publiée par la SOCIÉTÉ DE LINGUISTIQUE DE PARIS _ _ _ _ _ _ LXXXVI _
Daniel PETIT
APOPHONIE ET CATÉGORIES GRAMMATICALES DANS LES LANGUES BALTIQUES
D. 2003/0602/31 ISBN 90-429-1529-3 (Peeters Leuven) ISBN 2-87723-824-5 (Peeters France) © 2004 Éditions Peeters, Bondgenotenlaan 153, B-3000 Leuven
Tous droits de reproduction, de traduction et d'apatation réservés pour tous pays.
PEETERS LEUVEN - PARIS 2004
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION
.
7
1. Problématique générale
·
7
2. Apophonie radicale et catégories grammaticales
.
11
I. CATÉGORIE DE LA PERSONNE ET APOPHONIE RADICALE.......
15
1. Introduction
········.·············
15
..
16
3. La troisième personne du futur lituanien
.
17
4. Paradigme verbal et harmonie vocalique en letton
.
20
5. Conclusion
.
22
II. CATÉGORIE DU CAS ET APOPHONIE RADICALE
.
23
1. Introduction
.
23
2. Noms-racines et apophonie radicale
.
25
3. Noms (alpha-)thématiques et apophonie radicale
.
55
4. Noms athématiques suffixés et apophonie radicale
.
58
5. Conclusion: catégorie du cas et apophonie radicale
. 118
III. CATÉGORIE DU NOMBRE ET APOPHONIE RADICALE
.
123
1. Introduction
.
123
2. Système nominal et apophonie dans la catégorie du nombre
.
124
3. Système verbal et apophonie dans la catégorie du nombre
.
129
4. Conclusion: catégorie du nombre et apophonie radicale
. 168
IV. CATÉGORIE DU GENRE ET APOPHONIE RADICALE
.
171
1. Introduction
.
171
..
173
.
190
·
2. Oppositions quantitatives dans le verbe lituanien
2. "Substantifs mobiles" et apophonie radicale 3. Conclusi on : cat"egone d u genre etapop hOllIe ' rad'Ica1e
V. CATÉGORIE DU MODE ET APOPHONIE RADICALE
PRÉFACE
193
1. Introduction........................................................................... 193 2. Subjonctif, optatif et impératif..................................................... 196
220
Cet ouvrage, issu d'une thèse d'habilitation soutenue le 12 octobre
4. Infinitif et supin...................................................................... 244
2002 à l'Université de Paris-IV Sorbonne, est l'aboutissement de
5. Conclusion: catégorie du mode et apophonie radicale....................... 287
recherches entreprises depuis quelques années dans le domaine de la
3. Participes
'"
linguistique comparative indo-européenne, et plus précisément dans le VI. CATÉGORIE DU TEMPS ET APOPHONIE RADICALE................ 289
domaine des langues baltiques (lituanien, letton, vieux prussien).
1. Introduction
289
2. Thème de présent et thème de prétérit..
292
aux langues baltiques pour différentes raisons, non seulement du fait de leur
3. Rapport des thèmes de présent et des thèmes de prétérit...................... 300
archaïsme, qui est bien connu des comparatistes, mais encore pour leur
4. Genèse des apophonies radicales dans le système temporel baltique
344
développement historique propre et pour la culture dont elles témoignent.
CONCLUSION......................
363
1. L'apophonie dans les langues baltiques
363
reçu toute l'extension qu'on pourrait lui souhaiter. Un siècle après Le
2. Apophonie et catégories grammaticales
367
Parler de Buividze (1903) de Robert Gauthiot, qui reste encore aujourd'hui
INDEX VERBORUM
375
Parallèlement à la linguistique grecque, j'ai été amené à m'intéresser
L'étude des langues baltiques est, en France, le produit d'une longue
BIBLIOGRAPHIE...................................................................... 411
tradition, puisqu'elle remonte à Ferdinand de Saussure, mais elle n'a pas
le seul ouvrage de langue française consacré à une question de linguistique baltique, il m'a paru important de tenter de contribuer, à ma mesure, à la redécouverte de ces langues dans le paysage scientifique français. Je souhaiterais remercier ici tous ceux qui ont contribué à l'élaboration de cet ouvrage, en premier lieu mon maître et directeur de recherche, M. Charles de Lamberterie (Université de Paris-IV Sorbonne et École Pratique des Hautes Études), ainsi que les autres membres de mon jury, MM. Georges-Jean Pinault (École Pratique des Hautes Études), Paul Garde (Université d'Aix-en-Provence), Laurent Dubois (École Pratique des Hautes Études), Jean-Louis Perpillou (Université de Paris-IV Sorbonne), Alain Lemaréchal (Université de Paris-IV Sorbonne) et Bonifacas StundZia (Université de Vilnius). Je dois àM. Georges-Jean Pinault et à M. Alain Lemaréchal de nombreuses suggestions et corrections sur une première version de ce texte.
Mme Hélène Vairel (École Normale Supérieure de Paris) a bien voulu se charger d'une relecture de l'ensemble du volume et m'a permis ainsi d'en améliorer la rédaction et d'éviter de nombreuses erreurs. Je dois également beaucoup à mes auditeurs de l'École Pratique des Hautes Études, avec qui j'ai eu de nombreuses discussions sur les questions ici développées, notamment Emmanuel Dupraz, Pierre Ragot, Vincent MartzlofI Enfin, je tiens à remercier mes collègues de l'étranger, dont l'aide m'a été souvent très utile, notamment MM. Rick Derksen (Université de Leiden, Pays-Bas), Bohumil Vykypel (Université de Brno,
INTRODUCTION
République Tchèque), Pietro U. Dini (Université de Pise, Italie), Vytautas Ambrazas (Vilnius, Lituanie). Je voudrais également souligner le rôle central joué par mon épouse Justyna, qui non seulement m'a apporté ses lumières sur de nombreux faits lituaniens, lettons et polonais, mais aussi a constamment veillé à créer les
1. PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE: L'APOPHONIE DANS LES LANGUES BALTIQUES
conditions les plus favorables à ce travail. Un grand merci enfin à mes enfants, Antoine et Gabrielle, dont les premiers balbutiements ont
Un des archaïsmes les plus notables des langues baltiques (lituanien,
accompagné la rédaction de cet ouvrage et qui lui ont ainsi donné un peu de la saveur dont il manquait.
letton, vieux prussien) est, dans une large mesure, la préservation des alternances vocaliques héritées de l'indo-européen. Les phénomènes d'apophonie - c'est-à-dire de variation vocalique à fonction morphono-
Janvier 2004
logique - sont nombreux encore en lituanien et en letton modernes; leur rôle n'a pas dû être moindre dans les autres langues baltiques, et sur ce point la situation du vieux prussien, par ailleurs si altéré, reflète encore fidèlement un état de faits commun à tout le groupe. Dans bien des cas, les apophonies baltiques prolongent directement un trait archaïque de l'indoeuropéen, mais souvent aussi elles apparaissent comme une création spécifique de ces langues. L'apophonie, en tant que procédé morphonologique, est donc non seulement vivante en baltique, mais elle y est encore productive. Ce caractère n'a pas manqué de frapper les linguistes depuis longtemps, et plusieurs études ont été consacrées entièrement ou en partie aux manifestations de l'apophonie en baltique. Il faut citer tout d'abord, naturellement, l'ouvrage magistral de Leskien (Der Ab/au! in den
8
Introduction
Introduction
Wurzelsilben im Litauischen, Leipzig, 1884), qui a été l'un des premiers à
ou < il / ü >, cf. lit. mùsti "frapper" ... musis "bataille"), à quoi l'on
passer en revue les types d'alternance vocalique en lituanien. Par la suite,
ajoutera une apophonie intonative ou métatonie, qui pose des problèmes
des travaux portant sur la question de l'apophonie n'ont cessé de voir le
spécifiques (métatonie douce, par ex. < ê /
jour. À l'ouvrage classique de Kurylowicz (L'apophonie en indo-européen,
... bégis "course", ou métatonie rude, par ex. < eî / éi >, cf. lit. svefkas
Wroclaw, 1956), qui est conçu dans une perspective générale, mais opère
"sain"
largement avec des données baltiques, s'ajoutent diverses contributions,
festations de l'apophonie est souvent distribuée en différentes "séries
dont certaines sont fondamentales pour la compréhension des apophonies
apophoniques" (aIl. Ablautreihen), dont on examine les réalisations
baltiques} .
diverses dans les langues concernées. Cette approche, dont le modèle le
E-+
9
e >, cf.
lit. bégU "courir"
svéikinti "saluer")2. Plus précisement, la variété des mani-
Pour autant, on ne saurait affirmer que la question apophonique en
plus clair est fourni par la classification des verbes forts en germanique, est
baltique soit entièrement résolue. Car de nombreux aspects demeurent
illustrée notamment dans l'ouvrage de Leskien (1884, notamment p. 268-
encore peu étudiés, voire négligés, si bien qu'il ne paraît pas inutile de
269), qui se présente pour l'essentiel comme un catalogue des séries apo-
revenir sur ce débat. Dans cette étude, je me propose d'envisager le
phoniques du lituanien. Elle nécessite un certain nombre d'aménagements,
problème de l'apophonie en baltique à travers une perspective relativement peu explorée, celle du rapport de l'apophonie et des catégories gramma-
dus surtout à des altérations secondaires du système, mais elle demeure fondamentalement valide.
ticales. Cette perspective est limitée dans son principe et ne peut par
Dans une autre perspective, l'apophonie peut aussi être étudiée sous un
conséquent aborder tous les problèmes; mais elle permet à mon sens de
angle fonctionnel. Ce type d'analyse consiste à déterminer les rapports
renouveler les approches traditionnelles de la question de l'apophonie en
morphologiques et sémantiques entre "formes de fondation" et "fonnes
baltique. On peut distinguer, en effet, au moins deux approches pour traiter
fondées" apophoniques. On a le choix, dans ce cas, entre plusieurs critères
de l'apophonie.
de classement. Par exemple, il est possible d'opérer une distinction entre
Traditionnellement, l'apophonie est étudiée sous son aspect formel: il
une apophonie "translative", qui accompagne un changement de classe
s'agit le plus souvent de déterminer quels sont les phonèmes mis en jeu
grammaticale (par ex. < verbe / substantif >, cf. lit. nèsti "porter" ... nastà "fa d ") . r eau et une apophome "non translative", qui apparaît à l'intérieur d'une mê 1 me c asse grammaticale (par ex. < verbe / verbe >, cf. lit.
dans les alternances vocaliques et leur relation formelle. À cet égard, deux types d'apophonie sont régulièrement distingués: une apophonie qualitative (par ex. <
e/ a >, cf. lit. nèsti "porter" ... nastà "fardeau",
ou <
e
/ 1 >, cf. lit. mena "il se souvient" ... minti "se souvenir") et une apophonie
quantitative (par ex. < 1/ ï>, cf. lit. gina "il défend" ... gyné "il défendit",
1. On retiendra ici principalement les contributions suivantes: Endzelfn~ (1923, p. 58-61), Skardzius (1935b, p. 59-65 = RR(S),. N, p. 371-378), Otrçbskl (GJL, I, p. 184-213), Stang (1966, p. 120-125), Urbutls (1971, p. 71-78; 1978, p. 222-231), Venckuté (1971, p. 79-88), et plus récemment Akelaitiené (1994; p. 5-11; 1995, p. 5-11; 1997, p. 49-55; 2000, p. 3-10). Voir aussi Kaukiene & PakalniSkiené (2002, p. 19-22).
(pa)kibti "s'accrocher" ... Jeyboti "pendre, être suspendu"). Mais le critère le plus intéressant à 1'" ,.. , mon sens, est ce U} qUI conSIste a dIstmguer, d'une part, une apophonie "1 . 1" ." . eXlCa e , aSSOCIee a la dérIvation, c'est-à-dire à la . d' formation de l ' ," exemes ID ependants (par ex. < verbe / substantif >, cf. lit. nesti "porter" '" "Co - nasta lardeau", ou < verbe / verbe >, cf. lit. mif'ti
--------------2. Sur la mét t .
Derksen (1996 a O~I~, on .se reportera avant tout à l'ouvrage fondamental de (1923.1924) ~' 9uI s appuie notamment sur les travaux plus anciens de Büga . olr ausSI Stang (1966, p. 144-169).
10
Introduction
Introduction
"mourir" .... marinti "faire mourir, tuer"), d'autre part, une apophonie
11
Il. APOPHONIE RADICALE ET CATÉGORIES GRAMMATICALES
"grammaticale", qui intervient dans l'opposition de catégories constitutives
kélé
L'une des approches les plus fécondes pour étudier l'apophonie en
minti
baltique consiste, me semble-t-il, à passer en revue les catégories
"se souvenir"). Les deux critères peuvent du reste être associés l'un à
grammaticales ou lexicales dont la réalisation est liée, de manière régulière
l'autre, car on observe qu'une apophonie translative est toujours de nature
ou sporadique, à l'apophonie. Quand on confronte le système apophonique
lexicale, tandis qu'une apophonie non translative est tantôt lexicale (par ex.
des langues baltiques avec celui de l'indo-européen, tel qu'il est reconstruit
< verbe non marqué / verbe intensif >, cf. lit. (pa)kibti "s'accrocher"
par la comparaison, on ne peut manquer d'être frappé par une certaine
kYboti "pendre, être suspendu"), tantôt grammaticale (par ex. < présent
réduction du domaine de l'apophonie. Si on laisse de côté le problème de
/ prétérit >, cf. lit. ke/ia "il lève" .... kélé "il leva"). La question se pose
la dérivation lexicale et qu'on se concentre sur les catégories gramma-
cependant de déterminer les limites du domaine lexical et du domaine
ticales, on constate que presque chacune d'entre elles (à l'exception de la
grammatical en baltique: sur quelle base peut-on dire par exemple que
personne) pouvait présenter en indo-européen des faits d'alternance
l'opposition de diathèse entre un verbe transitif et un verbe intransitif (lit.
lenkti "pencher" .... linkti "se pencher") est de nature lexicale, tandis que
vocalique. On peut en dresser ici une liste approximative, qui n'a qu'une valeur illustrative :
l'opposition de mode entre un verbe à l'indicatif présent et à l'infinitif (lit.
- (a) catégorie de la PERSONNE: dans le système verbal,
de paradigmes (par ex. < présent / prétérit >, cf. lit. kêlia "il lève"
"il leva", ou < indicatif / infinitif >, cf. lit. mena "il se souvient"
++
mena "il se souvient" .... minti "se souvenir") est nécessairement gramma-
l'alternance vocalique était inusitée en indo-européen entre les personnes du
ticale? Il existe, en outre, de nombreux cas d'apophonie dans lesquels
même nombre. Celles-ci présentent toujours le même degré vocalique:
l'alternance vocalique n'apparaît qu'à travers une analyse étymologique,
• Exemple: cf. i.-e. "aller", indicatif présent
r e sg.
*h1ei-mi, 2e sg.
e
synchronie (par ex. < substantif / substantif>, cf. lit. diegas "germe"
*h1ei-si, 3 sg. *h1ei-ti > véd. émi, é~i, éti (degré *e constant); 1re 1 *h . e e p . ll-me-,2 pl. *h1i-te, 3 pl. *hâ-efonti > véd. ima!), ithéJ,
daigas "pousse, germe"). Les problèmes soulevés par une étude
yanti (degré zéro constant). Le seul cas d'alternance vocalique attesté
fonctionnelle de l'apophonie en baltique sont par conséquent nombreux, et
entre des personnes du même nombre est l'alternance de la voyelle
l'on ne peut espérer leur apporter une solution défmitive. Dans cette étude,
thématique en indo-européen, par ex. e 3 pl. *-o-nti.
sans laquelle la relation de deux lexèmes demeure indécelable en
++
je me bornerai à examiner les problèmes posés par l'apophonie grammaticale, et, pour des raisons de cohérence qui apparaîtront au cours de l'exposé, je n'aborderai que les cas d'apophonie radicale, laissant de côté l'apophonie suffixale, qui mériterait à elle seule une monographie. Il ne s'agit pas ici simplement d'offrir une classification plus ou moins cohérente des faits d'apophonie en baltique, mais, plus généralement, d'examiner les conditions de sa survie dans une famille de langues connue pour son archaïsme.
r e pl. *-o-me-, 2e
pl. *-e-te,
- (b) catégorie du CAS: à l'intérieur des flexions nominales, l'alterna . . nce vocalIque pouvaIt toucher en indo-européen aussi bien le radical que le suffixe. • Exemple d'alternance radicale' < 0 / e > cf . * " . l.-e. nom.-acc. J,lod-r "eau" > h'tt / ' * . 1 . watar gen. ued-n-es> hltt. wetenas (avec degré 1 . P em secondaire du suffixe) ; alternance suffixale: < 0 / e > suffiXe des neutr . . . ' " es slgmatlques l.-e. nom.-acc. sg. *-os- > gr. yÉvos race, espèce" / gén. sg . *-es- > gr. h omenque " YEVEOS. 1
Introduction
Introduction
12
13
- (c) catégorie du NOMBRE: dans le système nominal, l'alternance
On observe, à travers ce rapide tour d'horizon, que toutes les catégories
vocalique liée au changement de nombre pouvait toucher en indo-européen
grammaticales, à l'exception de la personne, étaient susceptibles en indo-
aussi bien le radical que le suffixe. • Exemple d'alternance radicale: < 0 / e >, cf. nom.-acc. sg. *J,!od-f
européen d'être associées à des phénomènes d'apophonie. Il importe alors de confronter ce tableau de l'indo-européen reconstruit avec les données
"eau" > hitt. watar / nom.-acc. collectif *J,!ed-or > hitt. pl. widar;
baltiques. On pourra ainsi déterminer dans quelle mesure les langues
alternance suffixale: < 0/0 >, cf. i.-e. nom.-acc. sg. neutre *-m{l >
baltiques ont réduit, ou au contraire développé, le domaine de l'apophonie
avest. réc. haxma "société" / nom.-acc. collectif neutre *-mon
et, par là même, quelles fonctions celle-ci a assumées dans la préhistoire
> avest. réc. pl. haxflm{lm.
immédiate de ces langues.
De même, dans le système verbal, l'alternance vocalique pouvait
Il est intéressant d'observer, pour commencer, les catégories dans lesquelles l'apophonie n'apparaît pratiquement jamais: un fait linguistique
toucher aussi bien le radical que le suffixe: re
• Exemple d'alternance radicale: < e/ 0 >, cf. Î.-e. 1 sg. *h1ej-mi
se définit autant par ses limites que par ses caractères propres. On
r pl. *hd-me- "nous allons" > gr. '(\lEV; e alternance suffixale: < e/ 0 >, cf. Î.-e. 3 sg. *-ney-ti> véd. sPJoti
envisagera donc tout d'abord les catégories de la personne, du cas, du
"je vais" > gr. dlil, vs.
e
e
"il entend" / 3 pl. *-nJ,!-%nti> véd. sPJwinti "ils entendent". _ (d) catégorie du GENRE: à l'intérieur du système nominal, l'alternance vocalique liée à une distinction de genre grammatical pouvait toucher en indo-européen aussi bien le radical que le suffixe: • Exemple d'alternance radicale: < e /0>, cf. Î.-e. nom. sg. masc.
*sem-s "un" > gr. Ets / nom. sg. fém. *sm-iih2 "une" > gr. lita; alternance suffixale: < 0 /0>, i.-e. nom. sg. masc. *-on > véd.
râja "roi" / nom. sg. fém.*-n- > véd. râjnï"reine". _ (e) catégorie du MODE: à l'intérieur du système verbal, l'alternance vocalique pouvait opposer le radical de différents modes: • Exemple d'alternance modale : <
e/ 0
>, cf. Î.-e. indicatif
*h1es-mi> véd. asmi "je suis" / optatif *h1s-jeh1-m > véd. syâlJ'l. _ (f) catégorie du TEMPS: à l'intérieur du système verbal,
l'alternance vocalique pouvait opposer le radical de différents thèmes aspecto-temporels: • Exemple d'alternance temporelle: <
e/
0
>, cf. Î.-e. thème de
présent *set- > gr. Ëxw "avoir" / thème d'aoriste *st- > gr. Éax ov .
nombre et du genre, en examinant leur relation éventuelle avec le phénomène de l'apophonie en baltique. En second lieu, on étudiera des catégories dans lesquelles l'apophonie joue parfois en baltique un rôle central, c'est-à-dire les catégories du mode et du temps. Seule l'apophonie radicale sera ici étudiée, parce qu'elle constitue un ensemble de problèmes assez différents de ceux que pose l'apophonie suffixale, et surtout parce qu'elle appartient à un état très archaïque des langues baltiques. La question de l'apophonie suffixale, ainsi que celle des rapports entre apophonie et dérivation lexicale, mériteraient à elles seules une monographie; elles ne seront évoquées ici qu'en passant.
CHAPITRE 1 CATÉGORIE DE LA PERSONNE ET APOPHONIE RADICALE
1. INTRODUCTION
Dans le système verbal des langues indo-européennes, la catégorie de la personne n'est jamais liée, isolément, à des phénomènes apophoniques. On observe en fait une totale cohésion apophonique des formes verbales personnelles d'un même nombre. Par exemple, un présent radical athématique avait en indo-européen un degré
*e
constant à toutes les
personnes du singulier, un degré zéro constant à toutes les personnes du pluriel. Lorsqu'une langue comme le français oppose une
re
pl. nous
e
venons et une 3 pl. ils viennent, il ne s'agit nullement d'un cas d'apophonie < e / ie >, mais d'une évolution phonétique récente, conditionnée 1 par a place de l'accent en latin. Cette limitation du domaine de l'apophonie appartient déjà à l'indoeuroPéen commun, et il n'est pas étonnant qu'elle apparaisse exactement . " . ., genera " I le,& dans les mêmes cond"ltIons en ba1tique. De mamere es .lormes
16
Catégorie de la personne
Catégorie de la personne
verbales associées dans un paradigme et distinguées seulement par le critère
distribution est parfaitement réglée par la place de l'accent: formes atones à
de la personne présentent dans les langues baltiques le même degré
voyelle brève e
(Ire
17
sg. drebiù, 2e sg. drebi), formes toniques à voyelle
vocalique. Plusieurs exceptions apparentes peuvent être évoquées; on
allongée (3 p. drebia, 1 pl. drebiame, 2e pl. drebiate). L'allongement, et
s'apercevra vite qu'elles n'ont rien à voir avec le phénomène de
par conséquent l'alternance quantitative qui en résulte, proviennent donc
l'apophonie.
d'un fait phonétique secondaire et ne relèvent pas de l'apophonie. Au
II. OPPOSITIONS QUANTITATIVES DANS LE VERBE LITUANIEN
re
contraire, dans le prétérit drèbé, la voyelle longue [e:] n'est pas phonétiquement conditionnée: elle apparaît sous l'accent à la troisième personne e
Les grammaires académiques du lituanien classent parfois parmi les cas
(3 p. drèbé, cf. aussi 1Te pl. drèbeme, 2 e pl. drèbéte), mais également hors
d'apophonie (lit. bafsi{l kaità "alternance vocalique, apophonie") des
de l'accent aux deux premières personnes du singulier (1 re sg. drébiaü,
oppositions de quantité comme celle du lit. drebiù "je jette" (l re sg.), avec
2 sg. drébel). Il s'agit donc non pas d'un allophone, mais d'un
voyelle radicale brève [E], et du lit. drebia "il jette" (3 e p.), avec voyelle
allomorphe, où l'on peut voir la manifestation d'une apophonie, si l'on
radicale longue [E :], ou encore du lit. manaü "je pense"
sg.), avec
défmit celle-ci précisément par son caractère morphonologique. Dans les
voyelle radicale brève [a], et du lit. miino "il pense" (3 p.), avec voyelle
grammaires lituaniennes récentes, les cas du type drebiù / drebia sont à
radicale longue [a:]3. Formellement, l'alternance paraît assimilable à un cas
juste titre séparés de l'apophonie: la grammaire académique de 1994
d'apophonie quantitative.
(DLKG, p. 41, § 49), par exemple, les conçoit comme relevant de
(Ire
e
e
Toutefois, on doit reconnaître que la variation vocalique < E / E: > qui
"changements vocaliques quantitatifs automatiques" (lit. automatiniai
oppose en lituanien drebiù "je jette, j'éclabousse" et drebia "il jette, il
kiekybiniai balsi{l pakitimai), et les distingue de l'apophonie, présentée
éclabousse" n'est pas de même nature que celle qui sépare le présent drebia
comme une "alternance vocalique non automatique" (lit. neautomatine balsi{l kaita)5.
"il jette, il éclabousse" du prétérit drèbé "il jeta, il éclaboussa" (variation
<E:/e:». La voyelle longue [E:] dans drebia n'est rien d'autre qu'un allophone, contextuellement déterminé par la présence de l'accent, de la
III. LA TROISIÈME PERSONNE DU FUTUR LITUANIEN
voyelle brève [E], laquelle est conservée hors de l'accent dans drebiù. On
Un autre cas comparable est celui de l'indicatif futur en lituanien. La
sait en effet que les voyelles e [E] et a [a], et seulement ces deux voyelles,
troisième personne présente fréquemment une voyelle différente des autres
s'allongent en syllabe ouverte sous l'accent en lituanien. Cet allongement n'est pas constant, et l'on observe un certain nombre d'irrégularités, par
personnes du singulier et du pluriel, par ex. < Ü / li > dans le futur lituanien r e sg. b~' ". ." 1re p.1 b~ US1U Je seraI, usime "nous serons", vs. 3e p. bùs "il sera
exemple lit. niikt{ (acc. de naktis "nuit"), avec allongement en syllabe
(ils seront)" (inf. lit. bûti "être").
fermée, ou lit. màno, tàvo, sàvo (génitifs possessifs "mon, ton, son"), sans allongement en syllabe ouverte tonique 4 . Dans les formes de l'indicatif, la chez Petit (1999a, p. 30); analyse diachronique chez Kortlandt (1977, p. 326) et Derksen (1996, p. 27). 3. Voir, par exemple, LKG (1, p. 99-109, §§ 115-119). 4. Sur cette "loi phonétique" et les problèmes qu'elle soulève, voir Zinkevicius (1966, p. 103-107). Une interprétation synchronique est proposée
5. Cf. DLKG (p. 44, § 57). Même analyse dans la version anglaise de la même grammair~ (LG, 1997, p. 62). Voir dans le même sens déjà Venckutè (1971,
p. 81~, 9Ul parle de fonetiniai prielpastatymai ("oppositions phonétiques") et les dlstmgue des gramatiniai prielpastatymai ("oppositions grammaticales").
Catégorie de la personne
18
Catégorie de la personne
De même encore6 :
-<û/u>: • ind. futur 1re sg. siûsiu, 1re pl. siûsime, vs. 3 e p. sius (inf. siûti
-<ü/il>:
r e sg. pûsiu, 1 re pl. pûsime, vs. 3 e p. pùs (inf. pûti e re e "pourrir") ; ind. futur r sg. iûsiu, 1 pl. iûsime, vs. 3 p. iùs re (inf. iûti "périr") ; ind. futur r e sg. griûsiu, 1 pl. griûsime, vs. • ind. futur
"coudre"). -
: • ind. futur
3 p. griùs (inf. griûti "s'écrouler").
"donner").
-:
-<6/0>:
e
e
re
• ind. futur 1re sg. gysiu, 1 pl. gysime, vs. 3 p. re
"guérir, se rétablir") ; ind. futur 1 sg. rysiu, 3e p. ris (inf.
19
ryti "avaler,
gis (inf.
r e pl. rysime,
gyti vs.
engloutir") ; noter aussi le verbe imper-
• ind. futur
sg. duosiu,
Ire
Ire
pl. duosime, vs. 3e p. duos (inf. duoti
r e sg. soksiu, r e pl.
soksime, vs. 3e p. soks (inf. sokti
"sauter, danser"). - <él/ eT>: re
• ind. futur 1 sg. ké/s iu, 1re pl. ké/s ime, vs. 3e p. kels (inf. ké/ti
sonnel/yti "pleuvoir" (3 e p. futur lis "il pleuvra"). L'alternance quantitative ressemble formellement à un phénomène d'apophonie. Cependant, elle s'en distingue nettement en ce qu'elle est phonétiquement conditionnée: elle n'apparaît jamais que dans des verbes
"lever"). Le même contraste d'intonation se rencontre aussi de manière régulière dans les verbes à thème polysyllabique, par exemple:
dont le thème, toujours monosyllabique, se trouve en position finale à la
- <Î/I>:
troisième personne. Or on sait qu'en vertu de la loi de Leskien (1881,
• ind. futur
p. 188-190) une voyelle longue d'intonation rude s'abrège en finale en
sakjti "dire").
proto-lituanien? L'alternance de <ü/il> et de < ï/'i> résulte donc d'un
-<ê/e>:
abrègement secondaire de [û] et [î] en position finale> [il] et ['i]. Il ne
• ind. futur 1re sg. stovésiu, 1re pl. stovésime, vs. 3e p. stovés (inf.
s'agit pas, à proprement parler, d'apophonie.
stovéti "être debout").
Ire
sg. sakjsiu,
r e pl.
sakjsime, vs. 3e p. sakys (inf.
Cet abrègement n'est du reste pas constant. Dans la plupart des verbes à
On notera que certains dialectes lituaniens (surtout sur le domaine haut-
thème monosyllabique il est remplacé par une métatonie douce, par
lituanien de l'Est) présentent un abrègement à la 3e p. du futur, même dans
exemple:
les thèmes polysyllabiques, cf. par exemple lit. dial. futur 3e p. sakis (: lit. e
standard sakys, cf. inf. sakjti "dire"), 3 p. iinàs (: lit. standard iinos, cf.
- <Î/I>: e
• ind. futur 1re sg. vysiu, 1re pl. vysime, vs. 3 p. vys (inf.
ryti
"chasser").
e
inf. linoti "savoir"), 3 p. stovès (: lit. standard stovés, cf. inf. stovéti "être debout"), ce qui, pour certains, représente peut-être l'état le plus ancien 8 • Selon Zinkevicius (1966, p. 361), à l'origine, l'abrègement était propre aux
6. Cf. DLKG (p. 341, § 938). Sur la forme du suffixe de futur en lituanien (*-s- ou *-si-), voir Schmid (1963, p. 55), Jasanoff (1978, p. 103-107, §§ 8790). Bibliographie plus complète chez Petit (2002, p. 245). 7. La loi de Leskien est traditionnellement datée du XIIIe siècle, mais, en fait, on peut la situer un peu plus tôt entre le XIIe siècle et le début du XIIIe siècle. Sur cette question, voir Girdenis (2000-2001, III, p. 385-386).
thèmes polysyllabiques, la métatonie douce aux thèmes monosyllabiques, d'où un contraste:
8. Voir LKG (II, p. 137, § 199), Zinkevicius (1966, p. 361-362, § 666).
21
Catégorie de la personne
Catégorie de la personne
20
e
- *iinâti- > lit. iinoti "savoir" --+ futur 3 p. *:linâs > *:linàs
PARADIGME
TRANSCRIPTION PHONÉTIQUE
(cf. lit. dial. iinàs; la forme à métatonie du lituanien infinitif
nest
1re sg.
nesu
[nçsu]
2 e sg.
nes
[nes]
(cf. lit. standard soks; la forme à abrègement du lituanien
3 e p.
nes
[nçs]
dialectal sàks serait analogique du modèle de :linoti "savoir' :
1re pl.
nesam
[nçsàm]
2 e pl.
nesat
[nçsat]
standard :linos serait analogique du modèle de stoti "se lever" : futur stos).
- *sâkti- > lit. sokti "sauter, danser"
e
--+
futur 3 p. *sâks > *fâks
futur :linàs).
"porter"
[nest]
Ce principe originel aurait été, selon Zinkevicius, brouillé ultérieurement dans les différents dialectes, au point d'aboutir en lituanien standard
L'opposition de la 1re sg. nesu "je porte" [nçsu] et de la 2 sg. nes "tu
à une distribution apparemment inverse (abrègement dans le monosyllabe
portes" [nes] paraît dès l'abord compamble à un fait d'apophonie (type < ç
gis de gyti "guérir", métatonie douce dans le polysyllabe sakys de sakYti
/ e ». Cependant, ici encore, la distribution des deux variantes vocaliques
"dire"). D'autres analyses sont cependant possibles9 . Quelle qu'ait pu être
est le résultat d'une évolution phonétique particulière, puisqu'elle dépend
l'origine de ce phénomène, qui est propre au haut-lituanien (le letton,
en l'occurrence de la qualité de la voyelle qui se trouve - ou se trouvait
comme le bas-lituanien, a conservé, ou restauré, partout la voyelle longue,
originellement- dans la syllabe suivante 10 • On trouve une voyelle fennée
re
cf. lett. futur 1 sg. bûsu,
r
e
e
e
pl. bûsim, 3 p. bûs, infinitif bût "être"), il
[e] devant les voyelles ou diphtongues palatales (lett. i, l, e, ë, ie, ei), ainsi
résulte d'un processus phonétique secondaire et ne relève donc pas de
que devant les consonnes palatalisantes ou palatalisées (lett. j,
l'apophonie.
i,
c,
l,
[1,
fc,
g, s,
di, bj, pj, mj, vj); on trouve une voyelle ouverte [ç] dans les autres e
IV. PARADIGME VERBAL ET HARMONIE VOCALIQUE EN LETTON
contextes. Ce principe phonétique explique la différence entre la 2 sg. nes "tu portes" [nes] < *nes-i (cf. lit. neSi "tu portes") et les autres personnes,
Il reste à évoquer un dernier cas. En letton, les verbes à voyelle mdicale
1re sg. nesu ''je porte" [nçsu] < *nes-u (cf. lit. nesù "je porte"), 3e p. nes 'il
r e pl.
de timbre [el présentent au singulier de l'indicatif présent une alternance
porte' [nçs] < *nes-a (cf. lit. nêsa "il porte"),
entre une variante fermée [el (notée e) et une variante ouverte [E] (notée ç),
[nçsàm] < *nes-ame (cf. lit. nêsame "nous portons"), 2e pl. nesat "vous
par exemple:
portez" [nçsat] < *nes-ate (cf. lit. nêsate "vous portez"). Rien n'autorise,
nesam "nous portons"
par conséquent, à interpréter comme apophonique une alternance qui repose en réalité sur un fait d'harmonie vocalique.
9. Voir par exemple aussi Ekblom (1923, p. 241-253). Kortlandt (19~5, p. 115-116) explique la métatonie douce dans ces fo~es d~ futur p~ ?n anCIen degré long morphologique, issu d'un aoriste sIgI?at1qu~. ulterIeurement disparu en baltique. L'hypothèse me paraît peu éConomlq.ue. J al proposé, pour ma part, une analyse différente dans un article récent (PetIt, 2002, p. 245-282).
10. Cf. MLLVG (I, p. 41-47, § 82-84), Laua (1997, p. 112-127), Forssman (2001, p. 74). Voir une description synchronique du phénomène chez Fennell (1970, p. 119-123).
Catégorie de la personne
22
V. CONCLUSION
En conclusion, on constate que le critère de la personne n'est jamais par lui-même associé en baltique au phénomène de l'apophonie. Les langues baltiques reflètent, en l'occurrence, une limitation héritée de l'indoeuropéen et ne l'ont pas remise en question. Il est vraisemblable que l'opposition des personnes à l'intérieur d'un paradigme verbal était déjà grammaticalisée en indo-européen au point de leur imposer une structure
CHAPITRE II
apophonique unitaire. Sur ce point, les langues baltiques n'ont pas modifié le système indo-européen.
CATÉGORIE DU CAS ET APOPHONIE RADICALE
J. INTRODUCTION
Dans le système nominal des langues indo-européennes, les faits d'apophonie entre formes casuelles sont fréquents, et de nombreux indices conduisent à penser qu'ils avaient encore une plus large extension en indoeuropéen. C'est dans les formations athématiques qu'ils sont le plus clairement représentés. On en possède peu de vestiges dans les formations "alphathématiques" (le seul notable étant i.-e.
*gWn-ehrs
*gWen-(e)h2,
gén. sg.
"femme"). Dans les formations thématiques, ils sont
inexistants, la présence d'une voyelle thématique excluant toute apophonie du radical ou du suffixe. Il convient, à cet égard, de distinguer deux types d'apophonie: - (a) apophonie radicale entre formes casuelles d'un même paradigme : par ex. < 0 /
e >,
i.-e. nom. sg. *dom-(s) "maison"
(> arme town), vs. gén. sg. *dem-s (>
V.
avest. dfJ1}g paitis,
gr. 8EalT0TT15' "maître de maison"). Cf. exemples chez Kurylowicz (1968, p. 33, § 29).
Catégorie du cas
24
Catégorie du cas
- (b) apophonie suffixale entre fonnes casuelles d'un même paradigme : par ex. < ë /
0
>, i.-e. nom. sg. *-tër (> gr. rrunlP
"père"), vs. gén. sg. *-tr- (> gr. rra-Tp-os).
25
Il apparaît, dès le premier abord, que les langues baltiques ont largement éliminé les apophonies touchant les radicaux à l'intérieur des flexions nominales casuelles. En règle générale, dans chacune des langues
Dans les formations suffixées, l'apophonie touchait fréquemment à la fois
baltiques, le radical d'un substantif ou d'un adjectif présente une forme
le radical et le suffixe, par exemple:
unique et invariée; seuls les suffixes et les finales désinentielles peuvent
- (c) apophonie radicale et suffixale entre formes casuelles d'un > et
Cependant, plusieurs traces indirectes laissent supposer qu'en proto-
* h2eys-os "aurore" (> gr.
baltique l'apophonie radicale pouvait encore exister à l'intérieur d'un même paradigme.
même paradigme : par ex. apophonie radicale < suffixale < 0/ fi} >, i.-e. nom. sg.
e/ 0
hom.liws, d'où secondairement gén. sg. lious), vs. gén. sg.
*h2us-s-eJos (> véd.
u~él1'),
encore relever dans une certaine mesure du système de l'apophonie.
d'où secondairement nom. sg.
u~ah).
La combinaison de ces apophonies diverses permet de distinguer
II. NOMS-RACINES ET APOPHONIE RADICALE
D'un point de vue diachronique, l'une des classes dont l'apophonie ait
différents "schémas apophoniques", dont la reconstruction a fait l'objet
été la plus claire en indo-européen était celle des "noms-racines"
depuis plus d'une quarantaine d'années d'analyses cohérentes (par ex.
(substantifs radicaux athématiques). Son schéma apophonique a été
Eichner, 1972; Schindler, 1972, 1975; Rix, 1976; Beekes, 1985)11.
reconstitué avec vraisemblance par Schindler dans un article devenu
Même si le détail de ces analyses n'est pas entièrement assuré et qu'une tendance puisse exister à multiplier les entités apophoniques pour rendre
classique (1972, p. 31-38). Il existait, selon Schindler, deux types de noms-racines en indo-européen 12 :
compte des variations observées dans les langues, il n'en demeure pas
- (1) Type "protérodynamique" : nom. sg. *CoC-s, ace. sg.
moins que la théorie des "schémas apophoniques" constitue un net progrès
*CoC-.cp, gén. sg. *CeC-s, cf. i.-e. *pod-s "pied", acc.
dans la compréhension du système nominal de l' indo-européen et que sa
*pod-.cp (gr. dor.
légitimité ne saurait être mise en doute.
*ped-s (refait en *ped-eJos > lat. pedis, d'où nom. pës).
Il ne peut être question, dans une étude portant sur les apophonies baltiques, de présenter une vue d'ensemble des "schémas apophoniques" de l'indo-européen. La méthode adoptée ici consistera, plus simplement, à confronter les données baltiques avec les faits des autres langues, afm de détenniner ce qui a pu survivre en baltique des anciennes apophonies
1HDS.
acc. rrô8a, d'où gén. rro86s), gén.
- (2) Type "hystérodynamique" : nom. sg. *CëC-s, acc. sg.
*CeC-.cp, gén. sg. *CC-eJos, cf. i.-e. *diëJ!-s "ciel lumineux, jour", acc. *dielJ-m > *diëm (gr. Zn)s, acc. Z"v(a); lat.
Iii-piter, acc. secondaire Iouem ; acc. diem, d'où nom. diës), gén. *di/J-e/os (gr. ~lÔS).
casuelles. On prendra comme objet d'étude principal les apophonies radicales, qui sont probablement d'un caractère plus archaïque et sont demeurées moins vivantes en baltique que les apophonies suffixales. Il. Voir une présentation de ces théories chez Meier-Brügger (2002, p. 203220).
12. Voir aussi Kurylowicz (1956, p. 48 sq.), Larsson (1999, p. 12).
26
Catégorie du cas
Catégorie du cas
Dans les langues baltiques, les noms-racines ont tendu à disparaître en
27
1. ABSENCE D'APOPHONIE RADICALE
tant que classe morphologique 13 . Ils se sont intégrés le plus souvent à la classe des substantifs en *-i-, sur la base d'une métanalyse de leur fonne
Du point de vue de l'apophonie radicale, les vestiges de noms-racines
d'accusatif *-lp (> balt. *-in, analysable comme *-i-n, d'où nominatif
indo-européens se laissent séparer en deux catégories. La plupart des
secondaire *-i-s). Toutefois, il subsiste encore en baltique quelques
anciens noms-racines présentent en baltique un radical figé sous une fonne
vestiges clairs des noms-racines. Ainsi, en lituanien, leur génitif pluriel,
unique, qui ne laisse plus rien transparaître d'un schéma apophonique indo-
qui est en général en
-{l
«
i.-e. *-om), les distingue des thèmes en *-i-
anciens, qui ont un génitif pluriel en -il!
«
i.-e. *-i-om). On peut ainsi
opposer, par exemple, lit. iuv-is "poisson", gén. pl. iuv-y
« nom-racine
européen. Pour certains d'entre eux, les correspondants externes eux-mêmes ne permettent pas de reconstruire un schéma apophonique. On citera notamment:
i.-e. *J'tuH-s, cf. gr. LX6ùS', -vos) et lit. av-is "brebis", gén. pl. av-iy
- BALTIQUE *tuH-, *!uv-(i)- "poisson"15 :
«
• lituanien: zuvis "poisson", fém. (gén. pl. iuv-il), nom. pl. dial.
thème en *-i- Ï.-e. *h 2oy-i-, cf. véd. avi/J, lat. ouis, gr. OlS)14. Dans les
textes anciens et encore aujourd'hui dans plusieurs dialectes lituaniens, les
iùves de type consonantique.
vestiges des noms-racines conservent une fmale consonantique au génitif
• letton: zivs, dial. zuvs ou zuve "poisson", fém. (gén. pl. dial. zivu
singulier (gén. sg. -es < i.-e. *-es, en regard de lit. -ies < i.-e. *-ei-s, dans
ouzuvu).
les thèmes en *-i-), et au nominatif pluriel (nom. pl. -es < i.-e. *-es, en
• v. prussien: dérivé à suffixe *-ka-, v. pro suckis / vysch "poisson"
regard de lit. -ys
(E 560), ace. pl. suckans / fisch "poissons" (III, 107 1).
noms-racines est donc un fait récent en lituanien, et leur existence peut être
• Zinov: iuwo / ryby "poissons" (Z 17, cf. Zinkevicius, 1985, p. 82)16.
postulée avec certitude en proto-baltique.
Il faut partir d'un nom-racine à radical immobile en i.-e. *JtuH-, cf. gr.
lX6ùS' "poisson" (gén. sg. LX6voS), arm. jowkn "poisson". La fonne d'accusatif singulier i.-e. *JtuH-lp (~gr. Lx8va, cf. gr. lX6Dv, avec autre 13. Sur les vestiges des noms-racines en baltique, cf. Skardzius (1956, p. 158-166 = RR(S), IV, p. 675-683, sur leur apophonie radicale : p. 162 = p. 679), Kazlauskas (1961 b, p. 73-78), Larsson (1999). Données balto-slaves : Vaillant (GCLS/., II/l, p. 166-178). 14. Sur ce point, cf. SkardZius (1956, p. 160-161 = RR(S), IV, p. 677-678), Barschel (1974, p. 175-183), Larsson (1999, p. 28), Petit (1999a, p. 50 et 5657). Il existe cependant d'anciens thèmes consonantiques qui, en lituanien, sont passés entièrement à la flexion en *-i-, même au génitif pluriel, cf. lit. antis "canard" (gén. pl. anciy), lit. pilis "château" (gén. pl. pilifl.). Mais il se trouve justement que l'origine consonantique de certains de ces lexèmes n'est pas entièrement assurée: les correspondants du lit. antis appartiennent soit au type consonantique (lat. anas), soit au type en *-i- (véd. iitil}); ceux du lit. pilis relèvent eux aussi soit du type consonantique (véd. pûr, gén. sg. pural}), soit du type en *-i- (gr. TTOÀLS, gén. sg. TTOÀEWS). Dès le vieux lituanien, les flottements entre gén. pl. en -{l et gén. pl. en -i{l étaient fréquents (voir Kazlauskas, 1961 a, p. 62-64; 1961b, p. 73-78).
syllabation) a abouti régulièrement en baltique à *:iuv-in> lit. iùv{, d'où un nominatif secondaire lit. iuvis. Le
V.
prussien *:iukas (nom. sg. suckis,
15. Trautmann (BSW, p. 373), Mülenbachs-Endzelïns (ME, IV, p. 730), Fraenkel (LEW, II, p. 1323), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 274), Sabaliauskas (1990 p. 38), Maziulis (PKEZ, IV, p. 167), Larsson (1999, p. 50-52), Smoczyfiski (2001, p. 114). Cf. LKZ (XX, p. 1008-1014). Voir aussi Winter (1982 p 167186). ' . 16. Le glossaire de Zinov, dont on sait l'histoire mouvementée (cf Schmid 1986~), a été publié par Zinkevicius (1984 et 1985) comme un texte jatvingien: Schm.ld (1986b), pour sa part, y voit un mélange de lituanien et de yiddish. La questIon reste ouverte. J'adopterai ici pour convention de citer les formes de ce glossaire sous l'étiquette "Zinov", ce qui ne préjuge en rien de la nature de ce texte.
28
Catégorie du cas
Catégorie du cas
29
*h 3bhruhr ,
ace. pl. suckans) suppose un thème à voyelle radicale brève, ce qui est
*piirwa- < *bhruJJG-, prolongeant peut-être Ï.-e.
prouvé par la graphie de type géminé -ck-; il paraît difficile, malgré
ellement Ï.-e. *h3bhruhr h/, avec finale de duel)2o. Kuiper (1942, p.9)
Larsson (1999, p. 51), de dériver cette forme *iu-kas d'un prototype
reconstruit un paradigme alternant en
baltique consonantique *iuH- « Ï.-e. *J'tuH-). La gutturale *-k- pourrait
h h *{h3}b rêJJH-s, acc. sg. *{h3}b reJ}H-I[l, gén. sg. *{h3}bhruH-os, loc. pl.
se retrouver en lituanien (lit. dial. fùk-mistras "Fischmeister", fùk-sparnis
*{h3}bhruH-su, en s'appuyant sur la comparaison de formes attestées en
"Fischhaar", avec voyelle radicale brève, cf. LKZ, XX, p. 986), et plus
germanique (cf. vha. brawa "sourcil", all. Augenbraue "sourcil" < i.-e.
lointainement en arménien (arm. jowkn), mais son origine demeure obscure 17 .
*(h3}b reJ}H-).
ou éventu-
indo-européen, nom.
sg.
h
Toutefois, les langues indo-européennes ne présentent aucune trace claire d'apophonie radicale21 . On notera que le slave a un
- BALTIQUE *bruH-, *bruv-(i)- "sourcil,,18:
thème en *-i- tout comme le baltique. Le passage au thème en *-i- s'est
3 • v. lituanien: bruvis "sourcil" (Sirvydas, DTL , p. 22: Brew
opéré à partir de la forme d'accusatif singulier, comme pour le mot précédent.
/ Supercilium / Bruwis), lit. dia!. bruvis "sourcil", fém. ou masc.
(Lazlinai: brùves, nom. pl. fém. de type consonantique)19.
- BALTIQUE *piIH-(i)- "forteresse,,22 :
• v. prussien: wubri / wimpro "Wimper, sourcil" (E 82), peut-être métathèse de *bruwi (sous l'influence de l'aIl. wimpro ?). Ou bien
• lituanien: pi/is "château", fém. (gén. pl. pili'v.). • letton: pils "château", fém.
emprunt au polabe wabbra?
• v. prussien: -pil(l)e dans les toponymes Pillekaym, Sassenpile,
Il faut partir d'un nom-racine à radical immobile en indo-européen
Wosispille.
h *h3b ruh r , attesté en grec (gr. 6<1>piJs "sourcil", gén. sg. 6<1>puos), en indo-
Il faut partir d'un nom-racine à radical immobile en Ï.-e. *pjhr, attesté en
iranien (véd. bhrûi) "sourcil", gén. sg. bhruvéli)), en celtique (v. irl. nom.
indo-iranien (véd. pûr "palissade, fortification, enceinte fortifiée", gén. sg.
duel brai, brae "sourcils"), en germanique (v. ang. brû "sourcil", ang.
puréli)) et en grec (gr. lTOÀLS "cité", gén. sg. 1T6ÀEWS)23. Les langues
eyebrow "sourcil"), en slave (v. sI. 6p'bBb / brbv b "sourcil, ~À.É <1>apov",
russe 6poBb / brov' "sourcil", avec dépalatalisation en pol. brew "sourcil", rare au sg., surtout au pl. brwi, tch. brva "sourcil(s)"), et enfin en tokharien (tokh. A piirwaTfl, B piirwane "sourcils", duel < tokh. commun
17. Selon SmoczyfIski (1987b, p.535), le v. prussien suckis (*zukis) représente une forme syncopée d'un diminutif *zuv-uk-/-ik- (cf. lit. zuv-ùké ou zùv-iké, zuv-iké "Fischlein"). Cette hypothèse n'est pas invraisemblable, mais elle n'explique pas la forme arménienne jowkn (sur cette forme, voir désormais ülsen, 1999, p. 130-131). 18. Trautmann (BSW, p. 38), Fraenkel (LEW, l, p. 57), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 272-273), Sabaliauskas (1990, p. 9), MaZiulis (PKEZ, IV, p. 266), Larsson (1999, p. 48-50), SmoczyfIski (2001, p. 116). Cf. LKZ (l,p. 1097). Données slaves: Vasmer (1953-1958, l, p. 124). 19. Petrauskas & Vidugiris (1985, p. 41).
20. Sur les formes tokhariennes, voir Hilmarsson (1989, p. 73-74). Je dois cette référence à G.-J. Pinault. , .2 ~. Le baltique possède sans doute une trace d'un degré plein dans un
~enj,e apparenté: lit. briaunà "bord, dos d'un couteau" (qui suppose un L-e.
h 3 b renH-n-â), cf. v. d. Osten-Sacken (1911, p. 139-145), Fraenkel (LEW, l, p. 57), SmoczyfIski, (~OOOb: p. 22, note 24), LKt (e, p. 1037). Mais l'apophonie attest~e da~s le denvé n est pas nécessairement un reflet d'une apophonie paradlg?1 at1 que propre au nom-racine. La même objection vaut pour les formes germamqres (vha. brâwa "sourcil"), à plus forte raison si elles ne remontent P~s ,à *b rënH-â, comme le pense Kuiper, mais appartiennent à une racine ~~f~~rle)~te *bhrëkw_ii (cf. v. sax. brfew, brég "sourcil"), cf. Schindler (1967b,
22. Trautmann (BSW, p. 217), Mülenbachs-Endzelïns (ME, III, p. 217), p. 591), MaZiulis (PKEZ, III, p. 280-281), Larsson (1999, p. 523), SmoczyfIskl (2001, p. 128). Cf LKZ (IX, p. 986-987).
~raenkel (LEW,!,
23. D'un point de vue sémantique, le sens premier de ce mot indo-européen est probablement "remblai, rempart, fortification". Cette valeur est encore
30
Catégorie du cas
Catégorie du cas
baltiques ne présentent aucune trace d'une flexion consonantique; la
*th2 ens -rp, gén. sg. *th2ns-efos) n'est pas impossible, mais ne dispose
suffixation en *-i- pourrait être ancienne, à en juger par le grec
d'aucun appui assuré25 .
1TOÀ.LS,
fonne visiblement apparentée, mais dont le vocalisme radical, malgré Strunk (1969, p. 1-15), pose toujours problème.
31
- BALTIQUE *tVëT-(i)- ou *fveHT-(i)- "bête sauvage"26 :
• lituanien; ivéris "bête sauvage", fém. (ace. sg. iveri, gén. pl.
- BALTIQUE *fans-(i)- "oie,,24 :
ivériy, dial. ivéry), cf. lit. dial. gén. sg. ivérès, nom. pl. iveres de
• lituanien; içsis "oie", fém. (gén. pl. içsy), dial. gén. sg. içsès,
type consonantique.
nom. pl.
i~ses.
• letton: zvfrs "bête sauvage", fém. (gén. pl. zvfru), en partie fléchi
• letton; zùoss "oie", fém. (gén. pl. dial. zùosu ou zùosu).
comme thème en *-0- (en raison de l'ambiguïté du nom. sg. et du
• v. prussien; sansy 1 gans "oie" (E 719), passé à la flexion
gén. pl.) ; gén. sg. zvfra.
féminine en *-ï, -iii-; cf. toponymes Sanse/in, Zanseynen.
• v. prussien: acc. pl. swïrins 1thier "bêtes sauvages" (III, 1072).
• emprunt baltique en finnois hanhi, estonien hani (-i reflétant une fmale baltique *-ë).
Il faut partir d'un thème consonantique à radical immobile en Î.-e. *tuër-, cf. gr. ef]p "bête sauvage", masc., fém. tardif (gén. sg. 8r]pOs). Le v. slave
La flexion consonantique est ancienne. Il faut partir d'un nom-racine à
3B'Èph / zverh "id." (fém.) est passé à la flexion en *-i-, cf. russe 3Beph
radical immobile en Î.-e. *tans- (? *th2ens-, selon Schrijver, 1991,
/ zver' "bête sauvage" (gén. sg. 3BepB / zverja), pol. zwierz "id." (gén. sg.
p. 113), cf. gr. Xtlv "oie" (gén. sg. XTlvos), lat. iinser "id." (gén. sg.
zwierza), etc. 27 • Pour expliquer la voyelle brève de l'adjectif thématique
iinseris), russe rYCh / gus' "id.", 00. rYCh / hui "id.", pol.
g~i
"id.", got.
latin firus "sauvage" et du substantif fera "animal sauvage", deux
*gans (cf. emprunts espagnols et portugais gansa "oie" et ganso "jars"),
hypothèses sont possibles. On y voit traditionnellement le reflet d'un degré
v. isl. gas "oie", v. ang. gos "id.", vha. gans "id." (thème en *-i-), v. irl.
bref*tuer- à côté duquel *tUër- (gr. 61lP, etc.) présenterait un degré long
géis "cygne"
«
celt. *gansï). Le védique a un substantif thématique
morphologique (le degré zéro *tur- serait peut-être attesté dans le latin
secondaire (véd. ha1'flsa- "cygne", d'où fém. ha1'flsl "oie"). La
jUror "furie")28; cette hypothèse, qui aurait le mérite de rattacher la
reconstruction d'un paradigme alternant (nom. sg. *teh2ns-s, acc. sg.
désignation de la "bête sauvage" à une racine verbale (i.-e. *tJJer-, *tur-
sensible en védique (cf. Rau, 1976), et on peut la reconstruire pour le grec (cf. Casevitz, Lévy et Woronoff, 1989, p. 279-285, qui définissent rr6À.LS' comme "ville vue de l'extérieur" par opposition à dO'TV, qui est la "ville vue de l'intérieur"). Il paraît probable que cette ancienne désignation relève étymologiquement de la racine *p/ehr "verser, déverser, remplir", attestée par exemple dans le lituanien pUti "verser" (noter en particulier lit. pylimas "digue"). 24. Trautmann (BSW, p. 365), Mülenbachs-Endzelïns (ME, IV, p. 760), Fraenkel (LEW, II, p. 1292-1293), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 168), Sabaliauskas (1990, p. 37-38), Mafiulis (PKEZ, IV, p. 62), Euler (1985, p. 90), Hinze (1985, p. 105 ; 1996-1997, p. 151), Blafek (1998, p. 16), Larsson (1999, p. 37-40), Smoczynski (2001, p. 112). Cf. LKZ (XX, p. 201-205). Sur la flexion du mot en indo-européen, cf. Griepentrog (1995, p. 211-232, sur les formes baltiques p. 225-226). Données slaves: Vasmer (1953-1958, 1, p. 324).
. ~5. En ce sens, voir Kortlandt (1985, p. 120) et Lubotsky (1989, p.60). Cntlque chez Griepentrog (1995, p. 231). 26. Trautmann (BSW, p. 374), Mülenbachs-Endzelïns (ME, IV, p. 773), Fraenkel (LEW, II, p. 1327), Sabaliauskas (1990, p. 38), Mafiulis (PKEZ, IV, p. 179-180), Larsson (1999, p. 62-64). Cf. LKZ (XX, p. 1090-1093). 27. Données slaves: Vaillant (GCLS/., 1111, p. 148-149, 167), Vasmer (19531958, l, p. 448). 28. Voir, en ce sens, Puhvel (1998, p. 607-609), qui rapproche le hittite
kurur "guerre" « "sauvagerie"), et plus lointainement le védique ghora"h orn'bl e, cruel" « *gh0 yr-o- ?). Récemment, Young (2002, p. 109-115) a proposé de rapprocher de cette famille l'adjectif lituanien ziaurùs "cruel" (sur
la base d'un thème 1). Autre étymologie chez Schindler (1972), qui rapproche véd. hvarate "boiter, marcher de travers".
32
Catégorie du cas
"être furieux"), pose cependant un problème si l'on admet, comme le fait Kortlandt, que l'intonation rude du baltique (lit. ivéris, acc. sg. iver{) ne peut pas remonter à un degré long morphologique. En ce cas, on est contraint de reconstruire un prototype i.-e. *gyehJr-, qui explique bien l'intonation, mais présente l'inconvénient de ne se rattacher à aucune racine verbale connue; la voyelle brève du latin rerus serait alors due à un abrègement (du type lat. uir "homme" < *Ylros, en regard de lit. vfras, véd. vfral; "homme" < *yiHros)29.
Catégorie du cas
33
perçue comme telle, et le mot a été interprété comme un nom-racine. Sa flexion était certainement de type acrostatique en indo-européen: - nom. sg. *nokWt-s : lat. nox "nuit" (gén. noctis), gr. vu~ "nuit" (gén. sg.
VUKTÔS),
véd. naktalJ1 "la nuit, bei Nacht" (acc. sg.) ; cf.
tokh. A nakcu, B nekciye "le soir" (adv.). - gén. sg.
*nek t_s : hitt. w
nekut- "soir" (gén. sg. nekuz "pendant le
soir, la nuit", cf. me-hur ne-ku-uz "temps du soir"). Noter le sens ancien de "soir", conservé seulement en hittite et en tokharien.
2. APOPHONIE RADICALE PERDUE EN BALTIQUE Dans quelques cas, l'existence d'un paradigme alternant est probable en indo-européen, mais la plupart des langues en ont éliminé toute trace. Le baltique présente alors, comme la majorité des autres langues, un radical
Comme la plupart des autres langues, le baltique a généralisé le thème fort *nokWt-. Le passage, en baltique, aux thèmes en *-i- a un parallèle en slave
vue", fém., russe HOl.fb / noc' "id.", pol. noc "id."), partiellement en germanique (got. nahts "nuit, vûe", v. isl. nott (v. sI. HOlIITb / nostb "nuit,
"id.", v. ang. niht, neahte 'id.', vha. naht "Nacht, nuit", fém., cf vha.
unifié. Ainsi:
nahti-gala "Nachtigall, rossignol") ainsi qu'en latin (lat. nox "nuit", gén. - BALTIQUE *nakt-(i)- "nuit,,30 :
• lituanien: naktis "nuit", fém. (gén. pl. naktY). • letton: nakts "nuit", fém. (v. lett. gén. pl. naktu). • v. prussien: acc. sg. naktin / nacht "nuit" (6x Catéchismes). À l'origine, en
indo-européen31 ,
pl. noctium) et probablement en albanais (alb. natë "nuit", pl. net < protoalb. *nakt-f-). Le slave pourrait éventuellement avoir conservé une trace lexicale du thème faible
*nekWt-
dans le composé russe HeTonbIpb
/ netopyr', tch. netopyr, pol. nietoperz "chauve-souris"
«
"oiseau qui vole
le nom de la "nuit" n'était pas un nom-
la nuit", avec sI. *neto- < i.-e. *nekW-t-(o)- ?)32. Il serait excessif d'en tirer
racine, mais un nom à suffixe *-t- (*nokW-t-) constitué sur une racine * nek w - (ou plutôt *negW-, si l'on rapproche lat. niger "noir", avec
la conclusion que le radical du nom-racine avait conservé son apophonie en balto-slave.
assourdissement dans *nogW-t- > *nokW-t-). La racine verbale n'est conservée, à l'état libre, qu'en hittite (hitt. nekuzzi "il fait sombre" < i.-e. *negW-ti). Dans la plupart des langues, la formation en *-t- a cessé d'être
29. Schrijver (1991, p. 337), Meiser (1998, p. 75, § 57), Smoczyfiski (2001, p. 109). 30. Trautmann (BSW, p. 193), Fraenkel (LEW, 1, p. 481), Kazlauskas (1961 b, p. 75), Larsson (1999, p. 40-43), Smoczyfiski (2001, p. 105). Cf. LKZ (VIII, p. 520-522). Données balto-slaves: Vaillant (GCLS/., II/l, p. 168). 31. Reconstruction du paradigme i.-e., cf. ~chindler (1967c, p. 290-303), Mayrhofer (1986, p. 108-109). Voir aussi Gnepentrog (1995, p. 476-479), Rieken (1999, p. 128-129). Sur les formes slaves, cf. Vasmer (1953-1958, II, p. 229). Sur la forme albanaise, cf. Hamp (1961, p. 254-256).
32. Analyse traditionnelle représentée, entre autres, par Benveniste (1935, p. 10). Dossier étymologique chez Vasmer (1953-1958, II, p. 216). Autre analyse (peu convaincante) chez Otr~bski (1949, p. 336): *ne- (négation) + *-to- (particule renforçante) + *-pyru "plume" ("oiseau sans plumes", comme en fr. chauve-souris). Récemment, Blazek (2000, p. 362) a proposé une nouvelle étymologie du mot, en partant de la variante dialectale *neputyrz (v. russe Hen'bThlph / nepDtyn, v. ukrainien nepotyr, russe dial. [Irkutsk] HenTYPYH 1nepturun), analysée comme *ne-putyri "non-bird" ; en ce cas, l'autre variante (russe HeTonhlph / netopyr', etc.) résulterait d'une métathèse.
35
Catégorie du cas
Catégorie du cas
34
- BALTIQUE *iint-(i)- "canard,,33 :
- BALTIQUE *naHs-(i)- "nez,,37 :
• lituanien: émtis "canard", fém. (gén. pl. anCiy).
• lituanien: nosis "nez", fém. (gén. pl. nosiy, dial. n6sy).
• v. prussien: antis / ente "canard" (E 720).
• letton : nass, nase "narine" (le "nez", en letton, est dfgùns,
• le letton a une autre désignation: lett. pile "canard", fém. (cf. bas-
d'origine obscure).
lit. pYlë).
• v. prussien: nozy / nase "nez" (E 85, passé à la flexion féminine
Il faut partir d'un nom-racine: i.-e. *h2enh2t- (ou ancien thème en *-t-:
en *-1, -jii-), noseproly / naseloch "narine" (E 86, à corriger sans
*h2enhr t-), dont les représentants se trouvent en latin anas "canard",
doute en *nosedrosy, cf. Ostrowski, 1998, p. 134-135), ponasse
fém. (gén. sg. anitis ou anatis), en slave *Qty "canard" (cf. russe yrKa
/obir/ippe "lèvre supérieure (sous le nez)" (E 90).
/ utka "id.", fém., s.-cr. ùtva "id.")34, et, avec suffixation ultérieure, en
On part traditionnellement d'un thème sigmatique en i.-e. *nehrs-, figé
germanique *anujJ- "canard" (v. isl. Qnd "id.", v. ang. ened "id.", vha.
comme nom-racine dans la plupart des langues. Seul le sanskrit védique
anut "id.", fém.). Le védique iiti- "animal aquatique" (cf. ossète iice, accœ < *iifi- "canard sauvage") suppose un degré zéro radical « i.-e. *h21J.h 2t-), ce qui pourrait faire penser à un paradigme altemant35 . Mais les autres
présente une apophonie radicale, en opposant une forme à voyelle radicale
langues n'en offrent aucune trace: le grec vfiTTa, ionien vTj'aaa, béotien
singulier nasâ (*nas-, reflet d'un i.-e. *nh2-es- ?)38. Les autres langues
vaaaa "canard" a peu de chances de provenir d'un prototype *niitja, qui ne
indo-européennes ont généralisé ou bien la voyelle longue, ainsi le latin
se laisse pas aisément ramener à i.-e. *h 21J.h2t-; il reflète plus vraisemblablement une désignation secondairement motivée *vaX-ya (: vilx w
niirës "narines" (thème en *-i-, fém. pL, cf. variante thématique expressive
''nager'')3 6 •
(instr. s~. niiIJhaiia, instr. du. niiIJhiibiia), le v. perse niih- ''nez'' (acc. sg.
longue *niis- au nominatif duel nâsii (*niis-, reflet d'un i.-e. *nehrs-?) et une forme à voyelle brève *nas- au locatif duel nasol) et à l'instrumental
nassus, niisus "nez", masc., ou niisum, nt.), l'avestique récent *niis- ''nez'' niiham), ou bien la voyelle brève, ainsi le slave (v. sI. russe
33. Trautmann (BSW, p. 10), Fraenkel (LEW, l, p. 11-12), Sabaliauskas (1990, p. 26-27), MaZiulis (PKEZ, 1, p. 85), Toporov (PrJ, 1, p. 95), Eckert (1972, p. 208209), Hamp (1978a, p. 29-31), Euler (1985, p. 90), Ademollo-Gagliano (1991, p. 147), BlaZek (1998, p. 8), Larsson (1999, p. 79), Smoczyiiski (2001, p. 112). Cf. Lll (e, p. 161). 34. Sur les formes slaves, cf. Vasmer (1953-1958, III, p. 193). 35. En ce sens, Kurylowicz (1968, p. 33, § 29), Beekes (1985, p. 63-64). 36. En ce sens, Schrijver (1991, p. 95). Autre conception chez R!x (~991, p. 186-198), qui tente de rattacher la forme grecque à la famIlle mdoeuropéenne du nom du "canard". Cf. déjà Kurylowicz (1956, p. 197).
HOC /
HOC'h /
nos'b ''nez'',
nos "id.", s.-cr. nôs "id.", pol. nos "id."), ainsi que le germa-
nique (got. -nas, v. isl. nQs "narine", pl. nasar, v. ang. nosu, nasu ''nez'', pl. nosa). Il est probable que le degré vocalique bref du radical apparaît aussi en baltique, dans un dérivé de sens plus général: lit. nasrai "gueule", dial. nastrai (masc. pl., cf. LKt, VIII, p. 565-566), cf. v. sI.
/ nozdri "narine, pts, IlVKnlP", russe
H03.llP.H: /
H03.QpH
nozdrja "narine" < balto-
37. Trautmann (BSW, p. 193), Fraenkel (LEW, l, p. 508), Sabaliauskas (1990, p. 13):. Maziulis (PKEZ, III, p. 202-203), Vaillant (GCLS/., 1111, p. 171), SkardzlUs (1943, p. 49; 1956, p. 159), Steinbergs (1996-1997, p. 23), Larsson (I9~9, p. 67-71), Smoczyiiski (2001, p. 117). Cf. LKt (VIII, p. 869-872). Sur la ~exlOn du ~ot en indo-européen? cf. Griepentrog (1995, p. 323-351, sur les ormes baltiques p. 344-345), Fntz (1996, p. 1-20, sur les formes baltiques p. 16). Voir aussi Kurylowicz (1956, p. 223). 38. Cf. P. Schrijver (1991, p. 143), et déjà Hamp (1974, p. 70).
36
Catégorie du cas
Catégorie du cas
slave *nas-ra- «i.-e. *nhr es-r-?)39. Pour Fraenkel (LEW, l, p. 509), l'apophonie < a/ à > dans le lituanien nosis / nasrai reflète une alternance
Quelle que soit la reconstruction retenue, on notera que l'apophonie radicale n'apparaîtrait en baltique que dans le rapport d'un dérivé suffixé à
radicale héritée de l'ancien nom-racine. Kortlandt (1985, p. 119) reconstruit
sa forme de fondation, ce qui ne permet pas nécessairement de la
un paradigme protérodynamique: nom. sg. *nehrs-s, ace. sg. *nehrs-rp,
reconstruire avec certitude dans cette dernière.
gén. sg. *n hrs-os (Kortlandt écrit fautivement *nh1os)40. Dans une direction toute différente, Fritz (1996, p. 1-20) suppose que le nom du "nez" appartient, à l'origine, à la racine indo-européenne *h1enh}- "respirer"
37
- BALTIQUE *pint-(i)- "chemin"41 :
• v. prussien: pintis / weyk "chemin" (E 799), peentis / weg "chemin" (GrG 33), pentes / weg (GrA 58), pentes / via (GrF 58).
(véd. émiti "respirer") et reconstruit un paradigme de type holodynamique: nom. sg.
*h1énhr os ,
ace. sg. *h1nh}-os-rp (v. perse naham), loc. sg.
*h1nhrés-(i) (véd. nasi), gén. sg. *hl 1J.hr s-és (lat. naris, thème en *-i-),
nom.-acc. du. *h1nh}-os-oh} (véd. nâsa, germ. *nos-, sI. *nos'b), gén. pl. *h1T).hrs-om (lat. *narum, refait ensuite en narium). Cette analyse est
ingénieuse et peut effectivement rendre compte de la plupart des formes. Mais, précisément, elle ne convient pas pour les formes baltiques: Fritz (1996, p. 16) admet que le proto-baltique a hérité de deux formes, une forme de nominatif sg. *nôs
«
i.-e. *h1nh]-os, secondaire au lieu de
*h1enhros d'après les cas obliques) et une forme d'accusatif sg. *nasim (< i.-e. *h1nh]-os-rp) et que la contamination de ces deux formes aurait
Le mot prussien possède des correspondants étymologiques en slave (v. slave
nXTb /
put' "id.", s.-cr. pût "id.",
avest. rée. pa1J,tâ "id.", ossète fandag, fiindiig "id."), en latin (lat. pons, pontis "pont", gén. pl. pontium), en annénien (arm. hown "gué", gén. sg. hni) et pour finir en grec, dans deux dérivés thématiques (gr.
"mer" < "passage",
TTUTOS
TTOVTOS
"sentier"). Le germanique (all. Pfad "chemin,
sentier", ang. path "sentier") est obscur. Pour reconstituer la flexion originelle, on peut, dans un premier temps, s'appuyer sur le paradigme indo-iranien42 :
pas, car l'intonation rude constante du lituanien nosis et du letton nGss, NOM. SG.
SANSKRIT VÉDIQUE
AVESTIQUE
INDOEUROPÉEN
ptinthiil}
pantâ
*pént-oh1-s
position tautosyllabique: un degré long morphologique *h1nh]-os ne pourrait produire en baltique qu'une forme à intonation douce *nos, dont il
nYTb /
tch. pout "id.", v. pol. p~é "id."), en indo-iranien (véd. panthal) "chemin",
produit *nâsis (d'où lit. nosis, etc.). En réalité, cette hypothèse "ne tient nase suppose nécessairement, à mon sens, la présence d'une laryngale en
pÇ!th "chemin", russe
avest. réc. GÉN. SG.
pathtil}
n'est guère possible de tirer les formes attestées. La reconstruction
pa()o
*pJ}.t-h1-%s
avest. réc.
traditionnelle, modernisée par Kortlandt, pose elle aussi des problèmes. INSlR. PL.
pathibhil}
pacrbïs
*pJ}.t-h1-bhi-
v. avest. 39. Tentatives d'étymologie du mot slave chez Vasmer (1953-1958), qui pose un ancien composé *nos-dbrja (de la famille de dbrati "déchirer"), et chez Trubacev (1972, p. 225-226), qui reconstruit un composé tautologique *nos-srï- (cf. gr. ptS. plv6s "nez" < *srï-n- ?); voir une discussion chez Hamp (1974, p. 69-72). Présentation rapide chez Stang (1972, p. 39-40). De manière invraisemblable, Vaillant (GCLS/., l, p. 76) voit dans le lituanien nasraï un emprunt au slave. 40. Cf. aussi en ce sens Lubotsky (1989, p. 60).
41. Trautmann (BSW, p. 205-206), Benveniste (1935, p. 6), Vaillant (GCLS/., l, p. 303), Larsson (1999, p. 82-83). Analyse erronée chez Maziulis (PKEZ, III, p. 281-282). Données slaves chez Vaillant (GCLS/., II/l, p. 146 et p. 173). 42. Voir par exemple Rieken (1999, p. 239-240). Cf. déjà Bezzenberger (1909, p. 384-385, naturellement sans analyse laryngaliste).
38
Catégorie du cas
Catégorie du cas
À côté de cette fonne suffixée, il a pu exister une fonne plus ancienne,
baltique. Le plus clair est le nom du "cœur", un ancien nom-racine de genre
probablement un nom-racine (sans laryngale, cf. lat. pons) : nom. sg.
neutre, qui était déjà anomal en indo-européen.
39
*pont-s (gén. sg. *pent-s ou *p1J.t-%s)43. On ne voit pas clairement quelle
Les langues baltiques présentent, pour la désignation du "cœur", une
pouvait être la différence qui séparait les deux fonnes ; un rapprochement a
diversité de fonnes, qui incitent à supposer des alternances complexes
pu s'opérer entre elles, dans des conditions qui nous échappent. Quoi qu'il
encore conservées dans le paradigme proto-baltique. Les fonnes attestées sont les suivantes:
en soit, en dehors de l'indo-iranien, on peut se contenter d'opposer un thème fort *pont- et un thème faible *p1Jt-. Les autres langues présentent en effet ou bien un degré *-0- (*pont-: sI. *PQtb, lat. pons, ann. hown, gr. TIOVTOS),
ou bien un degré zéro (*p1J.t-: gr.
TIaTOS,
v. pro pintis). La
flexion en *-i-, commune au baltique et au slave, pourrait être ancienne (elle se retrouve en latin et en annénien) ; mais elle peut aussi, en baltoslave, résulter d'une analogie récente à partir d'une fonne d'accusatif singulier, elle-même secondaire (*pont-rp / *p1J.t-rp > balto-slave *pantin / *pintin > sI. *PQtb, baltique *pinti-). On notera la différence de voca-
lisme radical entre le slave (degré *-0-) et le baltique (degré zéro): elle
- V. PRUSSIEN44:
V.
pro seyr / hercze "cœur" (E 124), gén. sg.
s'iras "Herzens" (Ille Catéchisme, 95 10), dat. sg. s'iru "Herzen"
(III, 115 19), ace. sg. siran "Herzen" (III, 95 14), sijran (III, 65 23 ), ace. pl. sirans "Herzen" (III, 77 19) ; adjectif dérivé *sïriska- dans l'adverbe sïrisku / hertz/ich "cordialement"
(III, 55 11 ); préposition sirsdau (+ dat.) "unter, entre" (III, 49 10), "neben, à côté" (III, 774) < *sird-dau "au centre" (pour la finale, cf. pirsdau / vor "devant", pansdau / ais denn, darnach "après, ensuite").
pourrait éventuellement amener à penser que l'apophonie radicale était encore conservée en balto-slave. Il n'est pas vraisemblable, à mon sens, d'interpréter avec Smoczynski (2000a, p. 15, p. 20) le prussien pintis comme un emprunt au vieux polonais p{lé "chemin", en postulant une évolution problématique *pantis > *pentis >
V.
pro *pintis. Il est
préférable d'admettre que le mot est hérité en baltique et qu'il y présente un
- LITUANIEN45 : lit. iirdis "cœur", fém. (ace. sg. sird{, gén. pl.
iirdfiy ou Sirdy), cf. lit. dial. gén. sg. iirdès, nom. pl. sîrdes de type consonantique; lit. dia!. seNlis "cœur, centre
d'un arbre, noyau", fém. (ace. sg. iérdt., gén. pl. serdZiy), ou ierdè "intérieur d'un arbre", fém. (ace. sg. sérd~).
degré zéro radical ancien. Le mot n'est attesté qu'en baltique occidental; en
- LEITüN: lett. sifds "cœur", fém. (Mülenbachs-Endzelïns, ME, III,
baltique oriental, on trouve une autre désignation (lit. ki/ias, lett. cè[s
843-844: "das Herz"); sefde "moëlle, intérieur d'un arbre,
"chemin").
intérieur d'une plante, d'un fruit; [fig.] milieu, centre", fém. (Mülenbachs-Endzelïns, ME, III, p. 819: "das Mark, der
3. TRACES D'APOPHONIE RADICALE EN BALTIQUE En dehors de ces cas peu significatifs, il existe cependant quelques
Kern im Holze; das Innere von Pflanzen, Früchten, Obst ; [fig.] die Mitte, das Zentrum").
témoignages d'une apophonie radicale dans les anciens noms-racines en . 44. Trautmann (1910, p. 424), Maziulis (PKEZ, IV, p. 94-95; sur le prussien slrsdau, cf. p. 116). Voir aussi Endzelïns (DI, IIh, p. 337) et Stang (1957, p. 237) sur la formation de la préposition sirsdau. 43. En ce sens voir LIV (p. 425), Rieken (1999, p. 240, note 1121). La racine verbale sous-jace~te est probablement *pent- ··pister,. suiv;e à la !race" (got. finjJan "trouver", LIV, p. 424-425). Je dois ces informatIOns a G.-J. Pmault.
.45. Skardzius (1956, p. 162 = RR(S), IV, p. 679), Ivanov (1974, p. 195-200), Stembergs (1996-1997, p. 24), Larsson (1999, p. 64-67). Cf. LKZ (XIV, p. 644, 646-647 et 850-897).
Catégorie du cas
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Catégorie du cas
Chacune des langues baltiques présente plusieurs degrés vocaliques radicaux. Le vieux prussien a non seulement *ser (dans seyr, gén. sfras, etc.), mais aussi probablement
*sird-
ou
*sfrd-
(dans la préposition
sirsdau); le lituanien et le letton ont à la fois *sfrd- (lit. sirdis, ace. sg. Sirdi ; lett. sifds) et *serd- (lit. serdis, ace. sg. lérdi ; lett. sefde). Toutefois, ces différents degrés vocaliques apparaissent dans des lexèmes indépendants, si bien qu'on ne saurait reconstruire avec précision une ancienne alternance paradigmatique sur la base des seules données du baltique.
41
opposition dont il reste de nombreux vestiges dans les langues indoeuropéennes47 : - INDO-EUROPÉEN degré zéro *frd- : lat. cor, cordis "cœur" ; hitt.
gén. sg. kardas, kardiyas "cœur"; dérivé féminin en gr. Kap8(a "cœur", gr. homérique Kpa8( Tl
neutre en
V.
« * frd-ii{i);
dérivé
irl. cride "cœur" «*frd-jom); dérivé neutre en
slave (diminutif?), v. sI. Cp'hALue / sr'bdbce "cœur, Kap8(a, u1TÀ.a yxvov", russe cep.llue / serdce "cœur", pol. serce
"cœur", nt. «*frd-iko-)48.
La forme la plus singulière est celle du vieux prussien. Comme l'avait déjà noté Ferdinand de Saussure (1892, p. 79
= 1922, p. 443), le thème du
v. pro seyr, gén. sg. sfras «*ser-), adverbe sïrisku «*ser-), surprend par l'absence de consonne dentale fmale en regard du lit. sirdis et du lett. sifds "cœur"; cette singularité ne peut être qu'un archaïsme. Depuis Saussure, on tire les formes prussiennes d'un prototype baltique *ser (de genre neutre) < Ï.-e.
* fer,
cf. gr. homérique KllP "cœur", dat. sg. KfipL, loc. sg. KTJp68L
« *fer, sans consonne dentale fmaie, car *ferd aurait donné *ferd> gr. *KÉp, par la loi d'Osthoff); hittite ki-ir "cœur" «*Jœr). L'arménien sirt
"cœur" (thème en *-i-, cf. instrumental sg. srtiv) est seul à supposer une
- INDO-EUROPÉEN degré plein *ferd-: hitt. loc. sg. ki-ir-ti "dans le
cœur" ; dérivé à nasale en got. hairto (gén. sg. hairtins) "cœur, Kap8(a", v. isl. hjarta, v. ang. heorte, ang. heart, vha. herza, aIl. moderne Herz, nt. 49 ; dérivé fém. en slave, v. sI. cpt.lla / sreda "milieu, centre, j.l.Écrov", russe cepe,llHlla
/ seredina, slavonisme cpe.lla / sreda "centre, milieu", s.-cr. srijèda "milieu, mercredi", tch. stfeda "mercredi", pol. srodek "milieu, centre", sroda "mercredi, Mittwoch"
« *ferd-a). Le sens de "mercredi" s'explique, en slave,
consonne dentale finale « *ferd-i-); il doit s'agir d'une forme
comme un calque du vha. mittawëcho "Mittwoch", lui même
secondaire46 .
fondé sur le latin media hebdomas (cf. v. ital. mezzedoma).
Toutes les autres formes baltiques présentent un thème terminé par une
Les formes du baltique oriental se singularisent toutefois par leur
consonne dentale. On peut distinguer deux degrés vocaliques radicaux:
intonation rude constante, qui incite à reconstruire d'anciennes diphtongues
d'une part, *Sïrd- dans le lituanien sirdis (ace. sg. sîrdD et le letton sifds
longues. Le lituanien sirdis (ace. sg. sîrdD et le letton sifds ne peuvent en
(probablement aussi dans le v. prussien sirsdau, bien que l'intonation n'en soit pas connue); d'autre part, *serd- dans le lituanien serdis (ace. sg.
lé rd Ü et le letton se f de. Cette alternance prolonge certainement l'opposition ancienne d'un degré zéro *frd- et d'un degré plein *fierd-,
46. Olsen (1999, p. 87-88).
47. Ajouter à cette liste véd. hardi, gén. sg. h[dal) "cœur", qui est probablement apparenté, quoique l'initiale aspirée pose problème. 48. Sur les formes slaves, cf. Vasmer (1953-1958, II, p. 613 et 614). Une forme non-dérivée est encore conservée en slave dans les composés du vieux slave MHJIOCpo,lJ;'b / milosr'bd'b "miséricordieux, OiKTLp~WV" (cf. v. pol. milosirdy "miséricordieux"), TAXbKOCp'b,lJ;'b / tfizbkosr'bd'b "au cœur endurci, insensible, ~apvKdp8LOS". Cf. Trautmann (BSW, p. 302), Humbach (1969, p. 351-353), Gusmani (1982-1983, p. 103-109). Sur le v. slave JIaCKp'b,lJ;o / laskr'bd'b "gourmand, glouton", voir Vaillant (1932, p. 89-90). 49. Données germaniques: Feist (1939, p. 234-235).
Catégorie du cas
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Catégorie du cas
43
effet procéder que d'une fonne baltique *fïrd-, non de *s1rd-, qui pourrait
actuellement l'une des questions les plus controversées de la
seul refléter un prototype indo-européen */ird-, mais aurait dû aboutir en
linguistique balto-slave. Elle est acceptée par de nombreux
lituanien à un accusatif sg. *siFdi (cf. lit. pifstas "doigt" < i.-e. *PfS-,
savants 52 , mais sévèrement rejetée par d' autres 53 , et sa
v. sI. np'bCTb / pr'bst'b "doigt") et en letton à *sirde (cf. lett. pirksts
défmition même reste un objet de débat. S'agissant du nom
"doigt" < Ï.-e. *PfS-). Pour la même raison, le lituanien serdis (acc. sg.
du "cœur" en baltique, de nombreux linguistes invoquent
sérdÛ et le letton sefde supposent *serd-, et non *serd-, qui pourrait seul
actuellement la loi de Winter pour rendre compte de
provenir d'un indo-européen */ierd-, mais aurait dû aboutir en lituanien à
l'intonation rude constante qui y apparaît. Dans cette analyse,
un accusatif sg. *serdi (cf. lit. versti "renverser" < i.-e.
on expliquerait les prototypes baltiques
*yert-ti-,
lat. uerto
*serd-
et *fïrd-
"tourner") et en letton à *sêrde (cf. lett. vêrst "tourner, renverser"
comme les produits d'un allongement régulier à partir d'i.-e.
< *yert-ti-). L'intonation rude des formes baltiques a reçu jusqu'à présent
*/ierd- et */ird-.
trois explications:
D'emblée, la seconde explication peut être rejetée, car la présence d'une
- (a) contamination du degré long morphologique Ï.-e. */ier et du
laryngale interne est nettement contredite par les fonnes du degré zéro, qui
degré zéro */ird- > baltique *ser- ::::: *sird-, d'où secon-
supposent un prototype indo-européen */ird-, aussi bien en grec (gr.
dairement balt. *ser- ::::: *fïrd- (-- lit. sirdis, acc. sg. sîrdi;
Kap8U:r, Kpa8b"j) qu'en latin (lat. cor, cordis) et en v. irlandais (v. irl.
lett. sifds), au lieu de *slrd-. Cette explication, qui est
cride). La première explication, qui suppose une contamination entre balt.
historiquement la plus ancienne, est demeurée traditionnelle
*ser-
«
Ï.-e. *1ier) et balt. *sird-
«
Ï.-e. */ird-) -- balt. *ser-::::: *sfrd-, est
défenseurs50 .
plus plausible; toutefois, elle demeure invérifiable, car on ne connaît pas
*/ieHrd- > baltique *serd-
l'intonation de *sird- en v. prussien (dans sirsdau), et, d'autre part, il
(-.lit. serdis, acc. sg. sérdi; lett. sefde), d'où secon-
n'existe aucune trace de *ser en baltique oriental. Plus généralement, on
dairement *sfrd- (--lit. sirdis , acc. sg. sirdi ; lett. sifds).
conçoit mal un nivellement analogique qui aurait touché seulement l'into-
Cette explication, typique des premiers temps de la théorie
nation, non le timbre vocalique, dans une famille de langues comme le
laryngaliste, n'a été proposée que par quelques linguistes
baltique où les apophonies radicales casuelles tiennent si peu de place.
et trouve encore aujourd'hui de nombreux - (b) restitution d'une laryngale interne
isolés 51 et elle n'est plus guère défendue aujourd'hui. - (c) effet de la "loi de Winter" (1978). Cette loi phonétique - qui postule, en baltique et en slave, un allongement (d'intonation rude) des voyelles et diphtongues devant les anciennes consonnes sonores simples de l' indo-européen - est
50. Cf. Trautmann (BSW, p. 302), Watkins (1965, p. 117), Stang (1966, p. 158), Szemerényi (1970, p. 520 = 1987, p. 177), Smoczynski (2000b, p. 21, note 16; 2001, p. 121-122). 51. Cf. Lehmann (1952, p. 31).
Alternativement, on pourrait concevoir que l'apophonie radicale indoeuropéenne (*/ier-::::: */ierd- ::::: */ird-) ait été partiellement nivelée en protobaltique (*ferd- ::::: */ird-, d'où proto-baltique *serd- ::::: secondairement, par extension du vocalisme long,
*sird-,
*serd-
puis,
::::: *sfrd-).
Toutefois, cette analyse pose elle aussi un problème. Car on voit mal comment le substantif de sens général ("cœur": lit. sirdis, acc. sg. Sirdi; .52. Par exemple Kortlandt (1977; 1985), Young (1990, p. 144), de Lamberterre (1993, p. 204-205), Derksen (1996). 53. Par exemple Gercenberg (1981, p. 129), Birnbaum (1985), Schmid (1986a), Strunk (1987), Eichner (1988, p. 87), Campanile (1994).
