Audaces et timidites de la Renaissance Pascal Brioist, maitre de conferences, Centre d'etudes superieures de la Renaissance, Uni versite de Tours
., tvoquolls quell/lie doc/cllr tie atte ecole. lIIor/ il y a celli (illS. Que/s serolll scs sellfimellf.\' ? Si, Oil
SOI/I'cnir fill 'il a Borde lie SO/I telllfJ�·. il compare Ie notre, je veux dire IIOII/XU 1/0,\' e.lperollces,
m(li.� lesflellrs ectases (Jejtl de "lIl1ioll lies lellre�' et de la ;}'ciellce ell France, ell Italie. ell AI/g/e ferre, IIC reslera-l-il pas stllrJtjllil et Jo/Illroye ? ..
Tel cst [' cnlhousiasmc avec Icqucl Pierre de la
qU'unc illusioll. II est neanmoins indeniablc
Ramee deerll, e n 1546. I'cpoquc de FrJ.n�ois
qu'un ecart a etc pcr'tu ct <jUC la consciencc
[
d'lIppanenir a un siccic unique a etC constitutivc
rains [cures, mais aussi par ses predeccsscurs
d'ullecuhurc singulicrc, panagee au moins par
italiens commc Leonardo Bruni ou Pic de In
cenaines elites.
Mirandolc.
Lc concept dc Ren:lissancc n'en demeure
On sait qll'au XVI' sicclc. Vasari. dans
pas moins problematiquc des lors qu'on en
ses Vie,l' des me; lIellr,\' IJeilllres. sClIlplClIrs
elargit I'usage au-dcla d'lIn simple Illouvelllent
el archirecles i/aliens, utilise Ie mot rillllscita
pour qua l ifier Ic renouvcau des arts, alors que
lilleraire ct artist i
Ie terme de "Renaissance"', utilise par Jaeob
Renaissance religicusc, une Renaissance dcs
Burckhardt et Jules Michelet au XIX' siccle,
sensibililcs? Autant de questions discUlees
possede une acccption bcaucoup plus large, Ce
par l'hisloriographie qui ne lrouvent pas de
pcndant.l'epoque corrcspond bien a un moment
reponses evidentes.
historique particulier, entre XV'ct XVI" siccies,
La tcmporalite drillS laquelle s'inscrit la
au cours duquel plusieurs generations d'artistes
Rcnaissance posc aussi un problbne. Elle
et de s:lvantseurcnt le sentimcnt quc des temps
pretc facilement a l'ironie des historiens car.
nouvcault etaient venus, marquant une rupture
scion les licult, Ie phenomcne apparait :lu XIII"
tres nctlc avcc la p6riodc mcdievale qualifiec
ou au XVI' sieclc et sc tennine soit au debut
dc "'gothiquc"' et de "'barbarc"'. II faudra rcvcnir
du XV,' siccle, soit en plcin creur du XVII"
sur ccllc idec dc rupture qui peut n'avoir etc
sicclc. Lcs dccalages cntre Italic CI Angleterrc
•
Of> 8049
L'EUROPE DE LA RENAlSSANCE
sont 11 c c titre excmplaircs. De plus, faire de la
n'empCche pas I' architccte du lieu d'Uliliser de
Renaissance, 11 la maniere de I'historicn balois
fa,
Jacob Burckhardt, Ie moment fondatcur de la
des arcades composites af/'anlica. Dc meme,
modemite est aujourd'hui remis en cause p:lT
les ceremonies civiques Ilorentines empruntent
tous ceul( qui JX)intcnt les archaYsmes des XV< ct
largement Ie vocabulaire chevaleresque de la
XVI" sieeles ; par tous ccux, aussi, qui recuscnt
cour de Bourgogne, avec ses tournois et ses
une t61eologic historiquc scion laqucllc passe
emblemes. Pareillement. les humanistes italiens
ct present forment une ch:line causate parfaite.
qui se lancent a I:t recherche des m:muscrits
Lc Moyen Age nOcs! peut-clre pas si radicalc
d'auteurs latins dans les annees 1430-14500nt
menl coupe des sieeles qui Ie suivcnL Ain!;;, par cxcmplc, I'entrcprisc qui consista a rairc
IXlur predecesseurs des humanistes fr:U1,
accepter une vision theologiquc plus 61evce
Jean de Montreuil.
de la nature humainc s'ancre dans la rencxion
En somme. plutot qU'une rupture veritable.
de Thomas d'Aquin sur les besoins spirituels
la Renaissance cst Ie result:tt d'une evolution
de )'homme. Dans Ie damainc de I'art. les
longue. une cpoque qui. oublieuse du legs de
fresqucs de Bcnozzo Gozzoli dans la chapelIe
ceux qui ront immcdialement preccdee. n'a
privce du palais des Mcdicis, a Florence, rcle
voulu retenir que les aspecls les plus sombres
vent du style gothique international. mals eela
du mel/iI/III ael'lIm.
•miter Ie passe ou s'en demarquer ? II cst classique de presenter PClrarque (1304-
tournant r:ldieal. En re:llite, Ie monde grec
1374) comme Ie perc spirituel de la Renais
n'elait pas totalement inconnu des [taliens,
sance. A la cour pontificale d'A vignon. en effet,
en r:tison notamment des nombrcuses ambas
Ie lettre cst I'un des premiers a militer pour la
sades envoyces par les cmpcreurs byz:lntins
restitution des textes en I:ltin classique : il rca
pour tenter de motiver une croisade contre
lisa lui-mcme un important travail sur Ie Pro Archia de Ciceron et redige:l plusieurs vies de
les Turcs. I-Iommes, savoirs linguistiques CI
Romains illustres. Mais ce qui fait de I'auteur
Orient et Occident des avant 1453 : cepcndant,
de La Vie solitaire el des Sonl/ets une figure
[a redccouverte de Platon, de [ivres inconnus
ouvrages philosophiqucs circulaicnt deja entre
fondatrice plausible. ce sont surtout ses prises
d'Aristote, des Icxtcs scicntifiques d'Euclide
de position contre I' aristotelisme elroit des 8CO
au d'Appolonius, sont bien des phenomenes
lasliques et I'enthousiasme qu'il communiqua
datables dc la seconde 1110itie du XV" �icclc.
a loute une generalion d'erudits el d'artistes
La philosophic en fut ebranlee. Ainsi. Ics ccrits
du XV' siccle.
J'Aristole sur ]a rhelorique, la ITlccanique ou la Ihcologie conduisirent a des retlexions inCdiles,
Anciens et modernes
par excmple, chez POIlll>on:lui, sur la nature de I'ame. Quant a la doctrine platonicienne CI
Lc premier cercle autour de PctTarque Tasselll
ncoplatonicienne, inspirtc de Plotin, elle faisail
blail entre aulres Ie pcintre Simone Martini,
de I'amour un moyen d'311cindrc Dieu. en obser
J'auleur Boccace au Ie Iribun republicain Cola
vant dans la nature Ics echos entre microcosme
di Rienzo. II engcndra a son tour dans les annecs
el macrocosmc.
1430 un cerele !lorentin. En son sein, I'inepui
La redccouvertc de certains de ccs lextes,
sable soif de livres anciens de Leonardo Bruni,
en contradiction avec la culture chretienne et
Coluccio Salutati et du Pogge, fut a I'origine de
classiquc, ctait par 3illeurs porteusc de ferments
la constitution d'un premier fonds de lillcmlure
rCvolutionnaires. II fallait opCrcr des syntheses
laline et de la mise en place de methodes phi
entre des courants radicalcmcnt hctcrogcnes,
lologiques de plus en plus assurees. A I'cpoqueou I'on commen,
Ainsi. Ie lJe fa .mbti/i/(J de Jeromc Cardan rechcrche-t-il une union impossiblc entre
les lextes antiques des erreurs de copic ou d'in
Aristote CI Plalon ct In philosophic de Pic de la
terpretation heritces de la periode mCdievale.
Mirandole croisc-t-ellc Ie plalollisme de Marsile
I'arrivce en Italic de Grecs fuyant l'Empire
Ficin et les idees de la cabale.
byzantin menace, ajout:l a la culture 13tine la
Clr un autre courant atTiv:l il (X!u pres simul
sagesse hellenique. Burckhardt presentc la
tanc1l1ent dans la peninsllle, cellli de la culture
chute de Constantinople (1453) comme un
hebra'ique transmise par les intellectllels juifs
•
OF' 8049 L-EIJROF'£ DE LA RENAISSANCE
comme a Venise celui d' Aide Manuee. des centres humanistes au sein desquels auteurs, philosophes. traducteurs et grammairiens, col laboraient ala restauration des belles-lettres. Dans ce domaine, un debat s'cngagea sur I 'imitation des Anciens: ne fallait-il pas essayer de les surpasser plutot que de les copier servi lement ? Certains, Paolo Cortesi ou Lorenzo Valla, tenaient pour la defense de regles cice roniennes classiques; d'autres, Ange Politien Oll Pietro Bembo. ctaient au contrairc partisans
d'un style plus inventif. Les fiertes nationales contribucrent a leur tour aces phcnomenes d'cmulation. Lc cardinal Bembo chercha par exemple a imposer un classicisme toscan dans la lignce de Dante et de Pctrarque landis que, plus tard, Joachim du Bellay defelldit celui de l a langue fran9aise, Conrad Celtis celui de I'al lemand, Antonio de Guevara celui de I'espagnol ct Philip Sidney celui de l'anglais, Les mcmes marques, entre Antiquitc et present. furent prises en architecture. Le role que joua la redccouverte de Vitruve et son commentaire, passe au crible des trouvailles archcologiques, cst indCniable. Dans certains cas. par exemple pour la construction de pa lais espagnols, les planches illuslrees de son
De Archilectura ont mcme servi de patron a des portails. II cst cvident que la granunaire vitruvienne des ordres et des Iypes d'cdifices ainsi que les rcgles d'utilitc, de solidite et de beaulc. ou les notions de correspondance entre la partie et Ie tout, de distribution, de module et .................... Laocoon et ses ootan/s, marbre du /Jo siecle avant J.e. ,edecouve,,!l Rome en 1506, h. 2.42 m, MUs6e du VatICan
chasses d'Espagnc. II nourrit la connaissancc que
de rythme. ont imposc leurs lois aux architectes.
ron avail des textes de ]'Ancicn Testament el
Filippo Brunelleschi, par exempJe, lorsqu'il
introduisit chez les chreticns l'art de la cabale.
dctermine l'aspcct de I'cglise San Lorenzo,
Une revolution des lett res et des arts
a Florence, respecte les injonctions du maitre romain : monumentalitc (jirmiras), plan basi lical a trois nefs dicte par I'usage de I"edifice (UlililGs), croisce des transepts carrce servant de module (l),lIIlIIelria), colonnes et pilaslrcs
Lc patronage des Princes encourage;! la cons titution de bibliolhcqucs (celie d' Urbina. celie
de style corinthien, cclairage diffus par de
du pape ou celie des Mcdicis aFlorence) CI
hautes fenetres ec1airant des surfaces blanches
d'acadcmics (celie de Carcggi. pres de Flo
e t grises (VeI/IIstas).
rence) qui conlribucrcl1I ala diffusion de ccs
Neanmoins, la grandeur de I'architecture de
savoirs. Les universilcs, les monasteres CI
l a Renaissance rcside aussi dans I'invention de
les cereles humanistcs italicns firenl cnsuite
solutions techniques originales rcpondant au
ecole. A Florence. par exemple, pass crc nl nOll seulcmenl Ie Fran911is Lctevrc d'EtapJes mais
goOt des cornmanditaircs, Le mcme Brunelles
encore rAnglais John Colct. rEspagnol Nuno
par line coupole la cathedrale Santa Maria del
chi. lorsqu'il se voit confier la tache d'achever
de Guzman ou Ie Hongrois Janus Pannonius, De
Fiore de Florence, edifice commence au XIII<
plus, les lettres, les artistes et les livres italiens
siccle, doit rcsoudre une difficullc technique
circulercnt partout en Europe et donnerent
sans reel preccdent : construire sans cchafau
bientot naissance aune veritable Rcpublique
dage un dome culrninant it quatre-vingt-dix
des Lettres, Apres 1470, rimprimerie alllplifia singu
metres. II ne lui est pas loisible de construirc une voute hernispherique en allcgeant les matcriaux
lierement Ie mouvelllent qui se donnait pour
pour contrebalanccr la poussce sur Ie cercle
tache de faire revivre I" Antiquilc, Les ateliers
de la base, comme I'avait fait I'architecte du
d'illlprimeurs eux-mellles formaient parfois.
Pantheon it I'epoquc de I'empcreur Hadrien, car
,.
DP f!OoI9 L Et.AOPE OE LA RENAISSANC1:
on lui demande de respecter Ie style gothique
(fresques de Pompci. portraits du Fayoum)
construit donc. sur I .. base octogonale, deux
n'av:lient pas encore etc redecouvertes, On
coques s'appuyant I'une sur I':lutre. dont la
savail cependant par Pline que des artistes
structure annulaire est tenue en place par un
de J'Amiquite. Apelle ou Zeuxis. avaient etc
squelene de pierre et par des briques dispo
des maitres de la pcinture illusionniste : aussi
sees en aJ'ctes de poisson. Lcs tensions de la
pla�ait-on tres haUl ]' an mimetique realiste, En
gigantesquc coupole sont, pour finir, resolues
outre. I'Antiquitc fUI doublement convoquce
par line pesante lanteme en llUlrbre qui eoiffe
dans les tableaux, a tmvers les themes my tho·
la c:lthcdrale. Non seulement, Brunelleschi
logiques ou historiques (pcnsons :lU vellilS el
fait preuve de crcativite dans sa conception
Mars de Bonicelli ou a la Bawille d"Alex(//ulre
architct:toniqllc. mais il innove cg:llemcnt en
d'Altdorfer) et les decors :lrchitecturaux ou
creant des machines qui lui pcmlenem d'elever
decora!ifs a I'antique, Lcs "grotesques" rctrou
son O!uvre :Ill-dessus de I'Amo : gmes sophisti
ves dans la Maison Doree de Neron. a Rome.
quees, trcuils a changemem de vitesscs, navircs
inspircrcnt ainsi durablement les createuTS. Un
a aubes pour transporter Ie marbre depuis Clr
des resultats essentiels de la refcrence au passe
rare en Toscane. etc.
fut I'cmancipation des thcmes exclusivement
Plus tard. a I'epoque du manierisrne, les
religieux de 1:1 periode medicv:lle. Les prece
architeetes font mcme de I'ec:lrt all mo(II�le
dents legitim:lient en effet des :ludaces comme
vitruvien une clause stylistique, Ainsi, en 1533,
Ie portrait de rhomme illustrc.la frcsque histo
dans Ie Palaao del Te a Mantoue, Giulio
rique, Ie nu mythologi(IUe ou hero·ique. Toute fois. la pcinture de la Renaissance, malgrc ses
Romano joue avec Ie dorique en incluant des •••••••••••••••••••• Leonard de VlI'ICi, Visage Mm/mn dll La Scapogliata (l'l!boulllt&8), dessIn, YefS 1490,24,7 J( 21 em. Galer,. nallOr'laie, Parme
les O!uvres que nOlls connaissons aujollrd'hui
qui conserve tout son prestige et S:I vitalite. II
frontons qui se deboitent ou des triglyphes qui
velleites humanistes, fut resolumcnt modeme
sc decTochent de la frise.
en cela qu'clle intcgrait des techni(IUeS que Ie
Dans Ie domaine de la pcinture. iJ ctait bien difficile d'imiter les Romains ou les Grct:s car
p:lSsC n·ava.! pas connues, telle la perspective geomctriquc ou la pcinturc a I"huile. Un phenomcnc an:llogue a lieu dans Ie champ de la sculpture Oil. si I"on marque S:l reverence aux ccuvres de marbre de I' Antiquitc. comllle Ie Laocoon redccouvert en 1506 et exposc au Vatic:Ul, on im:lgine aussi dcs solu tions nouvelles pour les statues de bronze gr.ice aux techniques de fonderie claborecs d:lns les arsenaux. pour les C:Ulons des Princes, ou dans les ateliers d'orfCvrerie, pour les bcsoins de 101 noblesse. Le COIllIOlliel'e (i dIem/ de Donatcllo sur la Piazza del Santo de Venise. Ie Persee et A",lromclle de Benvenuto Cellini oul:l Porte tIll
Paradis dll baptistcrc de Florence par Ghibcni, som a cc titre typiques des temps modemes.
L:I musique. quam i'l elle, ne laiss:lit a priori gUCre de prise aux humanistes puisqu'aucunc partition anterieure ml Moyen Age n'avait etc conservce. Comme en pcinture. cepcnd:lnt. on chercha dans les temoignages des auteurs lUltiqlles des preuves de la sUpCriorite du genic des Anciens. L'idce qu'iJ fallait reeoncilier I':ln musical et la poCsie des mots connut un cenain
succcs au XV' siecle. notamment avec Vinorino da Fcltre it ManlOuc ct Johannes TinclOris a la cour d'Aragon. La conviction croissanlc du pouvoir magique et de la fonction cthique de la mllsiquc telle qU'elle avait etc pensCe par les Anciens (Orphee. disait-on. aV:lit detoume les hommes de la guerrc au seul moyen de sa lyre). poussa les intellectuels et les autorites a constiltler des bibliothc(lues et des academics pour etudier les ecrits theoriques sur Ie sujeL En deeoula un bouleversement de la rcnexion
•
OP 8049 L'EUROI'E DE LA RENAJSSANCE
sur Ics intcrvallcs ct lcurs crfcts. slIr I'associa
ages. Ainsi. Copernic ne publia rien dc son
(ion entre prosodic el rythmes. L'Acadcmic de
viv:lllt par pcur du ridicule (De.� re\'OllIliolls des
poCsicct de musiquc de BaW, fandee en France
orbes celesle�' est public cn 1543, de rllanierc
en 1570 par Charles IX. incame celie evolution
posthume).
tardive, Jl faut toutcfois rclativiscr In nlptuTc
Cependant, en reeonstituant fidclemcnl
introduitc car les modes '"1'1 I'antique" soi-disalll
la pensee antique, les hommes de la Renais
rcdccouvcrts Jl'ctaicnt en TCalile que cellX du
sanec s'apcr�oivent qu'clle ne correspond pas
plain-cbant medieval. La vmie nouvcaute re
a robservatioll. Les astronomes, par exemple,
side dans Ics consequences que I'apparition de
decouvrent que des objets voues a la comlption
l'imprimcrie musicale. a Vcnise au XVI" siecle.
et a I'imperfection de mouvements non circulai
cut notamrncnt sur la diffusion des fXJlyphonics
res, classes par Aristote comme appanenant au
de cour ou sur les genres nouveaux, camme Ie
monde sublunaire (terrestrc), sont en realilc des
madrigal.
objets celestes. L' observation et In mesure leur apprennent encore qlle Ie systcme ptolemlfique
Sciences et techniques Cest dans cc domninc que ['on mcsurc Ie rnieux
n'a qu'une faible valeur predictive pour cons
tituer les tablcs de I'emplacement des planctcs dans Ie ciel. En botanique et en zoologic, les
la tension entre timiditc restauralricc ct audacc
descriptions des Histoires naturelles greeques
novatricc.
el romaines echouent a rendre comple des es·
La premiere chose que fircnt les hurnanistes
pCces du Nouveau Monde. Pareillement, dans
italiens. au contact dc la sagesse rnathcrnat ique
le domaine de I'anatomie, si au dcbut du XV,"
grccquc au d6but du XV< siccle, fut d'ctablirdes
siccle Leonard de Vinci, pourtant excellent
corpus dcfinitifs des chefs·d'reuvrc du passe.
observmeur, n'ose pas contredire Galien, la
Les El€mems d'Euciide furem ainsi rendus
generation de V6sale va legcremelll plus loin,
disponibles, et bientot imprimes, La recher
par exempJe en ce qlli conceme Ie systcme car·
che de� ecrits pcrdus et leur reconstruction
diaque. Mais ce son! [Iussi les nouveaux bcsoins
fictive d'aprcs les indices dont on disposait
qui poussent les savants modemes il depasser
devint mcme une obsession de mathemati
leurs maitres. Ainsi, la necessite de rendre
cien. S'ajouterent bient6t a cela les textes de
compte des triangles sphcriques pour la naviga·
Pappus. Appolonius. Archimcde, el autres
tion et la canographie met les mathematiciens
Heron d'AleX;lndrie, si bien que les sciences
:mglo-saxons sur la piste des logarithmes et les
firent un grand bond en avant dans Ie scns de
exigences de precision de la balistique poussent
la lllathCmatisatioll. d'autant que dans Ie mcme
les Iheoriciens comnle Harriot et Galilee, a la
temps,l'algcbre des Arabes etait introduite cn
suite de Tanaglia, a formuler une theorie anti
Occident.
aristotelicienne de In chute des corps.
Paradoxalerncnt, I'hcrmctisme et Ie pytha
Lc domaine des techniqucs cst, pour celte
gorisrnc. eux aussi herites de ]' Antiquite. loin
mcme raison, tres n[)vateur. Bien sGr, la base
d'ernpccher la rationalisation des pratiques.
conceptuelle demeure la physique d'Aristote
y cOlltribuerent : ta recherche des signes rna
et la thcorie des machines simples des philo
thematiques (ou tout au mains rnesurables) du
sopltes alexandrins ct ron se refCre beaucoup
divin sous-tend la theorie des correspondances
a Vitruve: cependant, les grandes percees
dcvcloppCc par J'alchi rn ic, commc laconviction
\'icnncnt surtout dc la resolution de
pythagoricienne de I'ecriture du monde en
concrcts. Les ingenieurs toscans du XV< siccle,
langage mathcmatique solis-tend les travaux de
Taccola, Brunelleschi, di Giorgio Manini ou de
Pacioli. de Vinci, Copcrnic ou Kepler.
Vinci. inventent des reponses locales pour leurs
problcmes
En mCctecine, la Renaissance fixe la doxa
challliers de construction ou d'amenagemcnts
hippocratico·galenique, pour fonder une theorie
hydrauliques ou bien encore pour les arnlees
des humeurs unique, base de tous les "ft!gi
des COlldollieri. La plupart des m6canismes
Illes de sante" publi6s alors. En astronomic,
utilises SOllt des ameliorations d'illvelltions
en cartographic, en botanique, en zoologic,
mcdievales, y compris les systemes hydrauli
mcme evolution: on pense qu'it falll avant
ques bielle-manivelle. Si agent de changement
lout rcstituer dans leur version non corrompue
radical il y a. c'est celui de rimprimerie qui
les reuvrcs de Ptotemee, Dioscoride et Pline.
va imposer une mise en ordre, une "reduction
Mcme Copcrnic ecrivant sur les orbcs celestes
en an", comme on dit alors, de savoirs jusque
n'a d'autrc but que de corriger les erreurs du
la cparpillcs et transmis oralemenL Livres de
maitre alexandrin, Mais a l'origine, les savants
machines et traites techniques en tout genre
de la Ren:lissance n'oscrent pas contredire les
ont des effets cumulatifs sur 1'6largissement
Anciens car leur conception du temps voulait
de la connaissancc que loua en son temps Ie
quc Ie savoir ait decline depuis les premiers
philosophe anglais Francis Bacon,
e.
Of' 800t 9 l'EUAOPE DE LA RENAISSANCE
Ainsi donc, mcme s'il n'y cut pas it pro
III-mcme la capacite it s'clever vcrs Dicu par la
prement parler de revolution scicntifiquc it la
vertu de I'Amour, La valorisation de I'homme
Renaiss1mce (car mcme la "rcvolution coper
CI dc l'individu par I'hur1lanisme rclevc done
nicienne" ne connut en verite qU'une faiblc
a la fois de la dimcnsion pedagogique CI de la
diffusion). la tension enlre timidite ct audace
dimension philosophique.
accoucha de mcthodes originales d'observation, de classification et de calcul dont on allribue en
La promotion de I'individu ?
gcneralla p
FIIlH-il 1LIlcr jusqu'it dire que rhumanismc
et des humanites fut done Ires generale mais,
a invcntc rindividualisme moderne '! C'esl
au-delit des divers champs disciplinaircs lies a la
ce qU'une leclure biaisee de Burckhardt a
connaissance. quelles furent les consequences
souvent conduil it induirc, L'hislorien suisse
de I'humanisme sur la societe?
n'a formulc en fail que rhypothesc suivallie : les conditions sociologiques et politiqucs de
L'impact de I'humanisme sur la societe Une revolution pedagogique
I'Iwlie du XY' sicdc auraient dcbouche sur la recherche de la celcbrile individucllc chez des individus de plus en plus nombreux it clre soucieux de conslruire leur image pour la pos terite et. ce faisant, auraient fragilise les cadres communautaircs de la famille. des corporations
A rorigine, Ie terme humaniste designe, d1ms
et des peuples, Les indices de celie evolulion.
rargot eSllldiantin, les professeurs de gram
pointcs par I'auteur de UI CiI'ilisarioll ell Ifolie
maire ct dc rhelOriquc, ceux qui enseignent
{lU
les "clUdcs humanistes", dont I'objcctif est de
multiplication des signalUres. des portrails ou
felllfJ,� ,Ie {" Re,wi.f.",,"ce (1860). elaicnt I:.
rendre rhomme plus humain (par opposition
des amoportrails. et I'affimlation des figures de
aux etudes de tMologie qui doivcnt avant
grands hommes, II n'esl guere queslion ici de la
lout Ie rapprochcr de Dieu), Humanisme el
conscience intime de soi : ce son! les historiens
pedagogic ont done partie lice, Dc fail, enlre
ullCrieurs. poslfrcudiens. qui ont fait deriver
Ics gencrations du premier XV· sil:cle el les
I'analysc cn faisant par exemple remarquer (IUC
suivantcs. les differences d'approche en matil:re d'enseignemenl furenl nOiables.
In derotio I/uxlenw avail encourage une relation
personnelle it Dieu ou encore cn realisant, lila
La pedagogie medievale, celie d'un Fra
m:miere de Philippe Aries el de Roger Chartier.
Giovanni Dominici it Florence vers 1400 par
rinventaire des signes de remergence de I:.
exemple. utilisait avant tout rapprcntissage
vic privcc : chambres individuellcs. !iflldioli,
par creur rcposant sur des procedes rythmi
jardins dos. chapclles privces. miniatures CI
'lues de repetition des le'(ons dc grammaire et
portraits que I'on s'cchange. Iitterature du mol.
de textes Cdifiants. ainsi quc sur In correction
corrcspondances Cditecs, ctc.
des errcurs et des comportemcnts par Ie biais
Nous sommcs aujourd'hui bcaucoup plus
d e puniliom. corpore lies, L·homme. et par
circonspects sur la promotion de rindividu it
consequenl I'eleve, elaient fondamentalement
la Renaissance, Les mcdievistes font en effcl
considcrescomme pecheurs, La nouvelle farron
remarquer 11 juste raison que la "morale de
d'enscigncr valorisait plutol la curiosile. la joie
rinlention". fondatricc d'un regard reflex if.
d'apprendre et l'emulation, Elic rempla'(ait les
eSI rcapparue. aprcs solint Augustin. dans la
manuels anciens par des ccrits dcfendant un
thcologie chreticnne all XIII" sieclc, De plus.
apprentissage gradue qui passuit par la Iccture
Ie.� groupes sont loin d'avoir disparu: corpo
expressive, la grammaire el la rhctoriquc. CI
rations el confreries sont au XV' siede plus
fonClionnail sur rimitation des :ltLleurs an
vivaces que jamais el les liens familiaux ont
ciens, La contrainte el la brulalite sc trouvaienl
rncme tendance it s·lIpprofondir. L'humanisme.
bannies car ron pnrillit sur la bonle CI rinlcl
avec Erasme. se fait dcfenseur du mariage CI
ligence fondalilenlaies dc rhOIllI1lC. ainsi que
la place grandissante de I'enfant cst celebrce
sur scs capacitcs d'amelior:1tion pcrsonnellcs
par la lilterature cl la pcinlure (pcnsons
pour dcveloppcr respril crilique et la civilite,
portraits de famille des Medicis
La redecouvertc des ecrits plaloniciens it flo
ou des More par Holbein). Entin. Ie couranl
:IlIX
par Bronzino
rence pcmlellait de fonder en raison cc credo,
anglo-saxon du New Historicism affirme que
L'homme. ecrivnit ainsi Pic de la Mirandolc
c'esl la construction de I' image du moi pour les
dans De fa disllitt de l'liolllllle (1486), occupc
aut res
une place p1lrliculierc dans la ch:Llne des ctres
dernontre 1Linsi quc. face aux crises rcligicuses.
parce que lui a etc octroyce, avec sa libcrte
it la dccouverte d'un AUlre menarrant dans
fondamenlale. la facullc d'auto-examen et par
III guerrc et les conqucles transoccaniques.
DP 11049 lEUROI'€ D€ LA RENAISSANCE
meme titre que Martin Luther (1483-1546). Toutefois, il faut se mefier des caus:llites sim ples. Certains hisloriens, comme Anthony Levi dans
RClloi:Honce and Reformatioll (2002).
fo nl remarquer que I'hostilite aux exactions pCcuniaires de I'Eglise, la vision d'unc naturc humaine ayant une lendance innee a la venu. CI mcme I'idee que la hierarchic de I'Eglise
n'etait pas une institution divine fondre par les Ecritures. s'ancraient largemcnl dans Ie Moyen Age. Les contestations hussites en Bohemc el lollardes en Angleterre n'claient a cel cgard que les epiphenomcnes d'un mouvcment de fond plus generaL D'autres hisloriens encore souligncnt Ie fait que les hum:lnistes n' ont pas lous souserit. loin
de la, a la RCforme, qu'Erasme Ie premier a rejete Lutherel que, dans Ie bcrceau dc I'huma nisme qu'etait I'ltalic, Ie mouvement lutherien a etc fermement rejete. La RCforme a-t-elle etc comme on I'a dit parfois la "Renaissance du Nord" ? En realile, les choses sonl un pcu
.................... Bible de LeteVfe d'E/sples ,mpr,",,*, 8 Anvers par Marrm Lempereuren 7530. Museedu
plus eomplcxcs. Tout d'abord. I"hum:lnisme avait bel et bicn pCnetre en Allemagnc par les universites ainsi quc par dcs ccreles, tel
pro/es/sn/,sme frSrK;80S
celui de Conrad Celtis. Mais ce qui lit son dynamismc parliculier. ce fut sa rcncontre avec un patriolisme hostilc au pape et a ses
ingcrcnees ainsi qu'avec Ie mecontentement social. L'anticlericalisme des populations se facc aux exigcl1ce!> de 1'Elal moderne et de la culture de cour. les conlemporains de Thomas
trouvait en effet rclaye par eelui de cenains princes territoriaux et d'aristocrates prets a
More et de William Shakespeare onl eu bcsoin
defendre "leurs" thcologiens sehismatiqucs. Dc
non seulement d'affirmer I'autonomic du moi,
tel1es conditions etaient tres spCcil1ques a ['aire
m:lis cncore d e manipuler les idenlites e n
germanique ct les idees de Luther critiquam
fonction d e leurs inlercls. L 'idee que Ie monde
la pratique des indulgcnces et proposant unc
cst un theatre CI que I'on prCscnte a I' autre des
nouvelle vision du salut par la foi. aidees par
f:l�:ldes qui ne s'identifient pa!> forcement au
Ie formidable instrument d'amplification que
moi intcrieur appartient pleinemcnt aux XV<
fut I'imprimerie, se propagcrent eomme une
et XVI< siccies.
Irainee de poudre.
Humanisme et Reforme
formes el les fractures confessionnclles se
Humanisme et Reforme entretiennent de fones
doctrinalcs, parfois jusqu'a I"affrontement les
En se diffusant. la RCforme prit diverses muhiplicrenl au furet a mesure des differences
parente!>. Lcs deux mouvemenlS dCfendent
armes a 1:1 main (eommeen France au tcmps des
notamment un mcme retour aux sources. Les
guerres de Religion). Les identites sc construisi·
reformateurs elaienl convaincus de I'cfficacite
rent cepcndam Ie plus souvent dans Ie cadre des
des methodes philologiques pour restituer un
Elals : sacramcnlaires suisses et strasbourgeois.