45
Catégorie du cas
Catégorie du cas
44
lett. sirds) pourrait avoir reçu son intonation rude de l'influence du
- (d) formulation de HOLST (2003) : allongement des voyelles et
substantif de sens spécifique ("intérieur d'un arbre": lit. serdis, acc. sg.
des diphtongues devant les anciennes consonnes sonores
sérdi; lett. serde). Certes, on pourrait supposer que ce nivellement a eu
simples de l'indo-européen seulement en syllabe tonique.
lieu à une époque où *sërd- et *sFrd- faisaient encore partie d'un même
Cette limitation particulière de la loi de Winter, inverse de
paradigme de sens général ("cœur"); mais il resterait, dans ces conditions,
celle de Shintani, a été établie sur des bases fragiles, avec une
à expliquer comment la variante apophonique *sërd- a pu en venir à cette
connaissance parfois erronée des données linguistiques (ainsi,
spécialisation sémantique ("intérieur d'un arbre"). Reste la troisième explication, qui voit dans l'intonation rude des
lit. vanduiJ "eau" est mentionné comme contre-exemple à la loi de Winter, sans tenir compte de l'intonation rude de
formes baltiques une illustration de la "loi de Winter". Pour que cette
l'accusatif vémdeni !).
hypothèse puisse s'appliquer valablement au nom du 'cœur' en baltique, il
S'agissant du nom du "cœur" en baltique, aucun argument déterminant
convient d'en préciser deux points. Tout d'abord, il importe de défmir plus
ne permet de prendre position sur la validité de l'une ou l'autre de ces
clairement les limites de cette loi phonétique, car actuellement elle existe
variantes de la "loi de Winter" ; on évitera, par conséquent, ici d'entrer
sous quatre formulations:
dans ce débat. Et, du reste, que l'on s'en tienne à la variante large de la loi
_ (a) formulation de WINTER (1978): allongement des voyelles et
de Winter ou à une variante plus limitée dans son extension, la genèse du
*sërd-
*sfrd-
des diphtongues devant les anciennes consonnes sonores
vocalisme long attesté dans les formes baltiques
simples de l'indo-européen dans tous les contextes. La loi
difficilement s'expliquer autrement que par un effet de cette loi. On est.
ainsi formulée a été adoptée notamment par Young (1990).
alors amené à poser trois radicaux pour le proto-baltique:
et
peut
Kortlandt en a proposé très tôt (1978) une réinterprétation
- *iër- (en vieux prussien)
"glottaliste", ce qui n'en modifie pas la portée.
- *iërd- (propre au baltique oriental) < i.-e. *fierd- (avec "allon-
_ (b) formulation de SHINTANI (1985) : allongement des voyelles et
gement Winter").
des diphtongues devant les anciennes consonnes sonores
- *ifrd- (commun à toutes les langues baltiques) < Î.-e. *fird- (avec
simples de l'indo-européen seulement en position pré-
"allongement Winter").
tonique. Cette limitation particulière de la loi de Winter a été
Les données baltiques ne permettent pas de déterminer quelle était la
acceptée notamment par Rasmussen (1992a) ; elle a été
distribution originelle de ces allomorphes apophoniques. Une recons-
critiquée par Kortlandt (1988, p. 387-396).
truction du paradigme indo-européen a été tentée dans un article classique
_ (c) formulation de MATASOVIé (1995): allongement des voyelles
de Szemerényi (1970, p. 523
et des diphtongues devant les anciennes consonnes sonores
SINGULIER
simples de l'indo-européen seulement en syllabe fermée. Cette limitation particulière de la loi de Winter a été acceptée notamment par le LIV (1998, voir p. 53, racine *bheg a été critiquée par Derksen (2002, p. 5-13).
W _)
;
elle
1987, p. 180):
=
PLURIEL
NüM.-ACC.
*fer
*lèerd-~
GÉN.
*frd -6s
*frd- 6m
DAT.
* frd-éi
*1ird - bh -
LOC.
*1iérd-i
* 1ird - su
Cette analyse pourrait être modernisée de la manière suivante SINGULIER
47
Catégorie du cas
Catégorie du cas
46
E 124). Cette hypothèse serait directement confirmée par les données du hittite, où le radical *fër- n'apparaît qu'au nominatif-accusatif sg. (hitt. ki-ir). Un autre trait frappant est la spécialisation sémantique du thème 54
* ferd-, qui, aussi bien en slave (* serd-ii) qu'en baltique (*serd-(i}-), :
COLLECTIF
n'apparaît qu'avec un sens divergent "centre, milieu" (en baltique "centre d'un arbre, intérieur d'un arbre"). Il n'est pas impossible que cette évolution sémantique ait touché d'abord une forme de locatif, par exemple
*1iêr
NOM.-ACC.
?
GÉN.
*1ird-~s
DAT.
*qd-éi
que le thème *ferd- était à l'origine celui du locatif, une hypothèse que
LOC.
*fèérd-(i)
viendraient cette fois encore confIrmer les données du hittite (hitt. loc. sg.
dans une locution "au cœur de..." > "au centre de..." (cf. russe cpemt / sredi "au milieu de", préposition + génitif). On pourrait alors supposer
ki-ir-ti "dans le cœur"). Au-delà de ces observations, qui n'ont aucun Mais il serait arbitraire de l'appliquer directement au baltique, qui n'en
caractère de certitude, les langues baltiques ne permettent pas de
présente aucune trace directe. La reconstruction d'un schéma apophonique
reconstruire, pour le nom du "cœur", quelle était la distribution des
apparaît difficile quand elle ne peut se fonder, comme ici, que sur des
variantes apophoniques dans un paradigme alternant. Elles permettent
membra disjecta, lesquels, par défmition, n'apparaissent qu'isolément, en
cependant d'en supposer l'existence et montrent que l'apophonie radicale
dehors de tout système, et sont par conséquent dépourvus de valeur
casuelle était encore possible en proto-baltique, même si elle n'apparaît
probante. Tout au plus peut-on, à propos du baltique, proposer deux
plus clairement à date historique.
*fër-,
dépourvu de dentale finale, est clairement
Outre le nom du "cœur", quelques autres anciens noms-racines en
secondaire en vieux prussien dans les formes des cas obliques, qui
baltique peuvent encore présenter, sous la formes de membra disjecta, des
conjectures. Le radical
n'apparaissent que dans les Catéchismes du
xvt
siècle et présentent deux
vestiges d'apophonies radicales. Mais leur interprétation est moins claire et
traits visiblement récents, la flexion thématique (par ex. acc. sg. siran, III,
leur reconstruction n'a rien d'assuré. SkardZius (1956, p. 162
95 14, sijran, III, 65 23) et le genre masculin (cf. acc. pl. masc. sirans, III,
p. 679) mentionne les cas suivants:
=
RR(S), IV,
77 19)55. Il est vraisemblable que ces formes des cas obliques sont des
- BALTIQUE *peuf-, *puf- "pin"56:
créations secondaires, et l'on peut en conclure sans doute qu'à l'origine ce
• lituanien: pullS "pin", fém. (gén. pl. dial. pul~), cf. gén. sg. dial.
radical *fër- était limité aux cas directs (nom.-acc. sg., cf. v. pro seyr,
pulès à Tverecius.
54. Cf. Pinault (verbalement). Voir aussi Rieken (1999, p. 52-56), Larsson (1999, p. 65-66). Noter la forme alternante *1èred- dans i:-e. *1ir~d-d'~hl- "placer dans son cœur, croire" (véd. sraddadhiiti, lat. credo, V. IrI. cretlm) ; Il n'e~t pas impossible que cette forme */èred- ne soit qu'une variante de *1ierd- (locatIf) en position antéconsonantique. 55. Sur le passage au genre masculin, cf. Barschel (1974, p. 183), Petit (2000b, p. 33).
. 56. Trautmann (BSW, p. 232-233), Fraenkel (LEW, l, p. 679-680), Sabahauskas (1990, p. 42-43), MaZiulis (PKEZ, III, p. 277-278), Ademollo-Gagliano (1992, p. 154). Cf. LKZ (X, p. 1108).
48
Catégorie du cas
Catégorie du cas
49
• v. prussien: peuse / kynbaem "Kiefer, pin" (E 597), toponymes
- BALTIQUE *dvar-, *dur- "porte,,60:
prussiens Peusebalten (attesté en 1419), Pewselauk (attesté en 1333)57.
• lituanien: dùrys "porte", fém. pl. (gén. pl. dùr1/-), cf. lit. dial. nom. pl. dùres.
• le letton a une autre désignation: pri€de "pin", fém. (cf. toponyme
• letton: dùrvis "porte", fém. pl. (gén. pl. dùrvju et duru).
v. pro Proyden, Gerullis, 1922, p. 136).
• v. prussien: dauris / grosthor "porche" (E 211), sans doute faute pour *dvaris (nom. pl. *dvarïs, d'un thème en *-i-) et, pour le sens,
On part traditionnellement58 d'un nom-racine à paradigme alternant: degré
peut-être une interversion avec le lemme précédent warto / thoere
plein *peJJK- > balt. *peus- (v. pro peuse, passé à la flexion en *-ë, cf. lit.
"porte" (E 210). Le lemme prussien doit probablement être lu
dial. serdé, lui aussi adaptation d'un ancien nom-racine), vs. degré zéro
comme *dvaris / thdre "porte".
*PUK- > balt. *pus- (lit. pulis, passé à la flexion en *-i- à partir de la forme
d'ace. sg. *PUK-1p. > balt. *pus-in > lit. ace. sg. pùl{, d'où nom. sg.
Maziulis (PKEt, l, p. 183) s'appuie sur l'alternance vocalique qui oppose
secondaire pusîs). Plus précisément, MaZiulis (PKEZ, III, p. 278) suppose
le prussien *dvaris et le lituanien dùrys pour supposer un ancien nom-
un ancien paradigme alternant en proto-baltique, avec nom. sg. *peus-s
racine alternant en proto-baltique: nom. pl.
«
« i.-e.
*dvares (-+ ace. pl.
secondaire
*puf-és). Mais les autres
*dvar-ins, d'où le passage à la flexion en *-i- dans v. pro *dvarïs, transmis
langues indo-européennes n'offrent pas trace d'un nom-racine: le grec
sous la graphie dauris); ace. pl. *durins (> lit. duris, ace. pl., d'où nom.
présente un dérivé féminin à suffixe *-ii (gr. lTEUK1l "pin parasol" < i.-e.
pl. secondaire dùrys au lieu de dùres, conservé dialectalement). La recons-
*peYK-ii), le-germanique et le celtique un dérivé féminin à suffixe *-tii (vha.
truction de ce nom-racine (i.-e. *d'yor-, *d'ur-) est appuyée par le sanskrit
fiuhta, all. Fichte "pin" < i.-e. *peYK-tii; cf. m. irl. ochtach "pin" < i.-e.
védique (nom. pl. dvâral) "porte", ace. pl. duraI), duraI), nom. du.
*puK-tiiko-). À l'origine, il doit s'agir d'une désignation qualificative du
dvârii(u))61, le germanique (vha. turi "TOr, porte",
pin comme "piquant" ou "amer", cf. gr. lTEUKelÀlI..lOS "aigu, pénétrant",
"porte", gén. pl. dura < i.-e.
lTEUKE8avos "qui pique, amer", ÉXElTEutdjS "aigu, perçant" ( qui suppose
< *d'JJor-es, avec fmale refaite), et, de manière résiduelle, par le grec (gr.
vraisemblablement un an-cien thème sigmatique *lTEUKOS, -ouS), arm.
arcadien 8upBa' Ëçw, 'ApKelÔES "dehors", Hésychius < *8up-8a ; gr. dial.
p'owl"aiguille" « i.-e. *PUK-JJO-)59.
8uaSEv "en dehors", à Tégée < *Svp-a8Ev; peut-être gr. 8upa(E "dehors",
i.-e. *péJJK-S) et gén. sg. *pus-es
*d'ur-es),
V.
isl. nom. pl. dyrr
l'italique (lat. forës "porte", pl.
s'il provient de *8upaa-ôE). Ailleurs, on trouve diverses formes suffixées
57. Gerullis (1922, p. 121). 58. Trautmann (BSW, p. 233), SkardZius (1943, p. 50; 1956, p. 159 et 162). Autre analyse: Smoczyftski (2000a, p. 120). 59. Chantraine (DELG 2, p. 893), Klingenschmitt (1982, p. 167), ülsen (1999, p. 26).
60,_ Trautmann (BSW, p. 63), Mülenbachs-Endzelïns (ME, 1, p. 520-521), Endzelms (DI: .111.1, p. 531), Fraenkel (LEW, 1, p. 112-113), Sabaliauskas (1990, p(. 56-57), MazlUhs (PKEZ, 1, p. 182-184), Toporov (PrJ, 1, p. 309-310), Larsson 1999, p. 56-58), Smoczyftski (2001, p. 130-131). Cf. LKZ (II, p. 901-902). Données balto-slaves: Vaillant (GeLS/., II/l, p. 167-168), Vasmer (1953-1958 ~, p. 330). Données germaniques: Feist (1939, p. 117). Sur la flexion du mot tdo-euroPéen, voir l'analyse complète de Griepentrog (1995, p. 117-152, sur es formes baltiques, cf. p. 143-144). "
61. L'occlusive non-aspirée pose problème. Influence du numéral dvâ deux"? ou dissimilation d'aspirées dans les cas à désinence en *-bh-? Cf Mayrhofer (KEWA, II, p. 83), Griepentrog (1995, p. 137).
51
Catégorie du cas
Catégorie du cas
50
qui ne se laissent pas ramener à l'unité, par exemple un thème en *-i- en
représentant de cette forme thématique possible6 4 ),
*dvaras
(ce qui serait graphi-
slave, parallèle à celui qui s'est développé en baltique (v. sI. ,l:lBbpb / dvUb
quement
"porte, eupa, TTÛÀTJ", pl. ,QBbpn / dvbri, russe ,ll,Beph / dver' "porte", pol.
non le sens dérivé de "cour". Les données baltiques permettent donc,
drzwi "portes", pl., métathèse de *dwrzi < sI. *dvlr-l- < i.-e. degré zéro
semble-t-il, de reconstruire un ancien nom-racine à paradigme alternant.
secondaire *d'y[-, avec une syllabation qui rappelle celle du gr. emp6s
Mais la restitution de cette apophonie repose entièrement sur les données
"gond d'une porte", masc. < gr. *eFap-yos); un thème en *-0- en indo-
du prussien, qui demeurent en défmitive peu assurées65 •
iranien (avest. duuar-,
duuara- "porte", v. pers. duvara- < *d'yor-o-), en
car le mot prussien a bien le sens primaire de "porte",
- BALTIQUE *sii/-, *sa/- 'se1'66 :
*sol-
celtique (v. irl. dor "porte" < *d'yor-o-), en germanique (got. daur "porte,
• vocalisme long reflété indirectement par le lituanien
TTÛÀTJ, iTuÀwv, eûpa", nt., aIl. Tor "porche", nt. < *d'ur-o-) et en tokharien
solymas "saumure" (le "sel" est en lituanien druskà < "miette", cf.
(tokh. B twere "porte" <*cI'yor-o-); un thème en *-ii- en grec (gr. pl.
lett. druska "miette, petit morceau")67 ; sur le letton sâls "sel", cf.
eÛpal, sg. eupa, eûpTJ "porte" < ï.-e. *d'ur-ii) et partiellement en latin (lat.
plus bas.
*forae, pl., cf. acc.foriis, abl.forïs "dehors" <ï.-e. *cI'yor-ii-). L'arménien
• vocalisme bref reflété par le slave *sol-l "sel", thème en *-i- :
associe l'ancienne forme athématique (dowrn "porte extérieure" < i.-e. acc.
v. sI. COJIb / solb "sel, aÀs", s.-cr. sô "id." (gén. sg. sôli), russe
sg. *cI'ur-rp.) à une flexion secondaire en *-ii (gén. dat. loc. dran < i.-e.
COJIb / sol' "id.", pol. sol "id.".
*d'ur-ii-), cf. aussi le substantif plurale tantum : dowrk' "porte de maison"
• v. prussien: le vieux prussien a sali / saltz "sel" (GrG 39), sai
«
(GrA 60), sai (GrF 83), salli (GrH 83), généralement
i.-e. *tfur-es)62. Il est parfois difficile de distinguer les représentants
dispersés de l'ancien nom-racine et les dérivés indépendants. Il est probable, à cause du sens, que la forme thématique neutre i.-e. *d'flor - om , supposée par le védique dvâraTfl "entrée" et le latin forum "place, fomm", est plutôt un dérivé qu'une adaptation de l'ancien nom-racine. La même analyse vaut sans doute pour le masculin thématique du slave *dvoru (v. sI. ,ll,BOp'b / dvor'b "cour, aÙÀiJ, iTEpL~OÀOS", pol. dwor "cour"), auquel le lituanien dviiras "cour" est probablement emprunté
«
i.-e. * d' fior-os )63.
comme un polonisme
«
dans
~terprété
pol. sol), mais où Maziulis (PKEZ, IV,
p. 42) a proposé de voir un mot baltique hérité (*siilis ou salis)68. Les données baltiques et slaves incitent à reconstruire un ancien nom-racine alternant en indo-européen *sehi-, vs. *sh21-: le baltique aurait généralisé le degré plein (i.-e. *seh21- > proto-balt. *saHI- > balt. *sâl-, d'intonation rude), tandis que le slave aurait généralisé le degré zéro (i.-e. *sh 21- >
Il y a peu de chances, malgré Griepentrog (1995, p. 144) et Larsson (1999, p. 57), que le v. prussien *dvaris doive être interprété comme le 64. Cf. pour la finale v. pro deywis / gol "dieu" (E 1) < i.-e. *deiJ/os, lit. diëvas. 62. Voir Griepentrog (1995, p. 145). Autre analyse des faits arméniens chez Olsen (1999, p. 129-130): le nominatif singulier dowrn serait le re~~t d'u~e forme dérivée de sens possessif *cfur-h30n (avec "suffixe de Hoffmann) tandIS que le génitif singulier dran procéderait de *tl'ur-h3n - 6s . Sur la forme de pluriel dowrk: cf. aussi Olsen (1999, p. 60). 63. Sur lit. dvêiras, cf. Skardzius (RR(S), IV, p. 126), Maziuli~ ~1960, p. 205209), LKZ (II, p. 936-937). Noter que Larsson (1 ~99, P', ~7) conSIdere le mot non comme un emprunt au slave, mais comme un lexeme henté.
65. Autre analyse chez Smoczyfiski (2000a, p. 120), qui interprète le prussien dauris comme *duris (analogue au lituanien dùrys), malgré l'absence de parallèle graphique. 66. Trautmann (BSW, p. 249), Mülenbachs-Endzelfns (ME, IV, p. 802-803), Karulis (1992, II, p. 151), Fraenkel (LEW, II, p. 749), Maziulis (PIŒt, IV, p. 4243), Larsson (1999, p. 60-62). 67. Cf. Büga (RR(B), l, p. 372), LKZ (XIII, p. 289). 68. Dans le même sens, voir Vykypel (1998, p. 166).
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Catégorie du cas
Catégorie du cas
proto-sI. *sQ/- > slave *sol-)69. On notera que le letton s âls "sel" suppose
Skardzius (1956, p. 161-162 = RR(S) , IV, p. 679) mentionne encore un
une intonation douce, pour laquelle deux explications sont a priori
autre lexème baltique, qui pourrait témoigner d'une apophonie radicale
possibles: métatonie douce dans une forme monosyllabique (cf. Larsson,
dans la classe des noms-racines. Cependant, l'analyse qu'il en propose
1999, p. 62, suivant Rasmussen); reflet d'un degré long morphologique
n'est pas entièrement assurée. Le mot qu'il cite n'appartient pas en effet à
(i.-e. *sëh21- > proto-balt. *saHI- > balt.
avec coloration, mais sans
la flexion consonantique, mais à peu près constamment à la flexion en *-a.
marque intonative laissée par la laryngale) selon Kortlandt (1985, p. 119;
En revanche, il présente en baltique une variation apophonique: SkardZius
1997, p. 26, cf. déjà Stang, 1966, p. 161, sans analyse laryngaliste). Les
s'appuie sur ce caractère pour supposer qu'il prolonge un ancien nom-racine
deux solutions posent des problèmes. Malgré la difficulté posée par la
à paradigme alternant. Le raisonnement est quelque peu circulaire: si l'on
forme lettone, il paraît vraisemblable que le balto-slave a conservé deux
veut étudier l'apophonie dans les noms-racines, on ne peut se fonder sur
*sal-,
*seh21-
> proto-balt.
l'apophonie pour reconstruire des noms-racines; cela revient à confondre le
*saHI- (lit. s6lymas, et peut-être lett. sâls) et la forme faible *sh21- > *sal-
résultat de la recherche avec sa méthode. En l'occurrence, cependant, il est
(> sI. *sol-). Le degré bref *sQ/- pourrait avoir été conservé également
possible que SkardZius ait raison. Voici le lexème en question:
variantes apophoniques du radical, la forme forte
dans un dérivé comme lit. isalas "douceur" (LKZ, IV, p. 145, cf. lett.
- BALTIQUE *jliUT-, *jUT- "mer,,71 :
iesàls "malt", ME, Il, p. 61), mais celui-ci ne témoigne pas nécessairement
• lituanien: jûra "mer", fém. (lit. dial. jûrios, jûrés, fém. pL).
d'une apophonie radicale dans le nom-racine dont il dérive. Dans les autres
• letton :jûra, jûra , v. lett.jüre "mer", fém.
langues indo-européennes, seul le vocalisme bref est attesté: on a un
• v. prussien: wurs / tych "étang", E 61
témoignage direct de l'ancienne flexion radicale en grec (gr. èiÀs- "sel, mer",
107 1 ; III, 119 16 (acc. sg.), luriay / mer "mer", E 66 (lire *iuriay).
gén. sg. àÀos-), peut-être en arménien (arm. al "sel") et diverses formes
• lituanien: jaura "marécage", fém.
«
*üras), iürin "mer", III,
suffixées ailleurs, *sal-i- (> lat. sai, salis "sel", v. irl. sail- "sel", cf. aussi
• emprunt baltique en finnois jiirvi "lac", estonien jiirv, lappon
tokh. A. sale, B salyiye "sel" < thème élargi *sali-ën) et *sal-d- (> got.
javrre, live jâra (suppose balt. *jaurë, cf. lit. dial. jauré).
salt "sel, èiÀus-")?O .
Deux analyses sont possibles. On pourrait, dans un premier temps, être tenté de reconstruire, sur la base des faits baltiques, un ancien substantif à suffixe -r- en indo-européen, secondairement interprétable comme nom-
69. Selon Kortlandt (1985, p. 119), Beekes (1985, p. 57) et Lubotsky (1989, p. 60), le slave *so/- proviendrait de l'indo-européen *Sh2- e /- . .L'hy~othèse n'est pas impossible, mais un degré zéro généralisé *s h2/- conviendraIt tout aussi bien. La reconstruction d'un paradigme hystérodynamique (nom. sg. *sehr/-s, ace. sg. *sh2-e/-m, gén. sg. *sh2-/-os) manque d'appui réel dans les langues indo-européennes. 70. Cf. Benveniste (1935, p. 8). Sur la forme arménienne, cf. Olsen (1999, p. 86-87). Sur la forme tokharienne, cf. van Windekens (1976, l,. p. 417), Hilmarsson (1987, p. 46 et 48-49) : je dois ces référence~ à G.:J. ~mault. vocalisme du védique sa/-i-lQ- "salé" pose problème, malS ne Justifie pas, a mon sens, de reconstruire un radical à voyelle *tÏ fondam~ntale : *sal-, vs. *sa/-. Une solution de facilité consisterait évidemment à partIr de *s h2el- pour expliquer la forme védique.
r:
racine: *h1eJJH-r-, vs. *h1uH-r- "étendue humide". Du degré plein
*h1ellHr- proviendrait le baltique *jâur- (lit. jaur-a "marécage"), du degré zéro *h1uHr- le baltique *ür- (v. pro wurs "étang"), qui aurait été refait en
*jur- d'après le degré plein *jaur- (lit. jûra "mer", etc.). Il existerait des
71. Trautmann (BSW, p. 335), Mülenbachs':Endzelfns (ME, II, p. 122), Fraenkel (LEW, 1, p. 198), Sabaliauskas (1990, p. 48), Maziulis (pJŒZ, II, p. 5456), Toporov (PrJ, III, p. 93-97), Büga (RR(B), II, p. 266-276), Smoczynski (2001, p. 103). Cf. LK2 (IV, p. 315 et 430-432). Cf. aussi Vaillant (GCLS!., II/l, p. 139), Darms (1978, p. 435).
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Catégorie du cas
Catégorie du cas
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correspondants en germanique (v. isl. ur "pluie fine", v. ang. éar
certaine vraisemblance les cas suivants:
''mer'')72 ; le latin présenterait, quant à lui, un dérivé (lat. ür-ïna "urine").
• "cœur" (balt. *iër ~ *iïrd- ::::; *iërd-), "pin" (balt.
Dans cette analyse, trois séries de formes posent un problème: l'annénien
"porte" (balt.
Jowr "eau" (thème en *-0-, cf. gén. Jroy), qui suppose un radical î.-e. *jür-,
incompatible avec la reconstruction ici proposée; le grec oùpov ''urine'', nt., sans doute indépendant (dérivé inverse de oùpÉw "uriner" < *FopaÉw, itératif, cf. véd. var~ati "pleuvoir", racine *h2uers- ?); le védique vâr, vâri "eau", nom-racine de genre neutre
«
î.-e.
*JJeh1r-).
Une hypothèse alter-
native, et sans doute préférable, consisterait à supposer l'existence, en indoeuropéen, de deux formes étymologiquement distinctes 73
:
d'une part, un
substantif*jeuH-r-, vs. *juH-r-, qui survivrait en baltique (lit.jaura,jûra) et en annénien (Jowr); d'autre part, un substantif *uehl-r-, vs. *uh1-r-, qui survivrait, sous la forme du degré plein, en indo-iranien (véd. vâr, vâri
*dvar-::::; *dur-), "étendue ::::; *jür-), peut-être "sel" (balt. *siil- ::::; *sa/-).
*peuS-~
*pui-),
humide" (balt. *jiiur-
Tous ces témoignages plus ou moins clairs d'apophonie radicale en protobaltique présentent un trait commun: l'apophonie n'apparaît nulle part à l'intérieur d'un même paradigme; elle n'est plus attestée qu'indirectement, à travers des lexèmes indépendants. Cette restriction incite à la prudence
dans la reconstruction de paradigmes alternants en proto-baltique. D'autre part, elle nous renseigne sur l'état de l'apophonie paradigmatique dans cette famille de langues: ce type d'apophonie n 'y est plus vivant et ne s'y rencontre plus que sous la forme de fossiles. En synchronie, il n'y joue plus aucun rôle.
"eau"), en anatolien (louv. warsa-), ainsi qu'en celtique (v. irl. fir "lait" < î.-e. * JJehrr-, le celtique prouvant *-h 1-), et, sous la forme du degré zéro,
III. NOMS (ALPHA-)THÉMATIQUES ET APOPHONIE RADICALE
en v. prussien (v. pro wurs "étang"), en germanique (v. isl. ur "pluie fine") et indirectement en latin (lat. ür-ïna "urine"). Le tokharien A wiir, B war "eau" est ambigu: il pourrait refléter un tokharien commun *wiiHiir issu de *uh r [, comme me le suggère G.-J. Pinault ; d'autres analyses ont été proposées74 • Quelle que soit l'explication retenue, le baltique paraît avoir conservé la trace d'une apophonie radicale (lit.jaura, vs.jûra).
La même analyse vaut pour les autres formations nominales. Il existait en indo-européen, en dehors des noms-racines, de nombreuses variations apophoniques du radical. Notre objet n'est pas ici d'offrir une vue d'ensemble des schémas apophoniques que l'on reconstruit au niveau de l'indo-européen, mais, plus simplement, d'examiner ce qui a pu rester de ces anciennes alternances dans les langues baltiques. D'une manière
4. CONCLUSION: L'APOPHONIE RADICALE
générale, l'uniformité de thème prévaut en baltique comme ailleurs. On
DANSLESNOM~RACThŒS
distinguera ici deux catégories: (a) les substantifs thématiques et alphathématiques, dans lesquels, dès l'indo-européen, une apophonie
Les noms-racines présentaient donc encore en proto-baltique un petit nombre de vestiges d'apophonie radicale. On peut reconstruire avec une
72. Données gennaniques: Feist (1939, p. 527). 73. En faveur de cette hypothèse, on rappellera que le prussien a lui-même deux mots nettement distincts (iurin "mer", wurs "étang"). 74. Winter (1965b, p. 202) pose un dérivé inverse sur la ba~e de l'adjectif tokh. A wrirrr (obI.) "aquatique", B wriye~~e "aquatique" « l.-e. *udriio-).
Dossier étymologique chez van Windekens (1976, l, p. 557).
radicale était exceptionnelle et toujours secondaire ; (b) les substantifs athématiques, où les variations apophoniques sont attestées avec une certaine clarté. Les substantifs thématiques (thèmes en *-0-) sont caractérisés dès l'indo-européen par une absence de variation apophonique à l'intérieur de leur paradigme: le degré vocalique déterminé par la formation reste toujours identique au cours de la flexion. On a par exemple un degré *-0-
Catégorie du cas
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Catégorie du cas
radical constant dans les substantifs du type *CoC-o- (ainsi gr. VÔIl0S-
- thème *gWen-
a-, d'où tokh. A siiTfl, B sana "épouse" «
*gWen-h2,
tok'D "courant, fleuve, (:rUOlS-" < i.-e.
mais obI. A siiTfl, B sana < ace. *gWen-ehrm); véd.jani
*tokW-o-, lit. maras "mort, peste" < i.-e. *mor-o-). Cette uniformité est
"déesse" (secondairement Joni), avest. jaini_ "femme" (ace.
régulière en baltique comme dans les autres langues indo-européennes. Il
pl. jainis) ; v. sI. )lœHa / zena "femme, épouse, yuvfl" ; v. pro
n'existe aucune exception.
genna, cf. infra; peut-être hitt. kuinnassan "sa femme"; avec
"loi" < i.-e. *nom-o-, v. sI.
TOK'b /
* -il),
le degré
suffixe nasal secondaire: got. qino "femme, yuvT)", v. isl.
vocalique radical était également constant à l'intérieur de la flexion. La
kona "femme", vha. quena "femme", v. ang. cwene, ang.
seule trace d'une alternance paradigmatique est attestée dans le nom indo-
(archaïque) quean "prostituée, femme légère" ; degré long
Dans les substantifs alphathématiques (thèmes en
européen de la "femme": i.-e. nom. sg.
*gWen-(e)h2 ,
gén. sg.
*gWn-ehrs
épouse, yuvrl", thème en *-i-, v. isl. kvan "épouse", v. ang.
(IEW, p. 473)75. L'alternance paradigmatique, sans doute héritée d'un ancien nom-racine neutre de type
secondaire dans le germanique *kwëni- (got. qens "femme,
protérodynamique76 ,
est conservée:
cwën, ang. queen "reine"), ou du degré zéro :
- en celtique: v. irl. ben, gén. sg. mna "femme"
«
nom.
- thème *gWn_il_, d'où gr. yuvi] "femme" (gén. sg. yuvalKôS-), gr.
*gWen-(e)h2, gén. *gWn-ehrs), cf. forme archaïque de genre
béotien ~ava ; véd. gén. sg. gnâs (dans gnâs pati- "mari
neutre v. irl. bé "femme" bée, bé
«
i.-e.
«
*gW en-s),
i.-e. *gWen ou *gWën), gén. sg. dat. sg. bein, bé
«
i.-e. 1oc.
*gWen-(i). - en arménien: arm. kin "femme"
«
i.-e. *gWen-(e)h 2), instr. sg.
kanamb (réfection, d'après aramb, instrumental de ayr "homme", d'un plus ancien *kanaw < i.-e. *gWn-eh2- bhi)77. Elle a été éliminée partout ailleurs, au profit du degré plein :
d'une déesse"), d'où paradigme secondaire gnâ- "déesse". En baltique, la forme ne survit plus qu'en vieux prussien: - BALTIQUE *geml "femme,,78 :
• v. prussien genno / wip "femme" (E 188); gema / fraw "femme" (GrG 50, lire *genna); gemia / hausfrau "femme" (GrA 21, lire *genna); gemia / mater familias (GrF 12, lire *genna); ace. sg. gennan "femme" (7x Catéchismes, par ex. 111,373 ), gannan (4x Ille Catéchisme, par ex. III, 35 18) ; gén.
75. Sur le nom indo-européen de la "femme", voir un essai de reconstruction chez Schindler (1972, p. 33), Hamp (1979a, p. 1-7), Hardarson (1987b, p. 115-137), Jasanoff (1989, p. 135-141), Rieken (1999, p. 39-41). Voir aussi Brugmann (1907-1908), Meid (1966, p. 271-272). Sur les formes celtiques, cf. Campanile (1976-1977, p. 21-28), Ahlqvist (1980, p. 156-163), de Bernardo Stempel (1987, p. 82-84). Sur les fonnes gennaniques, cf. Feist (1939, p. 386 et 388). Sur le tokharien, voir Pinault (1989, p. 59). 76. Il est possible qu'il ait existé une variante acrostatique du nom-racine: *gW on -s (gén. sg. *gWen-s) : un degré radical *0 apparaît ainsi probablement dans le louvite wana- "femme". Cf. Schindler (1972, p. 33), Rieken (1999, p. 39-41). 77. Explication du paradigme arménien: Schmitt (1981, p. 107), de Lamberterie (1991, p. 155), ülsen (1999, p. 172-174).
sg. gennas (III, 872 ; III, 103 22); nom. pl. gennai ( III, 93 12), gannai (III, 103 20 ; III, 103 25 ); ace. pl. gennans (III, 93 5 ; III, 103 6 ), gannans (III, 103 15 ) ; dat. pl. gennilmans (III, 93 11 ).
Dérivés: genneniskan / weibischen ''personne efféminée" (III, 93 6). Comme le montrent les différentes formes casuelles attestées dans les
78. Trautmann (1910, p. 337 ; BSW, p. 84), Maiiulis (PKEZ, J, p. 351-352), Toporov (PrJ, II, p. 207).
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Catégorie du cas
Catégorie du cas
Catéchismes prussiens, l'apophonie paradigmatique a été totalement
Maziulis (PKEZ, III, p. 218) reconstruit une forme baltique *pyon-u 82 ,
éliminée dès une période préhistorique au profit du degré plein79. La
qui s'insère difficilement dans la reconstruction, traditionnelle depuis
variation <en> / en vieux prussien n'est qu'un fait de graphie. Le
Schindler (1975, p. 10), du prototype apophonique indo-européen: sg.
baltique oriental a perdu cette ancienne désignation de la "femme" (rem-
nom.-acc. *péhryr, gén. *phryén-s, collectif nom.-acc. *péhryor, gén.
placée par lit. m6teris "femme", lett. sieviête "femme").
*phrun-és (> *puh1n-és). Le degré plein a été généralisé en hittite (hitt. palJlJur "feu", gén. sg. palJlJwenas, nt.), tandis que le degré zéro s'est
IV. NOMS ATHÉMATIQUES SUFFIXÉS ET APOPHONIE RADICALE 1. APOPHONIE RADICALE PERDUE EN BALTIQUE
imposé en grec (gr. il"ÙP "feu", gén. sg. lTVPOS, nt.), ombrien (ombr. pir pir "feu", ace. pure pure-to, loc. purome), arménien (arro. howr ''feu'' < *pür-, cf. aussi arm. hnoc' "fourneau" < *pün-), irlandais (irl. ur "feu"),
gotique (got. fon "feu, iT1Jp", gén. sg. funins, dat. funin, nt.), v. hautDans les substantifs athématiques suffixés, les langues baltiques
allemand (vha.fiur "feu", nt.), v. islandais (v. isl. furr, .fYrr "feu", masc.,
présentent, en règle générale, un radical à degré vocalique constant. Dans
funi "feu", masc.), tokharien (tokh. B püwar, A por "feu" < i.-e. *puyor,
plusieurs cas, cette immobilité du radical résulte de la généralisation d'un
*puyor-, cf. Schindler, 1967b, p.242-244)83, et probablement dans
degré vocalique particulier, qui avait sa place dans un paradigme alternant
quelques dérivés slaves (tch. pyfi "braise", pyriti se "rougir", s.-cr. pùriti
en indo-européen. Quelques exemples peuvent être mentionnés à titre
"griller")84. Dans une direction différente, Smoczyfiski (2000a, p. 191) a
d'illustration.
récemment proposé de voir dans le v. prussien panno une "Rückbildung" à
- BALTIQUE *panu "feu,,80:
partir de panicke, paniko, pannike, panick, qui serait un emprunt au moyen
• v. prussien panno / vueer "feu" (E 33), panuJtaclan / vueryJen
haut-allemand vanke "Funke, étincelle" (m.). L'hypothèse n'est en soi pas
"Feuerstahl zum Feueranschlagen, pierre à feu, briquet" (E 370),
impossible. D'un point de vue typologique, on pourrait songer au parallèle
diminutif panicke, paniko, pannike, panick (fragments de textes
du polonais firanka "rideau", emprunté à l'allemand Fürhang, mais
prussiens)81 .
postérieurement interprété comme un diminutif (avec le suffixe slave -ka,
• emprunt baltique en fmnois panu "feu", mordve piina-kud "four"
cf. pol. brama "porte" --+ bramka "petite porte"), d'où la création d'un néo-
« "maison du feu").
primitif non diminutif firana "rideau"85. Dans le cas du v. prussien panno,
panicke, cependant, une hypothèse de cet ordre est peu
vraisemblable. Car l'emprunt fmnois panu "feu" implique que le mot 79. Analyse différente chez Smoczyfiski (l989a, p. 308; 2000a, p.38), selon qui le v. pro genno serait un emprunt au m. bas-allemand kone. kan "femme" (analyse acceptée par Nilsson, 1998, p. 124). 80. Trautmann (BSW, p. 206), Maziulis (PKEZ, III, p. 218-219), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 181), Eckert (1963, p. 882), Stang (1972, p. 41). Sur le prototype indo-européen, cf. aussi Benveniste (1935, p. 10). Données germaniques: Feist (1939, p. 158). Tokharien: van Windekens (1976, l, p. 382383). 81. Cf. Büga(RR(B), l, p. 154-159), MaZiulis (PKP, II, p. 63).
82. Cf. déjà Stang (1972, p. 41): *pHJJon-. " 83'"L'hypothèse ancienne qui rattache à ce groupe également le grec TI
60
Catégorie du cas
Catégorie du cas
61
* -es
baltique soit ancien, ce qui exclut l'hypothèse d'un emprunt tardif au
analogique à partir d'un ancien génitif athématique en
moyen haut-allemand. L'idée d'un emprunt germanique n'est cependant pas
athématique *emmen-es, vs. gén. thématique *deiw-as, d'où ace.
totalement à rejeter; la suffixation en *-u semble, de toute façon,
athématique *emmen-en, vs. ace. thématique *deiw-an). S'agissant du type
secondaire. Quelle que soit la reconstruction précise du mot baltique
morphologique du mot prussien, deux possibilités s'offrent donc: on peut
occidental, il apparaît sous une forme apophonique déterminée et ne
l'interpréter comme un substantif thématique (suffixe *-menas > v. pro
présente aucune variation (à plus forte raison s'il s'agit d'un emprunt). On
nom. sg. *-men-s, ace. sg. *-m(e)n-an, gén. sg. *-men-as) ou bien comme
notera que le baltique oriental présente une autre désignation du "feu" (lit.
un substantif athématique (suff. *-men-
--+
(gén.
gén. sg. *-men-es, d'où
i.-e. *H eJog-ni- ou *.Qg-ni-,
secondairement ace. sg. *-men-en, nom. sg. *-men-s, d'après le modèle des
cf. v. sI. orHb /ognb "feu, 1TUP", russe orOHb / ogon', pol. ogien, véd.
substantifs thématiques, nom. sg. *-s, ace. sg. *-an, gén. sg. *-as). La
agnif), lat. ignis).
même ambivalence morphologique apparaît pour le nom prussien du
ugnis, lett. ugùns), elle-même très ancienne
«
- BALTIQUE *fnmen- "nom "86 :
"corps", nom. sg. kërmens (par ex. III, 73 15), ace. sg. kërmenen (par ex. III,
• v. prussien: nom. sg. emmens / name "nom" (l, 9 15 ; II, 9 15),
103 15 -16), kërmnen (III, 81 17- 18), ou kërmenan (III, 4b), gén. sg. Iœrmenes
emnes, peut-être faute pour *emens (III, 47 15 ; III, 49 1) ; ace. sg.
(par ex. III, 4h), qui peut représenter soit un thème thématique *ker-menas
emnen (12x Catéchismes, par ex. l, 56; II, 56; III, 29 2), emmen,
(cf. lit. dial. kermenaï"larves d'abeilles", masc. pl., LKZ, V, p. 611), soit
peut-être pour *emnen (l, 11 13 ), emnan (4x
me
Catéchisme, par ex.
111,27 13). Les flottements de la graphie rendent difficile une reconstruction du paradigme prussien. On peut cependant, sans trop d'invraisemblance, restituer un nominatif singulier *emmens et un accusatif singulier *emm(e)nen ou *emm(e)nan. Le mot devait être de genre masculin. On iso-
lera donc un thème *emeJ'l-, auquel s'ajoutent apparemment les désinences du nominatif singulier -s (* emmen-s, cf. fmale de nom. sg. -s dans deiws "dieu", par ex. III, 378 < balt. *-as < L-e. *-os) et de l'accusatif singulier -an (*emm(e)n-an, cf. fmale d'ace. sg. -an dans deiwan "dieu", par ex. III,
l'adaptation d'un thème athématique (cf. lit. dial. kermuo, -men-{ "larve d'abeille", masc., LKZ, V, p. 613, lett. [œrmenis "corps", couronisme ?). Dans les deux cas, il faut sans doute partir d'anciens substantifs athématiques neutres à suffixe *-m.Q. En vieux prussien, cette formation n'est conservée comme neutre que résiduellement, dans un seul mot, attesté dans le Vocabulaire d'Elbing (v. pro semen / somen "semence", E 256 < i.-e. *seh1-m.Q, cf. lat. sëmen, V. sI. c'kMA / Semf/ "semence, U1TÉPI-lU, O"1TOpOS"). Il est probable que l'usage postérieur, connu à travers les Catéchismes, a fait passer ces anciens substantifs neutres au genre
masculin, que ce soit par une adaptation suffixale (suffixe nt. *-m.Q--+
279 < balt. *-an < L-e. *-om). La fmale la plus fréquemment attestée à l'accusatif sg. -en (emnen) peut être interprétée de deux façons: ou bien comme une variante de -an après dentale (cf. finale de neutre -en dans pirsten / vinger "doigt", E 115, à côté de -an dans assaran / see "lac",
E 60 < balt. *-an < L-e. *-om), ou bien comme le produit d'une proportion 86. Trautmann (BSW, p. 70), Maziulis (PKEZ, 1, p. 253-254), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 211-212), Toporov (PrJ, Il, p. 28-29).
suffixe masc. *-mon, -men-, cf. v. lit. sémuo, -ment "semence", masc.)
ou par une thématisation secondaire (suffixe nt. *-m.Q-
--+
suffixe masc.
*-menas, cf. lit. dial. kermenai' "larves d'abeilles", masc. pl.). Dans le cas
du prussien kërmens "corps", l'origine neutre est confirmée par l'indoiranien (véd. carman- "peau",
V.
pers. carman- "peau", nt. < L-e.
*ker-(p)_m.Q-)87. Dans le cas du pro emmens "nom" se pose le problème du
87. Sur l'étymologie du
V.
pro kermens, voir Hamp (1979b, p. 144-145), qui
62
Catégorie du cas
Catégorie du cas
radical et de sa reconstruction indo-européenne. On voit en général, dans ce
63
anu, breton hano "id."; probablement aussi alb. émër
lexème isolé du baltique occidental, le représentant de l'ancienne
(tosque), emën (guègue) "id."; peut-être enfin louvite
désignation indo-européenne du "nom"88. Le radical de cette désignation
hiéroglyphique adaman- "id." « *an-man-).
apparaît sous plusieurs degrés vocaliques, qui font penser à un paradigme apophonique alternant89 :
La reconstruction d'un thème l (* h 1enhr m1J.- > *enmen-) ne saurait trouver d'appui ni dans la forme albanaise (tosque émër, guègue emën), ni dans la
nt.; lat. nomen, -inis "id.", nt.; arm. anown "id."; hitt.
forme prussienne (v. pro emmens), qui toutes deux s'expliquent aussi bien par un degré zéro 90 . Le tokharien A nom, B nem est le produit d'une série
/a-a-ma-an "id.", avec dissimilation; germ. *nomn-, avec
d'évolutions complexes
voyelle radicale longue conservée dans le verbe dérivé
< i.-e. *h1T).hrmen- et de *niimiin < i.-e. *h1nehrmp). Sur la base de la
v. frison nomia, mha. be-nuomen, néerl. noemen "nommer",
variation apophonique conservée directement en anatolien (hitt. /iiman-
mais abrégée par la loi d'Osthoff dans *nomn-, d'où got.
/ louvite hiéroglyphique adaman-) et indirectement en tokharien (proto-
namo "nom, oV0lJ.a", nt. (ace. pl. namna dans Marc, 3, 17),
tokh. *niimiin- + *iinfniin- > *nam(ii)), Pinault (l982a, p. 20) restitue une
v. isl. nain "id.", v. ang. nama, vha. namo "Name, nom",
flexion *h1néh3-mT).- (cas forts), vs. *h1fJ.h3-mén- (cas faibles)91, et recon-
masc. < *nomon.
struit une racine *h1enhr "qualifier", spécialisée en grec et en celtique en
• *h1nehrmT).- > *nomT).- : véd. nâman- "nom", avest. niiman- "id.",
«
proto-tokh. *nam(ii), contamination de *iinfniin-
• *h 1nhr m1J.- > *(e)nomp- : gr. laconien 'EvUlJ.a-KpaTL8as, et, avec
un sens négatif"mal nommer, blâmer" (gr. OVOlJ.aL "blâmer", v. irl. ainim
assimilation vocalique, ionien-attique ovolJ.a, dorien ovulJ.a
"tache, défaut", f., 3 sg. moyen -antar "il est blâmé")92. Le vieux
(Sélinonte) ; ou, avec une autre syllabation, *h1T).hrmp- :
prussien emmens s'intègre dans cette reconstruction si l'on suppose un
slave
*jf(n)-m~,
v. sI. HMA /
im~
HMeHe / imene), s.-cr. fine, russe
"nom, oV0lJ.a", nt. (gén. sg. HM.H /
imja, pol.
imi~
"id.";
e
prototype baltique de genre neutre *ïn-men-, parallèle à celui du slave *fn-m~
«
i.-e. *h1T).hrmp-), et dont le prussien *enmen-, transmis comme
v. irl. ainm "id." (gén. anme), v. gallois anu "id." (pl.
emmen-, serait un aboutissement particulier. La forme baltique a visi-
enuein), m. gallois enw "id.", corn. hanow "id.", m. breton
blement éliminé toute variation apophonique. Le baltique oriental a perdu toute trace de cette ancienne désignation du "nom", qu'il a remplacée par
hésite entre *lœrp-men- (cf. véd. carman- "peau" < i.-e. *lœr-(p)-mlJ.-; lat. corpus "corps" ; véd. k(pâ "forme", instrumental; gallois cry! "fort" < *kr(p)-mo-) et *kWer-men- (cf. gallois pryd, v. irl. cruth "forme" < i.-e. *kWr-tu-). 88. Autre analyse chez Smoczyftski (2000a, p. 30-35), qui tire le prussien emnes, emmens de la formule religieuse allemande im Namen (des Vaters und des Sohns). Il me paraît difficile de le suivre dans cette direction. 89. Dossier comparatif: Pokorny (IEW, p. 321), Feist (1939, p. 369-370), Vasmer (1953-1958, l, p. 480), Pinault (1982a, p. 15-36), de Bernardo Stempel (1987, p. 69-70), Olsen (1999, p. 132). Voir aussi Gutenbrunner (1969, p. 1-6). J'adopte ici la reconstruction qui me paraît la plus vraisemblable (i.-e. *hmehrmlJ.-) ; d'autres analyses ont été proposées (cf. par ex. Beekes, 1987, p. 1-12). Récemment, Stüber (1997, p. 74-88) a supposé une formation différente *hm6m-1J., sans laryngale interne, formation qui reste, à mes yeux, contredite par l'intonation rude du serbo-croate ime.
une autre forme (lit. vafdas "prénom", pavardè "nom de famille", lett. vârds "nom" < "mot", cf. v. pro wïrds "mot").
90. Sur la forme albanaise, cf. Demiraj (1997, p. 165). 91. Cf. aussi Hardarson (1987a, p. 92). 92. Pour le grec àVO~Lal "blâmer", une reconstruction différente est proposée dans le LIV (p. 251-252): racine *h2ne h3- (cf. hitt. banna- "contester ~n justice", lycien qiiti; tokharien B conjonctif niik- "blâmer"), avec une evolution *ano- > *ono- par assimilation en grec.
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Catégorie du cas
Catégorie du cas
- BALTIQUE *zem-ë- "terre"93 :
65
• par métathèse et simplification * JteJom- > *tJeJom- > > v. irl. du "place" (gén. sg. don).
• lituanien: iemé "terre", fém.
*
JeJom-
• letton: zeme "terre", fém. • v. prussien: same / erde "terre" (E 24) ; nom. sg. semme (III, 105 17) ; ace. sg. samyen / acker 'terre' (E 237), semmien (II, 7 11
me Catéchisme,
;
8x
par ex. III, 3920), semien (III, 29 19 ; III, 51 6),
Cette évolution conduisait à interpréter le suffixe nasal comme partie du radical. Le nouveau radical ainsi obtenu *(et)teJom- présente dans les langues de nombreuses variations apophoniques. Sont attestés: • un degré *-0- (long et bref), i.-e. *(J)tom-, en grec (gr. X8wv,
semman (III, 105 15), semmin (l, 71l ) ; dat. sg. semmey (l, 9 16- 17), semmiey (II, 9 17);
gén. sg. X8ovos "terre", la nasale dentale s'étant généralisée
• Zinov: zem / ziemie "terre" (Z 12, cf. Zinkevicius, 1985, p. 82).
à partir de la forme de nominatif), sans doute également en
• cf. adjectif thématique lituanien iemas "bas", letton zçms "bas",
indo-iranien (véd. ~â!J, avec sifflante [male secondaire sur la
v. prussien adverbe semmai / nieder "en bas" dans semmailisons
base de l'ace. ~âlJl < *(J)tom < *(J)tom-m ; loc. ~dmi
/ nidergefaren "penché en bas" (III, 43 2),
/ nidergefaren "id." (III, 127 12), semmay lysons / nidergestigen
"terre"), ainsi qu'en tokharien (tokh. A tka", B kelJl ''terre'' < *c!,.J, . d' une nasale dentale probablement g on-, avec extensIon
"descendu" (II, 7 18), sammay lesuns / nidergestigen "id." (l, 7 17- 18),
dans les mêmes conditions qu'en grec).
semmai lïsuns
• u n degre' zero, , . *(a')g /1 -h l.-e. m-, en grec (gr. XUJ.lu( "sur terre, à
semmai ëilai / vntergehe "qu'il tombe, qu'il périsse" (III, 12 h).
dont le radical apparaît comme figé dans la plus grande partie des langues
terre", X8uJ.luÀ.6s "bas, à ras de terre") et en latin (lat. humus ''terre'', humilis "bas").
indo-européennes, y compris le baltique, sous la forme du degré zéro
• un degre'* -e-,l.-e. . *//l')-h ' . la g em-, en baltIque (ht. iêmé ''terre'') et en
*d'teJom- (le degré plein n'étant plus conservé qu'en hittite, te-(e-)kim, gén.
slave (v. sI. 3eMJIIa / zemlja "terre, yfl, Ol KOUj.lÉ VT]", fém.,
Il faut partir d'un ancien substantif athématique à suffixe nasal *Jet-eJom-,
tdk-na-(a-)as ''terre'')94. De ce radical figé *JteJom- proviennent: • directement
* JteJom- > tokh.
s.-cr. zèmlja, russe 3eMJUI / zemlja, pol. ziemia), peut-être aussi en phrygien (phr. (EIlEAwS "terre").
A tka", "terre", cf. tokh. B ke",
f
.
"terre".
L'a
• par métathèse *tJeJom- > gr. X8ov-, gaulois deuo.gdonioi.
< *ziis, avec [male refaite d'après l'accusatif au lieu d'i.-e.
• par spirantisation *tselom- > véd. ~am-.
gr. X8wv), probablement un degré bref originel à l'accusatif singulier
• par simplification
* d'teJom-
> *(elom- > gr. XUIJ.-, lat. hum-,
balto-slave *zem-.
93. Trautmann (BSW, p. 369), Mülenbachs-Endzelïns (ME, IV, p. 708-709), Fraenkel (LEW, II, p. 1299), Sabaliauskas (1990, p. 53-54), Maziulis (PKEt, IV, p. 58-60). Cf. LKt (XX, p. 307-336). Données slaves chez Vasmer (1953-1958, 1, p. 452-453). 94. Reconstruction du paradigme Ï.-e. chez Schindler (1967a, p. 201) : nom. *etét-om, acc. *d'ét-om-rp, loc. *d't-ém, gén. *d'gh-rpm-és.
ves Ique, qUI oppose un degré long au nominatif (avest. rée. zâ ''terre''
*(J)tom,
cf
(v. avest., avest. rée. zgm < i.-e. *(J)tom < *(J)tom-m) et un degré zéro aux autres cas, par exemple au génitif et au locatif (avest. rée. gén. z"mo, loc " " J -h . /1 . Z ml < l.-e. *( ')g m-eJos, *(a')tm-i), suggère l'existence d'un paradigme apoph' omque. S'· agIssant du balto-slave, les formes attestées sont vraisemblablement le produit d'une histoire complexe, qu'on pourrait à mon sens reconstituer comme suit95 . Du thème faible *(c!')tm- "terre" 95. Autre analyse (peu claire) chez Maiiulis (1995a, p. 45-46).
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> balto-slave *zm- (conservé en dérivation dans le slave *zm-ijii "serpent',
"race, famille", et ienté (par ex. au XVIIe siècle, dans le dictionnaire
cf. v. sI. 3MHIa / zmija "serpent, opaKLùv, o
Lexicon Lithuanicum, p. 60a: Mannsbruderweib / 3ente)99, par
"homme", v. lit. im u 0), le balto-slave aurait tiré un adjectif dérivé
contamination avec le lit. iéntas "gendre".
caractérisé par une vrddhi (degré vocalique supérieur) et un sens possessif
• v. lituanien dialectal: inté (Sirvydas, DTL 3, p. 22: Bratowa,
" l·t .. "bas" (cf. pour *zem-a- "qUI. concerne la terre, terrestre" > "bas, 1. zemas
Fratria, uxor fratris, Inte), lituanien dialectal inté "sœur de
le sens gr. XeŒ~aÀ6s, lat. humilis "bas"). Sur la base de cet adjectif aurait
l'épouse" (Marcinkonys, haut-lituanien du SUd)IOO.
été constituée une désignation secondaire de la "terre" comme "celle qui est
• letton: ietere "belle-sœur"
basse" : balto-slave *iem-ijii "celle qui est basse" > "terre", v. sI. 3eMJ11a
couronienjentere)IOI.
/ zemlja, lit. ieme (avec suffixe caractérisant, cf. lit. svente "fête"
«
*jënter-, cf. aussi lett. dial. ietaIa,
sventas
De manière générale, le suffixe de parenté en *-ter n'implique pas en indo-
"saint, sacré", lit. dia1. bendrè "prairie commune" +- bendras "commun",
européen d'apophonie radicale, comme le montrent les désignations
lit. dial. railde "vache rousse" -- raildas ''rOUX'')96. Si l'on adopte cette
classiques:
+-
analyse, on doit supposer que le baltique a hérité de l'indo-européen un thème unique à degré zéro radical *im- « i.-e. *(d')tm-) et qu'il en a tiré, au moyen d'une vrddhi, un adjectif dérivé et une désignation nouvelle de la "terre" pourvus d'un degré plein radical *zem-. Ce degré plein résulte, en ce cas, de la dérivation possessive; il ne reflète pas directement un degré apophonique du lexème primaire. Le baltique n'a donc probablement hérité que du thème à degré zéro, et n'a pas connu d'apophonie radicale dans le nom de la ''terre''.
- i.-e. *phrter- "père" : véd. pitâ; gr. lTŒnlP, etc. - i.-e. *mehrter- "mère" : gr. ~rlTllP; véd. mâtii; v. pro mothe
/ muter (E 170), muthi / mutter (GrG 55), müti / mutter (par ex. III, 673), etc.; lett. mâte "mère" ; v. lit. maté, moters "mère, femme";
lit. moteris, -ies "femme". - i.-e. *bhrehrter- "frère" : lat.friiter; véd.
/ bruder (E 173), briiti / bruder (III, 67 10 )
;
bhrâtii; v. pro brote lit. broterèlis -. brolis,
gén. -io; lett. briilis.
_ BALTIQUE *jinter- "belle-sœur, femme du frère du mari,,97:
- i.-e. *d'ughrter- "fille" : gr. 6u)'aTllP; véd. duhitâ; v. pro duckti
• v. lituanien: jente "femme du frère du mari" (gén. sg. jenters ou
/ Tochter (III, 674 ) ; lit. duktè, -ers "fille".
jentes, cf. Klein, 1653, p. 55), variantes gente (par ex. au XVIf siècle, dans le dictionnaire Clovis Germanico-Lithuana, III, p. 508:
Schwaegerin / Gente,ês. F.)98, par contamination avec le lit. gentis
96. Analyse en ce sens: Skardzius (1943, p. 73). Autre analy~e .chez Smoczyfiski J2001, p. 97-98), qui part de l'ancien thème de locatIf mdoeuropéen *d'g -ém. 97. Trautmann (BSW, p. 107), Mü1enbachs-Endzelfns (ME, II, p. 81), Biiga (RR(B), II, p. 239), Pokomy (lEW, p. 505), Fraenkel (LEW, 1, p. 193), Stang (1966, p. 100), Szemérényi (1977, p. 92), Buivydienê (1990, p. 144-148; 199~, p.. 169176), Smoczyfiski (2001, p. 126). Cf. LKZ (IV, p. 123 et 340). DOSSIer mdoeuropéen: BlaZek (2001, p. 27), Tremblay (2003, p. 92-94). e 98. Cf. édition par V. Drotvinas (1997, 3 volume, p. 508).
99. Cf. édition par V. Drotvinas (1987, p. 266-267). 100. Zinkevicius (1966, p. 178, § 204). 101. La forme lettone ietere à intonation initiale, constamment citée dans les ouvrages étymologiques (cf. par exemple Vaillant GCLSl., II/l, p. 258), repose sur le seul témoignage du dictionnaire de Mülenhachs-Endzelïns (ME, II, p.. 81). Celui-ci tire la forme du recueil des Latvju dainas de Barons et Wlsendorfs (1894-1915), où elle était évidemment dépourvue d'intonation' la ~estitution d'une intonation ietere n'est donc appuyée par aucun fait. Dans 'ses Compléments et corrections" au ME (Papildiniijumi un labojumi K. Mülenbacha Latviesu valodas viirdnicai, 1934-1938, Rfga, l, p.551), ~ndzelfns a correctement supprimé l'intonation du mot ("ie- ME. II, 81 durch le- zu ersetzen !"). D'un point de vue historique, seule est valable l'intonation de ieta{a, qui reflète régulièrement une forme baltique *jent- « *ienh2-t-).
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Catégorie du cas
Catégorie du cas
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Mais, dans la désignation de la "belle-sœur", différents degrés vocaliques
Sirvydas 105
sont attestés dans les langues indo-européennes: un prototype à degré plein
Sirvydas, pinki "cinq", DTL , p. 290 (: lit. standard penki), gintis "race,
(i.-e. *jenhr ter-)102 est supposé par le grec (gr. homérique ElvaTÉpE5'
famille", DTL
"femmes des frères du mari", gr. dial. tardif sg. ÈvaTTlP, Asie Mineure);
p. 439 (: lit. standard iéntas), etc. Il apparaît donc que le baltique, comme
un degré zéro radical (i.-e.
*jI)hrter-)
apparaît en sanskrit (véd. yâtii
"femme du frère du mari"), peut-être en phrygien (acc. LaVaTEpa) et
:
comme exemples de ce traitement, on peut citer, chez 3
3 ,
p. 378 (: lit. standard gentis), tintas "gendre", DTL 3 ,
le slave, a éliminé toute apophonie radicale dans ce mot et a généralisé un degré radical déterminé, en l'occurrence le degré plein.
probablement en latin {lat. tardif ianitr'icës "belles-sœurs", pl., avec un suffIxe influencé par genitrfcës ''mères'') 103 • L'arménien nër "belle-sœur"
2. APOPHONIE RADICALE CONSERVÉE EN BALTo-SLAVE,
ne se laisse pas aisément intégrer à ce groupe 104 . Le slave est ambigü, car
PERDUE EN BALTIQUE
il peut refléter aussi bien un degré plein radical qu'un degré zéro radical : slave *jçtry> v. russe HTphI / jatry "belle-sœur" (avec même suffIxe que CBeKphI / svekry "belle-mère"), russe dial. HTpOBh / jatrov' "femme du frère du mari", v. pol. jçtrew "femme du frère", s.-cr. jêtrva "femme du beaufrère". Les données des différentes langues indo-européennes amènent à reconstruire un paradigme alternant, dont la confIguration pourrait avoir été la suivante: nom. sg. *iénhrtër, gén. sg. *iI)hrtr-és. Toutefois, cette reconstruction demeure incertaine, car aucune langue n'a gardé de trace directe de l'alternance radicale: celle-ci n'est postulée qu'afin d'expliquer la divergence des formes attestées. Le baltique présente un degré plein radical constant (v. lit. jenté, lett. ietere < balt. *jënter- < i.-e.
*jenhrter-,
auquel
répond probablement le slave *jçtr-y < i.-e. *ienhrtr-, mais *iI)hrtr- est
Les cas de cette nature montrent clairement à quel point la tendance à éliminer l'apophonie paradigmatique s'est affIrmée en baltique. Dans plusieurs cas, cependant, la comparaison du slave et du baltique donne à penser que l'apophonie paradigmatique était encore conservée en baltoslave, mais qu'elle a été perdue à une date plus récente, indépendamment dans chacun des deux groupes. On peut citer l'exemple suivant. - BALTIQUE *siiulë- "soleil"I06:
• lituanien: saulé "soleil", fém. • letton: saûle "soleil", fém. • v. prussien: saule / sunne "soleil" (E 7), toponyme Saw/iskresli/ "jetzt Sonnenstuhl Kr. Heiligenbeil" (attesté en 1423)107.
aussi possible). La forme dialectale du v. lituanien inté, attestée chez
Pour cette désignation ancienne du "soleil", les langues indo-européennes
Sirvydas, pourrait théoriquement refléter un ancien degré zéro radical (i.-e.
présentent de nombreuses variations apophoniques, qui amènent à recons-
*jI)hrter- > balt. *jfnter- > v. lit. inté). Mais il est infmiment plus
truire un paradigme hétéroclitique alternant. Selon Beekes (1984, p. 5),
vraisemblable qu'elle résulte d'une évolution phonétique de la diphtongue
prolongeant une analyse de Schindler (1975), la flexion indo-européenne du
* en >
*in,
évolution propre au dialecte haut-lituanien oriental de 105. En ce sens, Büga (RR(B), II, p. 239).
102. Reconstruction indo-européenne *ienhr ou *Hienh2- (si l'on admet que gr. rh-l, supposé derrière la forme psilotique dVUTÉpE5', reflète exclusivement un groupe *Hi-). Ce point est ici sans importance. 103. Sur la forme latine, cf. Hamp (1982-1983, p. 102). 104. Explications diverses chez Winter (1965a, p. 114), Hamp (1966, p. 12), Georgiev (1980, p. 200), Schmitt (1996, p. 21-24), ûlsen (1999, p. 190-191).
106. Trautmann (BSW, p. 251), Mülenbachs-Endzelfns (ME, N, p. 772-773), Fraenkel (LEW, II, p. 765-766), Benveniste (1935, p. 12), Vaillant (1950, p.4853), Eckert (1963, p. 882; 1979, p. 18), Sabaliauskas (1990, p. 51), Bader (1995, p. 265-276), Smoczyfiski (1993, p. 78-80 = 200 l, p. 176-178; 1997, p. 78-79 = 2001, p. 204; 2001, p. 98-99), MaZiulis (1995a, p. 46-48; PKEZ, N, p. 72-75). Cf. LKZ (XII, p. 191-194). 107. GerulIis (1922, p. 153), MaZiulis (1995b, p. 60; PKEZ, IV, p. 77-78).
Catégorie du cas
Catégorie du cas
mot opposait un nominatif *sehryl et un génitif *shryen-s. Les différentes
L'apophonie paradigmatique n'est conservée nulle part telle quelle. Seul
langues auraient généralisé, ou combiné l'une avec l'autre, ces deux formes,
l'iranien avestique a gardé, de manière partielle, l'alternance hétéroclitique
si bien qu'on observe en fait une grande diversité de thèmes 108
(nom.-acc.
70
:
huuar~,
gén.
XV~1Jg
71
< Î.-e. *shryel-, *shryen-). Toutes les
• *sehryl-: gallois haul "soleil", masc. ; dérivé *sehr yl-ij-eh2
autres langues, y compris le baltique, ont généralisé une situation
> balt. *siiule: lit. saulé, lett. saille, v. pro saule "soleil".
apophonique particulière, ainsi qu'une forme spécifique du suffixe, et les
Peut-être aussi proto-italique *sayl > lat. sol "soleil" (?).
ont en général insérées dans une dérivation propre (en balt. suffIXe *-ij-ii
dérivé *sehryel-ij-o- > gr.
> *-é). On notera cependant la divergence apophonique qui sépare le
gr. crétois à~ÉÀLOS' flÀLOS, KpflTES,
baltique et le slave. Elle pourrait suggérer, éventuellement, la conservation,
arcadien àÉÀLOS (Tégée), homérique liÉÀLOS, attique flÀLOS
en balto-slave, d'une apophonie radicale, ultérieurement perdue. Mais il
"soleil".
peut s'agir également de deux formes dialectales indépendantes.
• *sehryel-: got. sauif "soleil, commun
*haFEÀLOS:
• *s hrul- > *suhrl- >
flÀLOS" ;
*sül-:
dérivé *shrul-o- ou *shrul-j-o3. TRACES D'APOPHONIE RADICALE EN BALTIQUE
> véd. sûra-, sûrya- "soleil"; v. irl. suif "œil" (?).
• *s hryel- > *suyel- : véd. suvar- "soleil", nt. ; avest. réc. nom.-acc. sg. huuar~ "soleil".
concurremment deux allomorphes apophoniques, ce qui amène à supposer
• *shryen-: v. avest. gén. sg. xv~1Jg. • *shrun- > *su-n- > *sun- : germ. *sun-n-ii: got. sunno "soleil, flÀLOS",
Enfin, dans quelques cas isolés, les langues baltiques présentent
v. isl. sunna, vha. sunna, all. Sonne, v. ang. sunne,
que l'apophonie paradigmatique était encore conservée en proto-baltique. Les traces n'en sont cependant pas nombreuses, et leur analyse est parfois incertaine. La plus claire apparaît dans la désignation de l"'eau".
ang. sun. • combinaison des deux suffixes en slave secondaire en *-i-
--+
dérivé
*su-l-n-(i)-,
*sulnl-ko-
thème
: v. sI. CJThHLQe
/ sl'bnbce "soleil, flÀLOS", v. russe C'bJIHbue / s'blnbce, russe COJIHue / solnce, s.-cr. sûnce, tch. slunce, v. pol. slufzce, pol.
slofzce1 09 •
a. Le nom de l'"eau'' dans les langues baltiques Les langues baltiques présentent, pour la désignation de l"'eau", une série de formes visiblement apparentées et anciennes, mais dont le vocalisme radical et la formation morphologique divergent parfois de manière considérable. Les formes attestées sont les suivantes 110 : - V. PRUSSIEN: wundan / wasser "eau", nt. (E 59), wunda
/ wasser (GrG 10), wunda / wasserre (GrA 6), wunda / aqua 108. Dossier comparatif: Bammesberger (1985, p. 111-113), Huld (1986, p. 194-202), Hamp (1990, p. 193-194), Wachter (1997, p. 4-20), Euler (2000, p. 69-77). 109. Sur les formes slaves, cf. Vasmer (1953-1958, II, p. 690). Une forme sans suffixe *-ko- (* su/-nl-) est encore conservée en slave dans les composés v si 6eCJI'bHbH'b / bes/'bnbn'b "sans soleil, à1!TÎÀ.LOs", russe rrOCOJIOHb / pos%n' "~el~n le cours du soleil, qui se trouve à l'ouest", croate dialectal oposun "id.". Voir Eckert (1963, p. 882), Smoczynski (1997, p. 79, note 57 = 2001, p. 205, note 57).
(GrF 31); nom. sg. unds "eau", masc. (7x
me
Catéchisme,
110. Trautmann (BSW, p. 337), Buga (RR(B), II, p. 661-662), MülenbachsEndzelïns (ME, IV, p. 404-405), Fraenkel (LEW, II, p. 1194-1195), Vaillant (GCLS/., II/l, p. 179-180), Karulis (1992, II, p. 449-450), Maziulis (PKEt, N, p. 267-268), Schmalstieg (1999, p. 69-74). Cf. aussi LKt (XVIII, p. 101-112).
72
Catégorie du cas
Catégorie du cas
73
par ex. III, 59 7), acc. sg. undan (III, 61 17 ; III, 129 15- 16), gén.
Vandziogala), Vadinis (lac à Kapciamiestis), Vadinélis (lac à
sg. undas (III, 63 12- 13 ; III, 103 9 ), acc. pl. undans (III, 119 24 ).
Molêtai), Vadi5kinas (lac à KuktiSkës), Vaduvà, Vêiduva,
- LITUANIEN: vanduo "eau", masc. (acc. sg. winden{, gén. sg.
Vadvà (lac à Skapiskis). On rapprochera aussi le lituanien
vandefis); incertain: bas-lit. undui5 "eau", masc. (par ex.
viidé "ornière remplie d'eau de pluie et formant un ruisseau"
nom. sg. Q' ndQu, gén. sg. Q' nd~nts, à Salantai)lll .
(cf. LKZ, XVII, p. 775), ainsi que le letton vada / ein
- LETTON: ûdèns "eau", masc.
einschiessender freier Platz (der aIs Wiese dient) im Walde
À la même famille étymologique appartient également le nom baltique
"une place libre qui sert de prairie", vadele / eine kleine
de la "loutre", bien que la relation ne soit sans doute plus guère sensible en
Schlucht, die zum Fluss od ins Tal/ührt "un petit défilé qui
synchronie:
conduit à une rivière ou dans la vallée", vads / ein sumpfiger
- BALTIQUE *üdrii "loutre" 1 12
:
dichter Wald "une forêt marécageuse épaisse" 1 15 • Peut-être
v. pro udro / otter "loutre", fém.
faut-il encore intégrer à cette liste d'autres hydronymes
(E 667); lit. ûdra "loutre", fém. (variante dialectale ûdras,
comme lit. Vadaksnis (cours d'eau à Plungë), Vadakstà,
masc.) ; lett. ûdrs "loutre" (variante ûdris, Mülenbachs-
Vadukstà, Vadaktà (cours d'eau à Anyksciai), Vadakstis
Endzelïns, ME, IV, p. 406), masc. On peut citer aussi
(cours d'eau à Kurtuvënai et à Laizuva), Vadaktis, Vadaktà,
quelques hydronymes lituaniens tirés du nom de l'animal,
Vadakstà (cours d'eau à Krekenava), et lett. Vadakste (cours
par exemple lit. Üdrinis (lac à Rudnia), Üdarà (cours d'eau à
d'eau). On ajoutera enfm le lituanien viidaksnis "bras d'une
Gelvonai), Üdrijos eieras (lac à Udrija), Üdrijà (village près
rivière, qui se joint à elle seulement en cas de crue, lieu où
de ce lac) 1 13 •
circule l'eau" (cf. LKZ, XVII, p. 770). L'analyse de l'hydro-
Enfin, on rapproche généralement de ce groupe plusieurs hydronymes baltiques et quelques mots dialectaux qui s'y rattachent: - RADICAL *vad- 1l4
:
nyme prussien Wadanga demeure incertaine 1 16 • - RADICAL *viid- > *(v)od- 117 : lit. Odmuo, rivière près de Silalë.
lit. Vadà (cours d'eau à Ariogala et à
Cf. lit. dial. odmenis "embouchure d'une rivière" (cf. LKZ, VIII, p. 995).
Simkaiciai), Viidas (cours d'eau à Raseiniai et à VeivirZénai),
Viidé (cours d'eau à BalbieriSkis), Vadavé (cours d'eau à
On laissera de côté la désignation de la "grenouille" en baltique 1 18
:
lit.
varié "grenouille", fém. (acc. sg. vaflf/); lett. varde "grenouille", fém.; 111. Trautmann (BSW, p. 337), Stang (1966, p. 295), Pakalniskienè (1998, p. 33). Biiga (RR(B), II, p. 663) interprète la forme unduo comme un "couronisme". Cependant, son authenticité est mise en doute par Vitkauskas (1986, p. 103, cf. aussi 2001, p. 171-173), qui y voit le produit d'une évolution phonétique de vanduo. Dans le dialecte de Salantai (bas-lituanien du Nord), par exemple, d'où Stang tire la forme Q·ndiju, la diphtongue tautosyllabique < an > évolue régulièrement en < Qn >, cf. LKA, II, Fonetika, carte 68 (Salantai, 93). 112. Fraenkel (LEW, II, p. 1157-8). Cf. LK2' (XVII, p. 361). lB. Vanagas (1981a, p. 351-352). 114. Données chez Vanagas (1981a, p. 357-358), qui rapproche le lit. vanduo. Cf. aussi Fraenkel (LEW, II, p. 1176).
115. Formes dialectales lettones chez Mülenbachs-Endzelïns (ME, N,
p. 429 et p. 431).
116. Gerullis (1922, p. 191 et p. 247). 117. Rapprochement avec le nom de l'''eau'' chez Fraenkel (1958, p. 42-44 ; LEW: p. 516), Vanagas (1961, p. 230; 1981a, p. 234). Pour l'évolution p~o~etIque *vod- > *od-, cf. bas-lituanien ojis (Daukantas) "danger", paojus Id. , en regard du lituanienpavojus "id." (Fraenkel, LEW, 1, p. 516 et p. 559). 118. Fraenkel (LEW, II, p. 1200-1201), Mülenbachs-Endzelïns (ME IV p. 476). ' ,
!,
75
Catégorie du cas
Catégorie du cas
74
lett. dial. vargle "grenouille", fém. (Kurmin, 1858, p. 256); toponyme
- [cl un radical à degré zéro *ü(-)d-, attesté en letton et en prussien
v. pro Wor/yne. Certains savants ont proposé de tirer cette désignation d'un
dans la désignation primaire de l'''eau'', mais commun aux trois
étymon baltique *varde, forme à métathèse de *vad-r-e rapprochant l'arménien gort (thème en *-i) "grenouille"
« *yod-r-),
« *yod-r-i-)
1
langues dans le dérivé *üd-ra "loutre".
en
Le
Cette variation paraît refléter une ancienne apophonie paradigmatique.
rattachement au nom de l"'eau" est possible d'un point de vue sémantique
Toutefois, les langues baltiques ne permettent pas à elles seules de
("grenouille" < "animal aquatique"), mais pose une série de problèmes
déterminer la distribution de ces différents degrés apophoniques, et les
(métathèse *-dr- > *-rd-, intonation radicale, structure du suffixe *-de,
formes attestées dans ces langues posent par ailleurs une série de problèmes
*-lè, ou *-d/e ?), qui amènent à le mettre en doute 120 .
phonétiques et morphologiques qui invitent à examiner leur genèse de plus
19 .
Cinq radicaux paraissent donc s'opposer: deux radicaux pourvus d'une
près.
nasale interne dans la désignation primaire de l"'eau", *vand- (lit. vanduif)
D'un point de vue étymologique, il ne fait aucun doute que les formes
et *ünd- (v. pro wundan, unds, lett. ûdèns avec û- < *ün-, incertain: bas-
baltiques prolongent l'ancienne désignation indo-européenne de l"'eau", à
lit. unduo) ; et trois radicaux dépourvus de nasale interne dans les formes . u~dra, 1ett. uAdrs "1 outre") , *va. ,d dérivées secondaires *üd- (v. pro udro, ht.
l'origine un substantif neutre à suffixe hétéroclitique (i.-e. *yod-r/n-), qui
(hydronymes du type lit. Vadà, etc.) et *viid- (hydronyme lit. Odmuif). En letton, les radicaux *ünd- et *üd- se sont confondus; seule la comparaison des formes lituaniennes apparentées permet de les différencier et de tirer
ûdèns "eau" de *ünd- (cf. lit. vanduif), mais ûdrs "loutre" de *üd- (cf. lit. ûdra). Si l'on fait provisoirement abstraction de la nasale interne, on observe donc qu'une variation apophonique sépare pour l'essentiel trois radicaux : _ [a] un radical à degré plein bref *vad-, attesté seulement dans quelques hydronymes au statut étymologique douteux.
- [b] un radical à degré plein long *vii(-)d-, limité au haut-lituanien.
est attesté dans de nombreuses langues 121 -
:
INDO-EUROPÉEN *JJod-r/n- : hitt. wiitar "eau", nt. (gén. sg.
wetenas); gr. ü8wp "id.", nt. (gén. sg. ü8aTos); ombr. utur "id.", nt. (abl. sg. une < *udni); got. wato "eau, ü8wp", nt. (gén. sg.
watins) ;
V.
isl. vatn "id.", nt. (gén. sg. vatns, puis vats) ;
V.
sax.
watar "id.", nt.; vha. wazzar "Wasser, eau", nt.; véd. gén. sg. udnai), loc. sg. udan(-i) "id.", nom. sg. secondaire udakafJl, nt. ; formations incertaines: arm. get "rivière" (instrumental sg. getov); phrygien ~E8u "eau". Le dérivé baltique *üdra "loutre" est lui aussi ancien; il dispose de correspondants exacts dans d'autres langues indo-européennes: slave
*(v)ydra (v. sI. BhI.llpa / vydra, russe BbI.llpa / vydra, s-cr. vidra, tch. vydra, 119. Pour le traitement phonétique *-dr- > arménien *-r.t-,. c~. ~. artasowk' "larme" « i.-e. *drafu- < i.-e. *drafru-, avec diSSimIlatiOn progressive, cf. g~. 8d.Kpv "id~', avec di/ssi~,ilati~? régressive), arm. artewan "cils, sourcils" « l.-e. *drepana, gr. 8pETTavT) faux). 120. Autre hypothèse chez Schulze (193\ p. 129-13~), qui co:upare je latin rubeta "grenouille" (analysé comme *uret-e-> avec m~~athèse ruet-~- > lat. - --en regard de * /Joret-e- > balt. vard-e-). De manlere plus convamcante, ru b e, ' *uo.r~, d d Derksen (1996, p. 58) >tpose un prototype . mdo-eur?peen ont 1'1'tue un e forme baltique *var'd- (avec effet de la loi de Wmter). MaiS ,II.ne se prononce
pas sur l'étymologie de cette désignation. Sur la forme armemenne, cf. Olsen (1999, p. 182).
pol. wydra "loutre", fém.), grec (gr. ü8pa "hydre", fém., ü8pos "serpent d'eau", masc.), germanique (vha. ottar, v. isl. otr "loutre", masc.) et indoiranien (véd. udra- "animal aquatique", masc., avest. udra- "loutre",
121. Dossier comparatif: Benveniste (1935, p. 20), Feist (1939, p. 553), Mayrhofer (KEWA, 1, p. 103; EWA, l, p. 215), Chantraine (DELC, 2e édition, p. 1152-1153), Lehmann (1986, p. 395), de Vries (1962, p. 648), Ernout-Meillet (DELL, p. 746).
77
Catégorie du cas
Catégorie du cas
masc.)l22. D'autres dérivés sont encore connus, dont certains peuvent
suffixale à partir de la forme d'acc. *-en-I[1 > balt. *-en-in (> lett. -en-i, cf.
prétendre à une certaine antiquité. On comparera ainsi, d'une part, l'adjectif
acc. sg. ûdeni), d'où un nominatif sg. secondaire *-en-is (> lett. -èns, cf.
grec èivu8poS' "sans eau", d'autre part, l'adjectif védique anudrii- "id." ; ou
nom. sg. ûdèns). Mais, même dans les langues qui ont généralisé le suffixe
le grec mycénien udoro (probablement *ü8pov) "récipient en forme de
*-n-, le substantif dérivé "loutre" présente encore une trace du thème en
seau" (prolongé en grec alphabétique par le dérivé u8pla "aiguière, pot,
*-r-. On comparera ainsi, en lituanien, vanduo "eau" (*-n-) et ûdra "loutre"
ume"), et, avec un degré vocalique différent, le slave *vedro "seau" (v. sI.
(*-r-); de même, en letton, ûdèns "eau" (*-n-) et ûdrs "loutre" (*-r-); en
Btnpo / vedro "seau, ŒT
v. islandais, vatn "eau" (*-n-) et otr "loutre" (*-r-); enfin en sanskrit
tch. vedro, pol. wiadro); ou encore l'épithète homérique aÀ.oŒ-u8V1l
védique, le génitif sg. udniil}, le locatif sg. udtin(-i) "eau" (* -n-) et le dérivé
"vague de la mer" (épithète d'Amphitrite en Od. 4, 404, de Thétis en Il.
thématique udra- "animal aquatique" (* -r-).
76
20, 207, cf. aussi KaÀu8vaL, toponyme à Ténédos) et le substantif latin
Les formes prussiennes posent problème, car elles paraissent avoir
unda "onde, vague", fém. « *ud-nii). L'analyse des formes baltiques pose trois problèmes, que l'on
perdu toute trace d'une dérivation suffixale en *-r/n-. La forme wundan,
examinera successivement: tout d'abord, le problème du type flexionnel et
neutre (-an
de l'évolution de l'ancienne hétéroclisie indo-européenne; en second lieu,
connue par ailleurs, et son correspondant masculin unds, dans les
le problème de la nasale interne et de son origine; enfm, le problème de la
Catéchismes, doit représenter un passage récent de cet ancien neutre à la
quantité vocalique du radical. C'est seulement après avoir tenté de clarifier
flexion des masculins thématiques (v. pro unds < *und-as
ces difficultés qu'on pourra aborder la question plus générale de
Pour expliquer cette finale thématique, on peut envisager plusieurs
l'apophonie paradigmatique dans la désignation de l"'eau" en baltique.
solutions, dont aucune n'est totalement satisfaisante. On pourrait tout
attestée dans le Vocabulaire d'Elbing, suppose une finale thématique
+-
*und-an).
S'agissant du type flexionnel du nom de l"'eau" en indo-européen, les
d'abord être tenté, ce qui à ma connaissance n'a jamais été fait, d'y voir un
données des différentes langues amènent à poser un ancien substantif neutre
archaïsme indo-européen, en supposant par exemple que cette fmale
hétéroclitique alternant. L'hétéroclisie *-r/n- est conservée directement en
prussienne *-an prolonge une ancienne formation concurrente au neutre
hittite (hitt. wiitar, wetenas), en grec (gr. ü8wp, ü8aToS'), en ombrien
hétéroclitique. On pourrait, par exemple, songer à un ancien neutre
(ombr. utur, une), indirectement en germanique (got. wato, watins avec
sigmatique *ud-%s-, attesté en grec (gr. datif ü8EL : Hésiode, Erga, 61, cf.
*-n-, mais v. sax. watar avec *-r-); mais partout s'est exercée la tendance à
ü8oS', -oUS' "eau", nt. : Callimaque, Fragment 268), indirectement en
l'éliminer au profit d'une forme déterminée du suffixe. Ainsi, le sufftxe
indo-iranien (dérivé véd. iltsal) "source", avest. usa, masc. < *ud-s-o-) et
fort *-r- a été généralisé en germanique occidental (v. sax. watar), le
peut-être en celtique (v. irl. uisce "eau", masc. < *ud-s-liio-) 123 . Le neutre
suffixe faible *-n- en germanique oriental et septentrional et, dans les
*-on,
123., Cf. Mayrhofer (KEWA, 1, p. 103; EWA, 1, p. 213), Vendryes (1959-, V-21). A propos de la forme celtique, une autre analyse se trouve chez Hamp
*-en-es) répond exactement, pour l'alternance suffixale, le lituanien vanduo,
(1969, p. 87). On ne sait s'il faut rapprocher ici la forme arménienne get "rivière", thème en *-0- (cf. instrumental sg. getov). R. Schmitt (1981, p. 75) reconstruit avec prudence un neutre sigmatique *lied-os ("vielleicht -es/osStamm 7"), qui ne pourrait se concilier avec le grec ü80s qu'en supposant une apophonie paradigmatique, en l'occurrence peu justifiée; voir aussi Olsen (1999, p. 45-46). Le sens du mot arménien est en outre quelque peu différent
mêmes conditions, en baltique: au gotique wato, gén. sg. watins gén. sg. vandeiis
«
«
*-on, *-en-es). Le letton a nivelé cette alternance
122. Trautmann (BSW, p. 334).
78
Catégorie du cas
Catégorie du cas
79
thématique du v. prussien wundan pourrait alors s'interpréter comme le
un singulatif secondaire. On pourrait rapprocher le couple prussien slaya
prolongement indirect de ce neutre sigmatique, de la même manière que le
"traîneau" (E 307, collectif) / slayan "partie glissante de la luge" (E 309,
v. pro kelan / rat "roue" (E 295) représente probablement l'aboutissement
singulatif)126. L'hypothèse demeure cependant douteuse, parce que le
de l'ancienne forme neutre sigmatique *kwel-%s- (gr. TÉ,,"OS, gén. sg. -ous
baltique n'a gardé aucune trace de cette forme de collectif *ud-n-ii et
"fm, tenne", v. sI. Kono / kola, gén. sg. Konece / kolese "roue"; le
surtout, comme on le verra plus loin, parce qu'il a conservé directement la
V.
isl.
hvel "roue", nt. < *k Wei-am est une innovation parallèle à celle du prussien,
trace d'une plus ancienne forme de collectif *lled-or (cf. lit. vanduo). On
mais indépendante)124. Toutefois, cette analyse risque fort d'être
voit mal comment le baltique pourrait présenter conjointement une forme
anachronique. Il n'est guère plausible, en effet, que la fmale thématique de
ancienne et sa variante renouvelée. En tout état de cause, cette hypothèse ne
la fonne wundan du vieux prussien puisse s'expliquer à l'aide d'une forme
saurait expliquer la fmale neutre thématique du v. prussien wundan; il est
grecque à peu près isolée. En outre, à la différence du grec ü8os, le
préférable d'en éclaircir la genèse à l'intérieur même du prussien.
v. prussien wundan se signale par la présence d'une nasale interne au radical: la comparaison ne saurait donc être immédiate. Une autre hypothèse serait de partir d'un neutre pluriel de sens collectif
*ud-n-ii
«
i.-e. *ud-n-eh2 )l25 et d'en tirer, avec métathèse, une forme
prussienne *und-ii, dont la forme neutre attestée wundan (*und-an) serait
Il me semble que l'origine de la fmale prussienne est à chercher dans le fait que les substantifs neutres hétéroclitiques en
*-r/n-
ont disparu en
baltique en tant que classe grammaticale distincte. Leurs vestiges n'apparaissent plus que sous la forme de dérivés: par ex. thèmes en *-ii (v. lit. w jeknos "foie" ... *iek -r/n-, lit. vâsara "été" ~ * pes-r/n-), thèmes consonantiques (v. lit. ëduonis "goinfre" ~ *h1ed-r/n-, cf. lit. ëdrà
("rivière" et non simplement "eau"). Toutes ces formes sont bien éloignées du prussien wundan. 124. Le remplacement de l'ancien suffixe sigmatique .neutre (baltique *-~s < i.-e. *-os-) par la finale thématique neutre (balt. *-an < l.-e. *-o~) peut avAolr été motivé par le fait qu'en vieux prussien, ce suffixe devait apparaItre aberrant: il était de genre neutre, mais donnait l'impression d'une finale thématique de masculin. Dès lors, on a pu tendre à en faire passer. les représentants dans la classe des neutres thématiques (balt. *-as, nt. --: refaIt en *-an, nt.) ou dans celle des masculins thématiques (balt. *-as, nt. -- ré~nterprété comme *-as, masc.). La première évolution rendrait compte du V. prussIen kelan "roue" (~balt. *kelas, neutre sigmatique <ï.-e. *kwel-%s-, cf. gr. TÉÀ.OS), pour lequel la pression du neutre allemand das Rad a pu jouer u~ r~le dans !a préservation du genre neutre; quant à la seconde, elle pourrait et~e att~stee directement dans le lituanien menas "art" (~balt. *menas, neutre slgmatlque < ï.-e. *men-%s-, cf. gr. IJ.ÉvOS'), pour lequel l'hypothèse d'un intermédiaire neutre thématique (balt. *men-an) est certes possible, mais superflue. 125. Cette forme reconstruite *ud-n-a serait elle-même secondaire en re~ard de l'ancien collectif i.-e. *J!ed-or, qu'elle pourrait avoir remplacé de la meme manière que, par exemple, la finale *-mn-a du neutre pluriel latin. nomina, gotique namna "noms" a certainement remplac~ une finale plu~ ancI~nne ~~ collectif *-mon, laquelle est conservée en avestIqu.e (v. avest. namç,n .noms., pl.). Il n'est pas prouvé, mais pas non plus. impossIble, que le substantif latm unda "vague" procède d'une réinterprétatlOo comme fém. sg. de cette forme collective *ud-n-a.
"fourrage"), thèmes en *-i- (sans doute lett. asins "sang" < *asinis
-- *h1eshrr/n-), cf. aussi lit. faknis "racine" : : : fakarnis "branchu" 127. Un substantifneutre hétéroclitique hérité ne pouvait donc survivre en baltique qu'au prix d'une certaine modification morphologique. Dans le cas du nom de l "'eau", deux évolutions étaient envisageables: ou bien une modification "légère" du suffixe et un changement de genre grammatical (généralisation de la flexion en *-n- et passage au genre masculin en lituanien et letton: lit. vanduo, -efis, lett. ûdèns, masc.); ou bien une conservation du genre grammatical ancien et une modification "lourde" du suffixe (genre neutre conservé et passage à la flexion en
*-an,
majoritaire
dans les substantifs neutres en v. prussien: v. pro wundan, nt., ultérieurement unds, masc.). Le choix de la seconde possibilité plutôt que de la première en prussien a certainement été favorisé par la pression de la langue
126. Sur ce couple, cf. Petit (2000b, p. 30). 127. Exemples chez Kazlauskas (1968, p. 260-261).
Catégorie du cas
80
Catégorie du cas
81
allemande, dont le correspondant sémantique était de genre neutre (aIl. das
La fmale du correspondant slave voda "eau", fém. (v. slave BO,lla / voda
Wasser)128. Autrement dit, la désignation de l'''eau'' en prussien a gardé le
"eau, ü8wp", russe BO,lla / voda, pol. woda)130 pose également un
genre neutre sous l'influence de l'allemand, mais a dû en conséquence subir
problème. Il est vraisemblable que cette finale s'explique de la même
une modification radicale de son type morphologique pour être intégrée à la
manière que pour les formes baltiques, c'est-à-dire comme une conséquence
classe majoritaire des neutres prussiens, c'est-à-dire aux neutres théma-
de la disparition des anciens substantifs neutres hétéroclitiques. Selon
*yod-or (avec
tiques. Quant à la fmale -a, attestée chez Grunau (wunda "eau"), elle n'a
Bimbaum (1972), le slave voda procède régulièrement de
probablement aucune autorité: on sait combien la notation des fmales
une évolution de *-or> slave *-0, parallèle à *-er > slave *-1) et a été
casuelles est incertaine chez Grunau. Éventuellement, elle pourrait résulter
secondairement interprété comme thème féminin en *_0 131 . Une autre
en partie d'une interférence avec le slave voda. Elle n'a en tout cas aucune
hypothèse, assez spéculative, serait d'admettre une influence sur l'ancien
chance d'être ancienne, et une comparaison avec le latin unda serait hors de
neutre *yod-or de son parasynonyme animé *h2ep-ii (conservé en baltique
propos.
dans le dérivé possessif *h2ep-ij-ii "riche en eau" > v. pro ape "rivière", lit.
En baltique oriental, l'ancienne flexion hétéroclitique a été éliminée sur
ùpé). Un facteur qui a pu jouer un certain rôle est le développement d'une
la base des cas faibles en *-n-, ce qui a conduit à intégrer le mot dans la
opposition polaire des genres grammaticaux, opposition qui sépare en slave
classe des masculins à suffixe nasal
*-en-
(nominatif sg.
*-on);
on a
le "feu" et l"'eau", le premier de genre masculin (v. sI. orHb /
Ognb
"feu,
signalé plus haut que la même évolution avait eu lieu en gotique (got.
rrvp", masc.), le second adoptant dès lors par contraste le genre féminin
wato, gén. sg. watins, qui a toutefois gardé le genre neutre comme got.
(v. sI. BO,lla / voda "eau, ü8wp", fém.). Inversement, en baltique, la
augo, gén. sg. augins "œil,
6
nt.). Il n'est pas impossible que
désignation de l"'eau" était orientée vers le genre masculin (lit. vanduo,
cette forme de nominatif sg. *-on représente, en baltique comme en germa-
masc.), tandis que celle du "feu" adoptait le genre féminin majoritaire dans
nique, une réfection secondaire d'une plus ancienne fmale de collectif indo-
les thèmes en *-i- (lit. ugnis, fém.); le v. prussien n'était de toute façon
européen *-or (cf. i.-e. *yed-or > hitt. wid-or, grec ü8-wp): une flexion
pas concerné par ce processus, puisque le "feu" et l"'eau" étaient dans cette
archarque *-or, gén. sg. *-en-es aurait été nivelée en *-on, gén. sg. *-en-es, et se serait dès lors assimilée, en baltique, à un type masculin productif (cf. lit. piemuo, gén. sg. piemefis "berger"; ruduo, gén. sg. rudefis "automne", etc.). La finale du nominatif singulier -uo en lituanien est de toute façon ambiguë, car elle peut procéder aussi bien d'un prototype *-or (par ex.
sesuo "sœur" < i.-e. *s(wesor) que d'un prototype *-on (par ex. lit. piemuiJ "berger" < i.-e. *poi-mon)129. 128. En ce sens, Smoczyftski (1997, p. 72, note 45 = 2001, p. 198, note 45), qui compare v. pro buttan "das Haus", mettan "das Jahr", me/tan "das Mehl", etc. Voir aussi Petit (2000b, p. 40). 129. La seule forme présentant encore de manière vivante une finale *-uo < *-or en baltique est le nom de la "sœur" (lit. sesuô? gén. sg. s~sefs < i.-e. *s(W esor ). En l'occurrence, un passage au type masculIn en -UD, gen. sg. -ens,
était impossible en raison du genre essentiellement féminin du mot. Par ailleurs, la proximité de dukté, gén. sg. duktefs "fille" favorisait la conservation des :as obliques en *-er- (par ex. lit. acc. sg. sëseri comme dùkteri, gén. sg. sesers comme duktefs), suscitant même dans certains dialectes la création d'un non:inatif secondaire sësé ou sesé (LKt, XII, p. 435-436) d'après dukté. Ces cas oblIques (*-er-) étaient du reste eux-mêmes secondaires dans le nom de la "sœur", puisque les données comparatives ne permettent de reconstruire qu'une apophonie *-or / *-or- / *-r-, sans trace d'un degré *-e- suffixal. En tout état de cause, la flexion du lituanien sesuô se trouve au croisement de deux formations (-uo, -en- et -é, -er-) et apparaît en synchronie comme anomale. 130. Vasmer (1953-1958, I, p. 212). 131. Voir Birnbaum (1972, p. 149-151), qui cite le parallèle du slave .llo6a 1 d~ba "temps" (*-a) en regard du lituanien dahaf "maintenant" (reflet d'un anCien thème en *-r/n-). Cf. encore récemment Smoczyftski (1997, p. 73, note 46). 1,1 e~t. vrai qu'on attendrait plutôt une évolution i.-e. *-or > slave. *_y, p'~allele a l.-e. *-on > slave *-y, telle qu'elle apparaît dans le type KaMbI / kamy pierre" « *-mon).
Catégorie du cas
Catégorie du cas
langue tous deux de genre neutre (v. pro panno et wundan, nt.). Ces
latin unda "vague" et le v. prussien unds "eau"133. L'extension d'un infixe
évolutions diverses résultent toutes d'une même difficulté initiale, celle
nasal d'origine verbale dans une formation nominale aurait un parallèle en
d'intégrer un ancien substantif neutre hétéroc1itique dans des systèmes
baltique dans le lituanien jùngas "joug", masc. (le letton jûgs est
82
linguistiques où ce type morphologique a
disparu 132 .
83
théoriquement ambigü, car il peut provenir de*jüng- ou de *jug-, même si
La seconde difficulté posée par la désignation de l"'eau" en baltique
la première possibilité est la plus vraisemblable): jùngas prolonge
vient de la présence, dans certaines de ses formes, d'une nasale interne.
manifestement l'indo-européen *iug-om (cf. véd. yuga1Jl, gr. (uyôv, lat.
Cette nasale est constante dans les formes pourvues du sens primaire "eau"
iugum, got.juk), mais présente une nasale interne sous l'influence du verbe
(lit. vanduo, lett. ûdèns < *und-, v. pro wundan), mais absente en revanche
lituanienjùngti (prés.jùngia, prét. jùngé) "atteler au joug", lequel est lui-
du dérivé "loutre" (lit. ûdra, lett. ûdrs < *üd-, v. pro udro) et des
même ancien
hydronymes qu'on rapproche de ce groupe (lit. Vadà, Odmuo, etc.). C'est
"joindre"). Le parallèle serait d'autant plus significatif qu'on observerait
ainsi que s'opposent un radical *viind- dans le lituanien vanduo (acc. sg.
précisément la même différence entre le baltique et le slave: forme à nasale
vandenû et un radical *viid- dans l'hydronyme lituanien Odmuo, de même
en baltique (lit. vanduo "eau" et jùngas "joug"), vs. forme sans nasale en
qu'un radical *ünd- dans le v. prussien wundan (et probablement le letton
slave (v. sI. BO.lla / voda "eau" et Hro / igo "joug")134.
«
Ï.-e. *ju-né/n-g-ti, cf. véd. yunakti "atteler", lat. iungo
ûdèns) et un radical *üd- dans le v. prussien udro "loutre", etc. L'origine
Toutefois, cette hypothèse suscite une difficulté générale, qui incite à la
de cette nasale hystérogène demeure obscure. Traditionnellement, deux
mettre en doute. C'est le fait qu'en dehors de l'indo-iranien (véd. unatti), il
hypothèses sont proposées pour en rendre compte:
n'existe précisément aucune trace directe d'un présent à infixe nasal sur une
- hypothèse [a] : influence d'un verbe à infixe nasal comparable au védique 3e sg. unaUi, 3 e pl. undanti "rendre humide, arroser"
«
i.-e. *u-né-d-ti, *u-n-d-%nti).
- hypothèse [b]: métathèse de *ud-n- en *und-, puis extension de la nasale dans toutes les formes du radical. La première hypothèse, qui est ancienne, a été défendue notamment par Stang (1966, p. 160, note 1) et se trouve encore tout récemment énoncée dans le LIV (p. 599, cf. IEW, p. 346), qui reconstruit une racine verbale indo-européenne *JJed- "quellen", avec un présent à infixe nasal *u-né/n-d-, représenté directement par le védique unaUi, undanti et indirectement par le
132. Certains savants ont pensé retrouver une trace de la flexion hétéroclitique du nom de l"'eau" en slave dans les formes composées V. tch. vodne "eau, vague, inondation", russe dial. 3aBOHb / zavon' "crique plate d'une rivière sans courant" « *za-vod-nl-). Mais il peut s'agir d'une suffixation secondaire, indépendante du type originel. Cf. Eckert (1963, p. 881).
133. Même analyse à propos de la forme latine chez Kent (1932, p. 135). Le rapprochement du nom germanique de l'''hiver'' (got. wintrus "hiver, XELj.1wv", v. isl. vetr, vha. winter), conçu comme "saison humide", demeure douteux, et l'existence d'une nasale interne dans cette forme ne se laisse pas clairement expliquer. Cf. Lehmann (1986, p. 404-5), de Vries (1962, p. 658). 134. Parallélisme noté par Maziulis (PIŒ2, N, p. 268), qui en conclut que, dans les deux cas, le présent à infixe nasal a survécu plus longtemps en baltique qu'en slave. L'existence d'une forme à nasale interne en slave, dans le verbe *v{Jditi "pêcher" (cf. V. pol. w~dzié ryby "pêcher des poissons", actuellement éliminé du fait de l'homonymie avec le polonais w~dzié ryb~ "fumer du poisson"), et son dérivé postverbal *v{Jda "canne à pêche" (cf. v. sI. Ji\.,lJ;Hua, X,lJ;a / {Jdica, (Jda, russe YAOqKa / udocka, pol. w~dka "canne à pêche") est peu probable, malgré Smoczyiiski (1997, p. 73 = 2001, p. 199). On distinguera, en réalité, trois groupes sémantiques: (1) "mors, objet métallique recourbé" (russe YAHJIa / udila, pol. w~dzidlo "mors"), cf. peut-être racine i.-e. *J.!e nd'- "tourner, rouler" (lEW, p. 1148; LIV, p. 623: "(um)winden", got. -windan) ; (2) "fumer" (pol. w~dzié "fumer", transitif, w~dzony "fumé", swç.d "odeur de brûlé", wi~dnç.é "se faner"), cf. peut-être racine i.-e. *{s)J!end'- "se flétrir" (lEW, p. 1047, LIV, p. 554: "verdorren, schwinden", vha. swintan "schwinden"); (3) "canne à pêche, pêcher" (v. pol. w~dzié "pêcher"), probablement spécialisation sémantique à partir du premier sens ("pêcher à l'hameçon" +- "hameçon" < "objet recourbé"). Un rapprochement de ces formes aVec le nom de l'''eau'' n'est de toute façon pas vraisemblable.
Catégorie du cas
Catégorie du cas
racine *yed- "être humide", et qu'il est arbitraire d'en supposer l'existence
type *üd-n-, dont pourraient procéder par métathèse le radical *ünd-,
là où il n'est nullement attesté, à seule fm d'expliquer une forme nominale
ensuite étendu aux autres formes de la flexion (en particulier là même où le
obscure. On notera, en particulier, ce paradoxe que les langues qui ont des
suffixe nasal demeurait distinct, comme dans *ünd-en-, qui présente en
formes nominales avec une nasale interne (lat. unda, v. pro wundan, lit.
apparence deux fois la même nasale, mais résulte en réalité d'une
vanduo) n'ont pas trace d'un présent à infixe nasal *u-né/n-d-,
contamination de *üd-en- et de *ünd- < *üd-n-), et, par analogie, le radical
84
et
85
qu'inversement la seule langue qui ait un tel présent à infixe nasal (véd.
*vand- au lieu de *vad-. En faveur de cette hypothèse, il faut mentionner le
unatti) n'a pas de nasale interne dans les formes nominales (véd. gén. sg.
fait que la nasale interne apparaît seulement dans les formations qui
udnal)). Tout incite donc à penser qu'il n'y a aucune relation entre
présentent le suffixe nasal, c'est-à-dire dans la désignation primaire de
l'existence d'un verbe à infixe nasal et la présence d'une nasale dans les
l"'eau", non dans les formations qui présentent un autre suffixe, à savoir le
formes nominales. Bien plus, il est vraisemblable que le védique unatti est
dérivé *üd-ra "loutre" (suffixe
une innovation propre à cette langue; il faut donc emprunter d'autres pistes
l'hydronyme Odmuo (suffixe *-mon, qui n'est pas directement comparable
si l'on veut expliquer la nasale interne dans la désignation de l'''eau'' en
au suffixe nasal *-on, *-en- dans le lituanien vanduo). On observe donc une
baltique. La seconde hypothèse, qui postule une métathèse de *ud-n- en *und-,
corrélation entre la présence d'une nasale interne et le suffixe nasal du
puis une extension de la nasale dans les différentes formes du radical,
d'une façon ou d'une autre, de la nasale suffixale. L'hypothèse d'une
apparaît d'emblée plus plausible. On a tendance actuellement à y recourir
métathèse est donc vraisemblable 137 • Il reste à examiner si l'évolution
pour expliquer le latin unda "vague", qu'on tire régulièrement de *ud-n-a
phonétique -DN- > -ND- ici supposée est possible en baltique.
(cf. gr. àÀoaucVll "vague de la mer"). Une métathèse -lN- > -ND- dispose
« *fudno-
et, de manière incertaine,
lexème en question, ce qui ne s'explique que si la nasale interne provient,
On ne connaît pas, à vrai dire, d'autre exemple d'une telle évolution
cf.
phonétique, et l'on peut d'emblée mentionner plusieurs contre-
< *bhudh-no-, cf. véd.
exemples 138, notamment lit. liûdnas "triste" (: liûsti "s'attrister", prét.
de quelques parallèles en latin même: lat. panda "étendre" gr. TIL TVlllJ.l), lat. fundus "fond"
« *pat-na-,
* -r-a)
« *-tn-o-, à partir du thème
faible du suffixe
liudo), lit. dial. glodnas "égal, plat" (: g16sti "aplanir", prét. gl6dé), lit.
*-ter/n-)135. S'agissant du baltique, l'hypothèse d'une métathèse suscite
dia!. gùdnas "vrai" (: gùsti "s'habituer", prét. gùdo), lit. dial. sodnas
quelques difficultés qui peuvent être, à mon sens, résolues assez aisément.
"jardin" (: sodas "jardin"), lit. dial. laidnùs, nuolaidnùs "complaisant"
*-on-
(: nuolaidùs "complaisant"). Cependant, la validité de ces contre-exemples
budhnal)), lat. gérondif -ndus
Le baltique n'a conservé que deux variantes suffixales apophoniques
(au nom. sg., cf. lit. -uo) et *-en- (aux autres cas, cf. lit. -en·, lett. -en-), mais il est probable qu'il existait, à une date plus ancienne, d'autres degrés vocaliques du suffixe, notamment un degré zéro *-n- (cf. véd. gén. sg.
ud-n-al) < i.-e. *ud-n-és)136. On peut admettre comme probable un proto-
135. Exemples chez Sihler (1995, p. 209, § 222.2). 136. Une trace d'un degré zéro suffixal apparaît encore certainement dans la flexion anomale et archaïque du nom du "chien", lituanien sua «i.-e. *Jèuy-on, cf. grec KVWV), gén. sg. sufis, dial. sunès « ï.-e. *lèu-n-és, cf. grec KVVOS). Sur le
n?m d.e l"'homme", v. lit. nom. imuo, acc. imuni (avec thème *imun-, peut-être refectlOn de *iumn- < i.-e. *gh1J1-n-), cf. Kazlauskas (1968, p. 270-271), Smoczynski (2000b, p. 18-33). 137. Elle est acceptée notamment par Smoczynski (1997, p. 72 = 2001, p. 198; 2000a, p. 94; 2001, p. 1Ol). Noter cependant que Smoczynski n'exclut pas ~ne influence d'un verbe à infixe nasal (baltique * unda "être humide"), explication qui, selon lui, vaut également pour le latin unda (nasale interne d'après abundiire, inundiire, etc.). 138. Exemples chez Skardzius (1943, p. 215-226, §§ 131-136); matériel chez Robinson (1976) et Korsakas (1991).
Catégorie du cas
Catégorie du cas
n'est pas assurée, car dans chacun d'entre eux la motivation morphologique
< *yod-, v. isl. otr "loutre" < *ud-), et en slave (sI. *vedro "seau" < *JJëd-,
imposait une analyse [radicaL.D] + [N... suffixe], qui bloquait en quelque
*vydra "loutre" < *üd-), à côté d'une forme à degré radical bref (sI. *voda
sorte l'évolution phonétique: l'adjectif lituanien [judnas "triste", par
"eau" < *yod-).
86
87
exemple, ne pouvait évoluer en t liündas, dès lors que son radical */iud-
L'origine de ces voyelles longues pose un problème. La plupart des
était soutenu par toute une série de formes de la même famille, où la
savants reconnaissent en fait la difficulté sans l'expliquer. Trautmann se
dentale apparaissait clairement (lit. liüdeti "être triste", / iusti "s'attrister",
contente ainsi d'une mention laconique: "im Ablaut" (BSW, p. 337), qui
prét. [judo). Au contraire, la désignation de l"'eau" était un lexème isolé
laisse la question ouverte. Tout récemment encore, à propos du lit. ûdra,
dans les langues baltiques (le dérivé *üd-rii "loutre" n'étant plus
Smoczynski (2000a, p. 92) admet qu'une voyelle brève peut être "parfois"
directement perçu comme apparenté) et le degré zéro du suffixe (*-n-) n'y
("mitunter") allongée, mais il ne précise pas le contexte de cet allongement
était plus vivant (le baltique n'opposant plus que *-on- et *-en-), de telle
et s'appuie sur un seul cas, à mon sens peu significatif, le doublet lit.
sorte que rien n'empêchait une évolution *üd-n- > *ünd-, avec intégration
iiu/ùs / iiü/ùs "insolent" (cf. v. sI.
du suffixe dans le radical. La "loi phonétique" ainsi postulée ne pouvait
iTOVllPÔS, KaKôs").
jouer que parce qu'elle ne perturbait pas de manière trop brutale la
"allongement", ni ce qui fait en l'occurrence la spécificité du baltique, à
motivation morphologique.
savoir le fait que la quantité longue est pratiquement constante dans les
On admettra donc que la nasale interne dans le radical du nom de
3'bJI'b /
Z'b/'b
"mauvais, méchant,
Cette hypothèse n'explique pas les conditions de cet
fonnes du nom de l"'eau".
l"'eau" en baltique s'explique par une évolution phonétique particulière
Certains savants ont suggéré, à propos de l'intonation rude du lituanien
d'un degré apophonique du suffixe. Historiquement, elle n'a donc aucune
vandeni, l'hypothèse d'une "métatonie"139. Mais on ne saurait préciser la
signification.
motivation de cette métatonie, postulée à seule fin de pouvoir rendre
La troisième difficulté posée par la désignation de l'''eau'' en baltique est celle de la quantité vocalique du radical. Dans les langues indo-
compte d'une voyelle radicale longue autrement inexplicable. Cette hypothèse, elle non plus, n'est donc pas convaincante.
européennes, le nom de l'''eau'' et ses dérivés présentent plusieurs degrés
L'hypothèse d'un allongement morphologique prête, elle aussi, le flanc
apophoniques, qui sont certes divers, mais tous de quantité brève: *JJed-
à la critique. La comparaison du germanique est sur ce point instructive.
(hitt. gén. sg. wetenas), *yod- (hitt. wiitar, got. wato), *ud- (gr. ü8wp,
En germanique, toutes les formes anciennes présentent une voyelle radicale
véd. gén. sg. udnal). Or, en baltique, la majorité des formes attestées
brève: gol. wato "eau"
présentent une voyelle radicale de quantité longue: *viid- (peut-être lit.
etc. La seule fonne à voyelle radicale longue (v. isl. vatr "humide" < i.-e.
« Ï.-e. *JJod-), v. isl.
otr "loutre"
« i.-e.
*ud-),
Odmuo, et, avec nasale, lit. vanduo, acc. sg. vandeni), *üd- (lit. ûdra
* JJ e""d- 0-)
"loutre", etc., avec nasale lett. ûdèns "eau"); la seule trace d'une voyelle
régulièrement comme une vrddhi propre au germanique: elle présente en
« *yod- ?), dont
effet tous les caractères d'une vrddhi, le passage à un degré vocalique
l'apparentement étymologique n'est pas certain. En dehors du baltique, les
SUpérieur (* yed- --. * yed-), la thématisation (* JJed- --. * Jled-o-), le sens
brève apparaît dans les hydronymes du type lit. Vadà
est de toute évidence une innovation, qui s'interprète
seules attestations de voyelles radicales longues se rencontrent en germanique (v. isl. vatr, v. ang. wœt, ang. wet "humide" < germ. *wetaz < Ï.-e.
*Med-o-), à côté
de formes à degré radical bref (got. wato "eau"
139. Cf. van Wijk (1935, p. 24 et p. 26); solution compliquée en ce sens chez Kurylowicz (1968, p. 140).
l'
88
Catégorie du cas
Catégorie du cas
89
"pourvu d'eau, riche en eau, humide"), à l'exception
*vedro "seau" (*vëdr-o- . . . . *JJed-r- ; pour le sens, "seau" < "qui a de
peut-être de la variation accentuelle, qui ne paraît pas attestée (* JJod-x-, cf.
l'eau")142, mais cette supposition elle-même n'est pas contraignante. Quant
got. wato ~ *JJêd-o-, cf. v. isl. vatr)140. Le degré long est donc clairement
au vocalisme bref, il n'apparaît que dans la forme primaire *voda "eau". Le
identifiable et dispose d'une motivation interne, qui ne laisse aucun doute
slave offre donc une situation partiellement comparable à celle du baltique,
sur son origine secondaire. Il forme, en outre, un contraste sensible avec le
avec un vocalisme long largement attesté et dépourvu de toute motivation.
possessif ("eau"
~
degré bref et, en ce sens, apparaît comme une marque morphologique
Ce vocalisme long apparaît, en baltique et en slave, comme un fait à
déterminée. Le baltique présente une situation très différente, car le
peu près constant et immotivé. On est donc conduit à lui chercher une
vocalisme long y est général et ne saurait s'expliquer comme une marque
explication elle aussi constante et immotivée, c'est-à-dire phonétique. Pour
morphologique opposée à un degré bref. En outre, on ne peut rattacher ce
cela, la seule solution envisageable consiste à faire intervenir la loi de
vocalisme long à aucune des sources de la Dehnstufe indo-européenne: ni
Winter (1978), selon laquelle les voyelles brèves sont allongées en baltique
l'hypothèse d'une Vfddhi possessive, ni celle d'une formation acrostatique,
et en slave devant les anciennes consonnes sonores simples de l'indo-
ni celle d'un nom-racine à allongement au nominatif singulier ne
européen. Dans son article fondateur, Winter signalait le cas du balto-slave
fournissent de cadre adéquat pour rendre compte de la difficulté. On
*üdrii "loutre" comme un exemple de la loi qui porte désormais son nom
observe notamment que le vocalisme long apparaît même dans des
(1978, p. 441). Quelques années plus tard (1990), Young étendit la loi de
formations synchroniquement immotivées comme le nom de la "loutre"
Winter au cas des diphtongues et l'appliqua donc régulièrement au baltique
(balt. *üd-rii, en regard de l'Î.-e. *ud-rii)141. Enfin, l'intonation rude
*vand-, *ünd-, expliquant l'intonation rude constante des formes baltiques
constante des formes baltiques (lit. ace. sg. vanden{, ûdra; lett. ûdèns,
comme le reflet d'anciennes diphtongues à premier élément long (1990,
ûdrs) exclut à mon sens une origine morphologique du degré long, pour
p. 147). Cette hypothèse pose cependant deux problèmes qu'il convient
lequel on attendrait plutôt, si l'on suit sur ce point comme je le fais les
d'examiner: tout d'abord, ce traitement phonétique présente des
conceptions de Kortlandt, une intonation douce (cf. lit. musis "bataille",
exceptions, précisément dans la famille du nom de l'''eau'' (notamment sI.
degré long morphologique en regard de lit. mùsti "battre"; lit. juokas
voda, lit. Vadà); en second lieu, il faut tenter de dater cette loi phonétique
"plaisanterie", degré long morphologique en regard du lat. iocus "id."). La même difficulté apparaît en slave, où le vocalisme long apparaît
et de la mettre en rapport avec l'évolution du vocalisme de l'indo-européen au balto-slave.
également en dehors de toute motivation, notamment dans le nom de la
S'agissant du premier problème, les opposants à la loi de Winter se
"loutre" (sI. *vydra < *üdra, superposable au balt. *üdrii). On pourrait, à
sont naturellement concentrés sur les exceptions apparentes pour contester
la rigueur, interpréter comme une Vfddhi le dérivé de sens possessif slave
la validité de la loi dans son ensemble: voir par exemple Schmid (1986a, p. 460), qui mentionne principalement les contre-exemples du slave voda
140. En ce sens, Mathiassen (1974, p. 212), Darms (1978, p. 13-24), Bammesberger (1990, p. 255). 141. Difficulté soulignée par Matasovié (1995, p. 60). Selon Smoczyftski (2001, p. Ill), l'allongement dans *ud-ra est une vrddhi caractéristique du genre féminin; mais on ne peut parler de Vfddhi que dans l'opposition d'une forme fondée à une forme de fondation, ce qui n'est pas le cas dans le mot isolé
*ud-ra.
et et du lituanien Vadà. À propos du slave voda "eau", Winter (1978, p. 441) évoquait avec prudence la possibilité d'un emprunt au germanique (gol. wato, emprunté avant la mutation consonantique *wado); cette
142. En ce sens, par exemple Leumann (1954, p. 10).
90
91
Catégorie du cas
Catégorie du cas
hypothèse est peu vraisemblable, s'agissant d'un mot comme celui-ci qui
"eau". Toutefois, leur parenté étymologique avec le nom de l'''eau'' n'est
fondamental 143 .
Dans une conférence présentée à
pas, à mon sens, acceptable sans réserves. Tout d'abord, d'un point de vue
la Société de Linguistique de Paris le 22 février 1997 sur "la loi de
sémantique, on peut trouver singulier que des hydronymes soient
Winter", Charles de Lamberterie proposait de séparer le slave voda du nom
dénommés simplement comme étant de l"'eau": c'est là une qualité
indo-européen de l'''eau'' et d'y voir une désignation secondaire motivée à
commune à tous les hydronymes et trop peu spécifique, me semble-t-il,
partir du verbe slave vesti, vedÇJ "conduire", l'''eau'' étant conçue comme
pour servir de motif de désignation. En général 14 5, un hydronyme est
"celle qui emporte", cf. v. sI. "pHne Bona li B'b3b..T'b BbCb.. / pride voda i
dénommé par une certaine qualité contingente de l'eau, par exemple sa
VDZ~t'b V.M'~, traduisant le grec ~ÀeEV b KaTaKÀoo~às Kat ~pEV éhravTas
couleur (cf. lit. Juodas, lac à Vepriai
"le déluge vint et les emporta tous" (Mt., 24, 39). L'hypothèse est
courant (cf. lit. Judrà, cours d'eau à 2arënai .... lit. judrùs "vif, rapide"), ou
intéressante et touche un point très important: le nom de l"'eau" en slave
par un trait caractéristique de l'environnement, comme un nom d'arbre (cf.
(voda) apparaît proche en synchronie de la famille du verbe vesti "conduire"
lit. Liepelé, cours d'eau à Pagiriai .... lit. liepa "tilleul"), ou un nom
Ï.-e. *J,Jec!-). En polonais, par exemple, seul le sens permet de séparer
d'animal (cf. lit. Varnas, cours d'eau à Gaurë .... lit. varnas "corbeau"),
woziwoda "porteur d'eau" (: woda "eau") et wojewoda "voïévode",
mais jamais par le seul fait qu'il est composé d'eau. Une seconde difficulté
étymologiquement "conducteur d'armée" (: wiesé, wodzié "conduire").
est celle du rapport entre le présumé *vadà "eau" et la désignation courante
Cependant, cette suggestion me paraît devoir être rejetée, car il est peu
en lituanien vanduo "eau". Formellement, l'hydronyme lituanien Vadà
vraisemblable que le slave voda n'ait rien à voir avec l'ancienne
rappelle le slave voda "eau" et paraît au premier abord pouvoir reposer sur
désignation indo-européenne de l'''eau'': une telle évidence me semble
une forme comparable (baltique *vadii "eau" ?). Toutefois, une différence
difficile à mettre en doute. Le vocalisme bref du slave voda demeure donc
essentielle les oppose: le slave voda est l'unique représentant de la
un réel obstacle à la loi de Winter. La difficulté pourrait être,
désignation indo-européenne de l"'eau", dont il est un prolongement direct,
éventuellement, résolue si l'on adoptait la reformulation de la loi de Winter
plus ou moins modifié morphologiquement; l'hydronyme lituanien Vadà,
par Matasovié (1995, p. 62-63, sur voda), qui limite l"'allongement
lui, coexiste avec le lituanien vanduo, qui est la seule désignation vivante
Winter" en balto-slave aux syllabes fermées. Cette hypothèse pourrait
de l'eau en baltique et prolonge une ancienne forme indo-européenne. On
appartient au vocabulaire
«
expliquer l'opposition, en slave, de *vydra "loutre"
« * üdrii),
c-
lit. juodas "noir"), ou la qualité du
avec
voit mal comment expliquer la coexistence des deux formes. Le plus
allongement Winter en syllabe fermée, et de *voda "eau", sans allongement
vraisemblable, à mon sens, est de séparer les hydronymes lituaniens du
Winter en syllabe ouverte. Mais il faut bien reconnaître que cette
type Vadà du nom indo-européen de l'''eau'' et de leur chercher une autre
interprétation restreinte de la loi de Winter pose des problèmes et ne saurait
étymologie. Pour cela, on peut prendre en compte les formes non-
être acceptée sans
difficultés 144 •
La question reste ouverte.
appellatives, qu'on rapproche traditionnellement de ces hydronymes,
Quant aux hydronymes baltiques du type lituanien Vadà, il serait
notamment le lituanien viidé "ornière remplie d'eau de pluie et formant un
évidemment loisible de les mettre sur le même plan que le slave voda
ruisseau", le letton vada "place libre qui sert de prairie" et vadele "petit
143. Critique chez Bimbaum (1985, p. 46). 144. Voir les critiques pertinentes de Derksen (2002, p. 5-13).
145. Sur la sémantique des hydronymes, on se reportera principalement à l'étude très complète de Vanagas (1981b, p. 4-153); voir aussi Vanagas (l981a).
92
Catégorie du cas
Catégorie du cas
défilé qui conduit à une rivière ou dans la vallée", à quoi l'on ajoutera le
- i.-e.
93
*h 2eli-r/n- (véd. asri- "coin", asani- "pointe de flèche"),
vs.
lituanien dialectal vadà "terre vierge, terrain nu dans une forêt". Le
i.-e. *h 2eli-meJon- (véd. asma "pierre", gr. aKllwv "enclume",
sémantisme de ces mots est assez éloigné de la notion d'eau: plusieurs
lit. akmuo "pierre").
d'entre eux évoquent plutôt l'idée d'une ligne, d'un sillon creusé (cf. lit.
- i.-e. *h1uHdh-r/n- (véd. ûdhar, ûdhnah "mamelle", cf. lit. üdr6ti
viide "ornière", lett. vadele "petit défilé"), ou, plus généralement, d'un
"donner du lait"), vs. i.-e. *h1uHdh-meJon- (v. sI.
terrain labourable ou d'une terre à pâturage. On peut dès lors risquer
"mamelle").
l'hypothèse que ces formes proviennent en réalité de la famille du verbe lituanien vèsti, letton vest "conduire" (radical ved- < i.-e. *yed'-), en admettant que le sillon ou le terrain creusé est conçu comme quelque chose qui conduit, qui canalise l'eau en cas
d'inondation 146 •
BbIMA / lYm~
- Î.-e. *h1ed-r/n- (lit. éduonis "goinfre", édrùs "vorace"), vs. Î.-e.
*h1ed-mefon- (lit. édmenys "gueule, bouche"). Mais ces rapprochements sont sans doute fortuits, et surtout on
Le verbe lituanien
comprendrait mal la coexistence des deux formations dans une même
vèsti "conduire" possède parfois des emplois relativement proches, cf. lit.
langue. En quoi s'opposeraient en lituanien vanduo "eau" (baIt. *-on,
ke/ias veda peP' mi/kg "le chemin conduit à travers la forêt". Dans cette
*-en-, prolongeant l'ancienne formation i.-e. en *-r/n-) et *vodmuo "eau"
perspective, les hydronymes du type lituanien Vadà, etc., désigneraient à
> hydronyme OdmUD (baIt. *-mon, *-men-, prolongeant l'ancienne
l'origine des "courants" d'eau, canalisés dans des ornières et sans doute
formation i.-e. en *-meJon-)? D'un point de vue sémantique, en outre, une
gonflés par l'eau de pluie. Un rapport avec le slave voda, et plus généra-
reconstruction *vodmuo "eau" > hydronyme Odmuo serait confrontée à la
lement avec la désignation indo-européenne de l"'eau", doit donc à mon
même difficulté que l'on a signalée à propos du type lituanien Vadà, celle
sens être abandonné.
de concevoir un hydronyme dénommé par le seul fait qu'il est de l"'eau".
Il est vraisemblable qu'une analyse comparable doit être faite à propos
On peut donc penser que, comme Vadà, l'hydronyme Odmuo est
de l'hydronyme lituanien Odmuo. Cet appellatif fait difficulté, tant par sa
indépendant d'un point de vue étymologique de la désignation baltique et
formation morphologique que par sa position à l'égard du lituanien vanduo
indo-européenne de l"'eau". Il resterait à lui chercher une étymologie dans
"eau". Tout d'abord, on ne sait comment expliquer la suffixation en -muo
une autre direction. À titre d'hypothèse, on suggérera un rapprochement
(< *-mon, *-men-) en regard de la suffixation hétéroclitique *-r/n- attestée
possible avec la famille du verbe lituanien êsii "manger, dévorer"
«
dans toutes les langues indo-européennes et prolongée en baltique par une
*h1ed- "manger"), en rappelant que le lituanien dialectal odmenis
signifie
suffixation simple en nasale *-on, *-en-. On observe parfois, il est vrai,
"embouchure d'un fleuve" (métaphore "bouche" / "manger" ?), cf. dans un
une proximité des formations hétéroclitiques en *-r/n- et des formations en
autre contexte les hydronymes lituaniens Édelé, partie d'un lac à Miela-
*-meJon-, comme le montrent notamment les couples suivants 147
gènai, et temeda, cours d'eau à Kelmè 148 • On devrait en ce cas admettre
:
i.-e.
une déviation apophonique de la forme Odmuo par rapport à Mmenys "gueule, bouche" 149 , peut-être par contamination d'un ancien masculin thématique *h1od-meJo- (> balt. *Qd-mas > lit. *6dmas, avec *0- secondaire 146. On pourrait également penser à une métaphore assimilant les cours d'eau à des "chemins liquides", cf. grec homérique v'Ypa KÉÀ.EV6a. 147. Sur cette proximité, cf. Eckert (1966, p. 144-145, note 5 ; 1987, p. 272).
148. Vanagas (1981a, p. 399). 149. Cf. Skardzius (1943, p. 295).
Catégorie du cas
94
au lieu de *uo-) et d'un ancien masculin ou neutre sonantique *h1ed-mefon(> balt. *ëd-men- > lit. *édmuo, pl. édmenys); le cas serait partiellement
Catégorie du cas
95
à *-a-. Cependant, d'autres exemples présentent un aboutissement < uo >, notamment:
parallèle à celui du lituanien stuomuo "taille", contamination de stuomas et de stomuo150 • Cette suggestion n'a du reste qu'un caractère expérimental, et d'autres pistes plus convaincantes pourraient être tentées. Quoi qu'il en soit, l'hydronyme lituanien Odmuo me semble également devoir être séparé du nom baltique de l'''eau''. Il reste à évoquer une dernière question, celle de la date de
-lit. uosti "sentir" (*od- < i.-e. *od-, cf. grec ü(w "sentir"), -lit. uoga "baie" (*og- < L-e. *og-, cf. tokh. B oko "fruit"), -lit. nuogas "nu" (*nog- < L-e. *nog w. , cf. got. naqajJs "nu, 'Yu~v6S'''),
-lit. puodas "pot" (*pod- < i.-e. *pod-, cf. vha.faz "tonneau"),
l' "allongement Winter", tel qu'il apparaît dans la désignation baltique de
et, dans quelques cas, on observe une substitution récente de <
l'''eau''. Le problème peut se poser en ces termes: l'allongement a-t-il eu
plus ancien < uo > :
lieu à l'époque où le balto-slave possédait encore la voyelle *-0- de l'indo-
- lit. sodinti "planter"
européen (en ce cas, on attend une forme à allongement *-0- > lit. -uo-) ou
"suie" < "dépôt" < *sod-),
à l'époque où cette voyelle était déjà passée à *-a- (en ce cas, on attend une forme à allongement
* -a·
> lit. -o-)? Le radical lituanien wind-,
«
« *sad- au lieu de *sod-),
*sod-), bas-lit. svadinti "planter" (*suod-
- lit. boginti "faire courir, transporter"
« *bag-
au lieu de *bog-),
mais lett. buôdzinât "faire courir" (* buog- < *bog-),
est conservée dans l'intonation rude, mais le timbre vocalique a été abrégé
- lit. s/ogà "rhume"
selon la version baltique de la loi d'Osthoft), et parle donc plutôt en faveur
"affliction" «
*vuond-, d'où lituanien *vùnd- 151 • On pourrait donc penser que la loi de
Winter est un développement postérieur au passage de l'indo-européen *-0-
> à un
mais lit. suodZiai
d'intonation rude, paraît supposer *vand- (une trace de l'ancienne longue
de la seconde possibilité. Une forme *vond- aurait probablement abouti à
0
« *s/ag-
au lieu de *slOg-), mais lit. s/uogas
*s/og-).
Tout incite donc à penser que l'allongement Winter a eu lieu en balto-slave avant le passage de *0 à
*a
et a donc produit
*0
(> lit. uo);
secondairement, le degré apophonique < 0 > a pu être remplacé par <
a>
dans un certain nombre de cas, notamment dans la désignation baltique de l"'eau". 150. On notera que, d'un prototype indo-européen *hlod-mefo-, on attendrait en lituanien, avec allongement Winter, une forme *uodmas (cf. lit. uodas "insecte" < i.-e. *hlOd-efo-, s.-cr. ov-âd "insecte") et non *6dmas. L'apophonie < ë / uo> « i.-e. < *e / *0 >, avec allongement dû à la loi de Winter < *ë / *0 » pourrait avoir été refaite dans ce mot en < ë / 0 > (qui serait en i.-e. < *ë / *3. », comme dans le lituanien sesti "s'asseoir" (séd-) / sodinti "planter" (sod-) ou dans le lituanien begti "courir" / boginti "faire courir, transporter", tous deux illustrant également la loi de Winter. Dans le cas du lituanien stomuo / stuomuo, qui appartient à une autre série apophonique (i.-e. < *3. / *0 », cette réfection n'était pas directement envisageable, car elle aurait fait disparaître toute apophonie. Sur ce dernier mot, cf. Petit (200080 p. 259-275). 151. Cf. lit. astuoni "huit" -+ *astuon-tas > *astùntas "huitième" (intonation rude conservée en letton astuôtais), refait en astuiitas d'après septiiitas "septième" « i.-e. *septrp-to-). Voir aussi Stang (1966, p. 18). Doutes sur la réalité de cette évolution chez Mathiassen (1970, p. 328).
Au terme de cette analyse, il convient de revenir sur le problème de l'apophonie paradigmatique conservée dans le nom de l'''eau'' en baltique et de tenter d'en reconstruire la préhistoire. Les formes diverses de la désignation de l'''eau'' dans les langues L-e. conduisent à supposer que le mot devait présenter en i.-e. une double apophonie, d'une part une apophonie radicale (*j!ed-, *j!od-, *ud-), d'autre part une apophonie suffIXale (*-or/n-, *-er/n-, *-r/n-). Une reconstruction du paradigme indo-européen a été
Catégorie du cas
96
Catégorie du cas
proposée dans un article classique de Schindler (1975, p. 4-5), qui oppose une flexion de collectif et une flexion de
singulier l52 :
97
La position des langues baltiques dans cette évolution est remarquable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, c'est la seule famille de langues, en dehors de l'anatolien, où l'alternance paradigmatique du radical soit encore
COLLECTIF
SINGULIER
clairement attestée: la divergence entre, d'une part, le lituanien vand-uo
NOM.-ACC.
* yéd-or
*yod-[
(balt. *viind-, prolongeant l'indo-européen *yod-), d'autre part, le letton
GÉN.
*ud-n-és
** yéd-1)-s
ûd-ens et le vieux prussien wundan (balt. *ünd-, prolongeant l'indo-
LOC.
*ud-én
?
européen *ud-) en est un témoignage indirect, mais certain. Le baltique
Ce schéma apophonique est fondé principalement sur les données de l'anatolien, où il est encore directement attesté: on oppose en hittite une forme de nom.-acc. pl. u-i-da-a-ar, avec scriptio plena (hitt. /wedar/ < i.-e. *péd-or), une forme de nom.-acc. sg. wa-ta-ar (hitt. / wadar / < i.-e.
*yod-f) et une forme de gén. sg. we-te-na-as (hitt. / wedenas / < i.-e. *yed-én-os, réfection de
*yéd-q.-s
par analogie du nom du "feu", i.-e.
nom.-acc. sg. *péhrYf, gén. sg. *phrpén-s > hitt. nom.-acc. sg.
pa-ah-our, gén. sg. pa-ab-lJu-e-na-as). Dans la plupart des autres langues, cette double apophonie radicale et suffixale a été simplifiée. Le grec, l'ombrien et le sanskrit ont ainsi généralisé le degré zéro radical *ud- (gr. ü8wp, ombr. utur, véd. udaka-, gén. sg. udna/J), tandis que le germanique et le slave ont généralisé le degré *-0- radical *I)od- (got. wato, v. sax.
watar, slave voda). L'alternance suffixale a été en général mieux conservée, mais elle présente aussi des modifications: dans plusieurs langues, la finale du nominatif-accusatif collectif *-or s'est ainsi déplacée dans le domaine du singulier (gr. ücwp, ombr. utur, got. wato, cf. aussi lit.
vanduo) ; en ce qui concerne les cas faibles, les différentes langues ont généralisé soit la variante *-en- du suffixe (got. gén. sg. watins, cf. aussi lit. gén. sg. vandefïs), soit la variante *-n- (gr. gén. sg. ücaTos, ombr. abl. sg. une < * udni), seul le sanskrit présentant encore la trace de la distribution ancienne (véd. gén. sg. udna/J, loc. sg. udan(-i). 152. En ce sens, aussi Hardarson (1987a, p. 91). Discussion du paradigme indo-européen chez Rix (1965, p. 86) et Beekes (1985, p. 4).
suppose, par rapport à l'indo-européen, une alternance hybride, associant un radical à l'origine propre aux cas directs du singulier (* pod-) et un radical à l'origine propre aux cas obliques du collectif (*ud-); il n'a gardé aucune trace de la variante apophonique *ped-, propre à l'origine aux cas directs du collectif et peut-être aux cas obliques du singulier. Manifestement, l'alternance conservée en proto-baltique est le résultat d'une recomposition secondaire. Quant à l'alternance suffixale, elle est elle aussi en baltique d'une nature hétérogène. Si l'élimination de l'ancienne hétéroclisie indoeuropéenne *-r/n- au profit de la variante à nasale n'a rien de surprenant (la variante en *-r- n'apparaissant plus que dans le dérivé *üd-r-a "loutre"), il est notable que le baltique n'a conservé la trace que des degrés apophoniques suffixaux qui, à l'origine, étaient propres au collectif: la finale spécifique des cas directs (i.-e. *-or ou secondairement *-on) survit dans le nominatif singulier -uo du lituanien (lit. vanduo); la finale du locatif (i.-e. *-en-) constitue apparemment le reste de la flexion (lit. ace. sg.
vandeni, gén. sg. vandefis, loc. sg. vandenyjè, etc.); celle du génitif (i.-e. *-n-) n'apparaît plus qu'indirectement, à travers la nasale interne du lit. vand-uo, du lett. ûd-ens (*ünd-) et du v. pro wund-an, si l'on admet que celle-ci provient d'une métathèse de *üd-n-. La reconstruction du paradigme proto-baltique à partir de ces différents allomorphes apophoniques est difficile du fait qu'ils n'apparaissent qu'isolément, à travers des formes indépendantes. Une certaine vraisemblance peut cependant être atteinte si l'on associe à la comparaison indoeuropéenne l'analyse de certains faits significatifs particuliers au baltique, notamment de certains faits accentuels. En lituanien moderne, le substantif
98
Catégorie du cas
Catégorie du cas
99
vanduo "eau" appartient au type accentuel 3\ c'est-à-dire à un type
- nom. sg. *yod-on ou *llod-or (= got. wato),
caractérisé par une tendance accentuelle terminale (cf. gén. pl. vandeny" cas
vs. gén. sg. *ud-n-és (= véd. udnalJ).
libre), un radical d'intonation rude (cf. instr. sg. windeniu, cas cardinal) et un suffixe constamment inaccentué (cf. acc. sg. vandeni, cas contraint)153. Mais il est probable que cette accentuation à tendance terminale résulte d'une adaptation récente au schéma accentuel majoritaire dans les substantifs en -uo (cf. lit. piemuo "berger", 3a) et qu'à date ancienne, le nom de l"'eau" appartenait au type à tendance accentuelle radicale (vanduo, type 1). On trouve encore des attestations directes de cette accentuation radicale au
:xvr
siècle (1599), dans la Postilla de Mikalojus Dauksa (par
ex. nom. sg. wandil, 17927 , wçndil, 26444, 361 45 , gén. sg. wandenes, 429 II, 452 31, etc) . , et certains dialectes l'ont conservée jusqu'à nos jours (vanduo à Siauliai, Dusetos, Kamajai et Subacius)154. On posera donc,
pour la préhistoire immédiate du lituanien, un thème à accentuation radicale *v'iind-%n-. En revanche, l'intonation brisée du letton ûdèns "eau" suppose nécessairement un thème à l'origine atone et un accent final, d'où une reconstruction théorique *und-%n-'x-. Il est donc possible d'opposer le lituanien et le letton non seulement par la structure de leur radical, mais aussi par la place de l'accent. On peut mettre en relation ces deux divergences et proposer de reconstruire sur cette base un paradigme protobaltique à radical et accent alternants15 5 : ~ ' *sg. - dun / .-Ie/n-es. .l ' - nom. sg. *vand-o, vs. gen.
Par rapport au modèle représenté en hittite et reconstruit par Schindler pour l'indo-européen, le baltique a donc innové en transposant dans la forme collective (i.-e. *lléd-or) le vocalisme de la forme singulière (i.-e. *yod-[), d'où un prototype reconstruit *yod-or, dont procède en définitive le lituanien vanduo. Le génitif collectif *ud-n-és, lui aussi, a été conservé dans un premier temps en baltique; il Y a donné naissance à une forme à métathèse *und- (avec allongement Winter *und-), dont la nasale s'est ensuite généralisée (d'où secondairement lit. vand-). Postérieurement, la disparition des substantifs hétéroclitiques en baltique a conduit à redéfinir le type morphologique du mot afin de l'intégrer au système tel qu'il existait, soit en lui conservant son genre neutre originel et en modifiant radicalement sa morphologie (v. pro wundan), soit en le rapprochant du type masculin à nasale et en changeant par là même son genre grammatical (lit. vanduo, lett. ûdèns). Au passage, on fera observer que le degré *-e- du
suffixe (*-en-) ne prolonge pas nécessairement l'ancien degré propre au locatif collectif indo-européen; il pourrait être simplement une création secondaire en baltique oriental sur le modèle du type piemuo, gén. sg. *piemenès > piemefis "berger". On comprendrait aisément le remplacement
d'une flexion ancienne *-n-ès par une flexion secondaire *-en-ès dans un système où cette dernière est majoritaire.
Si l'on néglige les innovations que constituent la présence d'une nasale
On observe donc, en définitive, que l'apophonie indo-européenne a été
interne et l'allongement radical, ce paradigme peut être transposé dans la
réduite en baltique à deux degrés radicaux (* !Jod-, vs. *ud-) et à deux
préhistoire du baltique comme suit:
degrés suffIxaux (à date ancienne *-on, vs. *-n-, à date historique *-on, vs.
- nom. sg. *vad-o, vs. gén. sg. *ud-(e)n-és, et pourrait procéder d'un paradigme indo-européen (tardif) :
*-en-). Cette évolution interne aux langues baltiques
est significative d'une
tendance profonde qui se manifeste dans ces langues, la tendance à réduire l'apophonie à une opposition binaire, ce que Smoczyftski (2000b, p. 20, §7. 3) a très justement appelé une tendance au "bithématisme" apophonique
153. Sur cette terminologie, cf. Petit (1999a, p. 33). 154. Skardzius (l935a, p. 127-128 = RR(S), V, p. 163-164). 155. En ce sens, Stang (1966, p. 160 et p. 296).
(en polonais dytematyzm). Dans la désignation de l'''eau'', le baltique fait donc preuve d'un remarquable archaïsme, puisqu'il conserve une apophonie
100
Catégorie du cas
Catégorie du cas
101
à la fois radicale et suffixale, mais, en même temps, il inscrit cet archaïsme
remplacé par une désignation secondaire d'origine culinaire:
dans les limites de son système et lui impose une série d'évolutions
lit. moderne kepenys "foie", fém. pl. (: kèpti "cuire", pour le
spécifiques qui l'éloignent du prototype indo-européen.
sens et la formation, cf. russe neqeHb / peeen' "foie" -- ne%
/ pee' "cuire"), cf. v. lit. kepanos "foie", in Leber Kepanos
b. Le nom du "foie" dans les langues baltiques
(Lexicon Lithuanicum, p. 57a, milieu du XVne siècle)162;
Outre le nom de l'''eau'', on pourrait éventuellement trouver en baltique
képenos "foie", in Leber.
Képenos,û.PI.F. (Clavis
xvne
un autre exemple d'une ancienne apophonie paradigmatique conservée dans
Germanico-Lithuana, 1, p. 1170, milieu du
un substantif athématique suffixé: la désignation baltique du "foie".
képinas "foie", in W{ltroba, képinas (Daukantas, DLL, III,
Comme pour le nom de l"'eau", il s'agit d'un ancien neutre hétéroclitique hérité de l'indo-européen. Les fonnes attestées sont les suivantes 156 :
p. 234, dialecte bas-lituanien, milieu du XIXe siècle). - LETTON: aknas / die Leber "foie", fém. pl. (MülenbachsEndzelfns, ME, l, p. 65); v. lett. Acknis "foie", in Acknis
- LITUANIEN: v. lit.jekanas "foie" (Bretkünas, 3 Mos. 3, 10);
/ Leber (Mancels, 1638a, p. 114), Ackna=diissa "sorte de
ieknas "foie", in W{ltrobtl / iecur, epar. ieknas (Sirvydas,
saucisse", in Ackna=diissa / Leberwurst (Mancels, 1638a,
DTL 1, vers 1620, p. 190), jekneles, diminutif, in W{ltrobka & watrobecika / diminut. jekneles (DTL
1 ,
p. 215)164, Acknis "foie", in Acknis / die Leber (Mancels,
vers 1620,
1638b, p. V 261)165, Aknis "foie", in Watroba. lecur. Aknis
p. 190), Jeknos "foie", in Wçztroba / lecur, hepar heparis,
(EIger, 1683, p. 576), Aknigs "hépatique", in Watrobny.
Jeknos (DTL 3 , vers 1642, p. 471), Jekninis "hépatique", in Wçztrobny / Hepaticus, Jekninis (DTL
3 ,
Hepaticus. Aknigs (EIger, 1683, p. 576), aknys "foie", in
vers 1642, p. 471);
W{ltroby. Jecur. Aknys (Kurmin 1858, p. 233), Aknejgs
lit. dia!. jeknos "foie" (Druskininkai, dialecte haut-
"hépatique", in W{ltrobny. Hepaticus. Aknejgs v. aknu
lituanien du SUd)157; lit. dial. eknos ou aknos (Dusetos, dialecte haut-lituanien de
l'Est)158; lit.
(Kunnin 1858, p. 233); Iett. dial. jçknas / die Leber "foie",
dial. jaknos
fém. pl. (Mülenbachs-EndzeIÜls, ME, II, 109, dialecte de
(Lazünai, dialecte haut-lituanien de l'Est, en Biélorussie)159, d'où emprunt biélorusse .HKHbI / jakny "foie"160, emprunt polonais de Lituanie j akny "foie"161.
Ultérieurement
siècle)163 ;
Dundaga). - V. PRUSSIEN: lagno / leber "foie" (E 125), qui doit probablement être lu comme *iagno
« *jakna)l 66,
cf. pour la correction
graphique luriay / mer "mer" (E 66), lire *iuriay. 156. Trautmann (BSW, p. 106), Skardzius (1943, p. 45 et 50), Fraenkel (LEW, p. 192), Eckert (1963, p. 889), Sabaliauskas (1990, p. 11). Cf. LKZ (IV, p. 338). Données lettones chez Mülenbachs-Endzelïns (ME, l, p. 65), Karulis (1992, l, p. 63). Données du vieux prussien chez Toporov (PrJ, III, p. 11-14), Maziulis (PKEZ, III, p. 18-19), Steinbergs (1996-1997, p. 29). 157. Cf. Naktiniené, Paulauskiené & Vitkauskas (1988, p. 125). 158. Cf. Büga (RR(B), II, p. 172; III, p. 377). 159. Cf. Petrauskas & Vidugiris (1985, p. 96), voir aussi LKt (IV, p. 291). 160. Zinkevicius (LKI, II, p. 64). 161. Zinkevicius (LKI, III, p. 70).
Cf. édition par Drotvinas (1987, p. 255). Cf. édition par Drotvinas (1997, II, p. 645). Cf. Fennell (1988, p. 2). Cf. Fennell (1989, p. 3). 166. L'h.ypothèse de Benveniste (1935, p. 9), qui propose de conserver la i?rme pruSSIenne lagno et compare l'initiale du v. isl. lifr, vha. lebara et de arm: leard "foie", n'est pas vraisemblable, car elle sépare inutilement le prUSSIen des autres langues baltiques. 162. 163. 164. 165.
102
Catégorie du cas
Au même groupe il faut sans doute rattacher également la désignation balto-slave des "œufs de poisson", du "caviar"167, bien que le rapprochement ne paraisse pas motivé en synchronie: - LITUANIEN: ikras, surtout pl. ikrai "œufs de poisson, caviar", masc. (cf. LKZ, IV, p. 33), v. lit. ikray "œufs de poisson, caviar", in lkra rybia. Oua pifcium. ikray (Sirvydas, DTL
103
Catégorie du cas
3 ,
vers 1642, p. 89). - LETTON: ileri / der Rogen, Froschlaich "œufs de poisson, œufs de grenouille" (Mülenbachs-Endzelïns, ME, l, p. 704).
La désignation baltique du "foie" est ancienne et procède d'un substantif neutre hétéroclitique indo-européen plusieurs autres langues 169 :
*jekw-r/n-,
attesté dans
- INDO-EUROPÉEN'"jek -r/n- : gr. ~TTap "foie", nt., gén. sg. T)TTaToS' « Ï.-e. "'iëk w-[, gén. "'jëkw-{l-(t}-%s); véd. yalqt "foie", nt., W
gén. sg. yaknalJ «i.-e. *iekw-[-(t)-, gén. *jekW-n-%s); avest. rée. yiikar:l "foie"
«
i.-e. "'jëkw-%r-), pashto ylha "foie"
W
< Ï.-e. '" jek -n- %-), persan Jigar "foie"
«
«
ir. "'yaxna-
ir. "'yakar- < i.-e.
W
Pour expliquer la divergence sémantique, on peut penser à une désignation
'" jek %r-); lat. iecur "foie", nt., gén. sg. iocineris, iecinoris, iecoris «i.-e. "'jek w_[, gén. "'iek w-{l-%s)170.
métaphorique, le frai des poissons apparaissant en quelque sorte comme
La spécialisation sémantique du dérivé lit. ileras "œufs de poisson" pourrait
une masse molle comparable à un foie. D'une manière générale, ce qui est
elle-même avoir une certaine antiquité (ou, du moins, elle disposerait d'un
dénoté comme "foie" n'est pas tant l'organe en un sens médical que la
parallèle notable), à en juger par ses correspondants non seulement slaves
matière culinaire, dont seules comptent la consistance et l'apparence extérieure 168 .
(russe HKpa / ikra "œufs de poisson, caviar", fém., pol. ikra, tch. jikra,
-
s.-cr. ikra)171, mais aussi celtiques
(v. id. i(u)chair, gén. i(u)chrach "œufs de poisson", fém.
167. Fraenkel (LEW, l, p. 183). 168. Le rapprochement du nom balto-slave du "mollet" - v. lit. ikras "mollet" (cf. LKt, IV, p. 32, aujourd'hui remplacé par blauzdà), lett. ikri / die Waden "mollet" (Mülenbachs-Endzelïns, ME, l, p. 704), v. pro yccroy / wade "mollet" (E 142), cf. russe HKpa / ikra "mollet", slovaque ikra - n'est pas impossible, mais demeure tout de même spéculatif. Voir dans cette directi~n Toporov (PrJ, III, p. 36-37) et Maziulis (P KE2, Il, p. 20-22): ce derm~r reconstruit un substantif abstrait de genre neutre '" ikra "gonflement, partie molle et gonflée, comparable à du foie" (+- "'jek-r/n- "foie"), d'où, d'une part, "partie molle de la jambe, mollet" (lit. ikras, v. pro yccroy), d'autre p~ "œu!s mous, caviar" (lit. ikras, ikrai). Il me parait plus vraisembable de conSidérer ht. ikras "mollet" et lit. ikras, ikrai "œufs de poisson" comme de réels homonymes et de suivre en ce sens Fraenkel (LEW, l, p. 183), qui propose pour le premier mot de rapprocher le grec lKplOV (surtout pl. lKpW) "échafaudage de boi~", "poteau". Au passage, on notera que le grec LKplOV exclut un prototype à lablOvélaire'" ik w- (qui aurait donné tt lT-) : si le lit. ikras "mollet" do.it êtr~ ra~proché de lKplOV, il convient alors de le séparer nettement de la déSignatIOn l.-e. du "foie", qui comporte une labio-vélaire ('" iekW-r~n-): Pour la question qui nous occupe, ce rapprochement est pratiquement sans mCldence.
169. On reconstruira "'jêkw-r/n- ou "'Hjekw-r/n-, selon qu'on accordera créance ou non à l'analyse qui voit dans le grec [h-] (gr. ~lTap) le produit exclusif de "'Hj-. La question n'a ici aucune importance. Par convention, je noterai le prototype i.-e. comme'" jêkw-r/n-. 170. On rejettera ici comme improbable la reconstruction "'lyekw-(-t, proposée par Benveniste (1935, p.9) afin d'inclure dans le dossier des formes germaniques (v. isl. lifr, vha. lebara "foie") et arménienne (arm. leard "foie"); cette forme est interprétée par le même auteur (1935, p. 181) comme procédant du thème II "'/yék d'une racine autrement connue sous le thème l "'/éi-k w"laisser" (le "foie" étant l'''organe laissé, abandonné (aux dieux)" ?). 171. Vasmer (1953-1958, l, p. 477). 172. Sur la forme celtique, cf. Pedersen (1909, l, p. 129), Lambert (1978, p. 115). La plupart des auteurs reconstruisent un prototype '" ikWCJr à la base du v. irl. iuchair, mais cela soulève une difficulté phonétique: *ikWor aurait dû donner en V. irl. "'i(u)chur, comme "'snesor donne v. irl. siur "sœur". Peut-être est-il préférable de partir d'un dérivé (féminin) '" ikWor-i- > proto-celtique *ikuri > V. irl. iuchair, la flexion en gutturale des cas obliques (gén. iuchrach) étant de toute façon secondaire. Mais le traitement phonétique reste incertain. W
_
104
Catégorie du cas
Catégorie du cas
= RR(S), IV, p. 75), il est peu probable que le mot baltique soit un
complexe de la notion (le "foie" étant conçu comme un ensemble d'organes
emprunt formel au slave; il s'agit bien plutôt d'un mot hérité
divers, cf. tch. jatra "foie", nt. pl., apparenté au gr.
parallèlement en baltique et en slave, et dont le sens a été postérieurement
nt. pL). Le genre féminin du mot doit être secondaire en baltique oriental,
plus ou moins modifié en baltique sous l'influence du slave.
en regard du neutre hétéroclitique indo-européen dont il est l'abou-
Les formes baltiques posent deux problèmes: celui de l'adaptation
105
ÈVTEpa
"entrailles",
tissement.
flexionnelle de l'ancien neutre hétéroclitique et celui de son degré radical.
La forme prussienne *iagno, transmise comme lagno / leber "foie"
Les deux problèmes sont liés, bien que seul le second soit directement en
(E 125), peut, quant à elle, être interprétée de deux manières. Sa fmale -no
rapport avec la question de l'apophonie paradigmatique.
« *-(n)-ii) pourrait être celle d'un neutre pluriel
S'agissant du type flexionnel, le nom indo-européen du "foie" se présente dans plusieurs langues comme un substantif neutre hétéroclitique
« i.-e. *-(n)-eh2, cf. lat.
nomina, got. namna "noms" < *-mn-(e)h2 ). Elle aurait quelques parallèles
en v. prussien, notamment:
en *-r/n-. La flexion hétéroclitique est directement conservée en grec (gr.
- v. pro slayo "traîneau", nt. pl. (E 307), cf. slayan "partie glissante
~rrap,
de la luge", nt. sg. (E 309).
gén. sg. T;iTUTOS), en sanskrit (véd. yak[t, gén. sg. yaknal)) et, sous
une forme modifiée, en latin (lat. iecur, gén. sg. iocineris, iecinoris).
-
L'iranien a généralisé la forme *-r- du suffixe (avest. réc. yiikarô1, pehlevi
"porte,
Jagar, pers. Jigar); mais certains de ses dialectes ont conservé *-n-
- v. pro austo "bouche", nt. pl. (E 89), cf.
(pashto ytna, yidgha
'yëy~n
< ir. *yaxna-), ce qui prouve que l'hétéroc1isie
était encore vivante en proto-iranien. Le vieux khotanais a gyagarrii ou jatiirrii, qui dérive de *yakma-, avec addition des deux suffixes *-r- et *-n-
(comme, de manière inverse, le latin iocineris, iecinoris) 1 73 • Le baltique a généralisé la forme *-n- du suffixe (lit. jëk-n-os), mais le dérivé *ik-r-a"œufs de poisson" conserve une trace de la variante hétéroclitique *-r-. La distribution est comparable à celle qui apparaît dans le nom de l"'eau" en baltique: suffixe *-n- dans le substantif primaire (balt. *viidon / *üd-(e)n"eau", *jek-n-ii- "foie"), suffixe *-r- dans le dérivé secondaire (balt. *üd-r-ii- "loutre", *ik-r-a- "œufs de poisson").
Le nom du "foie" apparaît, en lituanien aussi bien qu'en letton, comme un plurale tantum, appartenant à la flexion féminine en *-ii-: lit.jëknos, lett. aknas "foie", fém. pl. «nom. pl. balt. *-as < i.-e. *-ehres). La limitation au pluriel s'explique vraisemblablement par le caractère
173. Cf. Emmerick (1980, p. 168) ; Mayrhofer (KEWA, III, p. 1 ; EWA,I, p. 391).
V.
pro warto "porte", nt. pl. (E 210), cf. v. sI. BpaTa / vrata iTÛ~Tl, iTÛ~at"
"bouche,
D"Toj.l.a"
(nt. pL).
(nt. pL),
V.
sI. oYCTa / usta
etc. 174 .
Une autre hypothèse consiste à interpréter le
V.
prussien *iagno comme un
féminin singulier « fmale *-n-eh2 ), dont le lituanien jëknos et le letton aknas représenteraient le pluriel et qui serait soutenu par l'influence de
l'original allemand die Leber (fém. sg.). Les deux hypothèses ne s'excluent pas, et l'on peut concevoir qu'une ancienne forme de neutre pluriel ait été secondairement réinterprétée comme un féminin singulier. Ce type de métanalyse est attesté en prussien. Ainsi, là où le Vocabulaire d'Elbing (E 154 et 374) a probablement encore un neutre pluriel menso ''viande'' (cf sI. *mfso "viande", nt. sg.), le
me
Catéchisme présente un féminin sg.
mensii (nom. sg. mensii, 111,101 19 ; acc. sg. menfan, III, 101 15), auquel le
letton miesa "corps" (fém. sg.) fournit un correspondant direct. De la même manière, dans la désignation slave du "foie", le neutre pluriel attesté en tchèque (tch.jatra "foie", nt. pl.) est devenu un féminin singulier en serbo174. En ce sens, Benveniste (1934-1935, p. 80); exemples chez Petit (2000b, p. 30-31).
106
Catégorie du cas
Catégorie du cas
107
croate (s.-cr. jetra "foie", fém. sg.). Ces rapprochements permettent de
- (b) ces radicaux représentent (au moins en partie) des variantes
comprendre comment l'ancien substantif neutre hétéroclitique a évolué dans
apophoniques anciennes.
les langues baltiques: d'abord fixé comme substantif neutre plurale tantum
Avant d'aborder directement le problème, il convient d'examiner un peu
(cf. v. pro *iagno, E 125), le mot a été secondairement interprété comme
plus précisément les données. On observe que, de ces quatre radicaux, trois
féminin singulier, puis rétabli comme plurale tantum (d'où lit. jeknos,
apparaissent dans plus d'une langue baltique:
lett. aknas, fém. pl.). Le cas est intéressant en ce qu'il montre comment un trait sémantique (la limitation au pluriel) a pu perdurer en baltique,
*jek- est attesté en lituanien (v. lit. et lit. dia!. jeknos, Druskininkai, en Lituanie du Sud) ainsi qu'en letton dialectal
indépendamment de l'évolution morphologique (neutre pluriel réinterprété
(jçknas dans le dialecte de Dundaga, un village de Kurzeme,
comme féminin). Le second problème, celui de la structure vocalique du radical, est plus difficile à résoudre. On peut isoler, en baltique, cinq radicaux, tous de
c'est-à-dire éloigné de toute éventuelle influence lituanienne).
- *jak- est attesté en lituanien dialectal (lit. dial. jâknos, LazUnai, village lituanophone de Biélorussie) ainsi qu'en v. prussien
quantité brève: *jek-(v. lit. et lit. dial.jeknos, lett. dial. jçknas), *jak- (lit. dial. jâknos,
V.
(* iagno) ; la forme lituanienne dialectale est caractéristique,
pro *iagno), *ek- (lit. dial. eknos), *ak- (lit. dial. âknos,
en particulier, d'un dialecte de Biélorussie, où l'on pourrait
lett. aknas) et *ik- (lit. ikras, surtout pl. ikrai, lett. ikri "œufs de
éventuellement supposer une prononciation slavisante (*je-
poisson"). Le dernier de ces radicaux (* ik-) n'apparaît que dans le dérivé
*ik-r-a- "œufs de poisson". Ce radical baltique *ik-
«
i.-e.
*ik
W _)
s'interpréter régulièrement comme un degré zéro de type s3.lJlprasar8.Qa sur une racine *iëk
w -.
ou *e- prononcés [ja-]) ; mais la forme prussienne montre que
peut
D'un point de vue morphologique, le passage au degré
zéro dans un dérivé secondaire *ikw-r-a-, en regard du thème primaire
*iekw-r/n-, rappelle le cas parallèle de l'indo-européen *ud-r-a- "loutre"
le vocalisme *jak- est ancien.
- *ak-
est attesté en lituanien dialectal (lit. dial. âknos dans le dialecte de Dusetos, au Nord-Est de la Lituanie, loin de toute éventuelle influence lettone) ainsi qu'en letton (lett. aknas).
(aboutissant au balto-slave *ûdrii, avec allongement dû à la loi de Winter)
Le radical *ek- (* eknos), lui, ne se rencontre apparemment que dans le
en regard de *yed-rln- "eau". Il s'agit en tout cas d'une apophonie propre à
dialecte lituanien de Dusetos, où il coexiste sans différence notable avec
la dérivation, qui, par conséquent, ne nous intéresse pas ici de manière
*ak- (âknos) 175. Cependant, Büga (RR(B), II, p. 172) a fait remarquer que
directe.
la forme aknys, attestée dans le dictionnaire polonais-latin-letton de
Ce qui pose un problème, en revanche, ce sont les quatre autres
Kurmin (Slownik polsko lacinsko lotewski, 1858, p. 233, dialecte
radicaux *jek-, *jak-, *ek- et *ak-, qui apparaissent tous dans la désignation
latgalien), ne peut avoir eu d'initiale ancienne *ak-, puisqu'une voyelle *a-
primaire du "foie". Le rapport de ces quatre radicaux est obscur. La
en début de mot est régulièrement rendue par *0- dans le dialecte latgalien.
difficulté peut se résumer dans l'alternative suivante:
Büga s'appuie notamment sur les exemples suivants, dans lesquels Kurmin présente un < 0- > en regard du letton standard < a- > :
- (a) ces radicaux sont des variantes phonétiques d'un seul et même radical. 175. Selon la fonnule de Büga (RR(B), III, p. 377) : dusetiikiai sako abejaip "à Dusetos, on dit les deux".
109
Catégorie du cas
Catégorie du cas
108
- Kurmin 208: Okka "puits", in Studnia / Puteus / Okka (: lett.
- Kurmin 42: Eiis "hérisson", in Jei / Herinaeeus, herix / Eiis
standard aka, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 62).
(: lett. standard ezis, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 572).
- Kurmin 198: Oklys "aveugle", in Slep / Male oeeultatus,
Cette analyse semble autoriser à dire que la forme aknys "foie" chez
luscitiosus / Oklys (: lett. standard ak/is, cf. Mülenbachs-Endzelfns,
Kurmin représente *fkn-; elle permettrait donc de retrouver une trace du
ME, 1, p. 63).
radical
- Kurmin 42: Odota "aiguille", in Igla / Aeus /
Odota (: lett.
standard adata, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 10). On peut leur ajouter ceux-ci, tirés d'une lecture cursive de Kurmin: - Kurmin 33 : Olkons "affamé", in Glodny / Olkons, izalcis (: lett. standard alkàns, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, l, p. 67). - Kurmin 70: Ossora "larme", in Lza / Lachryma / Ossora (: lett. standard asara, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 142). - Kurmin 126: Ostoini "huit", in Oim / Oeto / Ostoini (: lett. standard astuô!,i, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 146). Quant à *e- initial, il apparaît chez Kunnin soit comme < a- > (s'il s'agit à
*ek-
également en letton dialectal. C'est à cette conclusion
qu'aboutit Büga (RR(B), II, p. 172): il suppose une forme primitive
*eknas en proto-letton, conservée seulement dans la forme aknys chez Kurmin et ailleurs passée à aknas. Dans une notice de MülenbachsEndzelfns (ME, l, p. 566, s. u. *?knas), Endzelfns met en doute cette reconstruction: il fait observer que la seule forme latgalienne clairement attestée est oknys, régulièrement issue de
*akn-
; il interprète alors le
vocalisme initial de la forme aknys de Kurmin comme une influence du bas-letton. On ajoutera qu'il existe quelques autres exemples chez Kurmin d'une voyelle ancienne *a- notée < a- >, notamment: - Kurmin 44 : Akmens "pierre", in Kamiefz prosty / Lapis / Akmens
l'origine d'un *e- ouvert [~]), soit comme < e- > (s'il s'agit à l'origine d'un
sprosts (: lett. standard akmèns, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, l,
*e- fermé [e]). Le premier cas (Kurmin < a- > = lett. < ~- » peut être
p.64).
illustré par les exemples suivants: - Kurmin 69: Alkyunie "coude", in lokieé, czlonek r~ki od
przegubu, ai do dloni / Cubitus, ulna laeertus / Pedussa alkyunie (: lett. standard çlkuônis, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 567568). - Kurmin 42 : Azars "lac", in Jezioro / Stagnum, laeus / Azars (: lett. standard fzçrs, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 572).
- Kurmin 58: Asznis "sang", in Krew w ciele jeszeze / Sanqvis
/ Asznis welda iksz misas (: lett. standard asins, cf. MülenbachsEndzelfns, ME, l, p. 143). - Kurmin 121: Acis "œil", in Oko / Oculus / Acis, aié (: lett. standard aes, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 7). En définitive, on évitera de se prononcer sur ce dossier dialectal et on laissera de côté la forme aknys de Kurmin, dont le témoignage en faveur d'un radical *ek- en letton dialectal est sujet à caution.
Le second cas (Kurmin < e- > = lett. < e- » peut être illustré par les exemples suivants: - Kurmin 41 : Egle "sapin", in Jed/ina / Abies / Egle (: lett. standard egle, cf. MUlenbachs-Endzelfns, ME, l, p. 565). _ Kurmin 40: E§§ "je", in Ja / Ego / Eii (: lett. standard es, cf. Mülenbachs-Endzelfns, ME, 1, p. 571).
On se trouve donc en présence de quatre radicaux dont la genèse n'est pas claire. Est-il possible de les ramener à un prototype commun? Plusieurs analyses peuvent être tentées. Si l'on part d'un radical baltique *jek- « i.-e.
*iek
W -),
on expliquera le radical dialectal *ek- par la chute du
Yod initial; le radical
*ak-,
lui, pourrait résulter d'un flottement bien
110
Catégorie du cas
Catégorie du cas
connu dans les langues baltiques entre *e- et *a- en position initiale l76
111
;
autre difficulté est que le radical *jak- apparaît, dans cette perspective,
quant au radical *jak-, rien n'interdirait d'y voir une contamination qui se
comme le produit d'une évolution secondaire, alors qu'en réalité il a des
serait produite entre *jek- et *ak-. Cette première hypothèse suscite
chances d'être ancien, puisqu'il se rencontre non seulement en lituanien
cependant plusieurs difficultés. Tout d'abord, l'évolution phonétique
dialectal, mais aussi en v. prussien.
postulée dans *jek- > *ek- peut être contestée. Car si la chute d'un yod
Une variante de cette hypothèse consisterait à admettre que la chute du
devant *-e- est régulière à l'intérieur du mot (cf. lit. bùre "voile d'un
yod initial est régulière en baltique devant *-e- et donc que le radical hérité
bateau" < finnois purje, lit. comparatif -èsnis < *-jes-ni-), elle est mal
*jek- a donné *ek- dès avant les premiers documents linguistiques. De cette
l77
que
forme *ek- procéderaient les autres radicaux attestés: *jek- par ajout d'un
v.lit.jente "belle-sœur" «i.-e. *ienhrter-), lit.jegà "force" «i.-e.
yod initial (phénomène phonétique connu dans plusieurs dialectes
*jëg -eh2,
lituaniens, qui ont par exemple jëzeras "lac", au lieu de ëzeras); *ak- par
attestée en début de mot: elle est contredite par des cas aussi clairs W
cf. gr.
fl~ll
''jeunesse''), et ne s'appuie que sur un petit nombre
d'exemples plus ou moins assurés, comme v. lit. enti "allant", participe
suite du flottement entre *e- et *a- au début du mot (cf. lit. dial. iizeras
(acc. sg. < balt. *jentin < Î.-e. *hâ-e.6nt-Ip.)178 ou encore lit. dial. égéré
"lac", v. pro assaran); enfin, *jak- par contamination de *jek- et de *ak-.
"chasseur" (à côté de jegere < emprunt aIl. Jiiger). Une évolution *ja-
Cette explication n'est guère convaincante, non seulement à cause des
*a-
demeurant par ailleurs sans parallèle en baltique, on doit bien
difficultés que soulève l'évolution *je- > *e- en baltique, mais surtout
admettre que les radicaux dépourvus de yod initial sont issus d'une
parce qu'elle contraint à voir dans *jak-Ia contamination de deux radicaux,
évolution de *je- > *e-, ultérieurement étendue par analogie aux radicaux à
*jek- et *ak-, qui sont en réalité distincts d'un point de vue dialectal. Le
vocalisme *-a-. On pourrait certes limiter cette évolution problématique
radical *jak- doit nécessairement être ancien.
>
*je- > e- à un domaine dialectal restreint (lit. ëknos, Dusetos), mais on ne
Si l'on suppose que le radical *jak- est ancien, la variante *jek- pourrait
saurait expliquer la forme *ak-, attestée en lituanien dialectal et très
résulter d'une fermeture secondaire du timbre vocalique sous l'influence du
largement en letton, autrement que comme un avatar particulier de ce
yod initial. Quant aux variantes *ek- et *ak-, elles s'expliqueraient, comme
radical *ek-, qu'elle présuppose obligatoirement. Pour résoudre la
dans les hypothèses précédentes, à partir de ce second radical *jek- (> *ek-,
difficulté, plusieurs savants admettent une chute "facultative" de yod
puis par analogie *ak-). Mais ici encore surgit une difficulté: la fermeture
devant *-e- en position initiale, due à des phénomènes de sandhi;
de *ja- en *je- postulée par cette hypothèse n'est connue dans les dialectes
l'hypothèse n'est pas a priori exclue, mais elle est invérifiable 179 • Une
lituaniens qu'en position intérieure, en particulier à la fm du mot, par ex. lit. naîijas "neuf', prononcé [naujas] ou [naujes] dans de nombreux
dialectes 180. Pour la position initiale, on ne disposerait, à la rigueur, que 176. Sur ce flottement, cf. Stang (1966, p. 31-32), Andersen (1996). 177. Exemples et discussion chez Stang (1966, p. 100); cf. Fraenkel (LEW, J, p. 192-193). 178. Selon Stang (1966, p. 100), la conservation de *je- est régulière; la chute du yod dans le v. lit. enti s'est produite d'abord dans les formes préverbées, où le yod n'était pas en début de mot (par ex. isent- "sortant" < *is-jent-), puis a été étendue à la forme simple. 179. En ce sens, cf. Fraenkel (LEW, I, p. 193), qui parle de "Satzsandhi"; voir aussi Nagy (1970, p. 94-95).
d'un parallèle approximatif: le lituanien dialectal jiikstis / jëkstis ''hache''
«
emprunté au bas-aIl. ex(e) "hache"). Ce parallèle a peu de valeur,
puisqu'il est fondé sur une voyelle initiale *e-, prononcée *ja- ou *je-, non
180. Voir en ce sens, dès le XVIIe siècle, les observations de D. Klein (1653, p. 13 ; 1654, p. 7).
112
113
Catégorie du cas
Catégorie du cas
sur une séquence initiale *ja- qui serait passée à *je-. Si le radical *jak- est
persan moderne jigar < ir. *yakar-) peuvent a priori refléter aussi bien
ancien, on n'a donc aucun moyen d'en tirer le radical *jek- par une
l'indo-européen *iek w- que *jok w_. Le degré zéro aurait été très tôt éliminé
évolution phonétique.
de la flexion (cf. gén. sg. du védique yaknaf), avec degré plein restitué,
La conclusion paraît s'imposer: la diversité des radicaux attestés dans
mais accent final conservé); il en resterait cependant une trace dans le
le nom baltique du "foie" ne peut s'expliquer seulement par des variations
dérivé lit. ikrai, russe HKpa / ikra, v.irl. i(u)chair "œufs de poisson". Dans
phonétiques, et l'on doit admettre que les radicaux *jek- et *jak-, qui
cette perspective, le baltique aurait conservé non seulement le degré
apparaissent irréductibles l'un à l'autre, sont tous deux anciens. Leur
vocalique du nominatif-accusatif sg. *jek W_ (type lit. jëk-nos) et celui du
genèse se trouve ainsi repoussée dans la préhistoire indo-européenne, ce qui
locatif sg. *iok w- (type lit. jiik-nos), mais également, de manière indirecte,
amène à envisager l'hypothèse d'une ancienne apophonie paradigmatique
le degré vocalique du gén. sg. *ik w_ (dérivé lit. ikrai)I8I.
conservée en baltique.
Cette reconstruction suscite plusieurs objections, dont certaines ont été
Le baltique a donc possédé concurremment deux radicaux, *jek- et
mises en lumière dans des travaux plus récents comme ceux d'Eichner
*jak-, qui peuvent remonter à deux radicaux distincts de l'indo-européen, W w *jek _ et *jok -. Il faut maintenant tenter d'intégrer au dossier comparatif
(1972, p. 69) et de Beekes (1985, p. 5-6). La première est que la
ces allomorphes apophoniques supposés par le baltique et d'établir quelle
qui apparaît constamment en grec (gr. ~TTUp, gén. sg.
était leur distribution originelle. Les autres langues indo-européennes
w *j,ek -[, gén. *iëkW-IJ-(t)-efos) et sporadiquement en iranien (avest. réc. yakar;l
permettent de supposer, dans la désignation du "foie", l'existence d'un
ancien paradigme apophonique. La reconstruction de ce paradigme varie
proposé une reconstruction quelque peu différente. Selon lui, le nom du
cependant selon les auteurs. Dans un article consacré spécialement aux
"foie" en indo-européen appartenait à un type apophonique acrostatique: il
formes latines (lat. iecur, iocineris), mais qui aborde directement la
opposait un nom.-acc. sg. *iêkw-[-(t) (avec longue généralisée en grec
question de l'apophonie radicale dans ce mot, Rix (1965, p. 87) a proposé
nom.-acc. sg. ~TTUp
de restituer le paradigme suivant:
brève généralisée en védique gén. sg. yaknaf) -- nom.-acc. sg. ya/qt)I82. La
reconstruction de Rix ne permet pas de rendre compte du degré radical long
--
gén. sg.
iiTTUTOS)
iiTTUTOS
< i.-e.
et un génitif sg. *i~kw-n-os (avec
reconstruction d'un paradigme acrostatique n'explique cependant ni la INDO-EUROPÉEN
présence d'un degré radical *0 en latin (lat. gén. iocineris) et en baltique
NOM.-ACC. SG.
*iékW-f-t
(lit. jiiknos, v. pro *iagno), ni l'existence d'un degré zéro *ik w_ dans le
GÉN. SG.
*ikw-n-és
dérivé lit. ikrai, v. sI. HKpa / ikra, v. irl. i(u) chair. Pour résoudre ces
LOC. SG.
*iokw-én
difficultés, Beekes (1985, p. 6) a proposé d'interpréter le degré radical *0 comme le remplacement général du degré zéro paradigmatique, ce qui
Du thème fort du nom.-acc. sg. *iékw-r- procéderait directement le latin
l'amène à analyser le couple lat. iecur, vs. iocineris comme le reflet d'une
*jokW-én- se retrouverait dans
flexion protérodynamique i.-e. *iékw-r, vs. *iokw-én-s (ce dernier
iecur, tandis que le thème faible du loc. sg.
le radical des cas obliques du latin iocineris. Les formes indo-iraniennes à radical *yak- (véd. yak[l, gén. sg. yaknaf) ; pashto ytna < ir. *yaxna-,
181. En ce sens, voir par exemple Smoczyfiski (2001, p. 122). 182. Reconstruction en ce sens également chez Schindler (1975, p. 6).
Catégorie du cas
114
remplaçant un plus ancien
*ik
w
-én-s). On voit, à travers ces divers
"schémas apophoniques", comment la reconstruction du paradigme indo-
cependant, que la forme collective ancienne ait été *jekW-or (parallèle à i.-e.
*yed-or "eau") et qu'elle ait été refaite dans deux directions:
européen du nom du "foie" présente encore une grande part d'incertitude.