Ancien et un Nouveau Testamcnts purifies
anabaptistes de Munster, calvinistes gcncvois.
des corruptions des temps mcdievaux. lis
neerlandais. franifais. ecossais et anglais. an·
encourageaient leurs contemporains a utiliser
glic:lns, presbylericns. etc. C'est ce quc I'on
leur esprit critique contre une EgJisc jugee in
appclle Ie mouvement deoonfessionnalisation
digne des lextes saeres. Des ver ites regarJecs
ce lerme reeouvrc la f:won doni les :lUloritcS
jusque-Ia comme sacro-saintes dcvaicllt etre queslionnees. Par leurs travaux sur la Bible
:
ctatiqucs imposcrent aux populations qu'cllcs cOlltroJaient une identite confcssionnellc tout cn
et les Percs de l'Egli!>e. Dcsiderius Erasmus
proccdant a la domestication des gcstes consi
(1466-1536). John Colet (1467-1519), Jacques
Lefevre d' Etaples (1455-1536), furent de ce
des mccurs. Cene histoirc n'est plus ecpendant
point de vue des artisans de la RefoTme a u
alors tout a f..it eellc de la Renaissance.
•
Of' 9049 L"EUfIOf'E De LA RENAISSANCE
Reception et adaptation des formes culturelles nouvelles La question rcligicusc. en dcmontrant que d" un Iieu a I'autre 011 nc reagil pas de la mcmc farron aux memes stimlili. soutcvc un nouveau problc me. celui de la reception des formes cullUrcllcs nouvelles. Dc fait. it cst impossiblc dc soutcnir aujourd"hui que Ie mouvcmenl de la Renais sance s'idcmific tOlalcmcm 11 1:1 rcdccouvcrlc des textcs anciens en Iialie CI i'I !,imitation par Ie Teste de ]'Europc dc I'elegance Imine. mcmc si les arts onl lire la Ic�on de l'humanismc. Lc dcgrc d'acccptation du modele italicn par I'Europe du Nord CI de I'Est est cx!rt:mcmcnt variable d'tlTl pays a l"aUirc. Dans son oLLvragc illliwie RellOin(lIIce ellrfJpeellllC (2000). rhisloricn de Cambridge Peler Burke montre notamment quc Ie paradig me de la diffusion cuhurcllc de la Renaissance par ccrc1es concentriques i\ partir dc foycrs ini tiaux ne fonctionnc gltcre. A la notion obsolctc d'cmpnmt, il prefCrccclle de grcffect privilegic l"etudc des modcs d'appropriation. Chaquc nouvcilute est cn cffct sujcllC a des adaptations qui sont fonction de fihres spCcifiques aux differentes culturcs.
Des foyers multiples
.................... Salle de 001 du chAteau eta Fonta'nebleau : fresQves eta Nicota dall'Abl)ale d'apres etas dessifls
du PrimatlCe. entre 1551 et 1555
La notion de foyer de 101 Renaissance n'cst pas iei radicalement rejetee, i\ condition cependant de rncllrc Ie terrne au plurie1. Dalls lc cas de rhumanisme, nous avons vu que rorigine du mouvement pouvait facilemcnt etre assignee a la peninsule italienne. Mais si ron considere
d'autres clements tout aussi constitlltifs de 101 Renaissance, il faut chercher des points d'origine aillcllrs. Lc foyer de l"imprimerie par exemple. cst initialement allemand. mais en tres peu de tcmps, les presscs s'implantent partout (pres de trois cents ateliers en 1 500, aux quatre coins de l'Europe). Dans le domaine de la pein ture, on peut identifier en realile deux foyers, run namand, l"aUlre italien, ou s'elaborent les innovations techniques (perspective, peinture i\ l'huile, etc.) et thematiques. En ce qui conceme la musique, Ie centre Ie plus dynamique est la cour namingo-bourguignonne: c'est de lui que la plupart des innovations polyphoniques se diffusenl. Mais comment expliquer que certaines zones de l'Europe aient joue des rOles fonda teurs plutot que d'autres ? Repondre, comme on Ie fait habituellement, que "ce n'est pas un hasard si la Renaissance demarre dans les regions urbaines les plus peuplees et les plus riches d'Europe'·. rclcve au mieux du truisme. au pire de l"cxplication erronee. Des debats houleux opposent les historiens qui pellsent que la Renaissance est Ie resultat d'une consom mation accrue des produits de luxe (Richard Goldthwaite. Lisa Jardine) et ceux qui avancent que Ie marche de rart constitue une valeur refuge lars des periodes de crise ecollomique
(Robert S. Lopez). Certes, la scconde Ihoorie est quclque peu ballue ell breche aujourd'hui mais l' argument de Lopez scIon leqllel certaines vil les tres riches. comme Genes. n'on! pas donne naissance i\ UII courant anistique significatif ne peUl etre balaye d'un revers de la main. On se mefiera donc des analyses generales auxquelles I'on prefCrera les elUdes fines des contextes particuliers. dans loute leur complexite.
Reception: de I'assimilation au rejet Par ailleurs, les foyers n'om droit i\ ce titre que parce qu'il y a des recepteurs. II faut ici repren dre I'approche de Peter Burkc pour comprendrc que chaclin rcvisite les courants artistiqucs.
sciemifiqlles ou lilleraires i\ sa maniere. et parrois mcme les rejelle. Les heritages ne som cn fait acceptes que lorsqu'ils contiennent des clements susceptibles d'etre assimilcs par la culture locale. Le cas hongrois correspond i\ une assimi lation rapide dcs nouveaUlcs italiennes. phc nomene curieux puisque la Hongrie sc trouvc. i\ l"epoque. en periphcrie de rEurope, sur les marches menacces par rEmpire ottoman. Des Ie XV' sieclc, Ie lien S'OpeTC sous I'innuence de I'cveque Janoz Vitez ct de son neveu Janus Pan nonius qui font Ie voyage d·ltalie puis. de retour chcz eux, cnvoient leurs mcillctlrs ctudiants i\
•
Of' 8049 L'E UROPE DE LA RENAI SSANCE
Florence, Ferrare, Padoue et Rome. Le roi Ma thias 1<1 Corvin. fonne lui-mcme a rtlUmanisme
phenomenes de rejel. Dans cenains cas, l' hos tilite est motivee par un complexe d' inferiorite
et epollx d'lIne princcsse aragonaise de Naples,
vis-a,vis de I' Italic, hostilite caractcrisliquc par
a donne une impulsion supplementaire au mou
exemple de I'reuvre de [ ,humaniste Conrad
vement en invitant a Buda anistes, architectes et eerivains. Toutefois. mcmedans Ie cas d'une imponation massive dc laeulture etrangcrc vou
lue par Ie monarque. la greffe ne s'opere qu'a
Celtis, dCfenseur des leures allemandes. Dans d'autres cas, Ie rcjet cst davantage lie aux condi
tions sociales, materielles et culturelles locales. En architecture par exemple, point de palais a
condition de conservcr des elements anciens.
['antique dans les villes germaniques - it cst
Ainsi. Corvin ne fait pas seulcment reference
vrai que Ie marbre y est rare -, mais plutot des
i\ Hercule dans la rhetorique politiquc qU'il devcloppe : il fait allssi appel i\ Auila. Et lors des banquets, ses trouvcres accompagnaient a la
halles gothiques et des maisons a pans de bois. Toutefois, Ie propos cst a nuancercar les anistes
cithare des chansons amourcuses ou guerricres
ailleurs et pour peu que leurs clients Ie desirent.
nordiques n' ignoraient rien de ce qui se passait
en hongrois. Le style gothique des cathedrales
ils etaient capables de produire loggias, stucs ou
et des chateaux continuait par ail leurs i\ neurir
grotesques. Ainsi, la bibliotheque des Fugger a
en plein XYI" siccle hongrois.
En terre d'Empire, Ie scenario cst tout diffe rent dans la mesure Oll l' on constatc sunout des
Augsbourg fut·elle omee de fresques inspirees de la Maison Doree de �eron et de bustes ro mains par Frederik Sustris.
.. mise en p l ace d ' u ne civilisation europeenne Lcs historiens s' aeeordent aujourd'hui sur J' idee
Icchnologiqucs CI economiqucs aillsi que la
que les XY· et XYI' siccles ont vu emerger une
capacite de diffusion rapide de I ' information
civilisation specifique, delerminante pour Ie
par ['imprimerie. L'idee d'Europe elle-meme,
destin de ['Occident. Jean Dclumeau. a la fin des annees 1960, ecrivait meme qu' il s' agissait "d'une civilisation tellement sllpCricllre qu'elle
si ron en croit John Hale dans UI Civilismiol1
de I'Europe tI la Renaissance ( 1 998), aurait pris sa resonance moderne au cours du XYI'
s'est ensuite peu 11 peu imposee au monde en
siccle, c'cst-it-dire au moment ou Ie concept de
tier". Cet ellropCocentrisme telcologique, fonde
chretiente unifiee etait a I'agonie,
principalemellt sur Ie constat de la superiorite technologique et militaire des Europeens. n' est bien sur plus de mise aujourd·hui. D'une pan, les travaux des anthropologues interdisent d'ignorer la pluralite des cultures dans Ie
Reconstruction, echanges et consommation ostentatoire dans une Europe morceh�e
monde : d'autre part, les historiens anglo
Lcs debuts de la Renaissance, it panir du second
saxons ont demolllre que les fronticrcs entre
quan du XV' siccle grosso 1I10do. correspon
rOccident et les " civilisations" limitrophes
dent en fait it une pCriodc de reconstruction de
etaient poreuses : Mehmed I I commandait dcs
l'Europe. Les crises du XIV· et du tout premier XY' siecles avaient empone entre Ie tiers et la
tableaux a Gentile Bellini. les tcchniques de construction navales veniliennes etaient copiecs
moilie de la population europCenne. Lcs trois
a Istanbul. les mathematiques europeennes devaicnt bcaucoup i\ la scicnce arabe, etc. II nc
neaux redoutes, famines. guerres et pestes,
s'agit cependant pas de nier ici que se sont alors
glaciaire. En 1348, la peste noire s'abaUil lOUI
mises en place en Europe un cenain nombrc de valeurs panagees. Panni elles Ie christianisme bien sur. mais aussi Ie gout du passe, rallrait pour la technologic et les sciences, la notion de
s'etaient combines en un temps de petit age paniculicrement sur les villes, mnis c'est en realite tout un concge de pestes qui, dans les decennies suivantes. empCcherent Ie decol1age demographique.
progreso Ie capitalisme, la vision modeme de
Toutefois. i'I panir de 1450, Ie climat devint
I'Etat, I ' individualisme ou encore la defense
plus clement ct Ie repcuplemcnt put commen
de la libene intellectlie lie. Ces valeurs ont etc
cer. Les deccs avaient laisse des proprietes
promues hors d'Europe griice it un cenain nom
it exploitcr et la rarete de la main-d'O!uvre
bre d'atouts dont I' avance militaire, les pcrcecs
entralna une hausse des salaires. Grace aux
WI, progres agncoles, faibles mais reels, la nour
financcurs potenticls, de I;. conquetc coloniale
riture produite ctait de nouveau en adcqumion
par excmplc, on imagina de simples socictcs de
avec Ie nombre de bouches 11 nourrir, penncl1ant
capitaux dont on pou,,:.it ceder les parts : ccs
aux corps dc mieux resistcr aux maladies. Ces
societes par actions permirent cgalelTlcnt aux
conditions favorisCrent la mise en place d'un
Autrichiens de monter des projets d' extraction
cyele vertucux de croissanec et abOlnirent 11 Iii
minierc en Styrie au debut du XVIC siede ou aux
"copiositc du ]Xlpulairc" observee polr Claude
An£lais de lancer des missions d'cxploration
de Seysscl en France en 1 5 1 9 .
vcrs la Moscovie, Ie Labnldor ou la Virginic.
L'cssordcs vUles dcs Flandres, de la Hanse
Lcs grands negociants. dcsireux de conlrOler Ie
et d'ltalie, ainsi que de quelqucs capitalcs, s' ex
risque. multiplicrent egalemcnt les compagnies
plique, lui, par des phcnomenes migratoires.
d'assurancc maritimes invent6es par Ic." GCnois.
l..es pOles urbains attiraicnt en effet par leur
Parallelcment, les activites de change et de prct
richesse dans la mesurc ou les capitaux de la
gagncrent en sophistication. Comme au Moycn
rente fonciere, du crcdit ainsi que des profits
Age. I' Eglise condamnait I' usmc et I' action de
commerciaux ct artisanaux s'y accumulaienl.
change, par lellres interposecs. etllit devenuc au
Des produits desirables, les biens culturcls no
fiI du temps un mode de pret i'I. interet deguise.
tammen\. s'offraient aux yeux de tous. Florencc,
Sur celte base, des banqucs, celie des MCdicis
Lyon. Anvcrs, Augsbourg, Medina del Campo,
ou des Fugger pac exemple, se developperent
fun.::lll uuur..: Ie thealre d'une multiplication des
avec la complicitc des Princes 'lui avaicnt be soin de numeraire pour organiscr diplomatic
cchanges ct des progres de la production.
La naissance du capitalisme ?
el guerrcs. La culture negociante s'enrichit parallc lement de nouveaux savoirs. Dans les ecoles
Faut-il lire avee Lisa J:lrdine ( lVorldly COOl!!,',
d·abaques. com me celie 01 1 exer�ait Luca
1996) I' invention du eapilalisme dans ces cle
Pacioli i'I. Venise, les futurs grands marchands
ments ct lier la Renaissance a un iITi�prcssible
.�e voyaient enseigner la technique dcs lellres
besoin de consommer '! Ce n'cst pas ccrtain :
de change, mais aussi les mathematiques des
d'une part. I'Cconomie dc marchc nedomine pas
taux d' interct, la methode de la repartition des
encore I' cconomie dans son ensemble ; d'autre
profits en parts, la comptabilite en partie double.
part, on I'a vu pour Genes, la richessc ne fut
On soignait egalemcnt I'acces i'I. rinformation
pas toujours inveslie dans des biens cuhurc1s.
et les lellTes de nouvelles. ainsi que Ics cartes,
Toutefois, il cst indeniablc que la consomma
etaient de precieux instmments.
tion ostenlaloire d' clites en qucte de legitimitc
Lcs modes de production. dans I'environnc
(commef\:ants ct banquiers comme les Medicis
ment urbain, devinrent egalement plus elabores.
et les Fuggcr. cOl/dollieri comme les SforLa ou
Dans certains sectcurs, comme Ie textile, on vit
Ics Montefeltre) permit aux artistes et savants
se mettre en place de veritables filieres lIU sein
dc donner librc cours
dcsquellcs Ics diffcn:lll�" UIX:nLliollS tcdmiqucs
11 leur crcativitc.
moderne onl bel et bien ctc clabores 11 la fin du
etaient confiecs i'I. des acteurs specialises. L'lIrte tiel/a /al/a norentin ou rart de la soie venitien
Moycn Age cl au cours de la Renaissance, Lcs
acquircnt dans ce dom:.ine une grande expe
marchands, animes par un esprit d'invcstisse
rience. Par ailleurs. I' introduction de machines
ment bcaucoup plus assumc qu'auparavant.
dans un certain nombre d'activites, comme la
Dc plus. des instruments du capilalisme
sc sonl lout d'abord dotcs de nouvcaux oulils
minc ou la metallurgic, nc rut pas veritablemcnt
d'cchangc. Les "compagnics de commcrcc"
freince par lcs corporations.
ctaicnt certes connucs auparavan\. mais entre
II resulta de toutes ces cvolutions que aris
XV· et XVI' siecles on cn diversifia les fonnes
IOCrates, l1larchands. financiers. hommes de loi,
d'organisation. Les societes familialcs impor
notaires, etc .. disposant de veritables fortunes,
lantes comme eelle des Fugger se dotercnl de
purent celebrer leur richessc par I':lchat d' objels
succursales cl de filiales dans la plupar1 des
de luxe. La consornmation ostentatoire trans
grandes vi lies. Ensuile, pour reunir des fonds
forma alors profondement la culture materiellc.
rapidemenl afin de rcaliser une affaire, on in
Une foule d'objels devint marque de reussite :
venta la forme de la compagnie en commandite,
cCTamiques. tapisseries. orR:vrcrie, amlCS. mais
sorte de holding au scin de laque11e les associes
aussi livres richement enlumines, table••ux ct
ctaient respons:lbles de I'cchange, mais aussi
mcme instrumcnts scientifiques. Toutefois.
bCncficiaircs dc cc dcmier, 11 concurrence de
c'est principalemcnt I"architccture qui rut sol
leur invcslisscment. Pour accroitrc Ie nombrc de
licilee par ce nouveau desir d'ostentation.
la reponse des ingenieurs de la peninsule aux envahisseurs. BientOt. les forteresses bastion nees s'elevCrent partout en Europe el mcmc au-dcl�l. Se multiplicrelll egalemcnt les armcs
a feu ponatives. On put ainsi associer Ie choc des piquiers (proteges, pour les premiers rangs en tout cas, par des corselets de fer fabriques en masse) au feu des arquebusiers dans des amlees qui. desormais, pouvaient compter plusieurs dizaines de milliers d'hommes. Sur mer, face i\ la necessitc de s'imposer sur les oceans et de concurrencer les Ottomans et les B
tionna les navires de haUl bord
long rayon d'action en les rendant plus aptes i't la navi it
gation et en les dotant d'une anillerie embar quee. Cenains de ees bfiliments. les galeasses, donncrcnt la victoire aux chretiens contn! Ie Croissant a L.Cpante en 1 5 7 1 . A la fin du XVI' siecle, la concurrence entre les puissances ma ritimes espagnole et anglaise deboucha sur une course aux armelllents plus fipre encore, dOTH Ie royaume d'Elisabeth ,.. sorti! victorieux aprcs .................... &reau de change en Iialie. gr8V1Jre. xv,. siec/e. Sibliolhilque nallO'lale centrale. Florence
La genese des Nations
I'cchec de I' invasion planifiee par l'lnvincible Arm
Une revolution militaire
Apparition de I'Etat mod erne
eel clargissement du marche du luxe qui dyna
Faire la guerrc avec les mclllOdes modernes
misa la creation artislique avail lieu dans une
exigeait la disponibilite de somllles fabuleu
Europe eXlrememenl morcclee dont les Etats ctaient de taille et de nature tres differentes. Avec la fin de la guerre de Cent Ans et de la Reconquista, il ctait inevitable que la puissance
$eS. Les historiens s'aecordent � voir dans ee phcnomene une des plus evidentes origines de rEtat moderne centralise. La naissanee des nations europeennes est en erfet passce par
de I'empire habsbourgeois ct celie du royaume
la gestion de diffcrents impots permanents.
des Valois entrent en competition : les guerres
La necessite d'organiser une fiscalile effieace
d'italie se prolongcrent jusqu' en 1559. L' cmu
entraina i't son tour la croissance des adminis
lation militaire (mais aussi diplomatique) entre
trations. Les conseils medievaux s'ctoffCrent
Elats changea donc d'echelle nux XV" et XVI"
siccles, sans compter que les Imperiaux et les ltaliens avaient a combaure contre le� Turcs
d' institutions spCcialisees, de services centraux, de bure
pour maintenir I'intcgrite de leurs territoircs.
role itnportant aupres des Princes ; mais les
Les arts de la guerrc en furent evidemment
officiers de just icc et de finance formcrcnt peu
modifies el I'on a pu parler d'une veritable revolution militairc de la Renaissance. A l'origine, il ne s'agissait que d'amelio
� peu une c
rations de techniques ulilisees au cours de la
plus de diplollles pour produire de nouveaux
periode precedcnte : I'artillerie etait apparue
officicrs engendra dans les universilcs tine
sur les champs de bataille de la guerre de Cent
tendance a faire evoluer I"humanisme vers
Ans : les carres de piquiers mobiles avaient
une pure methode cducative, moins otlverte
prouve leur efficacite durant les guerres hussi
sur I'ide
tes. Toutefois, les progres des armes a feu furent
Etat modeme et culture entrelenaient done des
ensuite fulgurants. Les canons ne furent plus seulement forges mais aussi fondus ct gagne rent en efficacite. Face au pouvoir destructeur
relations dialectiques fortes. Pour bien gouvemer, encore fallail-il con vaincre les sujets et les citoyens du bien-fonde
de rartillerie, le� techniques de fortification se
des decisions publiques. lei, il fallut compIer
mirent au gollt du jour. La "trace italienne",
avec les transfomlations de la pensee politique
une mcthode alliant remparts de terre et struc
qui s'ct
ture geometrique des edifices dCfensifs, fut
et des principautes italiennes au XV" sicc1e.
't
Of> 8049 L'EUROPE DE LA RENAISSANCE
L 'humanisme civique de Leonardo Bruni,
Coluccio Salutati et du Pogge, trollvait dans les sources antiques dcs modeles d'ideal
civique et des theorics sur la chose pllblique
et sur I'histoire. Lcs "miroirs" des Princes
medievaux, qui recommandaient aux sOllve
rains de pratiquer un ccrtain nornbre de vertus
chl"etiennes (foi, espoir, charite, prudence.
temperance, justice, courage) et princieres
( libCr:Llite, magnificence. clemence. honneur. bonne foi et respect de ]a parole donnee). se
trouvaient enrich is de reflex ions sur la ra\on de
gouvemer les Etats. En 1 5 1 3, la publication du
romain. reste la propagande.
L't:tat,
une ceuvre
d'art
Scion Jacob Burckhardt. I e travail sur l' image
du Prince, opere avec I'aide des humanistes. participait d'une esthetisation du politique
relativement nouvelle. L'idee aristotelicienne
scion laquelle I' autorite dcmontrait son droit de
gouverner par des actions d'eclat et des gestes
magnanimes ne pouvait plus se satisfaire de la splendeur des banquets, des tournois et des
Prince de Machiave!. qui place la raison d' Etat
scelles de chasse medievaux : elle encourageait
preconise r usage de la violence et de ]a tcrrcur.
constmction de batiments publics. La mobi
avant les exigences de la morale chrctienne et
fit reffet d'une veritable bombc, bien que la
pr:1tique machiavelienne ait etc rort repandlle
auparavalll. La mcme annee, dans son
UlOpie.
desonnais Ie patronage des arts visuels et la
lisation des humanistes et des artistes permit la realisation de programmes architecturaux
et iconographiques au service des puissants.
Thomas More denon\ait au contraire les abus
Ainsi. Ics Mcdieis inscrivirent-ils leur marque
rengagement moral du Prince il bien servir la
d'abord. mais aussi par I' utilisation de sym
de la societe de son temps. en insistant sur COlllmunaute de ses sujcts. Plus tard. au moment
dans Florence, par la construction d'un palais
boles. dans la statuairc par exemple. la figure
des fragmentations religieuses. emergerent de
d'Herelile (la roree), celie de David (l' intcl
mauvais Prince (theses des monarchomaques
romains. Les Princes comprenaient egalemcnl
debarrasser dcs monarques heretiques) et celie
vus. Alissi llmltip[ierent-ils les ceremonies et
racon concurrente ridee de contestmion du
en France. par exernplc. qui suggcraieTlt de se
du renforccment de l'Etat monarchique race au
ligence et [a just icc) et celie des empereurs
([ue, pour asseoir leur pouvoir. ils devaient ctrc
les entrees solellnelles. L'argent depense pour
desordre des tcmps (auxquclles sc ratlachent par
les fetes par les Este it Ferrare ou par Ludovic
pal" Jean Bodin en [576). Au creur des ouvra
ne comprend pas la logique profonde de ces
excmple les Six Livres de la Repllbfiqllc publies
ges des philosophes. on discerne la tension
enlre ]a tcntation absolUliste des souverains, la
Ie More it Mi[an depasse I'entenderncnt si I"on
manifestations de prestige cphemercs.
Dans cc contexte, la cour. compagnie
necessite qll'avaient ces dcrnicrs de negocier
d'hommes bien nes au service d'ull superieur
ctats gencraux, p ..rlement. etc.) et Ie desif de
et au-delil le pays tout enticr.
mieux Cduques. Quoi qU'il en soit. l a methode
sur Ie sujet ne fait cependant plus I'unanimite
avec des institutions participmives (cortes,
•••••••••••••••••••• En/roo de Henri II a Rouen en 1550. enluminure de /e seconde moit,e du XV/" si8cle. BlblioltJeque municlpaie de Rouen
droit de plus en plus eerit et fonde sur Ie modele
liberte revendique par des sujets de Illieux en la plus communc pour gouverner une nation it
celie epoquc, avec r application des rcgles d'un
distingllc, pouvait servir a Cduquer la noblcsse.
a une ccrtaine "ci
vilisation des mreurs'·. La these de Norbert Elias
aujourd'hui : on pense dcsormais que I"entou
rage des Princes encourageait lllcme parfois Ics seigneurs baignant dans Ia gloire politique de
leur souverain a accroilrc leur pouvoir de fa\on
sCditiclise. Neanmoins. il est certain que l a eourdesormais permanente invcnta un langage
politique que tous durent apprendre
a parlcr.
Mctaphore de I"ordrc hierarchique donne par Dieu, elle mcltait Ie souverain a distance de ses
sujets el mcme de son entourage illllllCdiat pour
eonstmirc sa sacra[itc. En tcmoigne la gestion
des espaees prives et publics au scin du palais de Hampton Court : Henry VIII y distinguait
clairement les gentil shomllles admis dans la ehambrc privee de ceux qui n'avaient aeces
qu'it la salle d'audience. Le decorum social de [' espace sacre de la cour imposait cnfin aux
eourtisans des codes de conduite precis, ainsi
qU'une culture leur permeltant de discuter d' art
ou de lilteraturc ou de dccoder les emblemes ct
't
OP 8049
L'EUAOPE OE V. RENAISSANCE
I' iconographic mYlhologique, Cormnc I'cnsci gnail Baltha7..lr Castiglionc dans Le COllrlis(lII, I' adrcssc, I' clcgance, la civilite et la culturc sc dcvaicnt de rcmplxer la dcmonstration de la foree. Au-dela de 1:1 cour, I' idee qu' il fallait cdu qucr Ics individus a un certain savoir-vivrc sc diffu!>a dans les ll1:1nuels dc civilitc, dont Ie De c;il'ilirale 1II0flllll fJlferifilllll d'Erasme ( 1 526). qui cnoncc pour la premiere fois des regles de politesse destinces au" enfants. Lcs normcs de politesse. la pudcur. I'hygiene occidentalcs cn furcnl transformces. Lc corporcl, :lcceptc comllle naturcl jusqu'au debut du XVI" siecle - on pense a Rabclais -, fut peu a peu banni de la sociclc cormne relevant de J'animalitc. La Galaxie Gutenberg
La Republique des Lettres Curieusement. au moment mcme oll ies nations s·affirmaient. Oll les langues vcrnaculaires revendiqu:licnl leur originalitc. ou rncme des protonat ionalismes se mett:licnt en place. les hUlllanistes militaicnl pour un espace de librc circulation des idees. capable de rempl:lccr la Re.�pllblico chriS/iOllll a l'avcnir grcvc par l'cclatcmcnt confcssionnel. L'Eglise avail en cffct fourni jusquc-Ia un ideal d'universalitc et dc pai" ct mcme une langue commune. Ic latin. Les humanistcs ctant gcncralclllent dcs clcrcs pratiquant la peregrination acadcmiquc. il ctait tout naturel qu'ils pcrr;oivent leur com rnunautc COII1lI1C S'clcllualll p,u'-udil Ic� EI'lb. Lcs "chasscurs de manuscrits" se dcl1nissaient eomllle des amoureu" de Ja conn:lissanec el aimaicnt a mettrc en aV:lnt leur solid:lritc mni cale. La colTCspond:lnce entre Erasme, Thomas More et Guilhlullle Budc illustrc Ie tres fort scn timent d'appartenance eOllllllunautairc de ecs ecrcles au debut dll XVI< sicde, La consciencc d' appartcnir a une elite intcJlcctuclle p.1rtagc:lnt dcs valcurs et dcs rCne"es mcthodologiques :lC coucha rapidcment de J' idee d' unc Re,vmblica fileraria qui transcclldait Ics pctites patries. sans toutefois retncttrc en causc les fidclitcs au" suzerains princes dont on dCJx:ndait. L1 Rcpublique des Lcurcs ctcndit ses rescaux sur tOutc I' EUTOIX: dcs villcs, mais cut tendancc 3 se polariscr sur des lieux d'Cch:lngcs spCcifi ques 011 I' on pouvait sc rcncontrcr : academics. comme celie de Beroalde a Bologne. univcrsitcs prestigicuscs commc Alcala de Hcnarcs en Es pagne. bibliothcques. foires au" livrcs. ateliers d'imprimeurs comme celui d'Alde Manuce a Vcnise ou Ix:tits cereles littcraires tcltes Ics sOl/afiulles dc Conr:ld Ccltis.
Les domaincs d'activitc dc la communaute :lvaicn! tcnd:lnce a ctre proleifonnes el. si la philologie flit bicn la disciplinc fondmrice, les doctes s'mtelcrent ensuile a I'clUde de la philosophic, de la thcologie, de la litteralure CI des scicnces, Les ccoles philosophiques (neo plalOnicienne, sceptique, cabaliste. slo'iciennc, etc,) se multiplicrent. cncouragees par Ie goul de 101 dispute de ees hommes de lettres. Apres 1550, la situation se degrada, d'unc part parce que l' irenisme erasmien qui et:l!l encore a I'honneur dans les allnees 1520. Il'etait plus vr:liment possible au moment OU I' on etait !enu de choisir son camp religieux : d'autre pan paree que Ics Etms ten:lient a ce que "leurs" humanistes soient formes autan! que possible dans des univcrsitcs nationales pour repolldrc a "leurs" bcsoins spCcifi
La revolulion de I'imprime Toutefois, 1:1 cirelliat ion des hommes etait fina lement peu de chose au regard de la circulation des tcxtes que rendit possible l' imprimerie. Marshall McLuhan a appelc cn 1962 "Galaxic Gutenberg" I'unification du mondc produite par Ie p:lssagede la communication par I 'Cent a la communication p:lr I' imprime. L' invention par Gutenberg, orfevrc a Mayellcc. d'un systcmedc car:lctcrcs mobiles susceplibles d'eire rClIIilises pJusieurs fois n'cst pcut-etrc P:lS une revolution \OtaJe si ron considcrc que Ie manuscrit
-t
OP eo.t9 l'ElA'IOPE DE '"'" RENAISSANCE
I' iconographic mylhologique. Comme I'ensei
Les domaines d'aclivite de la communaulc
gnail Baltha7.ar Castiglione dans Le COltrlisan.
avaient tendance a ctre prolciformes el, si la
I"adresse, I'elegance, la civililc et la culture se
philologie fUI bien la discipline fondatrice,
devaient de remplacer la demonslration de la
les doctes s'attelerclII cnsuite a I'etude de la
force. Au-deUI de la cour. l'idC'C qu'il fall:lit Cdu
philosophic, de la theologie, dc la lillcrature ct
quer les individus a un certain savoir-vivre se
des sciences. Les ccoles philosophiqucs (nco
diffusa dans les manuels de civilite, dont Ie De
plalOnicicnne, sceptique, cabalistc, sto"iciennc.
cil'iliwte 1II0r/llll puerilium d'Erasme
elc.) se IllUlliplierent, encouragees par Ie goGt
( 1 526),
qui cnonce pour la premiere fois des regles de politesse destinces aux enfants. Les normes
de la dispute de ces hOllllllcs de lellres. Apres 1550. la situation se degrada. d'une
de politesse, la pudeur, rhygiene occidelllaies
pan parce que I ' irenisme cr:lSlllien qui ctait
en furent transformees. Le corporel, acceple
encore a I'honneurdans Ics annces 1520, n'ctait
comme naturcJ jusqu'au debut du XV," siccle
plus vraiment possible aU lllomcnt ou I' on elait
- on pense a Rabclais -, ful peu a pcu banni de
lenu de choisir son camp religicux : d' autre pan
la societe comme rcJevanl de 1"animalile.
parce (Iue les Etats tenaient a ce que " Ieurs'"
La Galaxie Gutenberg
dans des universites nationales pour repondrc a
La Republique des Lettres
dit lOut de mcmc sa vilalitc. Ellcest sans doute
hUlllanistes soiem formcs autant que possible "leurs" besoins spCcifiques. La Rcpllbliquc des Lcttres survCcut neanllloins a ces crises. ce qui a I'ongine de celie invention de I'Europe que Curieuscmenl. au moment meme otl les nations
John Hale auribue a la Renaissance.
s·affirmaient. Oll les langues vernaculaires revendiquaicnt leur originalile. ou mcmc des
La revolution de I'imprime
protonalionalismes se mellaiclII cn placc, les humanislcs mililaient l)Our un espace dc librc
Toutefois. la circulal ion des hommcs etail fina
circulation des idees. capable dc remplaccr
lement peu de chose all regard de la circulation
la RespllbliCll cllristiallll a J"avenir grcve par
des lextes que rend it possiblc I'imprimcrie.