- soit comme *ikw-or, attesté à travers un dérivé de sens spécialisé
Mon objet n'est pas ici d'intervenir dans ce débat, qui me paraît quelque
"œufs de poisson" en celtique (v. irl. i(u)chair < *ikw-or-i-),
peu circulaire et sans doute voué à l'échec, mais plus simplement de tenter
cf. même type de réfection dans le gr. ü8wp "eau". Les
d'expliquer la coexistence d'allomorphes apophoniques dans les langues
formes dérivées du slave et du baltique (russe HKpa / ikra, lit.
baltiques.
ikrai "œufs de poisson") présentent une évolution parallèle,
Pour cela, il me semble important d'attirer l'attention sur un trait
peut-être indépendante; elles ne supposent pas nécessai-
particulièrement significatif des formes baltiques: leur limitation au
rement l'existence d'un ancien collectif *ikw-or en proto-
pluriel. Il n'est pas impossible que ce trait représente quelque chose
baltique, car elles peuvent être dérivées de *jekW-or, comme
d'ancien. L'hypothèse que le nom du "foie" ait été marqué comme une
*ud-r-ii "loutre" l'est de l'indo-européen *yed-or "eau", avec
forme collective pourrait trouver un appui dans la forme celtique, v. ir!.
degré zéro non pas flexionnel, mais dérivationnel. - soit comme *jek W-n-eh2, avec le sens primaire de "foie" en
i(u)chair "œuf de poisson", qui pourrait provenir, éventuellement, de *ikw-or-i-, c'est-à-dire d'une forme pourvue d'un suffixe qui est dérivé
baltique (d'où lit.jêknos), cf. même type de réfection dans le
d'une ancienne fmale de collectif (cf. gr. ü8wp "eau"; pour la formation, le dérivé celtique rappelle le type grec 1TÉÀWP
115
Catégorie du cas
1TEÀWPLOS
got. namna "noms" < *-mn-eh2 au lieu de l'ancien collectif
"monstrueux" à côté de
'monstre'). En balto-slave, cette forme collective ne survit plus
qu'à travers un dérivé secondaire qui a des chances d'avoir été un neutre pluriel, *ikw-r-ii, passé au féminin singulier en slave (russe HKpa / ikra, fém. sg.) et au masculin pluriel en baltique (lit. ikrai, masc. pl.)183. La divergence sémantique ("foie", vs. "œufs de poisson") pourrait, dans cette perspective, résulter d'une évolution secondaire à partir de l'ancienne
*-mon (cf. v. avest. niim{ln "noms", pl.).
Quel qu'ait pu être le rapport de cette forme collective *jekW-or avec le paradigme singulier hérité de l'indo-européen (nom.-ace. sg. *jek w_[_ selon Rix, *jëk w_[_ selon Eichner), on peut supposer qu'elle a donné naissance, en proto-baltique, à un paradigme singulier secondaire de type *jokw-r/n-, par exemple sur le modèle du nom de l"'eau" : - collectif *yed-or
notion collective.
(confondus en proto-baltique dans le néo-singulier *yod-or, lit. vanduO),
On peut donc penser qu'à l'origine, le nom du "foie" a connu en baltique surtout un paradigme collectif, différent du paradigme singulier supposé par les autres langues. Je ne me prononcerai pas ici sur la reconstruction précise de ces deux paradigmes, en particulier sur celle du paradigme singulier, pour lequel les modèles fournis par Rix et par Eichner demeurent théoriquement possibles, quoique incertains. Il est concevable,
singulier *yod-[-
d'où:
x (X =
singulier *iokw-r/n-).
Si l'on accorde à cette spéculation une certaine vraisemblance, on peut voir dans la coexistence des deux radicaux *jek- et *jak- en baltique le reflet d'une opposition ancienne entre un radical pluriel-collectif *jek w_ et
183. Pour le baltique, le cas serait comparable à celui du lit. vaFtai "portes:: (masc. pl.), en regard du neutre pluriel conservé en v. pruss. warta porte (E 210) et en slave, v. 51. BpaTa / vrata "porte" (nt. pL).
Un radical singulier secondaire *jok w_. Un cas rigoureusement parallèle
116
Catégorie du cas
Catégorie du cas
serait celui du nom du "printemps" en balto-slave. En effet, on peut opposer dans le nom du "printemps" l 84
:
117
balto-slave "conflit": *kot-rln- (lit. katii/yU, katiiryti "battre, frapper", v. russe KOTopa, KOTepa / kotora, kotera "querelle",
- un degré *e en slave, cf. v. sI. BeCHa / vesna "printemps, Ëap"
cf. mha. hader "Hader, querelle") 1 86 •
(fém. sg.) < * yes-n-ii, prolongeant vraisemblablement un
- balto-slave "songe, rêve" : *s(y)op-rln- (* s(y)op-no- > lit. siipnas
ancien collectif neutre * yes-n-eh2 • Ce collectif neutre serait
"rêve", cf. peut-être lat. sopor "sommeil"), vs. *s(y)ep-rln-
parallèle à celui qui est supposé par le lituanien jêknos "foie" *iek w-n-eh2, nt. pl.
(*s(y)ep-no- > v. isl. svefn "rêve", tokh. A ~piif!l, B ~pane
0<-
- un degré *0 en baltique, cf. lit. vasara "été", v. lit. vasera, Chyliftski, 1664 (fém. sg.) < * yos-er-ii, prolongeant vraisemblablement un ancien neutre sg.
* yos-rln-
(avec une
dérivation du type gr. l)IJ.Épa o<-lllJ.ap "jour"), secondaire par
"sommeil") ; il existe aussi un degré zéro radical largement répandu *sup-r/n- (*sup-no- > v. sI. CbHb /
S'bn'b
"rêve,
ÜlTVOS", gr. Ü1TVOS "sommeil", tokh. B *sanme "rêve" dans
siinmetse "en transe" ; cf. aussi gr. ülTap "songe", hitt. suppariya- "dormir").
rapport au type hérité *yes-r (lat. uër, gr. Ëap). Ce neutre
Le cas est moins clair lorsque la voyelle radicale se trouve en position
singulier secondaire *yos-rln- serait parallèle à celui qui est
initiale, car elle peut être sujette à un flottement phonétique au début de
supposé par le lit. jiiknos "foie"
0<-
*iok w_rln_, nt. sg.
mot entre *e- et *a- :
On a depuis longtemps fait observer que les aboutissements des anciens neutres hétéroclitiques en balto-slave présentent souvent un degré radical
*0, opposé parfois à un degré radical *e 185 • Ainsi: - balto-slave "printemps":
* yos-rln-
*yof-rln- (lit.
(lit. vasara "été"), vs.
vakaras "soir"), vs.
*h1eshrr/n- (bitt. eslJar "sang"). balto-slave "automne": incertain *h1os-r/n- (v. pro assanis
/ herbist "automne", E 14), vs. *h1es-r/n- (v. sI.
I€œHb
/ jesenb "automne", pol. jesiefz). Plutôt qu'une ancienne
*yes-rln- (v. sI. BeCHa / vesna "printemps"). - balto-slave "soir" :
- balto-slave "sang" : peut-être *h1oshrr/n- (lett. asins "sang"), vs.
*yef-rln-
(v. sI. Beqeph ! vecerb "soir,oq;La, ÉŒlTÉpa").
apophonie, il doit s'agir ici d'un flottement phonétique, puisqu'il se rencontre à l'intérieur même du slave (comparer le polonaisjesiefz < *es- et le russe oceHb / osen' <*os-); cependant, le degré
*0
pourrait être ancien, car il apparaît
également, de manière claire, en germanique (got. asans 184. Sur le nom du "printemps" en balto-slave, voir l'article fondamental d'Eckert (1966, p. 143-154), ainsi que le compte-rendu qui en a été fait par Urbutis (1967, p. 234). 185. En ce sens, par exemple Kazlauskas (1967, p. 240 = RR(K), II, p. 241242), Eckert (1969, p. 7-10, note intitulée "1. Zur o-Stufe im Wurzelvokalismus ehemaliger heteroklitischer Stamme"). Autre analyse chez Hamp (1970, p. 2829), qui part d'un degré *e radical secondairement altéré (* uesr- développant des dérivés *ueser- et *uesar-, ce dernier aboutissant à * uasar- par assimilation régressive): cette analyse remonte à Skardzius (l938b, p. 42 = RR(S), IV, p. 430) et à Endzelfns (1938, p. 27 = DI, IV}, p. 335) ; elle se retrouve encore chez MaZiulis (1999, p. 321).
"temps de la moisson, été, SÉpos, SEpLŒIJ.6s", vha. aran "Ernte, moisson" < *os-) et en grec (gr. 6mDpa "[fi de l'été" < *6lT-oaap-a). On peut donc penser que s'est manifestée, dans la préhistoire des langues baltiques, une tendance à imposer un degré * 0 radical dans les
186. Sur ce groupe, cf. Karaliünas (1967, p. 219-22), Eckert (1969, p. 8).
118
Catégorie du cas
Catégorie du cas
neutres hétéroclitiques, c'est-à-dire une structure *CoC-rln-. Dans cette
est donc impossible, ou du moins très incertaine, à partir des seules
analyse, le vocalisme radical du lituanienjaknos et du v. prussien *iagno
données baltiques. Les vestiges de cet ancien type d'apophonie sont rares:
serait régulier à l'intérieur du système où il apparaît (* jok W_rln _), ce qui
on les rencontre principalement dans les anciens noms-racines, notamment
119
peut signifier qu'il n'est pas ancien. De toute évidence, une comparaison
dans les désignations du "cœur" (* fër ;:::: *lè{d- ;:::: *ferd-), du "pin" (*peuli-
avec le degré vocalique *0 attesté dans le latin iocineris n'est pas nécessaire
;:::; *puf-), de la "porte" (*d'J,lor-;:::: *d'ur-), avec moins de certitude dans les
et n'apporte rien à la compréhension des faits baltiques. Il me semble préfé-
désignations du "sel" (*seh21- ;:::: *s h21-) et de l"'étendue humide" (*ielJHr-
rable d'admettre que le degré *0 résulte de la création secondaire d'un néo-
;: :; *iuHr-). On trouve également une trace isolée d'une
singulier *iokw-rln-, d'après un modèle général (type
il pourrait, dans cette perspective, être plus
dans un ancien neutre hétéroclitique, le nom de l'''eau'' (*J,lod-orln ;:::: *ud(e)n-). On mettra à part le nom du "foie" (*iok w- ;:::: *iek dont l'apo-
ancien: il refléterait le vocalisme d'une forme collective i.-e. *iekw-or, qui
phonie est d'une nature quelque peu différente et relève plus en définitive
seule disposerait d'une antiquité indo-européenne. La distribution ori-
de la catégorie du nombre que de celle du cas.
Quant au degré
*e radical,
*Ijod-rln-
"eau").
apophonie radicale W -),
ginelle des deux degrés vocaliques aurait été secondairement perdue au
Ces vestiges d'apophonie radicale présentent quelques caractères
point que ses seules traces ne résident plus en baltique que dans une
communs. Tout d'abord, on observe qu'en général, ils n'opposent plus que
diversité de formes dialectales. Le degré *0 secondaire a même pu
deux allomorphes apophoniques. Cette limitation de l'apophonie radicale
s'introduire parfois dans le domaine de l'ancienne forme collective, comme
au "bithématisme", pour reprendre une expression très juste de Smoczyilski
*iegno
(2000b, p. 20, § 7.3), a conduit dans plusieurs cas à éliminer certaines
cf. lit. jeknos). On voit, par cette
variantes pour ne laisser subsister qu'une opposition binaire. Ainsi, dans le
analyse, à quel point l'apophonie radicale a été perturbée dans les langues
nom de l"'eau", l'indo-européen opposait probablement au moins trois
baltiques et combien il serait risqué de prendre leurs données pour argent
radicaux, *J,lod- (nom.-acc.sg.), *lJed- (nom.-acc. pl.-collectif) et *ud- (gén.
comptant dans une reconstruction de "schémas apophoniques". Dans le
pl.-collectif). Le baltique n'a gardé trace que de deux, *J,lod- (prolongé par
nom du "foie", l'apophonie ancienne en baltique séparait probablement un
le lituanien vanduo) et *ud- (prolongé par le v. prussien wundan et le
singulier *iokw-rln- et un pluriel (ancien collectif) *iekw-or. Il ne s'agissait
letton ûdèns) ; il a totalement perdu le radical *J,!ed-. Dans le nom du
donc pas à proprement parler d'une apophonie paradigmatique, mais plutôt
"foie", le baltique n'a conservé que *iek w- (lit. jëknos) et *iok w- (v. pro
d'une apophonie numérique, relevant en principe d'une autre analyse, bien
*jagno); il a perdu en revanche *jëk
qu'étant en réalité très comparable.
exception à ce principe du bithématisme, à ma connaissance, est le nom du
c'est visiblement le cas dans le prussien
« collectif secondaire *iek -n-eh2, w
v. CONCLUSION: APOPHONIE RADICALE
* iagno
au lieu de
W _
(attesté par le grec ~1Tap). La seule
"cœur", qui présente en baltique encore trois formes radicales, *fër (v. pro ET CATÉGORIE DU CAS
Au terme de cette longue analyse concernant l'apophonie radicale casuelle, on peut observer que ce type d'apophonie est devenu exceptionnel en baltique et n'apparaît jamais directement à l'intérieur d'un paradigme. On peut seulement en restituer l'existence à partir de membra disjecta, dont l'analyse est souvent malaisée. La reconstruction de schémas apophoniques
seyr), *ferd- (lit. ierdis) et *frd- (lit. iirdis). Mais on notera que, dans
chacun des principaux dialectes baltiques pris isolément, le bithématisme prévaut encore: le V. prussien oppose seulement *fër (v. pro seyr) et *Iè{dCv. pro sirsdau), il n'a aucune trace de *ferd-, tandis que le lituanien et le letton ne présentent que *ferd- (lit. ierdis) et *frd- (lit. i;rdis), et n'ont pas gardé *fër. Et, du reste, s'agit-il réellement de trithématisme, quand, à
120
121
Catégorie du cas
Catégorie du cas
côté de *Sird-, on trouve *sër et *sërd-, qui ne se distinguent plus que par
bithématisme, opposition d'un radical fort et d'un radical faible) et qu'elle
la présence ou l'absence d'une dentale fmale?
n'apparaît plus qu'à travers des données éclatées, qui laissent entrevoir une
Les degrés apophoniques indirectement attestés par le baltique sont en général caractérisés par le contraste entre une forme forte et une forme faible du radical. L'opposition la plus fréquemment représentée est celle d'un degré plein (degré *e ou degré *0) et d'un degré zéro (0), ainsi dans les désignations du "pin" (degré plein *peJ,Jf-, vs. degré zéro *puf-), de la "porte" (degré plein *d'J,Jor-, vs. degré zéro *cI'ur-), du "sel" (degré plein *seh21-, vs. degré zéro *sh21-), de l"'étendue humide" (degré plein *ieJ,J1lr-, vs. degré zéro *i.uHr-) et dans le nom de l"'eau" (degré plein *J,Jod-, vs. degré zéro *ud-). Seul le nom du "foie" oppose deux degrés pleins (degré *e dans *iek w-, degré *0 dans *i.ok
W -),
tandis que le nom du "cœur" oppose
originellement un degré long (*fër), un degré plein (*ferd-) et un degré zéro (*frd-). Si l'on fait abstraction de ces deux cas exceptionnels, la tendance semble s'être imposée en baltique de limiter l'apophonie radicale à l'opposition d'un radical fort et d'un radical faible. On peut penser que cette opposition s'inscrit dans un système qui tend à marquer spécialement le nominatif singulier et à le différencier des autres cas, comme on le voit clairement dans l'apophonie suffixale des thèmes à nasale: de la même manière qu'on oppose, en lituanien, un allomorphe spécifique au nominatif sg. *-on (lit. piemuo "berger") à un allomorphe *-en- commun à tous les autres cas (lit. ace. sg. piemeni, gén. sg. piemefis, nom. pl. piemenys, etc.), de même il est probable que le baltique a opposé, dans les vestiges d'apophonie radicale, une forme à degré plein, propre au nominatif sg. (*peJ,Jf-, *d'J,Jor-, *ieJ,JHr-, *J,Jod-), et une forme à degré zéro, commune à tous les autres cas (*puf-, *d'ur-, *h1uHr-, *ud-). Seule exception encore une fois, le nom du "cœur": il oppose une forme propre au nominatifaccusatif sg. (degré long *fër) et deux formes à l'origine propres aux cas obliques (peut-être *frd- au gén. sg. et *ferd- au loc. sg.). Si l'on peut donc parler d'une conservation résiduelle de l'apophonie radicale casuelle en baltique, on doit d'emblée reconnaître que cette conservation s'est faite dans des conditions limitées (tendance au
situation apophonique plus ancienne, mais demeurent en synchronie étrangères au système de l'apophonie.
CHAPITRE III CATÉGORIE DU NOMBRE ET APOPHONIE RADICALE
J. INTRODUCTION
Le critère du nombre est commun, dans les langues indo-européennes, au système nominal et au système verbal. Dans chacun de ces deux systèmes, on distingue un singulier et un pluriel, ainsi qu'un duel, qui n'a survécu que dans quelques langues (dont le lituanien jusqu'au début du e
XX siècle). Certains auteurs 187 ont supposé l'existence d'un quatrième nombre, le "collectif' ou "compréhensif'. Mais ce collectif n'est restituable que dans le système nominal, pour expliquer notamment les pluriels de sens collectif du type gr. KUKÀOL
KUKÀa
"cercles", du duel
"roues", en regard du pluriel non collectif
KUKÀW
"deux cercles" et du singulier
KVKÀOS
"cercle" (masc.); il n'est pas connu dans le système verbal, où ne s'opposent qu'un singulier, un pluriel et un duel: son existence est donc douteuse 188 • 187. En ce sens, Eichner (1985, p. 134-169). 188. Le "collectif' doit être conçu, me semble-t-il, à l'origine non pas comme une catégorie flexionnelle, mais comme une catégorie dérivationnelle; C'est ainsi qu'il apparaît, du reste, dans de nombreuses langues, par ex. ft. feuille -- feuillage, aIl. der Berg "montagne" -- das Gebirge "monts".
124
Catégorie du nombre
125
Catégorie du nombre
Dans l'expression de la catégorie du nombre, on observe en indo-
confondre les formes du singulier et du collectif en une forme unique, à
européen l'existence de quelques faits d'apophonie radicale. Ils sont assez
valeur de singulier: il a ainsi réuni le singulier *I)od-r/n- et le collectif
mal attestés dans le système nominal, où seules les formes dites
* I)edor en
"collectives" paraissent en présenter la trace par rapport aux formes du
vanduo "eau" (sg.). Cette tendance est ancienne, puisqu'elle apparaît aussi
une forme */Jodor/n, dont procède indirectement le lituanien
(> hitt. wiitar), vs. i.-e.
dans les langues germaniques (got. wato "eau", sg. < */Jodon). En grec
collectif */Jedor (> hitt. pl. widiir). En revanche, dans le système verbal,
même, l'ancienne finale de collectif *-or a fourni quelques fonnes plus ou
un contraste apophonique était fréquent entre le singulier et le pluriel, ce
moins intégrées dans un paradigme singulier, comme gr. üBwp "eau" (en
singulier, par exemple Î.-e. sg.
*/Jod-[ "eau"
qu'illustre notamment l'indicatif présent des verbes radicaux athématiques,
regard du pl. üBaTa), 7TÉÂ-WP "monstre, prodige" (en regard du pl.
par exemple i.-e. 1re sg. *h1ei-mi 'je vais" (> gr. Ellll, véd. émi), vs. 1re pl.
7TÉ Â-wpa), à côté de quelques formes non marquées en nombre et quasi
*h1i-me- "nous allons" (> gr. '(IlEV, véd. imal)), ou le paradigme du parfait,
indéclinables, comme gr. homo ÈÉÂ-Bwp "souhait, désir", ËÂ-wp "proie",
par exemple i.-e.
r e sg. */Jojd-h2e "je sais" (> gr.
otBa, véd. véda), vs.
re
pl. */Jid-me- "nous savons" (> gr. homérique 'L8IlEV, véd. vidma').
TÉKIlWP "borne, terme", etc. 189 . Pratiquement, en baltique comme dans la
majorité des autres langues indo-européennes, l'apophonie propre aux fonnes collectives ne relève plus du critère du nombre.
II. SYSTÈME NOMINAL ET APOPHONIE DANS LA CATÉGORIE DU NOMBRE
Dans les noms, l'opposition du singulier et du pluriel (ainsi que du duel) n'est jamais liée en baltique à des phénomènes d'apophonie. En règle
Un seul cas mérite d'être examiné. Dans les langues baltiques, une désignation du "mot" (secondairement du "nom") présente différents degrés vocaliques, qui pourraient éventuellement refléter une opposition ancienne entre une forme de singulier et une forme de collectifl 90
:
n
générale, le degré radical demeure inchangé dans les différents nombres. On
- BALTIQUE *vird-a "mot" (nt.): emprunt baltique en finnois virsi
a identifié plus haut, dans le lituanien jèknos "foie" et le v. prussien
"chant d'église", v. finnois virsi "habitude, coutume", eston.
*iagno, une trace possible d'une variation apophonique entre une fonne
vir 's, virre (v. eston. wirt, wirtz, virts) "habitude, coutume,
ancienne de collectif *iekw-or (balt. *jek- dans le lit. jèknos) et une fonne
manière"; v. pro wlrds / wort "mot" (nom. sg. wlrds, 5x
récente de singulier *jokw-r/n- (baIt. *jak- dans le v. pro *iagno). Mais,
Catéchisme, par ex. III, 61 17
quelle que. soit la validité de cette analyse, on doit reconnaître que le
Catéchisme, par ex. III, 29 13 ; ? loc. sg. wirdai, III, 97 17 ;
contraste apophonique n'est plus directement associé en baltique à l'oppo-
nom. pl. wirdai, 5x Ille Catéchisme, par ex. 111,61 6 ; acc. pl.
sition des nombres; il n'apparaît plus qu'à travers une variation dialectale,
wirdans, 6x I1f Catéchisme, par ex. III, 69 3 ; gén. pl.
qui est en soi dépourvue de signification. On observe du reste que, dans les
wirdan, III, 103 3 ; dat. pl. wirdemans, 2x
anciennes formations de type hétéroclitique, le baltique a eu tendance à
par ex. III, 33 2) ; anthroponymes du vieux prussien
;
acc. sg. wirdan, 14x
me
me me
Catéchisme,
Tulewirde, Jowirde (ce dernier probablement emprunté en L'utilisation grammaticale de formes collectives pour marquer le nombre pluriel est un fait secondaire, du même type qu'en slave, l'évolution de la formation collective *-ija (type gr. q,pcÎTT)p ....... q,pUTplU "phratrie, ensemble des frères") vers une simple marque de pluriel (v. sI. 6paT(p)b / brat(r)n "frère" -- 6paT(p)Hla / brat(r)ija "frères", russe 6paT / brat "frère", sg. -- 6paTMI / brat'la "frères", pl.)
189. Voir Kurylowicz (1956, p. 85, note 52). 190. Cf. Trautmann (BSW, p. 360), Fraenkel (LEW, II, p. 1198), Maziulis (PKEZ, IV, p. 245-246), Karulis (1992, II, p. 487).
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
126
127
lituanien: prénom masc. Jovirdas, fém. Jovirdà, Jovirda,
approximative du lexème *vardas, commun au baltique orientaI194. Il
Jovirdé, cf. forme refaite masc. Jovardas, fém. Jovardà,
n'est pas du tout sûr, malgré Endzelms (DI, 1112, p. 63), que cette forme
Jovarda, Jovardé) 191 . La forme prussienne est de genre
*vardas provienne de *verdas
masculin, sans doute secondaire, dans le
me
Catéchisme. Le
« i.-e. *peret-om), avec une évolution
de
*ve- en *va-, dont il n'existe pas d'exemple incontestable.
genre neutre n'est restitué que par la comparaison indo-
Tout se passe donc comme si le substantif thématique présentait les
européenne: i.-e. *y[d"-om "mot" > germ. *wurda (got.
membra disjecta d'une ancienne structure apophonique, dans laquelle
waurd "mot, pil~.W, 'A.6yos", v. isl. ord, v. ang. word, ang.
auraient leur place un degré *e (i.-e. *perd'-, attesté en italique), un degré
word, vha. wort, aIl. Wort, nt.)192.
*0
(i.-e. *yord'-, attesté en baltique oriental) et un degré zéro ( i.-e.
*JJ[J-,
_ BALTIQUE *vard-as (masc.) ou *vard-a (nt.) "mot, nom": lit.
attesté en v. prussien, germanique). Pour tenter d'expliquer ces différents
vafdas "prénom" (cf. LKZ, XVIII, p. 133-137), pavardé
degrés vocaliques, l'hypothèse d'une alternance paradigmatique est a priori
"nom de famille" (cf. LKZ, IX, p. 666-667), lett. vârds
peu vraisemblable puisqu'il s'agit d'un mot appartenant au type
"mot, nom" (Mülenbachs-Endzelïns, ME, IV, p.500-502),
thématique. Récemment, une hypothèse radicale a été proposée par
Zinov ward / slowo "mot" (Z 34, cf. Zinkevicius, 1985,
Smoczyfiski (2000a, p. 204), qui voit dans le prussien wirdai "mots" (pl.)
p. 81). Les formes du baltique oriental supposent un
un emprunt au pluriel bas-allemand würde
prototype à degré *-0- radical, i.-e. *yorJ'-o-, dont aucune
Umlaut) ; le singulier wïrds serait secondaire. Dans cette perspective, le
autre langue indo-européenne ne fournit de trace. Le sens
problème apophonique ne se poserait plus, et l'on serait conduit à
ancien de "mot" est peut-être conservé dans le texte de Zinov.
n'attribuer au baltique qu'une formation ancienne, celle qui est attestée en
Le sens de "nom" s'est développé secondairement, suite à la
baltique oriental *vardas. Cependant, cette hypothèse doit être rejetée, car
disparition de l'ancienne désignation (i.-e. *h j n(e)h3men-),
l'antiquité du thème *vird- en baltique est prouvée par l'emprunt finnois
encore conservée en prussien (v. pro emmens, emnes "nom"
virsi "chant d'église" ("Kirchenlied, Gesangbuchlied, Lied" selon Ritter,
dans les Catéchismes).
1998, p. 150; cf. aussi Vaba, 1998, p. 177), qui remonte à une époque
Les correspondants italiques supposent encore un troisième degré vocalique radical: i.-e. *perJ'-om > lat. uerbum "mot" (nt.), ombrien UERFALE "templum, temple"
« "territoire consacré verbalement"). On ne
sait s'il
faut mentionner ici une forme couronienne werdas, citée au XVIIe siècle par M. Priitorius (Deliciae prussicae, 1681-1684, publié en 1703, Livre XVI, chap. III)193. Il est plus vraisemblable qu'il s'agit d'une notation
«
worde, cf. mha. worde, sans
bien antérieure au moyen bas-allemand. Il faut donc chercher une autre explication. Plus radicalement encore, Maziulis (PKEZ, IV, p. 246) a supposé que les différentes formes attestées en italique, en germanique et en baltique étaient des innovations parallèles et indépendantes à partir d'une même racine verbale *yer- / *y[- "dire", ce qui dispense de chercher à expliquer l'origine de leur apophonie. Pour réconcilier le radical *peret-, supposé par les langues italiques, et
191. Sur les anthroponymes prussiens, cf. Trautmann (1925, p. 157); sur les formes lituaniennes, cf. Kuzavinis & Savukynas (1994, p. 211-212). 192 Sur les formes germaniques, cf. Feist (1939, p. 554). 193. Cf. Mülenbachs-Endzelïns (ME, IV, p. 502).
le radical
*yorcl'-,
supposé par le baltique oriental, on peut postuler
194. En ce sens, Endzelïns (DI, 1I1z, p. 63).
129
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
128
li'' '
l'existence de deux formations dérivées parallèles, un neutre i.-e. *!Jercl'-om
collectif *
et un masculin *!Jorcl'-os, qui seraient dans le même rapport apophonique
lexicales (et dialectales) dépourvues de toute signification? Il paraît plus
que par exemple i.-e. *!Jerg-om (gr. Ëpyov, v. isl. verk, vha. werc "travail")
vraisemblable, dans un cadre baltique, d'opter pour la seconde solution. Le
et *yorg-os (arm. gorc "travail"). Dans cette perspective, l'apophonie
contraste apophonique entre le v. prussien wlrds et le lituanien vaFdas ne
radicale ne serait pas de nature grammaticale, mais lexicale; elle ne nous
conduit donc pas nécessairement à supposer qu'une apophonie numérique
concernerait pas ici directement. Cependant, s'agissant du degré zéro
ait été encore conservée en proto-baltique. En règle générale, dans le
*1)[cf-, plusieurs auteurs ont supposé qu'il pourrait résulter d'une
système nominal des langues baltiques, le critère du nombre n'est jamais
apophonie interne dans une forme de collectif, qui s'opposerait ainsi à une
associé à un phénomène d'apophonie.
-il (type lat. locus "lieu", pl. loca)? ou simples variantes
forme de singulier. En ce sens, par exemple, Hardarson (1987a, p. 90) III. SYSTÈME VERBAL ET APOPHONIE DANS LA CATÉGORIE DU
distingue:
NOMBRE
_ une forme de singulier *Mércf-om > lat. uerbum, sg. (d'où Dans les verbes, l'opposition des nombres pouvait s'accompagner en
secondairement un nouveau pluriel non apophonique uerba). _ une forme de collectif (de type "mésostatique") *1)[cf-éh2 > got.
indo-européen d'une apophonie radicale. Les formations thématiques n'en
waurda, pl. (d'où secondairement un nouveau singulier non
présentent aucune trace, et le degré radical y demeure constant du singulier
apophonique waurd).
au pluriel, par exemple i.-e.
Le couple apophonique *JJérri-om (sg.), vs. *y,cf-éh2 (collectit) serait ancien en indo-européen; il pourrait disposer d'au moins un parallèle, celui w w
du nom de la "roue", i.-e. *kwékwl-os ou -om (sg.), vs. *k ok l-éh2 (collectif), cf., d'une part, véd. cakraTfl "roue", nt. (cakral), masc., rare), lit. kêiklas, lett. kakIs "cou", masc., v. isl. hvél "roue", v. ang. hweol "wheel,
roue", nt. « i.-e. *kWék"'f,.,.). d'autre part, gr. A kukéil, B kokale "roue", masc.
«
KUKÀOS
"cercle", masc., tokh.
w i.-e. *k ok I_)19S.
r e sg.
re
*bhér-oh 2 , vs. 1
"porter" (gr. epÉp-w, vs. epÉp-OIJ.EV ; véd. bhar-ilmi, vs. bhar-iimasi; lat. fer-D, vs.fer-imus;
V.
sI. 6ep-x / ber-Q, vs. 6ep-eM'h / ber-em'b). Dans les
langues baltiques, la situation n'a pas changé sur ce point, et l'uniformité du radical est sans exception l96 - V. PRUSSIEN:
r e sg.
:
imm-a / ich neme "je prends" (III, 107 15),
re
vs. 1 pl. imm-imai / nemen "nous prenons" (III, 33 10 ; 83 16). - LITUANIEN: 1re sg. ved-ù "je conduis", vs. 1re pl. ved-ame "nous
W
Dans cette analyse, le baltique pourrait avoir conservé deux fonnes
conduisons" ; 1re sg. suk-ù "je tourne", vs. 1re pl. sùk-ame
distinctes, d'une part, un masculin thématique en baltique oriental (lit.
"nous tournons"; 1Te sg. im-ù "je prends", vs.
vafdas, lett. vârds "nom" < i.-e. *JJorcf-os), d'autre part, une fonne
"nous prenons".
d'origine collective en baltique occidental (v. pro wïrds "mot" < i.-e. *1)[ri-om, néo-singulier tiré du collectif i.-e. *JJ,ri-il). La coexistence de
pl. *bhér-ome-
ces
- LETTON:
r e sg. vçd-u re
"je conduis", vs.
re
r
e
pl. im-ame
pl. vçd-àm "nous
conduisons" ; 1 sg. aûg-u "je grandis", vs.
re
pl. aûg-àm
deux formes dans les différents dialectes baltiques est surprenante, et l'on peut se demander quel était leur rapport en proto-baltique: opposition d'un singulier *JJorri-os, concurrent lexical de *Merri- 0 m, et d'un pluriel195. Analyse en ce sens: Eichner (1985, p. 139-142).
196. Exemples de présents thématiques en baltique: Stang (1942, p. 104118). Sur la question de leur degré apophonique, voir les remarques de Kaukiené (1994, p. 107-108).
Catégorie du nombre
130
Catégorie du nombre
"nous grandissons"; 1re sg. fl?m-u "je prends", vs.
r e pl.
En revanche, une apophonie radicale était régulière dans le présent athématique ainsi que dans le parfait indo-européen. Pour le premier, l'ancienneté de l'apophonie radicale < e / 0 > est prouvée par des cas aussi
vs.
r
r
e
e
sg. *h1es-mi "je suis", 3 sg. *h1es-ti "il est", e
pl. *h1s-me- "nous sommes", 3 pl. *h1s-%nti "il
sont" (> véd. asmi, asti, vs. smai), santi; gr. È<JjJ.EV,
une certaine
EL<Jl,
ELjJ.l, È<JTl,
vs.
avec prothèse vocalique au pluriel); cf. aussi
lat. est, vs. sunt; got. ist, vs. sind; v. sI.
I€CTb /
jestl>, vs.
Chez Mazvydas (milieu du
xvr
vs.
r e pl. *h1i-me- "nous allons",
exemples parmi les plus anciens et les plus significatifs, notamment 199
."
SUIS,
(> véd. émi, éti, vs. imal), yanti; gr.
ELjJ.l,
d<Jl,
vs.
'ljJ.EV,
:
par ex. 20 10 (< *es-mi : lit. moderne esù).
- 1re sg. eimi "je vais", par ex. 225 4 « *ei-mi: lit. moderne einù). - 1re sg. dumi "je donne", par ex. 433 1
«
*duod-mi, cf. 3e p. dulti
"il donne" < *duod-ti, par ex. 3066 : lit. moderne duodu, duoda).
- r e sg.
«
miegmi "je dors", par ex. 5105
*mieg-mi: lit. moderne
miegù). - 3 p. pradelt "il commence", par ex. 499 13
« *ded-ti:
lit.
moderne pràdeda). e
e
3 pl. *hâ-%nti "ils vont"
siècle
siècle), on en trouve quelques
e
sÇJt'b. e _ VERBE "aller": Ire sg. *h1ei-mi "je vais", 3 sg. *h1ei-ti "il va", CXTh /
xvme
productivité l98 .
- 1re sg. ef' ml ".Je
clairs que les suivants:
e
wzrstmai "nous devenons" (III, 55 22 )197. Ils sont plus fréquents encore en vieux lituanien et paraissent même y avoir connu jusqu'au
fl?m-àm "nous prenons".
-VERBE "être":
131
- 3 p. paliekt "il laisse", par ex. 288 12
«
*/iek-ti: lit. moderne
pa/ieka). e
'Lam). e _ VERBE "frapper": 1re sg. *g...hen-mi "je frappe", 3 sg. *gwh en- ti "il e frappe", vs. 1re pl. *gwhn-me- "nous frappons", 3 pl.
- 3 p. gelbt "il aide", par ex. 1849 « *gelb-ti: lit. moderne gélbéja ou gélbi). e
«
- 3 p. gieft "il chante", par ex. 490 10
*gwhn-% nti "ils frappent" (> véd. hanmi, hanti, vs. ghnanti;
gieda).
hitt. kuenzi, vs. kunanzi).
- 3 p. ferkti "il garde", par ex. 703
e
«
*gied-ti: lit. moderne
*serg-ti: lit. moderne sérgi).
D'autres n'apparaissent que plus tardivement200
:
1. PRÉSENTS RADICAUX ATHÉMATIQUES
Dans les langues baltiques, les présents athématiques ont survécu jusqu'à une date relativement récente. Le vieux prussien en conserve avec certitude encore un petit nombre: v. pro 1re sg. asmai "je suis" (par ex. Ill, e 41 17), 3e p. eït "il va" (par ex. III, 29 18), 3 p. dast "il donne" (par ex. Ill, 53 ), 2e sg. waisei "tu sais" (par ex. III, 69 24), de manière secondaire 4
probablement 2e sg. etskïsai "tu te relèves" (III, 79 2) et peut-être 1re pl.
197. Endzelïns (1943, p. 107, § 224 = DI, N 2 , p. 132; 1944, p. 161-162, § 224), Zabrocki (1947, p. 305-327), Kortlandt (1987, p. 104; 1999, p. 17) Ostrowski (1994, p. 169). ' 198. Sur les verbes athématiques en v. lituanien, cf. Specht (1935, p. 82109), Stang (1942, p. 99-104; 1962, p. 161-170; 1966, p. 309-319), Otrçbski (GJL, III, p. 186-188, § 428-431 ; II, p. 308-310, § 510-515), Sabaliauskas (1957, p. 77-114), Kazlauskas (1968, p. 304-316), Zinkevicius (LKIG, Il, p. 99107, § 553-562; LKI, II, p. 212-214), Palionis (1995, p. 57), Schmalstieg (~OOO, p. 69-110). Sur leurs vestiges dans les dialectes modernes cf Zmkevicius (1966, p. 344-352). ' . 199. Stang (1929, p. 145-147, § 297-302). 200. Exemples de Dauksa: Senn (1934-1935, p. 86-122).
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
132
_ v. lit. 3e p. êst "il mange", Pastilla de Dauksa, DP, 1599, par ex. 113 33
allons")202. Mais quelques dialectes en gardent encore la trace203 , par exemple lit. dial.
« *ëd-ti: lit. moderne Ma).
_ 3e p. kliést' "il se trompe", DP, 1599, par ex. 175 15 «*klied-ti:
133
r e sg.
esmi 'je suis", rare (: lit. standard esù), lit. dial.
1re sg. eimi "je vais", à Lazünai, dialecte lituanien de Biélorussie (: lit. e
standard einù), lit. dial. 3 p. sniëgti "il neige" en haut-lituanien (: lit.
lit. moderne kliedi ou klieda). _ 3e p. apraust' "il se plaint", DP, 1599, par ex. 410 29 «*raud-ti:
standard snifiga), cf. par ex. sniëKéi "il neige" à Tverecius (Otrçbski, 1934,
lit. moderne rauda). _ 3e p. mêgt "il aime", DP, 1599, par ex. 223 21 «*mëg-ti: lit.
p. 354). Certains dialectes ont même développé des formes hybrides du sg. -mu, 2 e sg. -ml,. 3 e p. -ma (contamination de 1re sg. -mi ty pe
moderne mégsta). _ 3e p. welst "il possède", Catéchisme de Dauksa, DK, 1595, 407 tousse", Sirvydas, DTL
1 ,
p. 52, D TL
3 ,
p.99
"je vais", etc. (cf. duoma "il donne" à Tverecius : Otrçbski, 1934,
f!smu "je suis", à côté d'une forme ancienne esi "tu es" et de formes e
thématiques secondaires f!sàm "nous sommes", f!sat "vous êtes" (la 3
« *kos-mi: lit. moderne k6siu). Certaines formes athématiques attestées après le XVIe
siècle sont e
visiblement des innovations: ainsi periengt "il s'avance" (3 p. *zeng-tl), dans le Nouveau Testament de Chyliilski (1664, 192), en regard de la forme
à suffixe thématique iefigia, attestée chez Mazvydas (l re sg. iengiu, 2973) et seule employée en lituanien moderne (lit. iefigia); le cas est parallèle à celui du v. lit. koJmi ou koJiu "je tousse", tous deux attestés chez Sirvydas
(DTL 3 , p. 99). Plus récemment encore, au
+ fmales thématiques -u, -i, -a), par exemple lit. dial. esmù "je suis", eimù p. 317)204. La même innovation a eu lieu en letton standard, où l'on a
« *veld-ti : lit. moderne véldi).
_ r e sg. koJmi "je
re
xvme
siècle, on voit apparaître
des formes athématiques clairement secondaires comme stovmi "je me tiens debout", en regard du lituanien moderne st6viu (un groupe *-iÏVm- devrait
personne étant supplétive: letton ir). En règle générale, les présents athématiques attestés dans les langues baltiques n'offrent aucune trace d'apophonie radicale entre les formes du singulier et celles du pluriel. Il convient de distinguer deux catégories: d'une part, les verbes qui ont dans les autres langues indo-européennes des correspondants du type athématique; d'autre part, les verbes athématiques propres au baltique et qui appartiennent étymologiquement à d'autres types flexionnels. Seuls les verbes du premier type sont exploitables dans une étude consacrée à l'apophonie radicale héritée de l'indo-européen.
donner *-aum-, non *-ovm-), girdmi "j'entends", lydmi "j'accompagne",
merdmi "j'agonise", en regard du lituanien moderne girdiiù,lydiiù, 202. Liste de ces vestiges en lituanien moderne: Hiersche (1980, p. 221).
mérdiiu (*-dm- devrait aboutir à *_m_)201. La disparition des présents athématiques en lituanien est un fait récent, qui ne s'est réalisé que progressivement. En lituanien moderne, il n'existe plus de présents de ce type (mis à part quelques vestiges lexicalisés comme re
lit. 3e p. niez-fi dans l'idiomatisme man nieiti "cela me gratte", lit. 1 pl.
ei-mè dans l'idiomatisme eimè ! "allons-y!", littéralement "noUS
201. Stang (1942, p. 101), Zinkevicius (LKIG, II, p. 101, § 554).
203. Données dial~cta~es: Zinkevici~s (1966, p. 345-352, § 616-646). Exemples de verbes athemattques dans le dIalecte de Zietela: Vidugiris (1973 p. 201-202). ' 204. Sur ces formes, cf. van Wijk (1936-37, p. 95-98). On notera une forme le dialecte lituanien de DieveniSkés (haut-lituanien de l'Est) e p~ese~~e un ver~e véim,~ "je cherche" (1 re sg. véimu, 2 sg. véimi, 3 e p, véima, 1re p , velmam, 2 pl. ve lmat), reposant sur un ancien athématique *véimi (~.*v~id-mi). Ailleurs, on ne connaît qu'une forme suffixée (bas-lit. 1re sg. velzdziu , 2e sg: VelZ ,. d'l, 3e p. VelZ " d'" 1 Cherc h") er . Le verbe athématique est sans doute secondaire; un rapprochement avec le v. prussien waisei "tu sais" n'est que fortuit. Sur ce verbe, voir Otr~bski (GJL, III, p. 187, § 428), Zinkevicius (1966, p. 351, § 643), Schmalstieg (2000, p. 95). re~arquable:
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
134
À la suite de Stang (1942, p. 101), on peut faire entrer dans cette catégorie les verbes suivants: _ BALTIQUE
• v. prussien206 : 1re sg. asmai (12x Catéchismes), asmau (lx), asmu (2x), 2e sg. assai (7x), assei (4x), essei (lx), asse (2x), œsse (lx), esse (lx), 3e p. ast (123x), asch (lx), œst (3x), est (lx), hest e (lx), astits (2x), 1re pl. asmai (4x), 2 pl. astai (5x), asti (2x), estei
régulière ou à en modifier la distribution. L'arménien, par exemple, a génée e e ralisé le degré plein (lre sg. em, 2 sg. es, 3 sg. è, e pl. emk: 2 pl. ëk: 3e pl. en) sur le modèle des verbes thématiques (type sirem "aimer"). En vieux slave, l'apophonie n'est conservée qu'à la troisième personne (v. sI. e 3e sg. I€CTb / jest'b, vs. 3 pl. CXTb / s{Jt'b) ; ailleurs, le degré plein du radical a été généralisé (v. sI. 1re sg. I€CMb / jesmh, 2e sg. I€CH / jesi, mais aussi
e esme, 2 pl. este, re e 2 sg. eS_l,1 pl. e 3 p. athématique
ès-ti encore au sens général "être d'habitude".
e • letton moderne208 : type partiellement thématique 1re sg. ~s-mu, 2 e sg. es-i, r e pl. fs-àm, 2e pl. fs-at, mais 3 p. supplétive Ir.
L'antiquité du présent athématique est prouvée par la comparaison indoeuropéenne, cf. véd. asmi, asti, gr. €LilL, ÈaTL, hitt. esmi, eszi, got. im,
ist, lat. est (lre sg. sum secondaire), etc. Dans plusieurs langues, l'apophonie < e/" > qui sépare le singulier du pluriel est conservée: e • INDO-EUROPÉEN (IEW, p. 340-341 ; LIV, p. 214) 3 sg. *h1es-ti, vs. 3e pl. *h1s-%nti: véd. asti, vs. santi, gr. È GTL, vs. EtaL
«
Quelques langues présentent une tendance à éliminer cette apophonie
r
*es-mi "être,,205 :
(lx). re • v. lituanien207 : 1re sg. esmi, 2e sg. essi, 1 pl. 3e p. esti ou forme supplétive yra. re • lituanien moderne: type thématique 1 sg. es-ù, es-ame, 2 e pl. ès-ate, 3e p. supplétive yrà, mais
135
*ÈhEvaL avec prothèse vocalique, cf. mye. e-e-si), got. ist, vs.
sind, etc.
r e pl. I€CMb / jesm'b, 2e pl. I€CTe / jeste). Le serbo-croate a généralisé
le radical à degré plein dans les formes toniques (l re sg. jèsam, 2e sg. jèsi, re e 3e sg. jèste, 1 pl. jèsmo, 2 pl. jèste, 3e pl. jèsu) et a développé secondairement un radical à degré zéro dans les formes atones (1 re sg. sam, 2e sg. SI,. 1re p. 1 smo, 2 e p 1. ste, 3e pl. su), à l'exception de la troisième personne du singulier (3 e sg.je); le bulgare moderne n'a gardé que cette dernière série de formes (Ire sg. CbM / sam, 2 e sg. CH / si, 3e sg. e / e, e 1re pl. CMe / sme, 2 pl. CTe / ste, 3e pl. ca / sa). Dans une autre direction, le latin a réorganisé la structure apophonique ancienne, probablement selon le modèle des verbes semi-thématiques, mais dans des conditions difficiles e e e à préciser (d'où un radical *su- dans la r sg. sum, r pl. sumus, 3 pl. sunt, et un radical *es- dans la 2e sg. es, 3e sg. est, 2e pl. estis). Toutes ces réfections témoignent d'une tendance, ancienne en indo-européen, à faire disparaître l'apophonie radicale dans ce présent athématique. Les langues baltiques ont visiblement poussé cette tendance jusqu'à son terme puisqu'elles ne présentent plus aucune trace d'une apophonie radicale et ont généralisé le degré plein dans toutes les formes du paradigme (radical baltique unique *es- / *as-): voir par exemple v. pro al-mai "je suis" (par
205. Trautmann (BSW, p. 71), Mülenbachs-Endzelfns (ME, I, p. 359-360), Fraenkel (LEW, I, p. 124), Endzelfns (1923, p. 555-557, § 601), Senn (19341935, p. 92-99), MaZiulis (PKEZ, I, p. 101-103), Toporov (PrJ, I, p. 122-128), e Schmalstieg (2000, p. 69-75). Cf. LKZ (e, p. 1213). Sur la 2 pers. sg., cf. Bammesberger (1995, p. 65-73). Sur les formes slaves correspondantes, cf. Meillet (1906-1908, p. 206). 206. SUT le paradigme prussien, cf. Schmid (1968, p. 355-361). 207. Voir par ex. Klein (1653, p. 123). 208. Cf. Endzelfns (1938, p. 165 = DI, IVI, p. 481 ; 1948, p. 179, § 334 = DI, Nz, p. 555-556), Forssman (2001, p. 189-190).
ex. III, 41 17) et af-mai "nous sommes" (par ex. III, 55 5),
V.
lit. es-mi 'Je
suis" et es-me "nous sommes", lit. es-ù et es-ame, lett. ~s-mu et ~s-àm. Si cette généralisation s'est faite sur la base du degré plein et non sur celle du degré zéro, c'est probablement en raison de deux facteurs qu'on peut défmir de la manière suivante. Un facteur déterminant a pu être, tout d'abord, le souci d'éviter la réalisation de monosyllabes dans certaines formes du pluriel: la première personne du pluriel *h1s-me- et la deuxième personne
136
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
du pluriel *h1s-te auraient dû donner en baltique des monosyllabes *sme et
ejàm, 2 pl. ejat, mais 3 personne encore athématique iêt2 12 .
*ste, qui furent très tôt refaits en *es-me et *es-te. D'autre part, la perte de
la distinction morphologique du singulier et du pluriel à la troisième
• Zinov: inf. eid / chodzié "aller" (Z 65, cf. Zinkevicius, 1985, p.72).
personne, caractéristique des langues baltiques, et par suite la disparition de
Le présent athématique est ancien et dispose de correspondants directs dans
la fonne i.-e. *h1s-efonti, ont privé le paradigme du verbe "être" d'un terme
d'autres langues indo-européennes:
particulièrement important dans le contraste apophonique (le slave, précisément, n'a gardé l'apophonie qu'à la troisième personne: / je st 1>, vs.
I€CTh
s Qt 1». On pourrait suggérer l'hypothèse que
CH... T'h /
l'apophonie radicale a été perdue dans les langues baltiques en deux étapes:
e
137
e
e
• INDO-EUROPÉEN (IEW, p. 293-296 ; LIV, p. 207) 3 sg.
*h1ej-ti,
e
vs. 3 pl. *hJi-efonti: véd. éti, vs. yanti, gr. ETal, vs. taaL. Dans quelques langues, l'apophonie radicale est éliminée ou apparaît sous
pl. *s-me et 2 pl. *s-te
une forme modifiée. Le latin, qui a partiellement thématisé le verbe et l'a
(remplacées par *es-me et *es-te), commune au slave et au baltique;
en conséquence adapté au type semi-thématique, ne présente plus qu'un
re
[1] élimination des formes monosyllabiques e
[2] élimination de la 3 pl. *santi mais pas en slave (cf. v. sI.
« i.-e.
CH...Tb /
e
*h1s-onti), réalisée en baltique,
sQt1». En définitive, l'apophonie
radical au degré plein (l re sg. eo < * h1ejo, 2e sg. ïs < *h1ej-si, 3e sg. It < *h1ej-ti,
r e pl.
ïmus < * h1ej-mos, 2 pl. ïtis < *h1ej-te-, 3e pl. eunt e
radicale n'a laissé aucune trace dans les langues baltiques: sa disparition
*h1ej-onti). En slave, l'ancien présent athématique *h1ej-mi a été remplacé
doit être ancienne.
par une forme thématique suffixée (v. sI.
me
re
Catéchisme), 1 pl. pereimai
(lx), 3e p. eit (2x), pereit (2x), pereit (lx). • v. lituanien: 1re sg. eimi, 2e sg. eisi,
re
r e pl.
H,lleM'h
• lituanien moderne: type thématique suffixé 1re sg. einù, 2 sg. e
eini, 1 pl. einame, 2 pl. einate, 3 p. eina.
• letton moderne211 : type thématique
généralisé (v. sI.
HAH... /
id{J < sI. *jldQ
baltiques ont visiblement généralisé le degré plein du radical, comme le
e
e
e
idQ,
pl. eime, 2 pl. eite
(variante eiste)21 0, 3e p. eiti. re
H,Z:lH... /
/ idem1> "aller"), qui repose certainement sur un radical au degré zéro
- BALTIQUE *ei-mi 'aller"209:
• v. prussien: 2e sg. eisei (lx
r e sg.
r e sg. eju,
e
re
2 sg. ej, 1 pl.
209. Trautmann (BSW, p. 67), Mülenbachs-Endzelfns (ME, II, p. 79-81), Fraenkel (LEW, I, p. 119), Endzelïns (1923, p. 557-559, § 601), Senn (19341935, p. 106-111), Mafiulis (PIŒ2, I, p. 246-247), Toporov (PrJ, II, p. 20-22), Schmalstieg (2000, p. 85-88). Cf. LKZ (II, p. 1069-1107). 210. Par ex. Klein (1653, p. 121). La fonne eiste, au lieu de eite, doit avoir été tirée secondairement de la proportion analogique suivante: 1re pl. duome « *duod-me-), vs. 2 e pl. duoste « *duod-te), d'où 1re pl. eimè « *ei-me-), vs. X (x = 2e pl. eiste). Cf. Fraenkel (1928, p. 54-56). 211. Cf. Endzelïns (1938, p. 165 = DI, IV I, p. 481 ; 1948, p. 180, § 336 = DI, IV2, p. 556).
212. Variantes dans les dialectes lettons: Rudzfte (1970, p. 418-428). 213. Théoriquement, une voyelle initiale slave *i- peut provenir de i.-e. *ï-, *ej- ou *j1- « *1-). Ce dernier cas peut être illustré par les exemples suivants: sI. *igo "joug" « sI. *j1g-o < i.-e. *jug-om), *igra "jeu" « sI. *j1g-ra, cf. pol. gra "jeu"). S'agissant du slave idp, on pourrait a priori hésiter entre *eid- et *j1d-. En réalité, seule la seconde analyse est possible, cf. tch. jdu "je vais" « *1d-), en regard de jiti "aller" « *eid-). En outre, la voyelle ultra-brève *1 « i.-e. *.1), renforcée à l'initiale par une prothèse *j1- (> sI. *i-), réapparait en slave comme jer (sI. *1 > 0) lorsqu'elle se trouve à l'intérieur du mot, notamment après préverbe. Par là s'explique notamment le contraste, en serbocroate, entre idem "je vais" « sI. *j1d- < *1d-) et ôdem "je sors" « sI. *ot-1d-, aVec chute du jer intérieur et simplification du groupe de consonnes) ; il existe une variante àtïdem, refaite sur le simple idem. Le même principe invite à voir dans la voyelle initiale de l'infinitif sI. *lJi "aller" un ancien degré plein « *ei-ti) et non un ancien jer, car le vieux slave a régulièrement OT-HTH / ot-iti "sortir" comme HTH / iti "aller" (cf s.-cr. otïéi "sortir" comme iéi "aller"). Voir Meillet (1906-1908, p. 200; 1924, p. 72). Sur l'origine du suffixe *-dp, les opinions divergent: Szemerényi (1948, p. 13-14 = 1991, p. 2143-2144) et Kortlandt (1979, p. 52-53) font intervenir un ancien impératif en *-cI'i; Smoczyfiski (1986, p. 151-152) postule une formation verbale en *-cfh}efo-.
139
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
138
latin, mais probablement dans des conditions différentes: on peut ainsi
• v. prussien: le vieux prussien ne présente de ce verbe qu'une
mettre en parallèle v. pro ei-Jei "tu vas" (III, 81 1) et perei-mai "nous
forme participiale, peu significative pour la question qui nous
sortons" (III, 63 18), v. lit. ei-mi "je vais" et ei-me "nous allons", lit. einù et
occupe ici (v. pro senditans 1 gefalten "rassemblées", III, 83 19 , ace.
eTname, lett. eju et ejàm. Cette généralisation du degré plein a pu être
pl. fém. d'un participe *sen-dïta- "placé ensemble", cf. lituanien su-
favorisée, comme dans le cas du verbe "être", par la disparition en baltique
détas).
de la troisième personne du pluriel (qui aurait été probablement *janti ou
La formation de ce verbe dans les langues baltiques n'a pas encore été
*jenti < Ï.-e. *hâ-onti) au profit de la forme ancienne de troisième personne
entièrement élucidée. La forme du
du singulier (*ei-ti). Un autre facteur important a pu être la pression de
dans la Postilla de Bretkünas, 1591, l, 407, demmi chez Klein, 1653,
l'infmitif *ei-ti- (v. pro pereit 1 kommen "venir", lit. eTti, lett. iêt "aller"),
p. 117) ne saurait procéder d'un prototype à voyelle radicale longue *de-mi
qui présentait dès une date ancienne un degré plein du radical (cf. infinitif
«
ili < * ei-ti-, en regard de l'indicatif présent
Ï.-e.
V.
lituanien demi (1 re sg., par ex. demi
r e sg. *etehrmi), qui serait superposable au
hittite temi ''parler,
idQ
établir", uwa-temi "procurer, fournir", et, au redoublement près, au védique
< *i-J-efo-). Ce facteur ne pouvait jouer aucun rôle dans le verbe "être",
dadhiimi, au grec Tl8TlJ.l.l "placer". Cette analyse n'explique pas, tout
dont l'infinitif était supplétif (v. pro büton, lit. bûti, lett. bût "être").
d'abord, les formes à sifflante finale de thème, la 3 p. dest, qui ne peut
slave
HTH /
H,LlX /
e
e
provenir que d'un prototype *ded-ti, et la 2 pl. deste, qui suppose
- BALTIQUE *de(d)-mi "placer,,2I4: • V.
lituanien:
r e sg. demi « *ded-mi), 2 e sg. desi « e
1re pl. deme «*ded-me), 2
*ded-si)215,
pl. deste «*ded-te), 3
e
p. dest
parallèlement un prototype à consonne finale de thème *ded-te. Elle est contredite, d'autre part, par les dialectes lituaniens modernes, dans lesquels re
on trouve des formes à voyelle radicale brève, 1
« *ded-ti). re
e
• lituanien moderne: type thématique 1re sg. ded-ù, 2 sg. ded-i, 1
e
sg. demù, 3 p. dema
(contamination de demi et des fmales thématiques -u, -i, -a), cf. par ex. lit. dial. demù (Lamnai), d'œma, pàd'ema (Zietela)216. Enfin, elle ne permet
e
pl. ded-ame, 2e pl. did-ate, 3 p. did-a (inf. déti "placer"). e
• letton moderne: formation thématique suffixée 1re sg. dêju, 2 sg.
pas non plus de rendre compte de la genèse de la forme secondaire
dêj, 1re pl. dêjàtn, 2e pl. dêjat, 3e p. dêj (inf. dêt "pondre").
thématisée en lituanien standard (lit. dedù, dedi, deda), qui comporte une voyelle brève radicale. Il faut donc partir, en réalité, d'un radical lituanien à voyelle brève *ded-, dont la consonne finale s'est amure devant nasale *-m-
214. Trautmann (BSW, p. 47), Mülenbachs-Endzelfns (ME, 1, p. 464-465), Endzelfns (1948, p. 180, § 338 = DI, IV 2, p. 556), Fraenkel (1950, p. 293, § 51 ; LEW, I, p. 91), Senn (1934-1935, p. 99-102), Maiiulis (PKEt, IV, p.99), Schmalstieg (2000, p. 75-84). Cf. LKt (II, p. 441-458). 215, Dans les vieux textes lituaniens, il est parfois difficile, pour des, raisons graphiques, de distinguer la 2e sg. de l'indicatif présent (v. lit._ de~' = *desi < *ded-si) de la 2e sg. de l'indicatif futur (v. lit. desi = *desi < *de-s- z). Un exemple incontestable d'indicatif présent se trouve cependant dans I.e Catéchisme de Dauk~a (1595, 7 h): prideafJi (*pri-desi), qui traduit l'indicat~f présent polonais przydawasz "tu ajoutes" (446); un indicatif futur seraIt przydasz. Cf. Senn (1934-1935, p. 100). En revanche, un peu .plu~.loi.n, I~ forme pridêHi (DK, 7913) est certainement un futur, car elle tr~dUlt 1 md1catlf f~tur polonais przydasz "tu ajouteras" (506~ .et ~e t:ouve par a~,l1~urs e~, corrélatIOn, dans le texte lituanien, avec la forme d md1cat1f futur bus (11) sera.
re
(v. lit. 1 sg. demi <*ded-mi,
r
e
pl. deme <*ded-me) ainsi que devant
e
sifflante (2 sg. desi < *ded-si), et a donné une sifflante devant dentale e
e
(3 p. dest < *ded-ti, 2 pl. deste < *ded-te). Le letton ne présente aucune trace de ce radical *ded-; il a refait l'indicatif présent du verbe sur la base de l'infinitif (infinitif dêt ou dit "pondre" -+ indicatif présent dêju ou diju,
216. Zinkevicius (1966, p. 346, § 622) ; sur les formes du dialecte de Zietela, cf. Vidugiris (1998, p. 142-143). Il existe, à Zietela, une variante d'emu (*demu, -a), avec voyelle longue secondaire d'après l'infinitif defi. Cf. Schmalstieg (2000, p. 83).
140
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
141
e
d'après le modèle de set "semer" ~ ind. prés. seju), une innovation qui
«*cI'e-J(hl)-me-), 2 pl. dhatta «*c!e-cI'(hl)-te), 3e pl. dadhati
apparaît aussi en slave (v. sI. .r:rtTH / defi "placer" ~ indicatif présent
« *cl'e-cI'(hl)-{lti).
secondaire
.r:rt~, ~1;l€lUH
/ de}Q, dejesi). L'antiquité du radical lituanien
• IRANIEN: avest. rée. 3
e
sg. actif daSati "place, donne" e
*ded- est assurée non seulement par les données internes de la langue, mais
«*cI'e-cI'ehrti), v. avest. 3
aussi par la comparaison externe: on retrouve ce radical *ded- en slave
«
sg.
moyen dazdë "accepte"
*cI'e-cI'(hl)-toi).
/ deidQ, deidesi < pré-slave *ded-}efo-, cf. aussi le substantif postverbal
• GRE C: r sg. Tl8TlI-.Ll « *cI'i-cI'hrme-).
v. sI. Ha~e)l(~a / nadeida "espoir, ÈÀrrlS-" < *-ded-jëi'f17. Les données
• GERMANIQUE: vha. prétérit teta, talun "faire".
(v. sI.
~tTH
/ deti "placer" -+ indicatif présent primaire
~e)K.r:v~., ~e)KJlellIH
balto-slaves invitent donc à reconstruire un présent radical athématique 1re sg. *ded-mi, conservé comme demi en v. lituanien, mais éliminé par thématisation simple en lituanien moderne (lit. ded-ù, réfection du type i.-e.
*gwh en_mi "frapper' ~ *gv.hen-o
> v. sI. )l(eHX / ienQ, lit. genù
"chasser") et par suffixation thématique en *-j%- en slave (*ded-jo > v. sI. ~e)l(.ux / deidQ, réfection du type i.-e. *g..hen-mi "frapper" -+*g..hen-jo
> gr. SEl vw "tuer"). Cette reconstruction soulève toutefois plusieurs
questions. La plus importante est celle de l'origine de ce radical *ded-. D'un point de vue synchronique, le radical *ded- est caractérisé, en regard de l'infinitif quantitative
*de-ti-
(lit. d eti, lett. dêt ou det), par une apophonie
« e/e»
et par une suffixation en dentale (-d-f18. Mais,
d'un point de vue diachronique, *ded- représente certainement l'aboutissement d'un ancien thème athématique à redoublement: Ï.-e. 1re sg.
*J'e-J'eh1-(mi) , 1re
pl. *dhe-J'h1-(me), constitué sur la racine i.-e. *J'eh1-
"placer" et attesté dans diverses langues: • VÉDIQUE:
r
e
« *J'e-Jeh1-si),
e
3 sg.
«
i. -e. *
cl' i-cI'ehrm i), r e
pl. Tl8EIJ.EV
Le thème *ded- du baltique et du slave représente, selon toute vraisemblance, l'ancienne forme faible de ce thème à redoublement (i.-e. *J'eJ'h1- > balto-slave *ded-, avec chute de la laryngale en syllabe
intérieure). À l'origine, cette forme faible était propre aux formes du pluriel actif, ainsi qu'à toutes les formes du moyen. La généralisation du thème faible en balto-slave s'explique vraisemblablement par une tendance de ces langues à ne conserver, dans la classe des verbes athématiques, que des thèmes monosyllabiques. On observe, en effet, que les verbes athématiques du baltique et du slave présentent tous sans exception un thème monosyllabique219 : en slave on a I€CMb / jes-mb "être", IaMb / ja-mb "manger", ~aMb / da-mb "donner", BtMb / ve-mb "savoir", en baltique lit. es-mi "être",
ei-mi "aller", de-mi "placer", duo-mi "donner", é-mi "manger", etc. Non
seulement toutes les formations athématiques suffixées ont disparu en balto-slave22o , mais, dans les formations radicales, seules les variantes apophoniques qui présentaient un thème monosyllabique ont été gardées.
« i.-e. * J'e-J'eh1-mi), 2 sg. dadhâsi e dadhâti « *Je-Jehl-ti), r pl. dadhmal}
sg. dadhâmi
e
e
Dès lors, on comprend pourquoi le balto-slave a généralisé le thème faible
219. Liste de présents athématiques en slave et en baltique chez Stang (1942, p. 21-22; p. 99-104). 217. Cf. LIV (p. 118-119). 218. En ce sens, par exemple Zinkevicius (LKIG, II, p. 89, § 539), qui rassemble dans un même type ("suffixe -d-") les indicatifs prése~ts lit.. vér-~-a. (inf. vir-ti "cuire"), lit. duo-d-a (inf. duo-ti "donner") et ht. de-d-a (mf: d~-tl "placer"). Cette analyse est certainement juste en tant que descr.lptl~~ synchronique, comme le rappelle Bammesberger (1~92,_ p. 9, note Il), mal~ e n'a aucun fondement diachronique. Sur le suffixe -do en balto-slave, VOIr les analyses de Smoczynski (1987a, p. 197-212), Bammesberger (1992, p. 7-13).
220. Ainsi, dès une date ancienne, la formation indo-européenne en *-neh2-mi> *-niimi (type gr. 8aIJ.VTJI-ll "dompter") a été thématisée en baltique: elle a pu donner *-neh2-jefo- > *-nii-ja ou *-nh 2-efo- > *-na (cf. balt. *giiu-nii-ti "prendre, recevoir" -+ pro engaunai "il reçoit", III, 133 9 < *-nii-ja-, lit. gauna "il reçoit" < *-na-). Le fait important est que cette formation a perdu son caractère athématique dès la préhistoire des langues baltiques. Cf. Stang (1942, p. 139). Analyse différente de la forme prussienne chez Endzelfns (1942, p. 455-456 == DI, IIh, p. 569).
142
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
monosyllabique *ded- « Ï.-e. *J'eJ'hr ) et non le thème fort dissyllabique
de thématisation et le fait que la consonne dentale finale du radical ded-,
tdedë- « Ï.-e.
qui n'était pas directement attestée dans le paradigme athématique, ait pu
*JeJ'eh 1-).
Par la suite, l'existence d'un redoublement n'a
plus été sentie, si bien que
*ded-
a été traité, en baltique et en slave,
réapparaître distinctement dans le paradigme thématique.
comme un radical à part entière. S'agissant des formes baltiques, un
- BALTIQUE *do(d)-mi "donner,,222 :
problème reste d'ailleurs posé, celui de savoir comment le radical *ded- a
• v.
pu réapparaître dans les formes thématisées secondaires (type lituanien
e
2 pl. duoste
paradigme athématique. Descriptivement, en effet, les fonnes athématiques
r e pl. de-me) et un radical des- (3 e p. des-tri),
1re pl. duome
« *duod-me),
« *duod-te). e
• letton modeme224 : type thématique
re
sg. duod-u (dial.
re
e
r e sg.
duôd-u (dial. duô-mu),
e
2 sg. duôd, 3 p. duôd, 1re pl. duôd-àm, 2 e pl. duôd-at. e
• v. prussien: 2 sg. dose "tu donnes" (III, 83 8), 3e p. dost "il
cf. aussi 1923, p. 560), le thème à dentale fmale *ded- (*dod- dans le verbe
donne" (7x Catéchismes), dast (4x Catéchismes).
"donner"), sur lequel reposent les formes secondairement thématisées,
• Zinov: inf. dodi / dawaé "donner" (Z 13, cf. Zinkevicius, 1985, p.71).
pourrait avoir existé encore distinctement dans une forme de troisième e
cf. véd. 3 pl.
e
dtidhati; "donner": balt. *dod-anti ou *dod-inti, cf. véd. 3 pl. dtidati, v. /
« *duod-ti),
sg. duosi
duod-ate.
Bammesberger (1983). Selon Endzelïns (1938, p. 166 = DI, NI, p. 481,
sI. na,z:V•. T'b
duomi «*duod-mi), 2e
duo-mu)223 , 2 sg. duod-i, 3 p. duod-a, 1 pl. duod-ame, 2 e pl.
2e pl.
a fait l'objet de plusieurs analyses détaillées, notamment d'un article de
*ded-anti ou *ded-inti,
p. duost
e
des-te); mais elles n'avaient aucune trace immédiate de *ded-. La question
personne du pluriel ("placer": balt.
e
r e sg.
• lituanien moderne: type thématique
du vieux lituanien ne présentaient que deux radicaux: un radical de- (1 re sg. e
lituanien:
« *duod-si), 3
moderne ded-ù, d€d-a), alors qu'il n'était nulle part manifeste dans le
de-mi,2 sg. de-si,
143
dadf/t'b), avant que celle-ci ne disparaisse en baltique.
L'hypothèse est chronologiquement douteuse, car elle suppose que le processus de thématisation ait été plus ancien que la disparition de la 3e pl., ce qui est peu vraisemblable221 • Alternativement, on pourrait supposer que la thématisation a eu lieu à une époque où la séquence *ded-me (1 re pl.) n'avait pas encore évolué en *de-me, ce qui est également
peu plausible. La seule solution convaincante est celle de Stang (1966, p. 318) et de Bammesberger (1983, p. 130-132), selon qui la thématisation
L'histoire de ce verbe est parallèle à celle de *ded-mi ''placer'' et pose des problèmes similaires. Selon certains savants, la forme du v. lit. duomi 'je donne" (Ire sg. dumi, par ex. Mazvydas, 433 1 , etc., Klein, 1653, p. 116117) proviendrait directement d'un prototype i-e. *do-mi
«
i.-e. *dehrmz),
qui serait superposable à l'arm. tam "je donne", au vha. tuon "donner"
« «
i.-e. *dehrmz) et, au redoublement près, au védique déldomi "donner" Ï.-e. *de-dehrmi, cf. avest. réc. 3e sg. daOiiti "il donne") ainsi qu'au
grec 8t8wl-ll "donner" « Ï.-e. *di-deh3-mi). Dans cette analyse, la forme de e
3 p. *dosti (v. lit. duost(i), v. pro dost) et celle de 2e pl. *doste (v. lit.
du radical *ded- s'est faite sur la base de la forme participiale *ded-ant-
« i.-e. *cI'ed'h1-ont-, cf. lit. ded-çs,
participe présent actif), réinterprétée
secondairement comme une forme thématique *ded-a-nt-. Cette hypothèse, acceptée par Schmalstieg (2000, p. 81-82), explique à la fois le processus
221. Critique chez Fraenkel (1950, p. 297, § 54).
222. Trautmann (BSW, p. 56-57), Mülenhachs-Endzelfns (ME, 1, p. 535-536), Fraenkel (1950, p. 293, § 51; LEW, l, p. 111-112), Endzelfns (1923, p. 559-560, § 601), Senn (1934-1935, p. 99-102), Maziulis (PKEZ, L p. 180-181), Toporov (PrJ, 1, p. 302-307), Szemerényi (1948, p. 7-12 = 1991, p. 2137-2142), Schmalstieg (2000, p. 75-84). Cf. aussi LKZ (II, p. 877-895). 223. Sur duomu, cf. van Wijk (1936-1937, p. 95-98). 224. Cf. Endzelfns (1938, p. 165 = DI, IV}, p. 481 ; 1948, p. 180, § 335 IV2, p. 556), Forssman (2001, p. 191-192).
=
DI,
144
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
duoste), qui supposent une consonne dentale finale (balt.
*dod-ti
145
et
*dosti un caractère secondaire, alors qu'elle est vraisemblablement ancienne
*dod-te), doivent être tenues pour secondaires en regard des formes
en balto-slave: en effet, elle apparaît non seulement en lituanien (v. lit.
« i.-e. *dehrti,
cf. véd. dadati, gr. OU3WŒl) et *d8-te
duosti, duost), mais aussi en v. prussien (v. pr. dast) et en slave (v. sI.
(avec degré plein secondaire < i.-e. *d(e)hrte, cf. véd. datte, gr. OlOOTE).
,Il;aCT'b / dast'b). La flexion du verbe athématique slave est d'ailleurs
Elles pourraient alors résulter de l'analogie du verbe demi "placer" ou du
rigoureusement parallèle à celle de son correspondant en v. lituanien. On
verbe ëmi "manger", en vertu de la proportion analogique suivante:
peut ainsi mettre en parallèle :
attendues *do-ti
· re
sg. demi "placer"
« *ded-mi) , vs. 3e p. desti « *ded-tl),
« *ded-ti) e r sg. ëmi "manger" « *ëd-mi) , vs. 3e p. ësti « *ëd-ti), 2 e pl. ëste « *ëd-ti)
v. LIT1JANIEN
SLAVE
e
RECONSTRUCTION
2 pl. deste
1re sg.
,Il;aMb / damb
duomi
*dod-mi > *domi
2e sg.
,Il;aCH 1 dasi
duosi
*dod-sie > *dosï
3 sg.
,Il;aCTh 1 dast'b
duost(i)
*dod-ti> *dosti
r
pl.
,Il;aM'b / dam'b
duome
*dod-me- > *dome
e
Cette analyse, qui remonte à un article de Koi'inek (1938, p. 445) à propos
2 pl.
,Il;aCTe / daste
duoste
*dod-te> *doste
du correspondant slave ,Il;aCTh 1 dast'b (3 e sg.), a été reprise notamment par
3 pl.
e
,Il;a,ll;A.Th 1 dad?t'b
-
(*dod-1J.ti> *dodinti)
-+
d'où par analogie:
re
1 sg. domi "donner"
e
« *do-mi) , vs. x (x = 3 p. *dosti, 2 pl. e
e
*doste).
e
Fraenkel (1950, p. 293, § 52), qui souligne la proximité, en slave, des verbes ,Il;aMb 1 damb "donner" et IaMb 1jamb "manger" (cf. v. sI. e
e
Dans ces conditions, il est préférable de partir d'un radical unique *dod-, à
3 sg. ,Il;aCTh 1 dast'b et IaCTh 1jast'b, 3 pl. ,Il;a,ll;A.Th 1 dad?t'b et Ia,ll;A.Tb
consonne dentale finale (sI. *dad-, baIt. *dod- > v. pro *dad-, letto-
/ jad?t'b)225 , proximité qui va parfois jusqu'au parallélisme de leurs
lituanien *duod-), qui apparaît seul susceptible d'expliquer l'ensemble du
dérivés nominaux (cf. par ex. russe npo,ll;a.IKa 1 prodaza "vente" < *-dad-ja,
paradigme: *dod- aboutit à *do- devant nasale *-m-
et russe e.IKa 1 eza "nourriture" < *ëd-ja). Dans le même sens, Szemerényi
devant sifflante (2 sg.), à *dos- devant consonne dentale (3 e sg., 2e pL).
(1948, p. 9 = 1991, p. 2139) suppose que le présent slave ,Il;aMb 1 damb
L'origine de ce radical *dod- est peu claire. L'hypothèse d'un suffixe indo-
e
provient de *do-mi, et que c'est d'abord la 3 pl. (*dçtu) qui a été refaite en ,Il;a,ll;A.Th / dad?t'b, d'après 1a,ll;A.Tb 1 j ad?t'b226 • Toutefois, cette hypothèse e
me semble devoir être rejetée, car elle conduit à attribuer à la forme de 3 p.
(1re
sg. et 1re pl.) et
e
européen *-d- ou *-J- est peu satisfaisante dans une formation athématique de ce type. Le même problème s'est posé un peu plus haut pour le verbe athématique du balto-slave *ded-mi "placer", et l'on a vu qu'en réalité ce radical *ded- représentait l'aboutissement d'un ancien thème à redou-
225. En serbo-croate, cette proximité pourrait se manifester à travers une innovation commune: 1re sg. dddêm "donner" au lieu de l'ancien dâm, jèdêm "manger" au lieu de l'ancienjêm, toutes deux d'après la 3e personne du pluriel dddû,jèdû. Mais cette innovation est plus générale, puisqu'elle touche aussi znâm -+ znddêm "connaître", imâm -+ imddêm "avoir" (malgré la différence des 3 e pl. anciennes znàjii et imajii). 226. Conception comparable chez Kurylowicz (1967 = 1975, II, p. 465469).
blement (i.-e. *eteJh r ). Depuis longtemps, la même hypothèse a été fonnulée à propos du balto-slave *dod-, et on a rapproché ce radical immotivé en synchronie du présent athématique à redoublement i.-e. 1re sg.
*de-dehrmi, vs.
r e pl. *de-dhrme-, qui a conservé une apophonie ancienne
< e/0> dans plusieurs langues indo-européennes:
146
Catégorie du nombre • INDO-lRANIEN: véd.
r e sg. dadami «i.-e. *de-deh3-mi), vs. r e
pl. dadmalJ « i.-e. *de-dhrme-). • GREC:
r e sg. 8(8wl-.ll «
147
Catégorie du nombre
· r e sg. *dedomi, 2e sg. *dedosi, 3e sg. *dedoti, r e pl. e
*ded(:J)me-,
e
2 pl. *ded(:J)te, 3 pl. *ded(:J)nti.
i.-e. *di-dehrmi), vs.
re
pl. 8(8ojJ.EV
« i.-e. *di-dhrme-).
Postérieurement, le redoublement aurait été éliminé au singulier, afin de ramener l'ensemble du paradigme à un même nombre de syllabes (souci
Le problème est d'expliquer le timbre vocalique de ce qui apparaît comme l'ancienne voyelle du redoublement en balto-slave. Le plus simple serait d'admettre une contamination, en balto-slave, d'un thème pourvu d'un redoublement *ded- « i.-e. *de-dhr ), ou *dëd- (avec effet de la loi de Winter), et d'un thème sans redoublement *do-
«
i.-e. *dehr ), d'où
*dod-. On pourrait, par exemple, supposer une influence du vocalisme
d'isosyllabisme), d'où:
. r e sg. *domi, 2e sg. *dosi,
3e sg. *doti,
r e pl. *dedme-, 2e
pl.
*dedte.
Enfm, le vocalisme long du singulier aurait été étendu au pluriel, pour le distinguer des formes homonymes du verbe
* dëti "placer" (lequel,
par
radical de l'infinitif *do-ti- (lit. duoti, v. sI. ,[laTH / dati) sur celui de
contrecoup, était amené à généraliser le vocalisme bref). Il en résultait un
l'indicatif présent *ded-, d'où un radical hybride *dod_227 , influence qui
paradigme complexe:
pourrait s'expliquer, avec une certaine vraisemblance, par le souci d'éviter
· r e sg. *domi, 2e sg.
une confusion entre les deux radicaux à redoublement hérités en balto-slave
*dodte.
*ded- 'donner'
«
i.-e. *de-dh3-) et *ded- 'placer' « i.-e. *cI'e-J'h/-). Cette
analyse est acceptée par de nombreux linguistes et présente effectivement une certaine
plausibilité228 .
*dosi, 3e sg. *doti,
r e pl. *dodme-, 2e
Ce paradigme était assimilable au paradigme du verbe
*ësti
pl.
''manger'',
pourvu d'une dentale finale, ce qui pouvait conduire à créer par analogie
Plusieurs solutions alternatives ont été pro-
une troisième personne du singulier *dosfi (au lieu de *dofi) sur le modèle
posées. Dans un article publié en russe en 1958, puis en lituanien en 1962,
de *ësti. Alternativement, MélZiulis (1958, p. 10-13) propose une autre
MélZiulis a examiné différentes pistes susceptibles d'expliquer la genèse du
hypothèse fondée sur l'idée que le redoublement verbal est une innovation
lituanien duoda. Il évoque, tout d'abord, une première hypothèse fondée
dialectale dans les langues indo-européennes et n'a jamais existé en balto-
sur l'idée que le redoublement verbal est une formation ancienne en indo-
slave. Il part alors d'un paradigme sans redoublement:
européen. Dans cette perspective, MélZiulis (1958, p. 7-10) suppose que le balto-slave a hérité de l'indo-européen un paradigme à redoublement:
· r e sg. *domi, 2e
sg. *dosi, 3e sg. *doti,
Ire
pl. *dome-, 2e pl.
*dote, 3e pl. *donti.
Dans ce paradigme, la forme de 3e pl. posait un problème phonétique, qui 227. Hypothèse différente chez Meillet (1924, p. 171), qui admet une contamination d'un présent à redoublement (*de-do- : *de-d~, cf. grec et indoiranien) et d'un présent radical (*do-: *d~, cf. latin). Peu vraisemblable est la suggestion de Vaillant (1938, p. 22), selon qui "*dodmi est l'ancien parfaità redoublement, véd. dadé, lat. dedï, qui a pris le vocalisme de l'aoriste, sI. da-x"b, lit. duoti (inf.) pour s'écarter du présent à redoublement *ded- (v. sI. deid~) de deti (placer)". Comme le soulignent àjuste titre Stang (1942, p. 22, note 1) et Bammesberger (1992, p. 9, note 16), il est difficile, en raison de son sens, d'admettre que le présent balto-slave *domi soit un ancien parfait. 228. En ce sens, Stang (1942, p. 22), Hiersche (1980, p. 221), Bammesberger (1992, p. 9). Analyse aberrante: Sabaliauskas (1957, p. 91).
aurait été résolu par l'insertion d'un *-d- sur le modèle d'autres verbes comme *ësti "manger" ; par la suite, la dentale fmale se serait étendue à d'autres formes sur le même modèle. De ces deux hypothèses, MélZiulis (1958, p. 13) avoue préférer la seconde. Toutes deux ne me paraissent guère plausibles: la première suppose, à des stades divers de l'évolution historique, l'existence de paradigmes aberrants (avec ou sans redoublement) modifiés par des réfections incomplètes, auxquelles on a peine à croire; la
seconde part de la troisième personne du pluriel, dont la survie en proto-
• "placer" :
baltique n'est pas assurée.
• "donner" :
On évoquera enfm une dernière hypothèse proposée par Hamp dans un article très bref (1991, p.
r e sg. *etèdhmi, vs. r e pl. *d'eJ'mè(s) r e sg. *dâdmi, vs. r e pl. *dodmè(s).
L'hypothèse est intéressante, en ce qu'elle suppose que l'apophonie
Selon Hamp, l'apophonie
touchant la catégorie du nombre a été conservée encore récemment dans la
paradigmatique entre le singulier et le pluriel devait être encore conservée
préhistoire du baltique et du slave. Mais elle soulève à mon sens une
en balto-slave, d'où, pour les verbes "placer" et "donner", les contrastes
difficulté: elle conduit à admettre, au moins dans le sentiment linguistique
suivants:
des locuteurs, que l'apophonie se réalisait, d'une part, entre *eteeti.-mi et
• "placer" : • "donner" :
89-90)229.
149
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
148
e sg. *d'éJ'emi, vs. 1re pl. *J'eJmés e 1re sg. *dédomi, vs. r pl. *dedmés.
r
Cette structure aurait secondairement évolué de la manière suivante: • "placer":
re sg. *d'éJ'emi, vs. 1re pl. *d'eJmé(s).
• "donner":
r e sg. "'!'dédomi, vs. r e pl. *dodmé(s),
*J'gJ'mes, d'autre part, entre *dedQ-mi et x (x = *dQdmes), c'est-à-dire entre la voyelle du radical au singulier et celle du redoublement au pluriel; or ces deux voyelles ont peu de chances d'avoir constitué un contraste apophonique, même secondairement. Une solution plus simple serait, me semble-t-il, la suivante. On pourrait concevoir, à titre d'hypothèse, que le balto-slave n'a conservé, dès
avec un même rapport apophonique des timbres vocaliques prédésinentiels,
une date très ancienne, que la forme faible du paradigme apophonique, en
d'une part < e/ e > dans le verbe ''placer'', d'autre part < 0 / x > (x = 0)
accord avec le principe général défmi plus haut, selon lequel le balto-slave
dans le verbe "donner" (tous deux secondaires par rapport à l'apophonie
n'aurait conservé, pour les verbes athématiques, que des thèmes
balto-slave héritée de l'indo-européen <
v /121>,
cf. i.-e. < eh l / hl > et
monosyllabiques. On reconstruirait donc deux verbes proches *ded-mi
h 3 ». Par la suite, les thèmes faibles auraient été généralisés, et
"placer" (secondaire d'après *ded-me < i.-e. *d'ed'hrme-, gr. TlSEIJ.EV) et
fmalement la loi de Winter aurait produit une voyelle longue dans le verbe
*ded-mi "donner" (secondaire d'après *ded-me < Ï.-e. *dedhrme-, gr.
< eh3
/
"donner", ce qui modifiait le contraste entre les deux verbes • "placer": • "donner":
230
:
re 1re sg. *d'èJ'mi, vs. 1 pl. *d'ed'mè(s) re 1re sg. *dodmi, vs. 1 pl. *dodmè(s),
et après effet de la loi de Winter:
8(8oIJ.EV), chacun d'entre eux étant associé à un infinitif pourvu d'une voyelle radicale longue
*de-ti-
et
*do-ti.
Par la suite, un rapport
apophonique secondaire pouvait s'établir entre ces infinitifs et leurs indicatifs présents, visant à imposer le même timbre vocalique dans chacun des deux verbes, d'où, sur la base du rapport apophonique < ë /
e>
existant
dans *de-ti-, vs. *ded-mi, la création d'un rapport comparable < 0 / '0 > 229. Dans un article plus ancien (1972, p. 83-85), Hamp avait déjà abor~é la
question de l'évolution des verbes "mettre" et "donner" en balto-slave. MaiS la solution qu'il proposait alors impliquait un déséquilibre fondam~nt~l ent~e les deux verbes: *i'écl'ëmi, vs. 1re pl. *dhecl'més "placer" aurait e;olue vers *dédmi, vs. 1re pl. *dedmés par uniformisation, alors que, dans le meme ~emps, *d 'd- . sire pl *dedmés "donner" aurait conservé son alternance et etendu e oml, v . . . 1 b " 1 r" le vocalisme long *0 au pluriel pour éviter la. confUSIOn avec e ver e pace . Cette hypothèse paraît acceptée par Schmalstteg (2000, p. 78). , 230. Le recours à la loi de Winter pour expliquer la préhistoire de lit. dedu et duodu se trouve déjà, en des termes différents, chez Kortlandt (1977, p. 323).
dans *do-ti-, vs. x (x =
*dod-mi). Cette forme *dod-mi aurait
postérieurement subi l'effet de la loi de Winter, d'où *dod-mi, dont procèdent les formes slaves et baltiques apparentées. Cette analyse n'implique pas nécessairement que l'apophonie numérique qui opposait en indo-européen le radical du singulier et celui du pluriel ait été conservée dans la préhistoire balto-slave. En baltique comme en slave, le thème faible
150
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
a été généralisé, et l'apophonie radicale n'a laissé aucune trace.
lituanien et le letton modernes ont thématisé le verbe, sans doute très tôt:
Synchroniquement, *dod- fonctionne en balto-slave comme un radical
dès le
immobile, et l'apophonie radicale n'y a plus aucune place231 .
iszedu (*is-edu) et itemi (*is-émi) "dévorer" (DTL 3 , p. 496, traduisant
re
e
• v. lituanien: 1 sg. émi « *ëd-mi), 2 sg. ési
«
*ëd-ti),
r
«
e
*ëd-si), 3 p. ést
pl. éme « *ëd-me), 2 pl. éste « *ëd-te). re
• lituanien moderne: type thématique 1
lituaniens modernes, on trouve trace d'une formation hybride ému, qui résulte de la contamination de la forme athématique 1re sg. *em i et de la
e
sg. éd-u "manger (en e
parlant d'animaux), bouffer (vulg.)" (dialectal é-mu), 2 sg. ed-i, re
siècle, le dictionnaire de Sirvydas présente conjointement
wyjadam / DepaIeor, comedo bona alicuius). Dans plusieurs dialectes
- BALTIQUE *ëd-mi "manger,,232 : e
XVIIe
151
fmale thématique -u. Les formes athématiques sont anciennes en baltique et procèdent d'un ancien verbe indo-européen (1 re sg. *h1ëd-mi), dont
3 p. éd-a, 1 pl. ed-ame, 2 pl. éd-ate; le verbe courant signifiant
l'existence est attestée par le témoignage de plusieurs langues (lEW,
"manger" est wilgyti.
p. 287-289, LIV, p. 205-206):
e
e
re
• letton moderne: type thématique 1 sg. fd-u (dialectal f-mu), e
e
re
e
« *ëd-sf), 3
2 sg. éd, 3 p. fd, 1 pl. fd-àm, 2 pl. fd-at.
r e sg.
- V. SLAVE: e
laMb / jamb
sg. laCT'b / jast'b e
pour la question qui nous occupe ici, à savoir un infmitif ïst / essen
« *ëd-me-), 2 pl. JaCTe « *ëd-1)ti) "manger".
"manger" (3x Catéchismes), ist (2x), istwei (III, 105 13 ), istwe (lll,
- SANSKRIT VÉDIQUE: 1
• v. prussien: le v. prussien n'a que des formes peu significatives
105 15 ), un participe prétérit actif ïduns / gessen [gegessen] "qui a e
/ jaste re
«
e
*h1ed-si), 3 sg. aUi
e
«
«
«
*ëd-mi), 2 e sg. laC" / jasi
« *ëd-ti), r e
*ëd-te), 3 pl. JaIlÂT'b / jad?t'b
sg. admi
e
«
2 pl. attha
(III, 75 4), idaiti (III, 87 17), ydieyti (II, 13 8), edeitte (l, 13 8).
r sg. e-id-mi (ëdm i), (apophonie < e/ a > secondaire).
re
«
*h1ed-mi), 2e sg. atsi
« *h1ed-ti), r e pl. admasi «
mangé" (III, 105 8) et un impératif 2 pl. ïdeiti / esset "mangez!"
- HITTITE:
pl. laM'b / jam'b
e
*h1ed-te), 3 pl. adanti e
*h1ed-me-),
*h1ed-efonti) "manger". 3e pl. adanzi
"manger"
Le paradigme athématique est bien conservé en vieux lituanien: la 1 sg. 3 1 emi (*émi) se rencontre par exemple chez Sirvydas (DTL , p. 47; DTL ,
- GREC HOMÉRIQUE: infinitif Ë8IJ.EvaL, subjonctif (.... indicatif
p. 84 et 89, au sens anciên de "manger") et dans la grammaire de Klein
futur) Ë80lJ.aL; formes thématisées secondaires: *Ë8w (très rare chez
re
(1653, p. 117); la Postilla de Dauksa (1599) a une 1 pl. ém? (DP, 48837) e
ou êm? (DP, 4045 ), et plusieurs fois une 3 p. ést (par ex. DP, 113 33 ), Le
Homère: imparfait itératif ionien Ë8EcrKE, Il. 22, 501), suffIxe complexe en grec classique ÈcreLw "manger" (homérique ËaSw). - V. IRLANDAIS: ithid "il mange"
231. On observe une tendance comparable en indo-iranien, où la forme faible dad- du radical « i.-e. *dedh3-, cf. ind. prés. actif 1re pl. dadmaJ;z) a donné lieu à la naissance d'un thème secondaire dad-, qui s'est répandu au participe (véd. dattaJ;z < *dad-ta-, mais forme ancienne dans deva-ttaJ;z "donné par les dieux" < *-d(~)ta- < i.-e. *dh3-tO-, cf. gr. 80TÔS), ainsi que dans des formes thématiques secondaires (3 e sg. moyen dad-ate). 232. Trautmann (BSW, p. 66), Büga (RR(B), J, p. 602), Endzelïns (1923, p. 559, § 601; 1948, p. 180, § 337 = DI, N2, 556), Fraenkel (LEW, 1, p. 124125), Senn (1934-1935, p. 112-113), Mülenbachs-Endzelïns (ME, 1, p. 577), Kaukienë-Jakulienë (1988, p. 142-156), Schmalstieg (2000, p. 84-85). Cf. LKZ (II, p. 1155-1163).
« *ite- < *h1ëd-ti,
avec -th-
d'après le nom verbal supplétif ithe < *pityii-). - GALLOIS: ys "il mange" « Ï.-e. *h1ed-ti). - LATIN: passage à la flexion semi-thématique, 1re sg. edo, 2e sg. e
re
e
ës, 3 sg. ëst, 1 pl. edimus, 2 pl. ëstis, 3e pl. edunt; osque edum "manger".
152
Catégorie du nombre
153
Catégorie du nombre
* edo
> got. itan
complexe234 ; la voyelle longue du latin est peut résulter de la loi de
"manger, ÈaSLElV", v. isi. eta, v. ang. etan (ang. to eat), vha. ezzan
Lachmann, celle des formes balto-slaves de la loi de Winter. Un dernier
(aIl. essen).
détail: en hittite, l'apophonie propre au type acrostatique < e/ e> survit
- GERMANIQUE: passage au type thématique,
La reconstruction du paradigme indo-européen pose un problème, car
encore clairement dans le verbe "désirer, exiger" (hitt. wekzi < *!Jelè-, vs.
aucune langue n'a gardé de trace directe du schéma apophonique ancien. On
wekkanzi < *JJelè-)235 ; il n'est pas certain qu'elle ait été perdue dans le
rencontre tantôt un degré plein long (i.-e. *h1ëd-: v. irlandais; sur le hittite
verbe "manger", au profit d'une alternance < ë / a >, propre à d'autres
et le balto-slave, voir plus loin), tantôt un degré plein bref (i.-e. *h1ed-:
verbes. Toutes ces raisons pourraient amener à mettre en doute la recons-
sanskrit, grec, gallois, germanique). Seuls l'anatolien et le latin présentent
truction d'un paradigme acrostatique dans ce verbe. Quoi qu'il en soit,
une apophonie radicale, mais dans des conditions différentes. En hittite,
s'agissant du balto-slave, l'hypothèse d'un ancien degré long généralisé
l'alternance entre le singulier et le pluriel (ëdmi, adanzi) est adaptée à un
(v. lit. émi = v. sI.
modèle productif < ë/ a > (cf. ëszi, asanzi "être", ëpzi, appanzi "saisir",
seulement parce qu'elle laisse sans explication l'intonation rude du baltique
ekuzi, akuanzi "boire", seszi, sasanzi "dormir") ; il n'est pas sûr qu'elle
(lit. ésti), peu susceptible de refléter un ancien degré long morphologique,
e/ e >
IaMb /
jamb < Î.-e. *êd-mi) est peu satisfaisante, non
apparm"t
mais aussi et surtout parce que ce degré long est général en baltique et en
distribuée dans le paradigme semi-thématique de telle sorte que le degré
slave: il apparaît même dans un dérivé nominal comme le lituanien uodas
soit de très haute antiquité. En latin, l'alternance < e
e
plein long apparaît dans les formes athématiques (2 sg. ës, 3 sg. est, e
et le letton uôds "moustique", cf. v. sI.
OBa,z:{'h /
ovad'b "insecte"
balto-
2 pl. estis), le degré plein bref dans les formes thématiques (l re sg. edo,
slave *od-as
r
pl. edimus, 3 pl. edunt). Selon l'hypothèse la plus communément
"conducteur")136. Il est plus vraisemblable, à mon sens, de supposer une
admise, le verbe présentait en indo-européen un paradigme de type
action de la loi de Winter dans ce verbe dont le radical se terminait par une occlusive sonore237 . Si l'on adopte cette analyse, on admettra que le
e
e
"acrostatique", avec degré plein long au singulier, degré plein bref au pluriel: i.-e. *h1ëd-mi, vs. *h 1ed-me-233 . Cette reconstruction, qui suppose notamment une généralisation du degré bref en védique (l re sg. ad-mi
r
e
4-
i.-e. *h1od-os "mangeur", nom d'agent du type gr.
«
TTOIJ.TTO S
baltique et le slave, comme plusieurs autres langues indo-européennes, reflètent un radical à l'origine pourvu d'un degré plein bref (i.-e. *h1ed-),
pl. ad-masi), est possible, mais elle n'est pas exempte de
secondairement allongé en vertu de la loi de Winter (-- balto-slave *ëd-).
difficultés. Tout d'abord, elle paraît exclure l'existence d'un degré zéro
Mais, en définitive, que l'on adopte ou non la reconstruction d'un
d'après
*h1d-, qui est pourtant attesté non seulement dans l'ancienne forme participiale *h1d-ont- "dent" (lit. dantis), mais aussi dans le désidératif
*hd-h1d-sé- (> v. iri. -is(s) "je mangerai"). En outre, le degré plein long qu'elle postule ne repose fmalement, comme le reconnaît le LIV (p. 205), que sur le v. irlandais ithid "il mange" l'arménien owtem "manger"
«
« *h1ëd-)
et indirectement sur
*h1od-), tous deux d'une analyse
233. En ce sens, par exemple, Kurylowicz (1968, p. 306 § 388), Schmid (19868, p. 463), Meiser (1998, p. 223, § 146).
234. Sur l'arménien owtem, cf. Klingenschmitt (1982, p. 157), qui postule une formation d'itératif à degré long *h1odeieJo- secondaire par rapport à un présent acrostatique *hlëd-. 235. Cf. LIV(p. 614). 236. Sur le mot slave ovadi:l "insecte", voir en dernier lieu l'analyse de Smoczyilski (1992, p. 209-212 = 2001, p. 351-354; 2001, p. 115). On notera que l'allongement dans ce mot baltique et slave contredit la version Matasovié de la loi de Winter (1995). 237. En ce sens, Winter (1978, p. 431, 433), Matasovié (1995, p. 62). L'analyse de Kurylowicz (1956, p. 307) n'est pas convaincante.
154
Catégorie du nombre
155
Catégorie du nombre
paradigme acrostatique, le balto-slave ne présente plus aucune trace d'apophonie radicale.
"espérer")240. Cf. peut-être aussi v. pro adj. *val-nas "meilleur" dans
walnint / bessern "améliorer" (III, 33 18), walnennint / bessern "améliorer" (III, 69 7), prei walnennien / zum besten "pour le mieux"
- BALTIQUE *vël-mi "souhaiter, permettre"238 :
r e sg. pawelmi « *-yël-m i),
e
(III, 35 4).
p. pawelt *-yël-ti), formes toutes deux attestées chez Bretkünas239 ; le
Le présent athématique *-velmi n'est attesté qu'en vieux lituanien, mais
verbe a disparu en lituanien moderne (peut-être du fait d'un risque
son antiquité ne fait aucun doute. Il possède en effet un correspondant exact
de collusion homonymique avec lit. vélti "feutrer, fouler" ?), et il
dans au moins une autre langue indo-européenne (lEW, p. 1137, LIV,
n'en subsiste plus qu'une forme dérivée, d'emploi très rare: lit.
p. 618-619):
• v. lituanien:
«
3
moderne velyti "permettre, souhaiter" (ind. prés. velija, prét. velijo, cf. LKt, XVIII, p. 633-635). La langue actuelle connaît encore quelques formes dérivées appartenant à la même famille (lit. valià e
• LATIN: type semi-thématique, 1Te sg. uolo
« *yelo,
au lieu de
*pel-mi), 3 e sg. uolt, uult « *yel-ti), 1Te pl. uolumus < *yel-o-me-), Ze pl. uultis « * yel-te), 3e pl. uolunt « * yel-onti), inf. uelle
"volonté" ; valiati "réussir" ; vi/tis "espérer", 3 p. ind. prés. vi/iasi,
«
prét. vylési; viltis, -ies "espoir" ; adverbe véltui "en vain"), mais a
conjonction (lat. uel "ou bien" < "si tu veux"), a été remplacée par
perdu toute trace de l'ancien présent athématique.
une forme supplétive (lat. uïs "tu veux" < *yej,hrsi, cf. lat. inuïtus
• letton: aucune trace de *vël-mi; seulement des dérivés: lett. vala
"contre son gré")241 .
"liberté, permission, volonté" (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p. 463-464); valuôt "être libre" (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p. 466); vèlte "cadeau"
«
"souhait"?, Mülenbachs-Endzelfns, ME,
IV, p. 533-534), viÎt "tromper" (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p. 596) ; viÎtiês "espérer" (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p. 596);
*vèlte "en vain" dans par vèlti (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p.534). • v. prussien: aucune trace de *vël-mi; seulement un dérivé: participe prétérit passif prawilts / verrathen "trahi, trompé" (III, e
75 2), indicatif prétérit 3 p. prowela / verraten wardt "a trahi, trompé" (l, 13 4 ; II, 13 4), qui repose sur *pra-vU-tvei ''tromper, décevoir" « "faire perdre espoir", cf. lit. apvi/ti "désespérer": vi/tis
238. Trautmann (BSW, p. 348-349), Büga (RR(B), II, p. 53-55), Fraenkel (LEW, II, p. 1220), Sabaliauskas (1957, p. 104 ; 1990, p. 74-75), Schmalstieg (2000, p. 88). 239. Cf. exemples chez Büga (RR(B), II, p. 53), Zinkevicius (LKIG, II, p. 100, § 553 fin).
* yel-se).
La Ze sg. athématique *yel-si, conservée comme
D'autres formations sont attestées ailleurs: ancien optatif en gotique (got.
wiljau "ich will, je veux", prét. wilda, pour la formation, cf. lat. uelim); présent suffixé en *-ë- / *-i%- en slave (v. sI. BeJItTH, BeJIHiÇ, / veleti, veljQ "vouloir, ordonner,
È1TL TciaaELv, 1TUPULVElV",
peut-être fondé sur l'ancien
optatif *velï- < *pelhrihr , cf. LIV, p. 619) ; présent à infixe nasal en indoiranien (véd. vPJïté "choisir", v. avest. v~r~fJté) à côté d'un aoriste radical (véd. av(u)ri); présent itératif de type */Jol-éj,efo- en slave (v. sI. BOJIHTH, BOJI~ /
voliti, voljQ "vouloir,
~OlJÀEaeaL")
et en germanique (got. waljan
"wahlen, choisir"). Le présent athématique est limité au baltique et au latin. Dans ces conditions, la reconstruction d'un paradigme apophonique paraît d'emblée incertaine. Plusieurs auteurs242 supposent que le verbe appartenait à l'origine au type acrostatique,
re
re
sg. */Jël(h})-mi, 1
pl.
240. Maziulis (PKEZ, III, p. 345). 241. Autre analyse, peu convaincante, chez Sihier (1995, p. 539-540, § 484), qui tente de tirer lat. uïs de *!Je/si. 242. Notamment Sihler (1995, p. 539, § 484), qui parle de "Narten roof'.
Catégorie du nombre
156
157
Catégorie du nombre
*!Jel(hl)-me-, ce qui expliquerait non seulement l'absence de degré zéro
Les autres verbes athématiques attestés dans les langues baltiques n'ont
radical, mais aussi le degré plein attesté dans l'optatif */Jel(hl)-ih r (lat.
pas d'antiquité indo-européenne et ne peuvent donc jouer aucun rôle dans la
uelim, got. wiljau), où l'on attendrait plutôt un degré zéro du radical et un
question de l'évolution de l'apophonie radicale ancienne dans ces langues.
degré plein du suffixe au singulier (cf. Ï.-e. *hls-iehl- / *hls-ih l- > v. lat.
Seul le présent athématique rausti "se lamenter" (3 e p.), attesté dès la
siem, simus, etc.). Sur ce point, la forme lituanienne pawelmi est ambigu~,
Postilla de Dauksa (1599, 3 p. apraust', DP, 410 29, aprâust', DP, 598 38 ,
car elle n'apparaît qu'en vieux lituanien, précisément dans les écrits de
traduisant le pol. op/akaé), pourrait disposer d'un correspondant externe du
Bretkfmas, où les intonations ne sont pas notées. Traditionnellement, on
même type morphologique: le védique roditi "pleurer, crier"
cite le verbe comme pavélmi, avec intonation rude, ce qui n'est pas
*reydH-ti, cf. véd. 3e pl. rudanti, avest. réc.
impossible, étant donné le caractère lourd de la base en baltique (cf. lit.
autres langues ont en général des formes thématiques, probablement
vi/tis "espérer") et ailleurs (cf. gr. dor. FÀi'lv "vouloir"), mais demeure
secondaires, à en juger par la divergence de leur degré vocalique (lat.
incertain. La forme dérivée qui survit en lituanien moderne (lit. vël-yti) a
archaïque rudo "crier, hurler, rugir" < *rud(H)-%-, v. ang. rëotan, vha.
une voyelle radicale brève qui peut s'expliquer de deux façons: direc-
riozan "pleurer, se lamenter" < *re/Jd(H)-%-)243. L'antiquité du présent
tement, si l'on part d'une base anit. *vel-mi -- *vel-l- (peut-être par
athématique ne me paraît pas impossible, et l'existence d'une apophonie
l'intermédiaire de l'ancien optatif */Jel-ih r ?), ou bien, si l'on part d'une
radicale est suggérée par le sanskrit, qui oppose rod- au singulier
e
urue~n
«
Ï.-e.
"ils pleurent"); les
base set. *velhl-mi, comme résultant d'une disparition ancienne de la
« *re/JdH-) et rud- au pluriel « *rudH-).
laryngale fmale en position antévocalique (*velhrl- > *vel-l-). En slave, la
degré vocalique du radical baltique *raud-. On peut en effet se demander
forme dérivée *veljQ a une voyelle radicale brève, qui pourrait
s'il faut partir d'un degré plein *e, Ï.-e. *reydH- (on attendrait *riaud-),
éventuellement résulter de la "loi Pinault" (Pinault, 1982b) dans un verbe à
d'un degré fléchi *0, Ï.-e. *ro/JdH- (par ex. dans un ancien prétérito-
suffixe *-j%-. Une difficulté supplémentaire vient de ce qu'en indo-iranien,
présent) ou bien d'une contamination d'un degré plein *e et du degré zéro,
la racine présente une forme set. (véd. vPJlté "choisir" < *!JJ-N-H-toi, racine
Ï.-e. *reydH- + *rudH- > *riaud- + *rud- - *raud- (avec élimination de la
*/Jel-h r ), tandis
palatalisation dans *riaud- d'après le degré zéro *rud-)l44.
qu'en latin elle est de type anit (lat. uolt, uult < * /Jel-ti,
Mais on ne saurait préciser le
qui suppose une racine */Jel-). Le plus économique, me semble-t-il, est de
Autre difficulté: les langues baltiques présentent aussi, en concurrence
partir, pour le baltique, de la base set. */Jelh l-, qui est par ailleurs attestée
dès les plus anciens textes avec le présent athématique résiduel, un présent
directement dans ce groupe de langues (lit. vi/tis "espérer" < balt. *vII-
thématique mixte à suffixe complexe *-a-j%- (lit. raud6ti, lett. raûdât
< */Jlhr), et de supposer que le degré bref radical a été généralisé dans tout
"pleurer"), qui a des chances d'être ancien (cf. v. sI. phI]:laTH / rydati
le paradigme, d'où */Jelhl-mi > probablement *pa-vélmi (v. lit. pawelmi).
"pleurer, K01TTEaSm, 1TEvSEl'v, KÀULElV, epllvElv"). Dans ces conditions, il
Cette évolution serait parallèle à celle du verbe "manger", *ed-mi, aVec
paraît impossible de reconstituer la préhistoire de l'athématique rausti du
degré bref généralisé (ultérieurement allongé par la loi de Winter -- *ëd-mi > v. lit. em i). Quoi qu'il en soit, il est clair que, dans le verbe résiduel pawelmi "permettre, souhaiter", le baltique n'a gardé aucune traee
d'apophonie radicale.
243. Données dans le LIV (p. 459). Cf. aussi Schmalstieg (2000, p. 88). 244. Une contamination en sens inverse s'observe dans i.-e. *teJlp- + *tup> baIt. *Ciaup- + *tup- -- *Ciup- (lit. Ciùpti "saisir"). Cf. Petit (2000c, p. 126). ~oter, en outre, dans le cas de raud-, que le radical a connu un allongement (cf. lIt. moderne rauda < *riïud-), probablement dû à la loi de Winter.
158
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
v. lituanien et surtout d'évaluer son degré vocalique radical. De toute
avec sa méthode d'investigation. Toutefois, la préhistoire indo-européenne
façon, la fonne baltique ne présente aucune trace d'apophonie radicale.
permet parfois de voir clair dans l'évolution d'anciennes formes de parfait,
159
Tous les autres verbes athématiques des langues baltiques apparaissent
et donc d'évaluer leur degré vocalique radical. À titre d'illustration, on
isolés dans leur formation: ils sont probablement secondaires. En tout cas,
examinera ici le sort qu'a connu en baltique l'exemple le plus caracté-
ils sont inexploitables dans une étude consacrée à l'évolution, en baltique,
ristique du parfait indo-européen, i.-e. *yoid-a (*yojd-h1e) "savoir".
de l'apophonie radicale propre aux anciens présents athématiques.
Le parfait indo-européen *yoid-h1e survit vraisemblablement dans une série de formes baltiques, qui doivent remonter à un prototype *viiid-mi
2. PARFAITS ET PRÉTÉRITO-PRÉSENTS
"savoir". En voici l' inventaire2 47 :
Une apophonie radicale liée à l'opposition des nombres apparaît encore,
- BALTIQUE *viiid-mi "savoir" : e
en indo-européen, dans quelques autres formations verbales. Si l'on néglige
• v. prussien: 2 sg. waisei / weissest "tu sais" (III, 6924), waisse tu
ici l'aoriste radical athématique, où une apophonie était régulière en indo-
/ weyssestu "tu sais" (III, 71 1), 1 pl. waidimai / wissen "nous
européen (type *(e)-cI'ehr m, vs. *(e)-cI'h 1-me- ''placer'', cf. gr. béotien 3e sg.
savons" (III, 65 22), 2 e pl. waiditi / wisset "vous savez" (III, 105 19,
re
re
dVEeE, vs. gr. 1 pl. ÉeEIJ.EV), mais qui n'a laissé aucune trace dans les
avec un sens d'impératif: III, 95 16 ; III, 95 22-23 ). L'infinitif waist
langues baltiques, la formation la plus importante à cet égard est celle du
/ wissen "savoir" est attesté une fois en III, 73 3 • Sur la base de ce
parfait radical indo-européen, où s'opposaient un degré
*0
dans les formes
verbe, le v. prussien a quelques dérivés: un abstrait féminin
du singulier et un degré zéro dans celles du plurie}245. L'exemple classique
waisnan / bericht "nouvelle", acc. sg. (III, 111 12); un nom d'agent
est:
*vaidilas ou *vaidilii "mage, sorcier, prêtre païen", attesté dans le • INDO-EUROPÉEN *yoid-h2 e "je sais" (> gr. o1Ba, véd. véda, got.
me Catéchisme à travers le verbe dérivé waid/eimai /
wail), vs. *yid-me- "nous savons" (> gr. homérique tBIJ.EV, gr.
faisons de la magie" (III, 29 3) et dans la Preussische Chronik de
classique 'lUIJ.EV; véd. vidma; got. witum).
Simon Grunau (1517-1526) à travers la désignation récurrente
Dans les langues baltiques, le parfait a disparu en tant que catégorie verbale indépendante, et ses formes ont été éliminées ou redistribuées dans diverses formations de présents, où elles ne sont plus guère reconnaissables 246 . Elles ne peuvent plus être identifiées que par la présence, en baltique, d'un degré vocalique *a, reflet d'un degré
*0
indo-européen. On
saisit la difficulté. Il y a quelque chose de circulaire à prétendre s'interroger sur l'apophonie radicale de formes qu'on n'identifie précisément que par leur apophonie radicale: l'objet de la recherche risque fort de se confondre 245. Voir Kurylowicz (1956, p. 46). 246. Sur l'évolution du parfait indo-européen en slave et en baltique, cf. van Wijk (1933, p. 134-139).
zeubern "nous
Waide/otte "prêtre païen" (*vaid-i/-utis)248. On connaît aussi un e
verbe causatif, 3 p. waidinna / zeygen "ils montrent" (III, 75 16), réfléchi waidinnasin / sich. .. stellet "se montre" (III, 113 12), dérivé perwaidinsnans / exempe/ "exemples", acc. pl. fém. (III, 69 13 ); mais
son rattachement direct à l'ancien parfait "savoir" reste sujet à caution (cf. plus bas). • lituanien: le verbe courant qui signifie "savoir" est linoti
«
i.-e.
*gno-). De l'ancien parfait *vaid-, le lituanien n'a gardé que des
247. Trautmann (BSW, p. 338), Fraenkel (LEW, p. 1215-1216), Maziulis (PKEZ, IV, p. 212-216). Cf. Stang (1962, p. 168). 248. Cf. Buga (RR(B), l, p. 183-189; II, p. 139).
161
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
160
dérivés: lit. vaidilà "prêtre prussien, sorcier" (cf. L K Z,
xvn,
/ gezeugnis "témoignage" (1, 521
;
II, 521 ), adjectifs et adverbes
p. 837, sans doute emprunté au prussien; le terme proprement
composés du tyPe aina-wldai / g/eich "de la même manière", kitta-
lituanien présente une formation parallèle: iynys "mage, sorcier,
widin / anders "d'une autre manière".
prêtre païen" ~ iinoti "savoir") ; peut-être lit. vilistas "médicament"
• LITUANIEN: isvysti "voir, apercevoir" (ind. prés. isvysta, prét.
(*vaid-tas, avec suffixe instrumental -tas, sens premier: "science,
isvPdo) ; pavydéti "être jaloux" (ind. prés. pavydi, prét. pavydéjo),
magie")249. Noter aussi les formes causatives (qui posent le même
pavydas "jalousie" (sens premier: "regarder par en dessous", cf.,
problème que le pro waidinna): lit. vaidinti "montrer sur scène,
pour le sens, lat. inuidere, gr. homérique lm68pa i8wv); véidas
jouer un rôle"
"visage" ; pavida/as "apparence" (cf. LKZ, IX, p. 686, noter la
(-+
vaidmuo "rôle"), vaidéntis "se montrer". Plus
éloignés: lit. valzdas "spectacle, vision", vaizduoté "imagination"
voyelle brève).
(*vaid-das; pour la suffixation, cf. SkarciZius, 1943, p. 99).
• LETTON: vldét / sehen,
• letton: le verbe courant qui signifie "savoir" est zinât. Mais le
(Mülenbachs-Endzelïns, ME, IV, p. 634); peut-être aussi vidét
letton a conservé une trace directe de l'ancien parfait *vaid- dans la
/ gonnen "accorder' (cf. all. nicht gonnen "envier" ?); viedét / sehen,
forme négative de 3e p. du verbe "être" (Mülenbachs-Endzelfns, ME,
Sehvermogen besitzen "voir, posséder la vue" (Mülenbachs-
II, p. 697): lett. nav "n'est pas / ne sont pas" (supplétif de ir "est
Endze lfns, ME, IV, p. 652); velds / die Form "fonne"
/ sont"), lett. dialectal navaîd, navaida,
(Mülenbachs-Endzelïns, ME, IV, p. 522), d'où veiduôt / formen,
nevaid,
nevaida
<*ne-vaid(e) "(on) ne sait pas"250. Il n'existe aucune autre trace de
wahrnehmen "voir, percevoir"
gesta/ten "former' (Mülenbachs-Endzelfns, ME, IV, p. 523).
*vaid- en letton, peut-être à cause d'un risque de collusion
Pour séparer les deux groupes, deux critères sont envisageables. On
homonymique avec la famille de valdét "se lamenter, soupirer",
pourrait songer, tout d'abord, à un critère formel: rattacher à l'ancien
valds "plainte, soupir" (~ interjection val "malheur !").
parfait toutes les formes pourvues, en baltique, d'un degré
*a
(radical
L'analyse de ces formes se heurte d'emblée à un problème: il est
*vaid-) et exclure toutes celles qui présentent un degré *e (radical *veid-)
difficile, dans un certain nombre de cas, de faire· le départ entre les formes
ou un degré zéro (*vlél-). Mais ce critère n'est pas entièrement fiable; en
qui procèdent de l'ancien parfait indo-européen *JJoid-h 2e et celles qui
effet, un radical *vaid- ne représente pas toujours une formation ancienne:
appartiennent au groupe apparenté, mais distinct, de l'indo-européen *J!eid-
cela peut être une création secondaire, propre au baltique. Ainsi en est-il
/ *lJid- "voir".
probablement du causatif *vaid-in-a- "montrer", attesté en v. prussien et en
Ce dernier groupe est bien représenté dans les langues
lituanien. Plutôt que de le tirer de l'ancien parfait *vaid-a "savoir", il est
baltiques. On peut citer les formes suivantes: • V. PRUSSIEN: widdai / sahe "il vit", III, 113 1
« *vldiijii,
voyelle brève contredisant la loi de Winter),
avec
widekausnan
249. Sur ce mot, cf. Grinaveckis (1998, p. 71-74). Cf. aussi LKL (XVII,
p. 946-948). . 250. Sur cette forme, cf. Stang (1966, p. 416), qui postul_e une évolutiOn "man weiB nicht" > "es gibt nicht". Autre analyse chez Endzelms (1938, p. 165 = DI, IV}, p. 481) et Karulis (1992, l, p. 620).
préférable de le rapprocher du groupe parallèle de *vlél- "voir", avec une apophonie secondaire < i / ai >, propre au causatif, dont il existe des parallèles en baltique même (lit. m isti "se nourrir"
-+
causatif mait-inti
"nourrir", dygti "germer" -+ daig-inti "faire genner")251. Le sens invite d'ailleurs à cette analyse: *vid- "voir" -+ vaid-in- "faire voir" > "montrer" 251. Exemples chez Jakaitienè (1968, p. 226), Petit (l999a, p. 95).
162
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
("montrer" n'est pas "faire savoir", surtout quand il s'agit de montrer un
• INDO-EUROPÉEN *yoid-h2 e ''je sais" (> gr. ot8a, véd. véda, got.
spectacle, cf. lit. vaidmuo "rôle au théâtre"). De la même manière, il est
wait), vs. *yid-me- "nous savons" (> gr. homérique t8IlEV, gr. classique '(aIlEv; véd. vidma ; gol. witum).
probable que le groupe du lituanien vaizdas "spectacle, vision", vaizduotë "imagination", procède de *vïd- "voir", plutôt que de *vaid- "savoir". Le degré *a serait là encore secondaire : il pourrait, par exemple, être analogique de la forme thématique non suffixée, lit. vaidas "apparition, vision" (reisKinys, Erscheinung, dans le dictionnaire de Nesselmann, 1851, p. 56)252, dans laquelle il n'aurait rien de surprenant (cf. lit. laTkas "temps"
+-
likti "rester, laisser"). Un autre inconvénient du critère formel
est qu'il exclut a priori la possibilité que certaines formes du degré zéro *vid- puissent remonter à un allomorphe
*y id-
du parfait
163
Deux questions restent posées. La première est celle du passage de l'ancienne forme de parfait à un présent athématique ; la seconde, celle de l'apophonie radicale et de son évolution en balto-slave. Le paradigme verbal attesté en prussien est clairement celui d'un présent athématique. Le sens de (perfecto-)présent apparaît dans les diverses occurrences du verbe, par exemple [III, 65 22 ] : - V. PRUSSIEN:
*yoid-h1e
mes waidimai bhe popreftemmai en noufon fijran
"savoir", ce qui est précisément la question qui nous intéresse ici.
-ALLEMAND:
Dans ces conditions, il est préférable de recourir à un autre critère, d'ordre sémantique, pour distinguer le groupe de *vaid- "savoir" et celui de
wir wiHen vndfuelen im hertzen
*vtd- "voir" : on rattachera à l'ancien parfait toutes les formes qui ont
"nous savons et comprenons [cela] dans notre cœur"
manifestement le sens de "savoir" et au groupe de *vïd- (à l'origine aoristique) toutes celles dont le sens est "voir". Le sens de "savoir" peut
(coordination de waidimai "nous savons" avec le présent poprestemmai "nous comprenons")
s'appliquer non seulement au v. prussien waisei "tu sais", mais aussi aux
Par sa flexion, le verbe rappelle d'autres présents athématiques: on peut
formes de sens magique, comme *vaidilii "prêtre païen, sorcier"
comparer par exemple v. pro waisei "tu sais"
« "savant", plutôt que "voyant", cf. lit. iynYs) et *vaid-tas "médicament" « "science, magie"). On observe que le degré *a, même s'il n'est pas
« *es-sai), eisei "tu vas" « *ei-sai), diise "tu donnes" « *diid-sai), etskfsai "tu te relèves" « *etskï-sai). Mais la r e pl.
limité aux formes qui signifient "savoir", est constant dans ces formes:
waidimai "nous savons" (*vaid-i-mai) et la 2e pl. waiditi "vous
aucune forme pourvue d'un radical *veid- ou *vla- n'a le sens de "savoir".
savez"(*vaid-i-të) surprennent en regard de la 1re pl. asmai "nous sommes"
e
Seul le prussien conserve un paradigme verbal encore vivant: 2 sg.
r
e
e
« *vaid-sai) et assai, assei
"tu es"
(*es-mai), pereimai "nous sortons" (*per-ei-mai), etskïmai "nous nous
pl. waidimai "nous savons", 2 pl. waiditi "vous
relevons" (*et-skï-mai) et de la 2e pl. asti, astai "vous êtes" (*es-tê) : la
savez". Depuis longtemps, on a songé à mettre en rapport ce présent
désinence y est -imai, -iti, non -mai, -ti comme dans les autres verbes.
athématique avec l'ancien parfait apophonique indo-européen, attesté dans
Cette différence a reçu plusieurs explications. La plus courante postule une
plusieurs langues :
influence, avant sa disparition en baltique, d'une 3e pl.
waisei "tu sais",
finale, cf. v. sI. '(<Ja<JL)
252. Skardzius (1943, p. 99, § 68).
Bt.llÂTb /
*yoid-pti
(pour la
vedçt'b "ils savent", et plus lointainement gr.
> balt. *vaid-int(i), d'où par métanalyse *vaid-i-nt, dont aurait été
165
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
164
tiré un thème secondaire *vaid-i- (--+ v. pro waidi-mai, waidi-ti)253. On
de *giriamai, lit. giriame, cf. aussi
pourrait aussi songer à un rapprochement occasionnel, sémantiquement
etwërpimai "nous pardonnons")256.
concevable, du verbe "savoir" avec les verbes statifs en *-ë- 1 *-i- (type re
re
pl. klantemmai "nous jurons",
Si l'on adopte cette dernière analyse, on doit admettre que le passage de f1exi~n
v. pro turritwei "avoir", lit. turéti < *turë-) : on comparerait alors la 1 pl.
l'ancienne
waidimai "nous savons" (*vaid-i-mai) et turrimai "nous avons"
progressif dans les langues baltiques et qu'il subsistait encore, dans la
e
(*tur-i-mai), la 2 pl. waiditi "vous savez" (*vaid-i-të) et turriti "vous
de parfait à celle d'un présent athématique a été
préhistoire du baltique, un vestige direct de l'ancien paradigme.
avez" (* tur-i-tëf 54 . Mais on voit mal pourquoi cette influence se serait
La question reste posée de savoir pourquoi c'est au type athématique
exercée sur le seul verbe "savoir" et non sur les autres présents
qu'a abouti l'ancien parfait indo-européen *JJoid-h2e en baltique. Van Wijk
athématiques. Une dernière possibilité, qui ne me paraît pas invrai-
(1933, p. 135, note 2) suggère, comme facteur ayant pu jouer un certain
semblable malgré son caractère spéculatif, serait de voir dans waidimai et
rôle, le fait que, dès l'indo-européen, le présent athématique et le parfait
e
waiditi des créations secondaires d'après une fonne ancienne de 3 sg. 55 *J!oid-e (= véd. véda, gr. o18E, got. wait) > baIt. *vaid-e2 > v. pro
avaient, dans quelques personnes, "des fonnes à peu près identiques" :
*vaid-e. Du fait des flottements qui, en v. prussien, existaient à la finale
*yid-me- "nous savons" ne diffèrent aucunement par leur fmale en grec (gr.
ainsi, la
re
pl. du présent *h1i-me- "nous allons" et celle du parfait
entre -e et -i (cf. 3 p. gëide "attendre", III, 85 9 à côté de giëidi, III, 83 8
r-~EV,
< *geid-ja, lit. geïdiia), cette fonne *vaid-e, ou secondairement *vaid-i,
l'opposition de désinences primaires ou de désinences secondaires (véd.
e
re
aurait été analysée comme appartenant à un thème en *-i-, d'où une 1 pl. e
e
*vaid-i-mai et une 2 pl. *vaid-i-të, par analogie avec le type en *-i- (3 p. re
vs.
'(a-~Ev)
et ne se distinguent en sanskrit védique que par
i-mal), vs. vid-ma), une opposition qui n'a, de toute façon, aucune signification en balto-slave.
turri, par ex. III, 274, à côté de ture, par ex. III, 65 15, vs. 1 pl. turrimai
La même substitution d'un présent athématique à l'ancien parfait
"avoir", par ex. III, 27 9). Le même processus a touché, en vieux prussien,
s'observe, dans des conditions comparables, en slave. Le v. slave a encore
e
r e sg. v. sI. B1;.o:1; /
vede "je sais" < *yoid-a-i,
les thèmes thématiques à suffixe *-ja- (par ex. 3 p. gëide, giëidi "il
une forme isolée de parfait,
attend" < *geid-ja, cf. aussi kniëipe "il puise", künti "il soigne", trinie "il
mais présente aussi, dès les plus anciens textes, un présent athématique,
e
1 vemb "je sais" (slave *ved-mi), dont la conjugaison est
menace", etwëre "il ouvre", etwerpe "il pardonne"), dont la 3 personne à
1re sg. v. sI.
finale *-i ou *-e a donné naissance à des fonnes de pluriel à voyelle prédésinentielle *-i- ou *-e- (par ex. 1 pl. girrimai "nous louons" au lieu
régulière et qui se rencontre encore dans quelques langues slaves modemes257 :
253. En ce sens, Endzelrns (1943, p. 107, § 224 = DI, IIIz, p. 132; 1944, p. 162, § 224), cf. aussi DI, IIIl, p. 461. Voir également Schmalstieg (2000, p. 95-96). 254. Sur l'extension de cette finale -imai, cf. van Wijk (l929a, p. 149). 255. Le letton nav "il n'est pas" « *nevaid "on ne sait pas") pourrait, à e mon sens constituer un reflet direct de cette 3 p. *vaid-e (> lett. *-vaid). Il est clair, en t~ut cas, que la forme lettone ne peut ~ro~eni.r d~un ancien par~digme de présent radical athématique: on att:nd~alt vald-tl. > lett. t-valst. Sur l'étymologie de cette forme, voir en ~art~culIer ~chmalst~e? (2000" p. 71-72), qui passe en revue les différentes explIcatIOns qUI en ont ete proposees.
256. Données chez Endzelïns (1943, p. 110, § 227 = DI, IlIz, p. 136; 1944, p. 166-167, § 227). 257. Données slaves: Vaillant (1948, p. 314-316, § 224 ; 1962, p. 52). Vieux et moyen russe : Cocron (1962, p. 254-256).
re
B1;Mh
166
Catégorie du nombre V. SLAVE
V. RUSSE
POLONAIS
Catégorie du nombre BALTO-SLAVE
BALTIQUE
*vaid-a(i)
SG
atAt /vede 1re p . (archaïque)
atm/vernI.
wiem
atM!>
2 e p.
atcH 1vesi
wiesz
3e p. atCTh / vest'b ateTh / vest
pro waisei
wie
(secondaire)
(secondaire)
PL. atM'b 1vem'b 1re p .
Dans le parfait indo-européen, une apophonie radicale < 0 l " > opposait les formes du singulier et celles du pluriel, cf. gr. ol8a, vs.
wiemy
tal-lEV, véd. véda, vs. vidma, got. wait, vs. witum. Le baltique, comme le
*viiid-me-
slave, a généralisé le degré fléchi radical *0 (> balto-slave *0) et a éliminé
pro waidimai
la variante faible du radical. Aucune apophonie ne sépare plus, en vieux
BtcTe 1veste
prussien, waisei "tu sais" (radical *viïid- au singulier, avec allongement dû
*viiid-te wiecie
à la loi de Winter) et waidimai ''vous savez" (radical *viiid- au pluriel), ni,
pro waiditi
(secondaire) (secondaire)
3 e p. BtAATh / ved~t'b
wiedzfl.
en slave, Bi>cH 1vesi "tu sais" (radical Bt- / ve- < *viïid- au singulier) et *viiid-{Jti
-
BteTe 1veste "vous savez" (radical B't(C)- 1 ve(s)- < *viiid- au pluriel). La généralisation du degré radical *0 (> *0) en baIto-slave s'explique, peut-
En vieux slave, la flexion ancienne de parfait ne survit plus qu'à la 1re sg. (B't~'t / vede < *vliid-ai) ; tout le reste du paradigme est du type e
athématique (par ex. 3 sg. B'tCTh / vest'b < *viïid-ti). La 3e sg. présente, dans quelques textes slavons, des attestations d'une forme réduite secondaire Bt / ve. Cette forme s'est imposée en polonais (pol. wie "il sait"); dès lors, le système désinentiel a été entièrement refait en s'adaptant au re
e
modèle général (1 sg.-m, 2 sg.
-SZ,
e
3 e sg.-@, 1re pl.-my, 2 pl.-cie) ; seule
e
la 3 pl. est anomale (désinence -dzfl). En vieux russe, la flexion athématique est limitée à deux formes isolées : la 1re sg. BtMb / vemb "je sais"
«
*vliid-mi) et la 3e sg. BtCTh / vest'b "il sait"
« *vliid-ti).
russe a développé une flexion secondaire du type
/ vedaju/vedajeii, à partir de
l'infmitifBi>~aTH
Le moyen
Bt~alO, Bt.~aeII1H
1vedati, doublet de Bi>ntm
1vedeti ; le russe moderne a éliminé ce verbe et l'a remplacé par 1znaju "je sais".
re
slave, la 1 sg. *J,loid-a-(i) (> v. sI. Btnt / vede "je sais") ; en baltique, probablement la 3 p. (sg.) *uoid-e (> lett. nov, nevaid, v. pro *vaide ~ 1re pl. waidimai, 2e pl. waiditi).
(secondaire) 2 e p.
encore trace de l'ancien paradigme de parfait, à travers une forme isolée: en e
*viiid-sï
? lett. -vaid *viiid-e - *viiid-ti
at/ve
La concordance entre le slave et le baltique indique l'antiquité du passage à un présent athématique ; mais chacun des deux groupes garde
- *viiid-mi
Ivem'
167
3HaIO
être en partie, par un souci de distinguer le perfecto-présent de sens "savoir" du groupe proche de sens "voir", dans lequel un degré zéro *JJid- (baltoslave *vtd-) avait sa place. Le degré *0 pouvait apparaître comme la marque spécifique du parfait, au point de s'imposer à l'ensemble du paradigme. D'autres traces du parfait indo-européen pourraient être identifiées en baltique, précisément parce qu'elles présentent ce qui apparaît comme un degré *a généralisé. Ainsi, le présent athématique du
V.
lit. liekmi "laisser,
rester" a des chances de procéder d'un ancien parfait intransitif, i.-e. w
*loik -h2 e (au sens de "rester" ; pour la forme, cf. lat. -lfquï, et, avec un redoublement, gr. ÀÉÀOl1TU) ; le degré radical *loik w - (> baIt. *laik- > lit.
liek-) est appuyé par l'infinitif V. pro poliïikt / bleiben "rester" (III, 1155). Cette forme de parfait se serait rapprochée de l'ancien présent à infixe nasal, i.-e. *liN(e)kW-ti (véd. rimikti, lat. linquo "laisser"), thématisé en baltique (v. pr. polfnka / bleibet "reste", III, 97 12, lit. dial. liflka "rester"), et aurait
hérité de celui-ci la double diathèse qui lui était propre
258
.
En lituanien
moderne, la forme thématique secondaire liekù (+- liekmi) a les deux valeurs: "laisser" et "rester". D'autres anciens parfaits en baltique pourraient survivre dans les verbes suivants259
169
Catégorie du nombre
Catégorie du nombre
168
une apophonie radicale était exceptionnelle entre le singulier et le pluriel (cf. i.-e. sg. *lJércfom "mot", vs. collectif *lJrcf-éh2) ; mais elle vaut aussi pour le système verbal, dans lequel elle caractérisait en indo-européen plusieurs types morphologiques (notamment les présents athématiques, les parfaits radicaux, etc.). Dans tous les cas, le baltique ne permet plus de
:
• v. lit. miegmi, lit. moderne miegù "je dors" (inf. mieg6ti) < parfait *mojgh-h2 e. • v. lit. sniegti, lit. dia!. sniêga "il neige" < parfait *snoig.,h-e (le rapport de v. lit. sniêgti et sniiiga serait le même que liêkti : lifzka).
reconstruire l'ancienne alternance indo-européenne, car il a généralisé un degré vocalique particulier. Le choix du degré radical s'est fait, en baltique, à partir de critères propres à chacune des catégories concernées. Ainsi, dans les présents radicaux athématiques, c'est le plus souvent le degré plein, propre au
Van Wijk (1933, p. 138) mentionne encore quelques autres verbes, mais
singulier, qui a été généralisé (par ex. balt. *es-mi "être", *ei-mi "aller",
leur analyse comme d'anciens parfaits demeure douteuse. En tout état de
*êd-mi "manger", *vë/-mi "permettre, souhaiter"), ce qui permettait,
cause, ces vestiges dispersés n'ont guère de pertinence pour la question de
parfois, d'éviter la formation de monosyllabes (par ex. dans le pluriel du
l'apophonie radicale dans les langues baltiques. Ou bien ils ont généralisé
verbe "être"). En revanche, là où le degré zéro, issu des formes du pluriel, a
un degré *a, qui ne participe plus à aucune alternance vocalique, ou bien
été imposé à l'ensemble du paradigme (balt. *ded-mi "placer", *dod-mÎ
leur degré radical est ambigü, notamment lorsque le radical présente une
"donner"), c'est sans doute là aussi parce qu'il permettait de fournir un
diphtongue ie, qui peut provenir aussi bien de i.-e. *ei que de i.-e. *01·
thème monosyllabique, en accord avec la tendance, ancienne en balto-slave,
IV. CONCLUSION: CATÉGORIE DU NOMBRE ET APOPHONIE RADICALE
à ne conserver que des présents radicaux athématiques à thème monosyllabique. Dans les parfaits radicaux, le degré
*a «
i.-e.
*0),
propre à
l'origine aux formes du singulier (type Ï.-e. *J,!ojd-h2e ''je sais"), semble
L'examen des données baltiques conduit à une conclusion purement
avoir été généralisé. La raison en est probablement qu'il constituait, à lui
négative: il n'existe, en baltique, aucune trace d'une apophonie radicale
seul, la marque de cette catégorie, alors que le degré zéro, propre à l'origine
dans l'opposition des nombres (singulier, vs. pluriel). Par rapport au
aux formes du pluriel (type i.-e. *J,!id-me-), n'apparaissait pas suffisamment
système indo-européen, le baltique se signale par une homogénéité du
caractéristique. En défmitive, c'est chaque fois le degré vocalique le plus
degré radical à l'intérieur des paradigmes. Cette observation vaut en
spécifique qui s'est partout imposé: il ne subsiste plus rien, dans les
premier lieu pour le système nominal, dans lequel, dès l'indo-européen,
langues baltiques, des anciennes apophonies indo-européennes.
258. En ce sens, cf. Petit (1999a, p. 84). Voir aussi Schm~lstieg ~;~o~~ p 88.~9}.Autre hypothèse chez Stang (1942, p. 1~1), qUI supp . ' ntaml'nation en baltique de deux verbes *leik-a "laIsser" « prése~t ~.-e. co , = gr. À-El'TIW ) et *1 az'kt'" 1 -e. * le' kW _% _ de, sens transitif z res t.er". « parfaIt ..' *1 ~kW h ' de sens intransitif). Cette contamination aurait eté SUSCItee par ?J. 1 - . 2e, .. t de *ez' et *ai. en ie en baltique oriental. Mais, dans cette l'evo utlOn conJom e *1' k ? perspective, que faire du présent à mfixe nasal zn -a . 259. Cf. Mahlow (1879, p. 144), van Wijk (1933, p. 136).
CHAPITRE IV CATÉGORIE DU GENRE ET APOPHONIE RADICALE
J. INTRODUCTION
Le critère du genre touchait en indo-européen deux types de classes grammaticales : il s'appliquait en premier lieu aux adjectifs et aux formes qui s'en rapprochent (participes et adjectifs verbaux, adjectifs possessifs, numéraux), ainsi qu'aux pronoms; en second lieu, une opposition de genre s'observe dans toute une série de substantifs, les "substantifs mobiles", qui distinguent un masculin et un féminin. Les deux types sont connus dans presque toutes les langues indo-européennes, et il n'est pas rare qu'ils présentent les mêmes marques morphologiques. Ainsi, en grec, le couple des substantifs mobiles 8ouÀ-os "esclave" (masc.), vs. 8ouÀ-TJ "esclave" (fém.) rappelle l'opposition des adjectifs àyu8ôs "bon" (masc.), vs. àyu611 "bonne" (fém.). L'apophonie radicale est, en général, mal attestée dans l'expression du genre en indo-européen. On ne peut mentionner que quelques faits isolés, qui n'offrent aucun caractère systématique. En grec, on oppose, pour le numéral "un", des formes masculine et neutre à degré plein radical, *sem-s, masc. (> gr. Ets "un"), *sem, nt. (> gr. Ëv "un"), et une forme féminine à degré zéro radical, *sm-ih2, fém. (> gr. !J.lU "une"); une opposition
172
Catégorie du genre
Catégorie du genre
comparable a dû exister en arménien, langue dépourvue de genre gramma-
à caution, si l'on tient à la considérer comme une expression grammaticale
tical, où le thème faible du féminin a été généralisé (* sm-iia, secon-
de la catégorie du genre.
173
dairement *sm-iios > ann. mi "un, une"). D'une manière un peu différente, dans le numéral "trois", l' indo-européen distinguait un radical au degré
II. "SUBSTANTIFS MOBILES" ET APOPHONIE RADICALE
plein au masculin (gr. TpELS-, véd. triryaf) "trois" < i.-e. *trei-es) et un radical au degré zéro au neutre (gr. TpLU, véd. trI "trois" < i.-e. *tri-h2 ).
On appellera ici "substantifs mobiles" des couples de substantifs ayant
Dans les pronoms, une apophonie du type de celle qui oppose, en védique,
la même signification lexicale et s'opposant seulement par leur genre
ay-am "celui-ci" (degré plein au masculin) et iy-am "celle-ci" (degré zéro au
grammatical. Les exemples de substantifs mobiles sont nombreux dans les
féminin), ou, à l'inverse, en latin, i-s "celui-ci" (degré zéro au masculin) et
langues indo-européennes et concernent pour l'essentiel trois catégories
ea "celle-ci" (degré plein au féminin), paraît exceptionnelle et ne se laisse
sémantiques. À ce type appartiennent au premier chef des substantifs
pas clairement ramener à un schéma indo-européen. En règle générale, dans
désignant des fonctions ou des statuts sociaux, qui peuvent être occupés
les adjectifs comme dans les substantifs, l'opposition des genres n'est associée à aucun phénomène d'apophonie radicale2 6o .
soit par des hommes, soit par des femmes, par ex. gr. 6 8oüÂos- "esclave"
En baltique, l'absence d'apophonie radicale est absolument régulière
(masc.), vs. fi 80uÂll "esclave" (fém.) ; lat. seruus "esclave" (masc.), vs. serua "esclave" (fém.) ;
V.
sI. pa6'b / rab'b "esclave, ôoùÂos-" (masc.), vs.
dans l'opposition des genres grammaticaux. Le vieux prussien, qui a
pa6a / raba "esclave, ôouÂll" (fém.) ; ft. vendeur, vs. vendeuse, etc. Une
conservé dans les adjectifs un système à trois genres (masc., fém., nt.), n'y
seconde catégorie est constituée par les désignations de parenté, qui
présente aucune apophonie radicale : les formes adjectivales sont
peuvent présenter, le cas échéant, les caractères de substantifs mobiles, par
distinguées en genre seulement par leur finale, par ex. v. pro labs "bon"
ex. lat. fiUus "fils" (masc.), vs. flUa "fille" (fém.) ; gr. à8EÀ
(masc.), vs. labba "bonne" (fém.), vs. labban "bon" (nt.), jamais par leur
(masc.), vs. à8EÂ
radical. La même contrainte vaut largement pour le baltique oriental, qui a
ana "grand-mère" (fém.)261. Une dernière catégorie sémantique est celle des
perdu le genre neutre, ainsi en lit. geras "bon" (masc.), vs. gerà "bonne"
êtres vivants sexués, notamment des animaux, qui s'opposent par paires,
(fém.), et en lett. labs "bon" (masc.), vs. laba "bonne" (fém.). Dans toutes
par ex. lat. equus "cheval" (masc.), vs. equa "jument" (fém.) ; esp. puerco "porc" (masc.), vs. puerca ''truie'' (fém.), etc. 262 .
les formes qui se rapprochent du système adjectival - participes, adjectifs possessifs, pronoms et numéraux -, le radical est constant d'une forme génétique à l'autre. La seule classe dans laquelle on pourrait éventuellement relever quelques faits d'apophonie radicale en baltique est celle des "substantifs mobiles". Cette classe soulève cependant des problèmes complexes, on le verra, non seulement du fait de la nature de l'apophonie en question, mais surtout parce que la notion même de "substantifs mobiles" demeure sujette
260. Voir par exemple Beekes (1985, p. 198).
261. Le cas en est cependant assez rare, car les noms de parenté sont en général de type supplétif, par ex. gr. iTUTrlP "père", vs. IJ.TrnW "mère"; lit. sünùs "fils", vs. dukté "fille" ; lat. frater "frère", vs. soror "sœur", etc. 262. Dans cette troisième catégorie (noms d'animaux), la motion féminine est relativement rare, et l'on trouve plus répandus l'ambivalence générique (par ex. gr. à LiTiTOS' "cheval" ou f) LiTiTOS' ''jument'', lat. bas "bœuf' ou "vache"), ou encore le supplétisme (par ex. v. sI. KOÛh / konjb "cheval, liTiTOS''', vs. Ko6hIJIa / kobyla "jument", lit. gaidys "coq", vs. vistà "poule", fr. bœuf, vs. vache). En revanche, dans la première catégorie (noms de fonctions), l'ambivalence générique est très rare (par ex. fr. populaire le prof, vs. la prof) et le supplétisme est lui-même exceptionnel (par ex. ang. king "roi", vs. queen "reine").
Catégorie du genre
174
Catégorie du genre
175
Dans les langues baltiques, comme dans toutes les autres langues indo-
- lit. vafnas "corbeau" (masc.), vs. varna "corneille" (fém.)264. Le
européennes, les substantifs mobiles sont en règle générale étrangers à toute
letton, qui a un féminin varna "corneille" (= lit. wirna), n'a
apophonie radicale. À titre d'illustration, on citera quelques exemples de
pas de contrepartie masculine
substantifs mobiles, régulièrement non apophoniques, en baltique :
répondrait au lituanien vafnas (le "corbeau" se dit en letton
* vârns
"corbeau" qui
• NOMS DE FONCTION:
kraûklis), mais une trace en subsiste peut-être dans le
- v. pro ludis / wirt "aubergiste", masc. (E 185), vs. ludini
toponyme Vârnukalni (cf. Derksen, 1996, p. 255). Quant
/ wirtyne "aubergiste", fém. (E 186).
aux formes prussiennes, elles sont
- lit. mokytojas "enseignant" (masc.), vs. mokytoja "enseignante"
d'intonation:
(fém.) ; pardavejas "vendeur" (masc.), vs. pardaveja ''vendeuse''
cf. acc. pl. warnins, III, 85 4), vs. warne / kro "corneille",
(fém.) ; kariilius "roi" (masc.), vs. karaliené "reine" (fém.).
fém. (E 722). Cf. aussi en composition:
- lett. skuoluôtajs "enseignant" (masc.), vs. skuoluôtaja
/ warkringel "der Raubwürger, pie-grièche, Lanius excubitor"
"enseignante" (fém.) ; pârdevejs "vendeur" (masc.), vs. pârdeveja
(E 755), colwarnis / ruche "die Saatkrahe, freux, Corvus
"vendeuse" (fém.) ; karalis "roi" (masc.), vs. karaliêne ''reine''
frugilegus" (E 726), bucawarne / holckro "der Eichelhaher,
(fém.).
geai, Garrulus glandiarius" (E 723)265.
• NOMS DE PARENTÉ (cas rare) :
-lit. senêlis "grand-père", vs. senëlé "grand-mère". • NOMS D'ANIMAUX : - V.
pro gertis "coq", masc. (E 763, E 203), vs. gerto "poule", fém.
V.
ambigu~s,
car dépourvues
pro warnis / rabe "corbeau", masc. (E 721, V.
pro warnaycopo
-lit. vilkas "loup" (masc.), vs. vilké "louve" (fém.)266. Le letton a un masculin vi/ks "loup" (= lit. vi[kas), mais son féminin est un dérivé peu significatif, lett. vi/cene "louve". Le prussien ne présente, pour sa part, qu'une forme
ambigu~,
dépourvue
(E 764) ; wosux "bélier, bouc", masc. (E 675), vs. wosee "chèvre"
d'intonation, le masculin wilkis / wuif"loup" (E 657, cf.
(E 676).
toponyme Wilkaskaymen "Kreis Pr.-Eylau"), voir MaZiulis
-lit. lokys "ours" (masc.), vs. loké "ourse" (fém.).
(PKEZ, IV, p. 238-239).
-lett. lâcis "ours" (masc.), vs. lâcene "ourse" (fém.). Quelques substantifs mobiles présentent cependant, en baltique, ce qui paraît être la trace d'une ancienne apophonie radicale. Les exemples les plus 1
cbHrs concernent des noms d'animaux, associés par paires, et séparés par leui-\intonation 263 :
263. Exemples chez Derksen (1996, p. 197-198 et 255-256). Voir également Mikulënienë (1995, p. 76-77).
-lit. zuikas ou zuikis "lièvre" (masc.), vs. zùiké "femelle du lièvre, hase" (fém.)267. Pas de correspondant direct dans les autres langues baltiques : le letton a za[cis "der Hase, lièvre" (masc.), vs. za[cene "die Hasin, hase" (fém.), qui paraît résulter d'une contamination d'un mot emprunté au biélo264. Trautmann (BSW, p. 343); Fraenkel (LEW, II, p. 1201) ; Hinze (1985, p. 141-142) ; Sabaliauskas (1990, p. 120). Cf. LKZ (XVIII, p. 277-280 et 282). . 265. Sur ces mots, voir Maziulis (PKEZ, IV, p. 224-225 et II, p. 240-241), Hmze (1995, p. 188 ; 1996-1997, p. 152-154 et 168), Blazek (1998, p. 9 et 20). 266. Trautmann (BSW, p. 359), Fraenkel (LEW, II, p. 1251-2), Sabaliauskas (1990, p. 36-37). Cf. LKZ (XIX, p. 380-386 et 389). 267. LKZ (XIX, p. 1080-1083 et 1078).
176
Catégorie du genre
russe 3a0Ka / zajka "lièvre" (dont provient aussi le lit. zuikis, par un intermédiaire couronien) et du letton ka/cis "chat" (cf. Mülenbachs-Endzelïns, ME, IV, p. 682-683). Le v. prussien a une autre désignation, plus archaïque: v. pro sasnis 1 hase (peut-être *sasins) "lièvre" (E 659), cf. dérivé sasnitinklo 1 hasengarn "der Hasengarn, piège à lapin, collet" (E 697), et
toponyme Sassenpile "Hasenberg, Zaj~czkowo". On pourrait ajouter un cas dans lequel le contraste métatonique n'apparaît plus qu'indirectement, à travers une variation dialectale: - lit. dial. sefnas "sanglier" (dans le dictionnaire de Kurschat, 1883), en regard du lit. standard sérnas "sanglier" (masc.), vs. sérné "femelle du sanglier" (fém.)268. Selon Büga (RR(B), II, p. 388), il faudrait partir d'un couple ancien: lit. sefnas (masc.), vs. sérné (fém.), nivelé en lituanien standard
177
Catégorie du genre
- lit. afitinas "canard mâle" (masc.), vs. antis "canard" (mot générique de genre fém.). - lit. gef'vinas "grue mâle" (masc.), vs. gérvé "grue" (mot générique de genre fém.). - lit. kufkinas "dindon" (masc.), vs. kùrké "dinde" (mot générique de genre fém.). -lit. stifninas "chevreuil mâle" (masc.), vs. stirna "chevreuil" (mot générique de genre fém.). -lit. safkinas "pie mâle" (masc.), vs. sarka "pie" (mot générique de genre fém.). - lit. sifsinas "frelon" (masc.), vs. sirsé "frelon, guêpe" (mot générique de genre fém.). - lit. iiufkinas "souris mâle" (masc.), vs. iiùrkë "souris" (mot générique de genre fém.).
au profit de l'intonation rude (cf. Derksen, 1996, p. 87-88).
Ce type de contraste métatonique est très rare, en revanche, dans les
Pas de correspondant direct dans les autres langues baltiques :
substantifs mobiles désignant des liens de parenté ou des fonctions ; il
le letton n'a qu'un mot rare et isolé, leU. sçrns "der
n'apparaîtrait plus, éventuellement, qu'à travers quelques traces indirectes.
Hermelin, hermine, Foetorius erminea" (transmis sans into-
Dans une conférence prononcée en juillet 1994 à l'Université de Vilnius et
nation, cf. Mülenbachs-EndzeIÜls, ME, III, p. 820), mais la
dont un bref résumé a été publié la même année dans une brochure
divergence sémantique peut faire douter du rapprochement
collective (1994, p. 17-18), Danguolé Mikuléniené a proposé de rapprocher
avec le nom lituanien du "sanglier".
du type lit. vafnas "corbeau", vs. varna "corneille" le lexème suivant:
Plus lointainement, une opposition comparable pourrait se trouver dans des
- lett. bêrns "enfant", masc., avec intonation douce (auquel
*befnas),
couples où le masculin est caractérisé par un suffixe -inas et une intonation
répondrait en lituanien
douce, tandis qut'fTe--féminin primaire (de sens générique) présente une
garçon", masc., avec intonation rude (auquel devrait répondre
intonation rude. Ainsj269 :
en letton berns ou befns)270. Forme inexploitable dans le
vs. lit. bérnas "gars,
lexique de Zinov : barnaj 1 dzieci "enfants" (Z 101, cf. Zinkevicius, 1985a, p. 70). Selon Mikuléniené (1994, 268. LKZ (XIV, p. 661). 269. Exemples chez Derksen (1996, p. 151-152). Cf. aussi Otrçbski (1965, p. 186). Le type n'existe qu'en lituanien et n'a pas de correspondant dans les autres langues baltiques : le letton, par exemple, désigne le mâle de l'animal par une périphrase. Comparer, par exemple, lett. dzerve "'grue", vs. dzervju tevifls"'grue mâle" (littéralement: "le mâle des grues") et lit. gérvé "'grue", vs. gervinas "'grue mâle".
p. 17), il faudrait partir d'un couple métatonique, *befnas, masc (d'où leU. bêrns, masc.), vs. *bérna, fém. (d'où lit. *bérna, et, secondairement, lit. bérnas, masc.). 270. Voir Derksen (1996, p. 216).
178
Catégorie du genre
Catégorie du genre
On pourrait appliquer la même analyse à un autre exemple:
179
indo-européenne. L'utilisation de la vrddhi comme marque du genre
-lit. vefgas "esclave", masc. (type accentuel 4) ou vérgas, masc.
féminin aurait un parallèle en indo-iranien, par ex. véd. mir- "homme"
(type accentuel 3), vs. vefge "esclave", fém. (type accentuel
2) ou vérge, fém. (type accentuel 1). Toutes les variantes sont
(masc.), vs. nârf"femme" (fém.)272, et l'on pourrait concevoir qu'elle ait connu encore en proto-baltique une certaine productivité273 .
signalées comme équivalentes dans les dictionnaires d'usage
Cette hypothèse, qui paraît vraisemblable au premier abord, soulève
de la langue standard moderne (par ex. D1, 4 éd., 2000,
néanmoins plusieurs problèmes. Tout d'abord, on note que l'opposition
p. 922, voir aussi LK1, XVIII, p. 745-746). Le letton a un
d'un degré bref et d'un degré long n'est attestée nulle part directement.
masculin vffgs "esclave" (Mülenbachs-Endzelïns, ME, IV,
Descriptivement, on a affaire, non à une apophonie quantitative, mais à une
p. 539), qui répond directement au lituanien vérgas (type
apophonie intonative, à une "métatonie". Dans le couple lit. vafnas
accentuel 3), et un féminin dérivé vefdzene "esclave", peu
"corbeau", vs. varna "corneille", seule l'intonation varie d'un genre à
significatif. On pourrait suggérer une distribution ancienne métatonique, *vefgas, masc (d'où lit. vefgas, masc., et,
l'autre. Cette observation vaut également pour les correspondants slaves, où l'on observe le même type de variation; on comparera par exemple274 :
secondairement, lit. vefge, fém.)., vs. *vérga, fém. (d'où lit.
- lit. vafnas "corbeau", cf. s.-cr. vrân "corbeau" (masc.), traces
vérgé, et, secondairement, lit. vérgas, lett. vfrgs, masc.)271.
indirectes : accent du russe BOpoH / v6ron, voyelle brève du tchèque
e
Le trait commun de tous ces substantifs mobiles est que la distinction
vran;
morphologique du masculin et du féminin est accompagnée d'un contraste
- lit. varna "corneille", cf. s.-cr. vràna "corneille" (fém.), traces
métatonique < intonation douce / intonation rude >, qui pourrait refléter
indirectes : accent du russe BopoHa / vor6na, voyelle longue du
une ancienne apophonie radicale. Dans cette perspective, par exemple, la
tchèque vrana.
variation < ef / ér >, qui semble séparer la forme masculine *befnas et la
On a certes le droit d'interpréter ce contraste intonatif comme le reflet d'une
forme féminine *bérnii, pourrait s'interpréter comme provenant d'une
ancienne apophonie quantitative, mais on ne doit pas oublier le caractère
ancienne opposition entre une diphtongue à premier élément bref dans le
indirect de son attestation. Une telle analyse n'a de sens que pour qui
masculin (masc. -ef- < *-er-) et une diphtongue à premier élément long
admet une équivalence historique d'une part entre diphtongues brèves et
dans le féminin (fém. -ér- < *-ër-), d'où une reconstruction *ber-nas
intonation douce, d'autre part entre diphtongues longues et intonation rude.
(masc.), vs. *bër-nii (fém.). On pourrait alors disposer d'un contexte où
Cette équivalence n'est pas admise par tout le monde. Par exemple,
l'expression du critère du genre serait associée à une apophonie radicale de type quantitatif, la motion féminine impliquant un passage au degré long. C'est en ce sens que ces couples de substantifs mobiles sont traditionnellement interprétés : on voit en général dans la métatonie rude qui caractérise la forme féminine le reflet de l'ancien procédé de la vrddhi
271. Données chez Derksen (1996, p. 86-87), qui n'évoque cependant pas cette possibilité d'analyse.
272. Cf. Brugmann (1901, p. 1-3), qui rapproche aussi le type secondaire du véd. agni- "Agni, feu", vs. agnây-ï "femme d'Agni", ari- "ennemi", vs. ariiy-î "femme de l'ennemi", etc. On a plutôt tendance, aujourd'hui, à y voir une dérivation féminine sur base marquée à finale de locatif, par ex. agni-, loc. agnâ « *agnây) ~ agnây-ï "femme d'Agni" ; en ce sens, Haudry (1978, p. 95). 273. En ce sens, van Wijk (1906-1907, p. 339) ; Pedersen (1933, p. 58) ; Leumann (1954, p. 10) ; Kurylowicz (1956, p. 159) ; Stang (1966, p. 156-157) ; Smoczyfiski (2001, p. 110). Cf. aussi Vaillant (GCLS/., 1, p. 301) ; Darms (1978, p. 344-345). 274. Voir par exemple Troubetzkoy (1921, p. 172-173).
180
Kortlandt (1985
Catégorie du genre
181
Catégorie du genre
1988) et son élève Derksen (1996, p. 255) limitent
distinguer du degré bref, s'il aboutit à une intonation douce [eT], ou du
l'intonation rude à la présence ancienne d'une laryngale indo-européenne
degré long d'origine glottale, s'il aboutit à une intonation rude [ér]. Il me
(par ex. lit. s eti "semer" < baltique
*se'-ti- <
i.-e.
*seh1-ti-)
ou d'une
semble que, dans ces conditions, l'économie du système favorise
préglottalisation (loi de Winter: lit. sesti "s'asseoir" < baltique *se 'd-ti
l'assimilation du degré long morphologique plutôt au degré long d'origine
< i.-e. *sed-ti-), tandis que l'intonation douce est, selon ces auteurs, propre
glottale (d'où [ér] dans les deux cas) qu'au degré bref (d'où [ef] dans les
aux allongements morphologiques (par ex. lit. gélà, acc. sg. g~l(l "peine,
deux cas) : cette dernière hypothèse empêcherait toute possibilité d'un
souffrance" < i.-e. *gWël_, ancien nom-racine) ou aux contractions (par ex.
degré long morphologique distinct du degré bref, dans les radicaux à
lit. gén. sg. fém. -os < *-aHas < i.-e. *-ehres). Kortlandt, en particulier,
diphtongue du baltique. Si l'on admet donc qu'un degré long
écrit d'une manière très claire (1988, p. 299) : "lengthened grade vowels
morphologique produit, dans les diphtongues, une intonation rude, rien
regularly have circumflex tone in Balto-Slavic"275.
n'empêche de considérer varna, vilké, etc. comme des exemples de vrddhi.
Dans cette perspective, il devient impossible d'expliquer la métatonie
Cette possibilité théorique une fois acquise, il reste encore à déterminer si
rude qui touche les formes féminines du type lit. varna "corneille", vi/té
elle est vraisemblable dans le cas précis des féminins métatoniques. Cette
"louve", etc., en termes d'allongement morphologique ou de vrddhi.
analyse soulève en réalité plusieurs problèmes.
Cependant, la théorie de Kortlandt me paraît devoir être corrigée, ou plutôt
Deux faits parlent contre l'hypothèse d'une vrddhi. Tout d'abord, il
complétée, sur un point276 • Qu'il y ait, en balto-slave, dans le système des
peut sembler suspect qu'un procédé aussi archaïque que la vrddhi indo-
voyelles une distinction entre l'intonation rude, reflet d'une laryngale indo-
européenne n'apparaisse plus, en baltique, que dans des mots dont les
européenne ou d'une glottalisation balto-slave, et l'intonation douce, issue
correspondants externes n'attestent jamais aucune vrddhi, ou dont l'étymo-
d'un degré long morphologique ou d'une contraction, ne me semble pas
logie demeure inconnue. En admettant que le procédé ait été hérité de
douteux, et sur ce point j'ai tendance à suivre les vues de Kortlandt. Mais
l'indo-européen, il faudrait encore identifier un point de départ pour son
il n'est pas sûr que la situation ait été exactement la même dans le système
développement ultérieur en baltique, c'est-à-dire au moins un mot dans
des diphtongues, car l'intonation douce y était déjà par nature associée au
lequel la vrddhi pourrait être ancienne. Le seul cas probablement ancien,
degré bref. Là où les voyelles opposent trois degrés, un degré bref [e] sans
celui du lit. varnas "corbeau", vs. varna "corneille", ne dispose de corres-
[el
d'intonation douce et un degré long [ê]
pondant qu'en slave, par ex. s.-cr. vrân "corbeau", vs. vràna "corneille",
d'intonation rude, les diphtongues ne peuvent opposer que deux degrés, un
mais demeure isolé en dehors du balto-slave : les rapprochements proposés
degré d'intonation douce [eT], originellement bref, et un degré d'intonation
avec le tokharien B wraufia "corneille de prédicateur"
rude [ér], originellement long. En d'autres termes, un degré long
*wiir-aufia <
morphologique [el peut avoir en baltique, dans les voyelles, une existence
Wrauske < *Wraufi-ske, avec suffixe diminutif -ske)Z77 ou avec des formes
distincte à la fois du degré bref [el et du degré long d'origine glottale [ê],
iraniennes comme le pashto vr8y, vrëy "corbeau", l' ormuri kall-wraya
tandis que, dans les diphtongues, un degré long morphologique ne peut se
"sorte de corbeau", le pehlevi variiy, variik, le baloutchi guriiy "corneille"
intonation, un degré long
« 275. Cf. aussi Derksen (1996, p. 19) : "a PIE. lengthened grade vowel yields a circumflex in Balto-Slavic and not an acute". 276. Voir, en ce sens, Petit (1999b, p. 246).
«
en réalité
*JJ[-, avec suffixe secondaire, cf. aussi anthroponyme tokh.
B
iranien *variika- < i.-e. *JJorH1J.ko-?) sont possibles, mais peu assurés,
277. Schwentner (1957, p. 167), van Windekens (1976, I, p. 583), MiliutëChomicenkienë (1990, p. 138), BlaZek (1998, p. 20).
182
Catégorie du genre
Catégorie du genre
tout autant que les comparaisons externes à l'indo-européen (fInnois varis
flottements entre le type à intonation rude (type 3) et le type à intonation
"corneille"), et, en tout cas, ils n'offrent aucune trace de vfddhi. On notera,
douce (type 4), ce qui est le cas de la plupart de nos exemples: lit. vérgas
*gor-nos,
(type 3) ~ vefgas (type 4), lit. bérnas (type 3) ~ *befnas (type 4, lett.
vs. *gor-na) aurait dû donner en lituanien quelque chose comme vafnas,
bêrns), lit. férnas (type 3) ;:::: sefnas (type 4)279. De tels flottements se
vs. *vuorna (?) > *vùrna (ou *ùrna ?). La fonne varna paraît ne pouvoir
rencontrent fréquemment dans les thèmes en *-a-, sous la forme de
procéder que d'un prototype *varna, ce qui suppose que la Vfddhi se soit
variantes dialectales du même mot280
enfIn, qu'une vrddhi de date indo-européenne (c'est-à-dire i.-e.
produite à l'époque où l'évolution de *0 en *0 était déjà réalisée, c'est-àdire après le stade indo-européen commun (d'où *varnas
--+
vrddhi *varna).
Tous les autres exemples de substantifs mobiles métatoniques présentent une situation comparable. Le lituanien vifkas "loup" est certes un mot hérité de l'indo-européen (cf. v. sI.
BJI'hK'h /
vl'bk'b, véd. vfkaJ;
"loup" < i.-e. *uJkw-os), mais son féminin vilké ne peut présenter une Vfddhi ancienne: par rapport à un degré zéro *(1] > balt. [il], une Vfddhi indo-européenne devrait être de fonne *[el] et non pas de forme
*lU > balt.
[n]o En outre, les autres langues indo-européennes n'ont aucune trace d'une vrddhi dans le féminin de ce mot; comparer par exemple : - véd. v(ktJ; "louve" (: vfkaJ; "loup"), V. isl. ylgr < germ.
*wulglz278
(:
ulfr < germ. *wulf-az), vha. wulpa (: wulfs), alb.
ujk6një (: ujk), plus lointainement gr. ÀûKalva (: ÀÛKOS), lat. lupa (: lupus). Le lituanien zuikis "lièvre", vs. zùikë "hase" est, pour sa part, un emprunt
183
:
- radical *juok- dans lett. juoks "plaisanterie" ~ radical *juok- dans
lit.juokas "plaisanterie" (type 4) ; - radical *laik- dans lett. laîks "temps" ~ radical *laik- dans lit.
laîkas "id." (type 4) ; - radical *lauk- dans lett. lauks "champ" ~ radical *lauk- dans lit.
laukas "id." (type 4) ; - radical *maur- dans lit. dial. maurai "lentille d'eau, Lemna" (type 3) et lett. maurs "lentille d'eau" ~ radical *maur- dans lit. dial. mauraî"lentille d'eau" (type 4) ; - radical *pûr- dans lett. pûri "blé", pl. ;:::: radical *pûr- dans lit. dial. pûras, pl. puraî "blé" (type 4) ; - radical *tauk- dans lit. taukai "graisse d'animal", pl. tantum (type 3) ~ radical *taiik- dans lett. tàuki "graisse", pl. ; - radical *:lirg- dans lit. zîrgas "cheval" (type 3) ~ radical *iifgdans lit. dial. iifgas "cheval" (type 4).
slave, non un mot hérité, comme le montre notamment la diphtongue ui, exogène en lituanien. La métatonie ne saurait donc y prétendre à une antiquité indo-européenne. Les autres exemples sont tous incertains. Rien n'indique, dans le cas du lit. sefnas ~ sérnas "sanglier", ni dans celui du lett. bêrns ~ lit. bérnas "enfant", ni enfm dans celui du lit. vefgas ~ vérgas "esclave", qu'on puisse avoir affaire à une Vfddhi indo-européenne. Du reste, le contraste intonatif ne reflète pas nécessairement une opposition ancienne entre le masculin et le féminin. On sait que, dans les paradigmes mobiles, il a existé des 278. Sur les problèmes que pose cette reconstruction, cf. Mayrhofer (1980, p. 131, note 12).
279. Dans de telles conditions, il est difficile de déterminer quelle est l'accentuation ancienne. Pour lit. bérnas ::::: lett. bêrns, l'étymologie fait plutôt attendre une intonation douce : on reconstruit un i.-e. *bher-nom "ce qui est porté, mis au monde" (nt.), dérivé de la racine i.-e. *bher- "porter", avec un suffixe *-nom (comme dans le gr. TÉKVOV "enfant"). Pour lit. vérgas ::::: vefgas, Derksen (1996, p. 73-74 et 87) restitue une intonation rude originelle, qu'il tire de la loi de Winter (i.-e. *(H)yerg- / *(H)JJreg "serrer, poursuivre", cf. got. wrikan "poursuivre, Ôl(J1KElV", russe Bopor / vorog "ennemi", ou i.-e. *JJerg"agir, travailler", cf. gr. Ëpyov "travail"). Analyse incertaine pour sérnas ::::: sernas (voir dossier étymologique chez Derksen, 1996, p. 87-90 ; cf. aussi Sabaliauskas, 1966, p. 162-163). 280. Exemples chez Derksen (1996, p. 211-232).
Catégorie du genre
184
Catégorie du genre
185
Parfois même, on observe une divergence intonative entre un substantif en
kurkinas / kùrké et dans iiurkinas / :liùrké. À part : [er] dans sérnas,
-a- et un substantif apparenté en -â- ou -ë-, sans qu'ils constituent un
bérnas et vérgas.
couple de substantifs mobiles, par exemple
281
:
Cette limitation significative a une double valeur, qui touche apparemment
-radical *kafhp- dans lit. kafhp-as "angle" (type 4) ~ radical *ktimp-
au paradoxe. D'une part, comme on l'a proposé plus haut, d'un point de
dans lit. kampa "siège de la luge" (type 1) ;
vue théorique, elle laisse ouverte la possibilité de reconnaître dans ces
- radical *kraiit- dans lit. kraiitas "bord" (type 4) ~ radical *krant-
formes un degré long morphologique en des termes compatibles avec les
dans lit. dial. kranta "id." (type 1) ;
conceptions de Kortlandt ; mais, d'autre part, d'un point de vue pratique,
- radical *kuok- dans lett. kùoks "arbre, tronc d'arbre" ~ radical
elle jette quelque doute sur cette hypothèse d'un degré long
*kuok- dans lit. kuoka "massue" (type 1) ;
morphologique. En effet, on ne pourrait être assuré de l'existence d'une
- radical *ldiv- dans lit. ldivas "bateau" (type 4) ~ radical */tiiv-
vrddhi dans ces formes que si l'on avait un exemple d'un tel allongement
dans lett. ldiva "id." ;
dans un féminin à radical vocalique, où l'opposition d'un degré bref (par
- radical *svifn- dans lit. svifnas "grenier, grange" (type 4) ~ radical
ex. [el) et d'un degré long morphologique (par ex. [el) est plus claire que
*svirn- dans lit. dial. svirna "id." (type 1) ;
dans les diphtongues. La limitation à des radicaux à diphtongue ne peut se
- radical *vafp- dans lit. vaFpas "cloche" (type 4) ~ radical *varp-
comprendre, à mon sens, que si le contraste en jeu dans la motion féminine
dans lit. varpa "épi de blé" (tyPe 1) ;
n'est pas réellement l'opposition d'un degré bref et d'un degré long, mais
- radical *maïs- dans lit. maïSas "sac" (type 4) ~ radical *mais-
plutôt celle d'une intonation douce et d'une intonation rude. Supposer là
dans lit. maisé "grand sac" (type 1) ;
une vrddhi ne permet pas d'expliquer pourquoi celle-ci n'apparaîtrait
- radical *sniëg- dans lit. sniegas "neige" (type 4), lett. sniegs "id."
précisément que dans des radicaux à diphtongue. L'hypothèse me paraît
~ radical
*snieg- dans lett. sniedze "flocon de neige".
donc devoir, en défmitive, être rejetée282 .
Dans ces conditions, il n'est peut-être pas nécessaire d'avoir recours à une
On est donc contraint d'avoir recours à d'autres explications. Kortlandt
métatonie rude dans une forme de féminin pour expliquer les différentes
(1985, p. 121) a proposé, par exemple, une nouvelle étymologie du couple
variantes. Un second argument peut être avancé contre l'hypothèse d'une vrddhi .
lit. varnas, vs. varna, qui permet, selon lui, d'éviter de faire appel à la vrddhi indo-européenne. Il suppose que les formes masculine et féminine
C'est le fait que tous les exemples mentionnés plus haut de métatonie rude
étaient pourvues à l'origine de suffixes différents : il faudrait partir d'un
dans la formation de féminins présentent une diphtongue comme centre de
masculin *!Jor-!Jos "corbeau" (cf. pour le suffixe le latin cor-uus "corbeau",
la syllabe radicale:
et, plus éloignés, les adjectifs de couleur comme lit. sif-vas "gris", muf-vas
- [ar] dans varna, [il] dans vilké, [ui] dans zùiké. De même: [an]
"rougeâtre") et d'un féminin *!Jor-Hn-aH "corneille" (cf pour le suffixe le
dans aiitinas / antis, [ar] dans safkinas / sarka, [er] dans gefvinas
latin cor-nfx et le grec
/ gérvé, [ir] dans stifninas / stirna et dans sif'Sinas / sîrsé, [ur] dans
primitivement "brûler" (cf. lit. virti "cuire", got. warmjan "chauffer,
281. Exemples chez Mikulënienë (1994, p. 17) ; Derksen (1996, p. 198 et 253).
KOpWVT]
"corneille"). Le radical *Jjor- signifierait
282. Sur ce point, je me sépare désormais de ce que j'ai écrit dans Petit (1999b, p. 246), où je me fondais sur l'analyse traditionnelle sans voir clairement tous les problèmes qu'elle suscitait.
Catégorie du genre
186
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Catégorie du genre
*kerH- "brûler" * JlerH- "brûler"
hitt. warnuzzi "brûler", causatif) et aurait été substitué, en balto-
racines en question sont des racines set: i.-e.
slave, à un radical *kor- de même sens (cf. lit. karstas "chaud", v. is1. hyrr
intonation rude de lit. karstas "chaud") et Ï.-e.
"feu", lat. carbo "charbon"), lequel se trouve dans les correspondants du
intonation rude de lit. virti "cuire, bouillir"). On peut imaginer que, sur la
latin cor-uus "corbeau", cor-nu "corneille" et du grec Kop-aç "corbeau",
seconde de ces racines, le balto-slave a connu deux formes distinctes, d'une
KOP-wVll "corneille". D'un point de vue sémantique, on pourrait passer de
part un adjectif *J!.orH-u- "brûlé, noir" (avec degré radical
racines signifiant "brûler" à des désignations du "corbeau" et de la
comme dans le lit. platùs "vaste" < *plothru-) et d'autre part un substantif
"corneille" à travers une motivation qui assimilerait la couleur noire de ces
de genre féminin *JlorH-neh2 "animal de couleur noire, corneille" (avec
oiseaux à une matière brûlée, carbonisée ("brûlé" > "noir" -- "oiseau noir"
suffixe *-neh2, comme dans lit. vilna "laine", stena "mur", etc.). La
> "corbeau, corneille") ; pour l'évolution "brûlé" > "noir", on pourrait citer
coexistence, en indo-européen, d'un adjectif en *-u- et d'un substantif en
les cas parallèles du latin ater "noir", apparenté à l'avestique (v. avest.,
*-nos, *-na, ne serait pas un fait isolé, cf. par exemple gr.
avest. réc.) atars"feu", ou encore du v. ang. blœc "black, noir", apparenté
faible", vs. lit. tarnas "serviteur". L'adjectif en *-u- pourrait être attesté
au lat.fiagro "s'enflammer, brûler". Le slave pourrait encore fournir une
directement en lituanien varùs "qui cuit, brûle facilement" (s'il ne s'agit
trace d'un intermédiaire sémantique, à travers un adjectif v. sI.
BpaH'h
pas d'une formation récente à partir du verbe virti "cuire", ce qui est plus
/ vran'b, russe BOpoHOÜ / voronoï "noir, moreau (en parlant de la robe d'un
vraisemblable) et indirectement à travers le causatif hittite warnuzzi
8dÀTrEW",
283
*0
(cf. (cf.
secondaire,
TÉpUS
''tendre,
S'agissant du
"brûler" (cf. hitt. tepu- "petit" et tepnu- "diminuer")284. Dans cette analyse,
"corbeau" et de la "corneille", on pourrait donc admettre, avec Kortlandt,
on pourrait admettre que la forme féminine *JJorH-neh 2 survit directement
que les formes balto-slaves héritées *varvas, vs. *varHnaH > *varvas, vs.
dans le balto-slave *varna "corneille" (lit. varna, s.-cr. vràna), dont
*varna se seraient contaminées, d'où lit. varnas "corbeau", vs. varna
l'intonation rude s'explique à partir de la laryngale finale de la racine.
"corneille". Cette hypothèse ingénieuse, quoique spéculative, permettrait
L'adjectif *J!.orH-u- fournissait, quant à lui, un contexte favorable à la
d'expliquer la métatonie rude attestée dans le couple lit. varnas, vs. varna,
disparition de la laryngale finale de la racine et devait donc aboutir à une
sans recourir à la notion de vrddhi.
forme balto-slave *var-u-, laquelle aurait été, de manière secondaire,
cheval)", qui peut provenir d'un indo-européen *JJor-no-
•
Tous les problèmes ne sont cependant pas résolus pour autant. Ainsi, Kortlandt ne se prononce pas sur la formation morphologique de ces deux désignations, *kor-Jlos ~ *Jlor-J!.os "corbeau" et
*kor-HnaH ~ *1)or-HnaH
"corneille". À titre expérimental, on peut faire ici une suggestion susceptible d'expliquer la formation de ces deux lexèmes. Il est notable que les deux 283. L'adjectif slave est cependant ambigü, car il pourrait s'agir d'une dérivation secondaire à partir du nom du "corbeau" ('"corbeau" --+ "noir comme le corbeau") : en russe, par exemple, l'adjectif BopoHoit / voronoï "noir" paraît avoir avec le substantif BOpOH / voron "corbeau" la même relation que l'adjectif rOJly6oit / goluboï "bleu clair" avec le substantif rOJly6h / golub' "pigeon". Cf. UhlraHeHKo (1989, p. 69).
284. Cf. Bader (1979, p. 199), Koch (1980, p. 236). On mentionnera, à propos de la forme hittite, une autre analyse possible qui va finalement dans le même sens, mais me parait moins économique. La forme balto-slave *varvas, supposée par Kortlandt et qui parait remonter à un indo-européen *uor-yos, pourrait éventuellement être rapprochée directement de la forme verbale hittite warnuzzi "chauffer". En effet, la coexistence d'un dérivé nominal de type *CoC-u o- et d'un verbe à suffixe *-nu- n'est pas un fait isolé dans les langues indo-européennes, notamment en grec, cf. gr. homo 60vpos "impétueux" (*60pFos < *cforh3-Jlo-) ::::: 66pvVIlaL "sauter", ovX-os "funeste" (*6X--F os < *h301hllIo-) ::::: ÛX-X-Vj.1Œl "périr", oupos "vent favorable" (*6p-Fos < *hlOr-Jlo-) ::::: 0PVVllaL "se lever", cf. Garcia-Ram6n (2000, p. 63-77). On pourrait alors peutêtre ajouter à ce groupe *Jlor-yos "brûlé> noir" (--+ balto-slave *varvas "animal noir, corbeau") ::::: *uor-nu- "brûler, chauffer" (--+ hittite warnuzzi "chauffer"). Mais, en l'occurrence, cette analyse laisserait inexpliquée la métatonie qui sépare le masculin vaFnas du féminin varna.