I'eclatement eonfessionncl. L' Eglise avail en effet fourni jusque-Ia un ideal d'universalite
Marshall McLuhan a appele ell 1962 " Galaxie
Gutcnberg" runificalion du monde produite p..'lI"
et de paix et mcme une langue commune, Ie
Ie passagc de la commllllication par I'ecrit a la
latin.
cOllllllunication par I' imprilllc. L' invention par
Les humanistes etant gcneralemcnt des
Gutcnberg. orfevre a Mayence, d'un sysleme de
clercs pratiquant la peregrination academique,
c:lract�rcs mobiles susceptiblcs d'clre !"Cutilists
il etait tout naturd qu'ils pen;oivent Icur com
plusieurs fois n'eSI peut-clre pas une rcvolution
munaute comme s'etendalll p:lr-dela les Etats.
totalc si ron consid�rc que Ic Illanuscrit a con
Les "chasseurs de manuscrits'" se definissaicm comlllc des amourcux de la connaissance el
tinuc d'exisler et (Iue Ie livre Iypographiquc, l\ scs debuts, ne f:lisail qu' imiter son pr6decesscur
aimaient a mettre en avant leur solidarite :IIlli
recopie a la main. Cependant, il eSI indeniable
calc. La correspondance enlre Erasme. Thomas
que les transformalions imroduites par Ic nou
More el Guillaume Bude illustre Ie tres fon sen
veau medium ont eu des conscquences incom
timent d'appanenance communaUlaire de ces
IIIcnsurables. Pour commencer, desonnais, les
cercles au debut du XVI' sieele. La conscience
leXles som rcproduclibles 3 volonte, sans erreur,
d' appartenir a une elite illlcliectuelle panageant
et il dcvient facile de comparcr Ie... vcrsions d'un
des valeurs et des renexes IlIcthodologiqucs ac
ouvrage. Ensuile, Ie mcdium ctant 11Ii-lllcme
coucha rapidemcnt dc I' idee d' une Re�p/lIJIiCll
lIIess:lge. comme I'ecrit McLuhan. I' invention
literarill qui tr:lIIsccndait les petitcs patries,
du regime typographiquc a fa�onne Ic... cons
sans toutcfois remetlre cn cause les fidelites
ciences cn standardisant et en rationalisant la
aux sU1.erains princcs dOIll on dependai!. La
presentation des texles : polices dc caractcrcs.
Republique des Lcttrcs clendil ses rCseaux sur
pages de lilre. I:lbles, index, etc" sc nomlaliscnt.
lOUie r Europe des villes. mais eUI lendance 3
Dc plus. Ie savoir est rendu massivcmem dispo
sc polariscr sur des lieux d'cchanges spCcifi
nible el g:lgneen percnnite de par la ll1ultiplicitc
ques Otl I' on pouvait se rencontrer : academies.
des exemplaires. Celte abondance debouche
commecclledc Beroalde a Bologne. universites
sllr 1:1 nccessile d'invelller de nouve:lUx
prcstigieuses comlllc Alcala de Henares en Es
dcles cI:lssificatoires et cpistcl1lologiques pour
pagnc, bibliothcques, foires aux livres. ateliers
gercr l' information (tables, arborescenccs.
1110-
d'imprimeurs comllle celui d'Alde Malluce 3
rapport cntre texle et gmvures. ctc.). Enfin.
Venise ou pelils ccrcles liucraires tclles les
non seulelllent la leclure n'est plus lInc affaire
sOilafitllle�' dc Conrad Celtis.
dc specialisles. et les ecrils vol:lI1ls VOl1t mcmc
ws
OP 8049 L'EUROPE DE LA RENAlS$ANCE
.................... Pirro L'gGrlO. AlI�Ofie des Scten ces. dessm. XV/" sllkle. mus6e du Louvre
sc propager au plus profond des c:ullpagncs.
Cap de Bonne-Esperance en 1488) et des Indcs
mais encore ellc transformc, lorsqu'cl1c sc fait
(Vasco de Gama dcbarque i\ Goa en 1497),
silcndeuse, Ie rapport dc l homme a lui-mcme,
nUlis e[le fit plus que cela : elle ouvrit I'horizon
en incit:mt chacull au reiour sur sa propre pens&:.
atlantique en mettant en evidence ['existence de
'
Des loni. Ic controle des idees. nmlgre la censure
vents utilisables pour aller vcrs roues!. L'idce
et l'lnquisition. devicllt de plus en plus difficile ct les nouveautes, la Reforme de I'Eglise notam
folie de Christophe Colomb, motivce a la fois par des legendes et pilr des experiences rcelles
memo se propagellt a une vilesse inimaginablc
de navigation, scion ["'lucile la sphericite de la
jusque-Ia. L'expCriellce occidenlale. fa�onnce
terre devait pcmlettre de rejoindre les lndcs en
par l'imprimedes le debul du XVI<siede, s'ctend
al[ant vcrs Ie couchant, convainquit les invest is seurs el les Rois eatho[iques desireux d'amasser
cnsui{e hors d'Europc avec les conqucles.
de ror pour financer leurs guerres. En p[antant
L'Europe s'impose au monde
son drapeau SUT [ ' ile de Guahani aux Bahamas en 1492, Colomb pennettait [a reconnaissance
On faisait autrefois commencer I'histoire de la
progressive de nouvel[es ires puis d'un nouveau
Renaissance p:lr celie des "Gralldes Dccouver
continent. Cabral au Bresil. Verrazano sllr les
tes", Jaissanl ainsi sUPIX)ser que I'clargissemenl
cotes ilmericaines, Jacques Cartier au Canada
du monde consecutif aux explorations du XV<
en furent les autres artisans. Ne restait plus qu'a
siccle aV:lil jOllc un role fondateur sur les autres mouvements culturels, On pense aujourd hui
mellre [e monde en cartes. . A [ exploration succCde bientQt [a conqucte
qu'a l'origine au moins, la rcceplion des infor
dont [e succcs, face a d' anciennes civilisations
'
mations sur Ie NouvellU Monde fullres limitce.
tres structurces, semb[e un mystcre. Comment
Les explorations clles-memes apparaissenl mo
expliquer que [es faib[es troupes de Cortes au
tivces d'abord par la recherche d'une route vers
Mexique entre 1 5 1 9 et [ 5 2 1 . puis de Pizarre
l'Asie productrice d'cpices (longeant ['Afrique
dans ['empire Inca entre [524 et 1535, se soient
ct ne passant pas par les territoires lures). ainsi
rendues rnaitresscs de nations aussi puissantes ?
que par la conqucte d'i!es a sucre el de comp
Sans doute en raison d'une combinaison de
toirs. En oulre, dans I'entrcprise du roi portugais
facteurs : [a revolution maritime qui donna aux
Henri [e Navigateur ( 1 394- 1460), qui rassemb[a
EuropCcns la maitrise des ocC:lIlS (y cornpris
une nOlle de caravelles et de caraques dotce des
dans rocean Indien. Otl ils supp[antcrent res
mejlleurs atoUis technologiques, i[ y cui indc
interrnediaires arabcs). la revolution combince
niablement une dimension de croisade.
de [a poudre et des armes, Ie choc microbien
Finalemem, I'aventure ouvrit bicn [a voie
qui ancantit des popu lations depourvues d'an
de ["ocean Indien (Barto[ol11eu Dias double Ie
tieorps. res guerres intestines sur Ie continent
WE
OP 8049 L'EUROPE DE LA RENAISSANCE
alllericain. racccs rap ide des EuropCens a
connaissanccs en geographic , en bolanique,
rinfonnalion par rimprillle et Ie choc anthro
en zoologic et en exp(!rience sur la diversite
pologique qui laissa noire aux Amerindiens
de I· human ite. Lc retour de ces savoirs en Eu
que ron s ' approchait de la fin des temps. ce
rope, par exemple dans r Hisloire (fUll l"O)"age
qui donmlit un sens a leur dominalion p.1r les
fai, ell la lerre (J/I 8re:>";1 de Jean Lery ( 1 578),
envahissellrs.
tr.lIlsforma la vision du monde en bouleversant
L' exploitation des richesses alllericaines consecutive a la conqucle s'accompagna pour
la sagesse antique et en posant des problemes cI:lssificatoires et moraux.
les EuropCens d' unc acquisition massive de
Gontradictions et doutes de la Renaissance 1.;:, controverse
prirellt f;lit Ct cause pour lellr collcgue mcnace,
nite des I nd iens . i:l Juan Gines de Sepulveda.
en Espagne. 1' inqu isition praliquail la chasse
leg1lt du P:1pe, cst embicill ali que des contra
1lUX
diclions qui tmversCllt la Renaissance, Pour
les Turcs etaiellt plus stigmatises encore que
Sepulveda, les A ll1cri ndicns soni des esclaves
les juifs. Tunaglia justifiail ainsi l' usage de
de naissance, ignores par Dieu, el les exactions
ranil lerie par Ie fait qu'elle pouvait sen'ir a
Ie pape condalllna ce dernier. Para llclclllen\. cryptojuda isants appeles COIII'enO.f. Mais ·
des Espagnols sonl justifices par la providence
extcnniner un grand nombre d' infideles. Les su
el 1:1 neccssite de mellre Ic pays au pas. Mais
jets de l'Empire ottoman etaicnt peH;US comme
n'cst-il pas paradoxal que la p(!riode au cours
cmels et indi fferents a la souffmnee humaine,
de laquelie s'est dcvclopp(! I'humanisme se
mcme si ccrt;lins obsc rvateurs saulignaient Ics
soit achamee a n ier rhumanilc de populations
qllalitcs de leur civilisatioll. L:t rupture de la
enticres 1
RCforme crea au XVI' sieele
lIli
alltre fosse.
Au Moycn Age, Ie concept d'esclavagisme
celie fois cntre eatholiqucs et protestants : lors
n'avail pas Ctc mdicalemcnt ballni, Certes, il
des guerrcs de Religion, rhcrCtique fut ttaitc
et:1il choquant d'asservir un chretien, mais
:1vee une sallvageric sans nom.
Ull
in fidc lc, considerc comille depourvu d'ame,
L' intoler.tnce, enfin, au fur et i\ meSLIre que
pouvait aiscment devenir une marchandise.
ronhodoxie religieusc sc renfor�ait et que Ie
Les Portug:1is les premiers rcprirent ell Afrique
desir de cOlltrolcr des consciences legitimail
au XV, siccie la Imite des Noirs opCree par les
rexistence de I'I nquisition ct de la cens ure, sc
Illarchands arabcs depuis scpt siccles, afill de
dirigea conlrc la culture populairc. Des individus
fou rni r a leurs plant:ltions de canne a sucre line
accuses de sorcellerie peri rcnt sur Ie bllcher avec
main-d'u:uvre bon marche. Christophe Colomb
I'll�scntilllent de philosophes cOlllme Jean Bodin,
ne fit que cont inuer aux Ant illes el fut suivi par
La misogynic de la Renaissance, qui reposait
la plupan des colonisateurs qui transposCrem
sllr les theories de Illedeeins et de thcologiens
aux ind ige lles ce qu'oll imposait aux Afric:1ins. Les Aztcques et les Incas utilisaient deja 1<1
:1ffirlllant I'inferiorite de la nature fcmininc, IlC ftll d' ail leurs pas etr.tngcrc il l:1 eondamnalion de
lIIain-d'reuvrc foreee de Icurs prisonniers de
femilles plutot que d'holllllles.
guerre et 1:1 greffe sc fit apparemmem Sims probtcme majeur.
Ce visage noir de la Ren:1iss:mce, qu' il faudra it
L' imolemuce rcl igicuse constiluail un :llItre
rapprocher aussi de la pregnance des guerrcs
ressan fond1lmcnt:.ll de la negation de r Autre a
et de la violence en Eu rope aux XV' et XVI'
la Renaissance. Elle s-ouvrc en Espagne par la
sicc lcs. coYncide en panic avec les dOllies ex
Reconquista . une croisadc visant a chasser les
primes par certains pcnseurs ct anistcs : doules
juifs et les maurcs d' Espagne. L'amisemitisme
sur les identiles religiellscs et sur la possibililc
elait en fait large mcnt rCpandu. Ainsi. raffaire
d'cxprilller sa foL sur 1:1 Icgitimitc des pou
Reuchlin, a Cologne en 1519, voit s'affronter lin
voirs, la bonte dc J'homme, dOlLIes Illcme sur
cabaliste qui a ose s'opposcr a la destruction de
Ie pouvoir createur de l"holllille qu'exprime
li vTCs juifs au cours d'un autodafe, a des theolo
de fa�on poignante t 'Ange de /ll Mt/tlllcolic
giens dominic:1ins. Si cn 1520, les humanistes
d' Albrecht Durer.
PI,
Of' 8049
L'EUAOPE De LA RENAISSANCE
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r
Foyers Itallf'llS U FI""ence de. Medici. c.rtot••phlee, ve... 1480
Emergenc� et : reception I
Foyers du Nord u p,uell. du A.,.",. de "Agn••u my.,iqtHI, V;on E�c:k, 1432
, C
ReceptJOn aedtnce eI Il'sI$tances Humanism. hongrol• •t th61t... anglai. It.de.)
r
I.e temps
cJes fficliChands el des banqwers
l.'Annonc:latlon d. Ca.lo C.i".IIi, 1486 : c:616b.... Ie c:ommerc:.
Une Ville
Conditions materielles
rnoclele en fonne de palalS U,blno
L'''ag. nobl. du palai. ducal : du public: • I'intime
L.e pauonage pm1C1e1 R6primande, solllc.ltaUon, c:reatlon d'une ac:ademie royale Itexte.) '
La revolUlJOn du livre Imprlme Frontl.plc. d•• auv.... d. Clceron Imprlmee. a Pari. en 1521
r
ReoecOl.Nffie des AncIf'llS et flClU\r'e11e educalJOn � des tartes. � des ....... .-.veIIe pWagogie lterlas) Renaissance dans res campagnes
7
8ru.gh.I " Anci.n, Un Aopa. d. noc:o.. v.... 1568
Une revolution
LamrmalOO de I'lndMdu. real/Ie ou ficoon 7 He-nry M.c:hyn, Monlalgne 01 Collini Iloxt••)
de la pensee et des croyances ?
La perCeptJOn de I'Autre el Ia quesuon de I'lntolerance l.'Auloct.te pre.Ide par ../nl Dominique, Pedro 8envguel., 1495
a OI('U 7 F....qu. du O/el d•• Tro/. mort. . .nl... 1510 .t 1530, Somme
Un flClU\r'eau rapport
L
RefOffnes et frdCtuu�s u Ltgu•
r
•n
.,m•• coni... I•• prol••tanl., 1 590
[artISte. Ie marche. fa cour L'Annonc. ,.lIe . Z.ch.ri., Ghi.l.nd.io, 1485
Nouvelles techniques artlstlques. /1OlNeI1e VIsIOn du monde L. ".r'.ge d. '. Vi.rg., A.phail, 1504
Nouvelles VOI('$ de I'archnccture
Expressions cultureHes
L. T.mpieHo de; Br.manto, ".r. 1509, Aome
La muSlqUe une evolution atypiQue Partition. du liv... d. m•••• de; Frederic: I. Sage, 1518-1 520
[esprit soentlfique de let RenaIssance Expe..,_,tation at obaMvatlon: Plwac:ebe, VHaIe, Digges It.nes)
L
[arnetlOfauon des technIQues L•• ctebut. de; I• •!cUt"'.g!., t.bl••u d'Henri P.teni., 1525-1527
r
La Ibduoon m�ltdlle La Bal.i/,. d'AIeMandnt par Altdoofer : Ie. combab .u XV.. .rec:..
Une nouvelle conception I du pouvoir I ,
L
La rormauon de 1'�lat rnodefne Atfinnet- sa pul...nc. : " pare d'.rti".'" de Charte. Quinl, 1530
Au deta deS Ilmlles du monde connu Le .a"olr d•• Ancien. c:artographle par Ort.liu., 1590
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L•• doc:um.nl. prlnc:lp.ux de; c:. do••I.r .onl 6galemenl ...p.<)dull• •n Ir.n.p....nl : voir p. 64
ye rs ita liens
Vue cavalillio connl.l8 sous Ie nom de Carra della Catena (Carto de Ia chaiTl8). at!ribuee :" Frar>eesco Rosselli. 1.30" 0.58 '" Museo eli Firenzo com'era.
Florence
Projel8b1e en IrlIIn.parenl
P OUR I'hiSloricl1 ba
quatre·vingt·dix metres au·desslls de
auteur de UI CiI,ili.Wlt;Oll ell 'Ul/ie
en cvitant d'utiliscr des ochafaudagc....
C'CS! dans 1c foyer italien qu'apparail
nisme cst au service de la famille au
lois hcob Burckhardt.
(/If
temps lie fa Rellllis.wlllce ( 1 860).
I' Arno gr:ke i\ des machines inOIl"ies.
De manicre plus gcneralc. rurba·
Ie phcnolllcnc. Plusictl['S arguments
pollvoir : des itineraires marques par
Toul J ' abord. dans les vi lies
pas du pcuple. lors des processions.
rondelll celie hypothese.
italicnncs ou les batiments antiques
les :trmoirics des Medicis guident les
Dc la Santissima Annlln7j;na (edifice
irnposaicill leur enlelante presence
de 1441
lI'clail jamais vraiment 111011C. Tout
des ceremonies urbaines touche ainsi
scrvaiCli1 de base 3 des discussions
civique. edifics ou omes p;lr Ics plus
menl : lout comllle on lllili�ait en·
rhopital des Innocents (mar
dans Ie paysagc. la tradition classique
comllle Horace. Virgilc CI Ciccron slIr 13 poCsic
Oll
Ie bon gouvcrnc
core Ie droit latin. on reemployait les
vestiges de 13 Rome imperiale pour
conslruirc des cgliscs ou des {Xllais.
a 1455) jusqu'au Palazzo
Vecchio (siege dll Conseil). Ie tracc les points nevr:llgiques du pouvoir
grands anistes de la Renaissance :
vres). Ie palais ct rcglisc San Loren7.0
dessinec par BruncJleschi (espace du
invitaient des professeurs capables
ct rantique Badia (ancien centre de la
Thucydide. En 14)8-14)9. la COUT
(sicge du pouvoir exccutif). A rex·
Paleolo!lue, venue chercher l'aide de
Mais C'CSI bien autour de pclmr·
clan Medicis). la cathcdr:lle nouvelle
a Rome, que I' on a commence a faire
vie religieuse). ainsi que Ie Bargello
qllc el scs disciples. en Avignon puis reffon de comprcndrc les Romains
et leur " age lumineux" , Vers 14)0.
terieur de I;. ville. dans les collincs.
Ia gencr:ltion des Coluccio Salutati.
Come de M6dicis avait tr;tnsfomlC
nardo Bruni enlrcprit la rechcrche, I;.
neoplatonicienlle (sous 1:1 direction
Poggio I]l";lcciolini (Ie Poggc) et Leo· collecte et Ie commentairc systemati.
ques des lextes ecrits avant Ia chule
sa villa de Careggi en ;.c;.dCmie
de Marsilc Ficin). tandis que dans
la bibliothcque de San Marco des
d'enseigner la langue de Platon et
de I'e mpcreur byzantin Jean V I I I
l'Occident conlre les Tures. fit egale·
ment forte impression en organisant
des confcrences sur Ie platonisme et en appor\alll des livres illconnus de
ses h6[cs (Plotin ou Euclide). Venise connul. a cet egard. un
de Rome (Ciceron. Quintilien. elc.) ct
centaines de copistes tr'..tvaillaient
i\
destin original : veritable pone de
et philosophique pCl"Illit d'claborer
de manuscrits ell Europe. Lc courant
lecluels" grecs chasses de rEm·
fondemenl de la pcnsee republic••ine
Ie Illonde des artistes formcs dans
Turcs. Lc don de sa bibliothcque a la
A celie cpoque. Florence consti·
taires cclaires. donna llaissance au,\;
(1400-1472). justifie par la stabilite
oublics depuis. Ce materiel lineraire
I'humanismeciviquc qui conslitua Ie
norentine.
tuc Ie principal foyer de
sancc en Italic.
13 Renais· Grace a sa fonune et
a un Conscil 11. sa mcrei. la dynastic
des Medicis prend en main une
rassemblcr la plus belle collection
humaniste norentin, en rencontrant
les ateliers et cclui des cOllllllandi
<cuvres inspirees de BOllicelli ct de
scs pairs.
Lc patronage ctail cgalell1ent actif
dans d'autres villes d·ltalie : Rome,
ville enrichie par Ie commerce des
Naples. Milan, Mantoue, Ferrare.
tivit6 bancairc. Florence cst alors en
qucs ct artistiqucs non 1110ins impor·
En 1417. Brunelleschi elureprend
grcc connut un renouvellcment grlce
draps de laine et de soie el par J'ac· pleine transfonnation architecturale.
d'elever un dome d'une hauteur de
constilucrent des foyers philosophi.
tants que Florence. L'intcrct pour Ie
notammen\
a ces humanistes qui
rQrienl. elle accueillil les "intel·
pire byzantin par la progression des
ville par Ie cardinal Jean Bessarion
polilique de Vcnisc. dynamisa ainsi
les activit6s philosophiques de la
proche universit6 de Padoue.
La Scrcnissime ne coupa tou·
lefois pas les ponts avec Ie monde
ottoman puisque Ie sultan Mchrned
11. cclui qui prit Constantinople en
145), sc fit ponraiturcr par Ie pcintre
venitiell Gentile Bellini dans un cadre
a rantique.
(!)
06me de Ia calhl!drale Sanla Maria del FlOfa
®
SaIlllSSlma Annunziata
","_u.."..cardfnal d'or g ne byzantine legue sa i i
bibliotheque Ii Venise, 1468
Bientot, tandis queje reflechissais toujours a ces questions [Ia disparition des /ivres de rAntiquite, NOT], iI me sembla que j'aurais fait trop peu pour mon dessein sf ie ne travail/ais pas en meme temps
a trouver de man vivant" ces livres, que {avais
rassembles avec tant de z(Jle et de fatigue, une place lelle qu'apres ma mort, ils ne
® (!)
Palauo vecchio
®
Pala,s des Me
®
I!:gIise San Lorenzo
pourraient plus etre disperses et vendus, Je devais leur trouver un emplacement a la fois sur et favorable a leur utilisation tant par les Grecs quepar les Latins,
HOprtaI des IrnooonlS
Dans celte pensee, ie parcourus bien des villes d'/talie, tout au mains par I'esprit, mais c'esl seulemenl votre celebre et puissante ville qui me parut etre cel/e oil ces difterents points de vue pourraient etre salisfails, D'abord ie ne vis aucun autre endroi/ plus sur que celui·ci, oil /'equile regne, oil les lois sont puissantes, oil , / inlegrile el la sagesse gouvernent, oil /'autorile, quoique forte et redoutable, est aussi jusle et moderee, ou la vertu, la relenue, la justice ella foi ani elu domicile, A Venise, les esprits sonl libres, ils ne sont pas exposes aux mefaits de la passion et de la mechancete .. ici, des hommes sages (iennent les renes du pouvoir, les bons dominent les mauvais, on ne pense point a son avantage partfeulier, mais on se preoccupe d'une seule volonte et, avec la plus grande integrite, du bien general de /'Etat, C'estpourquoi on doit espererque notre ville, comme nous Ie desirons, etende de jour en jour sa puissance et sa renommee. De plus, ie songeais qu'on ne peut trouver aucun endroit plus commode et qui soit plus favorable " mes compatriotes, Car presque tous les peuples de la terre confluent dans votre ville. mais surtout les Grecs qui arrivent en bateau de leur pays, debarquent a Venise, et qui d'ailleurs forment avec vas ciloyens une communaute inseparable, a ce point que quand ils arrivenl ici illeur semble qu'ils penetrenl dans une seconde 8yzance, En conclusion : noire don pourrait-i/ etre plus dignementplace qu'aupres d'hommes envers qui je suis oblige par taus les bienfaits dont ils m'ont comb/e el dans une ville que j'ai choisie comme nouvelle patrie apres la chute de la Grece et qui m'a appele et rBfu avec les plus grands honneurs ? Longue vie et prosp8ri/8
a vos
excellences !
lettre du cardOnal Bessarion au doge et au S80a1 de Venrse, 1468, ci1eedans The PortabJe Renaissance
Reader, 6dile par James Bruce Toss 61 19n, lraduction Pascal Brioist,
Mary Marlin Me Laughlin,
New York el
Londres : Penguin Books,
yers d u Nord Une nouvelle maniere de peindre
O
N nc peut p l u s
aujourd'hui considcrer que I" Renaissance s'es! diffusee iI partir de runiquc !loyall ita lien. Trop
Lcs anistes fl:ullands ont done claborc leurs propres methodes de constmclion de I'cs)l:Jccen perspective. coneurrcmrnent a ce qui sc passait en
d'clcmcnts mililclll lXlur I' imlXlrtancc
Italic. Jan Van Eyck ( 1 386- 1 4 4 1 ) ou
plus qualifier de gOlhiclllCS les ccuvrcs du XV' sicclc flamand. mcmc sl I'on
de la peinture a rhuile et I'usage de la
des foyers nordiqucs ct on nc peul
cst loin du classicismc i(:!lien. Dans les beaux-arts parcxcmple. la CUUT de Bourgognc encouragea les innovations des techniques pictura les en cng"gc;ulI des pcintres et en demandant
Rogier Van del' Weyden ( 1 375,1444)
Hubert at Jan Van Eyck Preoolla do L 'Adorn/ion d9 fAgneau mystique.
j rs
poIyplyque en Yingl.quatra panneau� achev6 an 1432 (face inleme visibie tas ou Cathedrata $aint·Bavon, Gand
Projelabte en lransparenl
ont par aillcurs develop))c la technique scs ccrclcs amicaux. avec Ie sentiment
Tres rapidemenl les inventions des
d'aplKlrtenir a une eornmunautC. Lcs voyages du Hollandais Er.mne
maitres du Nord furent reprises en
(l 469-1536)el du p(Jete allemand Con·
Italic. par des artistes aussi talentueux
rad Celtis ( 1 459-1508) dcsignent tous
loile au lieu du bois (:ormTle suppon.
que Piero della Franccsc:!. Dc rncme. considcrer I'ewdc des le\lres anciennes comllle I'apanage
Hubert el Jan Van Eyck am ainsi
des humanistes ilaliens n'est plus de
pei111 L 'Adoration (Ie /'t\gllelill I/I)'�'
misc, car celle·ei avait dcbute dans
les eenlres d'importancc majeure en Europe : villesde coureomme Vienne, marehandcs conlllle Augsbouf'6 ou Nu· remberg. universitaircs comme Ingol· stadt ou B: ilc. Quant a Albn,'Cht Diirer
liqlle. c\�sl-i\-dirc. symboliqucmcnt.
les Flandres dc." Ia fin du XIV· siecle.
(147 1 - 1 528). il quille Nuremberg pour
du Christ saUVCUT de ['humanit6. pour
Lcs eomrnunautes de laYes et de reli
eludier la gravure a B: lle. reside au
fa chapcllc privCc J'un couple de mar
gieux fomlCS a l"tmiversile d'Ulreeht
Fondaeo dei Tedeschi pour (;onnaitre
cstirnaicnt en cfret que la pratique des
la manicre venitienne. puis a Bologne.
beth Borluul). L. usage de rhuile sur
textes {Xlrticip;.lit de la meditation el de
Rome, Aorcncc. ct enfin a Bmges pour
chands de Gand (Joos Vijd el Elisa bois perlllet, en diluant les pigments dans des couches semi,transparentes que ron superpose jusqu'a obtenir reffet desire, de rendre les maticres (or. bois, crista!' neurs, tissus, etc.)
I' approfondissemellt de la foi. Lc mou
dem/io mollemo el de nombreux per sonnages a I'innucnce decisive, dont Erasme et Luther. furent fomlCs dans
et d'obtenir une extraordinaire lumi nosite. La perspeclive gcornclri(IUe, basculce vel's Ie speclateur. donne au
la pmdence. l·cndUr.J.JlCC et la trJ. nquil
La perspeclive atlllosphcrique des montagnes lointaines el bleutces, 1:1 vcgelalion el la ville (Ille I'on disceme
a I' arricre-plan du panneiltl inscrivent ce paradis sur lerre. Dans ce decor. des groupes de personnages con vergent des quatre points cardinaux pour adorer I' Agne'llI. comme s ' i l s'agissail d e conjurer les angoisses schismat iques du lemps
: l f
I' arricre
mOllenl(l insistaicnt sur Ie moralisme. lite. la neeessite de i' inlrospeetion, de la connaissance de.� leXles sacres et de I' imitation dc JCsII�·Chrisl. I...e portrait par Hans Memling du
jeune homme cn pricre devant son livre mel en scene les pratiqucs des nouveaux croyants. Lc tableau eonsli lue lui·mCme un objet de pietc invitant ': Ia meditation daJt� t' espacc prive dll cabinet de travail ou de 101 chapelIe. Dans un monde tres individualiste.
plan. les saints et les rnanyrs ainsi ()ue
la mode des portraits peints sur bois
les femmes. au premier plan a gauche les prophetes et les pcuples de I' An
lX!nneuait de capturer une image de soi pour t'etelllilc. en faisanl appel au
cien Testament CI au mcme niveau, a
lalent d'artistes en qucte de realisme.
droite. les :lpOlres ainsi que I'Eglise representce par des papes. Lcs Van Eyck. en rendant visible la lroisicme dimension et en trailanl de fa�on
cludier la manicre namande.
vemenl. en s' ampliliant, prit Ie nOIll de
scs Ccolcs. Lcs valeurs de la dCI'Ofio
{Xlradis une sone de volume scenique.
do fete)
Huita sur bois. 3.50 x 4.50 m (ensemble)
Enfin. Ics foyers humanistes et artisliqucs du Nord invcnlcrent de s for mes de sociabilitc originales : rcnldil itincranl eonstlllit ie n5scau de la Repu·
originale Ie propos des theologiens.
bliqucdcs Lcttrcs p.lr scsdepla(;cments
font ici ccuvre rCvo lUlionnaire.
professionncls. sa eorrespondance et
a
a
Hans Memting. J6une homme en prieM, vers 1475,
huita sur bois. 0,39 x 0.25 m. N liooal G llery, LondrllS
I-...La A epUbliQUe des Lettres : les voyages d'Erasme. Conrad Celtis et Albrecht Durer en Europe ...
_r>"r"'�
Universitas
•
Centres d'humanisme
"""'" •
� Voyages d'Erasme
-)
Voyages d'Albrechl Durer
-)
Voyages de Conrad Celtis
••_-_.
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•
C La ooeument
.
I
'
/
.
tlon creatnce et resIstances
L
pour construirc un cxclllpflflll visant
1\
disponibles en Europe centrale avaient
vanier I'efficacite de I'cvcque Mikl6s
certes oriente 1:1 tradition artistique.
D�lhory (ancien cleve de Mart.io)
mais les gouts des commanditaires
!ous les cas, cel>cndant. la reception
1\ faire pCnCtrcr I'itali:mite en Hongrie. Le prelat invita en effet, 1\ I' instar de son
s':lccompagna d\lIle rCeCrilUre de la
roi. des arehilectes et des ma<;ons de
aussi les options des artistes.