188
Catégorie du genre
Catégorie du genre
simultanément thématisée et substantivée au sens d"'oiseau noir, corbeau",
comme lit. vifkas "loup", vs. vilké "louve", ou lit. zulkis "lièvre", vs.
d'où *var-u- "noir" - *var-vas "oiseau noir" (*vaf-vas), et enfm vafnas par
zùikë "hase", et qu'à l'inverse elle pouvait aussi donner lieu à la création
varna2 85 •
189
La chute de la laryngale serait due, en ce cas,
de masculins à métatonie douce fondés sur des féminins rudes dans le type
à ce qu'elle se trouvait à l'origine dans un contexte antévocalique
lit. antis "canard" (fém.), vs. afitinas "canard mâle" (masc.). Il resterait,
ultérieurement modifié. Simple possibilité qu'on évoque ici en passant et
dans cette perspective, à expliquer la divergence morphologique qui sépare
qui demeure une pure spéculation.
la corrélation {-as / -a} dans le lit. vafnas "corbeau", vs. varna "corneille",
contamination avec
S'agissant du lit. vifkas "loup", vs. vilké "louve", Kortlandt (1977, p. 324-325) et à sa suite Derksen (1996, p. 210-211) supposent que la
la corrélation {-as /
-el
dans le lit. vifkas "loup", vs. vilké "louve", et la
corrélation {-is / -el dans le lit. zuîkis "lièvre", vs. zùiké "hase".
métatonie rude dans la forme féminine est due à une rétraction de l'accent à
À mon sens, le problème peut être résolu en des termes chronologiques.
partir d'un prototype baltique *yilkiH-aH, qui s'analyse comme une forme
La corrélation {-as / -a}, attestée dans le lit. vafnas "corbeau", vs. varna
secondaire recaractérisée par un suffIXe *-aH « i.-e. *-eh2 ) d'un plus ancien
"corneille", représente vraisemblablement la plus ancienne forme de motion
*yJkw-ihr (= véd. v[k-Û) "louve", v. isl. ylgr). Cette hypothèse me paraît
féminine : elle dispose de correspondants externes non seulement, en
devoir être mise en doute, car on voit mal pourquoi la rétraction de l'accent
l'occurrence, dans les langues slaves (par ex. serbo-croate vrân "corbeau",
aurait produit dans certains mots une métatonie douce (par ex. lit. piené
vs. vràna "corneille"), mais aussi, de manière plus générale, dans d'autres
"pissenlit", type 2 < *pëin-iia +- masc. pienas "lait", type 1), dans d'autres
langues indo-européennes (par ex. lat. lupus "loup", vs. lupa "louve").
mots une métatonie rude (par ex. lit. vilké "louve", type 1 < *yi/kiia
Quant à la corrélation {-as /
+-
masc. vifkas "loup", type 4), et dans d'autres mots encore aucune
métatonie (par ex. lit. sargé "gardienne", type 1 < *sargiiii
-el, attestée dans le lit. vifkas "loup",
vs. vilké
"louve", elle prolonge sans doute elle aussi une corrélation archaïque,
masc.
quoique marginale, pourvue à l'origine d'un sens possessif (cf. corrélation
sargas "gardien", type 3, ou encore lit. /iuté "lionne", type 2 < */iütiia
i.-e. {-os / -ih2 }, dans le véd. vtka/J "loup", vs. vrkÎ!J "louve"), mais son
masc. /iutas "lion"). On peut difficilement admettre que la rétraction de
développement est purement baltique et l'on observe qu'elle a été
l'accent ait eu des effets aussi divers sans que soit énoncé le principe de
pratiquement généralisée dans les substantifs mobiles de ces langues2 86. Si
leur distribution. Il convient donc de chercher d'autres explications.
le couple lit. vafnas "corbeau", vs. varna "corneille" est resté en dehors de
4-
+-
L'hypothèse la plus économique, à mon sens, est de supposer que la
cette innovation, c'est probablement parce que le "corbeau" et la "corneille"
métatonie rude, qui disposait d'un fondement étymologique dans le couple
ne sont pas à proprement parler des substantifs mobiles (la "corneille", on
lit. vafnas "corbeau", vs. varna "corneille", a pu s'étendre par analogie à
le sait, n'est pas la femelle du "corbeau", mais appartient à une espèce
quelques autres substantifs mobiles, où elle ne pouvait pas être ancienne,
proche), et aussi parce que le féminin varna a des chances d'être plus ancien que le masculin vafnas et peut représenter sa forme de fondation. La
285. L'évolution supposée ici (adjectif *varùs "brûlé" - substantif *varvas "oiseau brûlé, noir") aurait un parallèle dans le cas du lit. purùs "mou (en parlant d'une terre meuble)" - purvas "terre meuble, boue", cf. aussi lit. pifvas "ventre" +- adj. *pi/ùs "plein" « i.-e. *pJh/-u-, véd. puru-, cf. aussi gr. TroMs "abondant", got.filu "beaucoup, ÀLav, a68pa, TroÀÀ0", à côté de *plh r n%- > lit. pUnas "plein"). Sur le lituanien pifvas "ventre", cf. Smoczyfiski (2001a, p. 121).
tendance a pu exister, du reste, à introduire cette corrélation secondaire {-as / -e} dans le couple du "corbeau" et de la "corneille", comme le montre
notamment la forme dialectale du lituanien varné au lieu de varna en
286. Sur ce système, voir Petit (1999a, p. 67-71).
Catégorie du genre
Catégorie du genre
regard du masculin vafnas. La dernière étape du développement est atteinte
une différence originelle de leurs formations, est une solution envisageable,
dans la corrélation {-is / -ë}, qui apparaît secondaire par rapport à {-as
et elle peut fournir un point de départ au développement de ce qui apparaît
/ -el, et dans laquelle le masculin a été refait en *-is «
bien, en lituanien, comme un contraste métatonique, non comme un
190
î.-e. *-ii-os) d'après
le féminin sur le modèle des adjectifs (type lit. didelis "grand", vs. didelé
191
contraste apophonique.
"grande"). On peut ainsi expliquer le couple lit. zuïkis "lièvre", vs. zùiké
Du reste, même si l'on tient à la conception traditionnelle d'une Vfddhi
"hase" comme l'aboutissement récent d'une plus ancienne corrélation
dans le type lit. varnas, vs. varna, l'apophonie qui s'y manifeste n'est pas
zuikas "lièvre", vs. zùiké "hase", encore attestée de manière résiduelle en
directement liée à l'expression grammaticale du genre. En effet, on ne peut
lituanien. Le v. prussien offre un cas comparable, puisque cette corrélation
parler du "genre" comme catégorie grammaticale que là où il apparaît de
-el
apparaît entre le masculin warnis "corbeau" et le
manière systématique, c'est-à-dire dans les adjectifs, qui opposent
féminin warne "corneille" (*varnis, vs. *varni) : elle doit y avoir remplacé
régulièrement un masculin et un féminin. Dans les substantifs mobiles, en
secondaire {-is /
-el
(*varnas, vs. *varni), elle-même
revanche, le critère du genre n'est ni systématique, ni constitutif d'un
primitive {-as / -a} (*varnas, vs.
paradigme; il s'agit d'une dérivation lexicale, non d'un marquage
*varna). Ces divergences morphologiques n'empêchent donc pas de
grammaticaI287. Dans une étude consacrée à l'évolution de l'apophonie
rapprocher les différents lexèmes concernés et d'admettre que la métatonie
grammaticale en baltique, ces formes n'ont par conséquent aucune
rude a pu s'y introduire à partir du modèle, seul ancien, du couple lit.
pertinence. L'apophonie radicale est en réalité absolument étrangère, dans
vafnas, vs. varna.
les langues baltiques, à l'expression grammaticale du genre.
une plus ancienne corrélation {-as / récente par rapport à la corrélation
III. CONCLUSION: CATÉGORIE DU GENRE ET APOPHONIE RADICALE
Dans les langues baltiques, le critère du genre grammatical n'est jamais associé de manière régulière à des phénomènes d'apophonie radicale. La seule catégorie dans laquelle on ait pu identifier ce qui ressemble à une alternance vocalique - celle des substantifs mobiles du type lit. vafnas "corbeau", vs. varna "corneille" - présente en fait une métatonie rude propre au baltique, qui n'a, en définitive, rien à voir avec l'ancienne apophonie indo-européenne. Dans une analyse traditionnelle, on interprète cette métatonie rude comme un vestige du procédé de la Vfddhi indoeuropéenne, mais on a vu que, si cette hypothèse est possible d'un point de vue théorique, elle soulève néanmoins de nombreux problèmes, qui amènent à la mettre en doute. À cet égard, l'hypothèse de Kortlandt, pour qui la métatonie rude dans le couple lit. varnas, vs. varna s'explique par 287. Sur cette distinction, cf. Petit (l999a, p. 70).
CHAPITRE V CATÉGORIE DU MODE ET APOPHONIE RADICALE
I. INTRODUCTION
La catégorie du mode est probablement, de toutes les catégories grammaticales, celle dont la reconstruction indo-européenne pose le plus de problèmes. On hésite encore sur le nombre des modes indo-européens: ils sont sept en védique (indicatif, injonctif, subjonctif, optatif, impératif, participe, infinitif), cinq en gotique (indicatif, optatif, impératif, participe, infmitif), quatre en hittite (indicatif, impératif, participe, infmitif). Et, pour certains d'entre eux, on ne sait même pas si leur existence doit être attribuée à l'indo-européen commun ou appartient à une évolution indépendante de chacune des langues (notamment l'infinitif). Un autre problème est de déterminer une classification des modes indo-européens en fonction de leur valeur. Doit-on considérer comme des "modes" au sens propre, c'est-à-dire comme des modalités du procès verbal, le participe qui n'est qu'une forme adjectivale du verbe, et l'infinitif qui en est une forme nominale indéclinable ? peut-on, en outre, analyser comme modaux les substantifs verbaux de sens abstrait, dont la formation est systématique
194
Catégorie du mode
Catégorie du mode
195
dans plusieurs langues (notamment, en lituanien, les substantifs en -imas,
• impératif: présent (par ex. seiti "soyez !").
par ex. lit. sukimas "le fait de tourner" : sùkti "tourner") ? La question de l'apophonie radicale est, quant à elle, confrontée à une
• optatif: présent-futur? (par ex. bousei "qu'il soit !", boulai "qu'il soit !").
difficulté préalable, celle de définir, dans l'ensemble des relations
• participe: présent actif (par ex. skeUiints "devant, qui doit"),
qu'entretiennent entre elles les différentes fonnes modales, ce qui est fonne
présent passif (par ex. poklausïmanas "exaucé, qui est écouté"),
de fondation et ce qui est fonne fondée. Pour ne prendre qu'un exemple
prétérit actif (par ex. ïduns "qui a mangé"), prétérit passif (par
emprunté au lituanien, une apophonie radicale s'observe apparemment entre
ex. crixtits "baptisé, qui a été baptisé").
l'indicatif présent 3e p. pef1c-a "il achète" et le conjonctif 3e p. piFk-ty "il
• infinitif (par ex. bout "être", buton "être", diitwei "donner").
achèterait" (apophonie < er / ir », mais en réalité le thème du conjonctif est directement fondé sur celui de l'infinitif piFk-ti "acheter", et celui-ci, comme dans de nombreux autres verbes, apparaît inséparable de l'indicatif prétérit pifk-o "il acheta". La notion de "contraste apophonique" n'a de sens que dans l'opposition de fonnes associées par un rapport morphologique direct. Il importe donc de définir ces rapports morphologiques avant de tenter d'identifier et de décrire les phénomènes apophoniques. Dans les autres catégories grammaticales étudiées jusqu'ici, cette nécessité était moins sensible parce que l'apophonie ne pouvait apparaître que dans le cadre de séries fennées et parfaitement claires, que ce soit dans un paradigme personnel ou casuel ou plus largement dans l'opposition des nombres ou des genres. Une dernière difficulté résulte de la structure particulière des langues baltiques. D'une manière générale, le baltique paraît avoir profondément modifié le système des modes indo-européens, d'une part en réduisant le nombre des modes hérités, d'autre part en créant de nouveaux modes, dont l'existence ne doit rien, ou presque, à un prototype indo-européen. Descriptivement, l'inventaire des modes des langues baltiques peut être établi comme suit : - V. PRUSSIEN (5 modes) :
-LITUANIEN (8 modes):
• indicatif: présent (par ex. dirbu ''je travaille"), prétérit (par ex. dirbau "je travaillai"), futur (par ex. dirbsiu "je travaillerai"), imparfait fréquentatif (par ex. dirbdavau ''je travaillais"). • impératif: présent (par ex. dirbk "travaille !"). • conjonctif: présent (par ex. dirbciau ''je travaillerais"). • vestiges du mode optatif, mode "pennissif' du lituanien: présent (par ex. tedirbie "qu'il travaille !"). • participe : présent actif (par ex. dirbçs "travaillant, qui travaille"), présent passif (par ex. dirbamas "travaillé, qui est travaillé"), prétérit actif (par ex. dirbf;s "ayant travaillé, qui a travaillé"), prétérit passif (par ex. dirbtas "travaillé, qui a été travaillé"), imparfait fréquentatif actif (par ex. dirbdavf;s "qui travaillait"), futur actif (par ex. dirbsiçs "qui travaillera") ; ce qu'on appelle le "mode relatif' n'est qu'un emploi particulier des formes participiales et ne constitue pas une classe morphologique spécifique. • gérondif : présent actif (par ex. dirbant "travaillant, qui travaille"), prétérit actif (par ex. dirbus "ayant travaillé, qui a travaillé"), imparfait fréquentatif actif (par ex. dirbdavus "qui
• indicatif: présent (par ex. ast "il est", asmai "vous êtes"),
travaillait"), futur actif (par ex. dirbsiant "qui travaillera").
prétérit (par ex. bhe "il fut"), futur (par ex. postiisei "tu
• infmitif (par ex. dirbti "travailler").
deviendras").
Catégorie du mode
196
Catégorie du mode
197
• supin, d'emploi rare dans la langue moderne (par ex. dir bt1r!
on observe, en regard d'un indicatif à degré plein au singulier (type i.-e.
"travailler").
*h1es-mi "je suis", *h1ei-mi 'je vais") et à degré zéro au pluriel (type i.-e.
- LEITON (6 modes) :
• indicatif: présent (par ex. stràdâju "je travaille"), prétérit (par ex. stràdâju "je travaillai"), futur (par ex. stràdâsu 'je
*h1s-me- "nous sommes", *h1i-me- "nous allons"), les structures
apophoniques suivantes : -le SUBJONCTIF était marqué par la thématisation et un degré plein
travaillerai") ; ce qu'on appelle le "mode débitif' ne constitue
constant du radical: type *CeC-%-, i.-e.
pas une classe morphologique à part, mais un emploi marqué
sg. *h1es-e-ti,
des formes de l'indicatif.
subjonctif asiïni, asati, asiïma, asan ; gr. homo subjonctif
• impératif: présent (par ex. stràdâ "travaille !").
Ëw, Ël],
• conjonctif: présent (par ex. stràdâtu "je travaillerais"). • participes : présent actif (par ex. stràdâjuôss "travaillant, qui
secondaire ; lat. subjonctif> indicatif futur ero, erit, erimus, erunt).
travaille"), présent passif (par ex. stràdâjàms "travaillé, qui est
-l'OPTATIF était marqué par une suffixation alternante et un degré
travaillé"), prétérit actif (par ex. stràdâjis "ayant travaillé, qui a
zéro constant du radical: type *CC-jeh1-/-ih1-, i.-e.
r e pl. *h1es-o-me-,
ËWIJ-EV,
Ire
sg. *h1es-o, 3e
3e pl. *h1es-o-nt(i) (> véd.
Ë WUl, avec voyelle thématique longue
e
r
e
Ire
sg.
travaillé"), prétérit passif (par ex. stràdâts "travaillé, qui a été
*h1s-iehrm, 3 sg. *h1s-jeh1-t,
travaillé").
*h1s-ih1-ent (> véd. optatif syâlJZ, syât, pl. à degré plein
• gérondif: présent actif (par ex. stràdâjuôt "travaillant, qui
secondaire syâma, syur ; gr. optatif EITJv, dTJ, El!J.E V, EIEv;
travaille").
v. lat. subjonctif siem, siet,
• infmitif (par ex. stràdât "travailler").
verbes (appartenant au type acrostatique), la suffixation ne
SlmUS,
e
pl. *h 1s-ih1-me,3 pl.
sient). Dans quelques
On passera ici en revue les phénomènes d'apophonie radicale dans
présentait aucune alternance et le radical était constamment au
l'expression des différents modes, en les répartissant en trois groupes: on
degré plein: type *CeC-ih l -, par ex. i.-e. 1re sg.
distinguera d'abord le's modes de moindre réalité (subjonctif, optatif,
"je voudrais" (> lat. uelim, got. wiljau).
impératif), puis les formes adjectivales du verbe (participes, gérondifs), et enfm les formes nominales indéclinables du verbe (infinitif, supin).
*yelH-ih1-m
- l 'IMPÉRATIF était marqué, à la 2e sg., par une désinence zéro et un degré plein du radical ou par un système désinentiel particulier et un degré zéro du radical: type *CeC-, par ex.
II. SUBJONCTIF, OPTATIF ET IMPÉRATIF
L'indo-européen distinguait trois modes de moindre réalité, exprimant le désir ou la volonté: le subjonctif, l'optatif ou l'impératif. Chacun d'entre eux était caractérisé par une ou plusieurs formations apophoniques particulières, qui les distinguaient de l'indicatif. Si l'on prend comme exemples les verbes radicaux athématiques, qui sont riches en archaïsmes et dans lesquels les variations apophoniques sont encore clairement attestées,
i.-e. *h1ej "va!" (> lat. ï "va !"), ou type *CC-cfi, par ex. i.-e. *h1i-cfi "va 1" (> véd. ihi, gr. 'lel "va !"). Dans cette seconde formation, un degré plein n'apparaît que lorsque la réalisation du degré zéro pose un problème phonétique, par ex. véd. addhi "mange !" e
«
Ï.-e. *h1ed-cfi, au lieu de
th1d-cfi). À la 2 pl., l'impératif présentait, optionnellement,
Catégorie du mode
198
Catégorie du mode
un degré plein ou un degré zéro (cf. véd. éta ou
ita
"allez !")288.
199
109 19) ; pareyJey "qu'il vienne !" (II, 9 15) ; pokünli "qu'il protège !" (III, 133 13 ).
Les langues baltiques ont perdu toute trace de l'ancien subjonctif indo-
- FORMATION à suffixe *-lei-, *-lai-, à valeur de conditionnel
européen et n'ont conservé que l'optatif et l'impératif, en les modifiant
(parfois d'optatif, quoique surtout en subordonnées) de 3e p.
parfois de manière considérable.
(+ désinence -~), de 2 sg. (+ désinence -si), de
e
L'optatif indo-européen survit largement en vieux prussien, où les
r e pl.
(+ désinence
e
-mai) et de 2 pl. (+ désinence -te ou -ti). Pas d'exemple de 1re sg. e
formes qui en procèdent se sont réparti les fonctions anciennes de l'optatif,
• Exemples: 3 p. boülai "qu'il soit, il serait" (III, 113 27),
celles de l'impératif et enfin ont développé celles d'un conditionnel. On
baulai (III, 103 10) ; eilai "qu'il aille, il irait" (III, 12h) ; turrïlai
peut distinguer trois formations, qui correspondent approximativement à chacune de ces trois fonctions 289 :
"qu'il aie, il aurait" (III, 103 12 ; Il hl ; 11525 ), turïlai (III, 99 11 )
e
;
55 7
;
131 11 ),
e
• Exemples : 2e sg. ieis "va !" (III, 7 b2) ; gerbais "parle!"
quoitijlai (III, 1175), quoitilai (III, 55 18) - 2 sg. quoitïlaiIi "que tu veuilles, tu voudrais" (III, 79 14-15 ; 81 14 ; 109 12 ; 11929 ; e 133 4) - r pl. turrïlimai "que nous ayons, nous aurions" (III,
(III, 107 13- 14) ; weddais "conduis !" (l, Ils), wedeys (II, 11 5),
11323), - 2 e pl. quoitïlaiti "que vous vouliez, vous voudriez"
weddeis (III, 55 14) - 2e pl. ieUi "allez !" (II, 11 12, III, 59 13), seiti "soyez 1" (III, 9h3 ; 93 23 ; 958 ; 972 ;
(111,6714-15 ; 1171), quoitijlaiti (III, 125 5-6). Une fois, la forme de e 3 p. schluiilai est employée avec un sens de 1re sg. "que je
105 26 ), seïti (III, 898 ; 9h3) ; gerbaiti ''parlez 1" (III, 12h2) ;
serve, je servirais" (III, 43 21 ) ; elle apparaît ailleurs régulièrement
edeitte "mangez !" (l, 13 8), ydieyti (II, 13 8), ïdeiti (III, 75 4),
avec un sens de 3 p. schlüfilai "qu'il serve, il servirait" (III,
idaiti (III, 87 17).
12h).
- FORMATION à suffixe *-ei- ou *-ai-, à valeur d'impératif de 2 sg.
(+ désinence -s) et pl. (+ désinence -te ou -ti).
ieithy (I, 11 10)
-
quoitïlai "qu'il veuille, il voudrait" (III, 55 3
;
;
FORMATION à suffixe *-sei-, *-sai-, *-se- ou *-si-, à valeur
e
Les différentes formations attestées ont donc, en général, des valeurs distinctes. Elles se distinguent également par leur structure morphologique.
d'optatif de 3e p. (+ désinence -~).
9h2;
Descriptivement, les deux dernières formations apparaissent fondées sur le
101 11 ), bouIei (III, 9h4; 103 14 ; 10320), bouJai (III,
thème de l'infinitif, qu'elles reproduisent régulièrement. Ce rapport
95 17), baüJei (III, 79 19 ; 8lt9), boüJe (III, 13316), bouJe (III,
morphologique s'observe clairement dans le cas du verbe "être", qui est
daJai "qu'il donne !" (III, 133 18-19), daJe (III, 9914 ;
d'un type supplétif: l'optatif en *-sei (*bü-sei, v. pro boü-Iei) et le
• Exemples: 3e p. boüIei "qu'il soit !" (III, 89 17
93 12
;
105 10)
;
;
conditionnel en *-lai (*bü-lai, v. pro boü-lai) reposent sur l'infinitif
*bû-t(on) (v. pro boü-t, boû-ton "être") et sont en revanche éloignés aussi 288. Cf. Watkins (1969, p. 32-33), Jasanoff (2003, p. 82). Je dois ces références à G.-J. Pinault. 289. Données tirées d'Endzelïns (1943, p. 119-124, § 243-247 = DI, N2, p. 147-153 ; 1944, p. 181-190, § 243-247), Maziulis (PKEZ, s. u.). Voir aussi Bezzenberger (1907, p. 110-127), Specht (1928, p. 161-184), Palmaitis (1985, p. 159-169).
bien du thème de l'indicatif présent *as- (v. pro aI-t "il est") que de celui de l'indicatif prétérit *be- (v. pro bhe "il fut"). On peut supposer qu'il en va de même dans tous les autres verbes, bien que les données fragmentaires du
200
Catégorie du mode
Catégorie du mode
vieux prussien ne permettent pas toujours de le prouver avec certitude.
l'apophonie radicale qui nous intéresse ici, cette forme auIkiend/ai (*au-
Plusieurs exceptions sont cependant à signaler.
skend-Iai) est sans valeur, car le verbe sur lequel elle est fondée est entiè-
La plus simple est celle du conditionnel lemlai / bricht "qu'il brise" (III, 5L4), dont la diphtongue radicale 1 em 1 semble s'opposer à la diphtongue 1 im 1 de l'infinitif limtwei / brechen "briser" (III, 31 17 , cf.
rement dépourvu d'apophonie (cf. lit. inf. skfsti "se noyer" < *skend-ti-, ind. prés, skçsta < *skend-sta, ind. prét. skeiid-o)292. Une dernière exception, la plus difficile à expliquer, est celle de
aussi limtwey en II, 517) et paraît fondée sur un indicatif présent
l'optatif seisei, un hapax attesté dans un passage du
apophonique *lem-a (cf. type lit. inf. gifiti "chasser", ind. prés. gena)290.
71 9 ]
Il est peu probable qu'il s'agisse d'un simple flottement de la graphie, car ce type de flottement [im] > [em] est étranger au
me Catéchisme.
On peut
donc préfèrer y voir une réfection à partir du vocalisme d'un indicatif présent apophonique, On doit cependant reconnaître que cette innovation ne s'est probablement pas introduite directement de l'indicatif présent au
201
me
Catéchisme [III,
:
- V. PRUSSIEN:
Deiws JeiJei tebbei Grlkenikan etnijwings -ALLEMAND :
GOTT Jey dir genedig "Que Dieu te soit (à toi, pécheur) miséricordieux !"
conditionnel présent, mais qu'un infmitif secondaire *lem-tvei (au lieu de *lim-tvei) a pu servir d'intermédiaire: cet infmitif est peut-être attesté une fois dans le 1er Catéchisme (v. pr.lembtwey / brechen, 1, 5 17). Une autre exception, qui a été signalée par Endzelïns (1943, p. 123, § 247
=
DI, IV 2 , p. 152 ; 1944, p. 188, § 247), pourrait être le
conditionnel auIkiendlai / ersaufe "qu'il se noie" (III, 12b), dont le thème *au-skend- diffère de celui de l'infinitif attendu *au-skens-tvei par le traitement de la dentale finale. Peut-être la consonne dentale a-t-elle été réintroduite secondairement dans le conditionnel sous l'influence de l'indicatif (cf. lit. prét. skefid-o "il se noya") ; mais on peut aussi se demander si la motivation morphologique (thème du conditionnel .- thème de l'infmitif) devait être en l'occurrence plus forte que la règle phonétique, selon laquelle les dentales finales n'évoluent en sifflantes que devant dentale (type *-tt- > *_st_)291. Quoi qu'il en soit, pour la question de
Par son emploi, cette forme optative seisei ne se distingue nullement de la forme plus fréquente boüsei "qu'il soit", laquelle est régulièrement fondée sur le thème de l'infinitif boüt "être". La forme seisei, quant à elle, paraît relever plutôt du thème supplétif as-, propre à l'indicatif présent, mais le détail de sa formation demeure obscur : qu'elle est l'origine du degré zéro s- ? quelle fonction peut-on attribuer à la diphtongue interne -ei- ? et surtout comment expliquer que cette formation optative en -sei ne soit pas fondée régulièrement sur le thème de l'infinitif? Pour résoudre ces difficultés, plusieurs hypothèses ont été proposées. Endzelihs (1943, p. 122, § 245 = DI, IV2, p. 150 ; 1944, p. 186, § 245) suggère que la forme seisei
résulte de la contamination d'un ancien optatif de 3e p. *sei[tj (cf. 2e pl. seiti, employé comme impératif "soyez !") et de l'optatif prussien boüseP93. On voit mal cependant la raison d'une telle contamination, dont il n'existe pas d'autre exemple. Les textes prussiens distinguent toujours clairement impératif et optatif, par ex. i-ei-s "va !" et ei-sei "qu'il aille" : il
290. En ce sens, voir Ma.ziulis (PKE2, III, p. 62 : '.'su prezentiniu *~em-"l' Autre analyse chez Smoczynski (2000a, p. 172), qUI propose de corrIger e texte à mon sens inutilement, en */emai. 2'91. On sait qu'en lituanien c'est. en revanche. la. ~o~ivation secondaIre, , morp h0 loglque qUI. l'a emporté, puisque la sIfflante ," . JustIfiee ddans mèsti "J'eter" < *met-ti),.S.est mtrodUIte an~ l ,·m fiml't'f 1 (par ex. " f i ' egalement D '1 . t'f ( l,par ex, me's -k "J'ette 1") . , où elle n'etaIt pas JustI lee. u reste, a quo l ,·Impera
aurait bien pu aboutir une forme tmet-k? Sur ce point, cf, Endzelïns (1937, p. 422-427 = DI, IIh, p, 295-300). 292. Pour la reconstruction de la forme prussienne, cf. Smoczynski (2000a, p. 13), qui propose une autre analyse. 293. Dans le même sens, Stang (1966, p. 443),
202
Catégorie du mode
Catégorie du mode
n'existe pas de forme hybride ti-ei-sei. Et, surtout, on ne comprend pas
«
représente le suffixe sigmatique du futur (~i.-e.
203
i.-e. *-s-), la diphtongue fmale
e
pour quelle raison cette forme seisei aurait été créée concurremment à la
-ei le suffixe propre d'optatif
forme régulière bousei, qui ne posait aucun problème. Van Wijk (l929a,
dans les langues baltiques, le thème de l'indicatif futur est régulièrement
p. 160), qui signale la difficulté, mentionne deux possibilités : seisei
fondé sur celui de l'infmitif. Le lituanien a ainsi, à l'indicatif futur, bû-siu
pourrait être une forme dédoublée (aIl. Formenverdoppelung), ce qui n'a
"je serai" (: inf. bû-ti "être"), el-siu ''j'irai'' (: inf. el-ti "aller"), duo-siu 'Je
pas beaucoup de sens, ou bien représenter une addition récente d'un suffIxe
donnerai" (: inf. duo-ti "donner") ; de même le letton: bû-su "je serai"
caractéristique -sei à une base d'optatif déjà marquée *sei (dont la 2 pl.
(: inf. bû-t "être"), iê-su "j'irai" (: inf. iê-t "aller"), duô-su "je donnerai"
fonctionne comme impératif : seïti), ce qui rappelle l'hypothèse
(: inf. duô-t "donner") ; le seul exemple incontestable d'indicatif futur
d'Endzelïns, mais laisse ouvert le problème de la régularité de cette
synthétique en prussien, la forme posta-s-ei "tu deviendras" (III, 105 3
e
3 sg. *-oi(t))l95. Or l'on sait que,
;
formation. Selon Schmalstieg (2000, p. 246-247), la forme seisei pourrait
105 15- 16), obéit à la règle (: inf. posta-t(wei) "devenir", distinct de l'ind.
recouvrir *saisai (*s- radical, *-ai- morphème d'optatif, *-s- désinence,
prés. posüinai "il devient" < *-stanaj-a, par ex. III, 493, et de l'ind. prét.
*-ai particule). Aucune de ces analyses n'emporte l'adhésion. L'hypothèse
postai "il devint" < *-staj-a, par ex. III, 75 2). Ce rapport morphologique,
la plus économique, à mon sens, pourrait être de supposer que l'hapax
quelle qu'en soit l'antiquité296 , est constant dans les langues baltiques. On
seisei résulte d'une interférence ponctuelle de la forme prussienne *sei (cf.
conçoit dès lors qu'une forme d'optatif futur, dérivée de l'indicatif futur,
2 pl. selti) avec l'allemand sei "qu'il soit !" (cf. III, 7h : v. pro JeiIei ~ aIl.
obéisse au même principe et soit régulièrement fondée, elle aussi, sur le
Jey), interférence suscitée par l'homophonie des formations dans les deux
thème d'infinitif. Quant au conditionnel en -lai, s'il est vrai que son
« optatif
origine est incertaine297 , il apparaît inséparable en synchronie de l'optatif
e
langues et dont le produit a pu être une création hybride sei-
allemand) + -sei « suffixe d'optatif prussien), d'où v. pro sei-sei294 • Il est
en -sei et leurs formations sont donc parallèles.
peu probable, en tout cas, que seisei puisse être une forme ancienne. Car, dans cette perspective, sa coexistence avec la forme régulière bousei ne saurait être expliquée. En dehors de ces exceptions peu nombreuses, les optatifs en -sei et les conditionnels en -lai sont régulièrement fondés sur le thème de l'infinitif et n'ont donc pas de rapport apophonique direct avec les indicatifs présents qui leur correspondent. Cette dérivation (infmitif --+ optatif et conditionnel) s'explique par l'origine de ces deux formations. Il est probable que l'optatif en -sei est issu d'une forme d'optatif futur, dans laquelle la sifflante -s-
294. On pourrait proposer, alternativement, une autre analyse. Si l'on se rappelle que les optatifs en *-sei sont régulièrement tirés d'un thème d'infinitif, on peut suggérer que la forme sei-sei repose sur l'infinitif allemand sein "être" (analysé comme sei-n), de la même manière que, par exemple, v. pro boü-sei repose sur boü-t "être". Dans les deux analyses, il s'agirait d'une forme hybride.
295. Autre analyse, peu convaincante, chez van Wijk (l929a, p. 160), qui voit dans la finale -sei l'aboutissement de l'ancien optatif du verbe "être" (3 e p. *sei), agglutiné avec le thème verbal, et qui compare cette formation au type latin amii-bam "j'aimais". L'analyse traditionnelle (v. pro -sei = optatif futur) est préférable. L'emploi d'un optatif futur avec la valeur d'un simple optatif aurait, quant à lui, un parallèle en letton dialectal : iêsiem "earnus" (+- iêsim "ibimus"), voir Stang (1966, p. 442). 296. En grec, la situation est différente, parce que le système verbal n'est pas organisé comme en baltique autour d'une triade / ind. prés. / : : : / ind. prét. / : : : / inf. /, mais autour de différents thèmes temporels / prés. / : : : / aor. / : : : / pft. /, pourvus chacun d'un infinitif: dans ce cadre, la formation de l'indicatif futur sigmatique est à peu près libre et peut se fonder sur un thème de présent (par ex. "laisser" : fut. ÀEl4Jw +- prés. ÀEl iTW :1 aor. ËÀL1Tov), d'aoriste (par ex. "montrer" : fut. 8Etçw +- aor. Ë8ELça :1 prés. 8ElKVV~L), voire de parfait (par ex. fut. TESvf]çw "je serai mort" +- pft. TÉSVTJKa), ou demeurer indépendante des autres thèmes (par ex. "porter": fut. o'(aw :1 prés. >Épw, aor. TlVE'YKOV, pft. Èvf]voXa). 297. On rapproche cette finale -lai de la particule irréelle slave * 1i (cf. particule interrogative du russe JIll / li) ; la diphtongue finale de -lai pourrait être secondaire et s'être constituée sur le modèle de l'optatif des verbes thématiques (cf. V. pro *imai). Voir Endzelïns (l931a, p. 187-189 = Dl, IIII,
204
Catégorie du mode
Catégorie du mode
Pour la question de l'apophonie radicale, l'optatif en -sei et le
205
constante: on n'a aucune trace de *-sai-. Dans une direction proche,
conditionnel en -lai, tous deux fondés sur le thème de l'infinitif, ne sont
Endzelïns (1943, p. 120, § 243
donc pas directement exploitables. En revanche, on peut s'appuyer sur l'impératif prussien en -ei, -ai, qui reflète plus directement l'ancien optatif
suggère que la diphtongue -ei- pourrait provenir de -ai- « i.-e. *-oih 1-) après *-j- et s'appuyer sur le modèle des thèmes verbaux en *-i0-298 , mais
indo-européen. Avant d'examiner la structure apophonique impliquée par
on voit mal quelle relation particulière pourrait unir les verbes
cette formation, il est utile de défmir l'origine du suffixe et de préciser sa
athématiques et les verbes en *-io-. Alternativement, Endzelïns suggère que
forme en vieux prussien. Le problème principal est celui de l'interprétation
la diphtongue -ei- pourrait être ancienne et l'analyse comme une variante
de la diphtongue -ei-, marque d'optatifprésent dans les formes prussiennes
apophonique de *-oi- dès l'indo-européen; l'hypothèse est mentionnée par
d'impératif (par ex. seiti "soyez !") et d'optatif futur dans les formes
Stang (1966, p. 440), qui admet encore comme possible l'existence en
prussiennes d'optatif (par ex. bousei "qu'il soit !"). Il paraît d'emblée
indo-européen d'un allomorphe apophonique *-ei;}- du suffixe d'optatif,
difficile de réconcilier ce suffixe -ei- avec le suffIXe d'optatif indo-européen,
même s'il renonce à en rapprocher l'optatif dit "éolien" du type
sous sa forme athématique alternante (i.-e. *-ieh1- / *-ih1-, cf. gr. E'lrw,
ÀÛ<JElE.
=
DI, IV2, p. 148 ; 1944, p. 183, § 243)
ÀV<JELas,
dllEv, v. lat. siem, sïmus) ou sous sa forme thématique non alternante
Dans un article spécialement consacré au problème du suffixe -ei-
(i.-e. *-0-ih 1-, cf. gr.
d'optatif en v, prussien, van Wijk (1929b, p. 161-162) attire l'attention sur
athématiques anciennes *hls-ieh1- (sg.) ou *h1s-ih 1- (pl.), ou éven-
le fait que la forme d'impératif de 2e pl. du verbe "être" apparaît deux fois
tuellement d'une forme thématique récente *h1s-oih 1- (sg. et pl.), on ne difficulté ont été diverses depuis plus d'un siècle. Berneker (1896, p. 226)
pourvue d'un macron dans le Ille Catéchisme (seïti en III, 898 et 9lz3 en regard de seiti en III, 9b3, 93 23 " 95 8 972 et 105 26) , ce qui l'amène à restituer une intonation rude (::::: *séiti). Il propose donc de séparer le suffIXe
suppose une réfection de *sië- en *sjoi-, qui donnerait *siei- en
d'optatif athématique -ei- en V. prussien (* -éi- d'intonation rude) du suffixe
prussien, mais, du fait de son caractère hybride, cette hypothèse est peu
de permissif lituanien, par ex. te-dirbië "qu'il travaille !" (*-ië d'intonation
vraisemblable d'un point de vue morphologique. Pour Trautmann (1910,
douce) : tandis que le permissif lituanien procèderait du suffixe thématique
saurait aboutir à v. pro *sei- (dans seiti). Les approches pour résoudre cette
V.
e
p. 288), il faudrait partir d'une forme thématisée de 3
p.
*soilt]
(transposée en indo-européen: *h1s-oih1-t, cf. innovation' parallèle en grec homérique ËOL), qui devait aboutir en V. prussien à *sai. Dans cette
indo-européen *-oi- (en notation moderne *-oih l-), l'impératif prussien serait une création propre à cette langue et résulterait d'une contamination
analyse, la diphtongue -ei- de la forme *sei serait due à un flottement en
de l'ancienne forme faible athématique *sf- (d'intonation rude, i.-e. *hls-ih l-) et d'un radical secondaire *se-, lequel aurait été abstrait d'une
position finale entre -ai et -ei ; elle se serait postérieurement introduite par
3 pl. de l'indicatif présent *senti (conçue comme *se-nti, cf. réfection
analogie dans les autres formes du paradigme, où elle n'était pas justifiée
comparable dans le participe
phonétiquement (d'où par ex. seiti au lieu de *saiti). Cette hypothèse est
conséquence, van Wijk pose un prototype *se-l-ti. Cette analyse soulève
elle aussi douteuse, car elle n'explique pas pourquoi la graphie -ei- est
plusieurs objections. Tout d'abord, l'intonation rude supposée
e
V.
prussien *se-nt- au lieu de
*s-ant-) ; en
apparemment par seïti se concilie mal avec le prototype postulé *se-ï-ti, car p. 539-541), Stang (1966, p. 443). Autre analyse chez Schmalstieg (2000, p. 252-256).
298. En ce sens, aussi Stang (1966, p. 439).
207
Catégorie du mode
Catégorie du mode
une contraction de ce type devrait produire une intonation douce: c'est
longue *1. Un flottement graphique similaire s'observe par exemple dans la
bien une intonation douce qu'on trouve en effet dans le permissif du
famille de l'adjectif *gïvas "vivant" (= lit. gfvas "vivant"), cf. v. pro giwan
lituanien dialectal teguly "qu'il soit couché !" (lituanien de l'Est), dans
"la vie" (III, 79 17), gijwan (III, 75 19), gelwan (III, 12722
lequel-y provient probablement de *-i-l- (*-i-, suffixe verbal + *-1-, suffixe
(III, 12b2). Il faut donc probablement partir d'un prototype *-1-. Cette
d'optatit)299. S'agissant de l'intonation rude de selli, Stang (1966, p. 439)
analyse pourrait s'appuyer sur l'existence d'un correspondant exact dans des
propose d'y voir un souvenir de l'ancienne forme *s(j)ë- « i.-e. *h1s-ieh1-),
formes de permissif du lituanien dialectal (lit. de l'Est teguly"qu'il soit
hypothèse qui n'est pas impossible, mais manque d'appui. Une seconde
couché !").
206
;
12920), gëiwan
difficulté dans l'analyse de van Wijk réside dans le recours à une forme
Dans les verbes thématiques, la graphie 1ai 1est sans doute primitive et
hypothétique de 3e pl. *senti, qui n'est nulle part attestée et dont
peut remonter directement à un prototype thématique i.-e. *-oih 1- (cf. gr.
l'existence paraît bien fragile.
Une autre solution pourrait être la suivante. Avant tout, il importe
secondaire. Il resterait à en défmir l'origine.
d'examiner dans quelles conditions la marque d'optatif -ei- apparaît en
Dans les verbes athématiques, la graphie 1 ei / est pratiquement
v. prussien. On observe en fait trois situations graphiques dans le texte
constante (si l'on met à part l'exception unique de idaiti, III, 87 17). On
prussien:
pourrait certes y voir une simple variante de 1 ai l, qui serait la seule fmale
- 1 ei 1 alternant avec 1 ai 1 : dans les verbes thématiques (v. pro
weddeis "conduis !", III, 55 14 :::::: wedais, l, Ils) et dans un seul verbe athématique (v. pro ïdeiti "mangez !", III, 75 4 :::::: idaiti, III, 87 17). - 1 ei 1 alternant avec 1 i l, 1 ï 1,1 ij 1 : dans les verbes à suffixe *-ïà l'infinitif (v. pro kïrdeiti "écoutez !", III, 101 4 :::::: kirdijti, III, 1033).
ancienne. Cela reviendrait à postuler une extension de la fmale thématique d'optatif aux verbes athématiques, c'est-à-dire par exemple le remplacement d'une ancienne forme baltique
*s(j)ë-
ou
* Sl- «
i.-e. *h1s-ieh r
ou
*h1s-ih 1-) par *sai- (qui serait en indo-européen *hlsoih 1-). Cette hypothèse soulèverait cependant deux problèmes. D'une part, quels facteurs auraient motivé, en v. prussien, la thématisation des formes d'optatif des verbes
- 1 ei 1 seul attesté: dans les verbes à suffixe thématique *-io-
athématiques? d'autre part, comment s'expliquerait l'absence quasi-
(v. pro etwerreis "ouvre !", III, 117 19-1191, cf. lit. àt-veria "il
complète de variantes lai 1au profit de 1ei 1dans l'optatif de ces verbes?
ouvre") et dans les verbes athématiques (v. pro selti "soyez !", par ex. III, 898).
Pour répondre à la première question, il importe tout d'abord de rappeler qu'il n'y a aucun paradoxe à supposer une thématisation des verbes
Cette distribution ne peut se comprendre que si, derrière la réalité
athématiques à l'optatif dans un système linguistique qui, par ailleurs,
graphique, on distingue plusieurs formes différentes. Dans le cas des verbes
conserve parfaitement la distinction entre verbes thématiques et verbes
à suffixe *-ï- à l'infinitif, l'alternance 1 ei 1 : : : 1 ï l, 1 ij l, / i 1 s'explique
athématiques. Le cas ne serait pas isolé : il suffit de penser au parallèle que
probablement par une tendance à la diphtongaison de l'ancienne voyelle
fournit, en grec ancien, la généralisation aux verbes athématiques du subjonctif à voyelle longue, propre à l'origine aux verbes thématiques. Une
299. Voir Stang (1966, p. 422-423). On pourrait appliquer la même analyse aux formes prussiennes mijlis "aime !" (III, 9716), mi/ijti "aimez!" (III, 1036), endirïs "regarde !" (III, 672), cf. van Wijk (1929b, p. 165), Endzelfns (1943, p. 121 § 244 = DI, IV2, p. 149 ; 1944, p. 184, § 244).
thématisation précoce de l'optatif des verbes athématiques n'a donc rien d'invraisemblable. La question se pose cependant de savoir ce qui motive cette thématisation, en d'autres termes, quelle difficulté morphologique elle
Catégorie du mode
Catégorie du mode
a pennis d'éluder. Pour cela, il convient, à mon sens, de confronter les
Par analogie, la même règle s'est installée dans les verbes pourvus d'un
prototypes que ferait attendre la comparaison indo-européenne avec le
suffixe *-1- à l'infmitif, d'où une dérivation:
208
système général des formations d'optatif en v. prussien.
-indicatif: [X-i-] -. impératif: [X-i-i-] > [X-f-].
Le vieux prussien possède six réalisations du suffixe d'optatif (là où e
cela est possible, je cite les fonnes à la 2 pl. avec une désinence _te)300 : - (a) type -ai-te: essentiellement dans les verbes thématiques (par ex. gerbaiti "parlez !", III, 12 h2)'
daiti "donnez !", III, 9h, etc. ; attraiti "répondez !", III, 125 11 , etc.).
écoutons", III, 113 9), vs. impér. 2 e pl. *kird-i-i-te > *kircfïte "écoutez !" (par ex. kirdijti, III, 103 3).
l'impératif, du fait de la contraction de *-i-i- en
* -1-.
Du même coup,
l'impératif pouvait être mis en relation, non plus avec l'indicatif, pourvu d'une voyelle suffixale brève, mais avec l'infmitif, lui aussi pourvu d'une
- (c) type -ei-te : essentiellement dans les verbes athématiques (par ex. ieiti "allez !", III, 59\3, etc. ; selti "soyez !", III, 89 8, etc. ; Ideiti "mangez !", III, 75 4, etc.), mais aussi dans quelques verbes thématiques (par ex. weddeis "conduis !", 111,55 14, à côté de wedais, l, 115). - (d) type -l-te : dans les verbes à suffixe -1- à l'infinitif (par ex.
kirdijti "écoutez !", III, 103 3 , etc.). - (e) type -au-te: dans les verbes à suffixe -au- à l'infmitif (par ex. dans quelques verbes à suffixe
voyelle suffixale longue (dont l'origine était différente: *-1- < *-ë-), ce qui suscitait le sentiment d'un rapport morphologique entre les deux fonnes : - infmitif: [X-f-] = impératif: [X-f-]
«
«
[X-ë-])
• Exemple : inf.
[X-i-i-])
*kird-l-t- « *kird-ë-t-)
"écouter" (cf. kirditwei
"écouter", III, 67 15), vs. impér. 2 e pl. *kird'ïte
«
*kird-i-i-te)
"écoutez !" (par ex. kirdijti, III, 103 3). Ce rapport secondaire {infmitif-. impératif} a pu, dès lors, s'imposer dans
gerdaus "dis !", III, 67 17, etc.). -ft}-te :
e
• Exemple: ind. 2 pl. *kird-i-te "vous écoutez" (cf. klrdimai "nous
En l'occurrence, cette règle synchronique produisait une voyelle longue à
- (b) type -ai-te : dans les verbes à finale -a- à l'infinitif (par ex.
- (t) type
209
-ft}-
à l'infinitif (par
ex. powierptei "laissez !", III, 95 22).
plusieurs autres types de verbes, notamment301
:
- infmitif: [X-au-] = impératif: [X-au-]
Si l'on laisse de côté le type -ei-te, on observe donc deux types
• Exemple: inf. *dink-au-t- "remercier" (cf. preidinkaut ''remercier'',
principaux. Dans les verbes thématiques, l'impératif apparaît, au pluriel, fondé en synchronie sur l'indicatif par l'ajout à la voyelle thématique d'un
III, 41 15), vs. impér. 2 pl. *dink-au-ti "remerciez 1" (dinkauti, III, 85 1).
suffixe *-i-, d'où une règle de dérivation:
- infmitif: [X-0-]
e
- indicatif: [X-a-]
-+
impératif: [X-a-i-].
• Exemple: ind. 2 e pl.
*ima-te
"vous prenez" (cf. immati, III,
115 19), vs. impér. 2e pl. *ima-i-te "prenez 1" (par ex. immaiti, III,
=
impératif: [X-0-]
• Exemple: inf. *po-wierp-t- "laisser" (cf. powiërpt "laisser", III, e
107 17), vs. impér. 2 pl. *po-wierp-ti "laissez !" (cf powiërptei, III, 95 22 ).
75 4). 300. Classification chez Stang (1966, p. 437-438), avec données plus précises.
301. En ce sens, Stang (1966, p. 440). Autre analyse chez Schmalstieg (2000, p. 248).
210
Catégorie du mode
Catégorie du mode
211
Reste le cas des verbes athématiques. Leur situation posait problème. À
vocalique da- était naturellement fournie par la forme d'infmitif (v. pro da-t
supposer que le prussien ait hérité de formes anciennes, ces formes ne
"donner"), d'où un optatif da-i-ti "donnez 1". Pour les autres verbes, où un
pouvaient s'intégrer dans les structures de dérivation morphologique
tel modèle faisait défaut, on pourrait admettre que la thématisation est
décrites ci-dessus. Le verbe "être" avait à l'origine, à l'optatif, une structure
précisément ce qui a permis de transformer ces radicaux consonantiques en
apophonique *h1s-jeh r , vs. *h1s-ih 1-, qui aurait dü aboutir en v. prussien à
radicaux vocaliques, d'où *sai-, *yai- et *edai- comme
*s(j)e- ou à *sf-. Pour le verbe "aller", la comparaison indo-européenne
passage au type thématique apparaît donc motivé dans un système qui
laisserait attendre une structure *h}Î-jehr , vs. *hâ-ih r , qui donnerait v. pro
n'admettait pas d'optatif sur base consonantique.
* i(j)e- ou *(iJï-. Du verbe "manger", on devrait avoir théoriquement
*imai-,
Le second problème, si l'on part de formes thématisées en
V.
etc. Le
prussien
*hde)d-jeh 1-, vs. *h1(e)d-ih 1-, qui donnerait v. pro *ed(j)ë- ou *edï-
*sai-, *yai- et *edai-, est qu'on s'attendrait à trouver trace d'une graphie
(éventuellement avec effet de la loi de Winter). Enfin, l'optatif du verbe
1 ai l, qui fait presque constamment défaut, et qu'on s'explique mal la
"donner" aurait dü être en principe *dedhrieh 1-, vs. *dedh3-ih1-, qui
permanence de la graphie 1 ei /. La solution, me semble-t-il, passe par une
pro *dod(iJë- ou *dodï- (avec réfection du vocalisme du
comparaison de la seule autre catégorie d'optatifs où la graphie / ei / soit
donnerait
V.
redoublement comme à l'indicatif).
elle-même constante, celle des verbes thématiques à suffixe *-jo-. Dans ces
Or il est clair qu'aucune de ces formes reconstruites ne pouvait avoir de place dans le système de formation décrit ci-dessus. Car il était impossible
verbes, le suffixe d'optatif présente toujours une forme / ei /, cf. par exemple302
de les rattacher ni au thème de l'indicatif, ni au thème de l'infinitif, pour - V.
des raisons multiples qui tiennent à l'existence d'une apophonie radicale,
- V.
- V.
pro etwerreis / oÏfne "ouvre 1" (III, 117 19-1191,
*atverj-ei-s,
cf.
lit. àtveria "il ouvre").
"être", y- "aller", ed- "manger", dad- "donner"), tandis que, partout ailleurs, - V.
dans les formations d'optatifs prussiens, prévalaient des radicaux à fmale
pro tenseiti / reitzet ''tirez 1" (III, 93 18 , *tensj-ei-ti, cf. lit. tfsia
"il étire").
soulevé par les athématiques était que leur radical virtuellement hérité d'optatif était majoritairement terminé par une consonne ou une sonante (s-
pro draudieiti / wehret "interdisez 1" (III, 113 3 , *draudj-ei-ti,
cf. lit. draildZia "il interdit").
au supplétisme verbal, à une altération de la consonne fmale du radical ou à d'autres particularités de leur formation. Surtout, le problème principal
:
pro etwerpeis /verlasse "pardonne !" (III, 5320, *atverpj-ei-s, cf.
lit. dia!. atvefpia "il retourne de l'herbe").
vocalique (si l'on excepte un ou deux cas comme powierp-tei "laissez !", évidemment secondaires). Dans ces conditions, comment la langue
L'absence de graphie 1 ai / ne saurait être le fruit du hasard ; elle suggère
prussienne pouvait-elle donner un optatif aux verbes athématiques? Il me
certainement une réalité phonétique, à savoir que le suffixe d'optatif *-ai- a
semble que la seule issue envisageable à cette difficulté morphologique
évolué en *-ei- après consonne palatalisée (*-j-ai- > *-O)-ei-). L'apparition
pouvait passer par la modification de ces radicaux afin de les intégrer au
sporadique de cette forme secondaire du suffixe d'optatif *-ei- dans les
type majoritaire à fmale vocalique. On comprendrait alors le remplacement
formes thématiques non suffixées (type weddeis) résulterait, quant à elle,
des radicaux consonantiques
*s-,
*y-, *ëd-,
* dad-
par des radicaux
d'une extension ultérieure. On pourrait suggérer, par exemple, que, dans les
vocaliques comme l'effet d'une nécessité interne au système des optatifs en prussien. Dans le cas du verbe "donner", la constitution d'un radical
302. Données plus complètes: Stang (1966, p. 438).
212
Catégorie du mode
verbes à suffixe
*-io-,
Catégorie du mode
le rapport de dérivation existant entre l'indicatif
présent à finale consonantique palatalisée *-Cj-a-te et l'optatif à fmale
213
place que dans le second; on pourrait alors par exemple reconstruire la proportion suivante :
consonantique non-palatalisée *-C-ei-te (issu d'une fonne plus ancienne
- indicatif *ey-, vs. optatif *y-ei- "aller",
*-Cj-ai-te) pouvait conduire à restaurer la sonante palatalisante à l'optatif,
d'où: indicatif*es-, vs. optatif X (X = *s-ei- au lieu de *s-ai-).
d'où *-Cj-ei-te (cf. graphie / iei / par ex. dans v. pro draudieiti, qui note certainement *draudj-ei-te)303. Cette innovation contribuait à isoler une
Le modèle du verbe "aller" était moins sensible dans le cas du verbe
forme -ei- du suffixe, qui pouvait par extension s'introduire également dans
"manger", peut-être parce que ce verbe était dépourvu d'apophonie radicale;
les verbes thématiques à finale consonantique non palatalisée, en vertu
rien n'y empêchait dès lors la conservation de la finale thématique inaltérée
d'une proportion:
(type idaiti), en concurrence avec la fmale -ei- secondairement étendue (type ideiti).
- indicatif *-Cj-a-te, vs. optatif *-Cj-ei-te, d'où: indicatif*-C-a-te, vs. optatif X
Si l'on adopte cette analyse, on peut expliquer la forme
ex = *-C-ei-te).
*s-ei-
de
l'optatif du verbe "être" comme une innovation suscitée par le modèle de
Une analyse comparable pourrait s'appliquer aux verbes athématiques.
*y-ei-, optatif du verbe "aller". Cette innovation n'a pu se réaliser que parce
L'absence quasi-complète, dans l'optatif de ces verbes, d'une graphie / ai /
que les deux verbes avaient en commun un trait singulier, qui est un
au profit d'une graphie uniforme / ei / peut se comprendre si le point de
archaïsme, la conservation d'une apophonie radicale. Cet archaïsme est
départ de cette variante secondaire est un verbe dont la fmale consonantique
d'autant plus remarquable qu'il s'oppose au principe régulier de formation
était palatalisée. Le meilleur candidat pour cette innovation est le verbe
des impératifs-optatifs en prussien : tandis que l'optatif et le conditionnel y
"aller", dans lequel le suffixe d'optatif était précédé d'une sonante yod,
sont fondés sur le thème de l'infmitif, l'impératif est fondé sur le thème de
susceptible de provoquer une altération de *-ai- en *-ei-. Plus précisément,
l'indicatif, et seulement de manière secondaire sur celui de l'infmitif. Seuls
on peut supposer que la forme thématisée du baltique *y-ai-
«
*hâ-oih1-)
les verbes athématiques, notamment "être" et "aller", contredisent cette
risquait d'aboutir en prussien, dans les formes préverbées, à *y-ei- et même
règle de formation : si leur optatif et leur conditionnel sont régulièrement
à *ei-, dans laquelle le radical avait totalement disparu304 . À ce stade, le
tirés du thème de l'infmitif (v. pro boü-sei, boü-lai
parallélisme du verbe "être" et du verbe "aller" pouvait introduire dans le
lai
premier cette forme nouvelle du suffixe d'optatif qui n'avait d'abord sa
présent) présente une apophonie radicale par rapport à leur indicatif présent
4-
4-
boü-t "être", ëi-sei, ëi-
*ëi-t "aller"), en revanche, leur impératif (issu d'un ancien optatif
(v. pro s-eiti
4-
as-tai "vous êtes", i-eiti ...... * ei-tai "vous allez"). Cette
apophonie radicale < as / s > et < ei / i > reflète certainement un caractère 303. Analyse différente chez Smoczyfiski (2000a, p. 160-161). 304. Dans les formes préverbées, ce risque conduisait naturellement .à restaurer la sonante initiale dans la forme d'optatif, d'où *-y-ei- (cf. graphie / gei / = *-jei- dans v. pro pergeis / zukomme "qu'il arrive", l, 9 15). On not~ra que le grec ancien a été confronté à une difficulté en partie comparable, pUIsqu'un prototype indo-européen *hJi-oih1- risquait d'y abo~tir à *y-oi-. > *ol- (avec chute de yod en position initiale). Il a résolu cette difficulté en Imposant une variante de type Lindeman *iy-oi-, qui permettait Ade sauveg~!de! la. fo~e du radical, d'où gr. LOlllL. On peut comparer, ?ans le, m~m~ sens, 1. mdlcatIf 3 pl. du grec Laul (trisyllabique < *iy-) et du védique yantz (dissyllabique < *y-).
ancien des optatifs athématiques de l'indo-européen, comme le montrent les correspondants de ces deux verbes dans plusieurs autres langues : - véd. as-li "il est" (*h1es-), vs. s-yât "qu'il soit" (*h1s-) ;
V.
lat.
es-l (*h1es-), vs. s-Îel (*h1s-) ; gr. è"a-TL (*h1es-), vs. dTj < *è"h-LTj(T) (*h1s-).
214
Catégorie du mode
-véd. é-ti"il va" (*h1ei-), vs. iyât"qu'il aille" (*h1i-); gr.
Catégorie du mode EL-al
"il
va [ira]" (*h1ej-), vs. 'L-OL "qu'il aille" < *l(y)-OL(T) (*h1i-).
215
travaille(nt) !". L'emploi de l'indicatif seul, sans préfixe, ni particule, avec un sens de "permissif' n'apparaît que dans quelques phraséologismes isolés
L'absence d'apophonie dans l'optatif du verbe "manger" (v. pro fdeiti
dans un petit nombre de dialectes, par ex. lit. dia!. sùka tavè velniai ! "que
< *ëd- < Ï.-e. *ed-) pourrait, quant à elle, s'expliquer soit comme le reflet
les démons te retournent!" (dialecte haut-lituanien occidental de
d'un optatif "acrostatique" (i.-e. *h1ed-ihrm, cf. lat. edim, comme ue/im),
Liubavas)305. Enfin, les dialectes bas-lituaniens emploient, au lieu de te-,
soit comme l'introduction d'un degré plein secondaire dans une racine à
tegù(l), une particule lai de même sens, qui se retrouve en letton (par ex.
occlusive finale, dont le degré zéro pouvait apparaître mal commode. En
lett. laî nâk ! "qu'il vienne !") et qui provient probablement de l'impératif
dehors du verbe "être" et du verbe "aller", que leur fréquence prédisposait à
d'un verbe "laisser" (cf. lett. laîst "laisser"). Dans l'usage moderne, aussi
la conservation d'archaïsmes, aucun autre verbe prussien ne présente
bien en lituanien qu'en letton, le "mode permissif' n'est qu'un emploi
d'apophonie radicale dans les formes de l'optatif. Ce n'est sans doute pas
marqué de l'indicatif présent.
un hasard si les deux verbes apparaissent proches l'un de l'autre ; on sait
Mais, dans les textes lituaniens anciens, et encore aujourd'hui dans
qu'ils ont d'autres traits communs dans les langues baltiques: ce sont, par
quelques dialectes, le "mode permissif' présente une série de formes spécifiques, dont le système désinentiel s'organise comme suit306 :
exemple, les deux seuls verbes supplétifs du letton (lett. fsmu "je suis", vs. biju ''je fus", et lett. eju ''je vais", vs. gâju ''j'allai''). La conservation
- VERBES THÉMATIQUES en -a- :
d'une apophonie radicale dans l'optatif de ces verbes est un vestige de haute
-. mode permissif en -ië.
antiquité, qui n'a plus de motivation synchronique.
• Exemple : ind. sùka "il tourne" (inf. sùkti ''tourner'')
En lituanien et en letton, les vestiges de l'ancien optatif indo-européen
-. permissiftesukië"qu'il tourne !"
sont rares et aujourd'hui peu employés. Ils apparaissent dans deux séries de
- VERBES SEMI-THÉMATIQUES en -i- :
formes. On en trouve la trace tout d'abord dans les formes du ''permissif'
-. mode permissif en -jJ.
lituanien (lit. geidiiamoji nuosaka "mode désidératif' ou leidiiamoji
• Exemple : ind. gù/i "il est couché" (inf. guI
nuosaka "mode permissif'), et en second lieu dans certaines formes
couché") -. permissif teguljJ"qu'il soit couché !"
anciennes ou dialectales de l'''impératif' lituanien (lit. /iepamoji nuosaka
be -k "mode impératif sans -k-").
eti "être
- VERBES SEMI-THÉMATIQUES en -0- « *-â-):
-. mode permissif en -ai. e
Le "mode permissif', qui exprime l'ordre ou la permission à la 3
personne, est formé en lituanien moderne au moyen de l'agglutination d'un
• Exemple : ind. râso "il écrit" (inf. raiyti "écrire") -. permissif terâsai "qu'il écrive !".
e
préfixe verbal te- à la 3 personne de l'indicatifprésent, par exemple: - lit. tedirba "qu'il(s) travaille(nt) !" +- dirba "ils(s) travaille(nt)"
Ces formes étaient encore d'usage fréquent dans les textes anciens, par ex.
tfkf/ies "qu'ils se lèvent!" (Postilla de Dauksa, DP, 1599, 602 ~ lit.
tèguli "qu'il(s) se couche(nt) !" +- gùli "il(s) se couche(nt)" terMo "qu'il(s) écrive(nt) !" +- râso "il(s) écrive(nt)". On peut aussi employer, au lieu du préfIxe te-, une particule indépendante
tegù(l) (dialectalement aussi testà), par ex. lit. tegù dirba "qu'il(s)
305. Exemple chez Zinkevi~ius (LKIG, II, p. 136). 306. Sur les formes du "permissif' lituanien, cf. Otr~bski (GJL, III, p. 227229), Stang (1966, p. 423-425), Zinkevicius (LKlG, II, p. 135-136). Cf. aussi Kardelytë (1957, p. 181-189), Skurkaitë (1964, p. 153-164), Schmalstieg (2000, p. 250-252).
216
Catégorie du mode
Catégorie du mode
moderne tesikefia, tegù kefiasz), te klâuJai "qu'il écoute !" (DP, 9725 ~ lit.
différence entre les deux modes apparaît encore clairement à la 2e pl., où
moderne teklaüso, tegù klaüso). Elles survivent encore dans quelques
l'on oppose par exemple un impératif nesiêt "portez !" (suffixe -iê- < *-ai-)
dialectes, notamment dans la région de Vilnius (haut-lituanien de l'Est),
et un indicatif nfsat "vous portez" (voyelle thématique -a-).
217
par ex. tenès' "qu'il porte!" (réfl. teneSies), tegùly "qu'il soit couché!",
Ces formes d'impératif ont des correspondants exacts en vieux
terâsai "qu'il écrive"307. Dès le XVIe siècle, s'est exercée une tendance à
lituanien, et encore maintenant en lituanien dialectal, dans ce que l'on
les remplacer par les formes de l'indicatif présent: les écrits de Mazvydas,
appelle l'impératif "sans -k". L'impératif "sans -k" est fondé, en lituanien,
par exemple, emploient régulièrement l'indicatif au lieu du permissif (par
sur le thème de l'indicatif. Sa formation obéit aux principes suivants 3IO
ex. te gijwen "qu'il vive !", 33 5, te walda "qu'il règne !", 30 12, te dti "qu'il soit", 34 17)3°8. Dans les textes anciens et les dialectes modernes qui ont conservé ces formes de permissif, la distribution des fmales est parfois brouillée, et l'on peut trouver dialectalement des fonnes comme tegu/ie "qu'il soit couché !" (au lieu de teguly d'après le type tesukie) ou inversement tenesy (au lieu de tenesie d'après le type tegulY). Mais la distribution ancienne est probablement celle qui est ici décrite. plusieurs formes, dont certaines rappellent, par leur structure, les formes du e "permissif' lituanien. En letton moderne, l'impératif 2 sg. apparaît formellement identique à l'indicatif présent, ainsi lett. nes "porte !" (: tu
nes "tu portes"), runâ ''parle !" (: tu runâ "tu parles"), dzîvuô "vis !" (: tu dzîvuô "tu vis"), lasi "lis !" (: tu lasi "tu lis"), également dans les formes réfléchies, par ex. lett. mazgâjiês "lave-toi !" (: tu mazgâjiês "tu te laves"),
mâciês "apprends !" (: tu mâciês "tu apprends")309. Mais cette dérivation synchronique résulte d'un rapprochement secondaire, et à l'origine les formes d'impératif étaient différentes de celles de l'indicatif: leur dési0
en fmale), provient d'un plus ancien *-iê < *-ai- (cf.
v. pro wedais < i.-e. *-oih1-), tandis que celle de l'indicatif, lett.*-i (>
- VERBES THÉMATIQUES en -a- : -+
impératif en -i (réfl. -ie-s)
• Exemple : ind. veda "il conduit", 2e sg. vedi
"tu
conduis" -+ impér. "sans -k" : wed-i "conduis !" (Mazvydas, 105 15).
• Exemple: ind. : nesa-si "il se porte", 2 e sg. nesfe-si "tu te portes" -+ impér. "sans -k" : nes-ie-s "porte-toi !" (dialecte de
Pour le "mode impératif', les langues baltiques orientales présentent
nence, lett. *-i (>
:
0
en
finale), provient de *-iê < *-ëj- (cf. lit. nesî "tu portes", gr. epÉpELs). La
Vilnius, haut-lituanien de l'Est) - VERBES SEMI-THÉMATIQUES en -i- : -+
impératif en -y (réfl. -ie-s)
• Exemple: ind. ry/i "il se tait", , 2 e sg. tyli "tu te tais" -+
impér. "sans -k" : tyl-y "tais-toi !" (dialecte de Vilnius,
haut-lituanien de l'Est) • Exemple: ind. gù/i-si "il se couche", 2e sg. gulfe-si "tu te couches" -+ impér. "sans -k" : gul-ie-s "couche-toi !" (dialecte de Vilnius, haut-lituanien de l'Est) - VERBES SEMI-THÉMATIQUES en -0- « *-â-): -+
impératif en -ai (réfl. -ai-s)
• Exemple : ind. râso "il écrit", 2e sg. rasai" tu écris" -+ impér. "sans -k" : râsai "qu'il écrive !" (cf. v. lit.
307. Cf. Zinkevicius (1966, p. 374-376, § 687-689) cf. aussi à Pagrarnantis (Jonikas, 1939, p. 72-73, § 169). 308. Données chez Stang (1929, p. 156, § 324). 309. Exemples: Eckert, Bukeviciüté, Hinze (1994, p. 348-349). Cf. aussi Endzelfns (1923, p. 686, § 691).
atadârai "ouvre !", DP, 57032_33 ).
310. Exemples chez Zinkevicius (LKIG, II, p. 131-132, § 593-595). Cf aussi Schmalstieg (2000, p. 240-246).
218
Catégorie du mode
Catégorie du mode
219
• Exemple : ind. slikosi "il se dit", 2e sg. sakai-si "tu te
sans -/(', leur fmale -ie procède vraisemblablement d'une forme de 2 e sg.,
dis"~ impér.
baltique *-ais (cf. v. prussien wedais) < i.-e. *-oihrs (cf. gr. epÉpOlS', got.
"sans -/(' : sâkai-s "dis-toi !" (cf. v. lit. sakaymi
"dis-moi !", Catéchisme anonyme de 1605, 85 7).
bairais, véd. bharefJ), dont la sifflante finale a été éliminée, ce qui est
L'impératif "sans -/(' apparaît en majorité à la 2 sg. ; il est très rare aux
compréhensible dans un système où la 2e sg. n'est jamais caractérisée par
autres personnes. Zinkevicius (LKIG, II, p. 132, § 594) signale quelques
une sifflante. Quant à la fmale -y, elle pourrait résulter, comme en prussien,
e
re
exemples anciens de 1 (Ma.zvydas, 43 9
~
pl., comme paprafchaim "demandons!"
lit. standard paprasykime), padâraime "faisons !" (DP,
d'une contraction du suffixe verbal *-i- avec la marque d'optatif *-i-, laquelle aurait été extraite du modèle des verbes thématiques (ind.
-a-, vs.
lit. standard padarykime), mais aucun de la 2 pl. Dans le dialecte
opt. -a-i-). Elle est clairement secondaire, non seulement dans la 3e p. du
de la région de Vilnius, les formes de l'impératif pluriel sont tirées
permissif, mais aussi, à plus forte raison, dans la 2e sg. de l'impératif, qui
secondairement de celle du singulier (à désinence palatalisante), d'où par
a, comme ailleurs, perdu sa sifflante Imale. Enfin, la finale -ai provient
ex. lit. dial. nèS' "porte !" ~ nèi'-mete "portons!", nès'-te "portez!", peut-
certainement de *-a-i- (cf. indicatif râio < *-a-), aussi bien à la 3e p.
être par une influence du polonais. Dans les autres dialectes, et dans la
(~permissif) qu'à la 2 sg. (~impératif "sans -k"). Stang (1966, p.423-
253 49-50
~
e
e
langue standard, ces formes ont été remplacées par une formation différente,
425) a tenté de reconstruire une situation plus complexe, à partir des
celle de l'impératif "à -k", tiré du thème de l'infinitif et pourvu d'un
données du vieux lituanien, mais cette reconstruction a peu de chances, à
système désinentiel spécifique, 2e sg. -k, 1re pl. -kime, 2e pl. -kite, par ex.
mon sens, de représenter l'état primitif.
lit. standard duo-k "donne !", duo-kime "donnons !", duo-kite "donnez!"
(: duo-ti "donner")311.
Ni le "mode permissif", ni les formes d'''impératif sans -/(' du lituanien et du letton n'offrent aucune trace d'apophonie radicale: le radical verbal
Les formes du "permissif" et de l"'impératif sans-/(' en lituanien et en
attesté est régulièrement le même que celui de l'indicatif présent. Cette
letton constituent des vestiges de l'ancien optatif indo-européen, conservé
limitation vaut non seulement pour les verbes thématiques et semi-
en baltique. La finale -ie du permissif thématique procède vraisembla-
thématiques, mais également pour les verbes athématiques ou anciens
blement d'une forme baltique de 3e sg. *-ai, issue d'un prototype i.-e.
athématiques, qui y ont toujours le même degré vocalique qu'à l'indicatif.
*-oih1-t (cf. gr. epÉpOL, got. bairai, véd. bharet). Quant aux "impératifs
Ainsi, dans la forme athématique ancienne du verbe "être", le radical *esde l'indicatif (lit. esti "il est") se retrouve sans changement au permissif: lit. teesie "qu'il soit !" (parfois avec contraction tesié). La forme est ainsi
311. Sur cette formation, qui ne pose en synchronie aucun problème apophonique, cf. Brugmann (1911-1912, p. 404-409), Kazlauskas (1966, p. 6972), Hamp (1978b, p. 11 0-111), Shields (1986, p. 48-55), Schmalstieg (2000, p. 232 sq.). Il est possible que certaines de ces formes soient anciennes: ainsi, par exemple, lit. ei-k! "va !" pourrait procéder d'une forme héritée d'impératif *h1ei ! "va !" (cf. lat. l ! "va !"), renforcée par une particule déictique ou emphatique *-ki. De même, on pourrait comparer le lit. duo-k "donne !" et, dans un ordre inverse, le latin cedo "donne !". Ces deux verbes ("aller" et "donner") ont pu, du reste, servir de point de départ à l'ensemble de la formation, une fois qu'ils ont été mis en relation avec le thème d'infinitif. Mais cette analyse n'a qu'un sens historique : descriptivement, les impératifs lituaniens en -k apparaissent régulièrement fondés sur le thème de l'infinitif, et rien ne permet d'y déceler un degré apophonique qui leur serait propre.
attestée dès le vieux lituanien. On relève par exemple dans la PostUla de Dauksa (1599)312 : téssi (par ex. 6740), têssi (par ex. 51 41 ), tegi êssi (433 2),
te ?ssi (350 14), etc. Par rapport au correspondant prussien, dont il a été question plus haut et qui présentait un degré zéro radical ancien (v. pro *sei, impératif seiti "soyez !" <
*s-),
on observe donc en lituanien un
nivellement apophonique sur les formes de l'indicatif et une extension du
312. Sources: Senn (1934-1935, p. 97), Kudzinowski (1977, J, p. 125-126).
220
Catégorie du mode
Catégorie du mode
vocalisme plein (lit. esië "qu'il soit !" < *es-). Cette généralisation a sans
leur caractère systématique et leurs rapports immédiats avec le système du
doute été favorisée par le fait qu'un degré zéro radical aurait produit une
verbe. Cette remarque préliminaire est importante pour délimiter la
forme monosyllabique
*s ië,
221
peu acceptable dans le système verbal du
catégorie des participes dans une langue donnée : ainsi, par exemple, les
lituanien. On peut aussi penser que la proximité entre permissif-impératif et
formes en -tas du lituanien doivent être considérées comme des participes,
indicatif dans la même fonction, pouvait susciter un rapprochement de leurs
dès lors qu'elles existent pour chaque verbe (part. prét. passif: lit. sùk-tas
formes. Cette proximité apparaît dès les plus anciens textes : on comparera,
"qui a été tourné" : sùk-ti "tourner", sakY-tas "qui a été dit" : sakY-ti "dire",
par exemple, en vieux lituanien, avec la même fonction, le permissif te esi
etc.), ce qui n'empêche pas que la même formation constitue aussi des
(DP, 1599, 350 14) et l'indicatif te elti (Mazvydas, 34 17). Le vestige isolé
adjectifs verbaux d'une nature non systématique (par ex. lit. rim-tas
d'apophonie modale conservé en v. prussien (seiti) a donc été éliminé en lituanien313 .
"sérieux" : rimti "être sérieux", kels-tas "étrange" : kelsti "changer", bal-tas
Pour finir, on signalera qu'aux conditionnels prussiens en -lai
Pour la question de l'apophonie grammaticale, à laquelle cette étude est
correspondent en baltique oriental, pour la fonction, des conditionnels de
consacrée, cette distinction est essentielle, car elle permet dans plusieurs
formation complexe sur base en *-tum : lit. bûciau "je serais", v. lit.
cas d'écarter des formes qui relèvent de la dérivation et non de la formation
bütumbiau, bücia "je serais", lett. bûtu "je serais". Ces formes, qui
des paradigmes verbaux. Ainsi, pour reprendre le même exemple lituanien,
"blanc" : bal-ti "être blanc", sai-tas "froid" : sal-ti "geler, avoir froid")315.
dérivent probablement d'une combinaison d'un ancien supin en *-tun et
les participes en -tas sont régulièrement fondés en synchronie sur le thème
d'un optatif du verbe "être" *bï-, ne présentent, comme le supin, aucune
de l'infinitif et n'ont donc pas de degré apophonique qui leur soit propre
apophonie radicale; en synchronie, elles sont régulièrement fondées sur le thème de l' infmitif3 14 .
(type lit. kél-ti "lever" -+ kél-tas "qui a été levé"), mais la langue possède aussi, dans plusieurs cas, des formes apophoniques d'adjectifs en -tas (type lit. kél-ti "lever" -+ kil-tas "fort, grossier") : le sens de ces formes tout
III. PARTICIPES
autant que leur caractère non systématique montre clairement qu'elles
Les participes possèdent une double nature, à la fois verbale et
appartiennent à la dérivation lexicale, non à l'expression d'une catégorie
adjectivale, mais ils se distinguent des formations d'adjectifs verbaux par
grammaticale. La comparaison indo-européenne risque, dans certains cas, de déformer la vision des choses interne aux langues baltiques : on
313. Pour le verbe "aller", qui était lui aussi apophonique à l'optatif en vieux prussien (v. pro ieis / i-ei- /), les données du vieux lituanien sont plus délicates à interpréter. Probablement, le permissif de ce verbe a généralisé, comme celui du verbe "être", un degré plein radical, d'où une forme *ei-f ou *ei-ie, parallèle à *es-f ou *es-ie, cf. dans la Postilla de Dauksa : te ateii "qu'il arrive" (DP, 42737), te atâiig "qu'il arrive" (DP, 27827). Je ne sais ce qu'il faut penser de la forme tt;ii "qu'il vienne" attestée au simple dans le même texte (DP, 48540 : *t-ei-ï ?). 314. Il existe une riche littérature secondaire sur les formes du "conditionnel" en baltique oriental : cf. Stang (1942, p. 249-254; 1966, p. 428434), Otrçbski (GJL, III, p. 230-234), Kazlauskas (1961c, p. 73-91 ; 1968, p. 385-404), Zinkevicius (LKIG, II, p. 122-128, § 579-588, sur leur radical, cf. § 588), Schmalstieg (2000, p. 216-232).
pourrait, ainsi, être tenté de rapprocher plus ou moins de la catégorie des participes les adjectifs dérivés à suffixe -nas, du type lit. alk-a-nas "affamé" (: alk-ti "avoir faim"), sous l'apparence que cette formation fournit des participes prétérits passifs en slave (v. sI. HeCeH'b / nesen'b "porté" : ReCTH / nesti "porter"). Mais, à la différence du slave, le baltique n'a que quelques représentants lexicaux de cette formation, qui, du reste, n'est pas seulement déverbale (par ex. lit. dial. ûk-a-nas "assombri, couvert" : ukas
315. Exemples chez Skardzius (1943, p. 319-320, § 181).
222
Catégorie du mode
Catégorie du mode
"temps couvert")3 16 . Il importe d'avoir présent à l'esprit que la plupart des
thème temporel possède, à l'actif comme au passif, une forme participiale. On peut établir l'inventaire suivant318 :
formations de participes proviennent d'anciens adjectifs verbaux et que,
223
même dans le cadre d'une seule langue, les liens historiques qui les LITUANIEN
unissent ne sont pas totalement rompus. Cette première difficulté en entraîne une seconde. L'indépendance originelle des formations d'adjectifs verbaux, dont sont issus les participes,
ACTIF : PRÉSENT
à l'égard du système des conjugaisons verbales a pour effet qu'il est souvent difficile, voire impossible, de détenniner leur fonne de fondation.
PRÉTÉRIT
En grec par exemple, une forme comme -8apTos- "écorché" (cf. Homère
LETION
met-çs,-anti
mftuôis, -sa
skelliints
"jetant, qui jette"
''jetant, qui jette"
"devant, qui doit" (par ex. III, 6518; 919)
(: mès-ti)
(: mes-t)
mét-fls, -usi
met-is, -usi
"qui ajeté"
"qui a jeté"
"qui a pris" (III, 8924)
(: mès-ti)
(: mes-t)
gemmons, -ans
«
*der-%-),
puisque d'autres formes similaires ne correspondent à aucun thème d'indicatif (par ex. gr. KUpTOS- "courbé",
À,L TOS-
FUTUR
(: mès-ti)
constituée indépendamment sur la racine *der- selon un principe propre à la PASSIF: PRÉSENT
catif, s'il existe en synchronie, a toute chance d'être secondaire. La même difficulté existe dans les langues baltiques, quoique dans des proportions
mèsi-ç.s, -anti
"qui jettera"
"uni"), mais paraît s'être
formation (degré radical zéro + *-to-) : le rapport apophonique avec l' indi-
gauuns
"qui est né" (par ex. III, 4 h3; III, 12916)
vEo-8apTos- "nouvellement écorché" < *df-to-) n'est pas directement fondée sur le thème de l'indicatif présent 8Épw "j'écorche"
V. PRUSSIEN
PRÉTÉRIT
moindres en raison de la plus forte grammaticalisation des formes en *-tas.
mét-a-mas,-à
mft-à-ms,-a
poklausïmanas [?]
"qui est jeté"
"jeté"
"écouté" (III, 57 17)
(: mès-ti)
(: mes-t)
més-tas,-à
mfs-ts,-a
pomests
"qui a été jeté"
"qui a été jeté"
(: mès-ti)
(: mes-t)
"soumis" (III, 1055; 1179)
On devra néanmoins toujours veiller à préciser les rapports de fondation, afm de ne pas établir des rapports apophoniques présumés que rien n'appuie dans la réalité des faits.
FUTUR
mèsi-mas, -à
"qui sera jeté" (: mès-ti)
Les langues baltiques possèdent une riche panoplie de formes participiales, et l'on sait l'importance qu'elles ont prise dans la structure syntaxique de chacune des langues 317 . Descriptivement, le baltique présente un système maximal de formes participiales, puisque chaque
Les participes des langues baltiques se divisent en deux catégories. Un premier groupe (type 1) est fondé sur le thème de l'indicatif, dont il reproduit sans changement le degré vocalique radical. Ce type comprend les formes suivantes : - PARTICIPE PRÉSENT ACTIF: par ex. lit. met-gs "jetant, qui jette" (: ind. prés. met-a "il jette"), perk-gs "achetant, qui achète"
316. Exemple chez SkardZius (1943, p. 226, § 137). 317. Sur les participes dans les langues baltiques, on se reportera avant tout à l'opus magnum de Vytautas Ambrazas (1990, en particulier p.46-64, sur la morphologie des participes). Voir une présentation de l'ouvrage d'Ambrazas chez Petit (1999a, p. 113-134).
(: ind. prés. pen-a "il achète", cf. inf. pin-ti "acheter", ind.
318. Cf. V. Ambrazas (1990, p. 48).
Catégorie du mode
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Catégorie du mode
225
prét. pifk-o), raiid-çs "trouvant, qui trouve" (: ind. prés.
Un second groupe (type II) rassemble les participes fondés en
rafid-a "il trouve", cf. inf. ràs-ti "trouver", ind. prét. rad-o) ;
synchronie sur le thème de l'infinitif. Ce type comprend les formes
lett. mçt-uôss "jetant, qui jette" (: ind. prés. mçt "il jette"),
suivantes:
pêrk-uôss "achetant, qui achète" (: ind. prés. p frk "il achète", cf. inf. pirk-t "acheter", ind. prét. pirka), rùod-uôss "trouvant, qui trouve" (: ind. prés. rùod "il trouve", cf. inf. ras-t "trouver", ind. prét. rad-a) ; v. pro giwiïntei / lebending "vivant", gérondif, III, 97 14
(:
ind. prés. giwa / lebet "il vit",
111,43 24, etc.). - PARTICIPE PRÉTÉRIT ACTIF: par ex. lit. met-f;s "qui a jeté"
(: ind. prét. met-e "il jeta"), pifk-f;s "qui a acheté" (: ind. prét. pifk-o "il acheta", cf. inf. pifk-ti "acheter", ind. prés. pen-a), rad-f;s "qui a trouvé" (: ind. prét. rad-o "il trouva", cf. inf. ràs-ti "trouver", ind. prés. raiid-a), gyn-f;s "qui a défendu" (: ind. prét. gyn-e "il défendit", cf. inf. gin-ti "défendre", ind. prés. gin-a) ; lett. met-is "qui a jeté" (: ind. prét. meta "il jeta"), pirk-is "qui a acheté" (: ind. prét. pirka "il acheta", cf.
- PARTICIPE PRÉTÉRIT PASSIF: par ex. lit. mes-tas "qui a été jeté"
(: inf. mès-ti "jeter"), pifk-tas "qui a été acheté" (: inf. pifk-ti "acheter", cf. ind. prés. pen-a "il achète", ind. prét. pifk-o), ras-tas "qui a été trouvé" (: inf. ràs-ti "trouver", cf. ind. prés. raiid-a "il trouve", ind. prét. rad-o) ; lett. mfsts "qui a été jeté" (: inf. mest "jeter"), pirk-ts "qui a été acheté" (: inf. pirk-t "acheter", cf. ind. prés. pfrk "il achète", ind. prét. pirka), rast-s "qui a été trouvé" (: inf. ras-t "trouver", cf. ind. prés. rùod "il trouve", ind. prét. rad-a) ; v. pro laiküts / gehalten "tenu", III, 1721 107 10, etc.).
(:
inf. laiküt / leisten "tenir", III,
- PARTICIPE FUTUR ACTIF: par ex. lit. mè-siçs "qui jettera" (: inf.
mès-ti "jeter"), pifk-siçs "qui achètera" (: inf. pifk-ti "acheter", cf. ind. prés. pefk-a "il achète", ind. prét. pin-o),
inf. pirk-t "acheter", ind. prés. pfrk), rad-is "qui a trouvé"
rà-siçs "qui trouvera" (: inf. ràs-fi "trouver", cf. ind. prés.
(: ind. prét. rad-a "il trouva", cf. inf. ras-t "trouver", ind.
raiid-a "il trouve", ind. prét. rad-o).
prés. rùod) ; v. pro teiküuns / schdpffer "créateur, qui a
- PARTICIPE FUTUR PASSIF: par ex. lit. mè-simas "qui sera jeté"
créé", III, 39 19 (: ind. prét. teikü / schuff"il crée", 111,105 22,
(: inf. mès-ti "jeter"), pifk-simas "qui sera acheté" (: inf.
etc.).
pifk-ti "acheter", cf. ind. prés. pefk-a "il achète", ind. prét.
- PARTICIPE PRÉSENT PASSIF: par ex. lit. met-amas "qui est jeté"
(: ind. prés. met-a "il jette"), pefk-amas "qui est acheté"
pin-o), rà-simas "qui sera trouvé" (: inf. ràs-ti "trouver", cf. ind. prés. raiid-a "il trouve", ind. prét. rad-o).
(: ind. prés. pefk-a "il achète", cf. inf. pifk-ti "acheter", ind. prét. pin-o), raiid-amas "qui est trouvé" (: ind. prés. raiid-a "il trouve", cf. inf. ràs-ti "trouver", ind. prét. rad-o) ; lett. mft-àms "qui est jeté" (: ind. prés. mçt "il jette"), pfrk-àms "qui est acheté" (: ind. prés. pfrk "il achète", cf. inf. pirk-t "acheter", ind. prét. pirka), rùod-àms "qui est trouvé" (: ind. prés. rùod "il trouve", cf. inf. ras-t "trouver", ind. prét. rad-a). Pas d'exemple clair en v. prussien.
Les structures ainsi définies laissent peu de place à une apophonie radicale spécifique du mode participial. En règle générale, les participes reproduisent purement et simplement le degré vocalique de leur forme de fondation, c'est-à-dire de l'indicatif (pour le type 1) ou de l'infmitif (pour le type II). On peut cependant signaler plusieurs exceptions. Une seule est d'un caractère récent; les autres reflètent un archaïsme indo-européen et permettent d'entrevoir, dans la préhistoire du baltique, une période où la
Catégorie du mode
226
formation des participes n'était pas aussi régulière et systématique qu'elle l'est à date historique.