ES foyers i!alienset
nordi(l ues ne diffuserent pas leurs idees de fa<;on egale e! au mcme rythme panollt en Europe. Dans
bourgeois, et plus tard. les tendanccs iconoclastes de la Rcfonne, limitaient
la pcninsule pour edifier la cathcdr:tle
La Renaissance tardive inventa
Corvin ( 1 440- 1490), bien que situCc
ainsi que la residence episcopale de
par ailleurs, dans des pays comme
Vac. Le patronage de Dathory a pour
I ' Angleterre, des fonnes cuhureHes
en pCripherie de l'Europe et :1lI cont:lct
mente, aux yeux de Mar/jo. de reposer
inedites et relativement cloignces
de l'Empire ottoman, offre I'exemple
sllr la lilterature classique et sur l'imi
de celles (Iue connaissait I'ltalie. Le
forme initiale d:lns Ie style local. La Hongrie du roi M:nhias I"
d'une receplion quasi immediate et
tationdes acadCmics norentirlCS. Ainsi.
theatre public elisabethain, rendu
extremement volontariste de 101 Re
la demeure de I"c"cque cst-clle louCc
celebre (X l r Ie genic de Shakespeare.
pour rcsscmbler par ses jardins. SO l bi
largell1ent ouvert sur la ville et plus
naiss:lnce it:llienne dims les annees
1460, Mathias Corvin, edtJ(lue dans
bliolhCque, son animation et jUS(IU' au
sculelllent sur la cour, incamc bien ces
101 tradition humaniste. gout:l panicu
paysage de collines qui I'cntoure. 1\ la
innovations. Le texte du dramaturge
licrement les l ivrcs et les eltldes. Son
villa des Medicis a Carcggi.
Thomas Dekker
( 1 572-1632) deerit
SOil 11101-
Dans d'autrcs P.1yS. la reception
avec ironic Ie comportement du galan!
riageen 1476avec Dcmriced' Aragon,
des (onnes culturclles italiennes ne
au thC: itrc : il monlre qu 'est en tmin de
fille du roi de Naples, et (Xlr celui de
fut que pm1ielle. quand cllc ne frOla
naitrc a I.. fin du XVI" sieele un espace
son fils illcgitime avec une princessc
pas Ie rcjet pur ct simple. En Castille.
public critique tout a fait original.
Sforla. Le I>
si I' humanisme fut particulicrement
Chaquc nation. en somrne. a
it:llophilie fut renfol"t:ec IXlr
un afflux d' architectes, d'artisans.
bien acclimate. par esemple par Ie
choisi dans la civilisation de l a
(I'artistes (Verrochio, Lippi. etc.)
cardinal Cisneros qui fonda rUni
Renaissance les aspects qui lui con
el d'Ccrivains ilaliens (l ui mirent en ccuvre un programme architeclllral.
de I 'architecturc vitruvienne (voir
resultat la creation de cultures locales
decora!if el culturcl hwnaniste. Le
versitc d'Alcala ( 1498), la grammaire page 48) ne s'imposa qu'1\ condition
gout de Mathias Corvin pour une
de composer avcc Ie slyle gOlhiquc
symboli(l ue dlL pouvoir empruntce aux Medicis Ulilisant la figure d' Her
espagnol precxislant. Cest ainsi que
cule (m:lis ne neglige:lnl pas non plus
fut inventc cn Espagne Ie style plale rcsque (de pfa/cria. orlCvrcrie) dom 1:1
!) allait de p:lir
fa9ade dc I'universitc de Salam,lIlque
avec un goOt jX)ur Ie style dccoratif
offrc un joli esemplc avec .<;CS pilastrcs
Ie modele d' AttHa
(lir(lwic(I utilise frequem
et scs cntablell1ents onlCs de motifs en
ment dans les edifices des vi lies de
reliefs (blasons. medaillons. \'cgctaux.
Dud:lpcst, Viscgrfid el Ezlergom. Mais
etc.). L'archit(.'Cture c...t ici avant tout
florcntin
si 1:1 bibliothcque de M:lthias. avec
un art de sculpteurs. et si on lui appli
S:1 collection d'ouvrages enlumines,
que Ie I:mgage architectuml italien. on
imit..it celie des Medicis, les j:lrdins
ne Ie comprend gucrc.
stlspendtls de Dud:l copiaient ceux du paf..is de Montefehrc a Urbino.
En terre d'Empire, cependant. la resisance t a I"italianisme ful bien plus
Pounant, intcgrcr les idees nou
aCcentuce. Des humanisles comme
velles n':lv:lit rien d'aise. C'est ce
Conrad Celtis revcndiquaient la su
qu' illustrc Ie n.::'Citde I'hullmnistc italien
pCrioritc allcmande sur hI 1:llinite. En
Gale:ltto M:lrl.io ( 1427- 1490) mppor
architecture. on garda gcncmlement
tant sa visite 1\ la cour hongroise. On y
des structures gothiques. Enfin. les
1>cn,"Oil l'incomprehensioll de 1':lristo
retables el autres sculptures en bois
cr:Hie locale devant la culture Jivrcs
de lilleul allemandes. d01l1 Tilman
(ille classique chere aux hum:mistes. Nc:mmoins, Ie texte:;c sert 1\ I'cvidence
tion, appartiennel1t 1\ un imaginaire tres
de l'anccdOle des counisans incuhcs
cloignc de ran italicn. Les matcnaux
Ricmenschneider p(ma I'an a la perfec
vcnaient Ie micus et ceci cut pour hybrides.
Une
iUustralion de I'art plateresque : Ie porla� de I'universite de Salamanque, 1520-1525
Alors que l'assemblee des nobles se reunissait, afin de remedier a I'ennui de I'occasion, Mikl6s apporta avec lui un livre : les Disputations tusculanes de Ciceron, si rna memoire ne me fait pas defaut. Beaucoup s'esclafferent a la vue peu banale de cet extraordinaire jeune homme lisant des livres en un tel endroit ; c'etait une nouveaute pour les Hongrois de voir un eveque se pencher En Hongrie: un parfait humaniste, I'eveque Miklos Bilthory Galeottus Maflius Namiansis. De egregie, sapienle, K1cose dietis ac f
1l1ii, Londras :The ()pen University Press, 2000, traduction Pascal Brioisl.
sur un livre, surtout dans une telle reunion ou les discours et les debats etaient a I'ordre du jour. Mais alors qu'ils riaient, Ie roi Mathias entra et, voyant Miklos tenant ses livres, il me dit : "Mikl6s etait, je crois, votre ancien etudiant et un condisciple bien-aime lors de vos cours. Et cela est juste. Car l'ap6tre [Pierre], quand il investit les premiers eveques, dit bien qu'il devait y avoir des ensei gnants parmi eux [ . . .j". Alors Mathias se tourna vers ces princes dont il avait entendu les rires et les semont;:a en ces termes : uNe riez pas de celui que vous ne pouvez comprendre en raison de votre ignorance�. [. . . ]
Je ne dis rien de la magnificence avec laquelle a ete construite la cathe
drale, des architectes et des mat;:ons ayant ete importes a grands Irais depuis l'Italie, de telle sorte que I'eglise e t l a residence episcopale seyaienl lout par ticulierement a la personnalite et a la generosite Ide I'eveque Mikl6s
]. Ayant
passe deux ans en Hongrie, je fis un voyage pour voir ce dernier. 1 1 me ret;:ut el s'occupa de moi avec une tel1e humanite que meme moi j'en vins a trouver celie singuliere hospitalite extraordinaire, De plus, il me poussa a ecrire une histoire des hauts faits du roi Mathias, afin que les nobles actions de ce grand roi, qui il1ustra son pays et Ie rendit puissant, ne sombrent pas dans I'oubli. La dign ite et I'elegance de sa Maison me plurent egalement beaucoup : car dans sa demeure, il y avait constamment des personnes en priere ou a I'etude, ou chantant en s'accompagnant a la lyre ou partageant d'honorables conversa tions. t.:endroit ignorait I'inactivite, la paresse et Ie temps perdu. Les frequentes promenades du chateau jusqu'aux jardins (que lui-meme avail dessines et decores d'etangs) et des jardins au chateau s'accompagnaient toujours de la frequentation d'hommes de qualite ou de la frequentation de bons livres, de tetle sorte que, quai qu'it arrive, ces trajets se faisaient toujours de maniere interessante. Partois, I'eveque se depla<;ait en carrosse, revisitant inlassable ment ce cercle de plaisantes collines ensoleillees en I'excellente compagnie de livres ou d'interlocuteurs eclaires, de telle sorte que I'on eDt cru que Mi nerve et les muses habitaient et frequentaient joyeusement ces splendides vallons bachiques.
Puisqu'on prend si librement son plaisir en ce lieu [Ie theatreJ, que Ie lils du fermier peut aussi bien y avoir un tabouret que Ie membre de I'Ecole de droit du Temple ; que Ie fumeur nauseabond a la meme liberte d'etre la, entoure de sa vapeur de tabac, que notre suave courlisan, et que notre charretier et notre En Angleterre : Ie theatre, un nouvel espace public
chaudronnier revendiquent une voix aussi puissante dans leurs suffrages et siegent en jugement sur la vie ou la mort de la piece tout comme Ie plus fier MomuS 'de la Tribu Critique, il est juste que celui a qui les notes des tailleurs font la plus large place ne soit pas, lorsqu'il arrive, coince comme une viole dans sa boite [ . . . ].
Thomas Dekker LB Jour de MIa des ,
COtdonniars, sulvide L'Ab6cedalre des �ts. 1609, traductioo J, Loi, seau. Pllri s : AubiBr, 1955.
'Oans la mythoIogie grecQ..e. Momus est Ie diau de III moquafie at de til critique de mauvaise Ioi.
En t'asseyant sur la scene, tu as par brevet signe Ie droit d'accaparer tout
I'article critique ; tu peux legalement poser au raitleur, tenir Ie gouvernail aux changements de decors, sans pourtant que personne ne tente jamais de te contester Ie titre de fat insolent et outrecuidant [ . . . J, Et maintenant, messire, si I'auteur est un individu qui a fait sur toi une epigramme, ou a courtise ta maitresse, ou a introduit sur la scene soit ta plume, soit ta barbe rouge, soit tes petites jambes, etc., tu I'humilieras plus qu'en Ie roulant dans une couver ture ou en lui administrant une bastonnade dans une taverne, si, au milieu de sa piece (que ce soit pastorale au comedie, moralite au tragedie), tu te leves de ton tabouret, avec une grimace de mecontentement, pour fen aller : peu importe que les scenes soient bonnes au non ; meilleures elles seront, plus tu les abomineras.
temps des m a rcha n ds et des ba n q u iers Une Annonciation pour ceh!brer Ie commerce
L
'ANNONCIATION
des echanges (lui se multipliel1l alors.
de c.,rlo Crivelli n"c\'o
La production d'objets cOl11mctl'<"
que que d' :Issez loin ccllcs de Fm An . gelico au des peimrcs des gencr ltions
cn cffet a etre plus imlXll1ante et plus
Carlo Crivelli. Annoncialion IIWIC sainI Emidius. "..
DlIlrllmpe III huile sur bois 1.46 m
2.07 x
i\ la 1I1ecanisation de a I'exploitation systemati
divcrsitiee grike
prcccdcllIcs. Lc theme rcligicux y cst
l'al1isanat.
pour ains! dire noyc par la richessc
que des mines et au renOtlvcllCll1cnt
Nalional Gallery. Londres ProJetable en transparent
des objets qui prolif crcllI sur 1:1 toile.
des techniques de travail du metal.
Cenes. on a bien au premier plan ["ar
Les centres urbains, dynam i.�s par la
change Gabriel c\ In Viergc. Ie Saint
richessc des campagnes liCe
a r ame
tell1atiomll. Leur richc.�se vint d· abord
Esprit sallS la fanne d'une colombe
lioration du dimat. sc mirent aussi a
de I'exploitation monopolistique des
(>once par un rayon de lumicrc. mais Ie
consommer plus d'objets OSlentaloires
mines de cuivre et d'argent dll Tyrol
decor est loin d'cvO
(p.lnni lesqucls les livres el les ccuvres
ct de Boheme (Ies melaux precieux
d' al1). Entin, dcpuis Ie Xl Y< sicde, de
d'Amerique ne commenccrcnt vrai
lei. tout est luxe : les vClcrnellls
nouveaux outils cOll1ll1creiaux facili
ment
de saint Emidius (patron de rcglisc
terent Ie commerce tandis que resprit
[520), puis
c\ de In ville d'Ascoli Piceno. dans
d' inveslisscment elait de plus cn plus
gr.mds de ce monJe, y compris 1\ Char
les Marches. qui venai! de rcccvoir
valorise. L'activite de changc dOllna
les Quint qui lellr devait son election
du Pape ses libertcs c\ avail COIll
naissancc, par Ie biais dcs lcltres dc
au titre d"Empcreur.
mande 1c tableau pour roccasion).
change, au credit et iI la banque et
rarchitecture avec ses pilastrcs aux
rnerne aux assurances. Les forll1C�
chapitcaux cori1l1hicns. scs friscs. scs
d'associalion capital isles devinrcnt
� caissons et ses loggias, les panneaux de bois prccieux a
de plus en plus subliles et
plafonds
a cote des
"compagnies" naquirent les socielcs
I' imerieur de la charnbre, jusqu' aux
en COll1mandite et mel1le lex premieres
accessoires divers eomme Ie wpis
societes par actions.
persan, les ]>oIS en majol i(ltle all Ie paon. TOllS les objets semblent avoir
Ciele des Fugger. fOIl(I('C a Augsbourg
iI afnucr cn Euro[)C qu'aprcs iI l·aClivite de pret aux
�S banquiers en pleine aclivile ......;De r
:
Matlhaus Schwartz el Jakob Fugger
A cclIe de celie des MCdicis. la so
etc ]>cints d'apres nalllre dans des
ell A[lcmagne. fut runc des plus
echoppcs de marchands. lis disenl
opulcntes des grandes compagnies
combien I'ltalie de la fin du X Yc
et dcs banqucs inlcrnationale� de la
sicc1e cst au centre d'un marche doni
Renaissancc. Dans son recit auto
les limites dcpassent les fronticres
biographique intilule Le Livre des
de I' Europe : les draps vienncnt de
COS/limes, Mauhaus Schwartz pennet
Londres, les tapisseries d'Arras, les
d'en saisir l·aClivitc qllolidiclll1C.
verres de Yenise, Ie fer forge et les
Age de dix-neuf ans CII celie
majoli(ltleS d·Espagne. la ]>oreelaine de Chine et Ics tapis de l' Empire ot
annee 1 5 1 6, I'auteur. bancluicr lui meme, cst represcntc assis a sa table
toman. L'cloge dll mercanlilisme et
de travaiL en train de remplir Ie livre
de la consommation, dans ce tableau
de cornptabilite en partie double oil
qui IXlllrrait servir d'enseigne publi
doivent eIre recopiecs les entrees
citaire aux marchands florentins, frise
("on nous doil·') el les sorties d' argent
mcme I· irreverence qlland I'eclmnge
(""nous devolls"). Devallt lui. habille
emre Dietl et les hommes se trOuve
de noir, Jakob r=ugger. dit Ie Riche. de
mis en parallele avec Ie marchand
signe I' al1noire a dossiers sur laqucllc
a I "arriere-plan line leure
figucnt r les noms des succursales de
de change par pigcon voyageur.
sa banque : Rome. Yenisc. Offen
L'ccuvre de Crivelli l)Cut donc etre interpretee COllHlle line celebralion
bourg, Cracovie. Milan, Innsbruck.
recevant
Fugger avaicnt constnrit un empire in·
Nurc.rnlxrg. Anvers et Lisb()nne. Les
Manhaus Schwartz. �but du
La Livra des OOSlUmas. manuscrit allemand 211
XVI' siede. BNF.
e vi lle- modele e n form e de
a l a is
U rb i n o L'etage noble du palais due, d'Urbino : du public ill I'intim
D
ANS son celebre
CXlcrieur clail Icnu it I'ccan p:lr les
Livre till Courtisall
hauls Illurs cnlour:ml Ie lieu : seuls
( 1 528). Balthaz:lT Castiglione deeril
quelques indi"iduschoisis avaient Ie
Plan ax�t'iQue du pa'ais ducal d·Urbino
recOl1Slruil enlre 1450 el 1482 Projelabte en Iransparent
Ie palais d'Urbil1o comllle " une ville
droit dc franchir les ponails imprcs
en forme de ]J:llais" : c'est (I U'Cn cc lieu. Ie Prince avail ell ['occasion de
des ri[ucls policcs el des hicrarchies
rcmodclcr I"urbanismc i\ sa volonte.
cOTltraignantes. Une I"o is passce
Frederic de Montcrcltrc ( 1420-1 482)
la cour d·apparal it colonnades en
dec d'une cavalcade de chev;lliersen
avait fait [Orlune en louanl scs scrvi�
parfait style corinthicn du rez-de
armures empruntam la Tampc cachee
ccs de cO/If/olliere (chefde gucrrc i't la
chaussee, qui donnail sur la grande
par une lOur en contrebas des deux
lele d'unc annec privec) ct. bien que
bibliothcque de m:lllUscrits amasses
lourelles de la fa,
sionnal1ls conduisant au Prince, scion
d' ascendance doutcusc. etail devcnu
par Frederic, I' aUlOrite charismalique
Le Livre till COlIl"liSllIl de Cas
due en 1l1cUanl son epee au service du
du couple ducal sc trouvail afl"irmce
liglione b'oque la vic it la cour de
pape. Sa richesse lui permit de cons
par une gradalion des espaces inle
Guidubaldo. fils de Fredcric. II celc
tnlire sa residence i\ flane de colline
rieurs allant du public (salle de lole
bre la pl:tce qu'a pu lenir Urbino dans
c\ de transformer Urbino. bourgadc
conlenanl les colleclions d·art, salle
I" invention du modcle de cour qui
de la region agricolc des Marches
du Ir6nc) au privc (:tppartements de
de"ail dominer bient6t en Europe :
pounal1l lrCS p:lUvrc. en Ulle sortc de
la duehesse, ehambre du duc, SIII
un modele ou les activitcs chevaleres
ville ideale. mClropolc des arts CI des
diolo). en passant par Ie semi-pri,,!!
'lues tradiliollllelles se rnclaielll ;lUX
sciences. En cncouragC;lnl artistes cl
(salle d'audiencc, salles de spectacle,
distract ions humanistes plus pol icccs
architectcs. en adoptallt une posture
salle des veillces). L'espace Ie plus
pour consti[uer une civilisation des
hUIll:lllistc, Frederic rellfor!yait lion
intillle, Ie .vllldiolo, lieu dedie a la
m(Curs.
seulemellt I 'orgueil eivique et la
relraite el it 1a mcdit:ttion. ct:Lil orne
confiancc dc scs sujets, mais encore
des l1larqueterics de Baccio PontellL
I"estime des Princes qui etaient ses
surmOTltces de \'ingl-huil portraits
ernployeurs et lI'avaien[ que [mp
d'homl1les ill uslres (Plalon, Aris
tendallcc it Ie percevoir COlllme un
tole, Archil1lcde, elc.) dus i\ Juste de
mili tilire cupide, La presence it Ur
Gand el Pedro Berruguete. II abritail
bino de pcinlres COlll mc Picro della
I " arrnure du due, des instruments
FralicesCa, d'hurmmis[es eOlllllle le
scientifiqlles el les livres CJu'iI etail
bibl iothecaire Vespasiano da Bis
en Irain de lire.
licci, de Savants comllle Franccsco di
On pouvail circuler par Ie jardin
Giorgio Mar[ini ou Luca Pacioli ou
suspcndu. en bCncficiant de la vlle
encore d' architec[es COlllllle Luciano
sur la campagne alenlour, entre les
Laurlma, aoeste du fail que Ic due ne
apparternellls du due, ceux de la
reculait devallt aucune depcnse pour
duchesse, el les salles rescrvees aux
parvenir it scs fillS.
courtisans, logcs pour certains sur
Lc palais eons[itue it Urbino le
place. Les servileurs qui vivaiell1
c(Curd'une ville organisee au[ourd'un
au sous-soL juste au-dessus d·une
axe IXlintant vcrs Rome. gage dc la Ii
ccurie et d·un sysleme hydrauliCJue
delitcdu duc itcclui qui J'a"ail nomme
exemplaire, nc dcr.mgeaient jamais
capi[aille de I·anm�e pontilicale. Mo
ce bel ordonnancement
dele d·elegance, I" edifice e[ait it 101 fois
liers spcciaux etaiell1 prc"us pour
dCfensif e[ decoratif avcc ses gr.lIldes
[cur usage.
fenclres e l scs loggias. Le plan axollolllctrique permel
des esc:!
Lors des cclebmtions publi
de saisir la stmcturc de J'clagc noble
ou feles. la cour pouvait sOrlir du
du palais. Tout d'abord, Ie TIlonde
palais par la place du marche, precc-
La a9ade des toges, palais ducal d'Urbino
espace publiC espace semi·prive espace prlve
Salle de lole : collections aux invites
Salles de
,-,,<:�'mb,e du duc Studiolo
c£!�"e ..,. loge.
l e s premices du modele de cour en Europe
I---'� Le duc Frederic de Montefeltre, entre autres actions dignes de louanges, edifia surI'apre
et difficile site dVrbino, un palais, selon I'opinion de beaucoup Ieplus beau que ron trouve
dans loute I'/talie ; et ille fournit si bien de toutes chases utiles que ce ne semblait pas etre un palais mais une ville en forme de palais .. it l'emplit non seulement de ce dont on se sert ordinairement pour decorer les pieces, vases d'argent, riches draps d'or, de soie et d'autres chases semblables, mais a titre d'ornement, ityajouta une infinite de statues anciennes de marbre et de bronze, de peintures tres singulieres, d'inslrumenls de musique de toule sorte ; et it n'y VDulut aucune chose qui ne !ul tres rare et excellenle. II fil ensuite une grande depense pour rassembler nombre de tres excellents et rares livres grecs, latins et hebreux, qu'il fit orner d'or et d'argent. estimanl que c'etait la la supreme excellence de son grand palais f. . .]. {Apres lui, son fils GuidubaldoJ tenait par-dessus tout a ce que sa maison fut remplie de tres nobles et valeureux gentilshommes. avec lesquels it vivait familierement, en se rejouissant de leur conversation {...J. Dans les joules. les loumois, les concours eques tres, Ie maniement de loutes les sortes d'armes, et egalement dans les tetes, les jeux, la musique, bref, dans tous les exercices convenables a de nobles chevaliers, chacun s'efforyait-il de montrer qu'iI etait digne de se trouver en une 51 noble compagnie. Ainsi donc. toutes les heures dujour etaienlpartagees en d'honorables el plaisanlS exerci ces, tant du corps que de I'esprit; {. . .} apres souper. chacun. a fordinaire, se rendail alors
la oil etail madame la duchesse Elisabeth Gonzague {epouse de Guidubaldoj. {. . .}
La donc on entendait de doux propos el d'honneles trails d'esprit, el sur Ie visage de chacun on vcyail peinte une joyeuse gaile, si bien que ron pouvail certainemenl dire que celIe maison etail propremenl la demeure de I'allegresse. VOfsio<> par Alain Pons. Pa,;s : Garnier Flammarion. 1991.
Balthazar Castiglione. Le Livre du Courlisan. lraduil de \"ilalien d·ap.es la
de Gabriel Chappuis (1580)
patronage p rincier
L
de considercr avec bienveillancc sa
cOllnisans dans un premier temps,
vidu (un superieur) iI un autrc (un in
nes et cabalistcs en AI1cmagnc. pour
Le roi croyait fennement au pOllvoir
d'allegeancc el de soulien. derivait
en raison de I':mtiselllitisnle ambianl.
feodales.
delle
E systeme de pa
tronagc {l ui liail un indi
rerieur) dans une relation reeipro
du monde medieval el des relalions Dans Ie monde de la Renaissance,
publication des theses PYlhagoricien
laquclle il cst allilquc de tOllles parts
rnagiqllc de la musiquc mesuree.
L1 1ineraturc ct Ie Ihciltrc onl ]a mcmc
demics.
iI regard des cours d'Europe
car avant que Ie stmul d'auteur ne
Ie raplXlrt patron-dient etait inscrit
s'autonomise avec le developpement
L'artiste ctail en droit d'attendre de
au service des princes.
au cccur de la production cullurelle.
sur 1:1 societe tout entiere cnsuite,
du marche du livre, les plumes ct:lien\
En creant bibliOlheques et aca
iI I ' instar dcs Medicis ou
dll roi de France, les princes de l a Renaissance ont egalement eu iI cccur
de rassembler Ie savoiret de Ie trans mettre aux generations futures.
Enfin, dans Ie domaine de [' archi
AUlre interet du patronage, dans
tecture, les mecenes choisissaient Ie
pas coml1leHre d' impair. Lc musicien
vaillant IXlur un Prince pouvait etre
de l'adoplion du style c1assique en
serieusement reprimande en 1473 par
soumel\rc aLL systcme contraignant
son l1lecene hospilalile, largesse, pro
tection el conseils. eertes. il ne fallail Josquin des Pres. par exemple.
fut
son command ita ire. Ie duc Gale:lzzo
Maria Sforza. pour avoir travaille
IXlur un autre. Ercole
Les p:llrons du nouvel hunmnismc
IXluvaicnl financer la production et la publication de tmites philosophiques, fournir une pension permanente ou
encore une IXlsition iI la cour ou iI I'universile iI un hllmaniste ou a un
philosophe. C'est ce (Iue firent Come
Ie dOlllaine des arts, J'artiste tra
plus innovant car il n'avait pas
a se
b:lrreaux de I'echelle sociale a la cOllr
Chaque cour se devait ncanmoins
pait sans dOlile plus rapidement les
qu'il la ville.
Pour les Princes, s' entourer d' ar-
tistes devenait de plus ell plus neces-
saire dans 101 course au prestige qui
animait les cours des XVo et X V I<
steeles. Remplir les palais d'objets
desirables, les animer de conversa-
de traduire I' o!uvre de PI:lton et celie
d'avoir
Come omant la leUrine d'une traduc
tion de Plotin par Ficin dil bien Ie lien
personnel cxistant entre la famille des
Mcdieis et Ic philosophe (l ui offre
I'ccuvre
iI Lauren\.
Le patronage des grands offrait
par ail1curs une certaine proteclion.
Ainsi, Pic dc la Mirandole put deve lopper
iI i'ac:ldemie de Careggi fes
idees un peu trop rcvolutionnaires
aux yeux de I'I�glisc qu'il defendait sur la religion ulliversclle et 101 eabale
el (l u i lui avaient valu ['exi!. Des cou
fetes hors du C01ll1l1un. re(IUCrait
iI demeure des peintres, des
Rellchlin. dans sa leure iI Leon X, de
mande au papc, non sans flagornerie,
1«, par exemple, ee
et des chf lteaux de la Loire, une :ldaptat ion italianisantc du gothique.
Portrait de Come de Medicis dans un m''""''' 1 de Marsile Ficin sur Plotin,
1488-1489
'
commanditairc, ainsi 'Ill une eerlaine forme d'itllmOl1alitC. Les patrons en
deficit de Icgitimitc trouvaient dans Ie
meeenat I'autorite qui leur 1l1anquait
(ainsi Ie card inal Wolsey, fils de bou
cher d'ipswieh el cOllltllanditaire du pal:lis de Hampton Court). Peinturc,
lIlusique et architecture ctaienl des
sujets de conversation tres prises au sein de la COUL Quand Charles IX
ronda I' ACadcm ie de poeste el de
catholiques el protestants. Musique
au tlleccnal. C' est ainsi que Johannes
celie de Franrrois
fut celui de l'Ecole de Fontainebleau
des savants. Le patronage promettait
Ile purent se devclopper libremenl
qu'en dehors des universites. grace
d' inventer son style propre : pour
des honneurs dans la vie presente du
pialOnis1l1e ou Ie pythagorisme, cer
taines theories scientifiques IlIcme,
cierenl du patronage des MCdicis.
architectes. des hommes de 1cUres et
llmsi(l ue de B:t"if en 1570, il eSpCrait que cette sociabilite erudite eOlllri
rants philosophiques COlllme Ie lIeo
leschi et Michelozzo di Bartolomeo,
avoc.lls du modele antique, bCnefi
lions distinguees et organiseI' des
de scs coml1lentateu�. Le IXlrlrait de
Italic. A Florence, FiliPIXl Brunel
des corporations. En outre, on grirn
r Ancien et Laurent Ie Magnifique
pour Marsile Ficin en Ie chargeant
style des b. itiments. lis sont il l'origine
buerait
iI pacifier les tensions cnlrc
et poesie, considerees COlllllle des
harmonics pures, devaient rcstaurcr
l'equilibre entre religions grflcc
iI
leurs effets psychologiqucs sur les
Biblioteca Medicea Laurenziana. Flo,ence
A Josquin, Ie chanteur. Josquin. Nous avons entendu que vous passiez volre lemps a ecrire
d'autres pieces que I'ceuvre que nous vous avons commissionnee, el que vous laissiez de cote votre devoir pour d'autres personnes, et pour cela nous nous
"osquin des Pres reprimande par son eommanditaire
l.MOltthews at P:A. Merkley. Music and
Patronage in the Sforza Court (Studi &lIla Storm Della Musica in Lombar dia VoI IIJ. Turnhout : Brepols. 1999,
ptaignons grandement de vous. Et nous elions dans I'esprit de vous tenir garde en prison afin de vous enseigner d'etre plus sage une aulre fois, ce qui vous
arrivera assurement si vous ne vous arrangez pas pour que I'ceuvre que nous
avons commissionnee nous soit expediee sans delai. Abiate, Ie 1 5 mars 1473, Gabriel (secrelaire ducat de Gateazzo Maria
Sforza)
traduction Pascal Brioisl.
Je vous prie, tres saint Pere, de me permetlre, a moi Ie plus humble des
hommes, un roturier, de vous parler quelque peu plus franchemenl. Imaginez·
vous a quel point je fus emu d'admiration et de la joie la plus protonde quand j'appris que vous, Ie Ires noble fils du meilleur et du plus sage des princes,
Laurent de Medicis. aviez accede par acclamation universelle a la supreme
dignite du trone papal [...).
Car quel plus precieux fleuron de la couronne de laurier laurenlienne que
vous, non seulement pour Ie peuple de Rome, mais encore pour Ie monde
entier ? Pourrait·on imaginer plus grand tresor que votre regne ineffable. au
cours duquel toutes richesses se repandent sur nous comme Ie sable aurifere
Le pape Leon x sollieite par "ohannes Reuchlin Lettre de Johannes Rauchlin II Leon X. 1517, cilee dans Johann Reuch/ins Brief wechsel. lUbir.gen : l. Geige. Verlag. 1875, lraduction Pascal Brioisl.
du Pactole, au cours duquel les belles·letlres et tout ce qui est propice aux
affaires des hommes sont en honneur ? Votre pere a seme les graines de loute I'antique philosophie, qui vient maintenant a maturite, si bien que sous votre
regne il nous sera permis d'en recolter les fruits en toutes langues : grec, latin,
hebreu, arabe e! chaldeen. G'es! qu'a present les livres sont dedies a votre
Sainlele dans ces langues, el toutes ces choses qui furenl tres sagemenl
engagees par volre pere sonl accomplies avec davanlage de fruits sous volre autorite.
Consideranl de la qu'il ne manquail aux scolasliques que les ceuvres de
Pythagore, qui demeurent enfouies et eparses a l'Academie laurenlienne, j'ai
cru qu'il ne vous deplairail pas que je publie les doctrines que Pylhagore et
les nobles pythagoriciens sont repules avoir detendues, afin que ces ceuvres
qui, jusqu'a present, sont demeurees inconnues des Latins, puissenl eire lues selon votre bon vouloir. Marsile a prepare Plalon pour l'IIalie, Lefevre d'Etaples
a retabli Arislote pour les Franc;:ais, et quant a mOi, Reuchlin, je completerai Ie groupe, el expliquerai aux Allemands Ie Pythagore qui renail par mes efforts, dans Ie livre que j'ai dedie a votre nom.
[Atin quej ladile Academie soil suivie el honoree des plus grands, Nous avons liberalement accepte el acceptons Ie surnom de protecteur et premier Le roi Charles IX eree
auditeur de ceJle·ci, par ce que Nous voulons et entendons que les exercices
une academie de
qui s'y feronl soient a I'honneur de Dieu, et a I'accroissement de notre Elat et
poesie et de musique
a I'ornement du peuple franc;:ais.
Archives de l'Universile de Palis.
Cour et Parlement, Chambre de nos comptes, Cour de nos aides, baillis, sene·
Nous donnons en mandement a nos aimes et feaux, aux gens tenant nos
cart.7,1.17.
chaux et autres jusliciers et officiers de faire lire, publier et enregistrer en leurs
cours el juridictions I'existence de noire present etablissement, [..
.