Catégorie du mode
227
Il existe, dans la langue littéraire contemporaine, une tendance à rapprocher l'accentuation de ces participes divergents de celle des infinitifs,
La première exception concerne l'accentuation des participes prétérits
d'où des formes secondaires comme mèstas "jeté", nèstas "porté", kàstas
passifs à suffixe -tas en lituanien. En règle générale, ces participes
"creusé", ràstas "trouvé", etc. L'état le plus ancien est cependant conservé
reproduisent au nominatif masculin singulier l'accentuation de l'infinitif
dans une grande partie des dialectes lituaniens (notamment en haut-
auquel ils correspondent et sur lequel ils sont fondés en synchronie; les
lituanien de l'Ouest et en bas-lituanien).
verbes à radical polysyllabique ont une accentuation stable (type 1), les autres une accentuation mobile (types 3 ou 4). On a ainsP19 :
Il n 'y a aucune raison de parler ici d'apophonie quantitative. L'opposition de quantité < E:
/ E
> qui paraît séparer le participe mestas et
- VERBES DÉRIVÉS À RADICAL POLYSYLLABIQUE: lit. skaitftas
l'infinitif mèsti s'explique, à l'intérieur même du lituanien, par une
"lu" (fém. skaitfta) .-skaitfti "lire", girdetas "entendu" (fém.
tendance phonétique récente à allonger les voyelles brèves e et a sous
girdeta) .- girdeti "entendre", dainûotas "chanté" (fém.
l'accent. Même si les conditions de cet allongement demeurent obscures
dainûota).- dainûoti "chanter".
(l'absence d'allongement à l'infinitif pose évidemment problème)320, il
- VERBES À RADICAL MONOSYLLABIQUE D'INTONATION RUDE:
s'agit d'un phénomène phonétique secondaire, qui n'est en rien assimilable
lit. lilllktas "attendu" (fém. lauktà) .-lilllkti "attendre", léistas
à une apophonie radicale et ne remet pas en cause la cohésion synchronique
"laissé, permis" (fém. leistà) .- léisti "permettre", dûotas
des participes en -tas et des formes d'infinitif.
"donné" (fém. duo/à).- dûotÎ "donner".
Les participes en -tas sont donc fondés, dans la synchronie des langues
- VERBES À RADICAL MONOSYLLABIQUE D'INTONATION DOUCE
baltiques, sur le thème de l'infinitif. Ce rapport morphologique est ancien
OU À VOYELLE BRÈVE: lit. saiik/as "crié" (fém. sauktà)
en un sens, même s'il a été profondément renouvelé en baltique, car il
.- saftkti "crier", temptas "étiré" (fém. temp/à).- /empli
témoigne du parallélisme qui existait, dès l'indo-européen, entre la
"étirer", milstas "frappé" (fém. mustà) - mùs/i "frapper".
formation des adjectifs verbaux en *-to- et celle des abstraits verbaux en
Mais, dans les verbes à voyelle radicale brève e ou a, on observe une différence entre le vocalisme bref de l'infinitif et le vocalisme allongé du participe, ainsi:
*-ti-, toutes deux caractérisées (au moins dans certaines de leurs formes) par
un degré zéro radical. En védique, par exemple, on a (api}-hitaJ; "placé" comme (api}-hiti!) "placement, fait de placer", i~-(a!) "désiré" comme i~-(ih "désir", gata!) "qui marche" comme gati!) "marche, allure", etc. Le grec
- VERBES À RADICAL MONOSYLLABIQUE À VOYELLE RADICALE BRÈVE e ou a : lit. mes/as "jeté" (fém. mes/à) # mèsti
"jeter", nes/as "porté" (fém. nes/à) # nès/i "porter", kâs/as "creusé" (fém. kas/à) # kàsti "creuser", râs/as "trouvé" (fém. ras/à) # ràs/i "trouver".
présente encore l'état ancien dans des couples comme COTOS "donné"
« i.-e. *dh3-to-) et 80ŒLs "don" « i.-e. *dhrti-), TTOTOS "bu" « i.-e. *ph 3 -to-) et TTOŒlS
« i.-e. *phrti-), >aTos "dit" « i.-e. "parole" « i.-e. *bhhrti-), mais il a développé
"boisson"
*bhhrto-) et >ans, epaŒlS
également une tendance à rapprocher les abstraits en -ŒLS des abstraits en -!la et à les séparer ainsi, du point de vue de l'apophonie, des adjectifs
319. Exemples: LKG (11, p. 372-373, § 605).
320. Voir une présentation du problème p. 16-17.
229
Catégorie du mode
Catégorie du mode
verbaux en -TOS : en regard de l'opposition ancienne conservée dans puaLS
slave a ainsi conservé d'anciennes formes apophoniques, comme l'infinitif
"écoulement", PUTOS "versé, qui coule" (degré zéro) ::::: pEDll-a "écoulement"
6bpaTH / bbrati "porter, prendre", réfection d'après l'aoriste en
(degré plein), le grec tardif a produit une opposition secondaire PUTOS
plus ancien *bir-ti « Ï.-e. *bh(_ti_). En lituanien même, s'il est probable
(degré zéro) ::::: pEDaLS, pEulla (degré plein). Pour les langues baltiques, la
que berti "verser" et bertas "versé" ont pris leur degré plein secondaire à
question du degré apophonique des participes en -tas s'avère par conséquent
l'indicatif présent beria "il verse" (avec suffixation secondaire, au lieu de
inséparable de celle des infinitifs en -ti, qui prolongent d'anciens
*ber-a < i.-e. *bher-%-, cf. gr. cf>É pw), on observe que le système
substantifs verbaux en *-ti-. Sans aborder ici en détail cette question, on se
apophonique ancien survit encore dans le type minti ''penser, se souvenir",
contentera de faire une remarque, qui touche directement l'évolution des
participe miiitas (avec degré zéro) en regard de mena "il se souvient" (avec
adjectifs verbaux indo-européens en *-to- dans les langues baltiques.
degré plein). La question se pose de savoir pourquoi l'ancien degré radical
228
*-a- d'un
Le baltique présente, de manière très claire, une tendance à introduire un
zéro a été conservé dans le type type minti, mintas ::::: mena et refait dans le
degré plein dans les infmitifs en -ti et dans les participes en -tas, au lieu du
type type berti, bertas::::: beria. On abordera ce problème un peu plus loin,
degré zéro attendu par la comparaison indo-européenne. À l'indo-européen
dans l'analyse consacrée à l'apophonie des formes de l'infinitif; mais, dès
*cI'h l-to- "placé", reconstruit sur la base du grec 8ETOS" du latin fa(c)tus et
à présent, on peut penser que les participes en -tas ont joué un rôle
du védique hitcff), le baltique répond par une forme à degré plein *de-tas
important dans cette évolution.
*cl'ehl-
Si l'on laisse ce problème provisoirement de côté, il existe une seule
to- ; on observe la même divergence entre l'indo-européen *cI'h r ti- "fait de
autre exception à la motivation synchronique qui tire le thème des
placer" (cf. gr. 8ÉaLS) et l'infmitifbaltique *de-ti- (cf. lit. défi). De même,
participes de celui de l'indicatif ou de l'infmitif. Elle concerne deux verbes
pour le verbe "donner", là où l' indo-européen avait *dhrtb- "donné" (cf. gr.
athématiques, "être" et "aller" et leurs participes présents actifs.
(lit. défas "placé"), qui paraît supposer une prototype indo-européen
SOTOS) et *dhrti- "don" (cf. gr. BoaLS), le baltique a un participe *do-tas
Le verbe "être" avait en indo-européen un participe présent caractérisé
(cf. lit. duotas "donné") et un infinitif *do-ti- (cf. lit. duoti "donner").
par un degré zéro radical constant et un suffixe alternant: i.-e. *hls-ont-/-1)t-
Comparer également:
"étant, qui est". Cette reconstruction est fondée sur la convergence de
_ i.-e. *bh(-to- "porté" (véd. bh(taJ;z) et *bh(-ti- "fait de porter" (véd. bh(ti1) ::::: baltique *bertas "versé" (lit. beftas), *berti-
"verser" (lit. berti). _ i.-e. *gW(hrto- "dévoré" (gr. ~pWTOS) et *gW(hrti- "fait de dévorer"
fonnes attestées dans diverses langues indo-européennes, formes qui pour certaines ne fonctionnent plus en synchronie comme des participes et ont donc le plus de chances de présenter des traits archaïques321
:
-INDO-EUROPÉEN *hls-ont-, gén. sg. *hls-1)t-efos:
(gr. ~pwaLS) ::::: baltique *gertas "bu" (lit. gértas), *gërti-
• védique sant-, nom. sg. san "étant, qui est"
"boire" (lit. gérti).
*hls-ont-), gén. sg. sataJ;z
«
«
i.-e.
i.-e. *h ls-1)t-%s).
L'extension du degré plein en baltique doit être assez ancienne, car elle s'est également réalisée, de manière partielle, en slave, où l'on a quelques formes à degré plein, par ex. v. sI. ~tnl / deti "placer" (= lit. déti). Mais cette innovation n'est pas constante, ni en slave, ni même en baltique. Le
321. Reconstruction indo-européenne : Kurylowicz (1956, p. 67), Sihler (1995, p. 615-616, § 557). Sur le latin sons, cf. Watkins (1967, p. 186-194).
Catégorie du mode
230
Catégorie du mode
• grec nom. sg. homérique Èwv, attique
« *hls-ont-, avec prothèse pl.
*ÈOVTES'
wv
"étant, qui est"
probablement un calque de l'allemand gegen-wartig "présent", lui-même
vocalique, cf. gr. mycénien nom.
formé par calque du latin prae-sëns. La forme du participe -sins, -sentismu
dans a-pe-o-te
*àlTEOVTES'
"absents").
soulève deux problèmes, celui de la structure du suffixe et celui du degré
• v. slave ChI 1 sy, gén. sg. CZIllTa 1 sçsta "étant, qui est"
«
231
L-e. *hls-ont-).
vocalique du radical. S'agissant du suffixe, la graphie / in 1 (v. pro -sins) alternant avec / en 1
• hittite a-sa-an-za 1 asants l "étant, qui est"
«
L-e.
*hls-ont-s).
(v. pro -sentismu) a conduit certains linguistes à supposer la conservation d'une ancienne alternance vocalique: la forme -sins serait à lire comme
« *hls-ont-)
1sin(t)-s 1 et serait le reflet d'un indo-européen *S1)t- (en notation moderne
> v. ang. sojJ, v. isl. sannr "vrai", traces de germanique
*hls-1)t-), tandis que la forme -sent-ismu serait à lire comme 1 sent- 1 et
• germanique adjectif dérivé *sanJ>-az "vrai"
*sund-
«
i.-e. *hls-pt-) dans got. sunja "vérité,
et
germanique *sund-ijo > vha. suntea "8ünde, péché", v. sax.
représenterait un indo-européen *sent- (en notation moderne *hls-ent-)322. Cette analyse n'est guère vraisemblable pour plusieurs raisons. Tout
sundea, v. fris. sende, v. ang. synn "sin, péché".
d'abord, on comprend mal la distribution des degrés vocaliques suffixaux,
• latin sons, sontis "coupable"
«
àÀ:t'18Ela"
i.-e. *hls-ont-), cf. dérivé
avec un degré zéro au nominatif singulier (-sins) et un degré plein *e au
lat. sonticus "dangereux, sérieux", praesëns "présent", absëns
datif singulier (-sentismu) : cette distribution est apparemment inverse de
"absent"
«
i.-e. *hls-pt-), cf. osque praesentid (abl.
"praesenti").
celle qui est attestée en védique (nom. sg.
san,
avec degré plein, vs. dat.
sg. saté, avec degré zéro). Autre difficulté: les correspondants les plus
Par rapport à l'indicatif présent correspondant, lui-même apophonique (i.-e.
proches, le vieux lituanien santi (acc.) aussi bien que le vieux slave ChI 1 .sy
3e sg. *h1es-ti, 3e pl. *hls-elJnti), le participe présent est donc marqué par
(gén. sg. CZillTa / sçsta), paraissent avoir généralisé un degré suffixal *0
un degré zéro constant de son radical (*h1s-ont-, gén. sg. *hls-pt-efos). Dans les langues baltiques, cette particularité a été d'abord conservée, puis elle a
(*hls-ont-), mais n'ont aucune trace ni d'un degré zéro (*h 1s-1)t-), ni d'un degré plein *e (*hls-ent-). On imagine difficilement un paradigme
été éliminée. Les formes qui gardent encore le degré apophonique ancien
combinant ces trois degrés vocaliques. À cela s'ajoute le fait qu'un degré
sont les suivantes. En vieux prussien, le participe du verbe "être" est connu à travers une forme composée, qui apparaît deux fois dans le IIr Catéchisme: - nom. sg. emprijkisins / gegenwertig "gegenwârtig, présent", littéralement: "qui est devant" (III, 115 1), dat. sg. emprzkisentismu
suffixal *e est mal attesté dans les autres langues indo-européennes323 . Le latin -sens (dans praesens, absëns) ne représente pas nécessairement L-e.
*hls-ent-, mais peut être issu d'un degré zéro *hls-1)t- généralisé, comme dans l'ensemble des participes (cf. lat. ferëns "portant", ombr. zeref "sëdens" < *-1)t-) : quelques vestiges archaïques montrent que cette généralisation s'est faite au détriment d'un degré suffixal
/ gegenwertigen (III, 117 1-2).
* 0,
non d'un
Le premier terme du composé est l'adverbe emprzki / wider "contre, en face" (attesté en III, 8922, III, 8923, III, 97 4, sans doute un calque du v. pol.
wprzeki) ; le second terme -sins, -sent-ismu est une forme du participe du verbe "être". L'ensemble ainsi constitué ("étant + en face" = "présent") est
322. Analyse mentionnée par van Wijk (l929b, p. 162). 32~. E~ ce sens, ~ammesberger (1981, p. ~88), Smoczyfiski (2000a, p. 20). Plus reserve, Schmalstleg (2001, p. 186-187) ajoute au dossier de *h1s-ent- les formes du grec dorien hEVT-, sans insister clairement sur leur caractère secondaire.
233
Catégorie du mode
Catégorie du mode
degré *e (cf. lat. *Mel-ont- dans uoluntiis "volonté" en regard de * yel-pt- >
Comment, dès lors, expliquer la graphie / -sent- / à côté de / -sint- / ?
lat. uolens "voulant"). Dans le cas qui nous intéresse ici, le latin a conservé
Deux analyses sont possibles. On peut prendre comme point de départ la
une trace ancienne du degré suffixal * 0 dans la forme sémantiquement
graphie / -sint- / et y voir le reflet d'un degré zéro suffixal hérité de l'indo-
évoluée sons "coupable". Le grec dorien présente une trace plus claire d'un
européen *h1s-pt- ; en ce cas, la graphie / -sent- / doit être tenue pour
degré suffixal *e à travers un thème participial hEvT-, attesté en dorien
secondaire. Le problème est que, si l'on connaît plusieurs exemples
232
attique lTap6vTwv), en dorien
possibles de diphtongues [enC] étymologiques notées / inC / dans le me
attique ÔVTES-), en dorien d'Argolide (ace.
Catéchisme ("règle swints" selon Smoczynski, 2000a, p. 13-25), le cas
sg. fém. hEaaav ~ attique ovaav), et en thessalien (gén. fém. sg. €v[aas-],
inverse est nettement moins assuré. Les exemples d'une évolution [inC]
Larissa,lt s. av. J.-C. ~ attique ouaT)S-), etc. Mais il y a peu de chances
> [enC] sont tous contestables325 • Si l'on ne retient que les fonnes
que ce thème représente un prototype indo-européen *h1s-ent-. Comme l'a
attestées dans le Ille Catéchisme (puisque c'est là que se trouvent à la fois
suggéré Kurylowicz (1968, p. 268-269), il doit s'agir d'une formation secondaire à partir de la forme de 3e pl. de l'indicatif présent *hEVTl (dorien
-sins et -sentismu) et qu'on écarte les formes connues ailleurs326 , on ne trouve, à la rigueur, que deux mots susceptibles de présenter une évolution
ÈVTL, attique dal, mycénien e-es-si "ils sont" < i.-e. *h1s-enti, got.
[inC] > [enC], et tous les deux doivent être interprétés autrement:
sind)324. On peut concevoir que le thème participial *hEvT- a été tiré
ebsentliuns "désigné" (III, 109 10- 11, III, 11920) ne provient pas de
d'une proportion analogique comme:
*ebzintlij-uns, comme le pense Smoczynski (2000a, p. 23), mais de
laconien chez Alcman (gén. pl. lTapÉvTwv d'Héraclée (nom. pl. hEvTEs-
~
~
- *cPEpOVTL "ils portent" (attique
part.
d'où *(È)hEvTl "ils sont" (attique dal) -+
part. *(È)hEvT- "étant",
au lieu de *(È)hovT-. Ou plus précisément dans les verbes athématiques :
- *TLSEVTl "ils placent" (attique TlSÉaaL) ~
part. TL8EVT- "plaçant"
d'où *(È)hEvTl "ils sont" (attique dal) -+
part. *(È)hEvT- "étant".
*eb-zentlij-uns (dénominatif de *zentlas "signe", cf. lit. iénklas "signe") ; tenseiti "déchirez" (III, 93 18) ne vient pas de *tinseiti, mais de *tenseiti (cf. lit. tfsti "étirer" < *tens-). Une évolution [ine] > [enC] paraît donc étrangère au Ille Catéchisme et ne saurait expliquer la graphie / sent / du datif -sentismu. Pour expliquer cette forme, Smoczyftski (2000a, p. 19-20) a proposé une autre analyse. Il part d'un degré suffixal *0 et suppose donc une forme prussienne *-sant-
«
i.-e. *h1s-ont-), qui aurait un corres-
pondant direct en vieux lituanien (acc. santD et dans la plupart des autres langues indo-européennes. La diphtongue [an] aurait évolué d'abord en [en], étape attestée dans le datif -sentismu, puis en [in], étape ultime dont témoigne la finale de nominatif -sins. Cette hypothèse présente, à mon
Aucune langue indo-européenne ne fournit par conséquent de trace incontestable d'un thème *h1s-ent-. Il est donc peu vraisemblable d'en supposer l'existence pour expliquer la forme du vieux prussien -sentismu.
324. Le dossier est présenté de manière très claire chez Morpurgo-Davies (1978, p. 157-166). Voir aussi Sihler (1995, p. 618, § 559d).
325. Cf. Smoczyftski (2000a, p. 22-23). 326. Une graphie 1 enC 1 pour une ancienne diphtongue [inC] se rencontre plusieurs fois dans le 1er Catéchisme (par ex. dessempts "dix", l, 51, vs. dessimpts "dix", II, 57, dessimton, III, 271 < *desimts, cf. lit. desimt "dix") et l'on en a peut-être quelques exemples dans le Vocabulaire d'Elbing (par ex. klente / kuh "vache", E 673, cf. toponyme Clynteyne). Les données du Ille Catéchisme sont évidemment d'une autre nature.
Catégorie du mode
Catégorie du mode
sens, un inconvénient majeur. On connaît, dans le Ille Catéchisme,
d'optatif sei-, dont il a été question plus haut. On se rappelle que, dans
plusieurs exemples possibles d'une évolution [anC] > [enC], en particulier
cette forme, le suffixe d'optatif -ei-, au lieu de -ai-, a été expliqué par une
234
235
devant voyelle d'avant, cf. v. pro dengenennis "céleste" (par ex. III, 4920,
influence du verbe "aller", dans lequel -ei- résulte d'une évolution
etc.) < *dang- (cf v. pI. dangus "ciel", par ex. III, 43 4 , etc.)327. On
phonétique normale de -ai- après yod. On peut proposer une solution
connaît par ailleurs plusieurs exemples possibles d'une évolution [enC]
comparable pour la forme du participe du verbe "être". Supposons que le
> [inC] dans le Ille Catéchisme ("règle swints"), notamment v. pI. swints
vieux prussien ait hérité de l'indo-européen deux participes de structure
"saint" (par ex. III, 39 10) < *svent- (cf. lit. S'ventas "saint")328. Mais on ne
apophonique, *s-ant- "étant"
connaît aucun exemple combinant les deux évolutions [anC] > [enC]
*hd-ont-). Dans la seconde forme, la séquence ryal devait être conservée en
> [inC], ce qui serait le cas, selon Smoczynski (2000a, p. 20), dans le
position initiale (comme dans v. pI. *iagno "foie"), mais, en position
participe *sant- > *sent- > *sint-. Le seul parallèle cité par Smoczynski
intérieure, après préverbe, elle évoluait en ryal > [(y)e]. On peut admettre
-le v. pro pintis "chemin" (E 799), pentes (GrA 58, GrF 58), peentes
que les formes participiales *y-ant- "allant" et, par exemple, *is-y-ant-
(GrG 33), analysé comme un emprunt au vieux polonais pgé "chemin", à
"sortant" ont abouti respectivement à *y-ant- et *is-ent- (ou *is-y-ent- avec
travers une évolution *pantis > *pentis > pintis -
s'explique plus
restauration de la sonante), puis éventuellement, avec généralisation de
aisément comme un archaïsme hérité de l'i.-e. (degré zéro i.-e. *P1)t-, cf
l'allomorphe des formes préverbées, *(y)-ent-. On peut alors reconstruire,
véd. gén. sg. pathal})329. On peut mettre en doute cette analyse.
dans l'évolution linguistique, une étape où coexisteraient d'une part *s-ant-
«
i.-e. *h1s-ont-) et *y-ant- "allant"
«
i.-e.
Sur un point, cependant, Smoczynski a certainement raison. La
"étant" et d'autre part *(y)-ent- "allant" : cette étape est précisément, on le
reconstruction d'un prototype à degré suffixal *e « i.-e. *h1s-ent-) est
verra un peu plus loin, celle du vieux lituanien, qui oppose un participe
impossible pour des raisons comparatives, celle d'un prototype à degré
santi "étant" (acc.) et un participe enti "allant" (ace.). La proximité des
suffixal zéro « i.-e. *h 1s-1)t-) est impossible pour des raisons internes à la
deux verbes, observée dans leurs formes d'optatif, aurait ici encore joué un
graphie des textes prussiens. Le plus économique est donc de supposer,
rôle important, et il n'est pas impossible que le participe du verbe "être" ait
comme Smoczynski, une forme à degré suffixal *0, c'est-à-dire
pro
pu prendre par analogie le vocalisme suffixal du participe du verbe "aller",
i.-e. *hls-ont-). Il reste, en ce cas, à expliquer la forme *sent-
d'où une forme *s-ent- au lieu de *s-ant- d'après *(y)-ent-. L'analogie a pu
*sant-
«
V.
attestée dans -sentismu et la forme *sint- attestée dans le nominatif -sins.
se faire, comme pour l'optatif, à travers la proportion suivante :
Pour résoudre ce problème, il est utile, à mon sens, de rapprocher une autre
- ind. *ey- "aller", vs. part. *y-ent- « *y-ant-)
forme apophonique du verbe "être" attestée en vieux prussien, la fonne
d'où: ind. *es- "être", vs. part. X (X = *s-ent- au lieu de *s-ant-).
327. Smoczynski (2000a, p. 21). En l'occurrence, il n'est pas impos.sible, comme le suppose Maziulis (PKEt, l, p. 177), que la forme den~enenms,. au même titre que l'accusatif dengan (III, 1338), doive son degré vocalIque radical à l'influence du verbe de base *deng- (: lit. defigti "couvrir"), cf. lit. dialectal dengùs "ciel" au lieu de dangùs. 328. Smoczynski (2000a, p.21). Mais .l'hypo~hèse d'un emprunt au polonais swiçty "saint" n'est pas non plus ImpossIble (cf. Trautmann, 1910, p. 444; Maziulis, PKEZ, IV, p. 179). 329. Sur ce mot, voir notre analyse p. 37-38.
Cette hypothèse rejoint l'analyse de Smoczynski en ce qu'elle part d'une forme première à degré suffixal *0 généralisé (i.-e. *h1s-ont- > baltique *sant-). Toutefois, à la différence de Smoczynski, j'ai tendance à penser
que le passage du baltique *sant- au v. pro *sent- est le produit non pas d'une évolution phonétique, mais d'une évolution morphologique, et qu'il a été suscité par l'influence du verbe "aller", lui-même soumis à une
236
Catégorie du mode
Catégorie du mode
évolution phonétique qui lui est propre. Cette forme secondaire *sent-,
237
- ace. masc. sg. Janti (417 18), Içnti (418 2), voc. fém. sg. Janti
encore attestée dans le datif -sentismu, aurait ensuite abouti à *sint-, attesté
(317 16); ace. masc. pl. Ianczus (58 14, 573 2), gén. pl. déter-
dans le nominatif -sins, en vertu de la "règle swints". Le flottement des
miné Ianczuiu (258 6)332.
deux graphies / sent / et / sint / n'aurait, quant à lui, aucune signification précise, sinon peut-être d'indiquer une prononciation intermédiaire entre [el et [il, au même titre, par exemple, qu'une graphie / ie / attestée plusieurs fois dans le IIIe Catéchisme: v. pro piencts "cinquième" (III, 3 h, *penk-, lit. pefiktas), auskiëndlai "qu'il se noie" (III, 12b, sk~sti),
*skend-,
lit.
tienstwei "tirer" (III, 73 4- 5, *tens-, lit. tfsti)330.
Si l'on adopte cette analyse, on est amené à attribuer au vieux prussien un participe *s-ant-, passé secondairement à
*s-ent-.
Par rapport à
l'indicatifprésent correspondant, le participe du verbe "être" est caractérisé par un degré zéro radical constant. Cet archaïsme a été conservé en vieux prussien en dépit des modifications apportées à la structure du suffixe, et en dépit même de la pression d'un système qui associe clairement thème de participe et thème d'indicatif ou d'infinitif. On observera que la conservation de cet archaïsme n'a pas été gênée par le fait qu'il pouvait produire
Dès les premiers textes, cependant, les formes du nominatif masculin singulier *S{lS « *sant-s) et pluriel *sç font défaut; Mahrydas n'a que des formes déjà pourvues d'un degré plein radical *esçs et *esç (par ex. nom. masc. sg. elJas, 118 15, 1204, forme déterminée eIJçJis, 98 18, nom. masc. pl.
dIa, 338 15)333. Cette innovation s'explique probablement par une tendance ancienne à éviter des formes monosyllabiques comme *s çs et à les remplacer par des formes plus pleines comme *esçs. Dans le cas du gérondif neJchant, attesté en 63 16, il est difficile de savoir si la forme monosyllabique a été conservée (*ne-sant) ou modifiée (*n-esant)334. Dans le Catéchisme de Dauksa (1595), les formes à initiale s- se rencontrent encore (cf. gén. pl. Jçczi{l, DK, 1256 ), mais les fonnes à initiale escommencent à apparaître plus fréquentes. On notera, cependant, qu'en dehors du nominatif masculin singulier eOHas (DK, 56 12, 1284 , 1496), où
une forme monosyllabique (par ex. nom. sg. *sins) ; il est vrai que cette forme monosyllabique n'est connue, en vieux prussien, qu'à travers une forme composée (v. pro emprijki-sins), ce qui n'est pas sans parallèles et reflète peut-être une tendance ancienne (cf.lat.prae-sëns, ab-sens). En lituanien, cet archaïsme a lui aussi été conservé, au moins dans un premier temps, mais la tendance s'est vite exercée à l'éliminer au profit d'une forme à degré vocalique régularisé. En vieux lituanien, le verbe "être", qui appartient encore au type athématique à l'indicatif (v. lit. esmi, esti), présente de manière régulière une forme participiale à degré zéro
radical,
V.
lituanien sant{ "étant" (ace. sg.) < i.-e. *h 1s-ont-(rpj331. Chez
Mahrydas (milieu du XVIe siècle), on trouve les formes suivantes:
330. Voir une tentative en ce sens chez Kortlandt (2001, p. 57-65) ; cf. aussi Kortlandt (1998, p. 124). 331. Sur le participe sant- du v. lituanien, cf. Zink~vicius (LKIG, II, p. 148149, § 615), Schmalstieg (2000, p. 333). Les tentatIves pour retrouver des
variantes apophoniques du suffixe de participe présent en vieux lituanien peuvent être considérées comme sans valeur: la forme de gén. pl. priesienczu (Mazvydas, 11418_19, dans la Forma Chrikftima, 1559, 22 18- 19) ne reflète pas *prie-sent-ju, avec un vestige d'un thème *sent- (malgré Trautmann, 1910, p. 254), mais bien plutôt *prie-si-ent-ju, du verbe prie-si-eiti (en ce sens, van Wijk, 1929b, 167) ; la fonne dfmguifsis (Mazvydas, 48 19), dçnguiesis (54 3 ) "céleste" ne provient pas d'un groupe *danguje-si(n)s "étant + dans le ciel", avec un vestige d'un thème *sint- (malgré Trautmann, 1910, p.254), mais c'est une forme secondaire, en regard de dçnguj~is "6 Èv oùpav0", créée sur le génitif *danguje-jo d'après le modèle des formes détenninées geràsis : gérojo par métanalyse du rapport présumé entre un nominatif -sis et un génitif -Jo (en ce sens, Stang, 1929, p. 128, § 228). 332. Données chez Stang (1929, p. 157), Urbas (1998, p. 74). 333. Même distribution dans le Catéchisme de Petkevicius (1598) : nom. masc. sg. esçs (177 14), mais nom. fém. sg. santi (64 17), gén. fém. sg. sancios (31 18), etc. Cf. Kruopas (1970, p. 109 = 1998, p. 91). 334. Une conservation de la forme monosyllabique me paraît plus vraisemblable, cf. gérondif hmt chez Dauksa (DP, 2526, 60530). Si cette forme a pu être conservée dans un système qui répugne aux formes monosyllabiques, c'est peut-être parce qu'elle était dissyllabique à l'origine (*santi). S'agissant de la forme neJchant chez Mazvydas, l'association avec la négation ne- et la pression du texte original (polonais niosçc) ont également pu jouer un rôle.
Catégorie du mode
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239
Catégorie du mode
elles sont régulières, elles sont limitées à une formule isolée "l'Église omniprésente" (nom. fém. sg. Bainicfia wiIJurefIçti, DK, 396
Les données du vieux lituanien sont intéressantes en ce qu'elles nous
gén. fém.
montrent comment l'apophonie radicale ancienne a progressivement disparu
sg. Batniciios wïIsur~Jsçnczios, DK, 1299 , etc.), où l'introduction d'une
dans le participe du verbe "être". Contrairement à ce qu'on pourrait
voyelle initiale permettait peut-être d'éviter la rencontre phonétique de la
attendre, ce n'est pas en premier lieu la pression du système
sonante -r finale de l'adverbe visu; "partout" et de la sifflante initiale du
morphologique qui a imposé la disparition du thème réduit s-ant- au profit
participe sant- (*visur-sant- remplacé par *visur-esant-). Dans la Postilla
de es-ant-, mais c'est d'abord la nécessité phonétique d'éviter des formes
de Dauksa (1599), les données paraissent plus évoluées, même si la
monosyllabiques au nominatif masculin singulier (* sçs
prédominance des formes à initiale s- est encore sensible : le génitif
nominatif masculin pluriel (*sç --+ esç). L'extension ultérieure du thème
masculin singulier y est sancio (8x) ou esancio (2x) ; le génitif féminin
plein a été favorisée par le déséquilibre qui existait entre les formes du
singulier est sancios (11x) ou esancios (5x), l'accusatif masculin singulier
nominatif masculin, à initiale es- (es{ls et esç), et les autres formes du
est santi (33x) ou esanti (7x)335. Au XVIIe siècle, dans la Knyga
paradigme, à initiale s- (par ex. acc. masc. sg. sant{, nom. fém. sg. santj),
Nobainystes (1653), les proportions sont inversées en faveur du thème
ce qui conduisait naturellement à imposer partout un même degré vocalique
esant-, et par exemple l'accusatif masculin singulier est eJanti (9x) ou Janti
radical. Le choix de es- plutôt que de s- était évidemment justifié par des
(2X)336. La grammaire de Klein (1653, p. 100) mentionne encore
raisons morphologiques (rapport avec l'indicatif esti), mais aussi il
concurremment, au nominatif féminin singulier, éJanti ou Janti / die da
permettait d'éviter le problème posé par les formes monosyllabiques.
;
--+
esçs) et au
ist, en regard d'un masculin singulier unique éJçs / der da ist. Au XVIIIe
Il est intéressant de noter que l'apophonie radicale a été conservée plus
siècle, les formes à initiale s- paraissent avoir disparu : un texte religieux
longtemps, en lituanien, dans le mode participial que dans le mode optatif.
écrit en bas-lituanien, le Zywatas (1759), par exemple, n'a plus que des
Avant même les premiers textes
formes à initiale es_337 • En lituanien moderne, le participe présent du verbe
degré plein radical au degré zéro hérité (v. lit. permissif (te)esie "qu'il
"être" est régulièrement
es~s
(Xvr
siècle), l'optatif avait substitué un
(gén. sg. esancio), fém. esanti (gén. sg.
soit !" < *es-ai-, au lieu de *s-ai-), tandis que le participe conservait encore
esancios), et il n'existe plus aucune trace, ni dans la langue standard, ni
largement des formes à degré zéro radical (v. lit. sant-). Ce décalage
Cette inno-
chronologique dans l'évolution des formes modales reflète probablement
vation, qu'on voit s'imposer progressivement durant l'histoire de la langue
une différence dans leur degré de grammaticalisation : on peut estimer que
lituanienne, était déjà réalisée dès les plus anciens textes en letton, qui n'a
les formes conjuguées de l'optatif étaient plus étroitement associées au
"étant" (fém. ~suôsa) sur
système verbal, et par là même plus sujettes au nivellement analogique,
l'indicatif ~smu "je suis", ~sàm "nous sommes" (cf. Endzelïns, 1923,
que les formes adjectivo-nominales du participe présent. On observe là l'un
p. 722-723, § 727).
des traits les plus caractéristiques des langues baltiques, la tendance à
dans les dialectes, de l'ancien thème participial à initiale
jamais eu autre chose qu'un participe
fSUÔSS
S-.
restreindre l'apophonie radicale au domaine de la dérivation et à l'exclure de l'expression des catégories grammaticales. 335. Données plus complètes: Senn (1934-1935, p. 97-98). 336. Données chez Jakulis (1995, p. 36). 337. Données chez Girdenis & Girdenienë (1997, p. 96).
240
Catégorie du mode
Catégorie du mode
241
Le vieux lituanien possède encore un autre participe présent
- THÈME *ejant-: par ex. nom. masc. sg. ei{ls (DP, 50642 , cf. eiti
apophonique, le participe du verbe "aller"338. Ce verbe, qui appartient
"aller"), nom. masc. pl. f! i {l "allant" (D P, 51027 , cf. e if i
encore, en vieux lituanien, au type athématique à l'indicatif (v. lit. eimi,
"aller").
eiti), présente trois types de formes participiales :
La distribution des deux thèmes est aisément compréhensible: on trouve le
- (a) THÈME ent- : par exemple acc. masc. sg. enti.
thème *ent- partout, sauf dans les formes monosyllabiques du nominatif
- (b) THÈME ejant- : par exemple acc. masc. sg. ejanti·
masculin singulier et pluriel, où il est remplacé par le thème *ejant-. C'est
- (c) THÈME einant-: par exemple ace. masc. sg. einanti.
probablement la même distribution dont témoigne la grammaire de Klein
Le premier thème, très anomal, est probablement le plus archaïque ; le
(1653, p. 123), qui oppose un masculin éj{ls (thème *ejant-, là où la fonne
second thème ejant-, quoique relativement ancien dans les textes, a toute
risquerait d'être monosyllabique) et un féminin enti (thème *ent-, dans les
chance d'être secondaire; quant au thème einant-, qui s'est imposé dans la
formes polysyllabiques). Le thème secondaire *ejant- apparaît donc avant
langue moderne, il est rare en vieux lituanien. Chez Mafvydas (milieu du
tout comme un substitut du thème
xvt siècle), on ne trouve que quelques formes participiales du verbe eiti "aller"339. Elles appartiennent toutes au thème *ent- : - THÈME *ent- : acc. masc. sg. enti (270 10, cf. eiti "aller"), formes
préverbées : part. indéclinable inentz "entrant" (159 15, cf. ineiti "entrer"), nom. fém. sg. iIehenti "sortant" (317 15 , cf. iIcheiti "sortir"), dat. masc. pl. prientiemus "s'approchant" (499 15, cf. prieiti "s'approcher").
Dans la PostUla de Dauksa, on rencontre deux types de formes 34o :
*ent-,
substitut dont la fonction est d'éviter la réalisation de formes monosyllabiques341 . Il occupe donc la
même position que, dans le verbe "être", le thème *esant- par rapport à *sant-. On notera cependant une différence significative. Dans le participe
du verbe "être", le problème posé par les fonnes monosyllabiques avait été résolu par une extension précoce du degré plein radical (d'où *S{lS -. eS{ls) ; en revanche, dans le participe du verbe "aller", on observe non seulement une extension du degré plein radical (d'où
*0)- -. ej-), mais aussi une
réfection du vocalisme suffixal (*O)fs, cf. ace. enti -. ej{ls). Cette différence s'explique par le fait qu'une réfection *O)fS -. *ejfs aurait posé problème
- THÈME *ent- : par ex. ace. masc. sg. enti (DP, 32 6, cf. eiti
dans un système où la fmale -fS est typiquement celle du participe prétérit;
"aller"), formes préverbées : ace. masc. sg. atenti "arrivant"
on peut admettre que cette forme *ejfs a été aussitôt refaite en ej{ls, avec la fmale -{lS caractéristique du participe présent342 . Inversement, si les fonnes
(DP, 43 2 , cf. ateUi "arriver"), gén. masc. sg. atenciio
"arrivant" (DP, 328, cf. ateiti "arriver"), gén. masc. pl. fncziy "allant" (DP, 268 12, cf. ateiti "arriver"), nom. fém. sg. if nti
anciennes du thème *ent- ont pu survivre assez longtemps en vieux
"entrant" (DP, 617 2, cf. ieiti "entrer"), gén. fém. sg. ~nczios "allant" (DP, 391, cf. eiti "aller"). 338. Sur le participe du verbe "aller" en vieux lituanien, voir Specht (1930, p. 276-296), Zinkevicius (LKIG, II, p. 145-148, § 614), Schmalstieg (2000, p. 333). 339. Données chez Stang (1929, p. 157), Urbas (1998, s.u.). 340. Données chez Senn (1934-1935, p. 110-111).
341. La seule forme monosyllabique du thème *ent- est le gérondif ent, attesté par exemple dans le Catéchisme de Petkevicius (1598, 39 19), mais il s'agit à l'origine d'une forme dissyllabique (gérondif *enti). Forme mentionnée chez Kruopas (1970, p. 113 = 1998, p. 95). 342. Une évolution comparable a dû se produire en letton, où le participe du verbe "aller" est régulièrement ~juôss "allant", dérivé en synchronie de l'indicatif eju. On peut penser qu'en réalité c'est l'indicatif eju qui dérive du participe plus ancien ~juôss (cf. v. lit. ejfJs), qui pouvait être secondairement analysé comme une forme thématique.
242
Catégorie du mode
Catégorie du mode
243
lituanien, c'est parce qu'elles étaient limitées à des formes (cas obliques du
L'origine de ce thème *ent- pose plusieurs problèmes qu'on examinera
masculin, flexion du féminin) qui, précisément, ne présentaient aucun
ici brièvement. Traditionnellement, on tire *ent- d'une forme *i-ent-. Il est
risque de confusion avec le participe prétérit (où elles étaient pourvues d'un
cependant peu probable, malgré Zinkevicius (LKIG, II, p. 146), que le
suffixe -us-, par ex. gén. masc. sg. -usio, nom. fém. sg. -usi).
suffixe participial ait été de forme *-ent-. On a montré plus haut
Dans les textes plus récents, le thème anomal *ent- a tendu à s'effacer.
l'inexistence d'une telle forme aussi bien en indo-européen qu'en baltique
Dans la Knyga Nobainystes (1653), il n'apparaît plus que dans les formes
(le vieux prussien *-sent- étant le produit d'une analogie récente) : dès lors,
préverbées, où le risque de monosyllabisme était nul (par ex. acc. masc. sg.
il paraît vraisemblable de supposer que que le timbre vocalique -e- dans
atenti "arrivant", KN, 759, 75 18, 75 20) ; mais on observe déjà, dans ce texte
*ent- n'est pas ancien, mais est dû à une évolution secondaire. Si l'on part
du milieu du XVIIe siècle, que le thème *ejant- peut apparaître même là où
d'une formation régulière *y-ant-, parallèle à *s-ant-, on peut admettre que
il ne sert pas à éviter la formation d'un monosyllabe (par ex. au nom. fém.
la séquence [ya], conservée en position initiale (cf. lit. dial. jiiknos "foie"),
sg. ejémti, KN, 217 14). On rencontre également, dans ce texte, un autre
évoluait en [ye], puis en [e] en syllabe intérieure, ce qui était le cas dans
thème de constitution récente *einant- (par ex. acc. masc. sg. ateynanti
toutes les formes préverbées : ainsi, par exemple, *is-y-ant- "sortant" serait
"arrivant", KN, Ill), dont le développement est parallèle à celui de
devenu d'abord *is-y-ent-, puis *is-ent- (cf. Mazvydas, 317 15 , nom. fém.
l'indicatif thématique secondaire eïna "il va" au détriment de l'ancien
sg. ifchenti "sortant"). La forme simple ent- aurait été ensuite extraite des
athématique eïti. Au XVIIIe siècle, dans le Zywatas (1759), on ne trouve plus aucune trace du thème *ent-, remplacé de manière générale par le
formes préverbées, selon un phénomène de dépréverbation dont le baltique offre d'autres exemples346 . On a formulé plus haut l'hypothèse qu'une
thème *einant-343 ou par un autre thème secondaire eitant-344 , propre aux
évolution comparable s'était produite indépendamment en vieux prussien,
dialectes bas-lituaniens et formé sur l'indicatif thématique de constitution
où elle s'est même introduite secondairement dans le participe du verbe
e
récente eitù, eiti, eïta (sur la base de la 3 p. athématique eïti). En lituanien moderne, le participe présent du verbe "aller" (indicatif einù, eini, eïna) est
"être" (*sant- -+ *sent- d'après *y-ent- +- *-y-ant-). S'agissant de l'apophonie radicale, la forme participiale ent- du vieux
«
*y-ent- < *y-ant-) présente manifestement le vestige d'un
régulièrement emçs (gén. sg. eïnancio), fém. eïnanti (gén. sg. eïnancios),
lituanien
et il n'existe plus de trace du thème archaïque *ent-. Seuls quelques
ancien degré zéro radical, ce qui est un archaïsme de haute antiquité (i.-e.
dialectes modernes ont gardé l'ancienne forme participiale atentis
*hâ-ont-).
«
"arrivant" ;:::: lit. moderne at-eïnçs, at-eïnantis) avec un sens lexical
Dans les autres langues indo-européennes, cette formation apophonique a été diversement conservée347 . Le degré zéro radical apparaît
*hJi-ont-)
secondaire ("futur, suivant, autre")345.
encore clairement en védique (yant-, nom. sg. yan "allant" < i.-e.
343. Cf. Ziwatas : par ex. eynanti (9723), ateynanéius "arrivant" (121I9, 14926, 2495, 282 17 ), acc. fém. sg. yIzeyn(lty "sortant" (115 4 ), Données chez Girdenis & Girdenienë (1997, p. 77, 120 et 149). 344. Cf. Ziwatas : ace. masc. s~. eytanti (222z), eyt(lnti (27528), ace. masc. pl. eyt(lnéius (245 13 ), aec. masc. pl. yJzeytanéius "sortant" (23 7). 345. Fraenkel (LEW, 1, p. 119), Zinkevicius (LKIG, II, p. 147).
346. Voir quelques exemples de "dépréverbation" en baltique et en slave chez Vaillant (1946, p. 5-45). 347. Un correspondant slave pourrait exister, selon Vaillant (GCLS/., II/l, p. 196), dans le v. sI. 3alA.Uh / zaj~cb "lièvre, À.ayws", analysé comme *za-jint"celui qui passe devant" (participe ancien de *za-iti). Vaillant suggère que le lièvre était tenu pour un animal de mauvaise augure quand il croisait la route. Douteux.
244
Catégorie du mode
et en grec (gr. lwv "allant", myc. i-jo-te
*16VTES' )348.
245
Catégorie du mode
Les faits latins sont
finoti "savoir". Par sa fonction, l'infinitif est en lituanien
curieux: le thème du nom. sg. iëns "allant" présente une forme archaïque
essentiellement un nom verbal complétif, par ex. lit. nariu
du radical (lat. i- < degré zéro *h1i-), mais une forme régularisée du suffIXe
wilgyti "je veux manger", malonù miegoti "il est agréable de
(lat. -ëns comme dansferëns, etc. < *-pt-) ; à l'inverse, le thème des cas
dormir".
obliques eunt- "allant" (gén. sg. euntis) présente une forme archaïque du
- le SUPIN (lit. siekinys "mot prospectif'
+-
siekti "atteindre"), à
suffixe (lat. -unt- < *-ont-), mais son radical a un degré plein secondaire
morphème -ty (réfléchi -t{t-s) : lit. bût{t "être", elt{t "aller",
(lat. e- < degré plein *h1ei-)349. La forme ent- du vieux lituanien présente,
duot{t "donner" (duot{t-s "se donner"), :linot{t "savoir". Le
quant à elle, une structure remarquablement archaïque, mais elle est
supin lituanien est un nom verbal à valeur de but employé
anomale, en synchronie, et vouée, en définitive, à disparaître. D'une
après les verbes de mouvement, par ex. lit. dia!. einù wi/gyty
manière générale, les vestiges d'apophonie radicale dans les formes
"je vais .manger". La langue moderne a tendance à le
participiales sont limités à deux verbes par ailleurs très archaïques ("être",
remplacer par l'infmitif, par ex. lit. einù wilgyti "je vais
"aller") et ont vite tendu à disparaître au profit de formes régularisées.
manger". -l'ADVERBE DÉVERBAL (lit. büdinys "mot de manière"
IV. INFINITIF ET SUPIN
+-
blidas
"manière"), à morphème -te (pas de forme réfléchie): lit. eitè
Les formations d'infinitif sont diverses dans les langues baltiques;
"aller", duotè "donner", finate "savoir". En lituanien, le
encore à date historique, plusieurs morphèmes entrent en concurrence dans
büdinys est un nom verbal à valeur adverbiale exprimant
les fonctions qui correspondent à ce que nous appelons "infmitif'350. Si le
l'intensité par rappel étymologique, par ex. lit.jis bégtè béga
letton n'a qu'une forme d'infinitif, à morphème -t, réfléchi -tiés « *-ti-),
"il court vite", littéralement: "il court à courir".
par ex. lett. bût "être", iêt "aller", duôt "donner", zinât "savoir", en
En vieux prussien, les morphèmes d'infmitif sont également divers. On peut en identifier trois 351 :
revanche, le lituanien moderne oppose trois formes proches : - l'INFINITIF proprement dit (lit. bendratis "mot commun"
- MORPHÈME -t (= infinitif lituanien -ti, letton -t) : par ex. v. pr.
beiidras "commun"), à morphème -ti (réfléchi -ti-s) : lit.
boüt / sein "être" (6x IIr Catéchisme, par ex. III, 41 16), bout
+-
bûti "être", efti "aller", duoti "donner" (duoti-s "se donner"),
(III, 105 5
;
III, 131 12) ; dei! / geben "donner" (3x
me
Catéchisme, par ex. III, 89 12), dat (III, 13 b2) ; ersinnat / erkennen "reconnaître" (III, 53 7 348. La forme grecque est issue d'une variante de type Lindeman *iyon (au lieu de *yon < *hJi-on, qui aurait dû donner une forme aberrante en grec twv). 349. Tentative d'explication chez Meillet (1905-1906, p. 354-358) : iëns < ancien féminin, euntem < ancien masculin. Analyse différente chez Sihler (1995, p. 616-617), qui tente de tirer le latin iëns de *ï-ëns, forme secondaire de *ëns « *eents < *eyents) avec réintroduction de*ï- d'après le paradigme de l'indicatif. 350. Sur les infinitifs baltiques, cf. Endzelïns (1923, p. 708-714, §§ 712717 ; 1948, p. 217, § 407 = DI, IV2, p. 586-587), Schmalstieg (2000, p. 205209). Remarques générales chez Vansévéren (2000, p. 29-30).
;
III, 1177)
;
fst / essen
"manger" (3x IIr Catéchisme, par ex. III, 41 6), ist (III, 53 12
;
III, 771). - MORPHÈME -ton, -tun (= lit. -t{t, supin) : par ex. v. pro büton / sein "être" (III, 87 1), boüton (III, 35 10), bouton (III, 6928), 351. Données chez Endzelïns (1943, p. 125-126, § 250 = DI, IV2, p. 155 ; 1944, p. 192-193, § 250). Cf. aussi Kortlandt (1990, p. 213-218).
246
Catégorie du mode
bauton (III, 105 5)
247
Catégorie du mode
daton / lassen "donner, pennettre" (III,
- SUBSTANTIFS à suffixe *-tu- : forme d'accusatif *-tu-m (supin lit.
51 16), réfléchi datunsi "se donner" (III, 65 18), maitatunsin "se
-ty, infinitifv. prussien -tun, -ton) ou de datif *-ty-ei (infinitif
nourrir" (III, 8721 ).
V.
;
- MORPHÈME -twei : par ex. v. pro datwei 1 geben "donner" (III,
33 15 ), datwei (III, 55 8)
istwe (III, 105 15 )
;
;
istwei / essen "manger" (III, 105 13),
biatwei 1 foerchten "craindre" (lOx
me
pro -twei).
Le budinys lituanien suppose, quant à lui, une formation parallèle en *-të, probablement secondaire. Une forme comme lit. bégtè peut s'interpréter en synchronie
comme
l'instrumental
(*-tën)
d'un
substantif
bég-té
Catéchisme, par ex. III, 27 10), biatwi (III, 393).
"course"353, mais une autre analyse est actuellement plus couramment
Ces trois morphèmes sont équivalents en vieux prussien ; il n'est guère possible de trouver entre eux une différence de fonction. On peut les
admise, celle qui y voit une forme archaïque d'instrumental (*-t(j)ë-) d'un thème en *-ti-, comparable à la formation en -tyâ du sanskrit354 .
rencontrer pour un même verbe, par ex. v. pro dat "donner" (III, 89 12),
Les deux formations les plus importantes (*-ti- et *-tu-) existent par
daton (111,51 16) et datwei (III, 33 15), mais seul le morphème -tun présente
ailleurs dans le lexique des langues baltiques, indépendamment du système des infinitifs355 . La formation en *-tu- est rare et n'apparaît plus produc-
une fonne réfléchie (datunsi, III, 65 18). Les différents morphèmes d'infinitif sont associés par une proximité
tive : le lituanien n'en possède plus que quelques représentants isolés et
non seulement fonctionnelle, mais aussi formelle. Ils commencent tous par
démotivés (lit. lietùs "pluie", de la famille de Iyti "pleuvoir", piëtus
une occlusive *-t- ; il en résulte qu'ils apparaissent comme des fonnations
"repas du midi", pl., de la famille du lit. dial. pyti "donner du lait", i.-e.
morphologiques parfaitement parallèles. En lituanien, par exemple, infi-
*pï- "être gras") ; le letton, lui aussi, n'en a plus qu'un petit nombre (lett.
nitif, supin et budinys sont fonnés sur un radical identique, par ex. lit. elti
liêtus "pluie", mîtus "changement", viltus "déception, tromperie")356.
~
Quant à la formation en *-ti-, elle est mieux représentée en baltique, où elle
A
eU1/-
~
eitè "aller", Zinotï
~
linot1/-
~
iin6te "savoir", etc. ; seule l'accentuation du budinys est parfois divergente352 . Il en va de même en
entretient encore des relations étroites avec le système des infinitifs. On
vieux prussien pour les divers morphèmes d'infmitif (v. pro -t, -ton, -twei),
peut ainsi rapprocher en lituanien l'infinitif mifti "mourir" et le substantif
qui n'impliquent aucune différence de formation.
mirtis, -iës "la mort" (fém.), l'infinitif minti "penser" et le substantif
D'un point de vue étymologique, les infinitifs baltiques prolongent d'anciennes formes casuelles figées de substantifs verbaux. Deux types principaux sont représentés : - SUBSTANTIFS à suffixe *-ti- : datif ou locatif *-tëi- (infinitifs lit.
-ti, lett. -t, v. pro -t) ; cette formation est probablement la plus ancienne, car elle se retrouve en slave avec la même fonction (v. sI. 6b1TH / byti "être", HTH / ifi "aller", .llaTH
/ dati "donner", 3HaTH / znati "connaître").
352. Sur l'accentuation du büdinys, cf. Otrçbski (1956, III, p. 245, § 245).
353. Analyse traditionnelle représentée par exemple par Büga (RR(B), II, p. 249-250), cf. aussi LKG (II, p. 421-424), Schmalstieg (2000, p. 216). 354. En ce sens, Girdenis (1983, p. 12) et S. Ambrazas (1993, p.46), qui s'appuient en particulier sur la coexistence, constante dans les langues baltiques, de formes en *-ti- et de formes en *-të-. Cette constatation les amène à supposer que ces deux variantes appartenaient à l'origine à un même paradigme préhistorique, ce que permet précisément l'analyse qui tire la finale *-te de l'ancien instrumental d'un substantif en *-ti-. 355. À l'origine, ces deux formations devaient être séparées par une différence de signification: voir en ce sens l'étude classique de Benveniste (1948, p. 64-112). Mais cette différence n'apparaît plus clairement en baltique. Sur les substantifs baltiques à suffixe -tis, cf. Bammesberger (1972, p. 62-66). 356. Données chez Skardzius (1943, p.333, § 189); S. Ambrazas (1993, p.49, § 56).
248
Catégorie du mode
mintis, -ies "la pensée" (fém.), l'infinitif deti "placer, poser" et le substantif detis, -ies "ponte des oeufs",
249
Catégorie du mode
etc. 357 •
Les langues baltiques présentent, aussi bien dans les formes lexicales de ces deux suffixes que dans leurs formes grammaticales (infmitifs et supins),
En indo-européen, les substantifs en *-ti- et les substantifs en *-tu-
une situation apophonique complexe. Il semble qu'il faille partir d'un
présentaient des variations apophoniques au cours de leur flexion (nom. sg.
système de nature secondaire en indo-européen, opposant des thèmes en
*CéC-ti- ou *CéC-tu-, vs. gén. sg. *CC-téj-s, *CC-téjJ-s). Dans certains
*-ti- à degré zéro radical et des thèmes en *-tu- à degré plein radical. Cette
cas, cependant, on observe une polarisation secondaire, qui a conduit à
situation apparaît encore attestée en baltique dans un ou deux cas isolés
généraliser le degré zéro dans les noms en
*-ti-,
le degré plein dans les
comme lit. lietùs, ace. liet1,!, lett. liêtus ''pluie''
«
*/ejH-tu-), en regard de
« *liH-ti-)3 58 • Cette comparaison,
noms en *-tu-. L'exemple le plus clair de cette polarisation est i.-e. *m1)-ti-
lit. Iyti, lett. lit "pleuvoir"
"pensée" (véd. matih "pensée", lit. mintis "pensée", lat. mens,-tis "esprit",
n'a aucun sens en synchronie: là où les formations en *-ti- et en *-tu-
~vEl.a, ~V11~6auvov, à.vci~1ITJcrLS'''),
il est vrai,
vs. *mén-tu-
alternent réellement, c'est-à-dire dans l'infinitif et le supin, l'apophonie
(véd. mémtuh "conseil"). Mais on observe encore un degré plein dans
radicale est systématiquement nivelée, d'où par exemple, en lituanien, un
*dehrti- "fait de donner" (gr. 6wal-, véd. -dati- "don"), à côté de *dhrti-
supin /yt1,! (qui suppose *liH-tu-), parallèle à l'infinitif lit. Iyti "pleuvoir"
(gr. BéatS'
«
got. ga-munds "souvenir,
"don"), ou encore dans *spehrti- "fait de prospérer,
*liH-ti-). D'une manière générale, la formation en *-tu- ne possède plus
d'engraisser" (véd. sphatih "engraissement"). Et, d'autre part, on a régu-
en baltique de caractéristique apophonique propre, mais dépend entièrement
lièrement un degré zéro dans i.-e. *gus-tu- "fait de goûter" (lat. gustus
de la formation en *-ti-, à laquelle elle est étroitement associée3 59 • C'est
"goût", got. ga-kusts "expérience", v. isl. kostr "choix") ou dans i.-e.
donc avant tout sur cette dernière qu'il convient de faire porter l'analyse.
*pr-tu- "passage" (v. avest.p:Jr~tu- "passage", lat. portus "port", vha. furt
Deux approches sont envisageables. Tout d'abord, la question de
"passage, gué"). En grec, où les substantifs à suffixe *-tu- sont rares, ils
l'apophonie radicale des formes de l'infinitif peut être envisagée à travers
ont, lorsqu'ils existent, un radical identique à celui de leurs correspondants
une approche étymologique et historique. En adoptant comme principe que
à suffixe *-ti-, par exemple gr. ~pwatS' "action de manger" et ~pWTUS'
la formation en *-ti- présentait à l'origine un degré zéro radical (structure
"id.".
*CC-ti-), on peut examiner le matériel baltique en distinguant:
- (a) les FORMATIONS qui conservent ce degré zéro radical: type lit. minti "penser" « i.-e. *m{1-ti-). 357. Sur cette proximité, cf. Bammesberger (1972, p. 62-66), Pohl (1976, p. 15-21), Petit (2000c, p. 125, note 9). On notera cependant que la relation entre infinitifs en *-ti et substantifs en *-ti- n'est pas systématique: voir par exemple la différence morphologique et sémantique, qui sépare en lituanien l'infinitif krauti "amonceler" et le substantif apparenté krutls "poitrine" « "couverture, enveloppe", cf. v. sI. KpbITH / kryti "couvrir, KpVrrTELV"). Autre fait significatif : les deux verbes supplétifs des langues baltiques, "être" et "aller", ont un infinitif fondé sur un seul des thèmes supplétifs, d'une part *buti (lit. bûti, lett. bût, v. pro bout) et d'autre part *eiti (lit. eiti, lett. iêt, v. pro -ëit), tandis que la formation en *-ti- peut se réaliser librement sur chacun des thèmes supplétifs, d'où d'une part *es-fi- (v. pro astin / ding "chose, action", III, 6hs, III, 7524, III, 1254) et *bü-ti- (lit. dial. bütis "existence"), d'autre part *ei-ti- (lit. ateitis "avenir") et *gii-ti- (lett. giitis "marche", pl.).
- (b) les FORMATIONS qui ont éliminé ce degré zéro radical au profit d'un degré plein *e : type lit. befti "verser, répandre"
«
apparemment *bher-ti- i- i.-e. *bh[-ti-).
358. Sur la préhistoire de cette famille, voir une tentative de reconstruction chez Karaliiinas (1991, p. 35-42). 359. Rudzïte (1983, p. 148) signale que, dans certains dialectes latgaliens, le thème du supin présente régulièrement les vestiges d'un degré flein radical, alors que l'infinitif a un degré zéro: par ex. latgal. supin cârptu « *cirptu), mais inf. éierpt,2 "couper" « *cirpt). Cf aussi Schmalstieg (2000, p. 209-210). Il s'agit probablement d'un archaïsme isolé.
250
Catégorie du mode
Catégorie du mode
251
e
- (c) les FORMATIONS qui ont éliminé ce degré zéro radical au
gyven-a "il vit", ind. prét. 3 p. gyvën-o "il vécut", inf.
profit d'un degré plein
gyvén-ti "vivre" [gyven-], etc.
«
apparemment *bhorH-ti-
*
*0
:
type lit. barti "quereller"
i.-e. *bhrH-ti-).
Une seconde catégorie est constituée par les verbes qui présentent des
- (d) les FORMATIONS dont le degré radical est indéterminé ou
thèmes différents à l'indicatif et à l'infinitif, mais sans divergence
demeure inanalysable: type lit. pùlti "tomber, attaquer".
apophonique. En général, l'un des thèmes est caractérisé par la présence
- (e) les FORMATIONS dont le degré radical est déterminé par une
d'un suffixe ou d'un infixe qui fait défaut ailleurs. On peut distinguer trois
forme de fondation externe : formations suffixées du type lit.
sous-types :
sapnuoti "rêver" (: sâpnas ''rêve''), juokauti "plaisanter" (: juokas
"plaisanterie"), galvoti "penser" (: galvà "tête"), seneti "vieillir" (: senas "vieux"), etc.
- (a) un SOUS-TYPE dans lequel une divergence morphologique non apophonique sépare l'indicatif présent de l'indicatif prétérit et de l'infinitif.
Mais cette approche négligerait, à mon sens, un facteur important dans
• Exemples: ind. prés. 3e p. lifhp-a "il colle" [limp-] ~ ind.
la synchronie des langues baltiques, à savoir le rapport de l'infmitif avec la
prét. 3e p. lip-o "il colla", inf. /ip-fi "coller" [lip-] ; lit. ind.
formation de l'indicatif présent ou prétérit. Ici encore, on peut distinguer
prés. 3e p. /ii1kst-a "il se penche" [linkst-] ~ ind. prét. 3 p.
plusieurs cas. On a, tout d'abord, un grand nombre de verbes dont le thème
1ii1k-o "il se pencha", inf. 1ii1k-ti "se pencher" [link-].
e
ne varie pas entre l'indicatif et l'infmitif. Ces verbes peuvent être simples
- (b) un SOUS-TYPE dans lequel une divergence morphologique non
(c'est-à-dire pourvus d'un thème monosyllabique) ou complexes (pourvus
apophonique sépare l'infinitif de l'indicatif présent et de
d'un thème polysyllabique). Voici quelques exemples lituaniens de cette
l'indicatif prétérit.
catégorie:
• Exemple: ind. prés. 3 p. sâk-o "il dit", ind. prét. 3 p.
-
e
sâk-é "il dit" [sak-] ~ inf. salo/-li "dire" [saky-].
THÈME IDENTIQUE sans apophonie < indicatif / infinitif> : e
• verbes simples, par ex. lit. ind. prés. 3 p. sùk-a "il tourne", ind. e
prét. 3 p. sùk-o "il tourna", inf. sùk-ti "tourner" [suk-] ; ind. e
" "1'1 court". '3 p. b"eg-o "'1 ,md. pret. 1 courut" , prés. 3e p. b eg-a
inf. beg-ti "courir" [bëg-] ; ind. prés. 3
e
e
p. bâr-a "il
- (c) un SOUS-TYPE dans lequel une divergence morphologique sépare chacun des trois thèmes. • Exemple: ind. prés. 3e p. eïn-a "il va" [ein-] ~ ind. prét. 3e p. éj-o "il alla" [ëj-] ~ inf. eï-ti "aller" lei-Jo
querelle", ind. prét. 3e p. bâr-é "il querella", inf. bar-ti
Enfrn, une dernière catégorie, la seule qui nous concerne ici, est celle
"quereller" [bar-] ; ind. prés. 3e p. sok-a "il saute, danse",
des verbes qui présentent une variation apophonique de leur radical entre
ind. prét. 3e p. sok-o "il sauta, dansa", inf. sok-ti "sauter,
l'infrnitif et l'indicatif. Dans la majorité des cas, le contraste apophonique
danser" [sok-], etc.
sépare l'indicatif présent de l'infinitif et de l'indicatif prétérit. Dans cette e
• verbes complexes, par ex. lit. ind. prés. 3 p. mokin-a "il instruit, éduque", ind. prét. 3e p. mokin-o "il instruisit, éduqua", inf. mokin-ti "instruire, éduquer" [mokin-] ; ind. prés. 3
e
catégorie, le lituanien, qui fournit les données les plus riches, distingue au moins cinq types d'apophonie 36o
:
p. 360. Données dans LG (1997, p. 287-290). Nombreux exemples du type (a) chez Venckutë (1983, p. 126).
252
Catégorie du mode
- (a) APOPHONIE < i / e > : inf. pifkti "acheter", ind. prét. 3e p.
pifko "il acheta" [pirk-]
~
e
e
- (g) APOPHONIE < i / é >: inf. Un-ti "prendre", ind. prés. 3 p.
ind. prés. 3e p. perka "il achète"
[perk-] ; inf. vilkti "tirer", ind. prét. 3 e p. vilko "il tira" [vilk-] ~ ind. prés. 3 p.
253
Catégorie du mode
ve[ka "il tire" [velk-] ; inf. kiihsti "farcir",
e
ind. prét. 3 p. kiihso "il farcit" [kims-] ~ ind. prés. 3e p.
keihsa "il farcit" [kems-] ; inf. riiikti "rassembler, choisir",
im-a "il prend" [im-] ~ ind. prét. 3e p. ém-é "il prit" [ém-]. Plus rarement se rencontrent des structures dans lesquelles l'infinitif se sépare à la fois de l'indicatif présent et de l'indicatif prétérit, par exemple:
- (h) APOPHONIE < u / uo > : inf. pùlti "tomber, attaquer" [pul-] e
~ ind. prés. 3 p.
e
ind. prét. 3 p. rinko "il rassembla, choisit" [rink-] ~ ind.
puole "il tomba, attaqua" [puol-].
e
prés. 3 p. reiika "il rassemble, choisit" [renk-] ; inf. minti e
"penser", ind. prét. 3 p. mine "il pensa" [min-] ~ ind. prés.
e
puola "il tombe, attaque", ind. prét. 3 p.
-
(i) APOPHONIE < ü / uv > : inf. siûti "coudre" [siü-] ~ ind. prés. e
e
e
3 p. siùva "il coud", ind. prét. 3 p. siùvo "il cousit"
e
[siuv-],
3 p. mena "il pense" [men-] ; inf. virti "cuire", ind. prét. 3 p. vire "il cuisit" [vir-] ~ ind. prés. 3e p. vérda "il cuit"
ou des structures dans lequelles chacun des trois thèmes est distingué par
[verd-]. - (b) APOPHONIE < i / ie > : inf. likti "laisser, rester", ind. prét. e
3 p. liko "il laissa, resta" [lik-] ~ ind. prés. 3e p. /ieka "il
son apophonie radicale, ce qui est le cas dans le type suivant: - (j) APOPHONIE < y / i(j) / e > : inf. vyti "chasser, poursuivre" e
laisse, reste" [liek-].
[vy-] ::::: ind. prét. 3 p. vijo "il chassa, poursuivit" [vij-]
- (c) APOPHONIE < é / e > : inf. lékti "voler", ind. prét. 3e p. lé/œ
e
~ ind. prés. 3 p.
veja "il chasse, poursuit" [vej-].
e
"il vola" [lék-] ~ ind. présent 3 p. /ekia "il vole" [lek-] ; inf.
slépti "cacher", ind. prét. 3e p. slépe "il cacha" [slép-] ~ ind. e
prés. 3 p. slepia "il cache" [slep-].
En règle générale, en lituanien, les types apophoniques attestés sont d'une grande stabilité. Cependant, une tendance existe, ou a existé, à éliminer l'apophonie radicale et à imposer dans les trois formes fondamentales
- (d) APOPHONIE < 0 / a > : inf. vogti "voler, dérober", ind. prét. e
e
3 p. voge "il vola, déroba" [vog-] ~ ind. prés. 3 p. vagia "il vole, déroben [vag-].
le même degré vocalique. Le dialecte lituanien de Zietela (Biélorussie), par exemple, dit régulièrement pifka "il achète" au lieu de pefka (d'après pifkti,
pino), gima "il naît" au lieu de gema (d'après gimti, gime), lika "il laisse"
- (e) APOPHONIE < il / u > : inf. tupti "se poser, atterrir", ind. prét. e
e
3 p. tupe "il se posa, atterrit" [tüp-] ~ ind. prés. 3 p. tùpia "il se pose, atterrit" [tup-].
au lieu de /ieka (d'après likti, liko), vira "il bout" au lieu de vérda (d'après
virti, vire), vogia "il vole" au lieu de vagia (d'après vogti, voge)361. Dans le dialecte haut-lituanien occidental de Vilkaviskis, le verbe mUiti ''traire'' a
Un autre type est celui dans lequel l'indicatif prétérit se distingue de
un paradigme unifié sur la base du degré zéro (ind. prés. mi/Zia, ind. prét.
l'infinitif et de l'indicatif présent :
mUio), tandis que la langue littéraire présente ou bien une apophonie
- (f) APOPHONIE < i / Y >: ind. prés. 3 p. gin-a "il défend,
radicale (inf. mi/iti, ind. prés. mélZia, ind. prét. mi/io), ou bien un
repousse", inf. gin-ti "défendre, repousser" [gin-] ~ ind. prét.
paradigme unifié sur la base du degré plein (inf. méliti, ind. prés. mélZia,
3 e p. gyn-é "il défendit, repoussa" [gyn-].
ind. prét. mélié). Dans quelques dialectes distincts du domaine haut-
e
361. Zinkevicius (1966, p. 338, § 597).
254
Catégorie du mode
Catégorie du mode
lituanien (Sakyna, Dauksiai, Birzai), on dit tupti "se poser", ind. prés.
tupia, ind. prét. tùpe, là où la langue standard oppose encore inf. tupti,
255 e
inf. likt "mettre, poser", ind. prét. 3 p. lika "il mit, posa" e
[lik-] ~ ind. prés. 3 p. liek "il met, pose" [liek-].
ind. prés. tùpia, ind. prét. tupe. Ces tentatives de nivellement analogique
- TYPE (c), apophonie radicale attestée en lituanien et en letton: lit.
sont cependant restées marginales, et l'on observe même à l'inverse que
inf. lèkti "voler", ind. prét. 3e p. lèke "il vola" [lëk-] ~ ind.
certains dialectes présentent des formes apophoniques là où la langue
prés. 3 p. Iekia "il vole" [lek-] = lett. inf. lèkt "voler", ind.
standard n'en a pas : en regard de l'indicatif présent non apophonique du
prét. 3 p. lèca "il vola" [lèk- /lèc- < lëk-] ~ ind. prés. 3 e p.
lituanien littéraire pi/a "il verse" (inf. pi/ti "verser", ind. prét. pYM),
Ife "il vole" [lek-].
quelques dialectes bas-lituaniens (Laukuva et Karklënai) ont pela, cf. aussi
skena à Pagramantis et Karklënai au lieu de skina (inf. skinti "cueillir"), trena à Pagramantis au lieu de trina (inf. trinti "frotter"),
etc. 362 •
e
e
- TYPE (d) : lit. inf. vogti "voler, dérober" (prés. viigia, prét. voge);
pas d'exemple en letton. - TYPE (e) : lit. inf. tupti "se poser, atterrir" (prés. tùpia, prét.
Les autres langues baltiques offrent un tableau comparable, quoique
tupe) ; pas d'exemple en letton.
sensiblement moins archaïque. Le letton concorde en général régulièrement
- TYPE (t), apophonie radicale attestée en lituanien, mais pas en
avec le lituanien dans la définition des types apophoniques, mais quelques
letton: lit. ind. prés. 3 p. min-a "il foule", inf. min-ti
alternances semblent avoir été éliminées. On peut mettre en parallèle:
"fouler" [min-] ~ ind. prét. 3 p. m yn- e "il foula" [myn-] e
- TYPE (a), apophonie radicale attestée en lituanien et en letton: lit. e
inf. pirkti "acheter", ind. prét. 3 p. pino "il acheta" [pirk-] e
e
*- lett. ind. prés. 3e p. min "il foule", inf. m'it "fouler",
ind.
e
prét. 3 p. mina "il foula" [min- / mï- < min-].
perka "il achète" [perk-] = lett. inf. pirkt
- TYPE (g), apophonie radicale attestée en lituanien, et différemment
"acheter", ind. prét. 3e p. pirka "il acheta" [pirk-] ~ ind. prés.
en letton : lit. inf. iin-ti "prendre", ind. prés. 3e p. im-a "il
~ ind. prés. 3 p. e
3 p. pirk "il achète" [perk-] ; lit. inf. ginti "chasser", ind. e
e
prét. 3 p. gine "il chassa" [gin-] ~ ind. prés. 3 p. gena "il chasse" [gen-]
= lett. inf. dz'it "chasser", ind. prét. 3e
p. dzina
e
"il chassa" [dzï- / dzin- < gin-] ~ ind. prés. 3 p. dz~n "il e
e
prend" [im-] ~ ind. prét. 3 p. 6m-e "il prit" [ëm-]
*- lett. inf.
e
vernt "prendre", ind. prés. 3 p. v~m "il prend" [pem-], ind. e
prét. 3 p. Vfma "il prit" [pëm-]. - TYPE (h), apophonie radicale attestée en lituanien, traces diver-
chasse" [dzen- < gen-] ; lit. inf. virti "cuire", ind. prét. 3 p.
gentes en letton : lit. inf. pùlti "tomber, attaquer" [pul-]
vire "il cuisit" [vir-] ~ ind. prés. 3e p. vérda "il cuit" [verd-]
~ ind. prés. 3 p. puola "il tombe, attaque", ind. prét. 3e p.
= lett. inf. vift "cuire", ind. prét. 3e p. vira "il cuisit" [vir-]
puole "il tomba, attaqua" [puol-] ± v. lett. inf. pult
e
e
vefd"il cuit" [verd-].
"tomber-", ind. prét. 3 p. pul "il tomba" [pul-] ~ ind. prés.
- TYPE (b), apophonie radicale attestée en lituanien et en letton : lit.
3 p. puai "il tombe" [puol-], cf. Mülenbachs-Endzelms, ME
e
~ ind. prés. 3 p.
e
e
inf. likti "laisser, rester", ind. prét. 3 p. liko "il laissa, resta" [lik-] ~ ind. prés. 3e p. /ieka "il laisse, reste" [liek-] = lett.
(III, p. 409). - TYPE (i), apophonie radicale attestée en lituanien, modifiée en
letton: lit. inf. siûti "coudre" [siü-] ~ ind. prés. 3e p. siùva e
"il coud", ind. prét. 3 p. siùvo "il cousit" [siuv-] ± lett. inf. 362. Zinkevicius (1966, p. 339, § 597).
Catégorie du mode
256
Catégorie du mode
257
e
sût "coudre" [sü- < siü-] ::::: ind. prés. 3 p. suj "il coud", ind.
et le letton ont, au prétérit, un radical au degré zéro, cf. lit. gime "il
prét. 3e p. suva "il cousit" [suj- / suv- < siuj- / siuv-].
naquit" (participe gimr;s "né"), lett. dzima "il naquit" (participe dzimis
- TYPE U), apophonie radicale attestée en lituanien, modifiée en
"né"). Le vieux prussien semble donc avoir étendu le vocalisme plein de
letton : lit. inf. vyti "1. chasser, poursuivre, 2. tresser" [vy-]
l'indicatifprésent à l'indicatif prétérit et à l' infinitif. Toutefois, il n'a pas
::::: ind. prét. 3e p. vijo "1. il chassa, poursuivit, 2. il tressa"
totalement éliminé les traces du degré zéro radical ancien. Elles subsistent
[vij-]::::: ind. prés. 3e p. vëja "1. il chasse, poursuit, 2. il
encore dans des vestiges du participe prétérit actif,
tresse" [vej-]
=1-
V.
pro ainangimmusin
e
lett. inf. vît "tresser" [vï-] ::::: ind. prét. 3 p.
/ eingebornen "née seule" (III, 113 24), et du participe prétérit passif,
V.
pro
vija "il tressa", ind. prés. 3e p. vij "il tresse" [vij-].
naunagimton / newgeboren "revenu à la naissance, né une seconde fois"
Les données du vieux prussien sont fragmentaires et peu utilisables, à
(III, 11526), ainsi que dans quelques dérivés comme naunangimsenin / der
la fois en raison des limitations du corpus et des nombreux problèmes
newen geburt "la nouvelle naissance" (III, 63 2), ëmtersgimsennien
philologiques qui y sont associés. On peut néanmoins retrouver quelques
/ widergeburt "renaissance" (III, 63 4- 5), etgimsannien /
éléments d'un système qui a dû être comparable à celui du lituanien et du
"renaissance" (III, 11722), qui paraissent fondés sur l'ancien infinitif
letton.
*gim-tvei (comme bousennis / standt "état" sur l'infinitif boût "être"), ou
widergeburt
Du type (a), illustré par le lituanien pifkti "acheter" (ind. prés. pefka,
les dérivés përgimmans / Creaturen "créatures", acc. masc. pl. (III, 41 3),
prét. pifko), le vieux prussien offre quelques traces confuses, dans
prëigimnis / art "façon" (III, 115 21 ), përgimnis / natur "nature" (III, 115 22).
lesquelles on observe une forte tendance au nivellement apophonique.
On peut donc supposer que le vieux prussien a possédé à l'origine un
L'infinitif v. pro gemton / geberen "engendrer" (III, 105 4) présente appa-
paradigme comparable à celui du lituanien, inf. *gim-tvei (lit. gimti), ind.
remment un degré *e radical [gem-], qui l'oppose au lituanien gimti et au
prét. *gim- (lit. gim-e), vs. ind. prés. *gem-a- (lit. gëma). Ce paradigme
letton dzimt "naître", pourvus d'un degré zéro radical [gim-]. Ce degré
aurait ultérieurement tendu à généraliser le degré plein radical propre à
vocalique plein à l'infinitif doit provenir d'une influence de l'indicatif
l'indicatif présent ; cette tendance aurait pu être favorisée, en particulier, par
présent *gem-a (cf. lit. gema,
lett. dzjm)363. La même influence s'est
le rapprochement du participe prétérit actif et du participe présent actif
exercée sur l'indicatif prétérit, où le vieux prussien a régulièrement un
(comme le montre par exemple la confusion des deux formes dans
V.
e
5x IIIx 3
gemmans, III, 129 16). Il est intéressant de noter que le nivellement
Catéchisme, par ex. III, 4lz3), avec variante gemmans (III, 129 16),
apophonique s'est fait de manière inverse en vieux prussien et dans le
engemmons / angeborn "inné" (III, 121 4 ), naunagemmans / widergeborn
dialecte lituanien de Zietela : en vieux prussien, c'est le thème fort de
"revenu à la naissance, né une seconde fois" (III, 13 h8_19)364
l'indicatif présent, de type [gem-], qui s'est généralisé (d'où par ex. un
participe actif gemmons / geborn "né" (1,7 14- 15
;
II, 714
;
:
le lituanien
infmitif gemton d'après l'indicatif présent *gema), tandis qu'à Zietela c'est 363. Autre analyse chez Toporov (PrJ, II, p. 205), qui voit dans le vocalisme *e la marque de la diathèse causative et compare le couple pro gemton "engendrer" / lit. gimti "naître" au couple lit. lenkti "courber" / lifikti "se courber". 364. La forme *-geminton dans ainangeminton / eingebornen "inné" (III, 1277-8) doit vraisemblablement s'interpréter comme l' aboutissement phon~ tique d'une forme *gaminta-, participe prétérit passif d'un verbe causatif
au contraire le thème faible de l'infinitif et de l'indicatif prétérit, de type *gamin-tvei "créer, engendrer" (::::: lit. gaminti "engendrer, fabriquer"), avec degré vocalique *a caractéristique du causatif. Voir Maiiulis (PKEt, 1, p. 52). Pour l'évolution phonétique, cf. v. pro pobrendints / beschweret "alourdi" (III, 69 19_20) +- *-brandinta- (causatif, cf. pobrandisnan / beschwerung "alourdissement", III, 73 1).
Catégorie du mode
Catégorie du mode
[gim-], qui s'est étendu à l'indicatif présent (d'où un indicatif présent gima
le v. prussien limtwei "briser", reconstruire un schéma apophonique ancien
d'après l'infmitif gimti).
opposant un infinitif *lim-twei, un indicatif prétérit *lim-a-, et un indicatif
258
259
Dans la famille du verbe limtwei "briser"365, le vieux prussien atteste
présent */em-a : ce schéma serait parallèle à celui qui est attesté dans le
majoritairement des formes à degré zéro radical [100-], d'une part l'infinitif
type lit. gimti "naître", ind. prét. gim-é, vs. ind. prés. gema. On observe,
limtwei / brechen "briser" (III, 31 17), limtwey (II, 517), d'autre part
en l'occurrence, que cet ancien schéma apophonique n'a pas survécu en
l'indicatif prétérit 3 e p. lïmauts / brachs "il brisa" (III, 75 3), limatz (l, 13 6),
baltique oriental. Le lituanien a visiblement réinterprété le contraste apo-
lymuczt (II, 13 6). Mais on rencontre aussi quelques formes à degré plein
phonique < degré zéro / degré plein> en termes d'opposition de diathèse:
radical [lem-l, un infmitif lembtwey / brechen (I, 517) et un conditionnel
le degré zéro a formé, en lituanien dialectal, un verbe intransitif limti "se
e
3 p. lemlai (III, 51 14). Apparemment, les données invitent à identifier deux
pencher" (sens premier: "se briser"), dont l'indicatif présent est régu-
ou trois degrés vocaliques, [lim-] dans l'infmitif limtwei, avec peut-être
lièrement limsta (au lieu de *lem-a, comme on a gimsta au lieu de l'ancien
[lïm-] dans l'indicatif prétérit llmauts (pour *lïma-ts), et [lem-] dans
géma) en regard d'un indicatif prétérit limo, tandis que le degré plein a
l'infinitif lembtwey et le conditionnel lemlai. La distribution de ces
formé un verbe transitif, sémantiquement divergent, lémti "prédestiner"
différents degrés vocaliques pose un problème. On peut, dans un premier
(sens premier : "briser, morceler" > "partager, distribuer, donner en
rr
Catéchisme
partage"), dont le paradigme s'est conformé à un modèle productif (ind.
(lembtwey, l, 5 17) résulte d'un flottement textuel ou d'une évolution phonétique propre à ce texte366 et qu'elle recouvre en réalité une forme
prés. lemia, prét. temé, comme remti "appuyer", ind. prés. rémia, prét.
*limtwei, identique à celle des deux autres Catéchismes. Mais, en dépit de
L'exemple est intéressant en ce qu'il montre comment une apophonie
Palmaitis (1995, p. 101), cette possibilité paraît exclue pour la forme de
paradigmatique < im / em > du type gimti, vs. géma "naître" est passée à
temps, être tenté de penser que la graphie / lem / dans le
conditionnel lemlai dans le
me
rèmé, en regard de rimti "s'appuyer", ind. prés. rimsta, prét. rimo)367.
Catéchisme (III, 51 14), où l'on doit
une apophonie diathétique < im / em > du type rimti "s'appuyer", vs.
supposer l'existence réelle d'un degré plein radical [lem-]. Les condi-
remti "appuyer". Un problème reste posé, celui de la forme de l'indicatif
tionnels en -lai étant régulièrement fondés sur le thème de l'infinitif, on est
prétérit en vieux prussien: le macron dans lïmauts (III, 75 3) paraît supposer
amené à penser que le radical au degré plein [lem-] provient d'un infinitif
une voyelle longue *ï, qui pourrait provenir de l'allongement secondaire
secondaire *lemtwei (qu'on pourrait alors retrouver dans la forme lembtwey,
d'un ancien degré zéro [lïm-], ou, selon Van Wijk (1918, p. 43) et
en l, 517) et que celui-ci le doit à l'influence d'un ancien indicatif présent
Palmaitis (1995, p. 102), d'un ancien degré plein de quantité longue [lem-]
*/ema. Le cas serait parallèle à celui de l'infinitif gemton "engendrer" (llI,
>
105 4), dont le radical atteste un degré plein [gem-] probablement sous
geables:
l'influence d'un indicatif présent apophonique *gem-a. On peut donc, pour 365. Sur le verbe v. pro limtwei, cf. van Wijk (1918, p.43), Stang (l9~~, p. 200), Maziulis (PKE1, III, p. 62-63), Toporov (PrJ, V, p. 255-262), PalmaltIS (1995, p. 101-102). Cf. aussi Trautmann (BSW, p. 162), Fraenkel (LEW, 1, p. 354355 et 373), Karaliünas (1987, p. 179-180). 366. Voir par exemple dessempts "dix" (1, 51), vs. dessimpts "dix" (II, 57), dessimton (III, 27 1) < *desimts (cf. lit. dëiimt "dix").
V.
pr. [lïm-]. Deux schémas apophoniques paraissent donc envisa-
- d'une part, inf. [im], ind. prét. [ïm], ind. prés. rem] : schéma peu plausible, car, là un allongement de la voyelle radicale se rencontre au prétérit (type lit. minti "fouler aux pieds,
367. Sur ce modèle, cf. Petit (1999a, p. 85 sq.). Liste d'exemples chez Venckutè (1983, p. 127).
260
Catégorie du mode
Catégorie du mode
261
marcher sur", ind. prét. myné), l'indicatif présent est non-
pourrait imaginer que le prussien a possédé deux verbes, d'une part un
apophonique (m in a), et, là où l'indicatif présent est
verbe radical *lim-twei (type lit. svirti "peser", pra-bi/ti "prendre la
apophonique (type lit. miiiti "penser", ind. prés. mena),
parole"), qui opposait un infmitif *lim-twei et un indicatif présent *lem-a,
l'indicatif prétérit est sans allongement (miné). Un paradigme
et d'autre part un verbe intensif suffixé à degré radical allongé *lïma-twei
hybride, inf. */im-, ind. prét. *tïm-, ind. prés. *lem-,
(type lit. svyroti ''peser de tout son poids", byl6ti "parler"), dont provient
n'apparaît guère vraisemblable, au moins en première
l'indicatif prétérit *llm-aO-a). Dans cette analyse, l'indicatif prétérit lima
approche ; il a peut-être existé dans la préhistoire baltique,
(dans lïmauts) n'interviendrait pas dans le paradigme du verbe radical
mais a peu de chances de s'être prolongé jusqu'en prussien.
limtwei et ne poserait donc aucun problème à la restitution de son
- d'autre part, inf. [im], ind. prét. [ëm], ind. prés. [em] : schéma lui
apophonie paradigmatique. La seule solution alternative serait d'admettre
aussi peu plausible, car, là s'observe un tel allongement du
une faute ponctuelle dans la graphie à macron du prétérit lïmauts et de lire
prétérit (type lit. ind. prés. lemia "il prédestine", ind. prét.
*limauts « invérifiable.
lemé), l'infinitif est non apophonique (lémti), et, là où l'infinitif est apophonique dans son rapport avec l'indicatif
*lima)
; solution possible, peut-être même préférable, mais
D'autres exemples du premier type apophonique
«
i / e >, type lit.
présent (type lit. miiiti "penser", ind. prés. mena), l'indicatif
pifkti, pefka) pourraient survivre de manière résiduelle en vieux prussien,
prétérit est fondé sur le même thème (miné). Un paradigme
mais leur analyse n'est pas assurée. Dans le verbe etwiërpt / vergeben
hybride, inf. *lim-, ind. prét. *lëm-, ind. prés. *lem-, n'est
"pardonner", l'ensemble des formes présente un degré *e radical:
donc lui non plus pas vraisemblable.