1 el de laisser
jouir et user de ladite Academie les suppliants, leurs suppots et successeurs
pleinement el paisiblement, cessant el faisant cesser tous troubles et empeche· menls contraires. Car tel est notre pJaisir. En lemoin de ce, Nous avons signe ces presenles de notre main el fait meltre notre seing sur celles·ci.
Donne au faubourg Saint·Germain, au mois de novembre 1 570, Charles.
revolution d u l ivre i m p ri m e Un frontispice de 1 521 : la grammaire du livre se met en place
L
ORSQU' [ L impri
eependanl rapidemellt dctronces
Frontispice des CFuvres de Ciceron Ouvrage publilt par Josse Bade et
me. en 1454. la Bible
par Ics Icttres italiques. ccllcs de
a quarame-dellx [ignes. GUlcnbcrg
1'I1:llien Aldc M:Uluce. du Fran�ais
Jean Pel't /I Paris BibIioIheqoe de rArsenaI, Paris Projetable en Iranaparent
invcnlc-I-il une technique nOllvelle '!
Claude Gammond ou de I'Anversois
L' irnprcssion sur papier pour un
Christophe Plant in. plus dans Ie gout
prix raisonnablc. avec line pressc c\ lUle cncrc "ppropricc. precxislait au
des humanistes (lui redccouvraient la majestc des maj uscules romaines
travail de l"orfCvrc de Maycncc. Les
gravces sur raTe de Tibere.
de chariot it tymp:1Il e[ frisquelle qui
technologies du papier CI de I"cncrc
Ce sont les gr:lIldes capitales ro
p:lssait sous la pl:uine. La frisquelle.
grassc claicnt arrivccs de Chine en
maines qui ant ctc choisies paT Jossc
cadre dc bois :tjourc. maimenail la
Europe par Ie monde musulman au
Bade et Jean Petit ]lOUr cc frontispice
fcuillc dc papier sur Ic tympan. landis
XIII" sieclc cl lcs prix avaicnt baissc.
des ccuvres completes de Ciccron. Lc
quc la platine s'abaiss:lit pour presscr
La pressc, elle, clail lUle technique
nom de rauteur saute ainsi aux yeux.
la feuille sur la formc cOllIenant les
conntlc dans Ie monde romain ct les
Lc titre, plus long, dctaille les divers
caractcrcs mCI:llliqucs. Lieu et date
ordrcs mon:lsliqucs rcproduis:liclll
textes concernant la rhctorique ras
de publication n'appamisscnt pas ici
deja mccaniqllcmclII dcpuis 1400 des
semblcs dans Ie volume (trois
mais a la fin d'un autre volumc. sur
images picliscs pour les pelcrinagcs
tomes de ce succes de librairie ctaient
un colophon sclon lcclucl l'ou\'mge a
p:IT xylogrJ.phic (c'cst-a-dirc a ['aide
consacrcs aux discours. l : la philoso
Ctc realise it Paris en 152 I .
d'uTlc planche de bois gravec en
phic el aux leures). L·encadrement.
Pour connaitrc Ie format de ce
relic!). Gutenberg IlC flit Illemc pas
a rantiquc. est capic d'un modele
dcrnier. il faudrait examiner ver geurcs. filigr:lIles el pontuseaux. ces
Ie premier ?t Ulit iscr des caraclCrcs
itaIien du XV' siecle et abusc des pi
mobiles mClalliques. les Corcens
laslres. trophecs. mCdaillons et autres
marques appamissant d:ms Ic papier
ra\'aicnt preccdc en 1403.
grotesques. Lc nom des deux impri
qui discnt comment la fcuille a etC
POllnant. son proc&ic. qui consis
rneurs cst ficremcnt inscri( sous Icur
pliee pour formcr des c:thiers aprcs
t:lit 1 : combincr tOlLles les tcchniques
marque represcntant unc pressc. cclle
eire passee SOliS la pressc. I I s'agit
connucset a utiliser un moule a main
de ratelier de la rue Saint-Jacqucs.
ici d'un
ajustable lui penneUant de fondrc des
i\ Paris. all opCraicnt les deux collc
caracteres calibrcs rigourellsement
gues. La presse i\ i mprimer cst fide
Renaissancc des c:tmctcristiques qll'il
identiqlles. fut rcellernent rcvolu
lel1lent represcntee. :IVCC son systcllle
a conscrvees dcpuis.
if/folio.
Lc livre.
011
Ie voit. a acquis it la
tionnairc. Son clllrcprisc. soutenue par des b:Ul(luiers. rencontra en cffet
la demande trcs forte d'un monde
avide de livres : Ie lectorat polenticl des universitcs et dcs cours ne tard.. pas a s'clargir alors que Ie livre. objet d·ostentation. scduis:lit des
",,_;.F.O• .ats et caracteres d'imprimerie : un heritage du xV" siecle
c:ltcgoric." de population de plus en plus nombretlscs ct. notamment. 1:1
0 --
bourgeoisie urbaine.
0 Q
Si. au dcpan. il ne s'agissait pour Gutcnberg ct scs contcmporains que SliccesseUTS imposerent
:IU
processus d'uniformisalion el de so phistication qui lui a donne S:I forme moderne. Ce n'est pas peu de chose que des imprimetlrs aient inventc les caraclcres donI nous IIOUS servons encore. L.'1. lettre gothique de Guten Ic premier imprimeur anglais. furent
h-
llm'[i � rn
livre un
berg et la bfitarde de Willi:lIlI Ca;o:ton.
1 1 --
--
d'imiter Ie manuscril. peu a peu. ses
__ '" _....... .
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II [Jill � �.-
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OPERA 'CICERONIS RhttoricaPraroria,& Formfia,prami�o jnd,cc� vita u Liuio,iltg, Ad C.Hn.nnium Rheeoricorum Lib.lIlI. Fo.l. � inumtiolK,qI,JZ & vttus Rhttoria,Lib.lL. Fo.xXl. T�picorum.ad Brutum,Lih.l. Fo.XU .Drt: Partirjo� Oratoria,Dialogus.l. Fo. XLV. Fo.LII De-Orarorr,l.ib.llI. fo. LXXXIX. . De ClarisOraroribus,LibJ; . ' Fo.CIIII. De P._ Omo••,Lib.l. . agmenr....; Fo. CXVI. De Opriuio gaxn Orarorum,q , Arrmna. •
•
_
d eco uverte des Anciens et nouvelle education L
A conviction d'ull
mot humaniste, a I'origine, dcsignc
dcclill de rEurope dc
les profesSl!urs de lellres d'humani
101 fin de rcrnpire romain devint
tcs), elaborerent non sculement des
un lieu cOlllmun i\ panir de PClr::Ir
cupait cgalelllcnt de ta formation de
( 1 307-1 374), $cs disciples. IOllt au
gr.lIl1lllilirc.." et des dictionnaires, rnais cgalelllent une critique philologique
long dll XV, siec1c. s'allachcrcnt a
leur pcrmellanl de determiner quelles
d'cnscigner nouvelle quc Rabclais
collcctionncr les rnanllscrits oublics CI
ctaient Ics versions les nloins cor
a sauvcgardcr les mines ct les SI.IIUCS
rompues de." ccuvrcs qu' ils voulaient
herilees de r Amiquilc.
reconstilller. Appliquee a la religion
puis
Pour bC:IIJCOUp d'humanislcs.
ou it la politique, eelle methode inlro
l'elUde des allleLLrs anciens permellail
duisait les ferments de la subversion.
aussi de rctrouvcr Ie passe de Rome
Quand il eerivit son "("mite
pour en ccrirc l'histoirc. Ainsi. Pog
Donation de Comlalllin, en
gio Bracciolini
( 1 380-1459), dit Ie
Lorenzo Valla
comme des Anglais Thomas More ct Thomas Linacrc. Enfin, rhumanismc, qui sc preoc I'individu, encouragca une manicrc loue dans Ie programme d'educ.ation dc Palllllgrllei
( 1 532). Dans celie
pedagogic, la contrainte devait etre rernplacee par I'cveil du goul pour Ie savoir. Tout passe d'abord par
fa
I · c l udc des langucs (gree, latin.
1 440.
hcbrcu, ehaldeen ct arabc) ct de ta
.mr
( 1 407-1457) servait
rheloriqllc, puis par les disci I'I ines
Pogge. rCdigc:1 dans scs camelS de
les intcrets de son prOIC(;teur, Ie roi
voy.age la DeRTip/;Ol1 llel" RI/il/e.\" lie
de Naples Alphonse d·Aragon, cn
( 1 440) ct les J"comflmc(!.\' lie fa FOr/Il11e ( 1 448) dans Icsqucllcs il
connit avec Ie pape. 1 1 dcmontr.lit en
les saintes ccritures, Ie droit, les
cffet que Ie document (lui prouvait que rempcreul" romain avait octroye
scicnces naturelles ct la medecine,
deerivai! cc qui restai! de I'ancicnnc Rome. All debut tiLL
au IV' sieclc au parle Silvestre
Roml!
XVI" sioclc. les
rouilles sc firelll plus syslcmatiqucs ct
I"
un pouvoir tcmporc!. etait en realitc
ron dCcouvrit dc.� u:uvres comnle Ie
un faux forgc au Moyen Age. Valla
L:loooon ou rApolion du BclvCdCre.
;nguait notamment du fait que Ie
On exhum:1 cg:llcment la Maison
texle clait cerit dans un latin dont la
doric de Ncron, source inepuisable
syntaxe ct Ie vocabulaire ctaient ecux
d' inspiration I>our les artistes
du VIII" sieck.
••vee
ses motifs dceoratifs que ron appcla
Lc pouvoir des hum;lI1istes etait
"grotesques" en mison des cavites qui
d'autanl plus gr.lI1d (IUC leur rCseau, la
les avaient conserve... intacts. LCon X demanda alors a RaphaCi dc recons
Rcpublique des Leltrcs, transccndail ice les frontieres des Etats gr;
qlf(l(Jril'illlll (geometric, arithmetiquc,
astronomic, llIusiquc). S'y ajoulent
ainsi quc les exerciees militaires physiques. Aux d iscip l ines
medic
vales classiques. Rabclais juxtapose done I'cnseignelllcnt des langues anciennes chercs aux humanistes, et des disciplines scicntifiques rondces sur I'apprentissagc tivrcsque ccl1cs (Ies sciences naturcllcs), mais aussi sur I'obscrvation (I.. mcdecinc).
L:I
tail Ie du programmc est bien sur a I.. (de)mcsurc du jeunc geant et rutur
a la
Prince, et peut-etre I';!lItem de />(1/1-
tituer un plan de la capitale imperiale
languc intemationale : Ie lalin. Ainsi,
en seize feuilles.
U/grue/ est-il ici tegcrement ironique
dans une kllrc
vis-a-vis de scs maitrcs, a commenccr
a Guillaume Bude,
Suivant la mi:me idee, la vue de
Erasrlle pcut-il le tellir au courant des
Rome realisee pm un artiste .mol}yme
publications du Fran�ais Paul Emile
par I�rasmc.
pom Ie p;Ii:lis dueal de Mantoue au XVI' sieclc delllonlrc la mailrise de la canographie llIathcmatique qu'en
",,_:U:"::Ian
des Antiquites romaines, palais ducal de Mantoue, XVI' siecle
avail son aUleur, mais aussi sa f;uni liarilC aV(:C les Antiquite... d&'rites par Ie Pogge, De nombrcux edifices sont reconnaissables : Ie Colisce, rAre de Constantin, la colonne Trajane, Ie Pantheon, la statue du dOlllpleur de chevaux du Quirinal (exhunlce a rcpo(lue de Paul II), Ie temple de Castoret Pollux, Ie Forum, ou encore Ie mausolce d ' l- ladrien, devenu chfl teau Saint-Ange, Dans Ie domaine texlue!. les human iSles (lui etaienl avant tout des expcns en langue aneiennc (Ie
III!!!!
II Y a quelques siecles, [Ies pontifes romains] ne comprirent pas que la Donation de Constantin etait une invention, un faux ; ou ils la forgerent eux-memes, et leurs
successeurs, marchant sur les traces de leurs devanciers, delendirent comme vrai ce qu'ils savaient faux, au deshonneur de la majeste pontificaJe, au deshonneur
de la memoire des anciens pontiles, au deshonneur de la religion chn3tienne : ils
melerent Ie tout de meurtres, de desastres et d'ignominies. 115 disent que la ville de Rome leur appartienl, que Ie royaume de Sidle el de Naples leur appartienl, que
l'IIalie entiere, les Gaules, les Espagnes, les Germains, les Brelons leur appartien
nenl, que l'Occident enlin leur appartient : tout cela est, en etiet, dans I'acte de la
Donation. Tout cela t'appartient-il done, souverain pontile ? As-tu I'intention de tout
recouvrer, de depouiller de leurs villes rois et princes d'Occidenl, de lorcer ceux-ci a
Ie verser des lributs annuels ? Esl-ce Ion ambition ? Pour ma part, j'estime au con· traire plus juste de laisser les princes Ie depouiller de Ion empire tout entier. Car,
Lorenzo Valla. La Dona/lOll dB Cons/anlin. tJaOOcrion J.-B. Giard. Paris: Les Belles LeUres. collection La Roue " Livfes. 1993.
comme je Ie montrerai, cette Donation d'ou les souverains pontiles veulent tirer leur droil lut egalement inconnue de Sylveslre et de Constantin [, . .], Je monlrerai, moi,
que Constantin jusqu'au dernier jour de sa vie et, apres lui, lous les Cesars a tour
de role reslerent en possession [de l'Empire romain] : ainsi n'aurez-vous plus rien a
repliquer. [.. .} Voyons I La lacon barbare de parler n'indique+elle pas que ce gali
malias remonte, non au temps de Conslantin, mais a une epoque plus recente ? Anvers, Ie 21 fevrier 1517,
Erasme de Rotterdam a son cher Bude, salut.
Erasme : Ie partage des savoirs
Erasme.
Cotrespotl(lance. Paris : Robert
LaIionL collection 8ouQuins.I992. Josse Bado. ImprirTl(lllr Hamand alabll l! Paris YllfS 1500. •
[ .] .
La France m'a loujours ele chere a plus d'un titre mais rien ne lui donne plus de prix a mes yeux que Ie lail qu'elle possede Bude. [ . . .] J'ai appris par votre ambassadeur que Paul Emile redigeait enlin son His
taire de France : elle ne peul manquer d'elre un ouvrage waiment delinitil, vu que sa mise au poinl n'a pas demande moins de vingt ans a un homme qui est aussi savant que diligent. Si tu n'as pas encore eu la chance de lire J' Utapie de Thomas More, lais-Ia acheter pour toi, et lis-Ia sans remords a loisir, lu ne regreHeras pas la peine. Les travaux de Thomas Linacre vonl incessamment
sorlir de ratelier de Bade" ; je ne puis dire combien je m'en rejouis : de la part de cet homme, je ne m'attends a rien qui ne soil absolumenl paliail en tous
points. Oieu immortel ! Quel siecle je vois arriver sous peu a exislence ! Fasse
Ie ciel que je puisse redevenir jeune !
J'entends et ie veux que tu apprennes parfailement les langues : premierement Ie
grec, comme Ie veul Quintilien ; deuxiememenl le latin ; puis I'hebreu pour I'ecrilure
sainle, Ie chaldeen el l'arabe JX>Ur Ia meme raison ; et que tu formes Ion style sur
celui de Platon pour Ie grec, sur celui de Ciceron JX>Ur Ie latin. Qu'il n'y ait pas d'etude
scientilique que tu ne gardes presenle en ta memoire et JX>Ur cela tu t'aideras de
I'encyclopedie universelle des auteurs qui s'en sont occupes. Des arts liberaux, gOO
metrie, arilhmetique et musique, je t'en ai donne Ie goOI quand lu etais encore jeune,
Rabelais : une nouvelle pedagogie Rabelais.
''''.
Pantagruei. chapilIe VIII.
a cinq ou six ans, continue ; de I'astronomie, apprends toutes les regles, mais laisse
mol I'astrologie et I'art de Lullius", comme autant d'abus et de futililes.
Du droit civil, je veux que tu saches par c:ceur les beaux texles et que lu me les
recites avec sagesse.
Et quant a la connaissance de la nature, je veux que lu I'y donnes avec soin :
qu'il n'y ait mer, riviere, ni source dont lu ignores les poissons ; tous les oiseaux du
ciel, lous les arbres, arbustes, et les buissons des forels, loutes les herbes de la
terre, lous les melaux caches au venire des abimes, les pierreries de tous les pays
, L'lU\ de Raymond LlIlle c'est·l!-(1ire, en roccurrence, raJchimie.
de rOrienl el du Midi, que rien ne te soil inconnu.
Puis relis soigneusemenl les livres des medecins grecs, arabes et latins, sans
mepriser les lalmudisles el les cabalisles, et, par de Irequentes dissections, ac
quiers une connaissance parfaite de I'autre monde qu'est I'homme. Et quelques heures par jour commence a lire I'ecriture sainte : d'abord Ie Nouveau Testament et les Epitres des ap6lres, ecrits en grec, puis l'Ancien Teslament, ecrit en hebreu.
En somme, que je voie en loi un abime de science car, maintenant que tu de
viens homme et Ie fais grand, il Ie faudra quitter la Iranquillite et Ie repos de " elude pour apprendre Ia chevalerie et les armes [...].
D'Utopie, ce dix-sepl mars, Ton pere, Gargantua.
n a issa n ce d a ns /es campagnes ?
Kunsthisto,isches Museum. Vienne
L
Proletable en transparent
E rnondc de la Re
gent :tv(''C un appetit Icroce, landis que
naissance cst tres ma
Itl mtlriec, les chevcux cncore dcnoucs
joritaircrncnl rural ct it cst legitime
(les cpouses portent la coifTe). est tlSsisc
d"affinllcr que les campagne!> n"ont
sous la traditionncile couronne nuptiale
a la feiicitc
pas conl1u :lIars de bou1cvcrsclllcnl
en p.1pier et s':.bandonne
majeur. Mais entre campagne c\ ville,
promise, les p..1upieres btlissCcs. Des
march:mdiscs ct homIlles circulcnt :
plats :UTivent. tlU son des comemuses.
res villagcois vonl vcndrc au marchc :
cepcndant que de nouveaux convives
Ie patriciat Ycnilicn ou clisabCthain
affluent par la porte ouverte.
possCde des villas hors des vi lies.
Les noces claient toujours pre
Surtout. la culture populairc du mondc
cedces d ' lIn charivari. survivtlnce
flu"al inspire les pratiqucs culturcllcs
mcdievtlle au coms de laquelle les
des clites urbainc.... pour les danscs.
confreries de jeunesse faisaient
par cxcmplc. ct IllCIllC la lilleralurc :
payer aux ruturs epoux Ie prix de la
a dire si les dlll1sCS
perte d'un parti. II se petlt que les
lTlorisqucs du temps de Henry VIII
rubans :lccroches tlUX cornemuses et
ou ]a volle en France sont issues des
dcpassant de certains costumes fas
on a bien du Illal
a de telles confreries.
milieux de cour ou des traditions
sent reference
villagl'Oiscs. On sait en revanche que
Ces rituels etaient parrois l'occasion
Ie Roff/lld Flirielix de rAriOSlc puisc dans les
themes des lll11siciens itine
rants du sud de I' ltalie,
de violences extremes. La dague au cote d'un
des musiciens rappel Ie
egalemenl que la laverne, lieu des
Bl1leghei l'Ancien s'habillait par
apprentissagcs de la sociabilitc, des
fois en pays-an pour mieux observer
lTlanicres de boire el de s 'affronter
ses contemporains. Dans Ic Repas
verbalcment, ctait aussi un lieu
tie Iloces. il s'c."t peut-t:trc rcprescntc
I'on pouvait s'entretuer
lui-meme en maric, rcvctu de velours
d ' u n e altercation. ce dont temoi
noir, I'cpCe lansquenette au cote, en
gnaienl les !cttres de remission.
Ol l
a l'occasion
conversation avec un franciscain.
Dans ce monde ou semble regner
Constmit sur une perspective oblique.
l'immediatetc, les nouveautcs de la
Ie tableau fail pellctrer Ie spectateur
culture eitadine n':lpparaissent que
ses concitoyens. Son interrogatoire
dans une scene peinte av(.'C unc ccrtainc
sous forme d'indices. 5i I'on observe
par un inquisiteur dominicain a cle
empathic pour ces villageois en leurs
attentivemenl Ie dossier du banc con
analyse par I'historien Carlo Gin
beaux habits de mte. On cst loin ici de
Ire Ie Illur, plusieurs pages imprimces
zburg : c'est
la distance que I'clite de Ia Rcnaissance
et mcmc illustrees ont etc arfiehces.
tres partieliliere du DecllmerolJ de
11 la leClure collective.
Boccace ou du FiorellO del/a Bibhia.
a partir d'une approche
tient a conservcrentre elle et "I'incons
deslinees
tant vulgairc" .
L' imprime pcnelre en crfel dans
de melaphores tirees du quotidien
les campagnes pllr les clites qui y
et de ses propres convictions. que
Bnleghcl peinl une societc dans
a construire a fait
la(IUelle les traditions perdurenl. L:.
rcsident et par la hotte du colporteur.
Ie meunier cst parvenu
scene sc P.1SSC dans une taveme, juste
Avec J' imprirnc arrivent les modes et
un ensemble de theories tout
apres Ie temps des moissons : les gerbes
les idees nouvelles, y compris pour
personnelles sur III Genese et sur la
sont croisCcs au mur, gage de bonheur
les non-lisants. Ainsi. Domenico
mission du Christ. Tout se g£ila quand
pour les maries. Plusieurs personnages
5c:ll1deJa, dit Mennochio, un meunier
boivcnt copicusement, d'autres man-
dll Frioul. aimait
a faire la leclure a
il voullit les parlager : il finil sur Ie bucher en
1600.
U ne xemple de reception de I'ecrit dans les campagnes
�--' G'est vrai que j'ai dit ces choses a difterentes personnes, mais je ne les exhorlais pas a les croire. Au con/raire, j'en ai exhorte beaucaup en leur disant : -Vous voulez que je vous indique la vraie route ? Soyez atienlifs a faire Ie bien, a marcher dans les traces de mes predecesseurs, et a faire ce que nous ordonne notre sainte Mere I'Eg/isen• Mais ces paroles que je viens de vous dire, je /es disais par /entation, parce que j'y crayais el que je voulais les enseigner aux autres .. et c'est I'esprit malin qui me faisait craire ces chases-Ia et me poussait aussi a les repeter aux autres. f. . .} J'ai dit que,
a ce
que je pensais et croyais, tout etait chaos, c'est-a-dire terre. air. eau el feu taut ensemble .. et que
ce volume peu a peu fit une masse, comme se fait Ie fromage dans Ie lait. et les vers y apparurent et ce furent /es anges ; et la Ires sainte majeste voulul
que ce fussent Dieu et les anges ; au nombre de ces anges, if y avait aussi
Dieu, cree lui aussi de cette masse en ce meme temps, et if ful fail seigneur avec quatre capitaines, Lucifer, Michel, Gabriel et RaphaiH Ge Luciler voulut se faire seigneur a I'image du rai. qui etait la majeste de Dieu, et, a cause de
sa supertJe, Dieu commanda qu'i/ fut chasse du ciel avec taute sa suite et louIe sa compagnie ; et ce Dieu fit ensuite Adam et Eve, et Ie peuple en grande louie pour occuper les sieges des anges ainsi chasses. Mais camme cette foule n'obeissail pas aux cammandemenls de Dieu, celui-c; envaya san fils qui fut pris par les juifs et crucifie. Je n'a;jamais dil qu'i/ s'est fait pendre comme une bete. Repon5es de Domenico $candella. dit Menocchio. au tribunal de l"Ir.quisition 8f1 f�rier 1584 dans Carlo Ginzburg,
d'un msunier du XV,. siecJe, traduction
Monique Aymard.
Paris : Aubier. 1993
Le Fromage ef Iss vetS. I'I.lflNetS
a ffi rmation d e / ' i n divi d u , rea / ite o u fi cti on ? J
ACOB BurckhanJl,
O'aUlres sonl rnoins hCsilanls, pcul
dans la Cil'ilim/ion ell
eire parcc que leur statUi el leur cul
(Iue Ie regard reOexif sur soi lrouve scs racines (bns la thoologie du XIII"
Rellaissance.
ture les y auloriscnt. Ainsi. le b.·mquier
sieclc. qui elle-mCl1'le donna naiss.1ncc
claborn en 1 860 une Iheoric scIon
d'Augsbourg Matthaus Schwartz Cerit
il ia t/erotio II/Ot/enlll. L'Ecole du Nell'
!aqucllc les conditions politiqucs de 13
un reelt aUlObiogmphique. Le Lil>ri!
Historici�m nous a ensuite appris que
pcninsulc ",vaient pCOllis rcmcrgcncc
(/e.� costlllne.�·. en prenant prelexle de
la representation du moi autonomc ne
de I'individualismc modcmc. l:ulI;:mt
garder mcmoire des costumes pones
serait pcut-etre qu"tme liction : Stephen
Iwlie all fem" s
tit' fn
:lins; une controvcrsc qui n' cIa!! P.1S
au cours de son elistence. Dans son
Grccnblau, I'un de SC.'i rcprCsclllalllS, 11
pres de s·ctcindrc. Pour l"historicn
manuscril, il se I1)ct it nu au sens proprc
soulignc Ie fait que Ie moi sc recompo5C
suisscccpcndanl. la naiond"individu
el se rCvele tel (IU'il sc voit : "replct et
en pcnnancncc ell fonclion des choix
rcnvoyait sur10ut a I' idee d'une cons
gros". Albrecht DUrer, quelques vingt
que ron rail et des contraimes que ron
tmelion de soi conduisant a la celcbrilC
ans plus tot. s'ctait lui ,russi croque
subi\. Le sentiment des hommes de la
CI non. comllle pour nOlLs.
50
a celie de
depouiJla1ll. pillS impudiqllement
Renaissance de vivre dans un thcatre.
conscience de soL Toutcfois. comllle
encore. de scs velements : Ic pcinlre.
d'avoir un llloi interieur dissimulc par
il donnai! pour indiccdc " evolution a
depuis son plusjeune fige, avail multi
des cotlchcs d'appareoccs protecuices.
j'IXuvre 13 multiplication des signatu
plie les :luloportrails. comme en quete
eSI. a J'epoque. un lieu commun de
res CI des aUlorcprCsclllalions aux XV�
obscssionnclle dc lui-meme.
la litterature, En deconslruisant les
ct XVI< sieclcs. son hypothese a pu
Cette quetc de soi sans complai
dispositifs du f:t<,:onnage du moi chez
eIre malgre lout intcrprelec plus \
s.1tlCe n'a jamais (!fe mieux dilc (Iue
Thomas More ou William Sh:lkes
d(lns un scn� p�ychologiquc.
j"IT Michel de Monlaignc ( 1 533-1592).
IJCiU-C, Gn::cllulall invile ) : comprendre
Dc nombrcux indices lui donnclll
L'autcur des csslIis forgeait Ie projet.
la tension qui poLLv:lit exister a l'epo
autant que les convcntions socialcs Ie
entre un ideal dcsinceritecl la tentation
destes artisans oonlille des plus gmnds
pcnncltaient. de sc dCpeindre " au vir'
de sc cacher derriere un pcrsonnage
artistes :lppamisscnt sur Ics reuvrcs
et 'lout nu" , avcc scs dCfauts. y compris
public.
a cette epoque. La rnultiplic:ltion
ses
d'espaces architecturaux prives (Ie
p.\Cte autobiogmphiquc de Montaigne.
raison. Les signatures dcs plus
rno
angoissc.<; viriles.
La profondeur du
.wlldiofo ou la charnbrc individuelle)
conetu, dit-il. :Ivee "ses parents et :LInis"
ou d' objets de J'intime (petites boites,
(et :Iu-dela scs lectcurs) pour qu'its
miniatures ou images croliques) cst
gardent une image fidcle de lui quand
non moins atlestCe. Lcs oomrnandes
il scrait mort. lranehca\'cc les intentklns
de portraits par les marchands, les
cvidcntcs de Benvenuto Cellini dans Ie
savants ct
!es I,;UUrlbilIlS 'lUssi bien
reeit aUlOjustificatif sur sa vic. rCdigc
(I ue les princes, pointent dans ta meme direction. L'ccritllre de soi de
sous sa dietCe par un sccrelaire entre
vielll egalement plus frC(I Uellle et les Ubri di ricort/llll:.e (livrcs de souve
comme un Ubro IIi ricor(/tlllze. esl destine a Come I"de MCdicis. I I vise a
nirs) qui enrcgistraient I'histoirc ge
oonvaincre Ie patron de l'exccllencc de
nealogiqueci familialedes march:lnds
son protege. artisan
de
1:1 fin du Moyen Age italien trou
velll leurs e(luivalents dans Ie Nord.
Ainsi. Henry Machyn. mailre
1558 el 1567. Lc telte. qui commence
talentueux. combat
tant valeureux, (:ourtis..\ ' Il habile, homme d'honncurct de genic. Dc tels mcmoirc.<; avaiel\l pour vocation de consolider un
taillcur. ne se cOlltellle-t-il p:IS dans
st:l1\lI Oll de corriger cc (lui C1:lll vCeu
son journ:11 de rapponer les faits
comme
auxquels il assiste dans les annecs 1550 (cercmonies urbaincs, fetcs,
une
il�ustkc. L'honnetetc
otl
J'imp..1rtialitc de rautellr y est SOl!\,ent discutable. C'cst qll' icijouc un nouveau
enterrements, etc.). II parle aussi
phcnomcne : la rk.
parfois de lui-meme ct des soirees
p..1r les hommc.'I de la Renaissance de
passees avec scs am is a manger des
fa<,:onner leur image.
huitres de la Tamise et
Unb anquier sa met a nu, debut XVI- siecle
r-:�
a boire de la
La position burckhardtienne a
bicrc. Mais Ie "je" du narratcur cst
cepcndant Ctc largcmcnl critiquce.
encore peu utilise.
Lcs mCdicvistes, d'abord, dCmontrent
Matthaus Sct:wiIrtz, Ls Livre des costLmss, BNF. manuscriI alIemal'ld 2' ,
En 1553, Ie 26 mai, eul lieu dans la paroisse de Fenchurch la plus jolie fele du mat de cocagne qui se puisse voir. Le mal etait peint en vert et blanc et des hom mes el des femmes dansaient autour, portant autour du cou des colliers blancs et verts eux aussi, on voyait aussi des geants, des danses morisques et [efface] . . . II y avail la un chaleau loul au milieu de la rue avec des etendards et des endroits decores de soie e! de lissus brodes d'or ; e! Ie meme jour Ie Lord Maire decida en conseil qu'on abatlit tout cela [ ... J. Le 30 juille! 1557, jour de la fete des marchands-tailleurs, maitre Dave Gyt tons, maitre Meynard et maitre Draper el maitre Smyth, maitre Coldwell, maitres Asse et Gybes, maitre Packyngton el monsieur Ie Machyn el bien d'autres, man geren! un demi-boisseau d'huitres a Anchor Lane chez maitre Smyth, et dans Ie cellier de maitre Gyttons ils mangerent des oursins a la lumiere des chandelles, ainsi que des oignons en buvant gratuilement de la biere rousse, de la biere clai Tire de John Gough Nichols (ed.), The Diary 01 Henry Machyn. Camclen Society. WI.XIU. 1848. traduction : Pascal Brioist.
retle el des bieres epicees, Ie tout jusqu'a huil heures du malin. [ ... ] Le 25 mai 1 562 fut arige par les bouchers et les pecheurs, au lieu-dil Le Havre du coucou, un grand mat de cocagne plein de trompes ; et ils firent lous bombance car ils avaienl a leur disposition deux caisses d'eslurgeons frais, des lurbots, des grands congres el grande quanlite de vin.
Au Lecleur C'est ici un livre de bonne fOi, lecleur. II t'avertit, des rentree, que je ne m'y suis propose aucune fin que domestique el privee. Je n'y ai eu nulle conside ration de Ion service ni de ma gloire. Mes forces ne sont pas capables d'un lei dessein. Je J'ai voue a la commodile parliculiere de mes parenls et amis : a ce Montaigne :
que m'ayanl perdu (ce qu'its onl a faire bienI6t), ils y puissenl relrouver aucuns
''C'est moi que
traits de mes conditions et humeurs, el que par ce moyen ils nourrissent plus
je peins"
enliere et plus vive la connaissance qu'its onl eue de mol. Si c'eOt ete pour rechercher la faveur du monde, je me lusse pare de beautas emprunlees. Je
Monlaigne. "Au lecteur", Las Essais. Livre I. 1580.
veux qu'on m'y voie en ma fa<;:on simple, naturelle et ordinaire, sans elude el arlifice : car c'est moi que je peins. Mes delauts s'y lironl au vii, mes imperfec tions et ma forme naNe, aulan! que la reverence publique me I'a permis. Que
51 j'eusse ete parmi ces nations qu'on dil vivre encore sous la douce liberte des premieres lois de nature, je I'assure que je m'y fusse tres volontiers peint toul entier, et lout nu. Ainsi, Lecteur, je suis moi-meme la matiere de man livre : ce n'est pas raison que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole el si vain. A Dieu donc, de Montaigne, ce premier de mars mille cinq cenl qualre-vingt.
Ceux qui ant connu dans leur vie une grande reussite au quelque chose d'approchant devraienl, avec la sincerite de I'honnete homme, ecrire eux-me mes leur biographie, mais sans s'atlaquer a ce beau Iravail avant quaranle ans. Benvenuto Cellini : les premices de I'autobiographie
Je m'en rends compte maintenanl que je suis sur la fin de mes cinquante-huil ans et que, fixe dans ma ville natale de Florence, je repasse en pensee loules les Iraverses de I'existence. Je n'en ai jamais renconlre mains qu'en ce momenl el je ne me suis jamais senti dans une disposition d'esprit si heureuse ni en si bonne sante ; je ne me rememore pas les moments agreables et les affreux
La Vie de Benvenuto CeIhnI ecfll6 par IlJi.mIme (1500-1571). traduction sous La tlirecbOfl d'Andre Chaste!. Paris : Scala. ""
malheurs sans eire terrifie a ces souvenirs et stupefait d'etre arrive a I'age de cinquanle-huit ans au, grace a Dieu, je poursuis si allegremenl ma roule. Le seul fait d'avoir pris de la peine et de devoir a la renommee de ses merites une petite repulation devrait eire une satisfaction suffisante, puisqu'on s'esl lail un nom. Mais il laul bien vivre a la maniere des autres, el la inlervient un peu d'ambition bien humaine, et caei sur plusieurs plans. D'abord, exposer a aulrui qu'on descend d'une tres ancienne lignee du plus haut merile. Je m'appelle Benvenulo Cellini et suis lils de maitre Giovanni, petit-fils d'Andrea, arriere-petit-fils de Cristolano Cellini.[ . . .] Je praliquais I'orfevrerie en aidan! man pere. Man cadet Cecchino avail commence des eludes de latin. Moi, Ie fils aine, je devais devenir un grand musicien, Ie second un brillanl jurisle, mais on ne peul aller contre les dons de la nature ; elle voulai! que je me mette a dessiner el man frere, beau gar<;:on de fiere allure, elail attire par Ie melier des armes.
p e rception d e l'A utre et la q u estion de I ' i ntolera n ce T
L'autodafe, chiitiment E R R I B L E para
(casaque mortuaire de coulcur jaune),
doxc : l a pcriodc qui
ainsi quc la camclla (sonc de bonnet
posa ell credo sa foi en I'Homme
infamanl). Un religieux leur proposc ( de sc reconciler avec I· :::glise en Icur
fill aussi celie
prescnlanl la croix. S' ils acccptcnL ils
rcduisant Africains c\ Arncrindicils
scront garrotes avanl d'ctrc brides.
en cscla\'agc. pcrsecutant juifs c\ rnu
Deux malheureux. deja attaches de
sui mans, decrct:U1l la sotls-humanilc
nudes sur Ic bucher allume, n'ont pas
de 13 femme.
cu cctte ·'chancc··, CI devront sounrir
Cc qui
des heretiques et des apostats Pedro Berruguete. AUlodaftj presid6 par saint Dominique Vers 1495 Puintufe sur loite, 1.54 � 0.92 m Musee du Prado. Madrid ProJetable en transparent
passa en C:lsliJlc c\ en
leur agonie devanl Ie public reuni
Aragon aprcs la chute de Grenade
sous I·cstradc. Le premier aUlodafe
dans lesquelles les Indiens servent
en 1492. est cmblcmatiquc de [' into
de ce genrc cui lieu cn place pubJique
d'escJaves). Cesl vcrs celie epoque
In
a Seville en 1 4 8 1 . Si dans d'autrcs
qu'il prend conscience de
ceremonies
de la situation et convainc Ie cardinal
se
lerance rcligicusc de l"Europc de
Renaissance : il fUI en cfrcl decide de
on ne bridait guere que
I"horrcuf
chasscr du pays tOllS ccux qui refll
Ics livrcs censures, r Inquisition fit
Cisneros puis Charles Quint d'y menre
S
lout de mCIl1C plLt�ieurs milliers de
un tenne. L1 7i·es ",-h'e relation de III
lOllS les convcnis de fraichc date qui nc
vietimes entrc XV< et XVI<siecle.
d(�;}·'l"IIclioJl de;}· hules est ecrile it son
sc l110ntrcraicnt P.1S de bons croyants.
Aulrc type de reaction violentc
retour a Madrid en 1 540. II Y rcprend
L1chasscnux mauTCS CI auxjuda"isants
facc a l 'Autrc, celie dc ceriains colo
en les generalisa11l des tcmoignages
praliquCc :llors par I'lllquisilion fait
nisateurs a regard des Amerindiens.
des cruaules espagnoles dont I' auteur
a un antisemitismc asscz gene
Certes. la gravure est polCmique.
n·a pas toujours ete temoin, comme
fidcle
la volante dc Bartolome
la scene ci-dessous, rapPOl1ee par des
de Las Casas ( 1 472-1 566) qui, au
dominicains en 1 5 1 9. La barbaric des
nom de hI chrcticntc, denonce les
conquistadores nc servail en general
par I"inquisitcur Thomas de Tor
crimcs dc ses compalrioles aux In
qu'a montrer leur loute-puissance,
qucmada pour Jc couvenl de Sainl
des. Las Casas conna!t parfaitcmcill
mais leur pulsion de 111011 clait sunout
Thomas d ' A v i l a , represente un
son sujcl. A Hispaniola cn 1502
justifiec par Ie deni de J"hu1Tlanitc de
echo
ralise li'I cl aillcurs. Lc tableau de Pedro Bcrruguclc
( 1450- J 5(4), commande sans doUlc
1 i"
a Cuba vers 1 5 1 0, il a gere des
autodafe, En Espagne a cClle epoque,
puis
on aplx:lle (/1//0 dele ou aCle dc foi un
ellcom;emlll,\· (proprictes ;Igricolcs
J"AUlre, deni confirme par la confe
rcnce de ValladoJid en 155 1 .
rilucl de repentance el d' humiliation
mClle sous regide dU lribunal de r In quisilion afin de punir les herCliques et les apostats, La scene presidec par saini Dornini
a son rn:mte:m noir
ct olanc, lTlontre avcc une pedago gic dc la terrellr assumee les divers types dc pun it ions prevues, Lc saini, entOllTe d'assessellrs clericaux el la'ics, dOni run porte la banniere dll Saint-Orrice, pardonne
a un hereli
<jlte rcpenti, serrnonne neanmoins par un lllcmbrc de rOrdre, En bas
a droite, deux soldals, comrnandes par d'aristocrati<]ues cavaliers - car C'CSI bicn la puissance publiquc qui se charge des executions -, poussent devant eux deux prisonniers convain CllS dc crimc religieux. Ccs derniers portent pour penilcnce Ie ml/ bel/i/O
. ute des conquistadores aux Indes, illustration de la Ti"es breve relation C�rua ..._� r
de Ia destruction des Ifldes de Las Casas par Theodore de 8ry, 1613
n o uvea u ra pport a D i e u ? La persistance du Diet des Trois morts ill la Renaissance se preparer ill la "bonne mort
D
ANS 13 ctwpclle
saienl pouvoir I'\.�uire Ie temps de
Anonyme, Fresque du
privec des abbes de
purgatoire, ce lieu de sourfrance entre
enlre 1510et 1530
Saint-Riquicr. e n Picardie. une frcscluc real isec entre 1 5 1 0 ct 1 530.
Ie paradis et I'enfer inventc par les
intitulec Ie Diet des Troi:;
MOIu el
4,!7 (lexle oompris) x 3,60 m AbbiIye de Sainl·Riquier, pres d'AbbeviI,Ie Somma
theologicns de la seeonde moitic du
Projetllble en transparent
XII< sicde dans le(ltlel Ie juste ctait
Troi.�· Viis. rcprcnd un th�rl1C
I:wc de scs fautes terrestres, Une
classiquc de la liUcraturc rnCdicv;!lc.
sarte de "colllptabilitc de I'au-deli\."
til'S
Diet des Tmu morts,
Trois jcuncs seigneurs sonl arretcs en
s'ctait mise en place par hlquelle les
c:ldr.tns solaires de diverscs faclures
plcinc chasse par trois squclcucs qui
gestes (carcllles, penitences, pele
et des instnlmellIS de mesure apparte
les prcvicnncnt ; ''''cls comllle vous
rinages, messes) ou I'on s':lssociait
un temps nous fUmes
a la souffrance du Christ ainsi que
nallt a I':Islronome de Henry VIII). la musique (un IUlh ii la corde cassCe),
CI leis scrcz
comllle IlOLIS sommcs", ct les invitcnt
les bonnes actions, les confessions
Au premier pl:ln. il y a celie
� sc prcparcr a 13 mort. Celie frcsquc
et les dons i\ I' Eglise, pcrmellaient
masse infonne (lUi. regardee obi i
cst loin d' clre unique ct l' illlaginairc
d' obtenir plus vite la redemption, de
quernent depuis la droite du tableau.
(IU'clle porte demeure
Ires presellt
farron pratiquement contractuelle,
se rcycle ctre un criine. Holbein
tout au long du XVlc sicclc : il cst
L'achat d'indulgcnces, sortes d'as
rnaitrise p:lrfaiternelll la technique
figure par les danscs lI1acabrcs pein
surances pour I'au-deli\. proposees
mathcmatique de I' anamorphose etl..
les sur les murs de Uibcck. Paris.
par la papaute en (Iucte de reyenus supplemcntaires, entmit dans celie
met au service du sens de sa toile. La
Londrcs ou Bille. O'autrcs. gr.!vCes. not:tmrncnt par des artistes commc
logiquc, Ellc n'ctait cepcndam pas
celie de la corde du huh rompue est
lerron du cr-Jne :IIl:lmorphosC comme
Hans Holbein. p u i s irnprimccs.
du gout de tous et :llirnentail. en
celle-ci : 1:1 jeunessc. 101 richessc, Ie
connaissaicnt Ull cnonnc succcs de
terre d'Empire notamment, un certain
s:lyoir. Ie pouvoir ne som rien face
librairie, tout comme ces Arts de bie"
"anticlericalismc",
1II()lIrir qu'on lisa it cn solitaire ou, i\
a
Le t..bleau rCillisc par I'hms Hol
1:1 mort, Voir avec les yellx de la
foi (rnctaphoriquelllent iei pour Ie
I'insw,rdc LCormrd de Vinci, dans des
bein, pcintrc de cour de Henry VIII.
spectateur, changer de position par
eonfrcries dCdiccs,
semble i\ premiere vue cclcbrer
rapport i\ la wile). c'esl comprcndrc
I'amitic entre Jean de Dinteville
Lcs artistcs de la Renaissance se
(a
cel.., l11:.is c· est :mssi apercevoir. dans
voyaienl frcquemment commander
gauche), amb..ssadeur de Frllnce
Ie coin superieur gauche dll table:lu.
des fresqucs reprcsentant I'enfer,
i\ Londrcs, et Georges de Selve
(it
Ie cnlcifix qui :lnnonce Ie rachat des
Se preparer
a la "bonne mon" ctait
droite), evcque de Lavaut, lui :mssi
peches des hommes. Pour les deux
1:1 preoccupation de chacun d:lns
diplomate, II constilUe, comllle la
diplomates, scnsibles aux idees de
un univers oil la pcur associec
a la
fresque pic:lrde. une lent:ltive de
Luther (un livre d'hymnes luthe
culpabilitc du pechc s'clait inst:llice
represemer 1:1 foL c'esl-i\-dire rirre
dens cst ouven sur la table b:ISse),
durablemenl. Lcs racines de celie
presentable,
angoisse sont malaisecs
a rx:conrmi
L' o::uvre fourTnille d'objets, dont
la redemption P:ISse par la foi. non p:lr les aCles,
tl'e, II est certain que Ie Iraumalisme
Ie choix et 1:1 disl}Q.�ition ne doivent
Les Y:lnilcs du pcintre anonyme
de la Grande Peste du XIV' sicde,
rien au hasard. IcL toul forme indice :
de Saint-Riquier et de Holbein
011 plus d'un tiers de la population
de I.. jeullesse des commandit..ircs
TIe revClent donc pas tout
europecnne avait cte terrassC, ajouc
d':lbord (leur age - 29 et 25 ails - est
rncme signific:uion : chez Ie pcintre
un role dCtenninant, Et l:1 recurrence
indique pour Dime\' ille sur 1:1 dague qu'il tient i\ la main, pour de Sclve
allcmand, !'idee n'est plus de se pre
des episodes pcsteux jusqu'au XVI� siccle enlretenait 1:1 terreur. On
sur la Ir.mche du livre sur lequel il
ses pechcs, mais de vivre selon une
s'imaginait que Ie royaume des cieux
pose Ie bras droit). de leur richesse
foi vcritable, signe que Ie rapport
s'cloignait de Ia portce des viv:mts,
ensuile (Ie luxucux tapis d'Orient. les
it Dietl cvolue p:.rmi les clites 11 101
que les legions du di:lble ctaient
vctements de foumlre), de leur savoir
Ren:tiss:mce.
prctes i\ fondre sur I 'Occident et que
enfin. Nornbrc d'objels font en effel
I' AI>OC:llypsc Ctllil pour bientot,
allusion aux arls IibCraux du quad,.i-
Redige en 1 526, Ie testament d' Antoine Langlois, riche bourgeois
1'111111 la gcomctrie. I'arithmctique (a travers un tmitc d' arithmctique
de Pant in, pcrmet de comprendre
marchande), 1':lstronomie (un globe
comment les contemporains pen-
ccleste avec Ics constellmions, des
a fait la
parer a 1:1 "bonne mort"en rachelant
Vous qui esles oullrecuidiez
o folies gens mal advisees
plus briefvement que na cuidiez
qui estes du haul/ lieu privees
lelz cOme vous ung laps no fumes
Is mort an IOUS laps I'D espie
penses 8 Ia mort tres certainne
el letz seres oome nous somes
pour II'OUS OSIer du corps Is vie
et leschies /a joye mondainne
Nous II'OUS cJ8nont;ons loul pour voir
Vous qui etes oulrecuidants
o foIs gens mal avises
qu'iI vous convienl mort recevoir
plus br;evement que �s ne Ie pensez
qvi etas dv haul lieu pr;ves
� comme vous un temps nous fUmes
la mort en toul temps
pensez a /a mort Ires cor/aine
61 leis sarez comma nous sommes
pour vous 6ter du corps la vie
Naus vous denonchons loul pour voir quilz
IIOUS
coovienl morl rechepvoir
Adaptation du picard
loCUS
epie
el laissez 18 joie monda/ne
,,"..Dei> � .; uis Ie Moyen Age : une religion conlracluette �ir avec les yeux de la foi : Hans Holbein. O � V _ ,,"
Les Ambassadeurs. 1533
In Nomine Domini Anno ran 1526, Ie 13 decembre. Antoine Langlois sain {...J fit et ordonna son testament et derniiHe volante f. ..}. Item quand iI plaira a Diev de fdler de
ce
pauvre monde. it elit sa sepulture dedans
feglise de Pantin en la chapelle NoIre-Dame aupriJs de feu son pere el sa femme et pour
ce
faire. a donne
8
feglise dudit Pantin vingt-huil sous parisiens. Item dil el ordonna qu'apres son deces qu'i/ fut dit el celebre Budit Pantin trois services complets c'est a Sllvair pour son enterremenl une vingtaine de vigiles' et recommanda trois haules messes et dix basses. Item pour son obif! huil jours apres qu'iI pourra au/ant. Item au bout de I'an aulant pour a chacun desdils services quatre poin/es de eire pour bouter au/our du corps au de la biere. Item di/ qu'i/ fUl donne a lous ses Iil/euls el fil/eules vivants chacun cinq sous lournois. Item a chacune des confreries, aux Irepasses, au luminaire NoIre-Dame, el I'Hotel-Dieu de Paris et aux ladres de Pantin chacun cinq sous lournois. Item di/ et ordonna qu'i/ fUI donne pour I"amour de Dieu aux pauvres Ie jour de son obit qui es/le second service Ie pain de deux seliers de ble. Item dit et ordonna qu'i/ fUI dir et celebre audit Pantin lous les jours une messe du jour et faire memoire des trepasses un an durant qu'on appelle un annuel. Et quand on voudra dire la messe on sonnera une cloche
a
voleo et puis on tin/era les deux
grosses ensemble et puis, apres la pelite. tintersix coups Huile sur bois, 2.07 x 2. 10 m. Nalional Gallery. Londres
route seule. TeSl&ment d'Anloine Langlois. bourgeois de Panlln, 1526. service de documentalion de la ville de Panlin. 'vtgiIe : oI1ioe telebt"6 " Ia. weille d"une �Ie ,mportante. >obit : service retigieux oetebre au ben8fioe de rAme d"un 00Iunt.
formes et fraaures
Anonyme catholiQue. Lapt'ocessiM 00 18 Ugue enplace 00 Greve. , 590
Huile sur toiIe,1 .2.12 m
Musee Camavale1.
PailS
Pro/etl'lble en trllr'l,p�lrenl
Q
UAND il ccril en
passage de 101 spiritualilC aux mains
1 520 iI son ami Pierre
des marehandsd'indu lgences, Ie lexte
Martyrc d ' Anghicra. cOllscillcr
imprime se propagca comllle une
pour Ics Indcs de Charles Quint. Ie
tminee de poudrc. Luther n'eul plus
jcunc Alonso V:lldcs. sccrCwirc de
qu'a assumer sa posilion devant les
I'Empcrcur. cst proprcrncllI cho(ltiC par 13 brUlatilc des pro]XlS du moine
theologiens du papc envoyes pour
lIuguslinicll Marlin LUlher ( 1 483-
im l}()Ssible de revenir en arriere. Les
1546) vis-a-vis du parc. Dans SoL
lui donner la rcpliquc. BientOI. il ful feuillets pro-lulhcriells se muhiplic·
lellre. il cvoquc Ie debut de rcngrc
rem. La page de litre de ce pamphlet
nagc qui va :lbm!!ir au schismc cmrc
de 1521 montre un dominicain (lui, sous l'elllbicme de la liare pontill.
CCtlX que ron 1l':lppcllc pas encore Ics protestants CI Ics fideles du P"]:lC. Valdes r"ppone Ics cvcncrncl1\s a
cale. sermonne la foule ccpclldanl
S:l rnanicrc : un connil personnel
(ille ]'on vend des indlJlgcncescontre espcTes sonnanles cl IrCbuchantes.
"ur..i, cclatc cnlrc Ie dorninicain
Ces imprirnes ont eu un impact con·
TCfZCI. rcslXlI1!>ablc de la campagne d ' indulgcnccs lancec a Wincnbcrg
siderable sur les foules allemandes.
avec J"appui
ell! banquicr Fugger. ct
Frederic Ie Sage. Luthcr lint tete a
par la Ligue. L'ctal d'un boucher, des
Luther. La public:llion parec dcmicr
la fois au papc et a I ' ernpereur. Les
de " propositions" de rcformc de
consequcnces de ce gesle furent im
natltonniers (lui reparem tine embar calion. une I}()rteuse d'cau. une ven
Prolege par Ie prince de Wittenberg,
rEg lise ..umit mis Ie feu aux POll
menses : la chretienlC sc divisa enlre
deusc de soupe. offrent un cadre bien
drcs. C'CSI III line vision simplillee
refonnalCufS (Iuthcriens d'abor
anC(.-dotiquc a (.'Clle mobilis.1tion qu:tsi
des evencmerus : les arguments de
evangeliSles plus rJ.dicaux : anab: t ptis
s.'lcmle contrc les ennemis des catho
thodoxie calholi(lue. Les connits qui
duc de Mayenne (en annure). Ie duc
cc1:1t�renl ct la confcssionnalis;ltion
de Ncmours (Ie chapeau a la main). Ie
des Etats donnerenl I icu en Europe i\
docteur Rosc (tout de noir velu). tOUle
Lutheretaicnt bien plus thcoriqueset les critiques de la papautc bien plus profondes (Iue Vald�s ne Ie controil. Luther. professeur a I ' universile de
I(:S, calviniSIc.�, CIC.) C:t IIdcles a 1'01'
liques. Dcrri�re les chefs ligueurs. Ie
Wittenberg, avail devcloppe. a partir
de vcritables fracltlres confcssionnel
I:. ville est la. en arrnes : les citoyens,
de rexeg�se hUlllanisle des textes
Ic.�. L'une d'clles Inlversa la Fr:mcc
ccrtes. mais allssi les fmndscains (en
sacrCs. sa proprc vision de 101 religion
qui. de 1562
robes de burel, les dominicains (en
chretienne et I' avait exprimee lors de
gucrrcs de Religion.
]' examen d'tm candidal a la lll
a 1598, sombm dans Ic.�
Lc tableau anonyme du mtlsee
Les qmurc-vingH]uinze theses a dis
Carmlvalct lIlontrc unc procession
euler par I' impelranI. (lui attaquaienl
de la tigue, motlvemcnl politique el
noir et blanc), e\ meme des enfams cquipes de boucliers el d'cl>Ccs. Pour Iller I'ennemi dc Dicu.cn I'occurrence Ics "politi(IUes", ces homrnes dom
religieux qui regroupa les catholiquc.�
Ie seul tort est d'accepter de donner
des saints, la pmtique des indulgen.
frJ.n\,ais de 1576 i\ 1 594. Ven:tnt de
certains droits aux protestatHs du
ces. et impli(I Uaienl l' idee de graluile
rcglisc Saint·Jean (visible a I'arricre·
royaurnc, Ics ligueurs pmtiquent une
enlre ,mires la scolastique. Ie culle
d\l salul. auraient dfl reSler dans Ie
pl:tn). le defile passe SOliS Ie pavilion
marche riluelle (lui pemlet a chacun de
ccrcle universit3irc. lTlais un cditeur
de I'Hotci de Ville f)Our arriver en place deGr�ve. 11
s'oublier dans Ie groupe el. collective enfants Ix>ssedcs de Dieu ct celie des
public. Dans un contcxle anlideric:.1
collective a la(luelle les eatholiques de la Ligue ctaiem parvenus en 1 590
OIl les Allemands s'insurgcaicnl deja
envers les prolestallls. une fcroellc
de (lui ne comprend P.1S que c'cst Ie
contre les illlpols prclevcs par une
rcciproque. Depuis 1 588, Paris vit
Egtise jugee etr:Ulg�re el contre Ie
SOtiS tin rcgime de terreur inslaurc
Seigneur lui-tnenlC (lui frappe, p.1r la main des innocents et des s:tgcs.
peu scrupuleux Ics Iraduisil. les imprima el les diffusa dans I 'cspace
men!. en Dietl. L:t violence des petits moines n'cst cho<]uante (]u'aux yeux
1
F ...; ,;;, tispice d'un pamphlet anonyme contre _ la vente d'indulgences en Allemagne, 1521
La ..,ragedie lulherienne selon un secrelaire ....: _ de Charles Quint. 1 520 Ce que tu n'as pas appris de rno; jusque-ia a propos de I'origine et du progrJs f de /a secle lulMrienne qui s'est recemmenl developpee chez les Allemands, je vais
a
present Ie Ie decrire, cerles sans elegance. rnais tout au moins avec precision. mettant consciencieusement les chases en relation, lelles que je les ai entendues raconter de personnes dignes de credit [. . .}. Car 810rs qu'un certain dominicain prechait a Wittenberg. une cite de SaKe. st poussait les ci/oyens a aeheler des indulgences pon/ificales, sans nul profit pour lui-merne, if (aut /e dire, un moine augustinien, du nom de Martin
Luther, et /'auleur de cette fragedie, fil son apparition, pos siblement pousse par sa jalousie vis-a-vis du dominicain. 1/ commerlfa a pub/ier certaines propositions imprimees
dans lesquelles il affirmait que Ie dominicain attribuait a ses indulgences des eftets bien plus grands que ceux que /e pon/ife romain concMail reel/ement. Le dominicain ayant lu les propositions, s 'enflamma de co/ere
a regard
de /"augustinien et /a dispute entre les moines s'exaspera en raison des expressions injurieuses et des arguments prononces - run defendant son sermon, /'autre ses pro positions; tanl et si bien que faugustinien, avec /'audace caracterislique du meehant, commenqa a critiquer les indulgences papales, el a dire qu·elles avaient ete confiues non pour Ie bien de la chretiente, mais pour salisfaire ravarice saceroolale : et a partir de la, Ie moine en vint a discuter les pouvoirs du pontife romain.
larua d'AIIooso Valdlts, de Bruxelles. II Pierro Marlyre IfAnghiera. Ie 3' aoUr 1520. lirlle de ThD Portable RenaISSance Reader. 6di16 par James Bruce T05S al Mary Marbrl Me laughlin. New York al londfes : Penguin Books. 19n. traduclion Pascal Brioisl.
I
' a rtiste, Ie m a rch e, la co u r L'objet du contrat entre commanditaires et artiste : L 'Annonce faite a Zacharie
L
E contrm, signt par
ainsi que leurs attitudes ct leurs
Domenico Ghirlandaio
costumes. " de la maniere que I'on
en 1485 avec 1<1 famille Torna(luinci
a definie. el ce dans lOllS les details
Cl les pricurs de Sama Maria No
particulicrs qlli 0111 ete decides",
vella (el de l'l-Iopil31 des lnnoccn!s)
Dc fait. les trois brarl('hes du li
a Florence. donne i\ voir une figure
gnage Tornablloni-Tornaqllinci sonl
Domenico Ghirtandaio, 1485
F.eSQlI6 de la chapel� Tornaquinci
Eglise Santa Maria Novella
,
FIo.ence
Protetable en transparent
de rarlistc bien cloigncc de celie qui
bien la. Dans Ie grOllpe a droile de
cst la notre aujourd'hui : un crCalcur
Zacharie. par exemple, on idenlifie
genial. inspire ct indcpcndant. A la
un slatut nouveau qui les libCrait des
G i u l i a n o Tornabuoni. Giovanni
obligations des guildes, Ainsi. des
Renaissance. Ie!> artistes SOI1\ cOllsi
Tornaquinci (Ie conunanditaire).
Jeres avanl lOlLl COlTlllle des artisans.
homrnes comme Lconard de Vinci.
Gian Francesco Tornabuoni et Gio
Leur milieu origil1d cst cclui des
Raphael ou Titien, pmelll-ils tra
vanni Battista Tornabuoni, On cst
corporations. A cc litre. les comrnan
111 au cO!ur du monde de la banque
vailler dans plusieurs villes a 101 fois el s'affrallchir des regiemellls, Les
dilaircs sc considcmicnl en droil de
florentine que sign..lent les jeunes
preciser leurs cxigcnccs en tCfJncs
gens au premier plan a droite. peut
de rnatcriaux utilises. de d61ais. el
etre des commis, On voil ega1cmcnt.
Il1CIllC de sujcl.
]a pcinlure 011 de la lllusique. Car de
a la gauchc de l ' O!uvre. parmi les
L'AllllOllce /(lile (/ Zac/wrie fut
plus en pillS. la legitimation de l'Etat
membres de 1:1 famille. des individus
I'objet d'tmc IIcgoc ialioll cxlr�rnc
passail par 101 consommation osten
a robe sombre. ayanl "C(luis Ie Slatut
laloire. les cercmonies, spectacles
men! fllIiclc entre les trois parties
de prieurs,
avant la passation du contra!. Lc clan
Neanmoins. I 'artiste parvient.
des Tom;lbuoni-Tofllaquinci, rcpre
lOut en celebrant Iii gmndeur et Ics
scnte par Giovanni Tornaquinci (Ie
ambitions dll lignage et de I' institu
princes aV:lienl interet a s'associcr de grands noms de I':lrchilecture. de
el fetes, L'eslhetisalion dU l>olitique pennellait non seulement de desa morcer les contlits dans la vcneration COllllllune du Prince rnais encore.
chef du clan. signatairc du contra!),
lion ecc1esiastiqlle qui Ie financenl.
avait pour projct d'affirrner son pres
11 Illettre en valeur son attachement
tigc en renOllvelant Ie programme
die donllail les moyens (rune diplo
patriotique a 1:1 ville de Florence CI
iconographiquc de la chapclle fa
malic de la grandeur, La conception
son goOt pour la culture humanistc ct
miliale (ac(l uise au XW siccle en cchange du don :lUX Dominicains du
modcrne de I'artiste na(luit dans ce
Ie savoir nouveml. II associe en effet aux bancluiers et prieurs Ie monde
contexte. Mais peinlres et architectes
terrain sur leqllcl I'cglise avait ete
des philosophcs. On a identilic dans
elevee). Le theme de l'Annonce faite
Ie groupe du premier plan a gauche Ie
11 Zacharie (annonce de la naissancc
neoplalonicien Marsile Ficin. en ha
de son fils. Ie fUllIr saint jean-Bap
bit de chanoine. Ie poete Christoforo
tiste) flatte les valeurs farnilialcs
lui proposail Ie titre de peintfe de
Landino. en manteau rouge et foulard
des Torn:Hluinci p"isq"c cc saint
cour, Cclui qui I'avait peint 11 cheval
noir. Ange Polilien, prcceptcur des
etait leur patron. Ce choix presente
1l la bataille de M(ihlbcrg redoutait
enfants de Lauren! Ie Magnifi(lue. et
par l'echallge d'artistes entre cours,
y decouvrirent parfois des formes de dependance qu'ils prcferaient eviter. Ainsi, Ie Tilien choisit-il de refuser I'offrc de Charles Quint qui
moins Ie langage de la flal1erie que
Gentile de Becchi, Ie maitre de
famille des cornmanditaires:1 la ville
]a negligence d'lIn souvera in oublieux
Laurenl (ou ]>Cut-etre Ie platonicien
de Florence puisque celle-ei par1age
de ses dettes envers les ar1istes a son
ce mcme p;t1ron. Les prieurs. qllalll
Demetrio Greco), Le decor 1l1cme
service. Mieux valail eomplef sur les
de l'Annonce. un lemple orne de b:l
a eux. acceptcrent ces relllanieTllents
tailles. de cavalcades, de grotes(llies
cortlrtlandes fer11les et les paiemellls
par ailleurs I'avantage d'identifier la
a condition (lue les autorites de leur ordre soien! diJrnent mises en valeur dans Ie nOllve,1l1 programTlle. Le peintre. entin, disposait d'lIne marge de manO!uvre assez reduite : Ie con
ct d'inscriptions lalines, rellvoie au nouveau vocabulaire arlistique i\ la mode, Aussi Iconin que paraisse Ie contrat. Ghirlandaio n'a pas ete IIll simplc exeeutant : son t:llelll a pu
trat passe avec scs command ita ires
s· exprirncL Meme s'il dependait ega
dctennilwit les materiaux a employer
Icmenl elroilemenl de 101 corporation
(les "bons pigments". Ie bleu Olltre mer notaillment. les feui lies d' or Ires couteuses). les personnages 1l figurer
1l laquel1e il apparlenaiL D',mlres ar1istes de la Renaissan ce, en freqllenlant la cour, conquirelll
scrupuleux des corporations et des bourgeois,
,-_::u;n; contral h�onin entre Ie peintre Domenico I"
,
Le ignage Tornabuoni-Tornaquinci a ,'honneur
Ghirlandaio et ses commanditaires, 1485
Ce jour. Ie 23 oc/obre 1485, /e reverend Messer Francesco di Giovanni Tawf;, pr8senlement prieur de I'H6pital des Innocents de Florence, commande et conlie /a tache a Domenico Ghirlandaio de peindre un panneau que ledit Francesco a fait faire et lui a
donne : /edit panneau. Domenico devra Ie luipayer. Et iI devra peindre fedit panneau et Ie mettre en couleur de sa propre main, a /a maniere doni iI a ete convenu sur un papief avec les figures, et de la maniere que fan a delinie, 81 ce dans taus las details particuliers qui ant ete decides. Moi, Fra Bernardo, estfme qu'i/ est preferable de ne pas S8 departir de /a maniere at de la composition dudi! dessin ; et i/ doft mettre /e panneau en coufeur a ses trais avec de bons pig ments, 8t de la poussiere d'or sur les ornements qui Ie demandent, el avec toutes les autres cJepenses requises pour Ie meme panneau. Et Ie bleu devra etre un outremer de la valeur de quatre fforins ronce ; et if devra faire et delivrer Ie dit panneau dans trente mois .8 partir d'aujourd·hui. Et il recevra pour prix du panneau ici dikrit (et Ie tout sera fait aux depens dudit Domenico. tout au long du travail) cent quinze gros florins si moi, Ie susdit Fra Bernardo. je juge que Ie travail en vaut la peine. Contrat passe entre Domenic:o Ghirlandaio et Ie prieur de rHOpitat des Innocents de Fiolenca en 1485. tGlCte eM par lisa Jardine. Wanly Goods, londles : Mac;m;ttan. 1996. tracluclion Pascal
Brio's!.
GtCqIII du �emief plan - 1 Ie pI>iIoIqlIIe MarIie FICin (1\aI);I Oe�) . 2 Ie po$Ie CtIIisIoIofo l1lndino (mam u rouge .. 1ouI/I," naif) . 3 : """" PoI�ien. Ie pr/ieeplo<>r des enlilnts de ....8111 ... de M6cIcII · 4 . Gootikt Oe Becchi. mallie Oe Laur"'" (qui ... XUM __ LaoIIino). 011 Ie plakricien Dernelrio ..... •
....
Groupe de r.ni6le-plan (0)
Mcm/.Nes des _ TorMbuoni 81 Tor"""lUkld :
Giuliano TomabuOni. GicMInni Tor!\llQUind (lignala".
du conlral avec �). Gian Fl1InoetCO Tor",,·
tuonI. Gir:wanni Banisla TomabuonI
uvelles tech niques artistiques, nouvelle vision du monde La perspective lineaire selon Raphael : Le Mariage de la V;erge, 1504
L
O R S Q U ' I L rein!
Renaiss:mce. puisque les ROlllains
pour la chnpcllc d'unc
utilis'lielll pour leurs peinturcs rnurales
petite ville d'Ombric 1c k/ariage de
des constmctions en arete de poisson
III Vierge. en 1 504. Raphael Sanzo
conservam les angles visuels, selon les
( 1 483- 1 520) cst I' hcriticr d' :l.l1i5IC$
prCceptes d' Euclide. Ce que 1a Renais
(lui anI 111is au point dcpuis pres d"tm sicclc. en Flandrc c\ ell Italic. les
chitccte Bnmclleschi qui inilia Albct1i.
Retabte destin!!! a la chapelte des Albizzini, CaslelJo. Ombrie
�ise San Frarocesco. Cillil di Huile el tempera sur bois
1.70 x l . 1 7 m
Milan Projetableen transparent Pinaooteca di Bmra.
sance decouvre. notallllllem avec rar
K'Chniqucs nouvelles de ]a perspective
mais aussi avec Van Eyck. ce sont les
gcornclriqllc. POUT 1a conslmclion du
reglcs de la perspective linc:lire.
Lcs tcehniquc� de la sculpture aussi ont evoluc. L'cnsemble staluaire
tableau. coml11C pour Ie Icmplc ccntr.ll
D'autres proccdcs cocxistaient.
realise par Michelangelo l3uonarroli.
inspire de rcglisc elu Saint-Scpulcre
dit Michel-Angc (1475-1 564). dans
de JcmsalCITl qui en fonne Ie decor.
Ainsi la perspective allTlosphcri<[ue prenait ell compte ]"cp..1isscur de [ ':lir
RaphaCi suit les prtccplCS d'Albcni.
pour peindre les [ointains. EI1c fut
Florence. exprimc dc fa�on poignante
eel humanistc nmlhcnmticicn. auteur
dcvcloppec en Flandre bien aval\l <[ue
la fragililc du mondc. Lc� allegories
(rull \raiIC d' architecture. cxpliquail en
Leonard ne l'explique 11 ses clc.ves.
du Jour. de la Nuil. dc I'Aurorc ct
crrcl dans Ie De piclIIra qll'tlll tablc;Ul
la chapclle monuaire de... MMicis. !'t
dll Crepusculc mellenl en valeur les
Une queslion se pose pout1anl comment Ie public a-t-il acceptc la
ligures dcs dues decCd6.... L'artisle fait
de rayons lumincux inlcrccplcs par un
nouvelle vision du rnonde qui redui
plus qu'imilcr I'Anliqllite. II jOlle sur
plan. Au premier plan. Maric ehoisil
s:lit Ie divin
:I
Ie non-fini. rcproduit dans la pierre b
Joseph. Ie selll donI Ie r.J.lllcau ail flcuri
l'Homme ? II sc peUl que rcvolution
�Iiqucsccncc des chairs vicillissantcs.
repose sur Ie principe d'unc pyramidc
il
la perception qll'cn
p�ml1i se, .. Ilombrcux prClcndanls. et ce
11 l'ccuvre ait ele favorisec par la cul
clagcrc Ics poses. allonge les mcmbres.
demier lui pas!;C l'anneau nuptial. La
tUfe des commanditaircs bourgeois : Ie
oovram la voie au manieri�me.
disposition des personnages redouble
negociant apprcnait
il ['ecole et 1"1r 5.1
rcspace circulairc du temple. La laitle
pratique quotidienne 11 mesurer. j:llI
des s i lhouettes plaeces aux second
ger. campier. II appreciait sans dOlile
el troisicme plans rcspecte une regIe
bcaucoup une sensibilite
h:lI"lTlonique. Le pavage de la place
compClences metrologiques. Dcpuis Ie
constnJil 1a profondeur par des lignes
debut du XV' siecle, la diffusion des
fuyantes convcrgentes qui aboulisselll
o:uvres a cgalelllelll transfonltc Ie re . gard des cOlllempor tins : it I' cJXXIlIe de
la plus proche du sol plan est plus dense que
Raphael. la perspective cst un langage
transparente et legere. Pour les objets grands
au centre de I·edifice. La perspective n'est pas. 11 pro premenl parler. line invention de la
anisti<[ue largement panagc.
La perspective atmospherique selon ....... r
Leonard de Vinci
De foute evidence, la partie de fatmospMre Ie reste. et plus elle s'eIiNe, plus elle devient et eleves qui sont a quelque distance de toi, leurs parties inferieures ne seront pas visibles, car la ligne suivant laquelle tu pourrais les voir
LaNuit,
sculpture du tombeau de Julien de Medicis, Michel-Ange,
1---" 1526, marbre, L
=
1,
Lorenzo, Florence
devrait traverser la portion /a plus epaisse et dense de /'air. Mais les sommets de ces hau teurs se voienf suivanf une ligne qui - encore qu'en partant de ton eElil, elle traverse une atmosphere plus dense - acheve sa course dans une atmospMre beaucoup plus rarefiee qu'a sa base, du fait qu'elle aboutit au sommet de /,objet vu. En consequence, plus Join de toi cette ligne s'etend d'un point a un autre, plus la subtilite de l'atmospMre se modifie. Done,
6
peintre, quand tu figures des mon
tagnes, aie soin que de colline en col/ine, les bases soient toujours plus pales que les sommets .. plus tu accentues leur eloignement, plus tu les feras pales : a mesure qU'elles s'ele veront, elles reve/eront leurs vraies ormes f et couleurs. l�rd de Vinci. Camels. manuscril 2038. Bibtiolheque nalionate de France. PariS.
folio
I Sr.
lies voies de I'arch itecture Grammaire et syntaxe architecturales : Ie Tempietto de Bramante
L
ES premiers hu
A 101 grammairc des ordres corrcs
mani�tes en etaient
IXlndail une synlaxe dcs edifices. Cinq
convaineus par les mines antiques.
genres reconnus dans l'Anliquite per
nombreuses en Italic surtout
menaient, l"lr COl11binaison, de realiser
rar
10Ules les crealions
age d'or
dc Iriomphe, la basilique, le Ihealre. le
� Venise en 1 4 1 0 de
San Pielro in Monlorio, Rome
Prolelable en Iransparenl
a I'anlique : rarc
chitecture avait autrefois connu un redcco\lverte
Vers 1509
lemple droit el Ie templc circulaire.
deux manuscrits complets du De
Lc Tempiello, drcssc par BTilman
jOller sur la correclion synlaxique, ou
Arc/tilectllr(/ de Vilruve, ingenieur
Ie ( 1 444- 1 5 14) vcrs 1509 sur Ie sile
dilater les motifs, et plulot respecler
romain dll [
de San Pietro in Monlorio
a Romc,
Christ. offrait une thcorie COlllp1(�tc
rcleve preeiselllenl de ce dernicr gen
l'harmonie geomctri(lue ? I3ramallle choisit la seconde solulion. preuve
pour cela, 1I1alheureusemenl sans
re. Le cylindre cenlral. caiffe d'une
que la vision humaniSle commcnr;ail
aucune illustration et en des Icrmes
coupolc, se trouve entourc d'un por
a clre concurrencce par une vision
� illierpreter. 1 1
lique circulaire donI I'ordre dorique
harrnoniqlle autonome.
fallul donc dccoder I e langage des
parf:lil (colonnes lisses � chapileaux
Lc statuI de rar(�hilecte, cn toUI
wines. Le Colisce permellail ainsi
simples, frise ; ) triglyphes CI melopes)
cas. fUI lotalement Iransformc par
a dmcun de
exprirnait la force de saint Pierre
les nouvelles praliques CI Ie modele du Ihcoricien offer! par Vilruvc. Le
techniques difficiles
de definir prCciselllenl
ses ctages ce qu'elaienl les ordres
supportant Ie mmlyre. On sail qucce
dorique, ionique. corinlhien el corn
lemple, inspire Sims doulc des dessins
I>osile.
de Leonard de Vinci. aurait del
ctre
mailre d'ccuvre mediev31. qui coor donna 11
les divers corps de metier
La grammaire des ordres. qui
entourc d' un cloilrc circulaire piulol
ayam leur expertise propre, fUI relll place par un pcrsonnage au savoir
dcfil1iss:lil les Iypes de colonnes,
que de 101 cour rectangulaire acluclle.
de frises, d'entablemenls el Illcme
Mais Ie projct ne ful jamais achevc.
humaniste, dont I'aclivite relevail
a une
nOlamment en raison de conflils
des arts majeurs. L'archilecle de la
rappareil des 1I1Urs, renvoyail
symbolique et ; ) des usages precis. [I
Ihcori
Rcnaissance devail savoir choisir
ctail donc itlllXlrtant de Ia cOlllpren
rensemble. Lc Tempiello. a vrai dire,
les rnateriaux, gerer I' approvisionne
avail pousse l'archilecle jus(lu'aux lil1111es de son savoir el I'avail con
de nOllvelles machines et eoncevoir
la Laurentienne de Florence, lieu
Iraint a certaines acrobatics. Ainsi, la
l'edifice scIon un plan precon9u.
destine a la rcnexion savanle, devail
frise intcrieure el la frise cxlerieure
L:I negociation sur maquelle, plus
se pi ier aux regles du ioniqlle, alors
du porti
adaplce a la complexitc techniquc du
qU'un patais conIIne celui d'Urbino
iI 101 magnificence dll co
" fenner" la seconde, nccessairemenl
manditaires. Ce syslcme n'3v:lit-il
avail droit
men! pour lenir les delais, conslruire
lemps, rencontrait la favellr des com
rilllilien. landis que Ie premier clage
plus longue que la premicre ? De
pas pcnnis de br ltir des ehefs-d'ccuvre
du palais des Mcdicis se devai!. par
vail-on r:youter une mctopc. CI ainsi
comme Ie dome de Florence '!
convenance, d'elXluser la rusticile du slyle 10scal1. A I' intcrieur de cha(IUe ordre, Vi lruve irnlXlsait plusieurs reglcs Slric les. donI celie de la correspondance qui voulail (11lC ta taille de chaque pallie d'un batiment soil en raplXlrt aVL'C Ie lOUt. Celie notion de module dClenninail par exemple les dimen sions de la base, dll flit el du chapileau de chaque colonne, mais aussi Ie plan d'un edifice. Ainsi.
a San Lorenz.o
de Florence, Filippo Brunelleschi ( 1 377-1 446) UliliSil-l-il Ie carre de Ia croisee dU Ir..IIlSCPI pour dimensionner I'ensemble de I'eglise.
O"'m
Signification
Caractare
Age de " histoire Motif.
Tosean ou
$o/idite
Uri/ire vi/ale
Age de p/omb
Fo".
Mililaire. viril, aelif Age du fer
Bossages. laille brule
ruslique Dorique
Triglyphes, painles. buehranes
lonique Corinthien
Harmonie. douceur.
Feminin. savant.
sagesse
con/emp/atif
Richesse
Profusion de fa
Age d'argent
Volutes, arrondis
Age d'or
Feuilfes d'aeanrhe
Genese
Corinthien + ionique
nature
Composite SynlMse, alliance
Melange
,.....G..rammaire des ordres vilruviens graves sur bois par Jean Goujon dans la traduction du De Architectura par Jean Martin, 1547
l- -,u�n!.J.Quveau statui pour I'architecte A celie cause, iI semble que celui qui veut faire profession d'archi/ecture, dolt etre exerce en chQcuno do cas parties : i/ est done besoin
qu'i/ soit leUre. expert en portrait, savant en geometrie, non ignorant de /a perspective. bien instruit en arithmetique, ayant connaissance de plusieurs hislaires, diligent en /a lecture des philosophes. exerce en musique, pratique en medecine el aux traditions des Jurisconsulles, puis tant usile en astra/ogle qu'iI ait inrelligence du cours el du mouvement des cleux. ArChitectvre OIJ Art de bien basti" de Marc Vitruve �Iion, auteur ramain antique. mis de latin en fra�is oar Jean Martin, seeretaire de MOO!;E!igneur Ie cardinal de LerlOnoourt. Paris. 1547, Ecole nationa� superieura des Beaux·arts. manlJscril LES 1785.
LAnN OU COMPOSHE
m us l q u e une evol ution atyp i q ue Une piece religieuse polyphonique pour la devotion privee du Prince
P
1::t
Pour donner une unitc 3ux cinq sections
Renaissance. 1:1 lTlusi
chantCcs a des morncllIs differents de
ARM! Ics :u1s de
Kyrie de 1'Av9 marls s'ell�. Josqui� des Pres 1518·152Q Livre de messe de Frj\d8ric Ie Sage. due de Saxe Folios 29v et 3Or. manuscrit 3
a
que a connu une evolution originalc.
la liturgic. Ie cornpositeur recourt
D'abord, lcs innovations. qui conccr
lll1e Tllclodie eonnue de I'asscmblee des
nCI\I surtout [a polyphonic. vicnncnt
fidcles. lei. Josquin s'csi inspire d'une
avant lOut de Flandrc ct non d'italic.
'Ultienne a la Vierge donton s..1it qu'clle
L.1 cour dc Bourgognc ct celie des rois
etait abondarnrnent chantCe i\ divcrscs
de Fr:.mcc sc SOl11 arr:lchc Ics lalcnL..
occilsions du calcndrier liturgique. Un
des compositcurs de I'ecole nordiquc
auditcurdu dcbut du XVI' siccle pou
11 11
Guillaume Dufay. Johannes Ockc
vail l"idemifier sans peine. La melodie
populaires. Surtout. clle boulcverse
ghcm. Josquil1 des Pres Cl d'aulrcs.
cmpmntCc eSI mise en evidence IXlr sa
la manicre de praliquer ]a rllusique.
Pour1anl. leur production s'inscrit :lussi
posilion dans I:t tmme vocale. Celle-c!
L 'ell/alJ/ IJrO(liglfe chez Ie.\' cOlfrti
dans ulle tradition.
Atelier de Petrus Alamlre. Malioes. Flandre UnivefSite de Thuringe, I�na Projetable en transparent
Venise au XVI' siccle. participe la diffusion dc genres musicaux
se distingue nettcmcnt de cc qu' elle
.wllle.�. qu'un artiste flamand a situc
Lcs Prince.... :limenl acqucrir. plutol
deviendr:t vers la fin du XVI' siecle:
dans un cadre parisien (on reconnail
qu'une p:U1ilion imprimec. un manus
la clc de vOlUe de la constnrction po
Notre·Damc i'r. l"arricre·plan) figurc
cTil sublilclTlclll decare qui rchausse
Iyphoniquecst la voix de"tenor".cclle
en fait une allegoric des cinq sens :
encore plus 13 spkndcur donI line
qui porte la melodic. Les trois autre...
la scene illuslre ]" usage feslif de
composition polyphoniquc s' cntollrail
voix s'articulcnt autour.
partitions nouvelles. plus legercs. qui
au XVI< siedc. Ceilli de I'AI'e /IIl1r;s
Relevant d'abord des mathernati
ne neecssilcnt pas de lulrins et oit les
sle/l(l, qui rclcvcdc la messc polypho
'Illes et de la thcorie de I' harmonic, la
parties des differenlS instmrnents (ici. Ie lulh ct la flute) sont distinguces.
niquc.genre lypi{[lIC de Ia Rcnaiss..lncc.
Illusique cst. dans un premier temps.
a ctc realise a Malinc..... en l-landre. d:Uls
assez peu en prise avec I' humanisme
I'atelier de Pctms Alarnire. pour Ie due
car elle n'a pratiquelllent aueun mo
de Saxe Frederic Ie Sage. II tcmoigne
dele :mlique
11
COUT. en la rapprochant de la poCsie.
la fois du faste des productions de
11
illliter. Lot culture de
la musique de com et de la peren
va pcrrnellre aux musieiens de rede·
nile de certains uSilges. Par son fonnat
couvrir (voire de fantaslller) les mo
d'abord : celui d\m livre de chccm.
dCles m:tnquants. Ainsi. la musique
c'cst-i\-dire d\m livre suftisamment
mesuree
grand pour penneure a un ensemble
Claude Lejeune a i' Academic royale
vocal de lire les nOles du m:muscrit
de Charles IX, imitait les rythmcs
pose sur lin lutrin. P;lf Ia disposition dc.."
en daetyles el spondees de l:t lilte
(Xlrtics vocalcs ensuile : Ics qualre voix
rature latine. L'auleur pensai! avoir
sont presentees sur Ic.." dcux P.1ges (s..1ns
retrouve dans les modes mcdievaux.
quoi. il �rail impossible de realiser la
tel Ie "sous-phrygien". la magic dcs
a
Anciens. L' :meedote r:tpportee par
gauche. Ie "tenor" en b.L" a gauche :
Arthus Thomas reprend en realite
polyphonic). Le "superius" en haut Ie "contrctenor" en haul
a droite et
a
I'antique. eomposCe par
Ie
la legende de Timothee qui. par Ic
"b:.L�us·· sur la mCllle page. Une telIe
son de sa nnte. inspirait a Alexandre
disposition rctlcte une manicre nou
tantot I'enthousiasme guerrier. tanlol
velle de composer. Mais une grande
l'amourel la voluptc. En rapprochanl
(Xlrt du repertoire resle tradit.ionnelle :
l:t musique des lellrcs. on donnail
Ie genre liturgique de la I1lcsse a ete fixe
:tux lllusieiens. toujours suspeCtS dc
(. au Moyen Age. av'C
n'ctre que de simples pratieiens. un
5..1
composition
en cinq mOUVCITler1ts : Kyrie. Gloria.
stalll( enviable.
Cre(lo. Sallcllls. AgIIII.� Dei. L'inno
Les memes eompositeurs pou
vation fmneo-tlamande a reside dans
vaient ccrire pour la eour ct pour la
la complcxification dc la polyphonic.
ville. L'imprimerie musicale, nee
La edecouverte des modes musicaux
r � J :::" ai quelquefois oui" dire au sieur Claude Lejeune qui a, sans !aire tart a aucun, de·
vance de bien loin tous les musiciens des
siecles precedents en /'intelligence de ses
modes, qu'il lut chanM un air (qu';1 avait compose avec les parties) aux magnificen·
ces qui lurent laites aux noces du feu duc de Joyeuse f. . .J. lequel, comme on I'essayait en
un concert qui se tenait particulierement, fit met/re la main aux armes a un gentilhomme qui etait la presenl, el commenya ajurer tout
haul qu'i1lui erait impossible de s'empecher de s'en aller batlre contre quelqu'un ; et
qu'alors an commen�a a jauer un autre air du mode saus·phrygien qui Ie rendit tran· qUil/e comme auparavant .- ce qui m'a eM confirme encore depuis par quelques·uns qui y assisterenl.
Arlhus Thomas. sieur d'Embry. Phi/ostrate. 1611. cit(i Les Acad6mies en France au XVI' si6cle. traduil de I anglais par Th.Chaueheyras, Paris: PUF. collection Questions. 1996. dans Frances Yates,
"
La
usique courtoise
L 'Enfant prodigue chez /es CQurtisanes,
,"""";;;;,anonyme flamand du XVI- siecle, huile sur bois, 0,89 :
x
1,30 m, musee Carnavalel, Paris
' esprit scientifi q u e de l a Rena issa n ce L
I/OI'(IC) ou encore de
A revolution scien
I' on cnregislrail les temps de re;lction
rieusemcnt (les
t ifiquc cst gcncralcmcnt
joua sans doule iei un role dClemli
la Irajecloire des pl:lllctes, mellent
considcrcc COlllmc ! " apanage du
nanl. Cel1cs il 6tail vain dechercher iI
en cvidence les failles du syslcllle
XVII' sieclc. a ['originc dc 13 philoso
tr;lnsformcr retain (Jupiler, selon les
antique decrit par Ptol6l11ee. Sur
phic experiment ale. 5i ron concede
termes des initi6) cn argent (Lune),
cClle basc, Copernic remel ell cause
it la Renaissance d':lvoir abritc la
ou Ie cuivre (Venus) en or (Soicil),
Ie gcocemrisme el construit ses tables
revolution copcmicicnnc. (l ui mit rin
certcs la fonte oxydce d:111s une cer
astronomiques sur I ' i dee que Ics
au gCoccrllrismc. on nc lui rcconnail
lainc fonlaine de Hongrie ne peut en
plancles, y compris
gucre d'autre percee fondamcntalc.
aucun cas sc transformer ell cuivre,
amour du solei1. Lcs conclusions de
la terre, toument
Pourlant, 13 science classique repose
Pamccise faisait sans doute trop con
sur Ics recherches de cellx qui. aux
fiancc
a des tradilions manqualll de
I'astronollle 1X)lonais IlC seront que peu reprises au XVI" siccle, sauf par
siccics precedents. onl fait cvolucr
fondemenl. Mais ses recherches sur
les Anglais. Thomas Digges ( 1 546-
praliqucs c\ theories.
les "sympalhies" cntre Ie corps hu
1595) fut de cellx-liI, mais il avanlfa
main el la nature dans la signification
de surcroit ridce quc Ics ctoiles se
On doit IOUI (!"aboTd aux huma
a des distances variables
nislcs la rcst
du nom des plantes ou ['aspeci des
lTOuvaien(
I' Anliquile. La physique d' ATistotc.
mineraux firent grandernent avancer
dans un univers infini, D igges el
13 geometric d' Euclidc. ]' astronomic
les connaissances sur les propricles
Copemic n'Claicnt pas les seuls 11 leur
de Ptotclllce, 13 bolanique de Diosco
chimiques des clcments,
cpoque a entrelenir la conviction que
ride ct la mcdccinc de Galien ctaicnt
Paradoxaleme1ll, seienceoccuhe,
les phenomcnes
ccrtcs connucs au Moycn Age. mais
magic CI bricolages d'artilleurs ac
ma[hcmatisables, c 'esl sans dOUie un
Ires imparfailcmcnL [k plus. certains
eouchcre1ll des pratiques seie1lliri
autre apport de 1:1 Renaissance que
ilUleurs, les rn:llhcmaliciens Pappus
des siecles suiva1lls, Sans Tartaglia e(
d' avoir nourri celie croyance,
ou Appolonius p:lrexernple, rcs[aienl
ses recherches sur la trajectoire des
;\ red6couvrir. Le [ravail des col
boulets, poilll de Ihcorie galilecnne de
lectionnellrs et des philologlles mit bien[ot
a disposition d:!s savants des
[extes
1:1 chUie des corps : sans les lravaux de Paracelse, poilll de Lavoisier. Autre (rail de ['esprit scientifi
Comllle dans d'autres domaincs,
na(ure, Andre V6sale ( 1 5 14-1 564) en
les hommes de la Renaissance ne se
mCdecine, comrne Leonard de Vinci
a imi[er les
avant lui, en fUi Ie fervenl dCfenseur.
bornercm eependan[ pas
HIIII/(m;
fispice du De Humani Corporis Fabrica
F(I/)ric(I
Anciens, lis innovcren[ notarnrnen[
Son De
en sortanl de 101 relatiOll au livre pour
( 1 543) loue. des Ie frontispice. les
cherchcr d'llls I'experimcn[alion c[ , [ observation, les rcponses aux pa
venus de la disscclion ana(omique
radoxes, aux erreurs ct aux cnigmcs
it B; i Jc en 1 555. Lc medccin beige ne
16gues par leurs predcccsseurs, Ainsi, au contact dll Illondc des
rejc(ail pas pour au[an( les theories de Galien el d'Hippocr.l[e qui rcposaiellt
:llchimistcs ou de celili dcs artisans
sur 101 Iheorie des hUllleurs. lllais il
voire des artilleurs, naqui[ Ie gail! de
ouvrail avec scs conlemporains, Ie
cenaills s:lvanls pour I'expcrimenta
Fram;'lis Ambroise Pare ou l'l[alien
Corporis
F
I--';';;Jde Vesale, version publiee a Bale en 1555
cn public, dans une version pubJiee
tion, Des hOlllmes comllle Leonard
Bartolomeo Eustachio, la voie (['une
de Vinci. Tartaglia (d:lIls le domaine
chirurgie qui rendi( rapidelllent bien
de l'artillerie) ou Th60phrasle Bom
des services.
b:lsl de Hohenheirn d i t Paracelse
C'es[ encore l'observation qui
( 1 493- 1 5 4 1 ) , estirncrcn[ que la re
pousse les astronollles des XV" ct
it aller :Ill-de!:) de la
[>Clition d'un phenomcne mesurable
XVI" siccles
dans des conditions precises pouv:lil
Iheoric plolcma'iquc. L:l C:U1ogl'aphie
cOllstiluer la b'lse d'un savoir. L.l pra
syslcmatique des c[olles, necessaire a
tique alchimique au sein de laquelle
la navigation, I'elude des COtllC\CS el
I'on calculait les doses de proouils el
de Cel1ailles c!Oiles apparues myste-
BibiioltJeque des Arts Deeoratils, Paris
C'est une merveille de la nature [qu'un] metal qui preexislait perisse et qu'un autre metal se forme. Cela fait d'Arislote, avec toute sa philosophie branlante, un sot. Car en verite, lorsque les paysans de Hongrie trempent la fonte de fer a la bonne saison dans une certaine fontaine, appelee generale ment Zifferbrunnen, elle se consume en rauille, et quand ensuite on la refond dans un fourneau, elle se transforme bient6t en pure Venus!, et jamais plus ne redevient fer. Pareillement, ils tirent de la montagne appelee Kuttenberg un lixiviat de marcassites, dans lequel le fer se transforme instantanement en Paracelse : aux fron tieres de I'alchimie. I'experimentation Paracelse, Le Livre des philosophes.
1520. dIll dans The HertnetN; and
Venus de haute purete, plus ductile meme que les naturelles, Ces choses, ainsi que d'autres semblables, a savoir Ie changement d'aspect d'un metal en un autre, sont mieux connues des hommes simples que des sophistes. Elles sont d'ailleurs presque ignorees, a cause du remarquable mepris des ignorants, mais aussi en partie a cause de la comprehensible jalousie des artificiers [ . . . J. Encore que bien des artistes du passe fussenl desireux de cet arcane, et
Alchemical Writings of Paracelsus lhe
I'eussent recherche avec la plus extreme diligence, bien peu d'entre eux par
Great. 6dM at traduit eo angtais par
venaient, a force de soins, a en parachever la preparation. Car la transmutation
A.E. Waite. JilmeS EttiOtt & CO: londres. 1894. traduction Jean·Jacques Briois1. 'Venus .. cuivr9 "Jupiter,. etain 'lune " argent
d'un metal vii en un metal noble est pleine de difficultes et d'obstacles, comme par exemple la conversion de Jupiter2 en Lune3, ou de Venus en 501ei14. Peut etre est-ce a cause de leurs peches que Oieu a voulu celer aux hommes les prodiges de la nature.
'SoIeil " or
L'anatomie etait trailee avec tant de negligence dans I'endroit ou nous etions formes qu'il fallait aller voir ailleurs pour faire renailre heureusement la medecine. Ainsi moi-meme me suis-je entraine sans etre du tout guide, a Andre Vesale :
dissequer des creatures brutales, et a la troisieme dissection a laquelle j'as
I'observation
sistai (il s'agissait, comme cela elait la coulume en ce lieu, essentiellement de
du corps humain
mener I'etude des visceres) je fus amene, encourage par les etudianls et les prafesseurs, a executer une dissection publique si precise qu'elle depassait
Andre Vesale. pre/ace du De Humani
Corporis FaIXica. tS43, traduction Pascal Briois1.
de beaucoup les exigences que I'on pouvait avoir a mon egard. Plus lard, je tentai une seconde dissection, mon dessein etant d'identifier les muscles de la main et de realiser une analyse plus fine des visceres. Et je menai cette lache
a bien, saul pour huit muscles dechiquetes de l'abdomen que je mis dans Ie mauvais ordre, alors que pourlant personne ne m'avait jamais montre comment fonctionnaient les muscles ni ne m'avait explique comment identifier les os, Ie reseau des neris, des veines et des arteres.
En notre age, un esprit tres rare (decouvrant les erreurs continuelles qui ne
cessenl d'apparaitre au til du tem ps, sans pa rler du monceau d'absurdites que I'on trouve dans les theories des universitaires, absurdites qu'ils onl €lIe forces d'admettre afin de ne pas confesser la mobilite de la terre) a, par de longues Thomas Digges et la revolution copernicienne
etudes, une pratique douloureuse et une grande inventivite, presente un nou veau modele au une nouvelle theorie du monde, en demontrant que la terre ne reside pas au centre de I'univers mais seulement au centre de notre monde mortel ou �Globe des elementsM, qui est environne et enclos par Ie cercle de la lune et par celui de la mortalite des choses, II a monUe egalement que ce
Thomas Digges, A Perfecl description
of the Celestial Orbes. London. 1576. traduction Pascal Briois1.
monde est chaque an nee transporte en une ronde autour du solei! qui, tel un rOi, regne au centre de toules choses et dicte les lois du mouvement, disper sant spheriquemenl ses rayons glorieux de lumiere au cceur du temple celeste et sacre de la nature. Et la terre elle-meme est I'une de ces planetes dont la course particuliere est de vingt-quatre heures autour de son centre, ce qui explique que Ie solei! et Ie grand globe des etoiles fixes semblent tourner autour de nous alors qu'en realite ils restent fixes. Les sens des hommes mortels sont abuses au piuS haul point mais la raison et Ie discours penetrant de I'esprit ont decouvert ces choses a Copernic, et il a voulu apparemment delivrer ce savoir par des demonstrations mathematiques au monde entier.
a m eli oration d es tech n i q ues
Huile sur bois O.83 x l . 1 4 m
Musee des OHices. Florence Proletable en transparent
L
E rcnouvcau des machines au QU:lttro cenla s'cxpliquc en panic par la dcmalldc de rna in-d'cctlvrc conse cutive 1\ [a reprise cconomiquc ct au delle;, de bras Iie a 13 Grande Peste. Pour faire face a la dcmcsurc des chanticrs urbains. :l U X problemcs d'alimentation en cau. i\ la dcrnandc de ['artisanat. ct bien sur aux besoins rnilitaircs. il fallai! miliscr des ruses mCc:lI1i qucs . Lcs innov:ltiollS miscs en (XlIvrc furent de plusicurs ordrcs : ['uti lisation de matcriaux nouveaux. camille racier. pour les rcssorts. la rencxion sur Ics frOltcrncnts c\ surtout ]' agcncclllcll! combinatoirc de dispositifs simples comllle Ics SYSICIllCS 1 1" cames ou Ie sys\crnc bicllc-rnanivcllc. La filicrc rnct:lliurgiquc pcintc vcrs 1 550 par Henri Patcnir (ou Herri med de Blcs) rend hommage a la complexite de I' activite siderurgi que dans b premiere moitic du XVI' siecle. Au premier plan du tableau. on voit des hommes et des femmes extrairc Ie minerai de fer de minicres. Ce minerai. mis en tas il ia brouette. cst ensuite lave par Ull "patouillet" portant tablier et bonnet rouge. puis transforme en gueuses de rOllte dans Ie haut-fourneau situc au deuxieme plan. La grande roue hydraulique alimentee p:lr une conduite forcee anime des soufnets qui permettent d'obtenir les I 500°C necessaires a la fonte. A gauche, des forgerons battent une loupe de fer. Leur forge cst clle 'Hlssi mecanisCc puisque les sourflets et certains mailkts sont entraines p:lr des systcmes a cames. Nous sonunes iei en presence d'un
systcme en deux temps (ronderie et atTinerie), dit "indirect", qui permet alars la production en masse de fer aciere. Les imposantes annees de la Renaissance dependaienl de cette lechnologie. La scie meeanique de Francesco di Giorgio Martini (copie par la suite par Leonard de Vinci) cst un bon cxemplc du systcme biclle-manivclle clabore a la Renaissancc. La roue de moulin entraine line mani veJJe qui. a son lour. aclionne line biclle cl une scie. cependant qu'un pelit chariot pol1anl le billot 11 scierest entrainc et empCche de rcp:u·t ir en arriere par un systcme d' echappement. L' encrgie hydrau lique. il ia Renaissance, etait asscrvie a de multiples engins indus triels : pompes de mines. SYSlemcs d'al iment:ltion en cau 011 d':IssCche ment de marais, moulins divers (a ble, 1 a poudre ou : soie), scies. tours de menuisicrs Oll d' arrnuricrs. martinets ct sourncts de forge, etc. La lTlecanisation de nombreuses aClivites permit aillsi de multiplier les objets ct de faire baisser certains eoilts. Lcs arts du feu connllrcnt ega lernent leur revolution. Dc vcritables dislricts pl'oto-industriels develop rerellt aillsi 1a verrerie (Murano). 1a cerarnique (Majorque ou Faellza). et aussi I' arrnelllent en fer aciere (Brescia ou Solingen), les canons de bronze ou de fonte (Tyrol. Florence. Paris. elc.). Dans ccrtains cas. l·encouragement de l'Etat joua un r6ledelenllinant. Ainsi Henry VIII tit-il venir des spCcialistcs normands dans Ie Sussex. auxquels il octroya des concc.<;sions atin qu'ils construiscnt des hauts-foumeaux.
Toujours. c'est la reneontre entre des ingenieurs de talellt (T:lceola. Brunelleschi. Leonard de Vinci ou Francesco d i Giorgio Martini 11 Florence par exemplc) ct des invcs tisseurs eciaires, publics ou prives. qui dctermina le� petites revolutions tcchllologiques de 1:1 Renaissance.
C r
uis d'une scie hydraulique a partir du Traite d'architecture
'""_..... et des machines de Francesco di Giorgio Martini, vers 1490
1�+H-+---1c--H--- �. systeme d'khappemenl bielle
++l�
tt r � +� � � � ::::'I = = = ----1..,.-1+!t= y _ _ _
manivelle -
l1O
--1
m ui rooe de o l n
revo l ut i o n m i l ita i re Une bataille antique pour iIIustrer les methodes de combat du XVI" siecle
L ORSQUE
Albrecht
inadaptee, l'organisation en un trapeze
Altdorfer peignit la 11(/
ilan(IUC de "manches" d'archcrs, qui
wille (FAlexfll1(/re en 1529. it cntCl1-
leur coOtera la victoirc. Aux XV· et
clail raire allusion a la lin des temps.
XV I< siecles, cc sont les Suisses qui
En erfct. scIon certains theologicns. le
ont portc it la perfection les techniques
moment historiquc ou les Grccs bat
de fOnllalions mobiles. CClle pa11icu
tent les Pcrscs a ISS05. corrcspondait
larile faisait de leurs Illercenaircs une
au passage du dcuxicme au lroisicmc
puissancc rcdoutablc aux mains des
royaumc de Oicu. La reference aux
souvemins.
Albrecht Altdorler. La Sa/ai/Ie d'AJexandre (deJa�),
'529 Huile sur bois, 1,58 � 1,20 m (ensembie) Aile Pinakothek, Munich Projelable en Iransparent
de metres cubes de telTC. De surero!!. Ics bastions abritaielll eux-lllcl11es des
prophctics de Daniel parlait aux con
A la Rcnaissancc. la gucrrc devint
Icmpomins du pcinlrc car ]' angoissc
affaire d'arithmetique (formcr Ics
canons derriere leurs ·'oreillolls". Les
de I'Apocalypsc clait largclllcnt par
carn.�s, c'cst cxtrairc des racines) et
places ainsi fortifices adopterelll, SOliS
lagee.
de geometric. La figure du chevalier
l' illtluence des ingcnieurs l11ilitaires,
Cenc representation du chaos.
heroi"quc fut dctroncc par celie de la
des formes gc.ol11ctriques. De tels
pcinlc pour [:1 ville de Ratisbonnc c!
masse de combaltants anonymes dom
pieges mathcmatiques, aiSCl11elll de
Ie due de Bavicrc Guillaume IV. nc
I"oubli de soi ctait gage de victoirc.
fendables avec 1X!1l de troupes, devin
doil rien au hasard : en 1 529. 1'armcc
L' affinnation tactique des amles a feu
rent ainsi coGteux i\ conquerir, en vies humaincs, cn tcmps et en argent.
lurquc a cnvahi Ie duchc, puis Ratis
villi completer ce systeme et les Es
bonne : clle cst aux P011CS de Vicnnc.
pagnols d'abord, puis tOllS les alltres,
L... demicre innovation definiss.. ... nt
Et Altdorfcr (vcrs 1480- 1 538), pour
associcrcnt aux blocs de piquiers des
la revolution mi litaire de la Renaissan
avair etc solda!. connaissait probabtc
"manches" Oll des "comes" d'arquc
ceest ibCrique. II s'agit dc I'cmploi de
mcnt Ires bien les scenes rnilitaires.
busiers. La combinaison infanterie,
navires de haUl-bord armes de canons
Au centre dll tableau. Alexandre. la
cavalerie ct anillcric dcvint la mar
et de l'entreticn de chaine de bascs
lance au poing, talonne par sa cava
que du combat iI r curopeennc. Les
stratcgiques pour tenir les empircs
lerie. poursuit Darius. Le Persc fuit
canons, en effct. etaicm devenus eux
maritimes conquis. A la fin du XV,'
sur son char a faux mene par trois
aussi. en se perfectionnam, tOl:llemelll
siocle, I' Europe avait acquis les bases
chevaux blancs. massacram ses pro
indispensables.
de sa domination.
pres troupes. U s'arrete l'evocation de
En talll que dip lol1l:lte italien,
l'cpisode historique. Car Altdorfer ne
Francesco Guicciardini (1483-1 540),
dcpeint pas ici une arrnee pcrse (sur
assista aux guerres d' italie, 11 tcmoigne
la gauche) face i\ une armcc grecque
ici de I'effic:lcite de la grosse artillerie
(sur la droite). mais bien des guerriers
de bronze a boulet;; lllctalliques des
de son tcmps avec leurs afmes ct af
Fram;ais conll"C les places fortes. C' est
mures specifiques. A ce titre, iI nous
en effet sUl10ut contre les murailles
renseigne sur les nouvelles methodes
que les pieces it feu ctaicnt utilisCcs :
de la guerre au XVI· siecle.
sur Ie champ de bataillc. il fallait
Derriere Alexandre se dcssine en
disposer, en I"abscncc de projectiles
cffet une configuration complexe : au
explosifs, d"tlllc ballerie impol1ante.
ccntre, Ie bloc des piquiers abrite les
comme ; ) Marigllall, IXlur prClendre it
drape:lUx donneurs d'ordrcs. Sur les
un resultat convaillCant.
ailes, les fantassins non pas anm�s de
1
.... 1
U
fortification bastionnee,
""'-;;;E' gnatio Danli, Trattato del radio latino, 158�
reponsc des Italicns a la puis
sarisscs rnaccdoniennes mais d'annes
sance dcstnlctrice de l'anillerie fr.m
d'haste(dont lc fcretail monte sur une
�aisc fut I"invention de l'architecture
longue haITl IX!) forment demi-Iune el
b;.stionnec. Les tours el les mumilles
se rcfcnncnl sur I"ennemi. Ce type
mcdicvales furent rempJacecs par
d'anlle avail ctc mis au point durant
des bastions et des counines msants.
la guelTC de Cent Ans et les guerrcs
Places au pied de la fortilication, Ics
hussites. II se revelait Ires efficacc
canons nc disposaiellt plus que de
pour arreler les charges de cavalerie
quelques metres d'unc cible quasi
ou affronter son semblablc. En facc,
indestructible car, dcrriere Ie parement
les Pcrscs ant opte pour une formation
de pierre, {cntas!). ... ient des ccntaines
Museum 01 the History of Science, Oxlord
::; UPE!ri Orj te de I'arlillerie franl;:aise vue par ,._�La
un
Italien
Les Franr;:ais, (aisaol des pieces bien plus {Iegeresj, en d'aulre chose que de bronze. qu'i/s appelaient canons, et se servant de boulets de fer, au lieu de ceux de pierre donI on usai, auparavant, qui etaient
plus gros sans comparaison et merveilleusement pesants, menaient lesdites pieces sur charettes tirees, non par des breufs (comme Ie voulai/la cou/ume en Italie), mais par des chevaux, avec une lelle agilile
d'hommes et d'instruments deeiies
a
ce service que presque loujours elles marchaient aussi vite que
I'armee. ApprocMes des murailles, elles etaient plan/ees avec une diligence incroyable, et sans qu'iI y eut d'un coup
a
!'autre qU'un Ires petil intervalle de temps. Elles battaient 5i dru et avec une telle impe
tuosite que ce qui auparavant etait fait en /tafie en plusieurs jours I'etait par eux en bien peu d'heures. Et s'ils usaient encore de ce plutot diabolique qu'humain instrument. non mains en la campagne qU'iJ
battre les villes, se servant des memes canons e t d'aulres plus petites pieces, lesquelles etaient forgees et conduites selon leurproportion, avec /a meme dexteriM et ce/erite. Telles artilleries etaient cause que
par toute /'Ita/ie on avait une grande crainte de I'armee du rof Charles. Francesco Guicaardini, Hisloire des guerres d'/Ialie, traduction Chomedy.
1577.
/
fo rmation de l'Etat moderne L'atfirmation de la puissance militaire : Ie pare d'artillerie de Charles Quint en 1 530
EN
juin 1530, Char
bureaucratique charge des finance�
les Quint fut sacre cm
royales. reorganiserenl le conseil me
pcrcur par Ie pape. Peu de temps
dieval en un veritable gouvemement
auparaval1l. il avail passe en revue
avec ses chambrcs de justice el ses
son pare d'artillerie, pour mesurer
bureaux, et prornurent Ie principal se
scs forces en des temps qui risquaicl1I
crctairc ministrc coordinateur (Lord
Gmvure anonyme Projelable en transparenl
d'etTe troubles. mais aussi pour affir
Tresorier). Le Parlemcnt fUl reconnu
mer .son pouvoir. Sc trouvcnt 1�, dis
cormne l' interlocUleur oblige du roi
devait apponer la p:lix, Lcs Parisiens
poses en demi-Junc, une quarantaine
dans son action de gouvemement. Le
payerent volontiers ces fastes destines
de pieces de calibres diffcrcnts : ca
concept de sOllverainele lui-meme
i'I montrcr qu'ils savaient organiser
nons capablcs d'cnvoycr des boulets
elail ainsi remodele : Ie souverain
corteges et fetes aussi bien que les
de cent livres. coulcuvrines. sacres.
gouvernait "en son Parlement'". com
Italiens, Mais l'evenelllcnt Ile mit
morliers 11. tiT parnbolique. [aucons
me Ie montre celie gravure. Elisabeth
pas fin i\ la rivalitc scculaire enlre
c\ faucon ncaux aux projectiles de
I'" d'AngletclTC trone dans la charnbre
Habsbourg ct Valois, La gucrrc rcpril
quelques livres seulcmcnL Gage de
des Lords. Face a elle se tiennent les
I"annce suivantc CI Paris, arsenal de
modcrnitC. les bouches 11. feu son! fai
quatre secretaires agenouilles qui
la cOllTonne. dUI pr�ler des ccntaines
tes de bronze, non plus de fer. ct sont
prellnent des notes, Derriere la reine,
de milliers de livrc..<; i\ son roi,
fondues. Certaines armcs sonl restecs
Ie Lord chancclier a gauche et Ie Lord
sur les wagons destines a leur trans
trcsorier il. droite. incarllent son pou
port CI ron distinguc. derriere les
voir legislatif et financier, Au premier
lignes. des cngins de lcvagc servant
plan se [rouve Ie public COI11IX)Se des
il. placer les canons les plus lourds
mcmbres de la gentry des Comtes, II
sur leurs afmts. $i ron compte qu'il
s'agil de montrcr qu'Elisabeth reglle
faUl dix-huit chevaux pour mouvoir
avec I' assentiment de tous
les plus gros canons et au moins deux
consentemcnt du peuple a l'imp6t
pour tracter les plus petits. on peUl
ou i\ la guerre. ricn n'cst dcsormais
evaluer les diffieultes logistiques iI
possible.
sans
ctablir Ie camp rcpresente iei. 5i I'on
Lcs souvcrains dc la Rcnaissance
prend en comple Ie prix "'un seul
se doivent par ailteurs de maitriser la
canon ( 1 160 Jivres pour une grande
propagande politique et Ira diplomatic,
couleuvrine, parexemple). on rnesure
L'enjeu n' est pas seulcmenl d'assurer
par ailleurs Ie cout exorbitant d'un
Ie prestige du Prince il. I"ctranger.
tel pare d'aniJlerie. Seul Ie souverain
mais egalement de construire des
d'un grand Etat pouvait s'offrir une
alliances et d' eviler cenains conOits.
p:lreil1e puissance de feu. La nouvelle
L'epoque inventa les ambassades
technologic militaire et les amleeS de
permanentes, mais ne se dispensa pas
plusieurs dizaines de rnilliers d'hom
de couteuses entrevues princieres,
mes donncrcnt aux seuls monarques Ie
tclle celie du Camp du Drap d'or
monopole de la violence efficace.
( 1 520) entre Fran�ois ,« el Henry
Depuis Ie XV" siecle, tenir son
V I I I ou la vi site de Charles Quint
role d:lns la competition entre Et:lts,
it Paris en 1 540, Taddeo Zuccaro
conlroler les grands feodaux et unifier
( 1529-1 566), dans sa frcsque, depeint
Ie lerriloire neCeSSilail des finances
bien la splendeur de la reception au
eonsidembles que seule une fiscalite
passage de la porte Baudoyer. Rien
cap:lble de lever rationllellemenl des
n'est trop beau pour l' Empereur (de
fonds a grande echelle pouvail garan
noir vetu car en deuil). En tCllloigne
tiro C'cst pour eeOc raison que naqui
Ie dais de dTap d'or orne de fieurs de
renl alors des bureaucralies ctoffecs.
Iys et d'aigles imperiales qui abrite la
aux compClcnccs spCcialisecs.
rcllcontrc, Les entrees royales etaient
En Anglelerrc. par cxemple. les premiers Tudor crecrenl un complcxe
toujours des ncgociations entre Ie Prince e t la ville, Celie de 1540
r--- '!" ,,, ,,,.
Elisabeth en son Parlement, non signee du XVII- siecle
-de/a des / i m ites d u m o n d e co n n u Ortelius : au-dela du savoir geographique ancien
L
A carte p u b l i c c
qui rel1contre Ie continent arncri
a Anvcrs e n 1 590 par
cain. En un demi-siecle, les bases
Abraham Ortclius ( 1 527-1598) dans
des Empires europeens d'outre-mer
son Thea/mill Orbis Terrarlllll, mel
sont jetces et les routes d'ech.mges
en evidence hI "distance definitive"
revolutionnces. L' idee mcme d'un
(lui s'cst instaurCc entre la geographic
Nouveau Monde ne naquit toulefois
de ]" Anti(]uitc ct celie des homlllcs de
que tres progrcssivement.
la fin dl! XVI" sieclc.
La g60grap/lie des Anciens. 1590 Traduclion : Void Ie lableau gtjographique du gloOO rerresrre. mais unlquemenl ce qui alair connu des Anciens jusqu'en ren de gr.lce 1492. Proletabte en transparent
En 1 5 2 J . dans son JOllmal (Ie
His/aria general )' IIlI/ural (Ie f{/.�
Lc geographc de Philippe I I con
l"O)"llge llmLl' les Pllys-lJa.f. Albrecht
'f1(lim' ( 1 5 26). I'hiSlOrien espagnol
frontc iei J'Clat ancien du savoir (lcs
Durer fait allusion avec enthousi:lsllle
Gonz:llo Femandez de Oviedo ( 1478-
trois seuts continents COIlIILlS avant
aux trcsors et aux echantitlons rap
1557) peine 1'1 trouver ses marques
lcs grandcs dccouvcncs sonl rcpre
portes du Mexique et presentes aux
d.ms Plille ct Dioscoride pour deerire
scntes au centre de la carte) nux con
familiers de la cour. dans Ie cabinet
la flore et 1:1 f.. une des Amcriques.
naissanccs clablics en 1 590 : ce sonl
de curiosites de Charles Quint. Le
L ',manas y est dccrit com me une
bien qualrc continents qui occupenl
" pays de I'or" fascine par ses riches·
vadete exotique de pomllle de pin.
Ics angles du dOC1l1l1Cm. l'Amerique
ses d'abord, mais aussi par les pro
ou d·artichaut. 011 ne sail trop. et Ie
figurallt dans Ie coin inf6riclIr gauche.
diges des artefacts d' une civil isation
jaguar com me un tigre. en plus lent. .
Par cctlc disposition 3udacieuse.
r..dicalelllent autre. Les valeurs de
Les apIX!llaliolls indigenes ne servent
Ol1c1ius souh:litc amcncr son ICCICllr
DUrer. lui-mcme collectionneur de
que lorsqu'on rellonce a trouver un
a comprclldrc que Ics navigations de
" lIlervei1tes" naturetles d'outre-Iller.
equivalent : c'est :linsi que Ie mot
decouverte ont provoquc une exten
Ie poussellt i\ lire avant tout dans ce
chocolat est Ie seul mot azteque de
sion elu monctc au-deli\. des limites
qu'il voit Ie signe de I'universalite
notre vocabulaire.
fixces par la tradition et rcvelc des
du genie humain. La connaissance
En depit de ces difficultes taxi
terres jusqu' a[ors inconnues .
du Nouveau Monde reste encore, a
nomiques. I'exploration du Nouveau
Le gcographe place egalement
son cpoque. I "apallage de milieux
Monde deboucha sur I'imponation de
sur Sa Carte la grille complete des
assez restreints : les elites politiques
plantes amcricaines en Europe. L:I
coordonnces. des longitudes et la
et religieuscs. les cerc1es intcllectuels
pomme de terre, la 10mate, Ie m.."ls.
titudes. Cercle arctique. tropique
et les populations des grands pons
Ie chocolat et Ie tabac ant ainsi fait
du cancer. tropique du capricorne.
qui ont acces aux temoignages des
Ie voyage vers I' Est el. quand cela
cercle antarctique sont sitlles. Ce
marins ou. COl11lne 1\ Rouen en 1 550.
faisan!. il se fonde. en ['adaptant. sur
aux spectacles dans lesqucls des "'In
etait possible. ant etc acclimates . La
hi projection quadri[lcc mise au point
diens" jouenl leur propre role.
canne 1\ sucre. en revanche, a vogue vers l'Ouest car les Iberiques vou
par LIn Flamand. Mercator. vingt ans
Cependant. avec la colonismion
laient menre en place sur Ie nouveau
plus tot. qui pennellait des fCperages
et I' arrivce reguliere des nolles char
continent I'economie de plantation
prccis pour la navigation. Ortelius
gees de tresors. I.. situation ehange
qU'ils avaient experimentee avec
affirme :linsi que I'cccoulllene s'est
IX!U it peu. De plus. Ie livre relaie I"ex
des esc1avcs africains. sur les cotes
c[argi jusqu'aux confins du globe et
pCricnce directe des singularites de
d' Afrique CI aux Alfores.
que I'on en mailrise la reprcsentation.
I' ail leurs et les textes d' Andre Thevet
L.. Renaissance est ainsi a I'ori
Ptolcrnce cst dcsormais obsolete.
en France ou de Richard Hakluyt en
gine d'un nouvel ordre culinaire, et
L'exp[oration des !Hers avec [a
Angleterre trouvent un lectoral tou
de maniere corollaire, d'un nouvel
caravel1e avait commence avec Henri
jours plus gr.md. Les ouvrages scien
ordre economiqlle mondial.
[e N:lvigateur. roi du Portugal. qui
tifiques, parfois itt ustres. ont pour
au dcbut du XV� siec1c. avait rcuni
but d'inciter it la colonisation. rnais
marins et s..vants et fin..ncc une flolle
aussi de classer les decouvertes. 1 1 5
pour dccouvrir les cotes de [ . Afrique. Puis ce sont res premiers voyages du
tcmoignent cependant des diffieultes des EuropCens it intcgrcr les nouvel
Gcnois Christophe Colomb pour [e
les connaissances dans Ie cadre des
compte de [ .. couronne d'Espagne.
savoir� classiques. Ainsi. dans son
ynt�m�e'."ta/ /
f h:llp.t�hilfS .
,
les Europeens decouvrent I'ananas, 1526 Les ehretiens rappel/entpigne' carcels y ressemble .
��
o
er emerveille par des objets provenanl d'Amerique, Anvers, 1521
les Indiens Ie nomrnent yayama mais ils appellent
J'ai vu aussi les choses que I'an a rap
une autre variate de ce rOOme fruit lIOire
portees au rai du nouveau pays de for :
boniama yayagua
une autre sorte encore, comme nous Ie
un solei! tout en or, large d'une grande
verrons dans ce chapitre .. en d'autres lieux iI porte
brasse, ainsi qu'une lune, tout en argent
encore d'autres noms. On t(ouve dans cette ite d'His
et de la meme grandeur .. egalement deux
paniale des cardons ; chacun porte une pigne (au,
chambres pleines de leurs equipemenfs et
pouretre plus exact. un artichaut) etant en/endu que,
deux autres remplies d'armes, d'armures,
parce que eela (8ssemble a une pigne ou pomme de
d'engins de tir, de boucliers merveilleux,
pin sans en eIre une, /es chretiens fa designenl einsi.
d'habillements etannants, de couvertures
C'est run des plus beaux fruits qu';1 m'a ete donne
de lit et de toutes sartes d'objets extraor
de voir dans loutes les con/fees que j'ai parcourues.
dinaires prapres a divers usages et plus
Aucune plante parmi loutes celles que Fai vues ns
beaux
portait un tel fruit hors ces pignes ou aftichauls et je
T outes ces chases sont si precieuses qu'on
pense qu'il n'existe au monde aucun fruit qui puisse
a
contempler que des prodiges,
les a eslimees a cent mille florins, et, de ma
/'t§galerpour toutes les raisons queie vais vous enon
vie, je n'ai rien vu qui m'ail aulant rejoui Ie
cer. 1Is'agit de la beaute offerle a Is
vue, de Is douceur
cceur, Carj'ai vu /a des merveilles d'art et
de leurodeur et de leur excellente saveur lorsqu'on y
je suis reste confondu d'admiration davant
goute, On voit bien, parmi les cinq sens lies au corps,
l'ingeniosite subtile de ces hommes des
comment ces trois-Ia peuvent s'exprimer au contact
pays lointains, Et les mots me manquent
des fruits, et meme comment un qualrieme, Ie lou
pour dir e ce que fai eprouve alors.
cher, occupe une place de choix a leur c6te, Gonulo Fernandez (je ()v;edo, HlSlona(18()ftt'lIl y natural (je las Indias, IrBducbon Bealrice MaUle!, 1e mot espagnol ublisli esl pu \a, NDT.
Exl1'811: hl1l oe AI:lrecht DOrer, Journal de \otJyagII dans Ies Pays-Bas, traduction JA GorIs el G_Marlier, BruxeII&s, 1931, citii par ElWIn Panovsky dans La V . If fATf d'Albtechf DUnK. Paris: Hazan. 1987
Europe a la conquete du monde Exploiter les richesses du Nouveau Monde : les mines du Potosi en Bolivie
C
OMMENT quel
protegent Ie cavalier. Lesannes 3 feu.
ques milliers d' Euro
arqucbuses el canons. ont surtout un
peens (d01i1 six cenlS soldats pour
impact psychologiquc (tout comrne la
Cones. par cxcmplc) parvinrclll-ils
musique militairc) facc 11 des combal
� SOUTnCHrc les regions Ires pctlplccs
tants proteges pardcs etoffes matelas . sees. Bien plus rcdoutables en . calite
du continent americain CI 1\ dClmirc
Anonyme, EIcerro rico de P%si. 1584 OessIn aquarel�
The Hispanic Soaely of America Pro/elflbfe en transparent
des civilisations :lUSS] anciennes que
sont les armes d'acier des assaillants :
sophistiquCcs pour s'cmparcr de IClIrs
casques. armurcs et COIICS de mailles
richcsscs ?
pour la dcfense. epees ttts aiguisees
Avcc Ie dcveloppcmenl du proccdc
Comllle Ie suggcrc celie illustra
ct piques pour rmaque. t Entin. lcs Es
de l'arnalgamc
tion d'origine aztequc tirec du Codex
pagnols ont pour eux rexpericnce de
au minerni argentif1:re pour oblenir de
ferc du Potosi dans ['actuellc Bolivie.
(melange de mercure
norcntin. les maladies inrccticuscs
I·autre. communiquec par I'&rit (donI
rargent pur), les lieux d'cxploitation
(variole. rougeolc. grippe) lransmiscs
visiblement Atahualpa ne comprend
devinrenl de vcrilablcs
a des populmions nc disposant pas d'antico'llS face 11 des gcnnes incoll
pas I'cnjeu) et la motivation dc leur
s'cffCCluaicnt Ie... nornbrcuses lfichcs
csprit de crois.1de. En face. une fois
dc tr.msfommlion de la matiere pre
nus jus(]uc-lil., euren! en Amcri(]lIc un
leur souvemin c'lplure. Ics Incas sont
miere. SOLIS Ie conlr61e d' Espagnols ?l
cffct dccisif. D'abord. clles rCduisircnt
presque resigncs
chcval, des cohortcs de lamas vicnncnl
les populations des nations amcrin
des temps a etc prCditc. Ce n' cst donc
dicnncs au tiers (quclqucfois moins)
pas tant la tactiquc des annes combi
eXlmil dc la mont:tgnc p.1r des cscl:tves in
11 Icur sort car la fin
haciel/tias ou
dcposcr :tu village Ic mincrni
qu'cllcs claienl avanl I'arrivcc
nees (cavaliers. pi
digenes. Au premier plan, une rouc
des cnvahisseurs. Ensuitc. clles de
et caoonniers) quc reffet de surprise ct
hydrauliquc actionne des marteaux
truisircnt les structures soci:llcs cl
Ics facteurs structurels. qui donn�rent
qui pilonncnt Ie mineral. ensuilc la\'c
politiqucs cxistantes. dc tclte sortc, lXlr
la victoire aux Espagnols.
ct Imvaillc dans des fours ou l'on pro
de
cc
exemple, que t'Empirc azteque ctait pratiquement paralysc quand Cort�s
Restait
11 mettre en coupe reglee
cede
11 la coupellalion (sep.1ration des
diffcrents composants du minerai par
L'uti
les territoires COIl
Ie pillagc dcs tresors des souverains el
oxydation).
lislltion ingcnicusc par Ics Espllgnols
I'extmction des mctaux precieux. Un
mctaux precieux amcricains 11 Scvillc
des disscnsions locales leur permit en
dessin aquarcllc datant de 1584 rcpre
fut lel que J'economic europecnnc en
outre de rccruter des annecs supplcti
scnte I'cxploitation dc la mine argenti-
ful massivcrnent transfonnee
arriva ?I Mexicorrcnochtitl:.m.
Apres 1 550. I'a(nux dcs
.
ves indig�nes qui combauirent 11 leurs cotes.
C' cst donc dans un contexte
qui leur ctait des plus favorablcs que
les conqllistadores sc lanc�rcnt dans I'a\'enture coloniale. En outre, ils disposaient d'atouts tcchniques indcniables. COtll1l1e Ie montre I:. capture d'Atahualpa jamareu au Pcrou. en
a Ca 1532. cvoquCc
par l l ndicn hispanise Felipe Guarn:lII '
POllia dc Ayala. La disproportion tcr rifiantc cntre Ics cent soixante soldats curopecns ct les ccnt mille guerricrs indiens cst
allcs tce
par toutcs les
.. a rre a resolu, sur Ie mod�lc sources. Pii'
de Cortcs au Mcxiquc. de lendrc un pi�ge a I'cmpcrcur inca. L'affaire est rondclllent mcnee, grilce. d':tbord.
a
une chargc dc cuvalcriect uu rnassucre systcmatiquc de ['clite qui cntoure Atahualpa. Lcs chevaux offrcnt aux Espagnols I'avanlage de la rapidite et
U n
epidemie de variole au Mexique en 1530, Historia de las cosas de
;..;.rNueva Espana, Fra Bernardino de Sahagun, Codex florentin, XVI- s. r-
tre a bas Ie pouvoir indigene : la capture d'Atahualpa par Pizarre a Cajamarca, 1532 Don Franeisco Pizarre et Don Diego de Almagro marchent vers la ville de Cajamarca contre Atahualpa Inca, avec cent soixante soldats contre cent mille Indiens. lis entrerent dans Cajamarca {
...
J.
Fray Vicenle dil 8' Atahualpa qu'i/ est aussi un ambassadeur el le messager d'un autre seigneur, Ires grand ami de Oieu et qu'il lui faut eIre son ami et adorer la croix et croira I'Evangiia de Oieu et ne rien adorerd'autre, car tout le reste est tromperie. Atahualpa repond eldilqu'il na doit adorerpersonna que Ie soleil qui ne meurtjamais et les dieux qui suivent sa loi : c'etait a eela qu'il s'an tenait. Et /'Inca demanda a Fray Vicente qui Ie lui avail dit. Fray Vicente repond qua I'Evangile, Ie Livre, Ie lui avait dit. Et Atahualpa dit : "Donne-moi ce livre, pour qU'il me Ie dise�. Ainsi la lui donna-t-il, et ille prit entre ses mains .. it commenfB .9 feuilleter les pages du livre. Et I'Inca
dit : �II ne me dit rien : iI ne me parle pas, ce fivre�, parlant sur un ton de grande majeste, assis sur son trone,
et il jeta de ses mains Ie livre. . . Voyant cela, Vicente se mil 8' crier, disanl : "Sus, chevaliers, SUS .9 ces nobles Indiens qui sont contre notre foi r. Ainsi done commencerent les cavaliers, el ils lirerent de leurs arquebuses. et les bruits des grelols et des armes, et ce qU'homme n'availjamais vu sur la place de CajamarC8 pleine d'ln diens. Les murs de la place de Cajamarca lurentjetes .9 bas. Et les Indiens se tuerent entre eux a force de se presser el de pietiner, les chevaux Irebuchaient, force Indiens perirent, tant qu'on ne put compter. . . Ainsi donc Franeisco Pizarre arracha-t-il Atahualpa Inca de son lrone. lis I'entrainerent sans Ie blesser, et il fHait captilsous la garde des Espagnols, aupres du capitaine Don Francisco Pizarre. FehPG Guaman Poma de Ayala. NUfNII Goronica Y Suet! Gob/erno. code. �ruvlen illUSlr� (Ie 1613.