- [werp-] : v. pr. inf. etwiërpt / vergeben "pardonner" (III, 55 1I ),
Pour résoudre la difficulté, Trautmann (1910, p. 290) a proposé d'inter-
etwïerpt (III, 81 14), etpwërpt (III, 1176), inf. powiërpt
préter l'indicatif prétérit *llma (dans limauts) < *lïma comme le reflet d'un
/lassen "quitter" (III, 107 17); part. prét. actif etwiërpons
verbe suffixé *lïma-twei, qui aurait avec limtwei le même rapport qu'en
/ vergeben "qui a pardonné" (III, 129 18- 19), powiërpuns
lituanien svyroti "pes,er de tout son poids, être suspendu" avec svirti
/ verlassen "qui a quitté" (III, 10 h2), part. prét. passif
"peser". Cette suggestion n'est a priori pas impossible: la finale du
etwierpton / vergeben "pardonné" (III, 65 13), ind. prés. 1re sg.
prétérit *lïma pourrait en effet être issue de *-aj-a (cf. type lit. inf. -oti,
etwerpe / vergebe "je pardonne" (III, 71J8), 3e p. etwiërpei
ind. prét. -ojo), avec une contraction de *-aj-a en *-a- comparable à celle
/ vergibt "il pardonne" (III, 45 31 ), 1re pl. atwerpimay
qu'on pourrait observer dans le prétérit billa / sprach "il parla" (III, 10h,
/ verlassen "nous pardonnons" (l, 1 h-4), etwerpymay (II,
III, 101 17 , III, 1051, III, 105 6), billats (111,75 4 , III, 75 9 , III, 10525-26, III,
11 4 ), etwërpimai (III, 53 21 ); impér. atwerpeis / verlaft
113 2, etc.), en regard du lituanien byl6jo (inf. byl6ti ''parler'')368. On
"pardonne !" (l, 1h), etwerpeis (II, 1h), etwerpeis (III, 53 20), e
368. Sur ce type, cf. Endzelïns (1943, p. 116-118, § 240 = DI, N2, p. 1~4 146 ; 1944, p. 178-180, § 240). On notera cependant un fait qui pourrait fane douter de cette analyse : la géminée constante dans le prétérit billa suggère une voyelle [il brève, différente donc du type lit. byl6ti, et qui fait penser plutôt à une forme comparable au prétérit lit. (pra-)bilo de pra-bilti "prendre la parole" (indicatif présent à infixe nasal pra-byla < *pra-b{la < *pra-binla).
impér. 2 pl. powiërptei / lasset "laissez" (III, 95 22). Également dans les dérivés : etwerpsannan / vorgebung "pardon" (l, 99), attwerpsannan (l, 15 1), etwerpsennian (II,
262
Catégorie du mode
99 , III, 45 5, etc.), aussi etwerpsnii / vergebung "pardon" (4x
me Catéchisme, par ex. III, 75 19). Toutefois, on a quelques traces d'un degré zéro dans des dérivés: - [wirp-] : v. pro
auwirpis / flutrinne "gouttière" (E 320),
crauyawirps / loser "saignée" (E 551), gruntpowïrpingin / grundlose "sans fond" (III, 109 11 - 12), et surtout dans powïrps / frey "homme libre" (III, 95 18), allemand de Prusse Powirpen, Pawirpen "Tagelôhner, Freimanner, travailleur . '" . saiane
263
Catégorie du mode
Le type apophonique (b), celui du lit. likti "laisser, rester" (ind. prés. /ieka, prét. liko), est mal attesté en vieux prussien. On trouve un degré radical *a dans l'infinitif poliiikt / bleiben "rester" (III, 115 5), ainsi que dans le dérivé auliiikings / messig "mesuré, retenu" (III, 872 )372. Il existe également, sur le même radical, un présent à infixe nasal po/ïnka "bleibet" (III, 97 12), polijnku (III, 376), qui se retrouve dialectalement en lituanien (lit. dia!. linka). En apparence, ce type apophonique (b) s'apparente, en lituanien, au type (a), dans la mesure où il se fonde sur l'opposition d'un degré plein à l'indicatif présent (lit. pefka et lièka) et d'un degré zéro à l'infinitif et à l'indicatif prétérit (lit. pifkti, pifko et likti, liko). Mais,
Il n'est pas sûr que ce degré zéro soit le reflet d'une ancienne apophonie verbale du type lit. piF/cti, pefka. Rien n'interdit de penser qu'il est propre à la dérivation et par conséquent étranger à l'opposition des formes modales ou temporelles. Un cas tout aussi incertain369 est celui du v. pro guntwei / treiben "chasser" (III, 875), gunnimai (III, 292), cf. anthroponymes Gynne-both, Gin-thawte, Gyn-thaute, Tawte-gynne3 70 , dans lesquels on reconnaît un degré zéro radical [gun-], en regard de genix / specht "pic" (E 742), cf. aytegenis / kleinespecht "pivert" (E 745), qui présente un degré plein radical [gen-]. On ne saurait se baser sur ces données pour afIrrmer que le vieux prussien conservait à date ancienne une apophonie comparable à celle du lit. inf. ginti "chasser", aveC degré zéro [gin-], vs. ind. prés. gèna, avec degré plein [gen-], cf. aussi lett. inf. dz'lt, vs. ind. prés. dzçn3 71 • Le rapprochement du nom d'oiseau genix (qui dispose d'un correspondant en lituanien genjJs et en letton dzenis "pic, pivert") et de la famille du verbe guntwei (cf. lit. ginti "chasser", lit. dia!. gùndyti, gùndinti ''tenter,
historiquement, on sait que la forme lièka provient de la thématisation récente d'un ancien verbe athématique lièk-ti, conservé en vieux lituanien, et qui remonte certainement à un ancien parfait indo-européen cf. gr.
ÀÉÀOL1Ta)373.
«
*loik w-h2 e,
Il Y a donc eu, visiblement, en baltique oriental une
adaptation de l'ancienne forme athématique à un modèle apophonique productif, adaptation qui était favorisée par l'évolution phonétique de
*ai
en *ie. La forme qui en résultait (*liek-) était en effet susceptible d'être analysée, par rapport au degré zéro
* i,
comme un degré plein régulier
(comparable par exemple à *perk- en regard du degré zéro *pirk-). Plus directement que le baltique oriental, le prussien a conservé le degré vocalique ancien *laik-, mais il l'a étendu de l'indicatif singulier, dans lequel il était hérité (v. pro laik- < ind. pft. sg. Ï.-e. *lojkw-h2 e), à l'infinitif (v. pro poliiikt), où il a remplacé une ancienne forme à degré zéro radical (*likW-ti-, cf. lit. likti). Historiquement, l'apophonie modale a donc été nivelée en vieux prussien, tandis qu'elle a survécu sous une forme modifiée en baltique oriental.
détourner") est, de toute façon, trop fragile pour être mentionné et n'a en outre aucune chance d'avoir été encore perçu en synchronie.
369. Voir Fraenkel (LEW, 1, p. 152-153), Toporov (PrJ, II, p. 341-345). 370. BUga (RR(B), III, p. 139). 371. Reconstruction en ce sens chez Toporov (PrJ, II, p. 345).
372. Stang (1966, p. 310, 330, 344, 396). 373. Cette reconstruction s'appuie notamment sur la diathèse intransitive qui caractérise nettement le verbe baltique ind. prés. 3 e p. *laik-ti ("rester") et qui s'est combinée à la diathèse transitive de l'ancien présent à infixe nasal ind. prés. 3e p. *link-a ("laisser"). Sur l'importance de ce facteur dans l'évolution de la racine *lejk en baltique, cf. Petit (1999a, p. 84-85). W
-
264
265
Catégorie du mode
Catégorie du mode
- [im-] : dérivés enimmewingi / angeneme "agréable" (III, 57 16- 17),
On ne s'attardera pas non plus sur un cas probable, mais peu clair,
enimumne / angeneme "agréable" (III, 91 18).
d'apophonie verbale, celui du v. pro perrëist / verbinden "relier" (III, 89 2), apparemment pourvu d'un degré plein radical *reis-, en regard du participe
Les autres langues baltiques présentent des données différentes. Le letton
prétérit passif senrists / verbunden "attaché" (III, 599 ), qui présente un degré zéro radical *ris_374 . La forme est trop isolée pour être analysée; le
oppose un radical *em- à l'infmitif et à l'indicatif présent (sous une forme régulière j?m- en letton dialectal, sous une forme altérée fl?m- en letton
lituanien risti "attacher" n'a qu'un degré zéro commun à l'ensemble du
standard) et un radical *ëm- à l'indicatif prétérit (cf. lett. standard
paradigme (ind. prés. risa, prét. riso)375.
Zinov
Les autres types apophoniques attestés en lituanien n'apparaissent pas
fl~ma)
;
présente une forme emt / braé "prendre" (Z 43), peu signi-
ficative 376 .
Le lituanien littéraire a une apophonie complexe. Dans
clairement en vieux prussien. Seul un verbe mérite d'être signalé.
plusieurs dialectes bas-lituaniens, l'apophonie présente une forme diffé-
L'apophonie radicale qui sépare, en lituanien, d'une part l'infinitif iin-fi
rente, inf. imti, ind. prés. ëma oujëma, ind. prét. èmé ou jèmë. Une
e
"prendre" et son indicatif présent 3 p. im-a [im-], d'autre part l'indicatif e
alternance vocalique est probablement ancienne dans ce verbe, puisqu'elle
prétérit 3 p. èm-é [ém-] ne se retrouve pas en vieux prussien, qui a dans
apparaît également en slave, mais dans des conditions différentes à la fois
toutes les formes un degré zéro radical :
du lituanien et du letton377 • Le slave oppose un verbe perfectif à degré zéro / jftti "prendre"
« *im-ti-),
ind. prés. HMX / imç
- [im-] : ind. prés. imma / neme "je prends" (III, 107 15), immimai
général, inf.
/ nemen "nous prenons" (III, 33 10, III, 83 16), immati "vous
« *im- %-),
prenez" (III, 115 19) ; cf. aussi impér. jmants / nim ''prends''
/ imati "prendre" « *im-ii-ti-), ind. prés. l€MJI~ / jemljç « *em-i%-)378.
(OrG 86), ymais (OrA 92), ymais / accipe (OrF 93).
lA TH
et un verbe imperfectif à alternance vocalique, inf. HMaTH
On peut penser que le slave et le lituanien conservent sous une forme
- [im-] : ind. prét. imma / nam "prit" (III, 75 2), immats / nam er "il
modifiée le vestige d'une ancienne apophonie radicale, inf. *im-ti-, ind.
prit" (III, 75 7), etc., cf. part. prét. actif enimmans
prés. *em-a, ind. prét. *em-ë-. Le prussien aurait généralisé le thème faible
/ angenommen "ayant accepté" (III, 1253-4), immusis (III,
[im-], propre à l'origine à l'infinitif; le letton aurait introduit à l'infinitif
117 25 ).
le thème fort rem-l, propre à l'origine à l'indicatif présent, et aurait
- [im-] : inf. lmt / nemen "prendre" (III, 99 14), enimt / auffnemen
développé secondairement, comme le lituanien, un thème allongé à
"prendre, accueillir" (III, 1175), enimton / annemen "accepter"
l'indicatif prétérit. Quant au lituanien, il pose évidemment problème dans
(III, 1173 ), cf. aussi part. prét. passif imtii / genomen "prise"
cette perspective, car il présente une apophonie à peu près inverse de celle
(III, 10b1), animts / genommen "pris" (III, 105 16), enimts
qu'on peut raisonnablement postuler pour sa préhistoire: au lieu de [im-] à
/ angenommen "accepté" (III, 115 28 , III, 123 13 ) enimts
l'infinitif et et de [em-] à l'indicatif présent et prétérit, il a [im-] à
/ angeneme "agréable" (III, 10521 ),
374. Voir Maiiulis (PKEZ, III, p. 270 et IV, p. 101). Reconstruction d'une apophonie ind. prés. *reis-, vs. inf. *ris-ti- chez Kaukienë (1994, p. 17). 375. Cf. Fraenkel (LEW, II, p. 738).
376. Cf. Zinkevicius (1985, p. 72). 377. Cf. Trautmann (BSW, p. 103-104). 378. En slave comme en baltique, une tendance a existé à niveler le degré apophonique, d'où, par exemple, en vieux slave une forme d'infinitif eMarn / emati "prendre", attestée plusieurs fois au lieu de HMaTH / imati, d'après l'indicatif présent I€MJI~ / jemljp. Cf. Vaillant (1948, p. 273-274).
266
Catégorie du mode
l'infinitif et à l'indicatif présent et [em-], sous une fonne modifiée 379, à l'indicatif prétérit. Il est possible que le paradigme attesté dans quelques dialectes lituaniens, inf. [im-], ind. prés. rem-J, ind. prét. rem-J, représente une étape intennédiaire entre le paradigme ancien, inf. [im-], ind. prés. [em-], ind. prét. rem-J, et le paradigme morphologiquement anomal du lituanien littéraire, inf. [im-], ind. prés. [im-], ind. prét. [em-]. Mais on voit mal la raison d'une telle évolution dans un système où ce paradigme aurait très bien pu s'intégrer à un type régulier, inf. [im-], ind. prés. [em-], ind. prét. [im-]. Je reviendrai sur ce verbe un peu plus loin, dans la section consacrée à l'apophonie des thèmes temporels38o • Il est difficile, étant donné la diversité des types représentés, de définir une structure simple susceptible de rendre compte de l'ensemble des données. Tout d'abord, il convient d'observer que les deux classifications
Catégorie du mode
267
- lit. likti "laisser" :::: ind. prés. /ieka "il laisse" (avec contraste apophonique), mais lit. lipti "monter" :::: ind. prés. lipa "il monte" (sans contraste apophonique). -lit. mifzti "penser" :::: ind. prés. mêna "il pense" (avec contraste apophonique), mais lit. pinti "tresser" :::: ind. prés. pina "il tresse" (sans contraste apophonique). -lit. vogti "voler, dérober" :::: ind. prés. viigia "il vole" (avec contraste apophonique), mais lit. kopti "récolter du miel" :::: ind. prés. kopia "il récolte du miel" (sans contraste apophonique).
proposées - la classification étymologique (qui se fonde sur une confron-
Ces divergences ne peuvent s'expliquer, à mon sens, que si l'on
tation du degré vocalique de l'infinitif et de la fonnation en *-fi- héritée de
reconnaît que l'apophonie radicale attestée de manière descriptive en
l'indo-européen) et la classification contrastive (qui se fonde sur Wle
lituanien recouvre en fait plusieurs réalités différentes, qu'il importe de
confrontation du degré vocalique de l'infinitif et de celui de l'indicatif)-
distinguer. Quelques observations peuvent être tentées en ce sens. Tout
sont indépendantes l'une de l'autre. Les verbes pourvus d'un type
d'abord, on laissera de côté plusieurs cas dans lesquels l'alternance radicale
particulier de degré vocalique à l'infinitif et qui semblent de ce fait
résulte en fait de la réalisation phonétique divergente d'un même degré
appartenir à une même classe peuvent, par rapport à leur indicatif présent ou
vocalique. Ainsi, dans le verbe lit. siûti "coudre", on peut opposer un
prétérit, présenter ou non une apophonie radicale : celle-ci n'est pas liée de
allophone antéconsonantique [ü] (dans l'infinitif siûti) et un allophone
manière prévisible au degré vocalique de l'infinitif. C'est ce que montrent
antévocalique [uv] (dans l'indicatif présent siùva, prétérit siùvo), cf. aussi
par exemple les divergences qui peuvent exister entre des fonnes
[i) (dans l'infmitif Iyti "pleuvoir") en regard de [ij] (dans l'indicatif prétérit
comparables à l'infinitif, par exemple:
lijo "il plut" et dans l'indicatif présent à infixe nasal *li-N-j-a > *Ifja, noté IYJa "il pleut")381. De la même manière, dans le lituanien pùlti "attaquer",
on opposera un allophone antéconsonantique [pul-] (dans l'infinitif pùlti
379. Il est possible que la voyelle longue radicale du prétérit 6mé s'explique comme celle du prétérit 6jo de efti "aller", c'est-à-dire comme une formation régressive tirée de la fonne négative *némé < *ne-emé (cf. éjo f- néjo < *ne-ejo). Cf. Zinkevicius (LKIG, II, p. 110, § 566), Schmalstieg (2000, p. 87). 380. Cf. p. 339-343.
381. Le cas du verbe lit. vyti "chasser, poursuivre" est intéressant car il [ij] (dans l'!~dlcatif prétérit vijo), et une apophonie radicale, [ij] (dans l'indicatif prétérit vljo), vs. [ej] (dans l'indicatif présent vëja). En l'occurrence, la forme apophonique vëja est sans doute secondaire (d'après le modèle de gifiti, gëna ?) à côté de vija, attesté en lituanien dialectal (par ex. à Linkmenys) et en letton (lett. vij). Voir, en ce sens, Vaillant (GCLS/., J, p. 110), Rock (1995, p. 77).
c~m?ine une alternance phonétique, [i] (dans l'infinitif vyti), vs.
268
269
Catégorie du mode
Catégorie du mode
< *puol-ti-, avec loi d'Osthoff) et un allophone antévocalique [puol-] (dans
l'influence de l'indicatif prétérit, qui représente, en ce cas, sa forme de
l'indicatif présent puola et prétérit puolé). Ces alternances s'expliquent en
fondation. On peut estimer, par exemple, que lekti "voler" est fondé sur
termes phonétiques et n'ont pas de fondement morphologique; en ce sens,
l'indicatifprétéritleké "il vola", non sur l'indicatif présent lekia "il vole".
elles sont indépendantes de l'apophonie.
L'origine de l'apophonie radicale n'est donc pas à chercher, en l'occurrence,
Si l'on néglige par conséquent ces alternances phonétiques, on peut
dans le rapport entre l'infmitif et l'indicatif présent, mais dans le rapport
opposer pour l'essentiel deux types dans les différentes classes d'apophonie
entre l'indicatifprésent et l'indicatif prétérit (auquel s'apparente le thème de
radicale défmies plus haut:
l'infmitit). On verra plus loin que cette apophonie résulte d'une évolution
- (1) un TYPE APOPHONIQUE à alternance < degré zéro / degré
phonétique particulière dans une sous-classe des indicatifs présents et
plein> entre l'infinitif et l'indicatif présent. Ce type n'est en
qu'elle s'est étendue à quelques autres catégories proches. Historiquement,
général attesté que dans des radicaux comportant une sonante
elle ne concerne pas directement le rapport de l'infmitif et de l'indicatif.
(r, l, m, n), qu'ils soient de structure [CeR] (type mifiti
Le premier modèle, en revanche, caractérise nettement la formation de
- mena) ou de structure [CeRC] (type pirkti - perka). Dans
l'infinitif par rapport à celle de l'indicatif présent. Dès l'abord, son origine
ces radicaux, le contraste apophonique apparaît en synchronie
indo-européenne ne fait aucun doute : à travers le contraste apophonique
sous la forme < iR / eR >.
entre un infinitif à degré zéro (type [pirk-]) et un indicatif présent à degré
• Modèle : infinitif minti "penser, se souvenir"
«
i.-e.
plein (type [perk-]), les langues baltiques prolongent une opposition
*m1)-ti-) ::::: indicatif mena "il pense, se souvient"
«
Ï.-e.
ancienne entre une formation nominale à suffixe *-ti-, caractérisée par un
*men- %-). Opposition comparable dans le type pirkt;
degré zéro radical, et une formation verbale radicale thématique, caractérisée
"acheter" ::::: pef'ka "il achète", et secondairement, sous une
par un degré plein radical. Ce contraste peut être illustré par les exemples
forme divergente, dans le type likti "laisser, rester"
«
i.-e.
* li kW - t i-) ::::: li eka "il laisse, reste" (secondairement interprétable comme un degré plein).
suivants, tirés de diverses langues indo-européennes, notamment du grec ancien: -INDO-EUROPÉEN "porter", *bhr-ti- (véd. bhrtil) "soutien", lat. fors,
- (II) un TYPE APOPHONIQUE à alternance < degré long / degré
forfis "sort, hasard", vha. giburt "naissance"), vs. *tfer-eir (véd. bhilrati, lat.fero, vha. bëran, përan "porter").
bref> entre l'infinitif et l'indicatif présent. Ce type n'est attesté que dans des radicaux comportant une occlusive finale
- INDO-EUROPÉEN "faire confiance", *bhicl'-ti- (gr. TTtanS' "foi"),
vs. *bh eiJ-%- (gr. TTELeOlJ.aL "faire confiance, obéir").
et présentant une structure [CeC]. • Modèle : infinitif 1ekti "voler" ::::: indicatif lekia "il vole". Opposition comparable dans le type lit. tupti "se poser, atterrir" ::::: tùpia "il se pose, atterrit" < ü / u >, et le type lit.
vogti "voler, dérober"::::: viigia "il vole, dérobe" < 0 / a >.
-
INDO-EUROPÉEN "couler", *sru-ti- (gr. puaLS' "courant", véd.
srutil}), vs. *srep-%- (gr. pÉw "couler", véd. sravati). Les langues baltiques ont conservé ce schéma apophonique ancien, au point même de lui conférer une certaine productivité. Les exemples de
Le second modèle est sans doute récent et doit résulter d'une évolution
correspondances immédiates sont cependant rares, et l'on peut plutôt parler
secondaire. Il est probable que la voyelle longue de l'infmitif y est due à
d'un développement parallèle à partir d'un schéma apophonique hérité que
270
de formes déjà constituées, transmises directement de l'indo-européen au baltique382 .
271
Catégorie du mode
Catégorie du mode
Le problème qui se pose est de savoir pourquoi cette apo_
- [tep-]: lit. tèpti "graisser, enduire" (ind. prés. tepa, prét. tepé), lett. tept "id." (ind. prés. tçp, prét. tepa) < Î.-e. 2.
*tep-
phonie a été conservée, en baltique, dans certains verbes, tandis qu'elle a
(LIV, p. 573), cf. v. sI. TeTH / teti "frapper, l-laŒTLYoùV,
été perdue dans d'autres. L'alternance < i / e > apparaît encore dans le type
mUiti, ind. prés. mena "penser", mais a été éliminée d'une part dans le type
streichen "frotter, enduire"::::: Streich "coup".
pitti, ind. prés. pila "verser" et d'autre part dans le type beft;, ind. prés. beria "disperser". Comment s'expliquent ces divergences? Deux facteurs me semblent avoir joué un rôle important dans la
- [met-]: lit. mèsti "jeter" (ind. prés. meta, prét. meté), lett. mest "id." (ind. prés. mçt, prét. meta) < i.-e. *met- (IEW, p. 703-
704, LIV, p. 398), cf. v. sI. MeTaTH / metati ''jeter, ~uÀÀELV, peut-être v. sI. MeCTH / mesti "balayer"; le
conservation ou l'élimination du schéma apophonique ancien: d'une part,
ÈKTIÉ I-lTIE LV",
la structure du radical, d'autre part, la diathèse du verbe. Tout d'abord, on
v. prussien n'a qu'un participe passé passif pomests
peut observer que l'apophonie ancienne n'a été conservée que dans les
/ vnterworfJen "soumis" (III, 105 5 , III, 1179), nt. pomeston
verbes dont le radical comportait une sonante susceptible de se vocaliser:
(III, 103 20).
descriptivement l'apophonie n'oppose plus < " / e >, mais < iR / eR >.
- [bed-]: lit. bèsti "frapper, creuser" (ind. prés. beda, prét. bedé),
Cette limite explique l'absence d'apophonie dans les verbes de structure
lett. best "id." (ind. prés. bfd, prét. beda) < i.-e. *bhed'-
[CeC] ou [CeH], dans lesquels les langues baltiques ont généralisé un degré
(IEW, p. 113-114, LIV, p. 51), cf. v. sI. 60CTH / bosti
vocalique particulier, le plus souvent le degré plein.
"piquer, Œ
Dans les verbes de structure [CeC], la réalisation d'un degré zéro en position antéconsonantique était de toute façon malaisée, et l'on comprend que les langues indo-européennes aient en général imposé un degré plein. Ce type est fréquent dans les langues baltiques, et aucune apophonie ne s'y manifeste entre l'infmitif et l'indicatif. Exemples de ce
type3 83 :
- [kep-]: lit. kèptî "cuire" (ind. prés. kepa, prét. kepé), lett. cept "id." (ind. prés. cfP, prét. cepa) < Î.-e. *pek w_ (IEW, p. 798,
LIV, p. 421-422), avec métathèse en baltique, cf. v. sI. neWTH / pesti "cuire" "cuire", lat. coquo, gr.
«
proto-sI. *pek-ti-), véd. pacati
TIÉTTLù.
VUŒUELV",
lat. fodio "creuser" ; le
v. prussien n'a qu'un participe prétérit actif embaddusisi
/ stecken "ils sont enfouis" (III, 113 15). - [ved-]: lit. vèsti "conduire, épouser" (ind. prés. veda, prét. vedé), lett. vest "id." (ind. prés. vçd, prét. veda), v. pro westwey .
/ füren "conduire", II, 57, etc. (ind. prés. *weda, cf. impér. weddeis, III, 55 14, prét. wedde-, III, 101 17) < Î.-e. *Jled'(IEW, p. 1115-1116, LIV, p. 600), cf.
V.
sI. BeCTH / vesti
"conduire, dYELv" (ind. prés. BenJK / ved{J), v. irl. fedim "conduire, apporter", véd. vadhûl) "fiancée". - [sek-]: lit. sèkti "a. suivre, b. observer, C. aboutir, réussir, d. raconter" (ind. prés. seka, prét. seké), lett. sekt "suivre" (ind.
382. La même analyse vaut d'ailleurs pour une langue comme le grec, où le contraste apophonique est resté productif : un mot comme 8âpULS" "fait d'écorcher", qui donne l'impression d'être d'une haute antiquité en regard de l'indicatif présent 8É pw, n'apparaît en réalité que tardivement (Gallien) et a toute chance d'être une création secondaire. 383. Exemples et classification d'après Kaukienè (1994, p. 7-17), cf. aussi du même auteur sous le nom de Jakulienè (1986, p. 28-30).
prés. sfk, prét. seka) < Ï.-e. *sek w- (2 racines distinguées dans
IEW, p. 896-897 et 897-898, LIV, p. 475-476 et 477), racine 1. *sek w - "suivre" : cf. véd. sacate "suivre", gr. Ërr0l-laL
"id.", lat. sequor "id.", avec spécialisation "voir" des yeux") : cf. got. saihJan "voir, 6pàv,
«
"suivre
l.8ELV", ou
272
Catégorie du mode
"aboutir"
«
"suivre jusqu'au bout") : cf. lat. secundus
"favorable", v. ir1. rochim "atteindre"
273
Catégorie du mode
«
- [vez-]: lit. vètti "conduire en véhicule" (ind. prés. veta, prét. veze)
*ro-sechim) ; racine
< i.-e. *JJet- (IEW, p. 1118-1120, LIV, p. 602), cf. v. sI.
"dire": cf. vha. sagën "dire", v. is1. segja "dire",
BecTH 1 vesti "conduire en véhicule, KOlll(ELV" (ind. prés.
"il raconta". Noter une trace
Be3X 1vezQ), véd. wihati "conduire", lat. ueho "conduire" ; le
probable du degré zéro dans la fonnation adverbiale lit.
letton n'a que des formes dérivées (lett. vizinât "conduire en
piiskui "à la suite", paskui "ensuite" (-sk-).
véhicule"), le v. prussien a wessis / rytslete "sorte de
2. *sek
w -
lat. inquit "dit-il", gr.
ÈVlO"lTE
- [deg-]: lit. dègti "brûler" (ind. prés. dëga, prét. dêgé), lett. degt
véhicule" (E 308).
"id." (ind. prés. dfg, dedz, prét. dega, dedza) < i.-e. *cfeg.h_
- [mezg-]: lit. mègzti "nouer" (ind. prés. mezga, prét. mezgé), lett.
(IEW, p. 240-241, LIV, p. 115), cf. véd. dahati "brûler",
megzt "id." (ind. prés. mfgz, prét. mf!gza) < i.-e. *mes-t-,
v. sI. xeWTH 1 zesti "brûler, KaLElV" (avec altération du
cf. russe MH3rHph, Ma3raph 1 mizgir', mazgar' "araignée".
radical), lat./oueo "chauffer" ; le v. prussien n'a qu'un dérivé thématique dagis / somer "été" (E 13).
- [rezg-]: lit. règzti "tricoter" (ind. prés. rêzga, prét. rêzgé) < i.-e. *res-l- (IEW, p. 874, LIV, p. 459), cf. véd. rajjul) "corde",
- [seg-]: lit. sègti "épingler, agrafer" (ind. prés. sêga, prét. sêgé),
lat. restis "corde"
«
*res-gh-ti-, noter le degré
*e
comme
lett. segt "id." (ind. prés. sfg, sedz, prét. sega, sedza) < Ï.-e.
dans l'infinitif baltique); le letton n'a qu'un itératif rezgît
*seg- (IEW, p. 887-888, LIV, p. 468), cf. v. sI. npH-Ch..IIIm
"tricoter" .
1pri-s~sti "saisir, a1TTE<J8m" (prés. à infixe nasal secondaire),
À cette liste s'ajoutent quelques verbes qui présentent un vocalisme radical
véd. (ii-)sajati "attacher" ; le v. prussien n'a qu'un dérivé
long en vertu de la loi de Winter :
thématique sagis / rincke "boucle, agrafe" (E 486) et sagis / hu/nagel "ongle de sabot" (E 544).
- [les-]: lit. lèsti "picorer" (ind. prés. lêsa, prét. lêsé), lett. lest "id." (ind. prés. IfS, les, prét. lesa) < i.-e. */es- (IEW, p. 689, LIV, p. 371), cf. hitt. inf. lessuwanzi "récolter", got. galisan "récolter, <Juva:YELv", vha. lesan "choisir, lire". - [nes-]: lit. nèsti "porter" (ind. prés. nësa, prét. nesé), lett. nest "id." (ind. prés. nfs, prét. nesa) < i.-e. *h1nef- (IEW, p. 316318, LIV, p. 222-223), cf. v. sI. HeCTH 1 nesti "porter, ÉPELV", gr. aor. ilVE'rKOV "porter" (supplétif de Épw).
- [pes-]: lit. pèsti "tirer, plumer" (ind. prés. pêsa, prét. pêsé), lett. pestiês "se frapper" (ind. prés. pfsas, pesas, prét. pesiis) < i.-e. *pef- (IEW, p. 797, LIV, p. 421), cf. gr.
lTÉKW
"peigner", lat. pecto "id.", vha./echtan "combattre, fechten".
- [bëg-]: lit. begti "courir" (ind. prés. bega, prét. bego), lett. bêgt "id." (ind. prés. bêg, prét. bêga) < i.-e. *bheg w_ (IEW, p. 116, LIV, p. 53), cf. v. russe 61;qH 1 bec; "courir" (ind. prés. 6try 1 begu), ukr. 6iqH 1 biCy (ind. prés. 6iry 1 bigu), gr. É~ollal
"fuir" ; le v. prussien n'a qu'une fonne d'impératif begeyte / lauft "courez !" dans un fragment isolé (cf. MaZiulis, PKP, l, p. 31).
- [sëd-]: lit. sesti "s'asseoir" (ind. prés. seda, prét. sedo), lett. sêst(iês) "id." (ind. prés. sêst(as), ou sêz(as), prét. sêsta(-iis) < Î.-e. *sed- (IEW, p. 884-887, LIV, p. 465), cf. v. sI. ctcTH 1 sesti "s'asseoir, KaSL(Elv" (ind. prés. à infixe nasal Ch..,llX 1 s~dQ), lat. sedeo "être assis" ; le v. prussien a un participe
présent actif sindats / sitzend "assis" (l, 9 1-2), syndens (II, 92),
274
Catégorie du mode
Catégorie du mode
275
et un participe prétérit actif sïdons / silzende (III, 43 4), s'idans
aussi un degré plein secondaire. On notera que le germanique
(III, 127 13).
présente lui aussi un degré plein: got. ga-dejJs "action" (dans
- [ed-]: lit. esti "manger (animal), vulgo bouffer" (ind. prés. eda,
du suniwe gadedai, ElS uio8EaLav), missa-dejJs "mauvaise
prét. edé), lett. êst "manger" (ind. prés. êd, prét. êda), v. pro
action, TTapa~aalS, TTapaTTTw~a", waila-dejJs "bonne action,
fst / essen "manger", III, 41 6 , etc. (ind. prés. athq. *fs-t, ct:
EUEPYEaLa", v. isi. ddâ "action",
impér. fdeiti "mangez !", III, 75 4
"Tat, action"
;
ind. prét. *ïd-, cf. part.
«
V.
ang. dœd "id.", vha. tat
i.-e. *cfehrti-, cf. Feist, 1939, p. 178).
prét. actif, fduns, III, 105 8) < i.-e. *h1ed- (IEW, p.287-289,
- [de-]: lett. dêt "allaiter"< Ï.-e. *cfehrti- (IEW, p. 241-242, LIV,
LIV, p. 205), cf. v. sI. JaCTH / jasti "manger, Èa8LElV" (ind.
p. 120), avec degré plein, cf. v. sI. ~tTH / deti "enfants,
prés. IaMb / jamb), lat. edo "manger", got. itan "id.".
TTm8la, TTaI8ES"
«
i.-e. *cfeh1-ti-), en regard du degré zéro
Dans les radicaux de cette structure, l'absence d'un degré zéro en position
attesté indirectement dans l'adjectif verbal du védique dhïtaJ;
antéconsonantique est un fait ancien, dont on trouve les manifestations
"têté, sucé" avec une forme différente de la racine
ailleurs, par exemple dans les adjectifs verbaux en *-tos, où l'on a dès
*d'h/i-to-).
l'indo-européen un degré plein radical au lieu du degré zéro attendu, cf. i.-e.
«
Ï.-e.
- [së-]: lit. séti "semer", lett. set "id." < i.-e. *sehrti- (IEW, p. 890,
*pekW-tos "cuit" (véd. paktéûJ = gr. TTETTTOS = lat. cactus = lit. keptas) et
LIV, p. 469), avec degré plein, cf.
i.-e. *cfeg..h-tos "brûlé" (véd. dagdhdJ; = lit. degtas = peut-être gr. 8ETTT-
ctIaTH / sejati "semer, alTEl pEL v"
dans 8ÉTTTavos "allumé")384.
regard du degré zéro attesté en lat. satio "fait de semer"
Dans les radicaux de structure [CeH], la réalisation d'un degré zéro
«
V.
«
sI. ctTH / seti ou i.-e.
*seh1-ti-),
en
Ï.-e. *shrti-).
n'était pas impossible, mais les langues baltiques, comme les langues
- [spë-]: lit. speti "arriver à temps", lett. spet "id." < i.-e. *speh1-ti-
slaves, ont en général imposé le degré plein à l'infinitif, au détriment du
(IEW, p. 983, LIV, p. 532), avec degré plein, cf. v. sI. cntm
degré zéro ancien. Exemples baltiques de ce type :
/ s p eti "réussir, lTpOKOlTTEl V,
[de-]: lit. deti "placer", lett. dêt "pondre (des œufs)"
V.
i.-e.
prussien n'a qu'un participe prétérit actif
senditans / gefalten "rassemblées" (III, 83 19 , acc. pl. fém. d'un participe *sen-mta- "placé ensemble"), qui suppose lui
KaTEuo8oi)a8al" «
i.-e.
*speh1-ti-), en regard du degré zéro attesté peut-être indirectement en lat. spatium "espace, étendue, champ de courses"
«
i.-e. *sph1-ti-).
- [dô-]: lit. duoti "donner", lett. duôt "id.", v. pro dat / geben "id." (III, 89 12, etc.), diitwei (III, 33 15 , etc.), daton (III, 51 16) < i.-e. *deh3-ti- (IEW, p. 223-225, LIV, p. 89-90), avec degré plein, cf.
V.
sI. naTH 1 dati "donner, 8l8ovm" « i.-e. *deh3-ti-), en
regard du degré zéro attesté en gr. 80alS "don" et en lat. datio "donation"
«
i.-e. *dh 3-ti-).
[sta-]: lit. st6ti "se mettre debout", lett. stât "id.", v. pro postiitwei / werden "devenir", III, 63 16, etc. < i.-e. *stehrti384. En ce sens, Kurylowicz (1968, p. 210, § 269).
(IEW, p. 1004-1008, LIV, p. 536-538), avec degré plein, cf.
Catégorie du mode
276
277
Catégorie du mode
« ï.-e.
rera par ex. lit. deti "placer" et v. sI. .ntTH / deti (i gr. BÉaLS), lit. duoti
en regard du degré zéro attesté en gr. aTaaLS'
"donner" et v. sI. ,QaTH / dati (i gr. 86aLS), lit. stoti "se mettre debout" et
"stabilité, fait de se mettre debout" et en lat. statio "station"
v. sI. CTaUI / stati (i gr. aTaaLS). En baltique comme en slave, cette
« i.-e. *sthrti-).
évolution a sans doute été suscitée par les problèmes que posait la
v. sI. eTaTH / stati "se mettre debout, laTuaSm"
*stehrti-),
- [ga-]: lit. dia1. goti "aller vite" < ï.-e. *gWehrti- (IEW, p. 464-464,
réalisation du degré zéro dans les racines à laryngale. La confusion, en
LIV, p. 183), avec degré plein, cf. substantif lett. glUis "der
balto-slave, des trois laryngales en situation de vocalisation (*Ch1C-,
Gang, Weg, marche, chemin", fém. pl., ME, l, p.619
*Ch2C-, *Ch3 C- > balto-slave *CaC-) pouvait créer des ambiguïtés: ainsi,
« i.-e. *gWehrti-) et russe raTb / gat' "chemin de fascines, jetée" « i.-e. *gWehrti-), en regard du degré zéro restituable
par exemple, *d'h1-ti- "fait de placer" et *dhrti- "fait de donner" risquaient
*gWhrti-
d'aboutir à une même forme *datï-. Dans les verbes de structure [ReH], la
(le grec f3aaLS' "pas, base" procède d'une
réalisation du degré zéro devait théoriquement produire une forme [J,Uf]
autre racine *gWrp_ti_, cf. véd. gatif; "marche, allure", lat.
> baltique [iR], aberrante par rapport à la structure générale de la racine
con-uentio "assemblée, convention") ; le letton a un prétérit
[ReH] : on attendrait ainsi, en baltique, tfti- sur le radical *ja- "aller à
gâj "il alla", supplétif de iêt "il va".
cheval", tflti- sur le radical *lii- "aboyer", tfmti- sur le radical *mii- "faire
en i.-e.
- fja-]: lit. joti "aller à cheval"< i.-e. *iehrti- (lEW, p. 296, LIV, p. 275), avec degré plein, cf. v. sI. IaxaTII / jachati "aller à cheval, imaYELv, ÈlTUvaYELv, lTÀElV, ÉpXEaSuL"
« i.-e.
un signe". Toutes ces reconstructions théoriques n'avaient aucune chance de survivre en baltique, où elles ne pouvaient s'intégrer à un schéma apophonique connu. L'extension du degré plein est donc compréhensible.
*iehr ), en regard du degré zéro restituable en i.-e. *f-tï-
Les langues baltiques ont conservé un vestige d'un degré zéro ancien
< *ihrti- ; le védique a lui aussi généralisé le degré plein (cf.
dans un verbe de structure [CeH]. Sur la racine i.-e. *stehr "être debout", le
adjectif verbal yataf; < i.-e. *iehrto-).
baltique a, comme le slave, un infmitif pourvu d'un degré plein secondaire,
p. 1004-1008, LIV, p. 536-538), avec degré plein, cf. v. sI.
« i.-e. *stehrti-). Le participe prétérit passif présente également un degré plein secondaire, lit. stotas « i.-e. *stehrto-).
« i.-e. *lehr ), en regard
Mais il subsiste, en baltique, plusieurs traces d'un ancien adjectif verbal
- [la-]: lit. loti "aboyer", lett. lât "id." < i.-e. *lehrti- (IEW, JIaIaTH / lajati "aboyer, ÙÀUKTElV"
du degré zéro restituable en i.-e. *Jhrti-. _ [ma-]: lit. moti "bouger, secouer, faire un signe de la main", lett.
lit. stoti
=
v. sI. CTaTH / stati
*statas, régulièrement pourvu d'un degré zéro radical
« i.-e. *sthrto-, cf.
véd. sthitaf;, gr. aTuTos, lat. status). Ces traces sont les suivantes:
mât "id." < ï.-e. *mehrti- (IEW, p. 693, LIV, p. 382), avec
- ADJECTIF lit. statùs "raide, abrupt" (cf. LKZ, XIII, p. 717-719),
degré plein, cf. v. sI. MaIaTH / majati "faire un signe de la
peut-être réfection de *statas (comme lit. stiprùs "fort",
« i.-e. *mehrti-), en regard du degré zéro restituable en i.-e. *rphrti-.
main"
réfection de stipras). - ADJECTIF lit. stâcias "droit, debout"
« *stat-jas, cf. LKZ,
XIII,
Dans tous ces verbes, dont la structure radicale est comparable, le degré
p. 617-619), doublet de *statas (comme naüjas "nouveau"
plein a été imposé aux formes de l'infinitif. Ce trait est sans doute ancien,
< i.-e. *neJ,!-ios, vs. v. slave
car il apparaît en général dans les mêmes conditions en slave : on compa-
forme secondaire de l'adjectif statùs tirée du féminin stati,
HOB'b /
nov'b < i.-e. *neJ,!-os), ou
278
279
Catégorie du mode
Catégorie du mode
staCios (cf. lit. gilùs "profond",
vs. lett. dzils "id."
le second). Cette observation est confinnée par l'examen du matériel lituanien386
< *gil-jas). - SUBSTANTIF lit. dial. stiitas (masc.) ou statà (fém.) "meule"
(= lit. gubà, cf. LKZ, XIII, p. 671-672), probablement n
ancien adjectif neutre substantivé *stata
:
- [intonation radicale douce] type lit. minti "penser" (ind. prés.
mena, prét. miné) : lit. ginti '~chasser" (gëna, giné).
"objet dressé"
- [intonation radicale rude] type lit. minti "fouler aux pieds" (ind.
« i.-e. *sthr t6m)385; le letton a stats "Pfahl, pieu, poteau"
prés. mina, prét. myné): lit. ginti "défendre" (gina, gyné),
(ME, III, p. 1048).
pinti "tresser" (pina, pyné), skinti "cueillir" (skina, skfné),
- VERBE DÉRIVÉ lit. staryti "construire" (LKZ, XIII, p. 685-712),
lette statU "id." (de sens factitif) (nt.). Cf.
V.
+-
*statan
"objet dressé"
pro preistaÛinnimai / fuerstellen "nous
présentons" (III, 111 15).
tinti "amincir le fil d'une faux" (tina, tfné), trinti "frotter" (trina, tryné), Sinti-s "se frotter contre" (sina-si, syné-si), pilti "verser" (pila, pYlé). À ce second type il faut ajouter une série importante de verbes qui
Cette ancienne forme à degré zéro radical *sta-tas a été repoussée dans le
présentent le même schéma apophonique, mais ont un suffixe -ia à
domaine lexical, tandis qu'une forme récente *sta-tas s'est imposée dans le
l'indicatifprésent3 87
système verbal pour former le participe prétérit passif. Dans tous les autres cas, les langues baltiques ont perdu toute trace de l'ancien degré zéro des racines à laryngale fmale dans les formations d'infmitifet d'adjectif verbal. Dans les racines à sonante, de structure [CeR] ou [CeRC], les données sont complexes. L'apophonie ancienne est sauvegardée dans certains verbes
:
- [intonation radicale rude] type lit. girti "louer, célébrer" (ind. prés. giria, prét. gyré), lit. irti "se décomposer" (iria, yré),
skirti "distinguer, séparer" (skiria, skfré), spirti "donner un coup de pied" (spiria, spyré), tirti "expérimenter" (tiria,
tfré), gilti "piquer" (gilia, gylé), etc.
(type lit. miiiti, mena "penser" et pinti, pefka "acheter"), tandis qu'elle est perdue dans d'autres (type lit. minti, mina "fouler aux pieds", befti, beria
La distribution des types apophoniques en fonction de l'intonation
"verser, disperser" et mifkti, mifksta "être trempé", mefkti, mefkia
radicale ne connaît que peu d'exceptions, dont chacune peut recevoir une
"tremper"). Pour comprendre cette divergence, qui ne dépend apparemment
explication particulière :
pas de la structure du radical, il importe, à mon sens, de prendre en
- LITUANIEN gimti "naître" (ind. prés. ancien gema, moderne
considération deux facteurs, d'une part l'intonation radicale, d'autre part
gimsta, prét. gimé, cf. LKZ, III, p. 312-314): la fonne
l'existence d'une opposition de diathèse (transitive, vs. intransitive).
ancienne de l'infinitif est gifizti (avec intonation douce). Cette
Quand on confronte le verbe lit. minti ''penser'' (ind. prés. mena, prét.
fonne, encore citée comme régulière par Fraenkel (LEW, l,
mine) et son quasi-homophone minti "fouler aux pieds" (ind. prés. mina,
p. 151), est confinnée par le témoignage du letton dzimt
prét. myné), on est frappé de la relation qui parait exister entre le schéma
"naître" et par la comparaison Ï.-e. (i.-e.
*gWrp_ti_,
cf. véd.
apophonique et l'intonation radicale (douce dans le premier type, rude dans
385. Analyse en ce sens chez Maiiulis (PKEZ, III, p. 352-353).
386. Données: LKG (II, p. 230, § 321). 387. Données: LKG (II, p.234, § 328). Sur le type berfi (ind. prés. bèria, prét. bèré), qui représente une exception à cette distribution, voir plus loin, p. 321-322.
Catégorie du mode
280
gatil) "marche, allure", gr.
~
281
Catégorie du mode
"pas, base", lat. con-uentio
la présence d'un suffixe *-da à l'indicatif présent; c'est le
"assemblée, convention"). Le schéma apophonique ancien
seul verbe de ce type en lituanien. On peut estimer que le
gifhti - gema - gime est cohérent avec le type lit. mifiti
paradigme actuel du verbe "bouillir" résulte d'un aména-
"penser". L'intonation rude de gimti résulte, quant à elle,
gement secondaire d'un ancien paradigme de présent suffIXé
d'une métatonie rude, qui s'est d'abord réalisée dans
*vérd-a, associé à un infinitif à l'origine indépendant virti
l'indicatif présent secondaire gimsta (cf. Derksen, 1996,
(qui pourrait avoir été préféré au degré plein *vérfi pour éviter
p. 286), puis étendue à l'infmitif (en ce sens, Arumaa, 1957,
la collusion homonymique avec vérti "ouvrir").
p. 125).
Si l'on néglige ces quelques exceptions, la relation qui se manifeste
- LITUANIEN mirti "mourir" (ind. prés. mirsta, prét. mire, cf. LKZ,
entre l'intonation radicale et le schéma apophonique paraît être absolument
VIII, p. 269-275) : aucune trace d'un indicatif présent apo-
régulière. Pour en rendre compte, il convient de rappeler un trait
phonique tmera. L'indicatif est irrégulier à plusieurs titres:
caractéristique de toutes les apophonies radicales dans l'expression des
métatonie rude à l'indicatif présent (*mif-
*mir-), suffIxe
catégories grammaticales, la tendance au "bithématisme apophonique", dont
-sta au lieu de -sta à l'indicatif présent, système désinentiel
il a été question plusieurs fois au cours de cette étude. Le baltique tend à ne
en -e au prétérit (alors que les présents en -sta s'opposent à
plus opposer que deux allomorphes apophoniques et à ramener tous les
des prétérits en -0, cf. sénti "vieillir", ind. prés. sénsta, prét.
schémas à cette opposition binaire. Sur cette base, on peut suggérer le
seno). La métatonie rude à l'indicatifprésent n'est pas un fait
raisonnement suivant. Dans les verbes à intonation radicale douce [in], il
isolé (cf. liste d'exemples chez Derksen, 1996, p.285-287,
faut reconstruire une ancienne diphtongue brève [ln]
tentative d'explication chez Bammesberger, 1991, p.274-
apparaissait régulièrement à l'infmitif et à l'indicatif prétérit, par ex. mifi-ti
277) ; en l'occurrence, elle permettait de distinguer mirsta "il
"penser", ind. prét. min-e. Dès lors que l'infinitif et l'indicatif prétérit
meurt" (: mirti "mourir") de mirsta "il oublie" (: mirsti
étaient non apophoniques l'un par rapport à l'autre, l'indicatif présent
"oublier"). Il n'y avait, en revanche, aucun risque d'ambi-
pouvait, par contraste, présenter une apophonie (d'où men-a), car il en
guïté à l'infinitif (mirti "mourir" , vs. mirsti "oublier"), ce
résultait un schéma bithématique, acceptable dans le système de la langue
qui explique peut-être que la forme mirt; "mourir" ait
(inf. et ind. prét. [in], vs. ind. prés. [en]). En revanche, dans les verbes à
conservé son intonation ancienne. Le letton paraît avoir
intonation radicale rude [in], il faut partir d'une ancienne diphtongue
généralisé l'intonation rude: lett. mift "mourir" (ind. prés.
longue [in]
mirst, prét. mira), cf. Arumaa (1957, p. 123).
conservée à l'infinitif et à l'indicatif prétérit (d'où inf. *mïn-ti- "fouler aux
-+
« i.-e.
« i.-e. *.(1), qui
*.(1H). Dans un premier temps, cette diphtongue était
- LITUANIEN virti "bouillir" (ind. prés. vérda, prét. vire, cf. LKZ,
pieds", ind. prét. *mïn-ë), mais ultérieurement la variante baltique de la loi
XIX, p. 642-658) : l'intonation radicale rude laisse attendre
d'Osthoffproduisait son abrégement en position antéconsonantique, c'est-à-
un schéma apophonique comparable à celui du type lit. ginti
dire à l'infinitif (*mïn-ti- > minti, la seule trace de l'ancienne diphtongue
"défendre" (gina, gyne). L'existence d'une apophonie radicale
longue étant l'intonation rude) : cette évolution conduisait, on le voit, à
à l'indicatif présent (*vir- -+ *ver-) et d'une voyelle brève au
créer une alternance secondaire entre l'infinitif à voyelle brève min-fi [min]
prétérit (vire) surprend. Le verbe est irrégulier également par
Catégorie du mode
Catégorie du mode
et l'indicatif prétérit à voyelle longue myné [min]. Un troisième
dans d'autres, elle caractérise l'opposition de l'infinitif et de l'indicatif
allomorphe apophonique était par conséquent impossible, et l'indicatif
présent. On comparera par exemple:
présent devait adopter le degré vocalique de l'un des deux al1omorphes déjà
-STRUCTURE [CeR] :
282
283
existants, d'où min-a d'après l'infinitif min-ti. On observe ici un principe
• opposition de diathèse: lit. kélti "lever" (ind. prés. kelia,
d'économie des marques morphologiques, qui ne permet pas d'imposer à
prét. kélé), vs. ki/li "se lever" (ind. prés. kYla < *kiNla, prét. kilo).
l'indicatif présent une apophonie spécifique là où l'indicatif prétérit est déjà caractérisé par une apophonie. Ce n'est donc pas l'intonation radicale qui est directement responsable du schéma apophonique, mais plutôt l'opposition de quantité qu'elle reflète et les problèmes que pose sa réalisation dans un système où prévaut une tendance au bithématisme. Le second facteur important, à mes yeux, est l'existence d'une opposition de diathèse (transitive, vs. intransitive). On sait que les langues baltiques, notamment le lituanien, ont développé un système dans lequel s'opposent des couples de verbes, l'un transitif (causatit), l'autre intransitif (inchoatit), distingués par leur apophonie et leur type morphologique388 . Ce modèle peut être illustré par les verbes suivants : - lit. raükti "froisser" (ind. prés. raükia, prét. raüké), vs. rùkti "se froisser" (ind. prés. ruiika, prét. rùko). - lit. keïsti "changer" (ind. prés. keïcia, prét. keïté), vs. kisti "se
• opposition modale : lit. minti "penser" (ind. prés. mena, prét. miné). - STRUCTURE [CeRC] :
• opposition de diathèse: lit. mefkti "tremper" (ind. prés. mefkia, prét. merké), vs. mifkti "être trempé" (ind. prés. mifksta, prét. mifko).
• opposition modale : lit. pifkti "acheter" (ind. prés. perka, prét. pifko). Historiquement, l'opposition modale paraît être la plus ancienne, car elle se retrouve ailleurs dans les langues indo-européennes. Le slave en présente de nombreux exemples, ainsj389 : - < bIr / ber> dans le v. sI. 6bpaTH / bbrati "choisir, cueillir, ÈKÀÉYELV"
changer" (ind. prés. kifita, prét. kito). Dans les radicaux à sonante, ce modèle prend la forme d'une opposition entre verbe causatif à degré < eR > et verbe intransitif inchoatif à degré < iR >, par exemple:
- lit. kélti "lever" (ind. prés. këlia, prét. kélé), vs. kilti "se lever" (ind. prés. kyla, prét. kilo). Autres exemples chez Petit (l999a, p. 86). La question se pose de savoir pourquoi, dans certains verbes, l'apophonie radicale < iR / eR > a été associée à une opposition de diathèse, tandis que,
- < dIr / der> dans le v. sI. ,llbpaTH / dbrati "déchirer, çEl'v" (ind.
prés. ,llepx / derç). - < ph / per > dans le v. sI. llbparn / pbrati "voler,
ÙValTÉTEa8m"
(ind. prés. nepx / pen;). - < zId / zid > dans le v. sI. )Kb,llaTH / ibdati "attendre, Il ÉVELV"
(ind. prés. )l(H,llX / iidç). - < zUv / zov > dans le v. sI. 3'bBaTH / z'bvati "appeler,
KaÀElv"
(ind. prés. 30BX / zovç). - < gun / zen> dans le v. sI. r'bHaTH / g'bnati "chasser, 8LWKELV"
388. J'ai décrit ce modèle dans une pu~l~catio? .réc~nte, cf. Petit (1999a~ p. 85-93). Certaines des analyses présentée~ ICI ont ete d~Jà évoq':lées dans cett publication et ne feront donc pas l'objet d une présentatIOn détaIllée.
(ind. prés. 6epx / berç).
(ind. prés. )l(eHX / :fenç).
389. Exemples chez Vaillant (1948, p. 309-310 et 273-275).
ÈÀavvELv,
284
Catégorie du mode
- < sHI / stel > dans le v. GTpWVVÛVaL"
(ind. prés.
Catégorie du mode
sI. CTb.JIaTH / stblati "étendre, CTeJI~
/ steljQ).
(ind. prés.
CTPOY)K~
subsiste en baltique quelques traces lexicales de cette situation primitive, en l'occurrence les adjectifs lit. kiltas "fort, solide"
- < strUg / strug> dans le v. sI. CTJYbraTH / str'bgati "racler,
ÇElV"
/ struijQ), etc.
285
girtas "ivre"
« i.-e. *gW[hrto-
«
i.-e. *kwJH-to-) et
~ gr. ~pwT6S' "mangeable") 392. On peut
imaginer que ces formations adjectivales en *-tas ont donné lieu à une
Ces alternances sont parfois superposables à leurs contreparties baltiques:
dérivation verbale inchoative, d'où par ex. lit. kiltas (avec son sens ancien
l'infinitif slave r'hHaTH / g'bnati "chasser" répond ainsi, au suffixe près, à
"élevé") -+ kilti "acquérir l'état de ce qui est élevé" (ind. prés. à infixe nasal,
l'infinitif lituanien ginti "chasser", cf. v. pro guntwei
«
Ï.-e. *gv.hp._ti_, cf.
lit. *kinla> kYla), de la même manière qu'on a lit. baltas "blanc"
--+
balti
adjectif verbal véd. hatal) "frappé", gr.' ApTJL-et>aToS' "tué par Arès"), tandis
"acquérir l'état de ce qui est blanc, blanchir" (ind. prés. à infixe nasal, lit.
que l'indicatif présent )KeH.K / fenQ rappelle le lituanien genù, gêna
*banla> bçla). L'opposition de deux verbes à l'indicatif présent (transitif
(*g..hen-efo-, prolongement de l'ancien athématique Ï.-e. *g..hen-ti, véd. hanti
kê/ia "il lève", vs. intransitif kyla < *kinla "il se lève") conduisait à
"frapper", hitt. kuenzi). Au
sI. llbpaTH / dbrati "déchirer" (ind. prés.
l'opposition de deux infinitifs antithétiques, l'un transitif (kélti "lever" au
llep.K / derQ) correspond le bas-lituanien dini "déchirer" (variante plus
lieu de *kilti d'après l'indicatif kê/ia), l'autre intransitif (kilti "se lever" sur
courante dira, ind. prés. derù, dêraJ390 < i.-e. *d[-ti-, vs. *der-efo-. On
ki/tas "levé"). Ce système est, par la suite, devenu productif, si bien qu'il
observe, enfin, que, là où le slave a une opposition modale inf. 6bpant
n'est pas nécessaire de supposer partout l'intermédiaire d'un adjectif verbal
/ buati "choisir, cueillir", vs. ind. prés. 6ep.K / berQ, le baltique présente
apophonique. Si le lituanien *biFti "se disperser" (la forme actuelle est
une opposition de diathèse certainement secondaire, lit. befti "verser,
birti, avec métatonie rude d'après le présent birsta) repose certainement sur
disperser", vs. birti "se verser, se disperser"391. Il est donc raisonnable de
un adjectif verbal
penser que l'opposition modale est un fait ancien dans les langues
bh[ta/]) et en est venu à s'opposer à befti "disperser", fondé sur l'indicatif
baltiques, tandis que l'opposition de diathèse est une innovation propre à
bèria, on peut se contenter, pour beaucoup d'autres verbes, de supposer
ces langues.
l'application du schéma apophonique secondaire, opposant un verbe
V.
*biftas
"dispersé" (formellement identique au véd.
Dans une publication récente (1999a, p. 88-89), j'ai proposé d'expliquer
transitif à degré < eR> et un verbe intransitif à degré < iR >, d'où par ex.
la genèse du système baltique par le rapport spécifique des fonnes d'infmitifs en -ti- et des adjectifs verbaux en -tas. Je me contenterai ici de
lit. mefkti "tremper", vs. mifkti "être trempé", lenkti "pencher", vs. /inkti "se pencher", etc.
résumer quelle était mon argumentation. Actuellement, les verbes
Une question reste cependant posée: pourquoi ce modèle secondaire
lituaniens kélli "lever" et gérti "boire" ont des participes prétérits passifs
n'a-t-il pas totalement remplacé l'ancienne apophonie modale? La survie
non apophoniques kéltas "qui a été levé" et gértas "qui a été bu", mais la
du type ancien (dans le lit. minti "penser", ind. prés. mêna, ou le lit. pifkti
comparaison indo-européenne laisse supposer qu'à date ancienne la
"acheter", ind. prés. pefka) peut, à mon sens, s'expliquer par le facteur
formation en -tas « Ï.-e. *-to-) était caractérisée par un degré zéro radical. Il
suivant: l'opposition modale a été remplacée par une opposition de dia-
390. Sur ce verbe, cf. Fraenkel (LEW, 1, p. 96-97), Skardzius (1935b, p. 59 RR(S), IV, p. 371-372). 391. Sur l'évolution sémantique de ce verbe en baltique, cf. Petit (1998, p. 229-288).
fondamentalement intransitifs échappaient donc par nature à une telle
thèse partout, sauf là où cette évolution était impossible. Les verbes =
392. Autres exemples du même type chez Kurylowicz (1956, p. 215, note 7).
286
Catégorie du mode
Catégorie du mode
opposition de diathèse, ce qui, le cas échéant, pouvait permettre la survie
verbes se sont conformés au second type, sauf ceux qui, pour des raisons
287
de l'ancienne opposition modale. C'est le cas, par exemple, du lit. miiiti
sémantiques, ne pouvaient s'y intégrer et qui, dès lors, purent conserver le
"penser" (ind. prés. mena), dans lequel une opposition de diathèse était
premier type d'apophonie.
proprement inconcevable ("penser", vs. "être pensé" ?) ; la même analyse vaut pour d'autres verbes intransitifs comme lit. If:sti "entrer dans, pénétrer"
v. CONCLUSION: CATÉGORIE DU MODE ET APOPHONIE RADICALE
(ind. prés. lenda), sifgti "être malade" (ind. prés. sefga), slinkti "couler, passer, avancer" (ind. prés. slenka), ti!Pti "avoir de la place" (ind. prés.
tefPa). On sait, en outre, que, dans les couples diathétiques du type kélti, vs. kilti, les formes intransitives sont caractérisées par une limitation sémantique: elles sont réservées à l'expression de procès naturels et spontanés, qui n'impliquent pas l'intervention d'un agent, cf. lit. kji/a
véjas "le vent se lève", siikos linksta "les branches penchent", etc. 393 • Les verbes dont le sémantisme suppose nécessairement un agent humain ou social n'ont donc pu participer à la constitution de couples apophoniques diathétiques. Malgré le modèle de mefkti "tremper", vs. mirkti "être trempé, dégouliner", la langue n'a pu créer un couple (sémantiquement aberrant) tpefkti "acheter", vs. tpirkti "être acheté", parce que le sens du verbe impliquait un acte social référé à un agent déterminé, et non un procès naturel et spontané; l'opposition ancienne pifkti, vs. pefka pouvait donc subsister. La même analyse vaut pour les verbes transitifs du même type, comme lit. ginti "chasser" (ind. prés. gena)394, kimsti "fourrer, bourrer" (ind. prés. kemsa), kifpti "tondre" (ind. prés. kefpa), kifsti "couper" (ind. prés. kefta), kriihsti "mâcher" (ind. prés. kremta), pifsti "arranger un mariage, marier" (ind. prés. pefsa), rifikti "rassembler, choisir" (ind. prés. renka), vilkti ''tirer, mettre un vêtement, vêtir" (ind. prés. velka). La coexistence d'un type ancien d'apophonie modale et d'un type récent d'apophonie diathétique se comprend donc si l'on admet que tous les
393. Cf. Petit (1999a, p. 101-102). 394. C'est probablement sur le modèle de giflti "chasser" (ind. prés. gêna) qu'une apophonie radicale s'est développée dans le verbe synonyme vyti "chasser" (ind. prés. vêja, au lieu de vija), et par contigurté dans son homonyme vyti "tourner une corde, tresser" (ind. prés. véja, au lieu de vija).
L'apophonie modale apparaît sous deux formes dans les langues baltiques. Tout d'abord, sous une forme résiduelle à l'optatif et au participe : seuls deux verbes, "être" et "aller", en présentent des traces nettes, qui ont rapidement tendance à disparaître. Là où le v. prussien a encore un impératif apophonique à degré zéro radical *s-ei- (v. pro seiti "soyez !") et *y-ei- (v. pro ieis "va !"), le lituanien n'a plus, dès les plus anciens textes, que des formes à degré plein rétabli d'après l'indicatif, permissif *es-ie- (v. lit. te eli "qu'il soit !", DP, 350 14) et *ei-ie (v. lit. te
ateii "qu'il arrive !", DP, 42737). Les deux verbes ont encore un participe présent apophonique en v. lituanien (v. lit. acc. santi "étant" < *s-ant-, acc. enti "allant" < *y-ant-) et en v. prussien (v. pro emprijki-sins "présent"), mais ici aussi des formes à degré plein régularisé ont vite vu le jour et se sont imposées dans les langues modernes (lit. esçs "étant", v. lit.
ejç.s "allant", aujourd'hui eïn{lS). L'apophonie modale apparaît, en revanche, plus régulièrement et plus fréquemment, en baltique, dans les formations d'infmitif. Le type lit. minti "penser", ind. prés. mena, est ancien et se retrouve non seulement dans chacune des langues baltiques (même si l'on observe une tendance nette à ~on élimination en vieux prussien), mais également dans d'autres langues
mdo-européennes : la concordance précise entre le baltique et le slave pennet, sur ce point, de voir dans ce type une apophonie de très haute anti ., . qUlte. Cependant, la conservatIon de cette ancienne apophonie radicale n'a e' t ' · ble, en baltIque, . que dans des conditions limitées, c'est-à-dire e pOSSl POur autant qu'elle n'interférait pas avec un système apophonique secondaire, productif en baltique, fondé sur une opposition de diathèse.
288
Catégorie du mode
La confrontation de ces deux types d'apophonie modale est instructive. Elle suggère qu'en un sens, la relation de l'infinitif et de l'indicatif était perçue comme moins "grammaticale" que celle de l'indicatif et de l'optatif ou celle de l'indicatif et du participe. On peut comprendre cette différence si l'on conçoit que le système verbal baltique repose sur l'opposition de trois thèmes temporels fondamentaux, l'infinitif, l'indicatif présent et l'indicatif prétérit, et que ni l'optatif, ni le participe ne constituent à eux seuls des
CHAPITRE VI
thèmes temporels : ce sont des formes toujours fondées, non des formes fondatrices. On peut ainsi opposer, dans le verbe baltique, d'une part les thèmes temporels, par nature indépendants les uns des autres, et d'autre part les formes qui en dérivent et qui sont par nature dépendantes. L'apophonie
CATÉGORIE DU TEMPS ET APOPHONIE RADICALE
grammaticale ne survit, en baltique, que dans l'opposition de formes fondatrices indépendantes (rapport de l'infinitif et de l'indicatif), non dans l'opposition de formes fondatrices et de leurs formes fondées (rapport de l'indicatif et de l'optatif ou du participe). Il n'est donc pas tout à fait exact de dire, comme on l'a fait jusqu'à présent, que l'apophonie radicale tend à disparaître dans le domaine grammatical et à se restreindre au domaine lexical: plus précisément, il apparaît que l'apophonie radicale tend à disparaître, en baltique, dans le rapport de formes grammaticales fondatrices et de leurs formes fondées, mais reste vivante dans la constitution de formes indépendantes, même si leur relation ne saurait être défmie autrement que comme une relation grammaticale.
1. INTRODUCTION
Le système temporel des langues baltiques est centré sur l'opposition d'un thème de présent et d'un thème de prétérit, auxquels s'ajoute, par contraste, un thème modal d'infinitif. Les autres formes, qu'elles soient ~emporelles (par exemple le futur) ou modales (par exemple le participe), ~ouent à cet égard un rôle mineur, et l'on ne saurait leur attribuer la même
Importance. Seuls le présent et le prétérit peuvent constituer à côté du thème modal de l" In fiInltl . Of, des thèmes temporels indépendants ' d'un point de vue morphol oglque, 1es autres temps apparaIssent . toujours comme des 0
0
~ormes fondées. Pour prendre un exemple simple, un verbe comme le lItuanien dûoti "donner" oppose trois thèmes 395
:
B 395. Sur l'origine de ces différents thèmes voir notamment l'article de ammesberger (1982, p. 239-250).' 0
Catégorie du temps
290
Catégorie du temps
291
- 1. un thème d'infinitif duo- (inf. duo-ti "donner"), sur lequel
ses thèmes temporels: un verbe comme )'l)'v0ll-aL "devenir" oppose ainsi
reposent, en synchronie, l'indicatif futur (duo-siu "je donnerai"),
quatre thèmes temporels (1. prés. )'l )'V0ll-aL, II. fut. )'Ev~aOll-aL, III. aor.
l'imparfait itératif (duo-davau "je
le conditionnel
È)'EVOllllv, IV. par( )'É)'ova). À la différence des langues classiques, où
(duo-ciau "je donnerais"), l'impératif (duo-k "donne!"), le participe
l'infinitif est morphologiquement dépendant des thèmes correspondants de
passé passif (duo-tas "donné")
l'indicatif (par exemple gr. )'l YVEaSm
donnais"),
et le participe circonstanciel
comme Y( )'vollaL, YEVÉ aSaL
(duo-damas "en donnant").
comme È)'EVOllllv, etc.), le balto-slave présente un thème unique d'infinitif,
- II. un thème d'indicatif présent duod- (ind. prés. duod-u "je
souvent distinct du thème de l'indicatif présent et parfois de celui de
donne"), sur lequel reposent, en synchronie, les participes présent
l'indicatif prétérit.
actif (duod-fJs "donnant, qui donne") et passif (duod-amas "donné,
Dans la plupart des langues indo-européennes, l'opposition des thèmes
qui est donné").
temporels peut s'accompagner d'un contraste de l'apophonie radicale. Le
- III. un thème d'indicatif prétérit dav- (ind. prét. dav-iaii "je
grec conserve à cet égard une remarquable liberté : on trouve, côte à côte,
donnai"), sur lequel reposent, en synchronie, le participe prétérit
un degré plein dans le thème du présent ÀEl TIW
actif (dèiv-?s "qui a donné") et le substantif verbal en -imas
ÀEl4JW, un degré fléchi dans celui du parfait ÀÉÀOL TIa et un degré zéro dans
(dav-imas "don, fait de donner").
celui de l'aoriste ËÀL TIOV. Dans d'autres langues, le seul contraste vivant
"laisser" et du futur
Cette opposition tripartite (thème d'infinitif, de présent, de prétérit) est
est celui qui oppose un thème de présent et un thème de prétérit: c'est le
caractéristique des langues baltiques. Un système proche, quoique déve-
cas en latin (prés. Mg-a "lire", vs. parf. /eg-f).
loppé dans une direction différente, apparaît en slave, où l'on peut opposer, dans certains cas, un thème d'indicatif présent (par ex. v. sI.
qbT- /
Dans les langues baltiques, la diversité des formations apophoniques a
cbt- :
été fortement réduite. Une apophonie radicale ne se rencontre pl~s, dans les
ind. prés.
qbTJi\. /
cbtQ "je lis") et un thème d'infinitif-indicatif aoriste (par
thèmes temporels, qu'à travers l'opposition d'un thème de présent et d'un
ex. v. sI.
qHT- /
Cit- : inf.
cis'b "je
thème de prétérit. Le futur sigmatique, qui avait régulièrement en indo-
lus")396. Dans les auttes langues indo-européennes, la constitution des thèmes temporels prend des formes différentes. Le germanique peut opposer
européen un degré plein et formait parfois un contraste apophonique avec le présent ou avec le prétérit397 , apparaît systématiquement nivelé en baltique
jusqu'à quatre thèmes (1. prés. : got. baira "je porte", inf. bairan "porter,
sur la base du thème d'infinitif. Là où le grec présente un futur ÀEL4JW "je
laisserai" (transposé en indo-européen */eikw-s-efo-), à degré plein régulier en
portâmes"; IV. part. passif: baurans "porté"). Le latin n'oppose
regard du présent ÀE (TIW, le lituanien a un futur de même sens liksiu
régulièrement que deux thèmes (I. thème d'infectum : lat. Mg-a "je lis",
(transposé en indo-européen *lik w_si- %-), fondé sur l'infinitif apophonique lik- t"Z "1' . *lzk . -tz-). Pour la questIOn de l'apophonie radicale, aIsser" « l.-e.
qHCTH /
Cisti "lire", ind. aor.
qHCb /
inf. leg-ere; II. thème de perfectum: leg-ï "je lis", inf. leg-isse) et,
W
•
•
seulement dans quelques cas, trois thèmes (1. thème d'infectum : pel/-a "je remue", inf. pell-ere ; II. thème de perfectum : pepul-f, inf. pepu/-isse ; III. thème de participe passif: pu/sus). Le grec se signale par la multiplicité de 396. Exemple chez Vaillant (1948, p. 253, § 167).
397. Le grec oppose ainsi un présent à degré zéro TLVW "juger" « *kwi-ny_) et un futur à degré plein TElŒW « *kwei-), qui concorde avec l'aoriste ETELŒa ou encore un aoriste à degré zéro en grec homérique TlÀv80v "aller" « *hfluet_) et un futur à degré plein ÈÀEVŒOJ.laL « *h/leycl'-).
292
Catégorie du temps
Catégorie du temps
293
le futur baltique demeure donc dépourvu de signification, car il est
• type en *a- : lit. sako "il dit", inf. sakyti (ind. prés. 1re sg.
constamment fondé sur l'infinitif, dont il reproduit le degré vocalique 398 .
sakaii < *-a-u, 3
Le seul contraste apophonique clairement représenté dans les thèmes
e
sako < *-a-(t),
p.
re
pl.
< *-a-me-) ; lett. saka "il dit", inf. sadt (ind. prés. e
sakome
re
sg.
temporels des langues baltiques est donc celui qui y oppose assez
saku < *-a-u,
fréquemment le présent et le prétérit. Ses manifestations sont diverses, et
v. pr.laiku / halten "ils tiennent", III, 37 18 , III, 39 7 , cf. III,
son origine n'est pas toujours aisée à détérminer. Dans cette étude, je
87 9, inf. laikiit / leisten "tenir", III, 107 10 (ind. prés. 3e p.
n'aborderai pas dans son ensemble la question du prétérit baltique, qui mériterait à elle seule une monographie, mais je me contenterai d'indiquer
laiku / halten < *-ka-(t), 1 pl. laikumai / halten < *-kQ-me, III, 29 14).
quels sont les principaux types apophoniques attestés dans cette formation
• type en *-i- : lit. sédi "il est assis", inf. sédeti (ind. prés.
et de faire quelques observations sur leur préhistoire.
r
3
p. saka < *-a-(t),
Ire
pl. sakâm < *-a-me-) ;
re
e
e
sg. sédiiu < *-i-u, 3 p. sédi < *-i-(t),
r
e
pl. sédime
< *-i-me-) ; devenu thématique en lett. sêt' "il est assis", inf.
II. THÈME DE PRÉSENT ET THÈME DE PRÉTÉRIT
re
sêdêt (ind. prés. 1 sg. sêt'u < *-i-u, 3e p. sêt' < *-i-a-(t), 1re
Les langues baltiques sont caractérisées par la diversité de leurs
pl. sêt'àm < *-i-a-me-) ; v. pro turri / hat "il a", par ex. III,
r
e
formations de présent et, à l'inverse, par l'extrême limitation de
27 7, inf. turrïtwei / haben "avoir", III, 27 7 (ind. prés.
formations de prétérit. Stang (1942, p. 98-99) distingue au moins trois
turri, secondaire III, 57 15 , 3 e p. turri < *-i-(t), 1re pl.
grands types de présent, qui comprennent de nombreux sous-types 399
turrimai / haben < *-i-me-, par ex. 111,279).
:
- (c) verbes thématiques :
- (a) verbes athématiques: v. lit. duosti "il donne" (ce type a pratiquement disparu en lituanien moderne), v. pro dast / gibt "il donne" (par ex. ID,
• radicaux thématiques *-a- : lit. veda "il conduit", inf. vèsti re
e
(ind. prés. 1 sg. vedù, 3 p. veda, 1re pl. vedame); lett. vfjd "il conduit", inf. vest (ind. prés. 1re sg. vçdu, 3 e p. vçd,
53 4).
(b) verbes semi-thématiques
sg.
(dont
certaines
formes
sont
re
pl. vçdàm) ; v. pro *imma "il prend" (cf. senrïnka / sammelt
thématiques, par ex. 1re sg., tandis que d'autres sont athématiques,
"il rassemble", III, 45 16), inf. ïmt / nemen "prendre", III, 99 14
par ex. 3e p., 1re pl.) :
(ind. prés.
r e sg.
imma, secondaire III, 107 15 , 3 e p. *imma,
1re pl. immimai / nemen, III, 33 10 , III, 83 16 ). • thématiques à suffixe *-da-: lit. vérda "il bout, fait 398. Il n'est pas vraisemblable de supposer, comme le fait von d. OstenSacken (1922, p. 146), que, si nombre d'infinitifs ont acquis en baltique un degré plein radical (type lit. befti "disperser" en regard de l'i.-e. *bhr-ti-), ils le doivent à l'influence des formes du futur, où le degré plein est ancien. Une telle supposition est contredite par les faits mêmes des langues baltiques: le futur est, dans ces langues, toujours une forme fondée et ne saurait par conséquent avoir joué de rôle déterminant dans l'extension d'un degré apophonique. 399. Cf. Stang (1966, p.309), Zinkevicius (LKlG, II, p.85, § 533 sq.), Schmalstieg (2000, p. 69 sq., 276 sq.). Données prussiennes chez Stang (1942, p. 157).
bouillir", inf. virti (ind. prés. 1re sg. vérdu, 3 e p. vérda, 1re pl. vérdame) ; lett. vçfd "il bout, fait bouillir", inf. vif! (ind. prés.
re
sg. vçfdu, 3
e
p. vçfd, 1re pl. vçfdàm); pas
d'exemple prussien. • thématiques à suffixe *-ia- : lit. ke/ia "il lève", inf. kélti (ind. prés.
r e sg. ke/iù, 3e p. ke/ia, r e pl. ke/iame) ; lett. per
ou pèr "il frappe", inf. pèrt (ind. prés. 1re sg. peru ou peru ,
294
Catégorie du temps e
3 p. per ou pèr, 1Te pl. peràm
Catégorie du temps
OU
peràm) ; v. pr. etwiërpei
/ vergibt "il pardonne", III, 45 2 1, inf. etwiërpt / vergeben "pardonner", III, 55 11 (ind. prés.
re
sg. etwerpe / vergebe,
III, 71 18 , 3 e p. etwiërpei / vergibt,
r
e
pl. etwërpimai
/ verlassen, III, 53 21 ). met une
chaussure", inf. auti (ind. prés. 1Te sg. aunù, 3 e p. auna, 1Te pl. auname); lett. aûn
OU
aût (ind. prés. 1Te sg. aûnu OU
aûj "il met une chaussure", inf. OU
aûju, 3e p. aûn
OU
aûj, 1Te pl.
aûjàm) ; v. pro pogaunai / empfange "il reçoit",
III, 77 9 , inf. pogaiit / empfahen "recevoir", III, 53 7 (ind. prés. 3 e p. pogaunai / empfange, 1Te pl. pogaunimai /
nykti (ind. prés. 1Te sg. nykstù, 3e p. nyksta, 1Te pl. nykstame) ; lett. nikst "il végète", inf. nikt (ind. prés. 1Te sg.
r
e
pl. nikstàm);
< *pret-sta-,
V.
pr. *-presta "il
issprestun
inf.
/ uerstehen
"comprendre" < *pret-tun-, III, 113 13 (cf. ind. prés. 1Te pl.
e
(1 Te sg. viriau < *-ë-u, 3 p. viré < *-ë-(t),
r
e
pl. viréme < *-ë-me-).
est attesté par exemple dans les formes suivantes : - v. pro 3 e p. prowela / verraten wardt "il trahit, trompa" (I, 13 4 , II, 13 4), recouvre sans doute *pra-vil-ii (cf. part.prawilts / verrathen "trahi, trompé", III, 75Ü. e
- v. pro 3 p. timauts / brachs "il brisa" (III, 75 3 ), limatz (I, 13 6),
/ymuczt (II, 13 6). e
pro 3 p. kura / bawet "il créa" (III, 101 Is ).
- v. pr. 3 p. dinkowatz / dancket "il remercia" (l, 13 s), dinkowatz (I, 13 14), dïnkauts (III, 75 3), dinkauts (III, 75 8), dinkautzt (III, 13 s),
dinkauczt (II, 13 14). - V.
e
pro laipinna / gebot 'j'ordonnai", 3 p. employée avec un sens
de 1Te sg. (III, 105 9, cf. part. prét. passif enlaipints / befoh/en "ordonné", III, 111 9).
poprestemmai / tuelen "nous comprenons", III, 65 22 ),
Quant au prétérit en *-ë-, il se rencontre par exemple dans les formes
• thématiques à infixe nasal et *-a- : lit. kriflta "il tombe",
suivantes:
inf. kristi (ind. prés. 1Te sg. krintù, 3 e p. kriiita, 1Te pl.
- V.
pro weddëdin / bracht sie "il la conduisit" (III, 101 17 ).
kriiitame) ; lett. krit "il tombe", inf. krist (ind. prés. 1Te sg.
- V.
pro ismigë / entschlieff "il s'endormit" (III, 101 13 , cf. part. prét.
e
kritu, 3 p. krit, 1Te pl. kritàm) ;
V.
pro polïnka / bleibet "il
reste", III, 97]2, inf. po/iiikt / b/eiben, III, 115 s' Quant aux formations de prétérit, elles ne sont qu'au nombre de deux en baitique400
- (b) prétérit à suffixe *-ë- : lit. viré "il bouillit, fit bouillir"
e
• thématiques à suffixe *-sta- : lit. nyksta "il disparaît", inf.
comprend"
e
(1 Te sg. sukau < *-ii-u, 3 p. sùko < *-ii-(t), 1Te pl. sùkome < *-ii-me)
- V.
entpfangen, III, 111 12).
nikstu, 3 e p. nikst,
- (a) prétérit à suffixe *-a- : lit. sùko "il tourna"
Ces deux formations se retrouvent en vieux prussien401 . Le prétérit en *-ii-
• thématiques à suffixe *-na-: lit. auna "il
aûnàm
295
:
400. Cf. Endzelïns (1923, p.666, § 679), Stang (1942, p. 188; 1966, p. 19, 374), Kazlauskas (1968, p.336 sq.), Zinkevicius (LKlG, Il, p. 107, § 563 sq.). Une exception à signaler: un ancien aoriste athématique survit dans le prétérit du verbe "être" en vieux lituanien bUi "il fut" et, encore récemment, en lituanien dialectal bit (à Zietela, en Biélorussie). Ce qui montre que ce type n'était plus vivant en baltique, c'est le fait que cette ancienne fonne prétéritale
enmigguns / gesch/affen "endormi", III, 81 22). - V.
pro pertraüki / schloj3...zu "couvrit" (III, lüb4).
En letton modeme4oz , le prétérit en *-ii- s'est imposé dans tous les verbes au détriment du prétérit en *-ë-, d'où par ex. lett. bêga "il courut"
a reçu une désinence primaire *-ti, au lieu de la désinence secondaire *-t ancienne. 401. Données chez Stang (1942, p. 199-201; 1966, p.375-376), Endzelïns (1943, p. 116-119 § 239-241 =DI, IV2, p. 143-147; 1944, p.177-178, § 239241), Kazlauskas (1968, p. 345). Cf. aussi Bezzenberger (1907, p. 106-109).
296
Catégorie du temps
Catégorie du temps
(= lit. bego), lett. pirka "il acheta" (= lit. pifko), mais aussi leU. veda "il conduisit" (:;t: lit. vedé), leU. meta "il jeta" (t: lit. meté). Plusieurs indices
L'origine des suffixes de prétérit en baltique a donné lieu à une littérature considérable405 . Si l'on néglige les théories anciennes et
montrent que cette généralisation est un fait récent et qu'à une date
largement périmées de Schleicher (1856, p.224) et de Kurschat (1876,
ancienne, le prétérit en *-e- était encore vivant en letton. Dans les vieux
§ 1076), qui tiraient par exemple le lituanien
textes du :XVIIe siècle, on rencontre encore des fonnes de prétérit à suffixe
phonétiquement impossible, la première étude scientifique consacrée au
*-e-, par ex. vede "il conduisit" (cf. EIger, 1640: wœdde, 36, 1. 28,
prétérit baltique est celle de Wiedemann (1891), qui part de deux
wedde, 43, 1. 29, atwedde, 47, 1. 21)403. Des prétérits en *-e- apparaissent
formations préhistoriques *-ë- et *-ii-. Un peu plus tard, dans sa grammaire
encore dans quelques dialectes modernes. Une liste s'en trouve par exemple
comparée des langues celtiques, Pedersen (1909, II, p.354) proposait
dans un article d'Endzelfns (1909, p. 9-31 = DI, II, p. 98-120): on peut
d'identifier ces deux formations baltiques aux formations d' inj onctif en
citer notamment lett. dia1. mete, mçt'a, mat'a "il jeta" (= lit. meté), en
celtique, formations qui se retrouvent en latin (lat. amëmus et scrïbiimus).
regard du letton standard meta, ou encore lett. dia1. vede "il conduisit" (= lit. vedé), en regard du letton standard veda404 . La langue standard,
Cette hypothèse a été prolongée par Benveniste (1951, p. 11-20), qui a analysé le suffixe prétérital *-ii- comme une ancienne formation d'optatif; à
enfin, conserve elle-même indirectement la trace des anciens prétérits en
l'inverse, Safarewicz (1954, p. 103) a soutenu la primauté de la valeur
*-ë- à travers deux traits phonétiques. Dans certains prétérits, le suffixe *-à-
prétéritale sur celle d'optatif. Une autre théorie, défendue d'abord par Rirt,
s'accompagne d'une palatalisation de la consonne antécédente, phénomène
puis plus largement par Sandbach (1930), consiste à relier la genèse des
qui ne peut s'expliquer que par l'ancien suffixe *-e- ultérieurement
formations en *-ë- et *-ii- à l'existence de bases dissyllabiques en indo-
e
297
-0
de *-aja, ce qui est
remplacé par *-à-, par ex. lett. nàkt "venir", ind. prét. 3 p. nàca (qui
européen (type *CeR-ë-, *CeR-ii-)406 ; cette théorie n'est plus guère défen-
suppose un plus ancien *niic-e). Deuxième fait significatif: dans certains
dable aujourd'hui, du fait des acquis apportés à la fois par la théorie des
verbes, la voyelle radicale *e conserve sa variante phonétique fennée au
laryngales et par la théorie benvenistienne de la racine. Actuellement, la
prétérit, ce qui suppose que la syllabe suivante comprenait une voyelle
plupart des savants admettent que le prétérit baltique en *-ii- doit être mis
e
*-ii-
d'avant, en l'occurrence *-e-, par ex. lett. degt "brûler", ind. prét. 3 p.
en rapport avec une formation de prétérit indo-européen en
dega (qui suppose un ancien *deg-e, car *deg-ii aurait dû donner tdçg-a).
ailleurs (type de l'imparfait lat. eram)407, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une
Ces différents indices permettent donc de supposer que le prétérit en *-ë-
fonnation héritée. Sur le type baltique en *-ë-, en revanche, les analyses
attesté
était encore régulier à date ancienne en letton et que son élimination résulte d'un processus secondaire, réalisé seulement à une date récente.
402. Surie prétérit en letton, voir Endzelïns (1909, p. 1-41 = DI, II, p. 90130, en particulier p. 7-37, cf. aussi 1923, p.668-671, § 681), Schmid (19671968, p. 116-122). 403. Exemples cités d',après l'édition de Dravips (1961). Des fonnes comparables se rencontrent chez Mancels (milieu du XVIIe siècle), cf. Ozols (1965, p. 185-186). 404. Voir quelques autres données dialectales chez Rudzïte (1964, p. 136137 sur le vidus dialekts, et p. 367-370 sur l'augszemnieku dialekts).
405. Présentation du problème: Stang (1966, p. 383-386 sur *-ii- ; p. 386391 sur *-ë-), Schmalstieg (2000, p. 276-283). 406. Analyse comparable chez Kurylowicz (1956, p. 131, note 35). 407. En ce sens, par exemple, Leumann (1957, p.157-159), Stang (1966, p. !83-384), Erhart (1984, p. 215). La comparaison du prétérit tokharien, qui p~~s~?te un morphème tokharien commun *-ii- (type tokh. A sal, B sala, prét. de kal- conduire, apporter"), est à rejeter: Pinault (1989, p. 147) reconstruit un tokharien commun *siilii < *kel-a-t < *kélhj-t (cf lit. kélti "lever"); dans cette ~er~pective, la finale *-ii- du prétérit tokharien n'est pas un morphème In~ependant, mais est issu des bases dissyllabiques. Sur le prétérit tokharien, VOir aussi Jasanoff (1983, p. 55-62). Une telle analyse est impossible pour le baltique.
298
Catégorie du temps
299
Catégorie du temps
divergent. Certains savants408 le relient à la formation stative en *-ë-
Dans l'évaluation indo-européenne des suffixes du prétérit baltique, une
connue en baltique même dans le type lit. sédéti "être assis" (cf. aussi lit.
difficulté est posée par leur intonation douce, prouvée par l'absence d'effet
minéti "penser" comparé au grec Èl-lclVllV, aoriste de ~alVOl-laL
"être
des lois de Saussure et de Leskien: les formes lit. sùk-o "il tourna" et
fou"); ils appliquent la même analyse à l'imparfait slave (type v. sI.
véd-é "il conduisit", par exemple, ne peuvent provenir de prototypes
D'autres4lO
estiment que le suffixe *-ë- est
*sùk-â-(t), ou *vèd-ê-(t}, qui auraient dû donner régulièrement *sukâ > lit.
l'aboutissement modifié de la voyelle thématique dans l'aoriste thématique
tsukà, et *vedê> lit. tvedè, et par conséquent les suffixes prétéritaux du
indo-européen (avec allongement *-e- > *-ë- sur le modèle de *-ii- ?).
baltique doivent être reconstruits comme
D'autres, enfin, estiment que *-ë- est, dans certains cas, une variante
priori de les analyser comme des aboutissements de *-ehr ou de *-eh 1-.
phonétique de *-ii-, par exemple en expliquant le prétérit siiké "il dit"
On est alors apparemment contraint de rejeter toute comparaison directe du
comme un reflet de *sak-ijii-(tJ4ll, avec une évolution de *-ijii- en *-ë-,
suffixe baltique *..a- avec le suffixe prétérital indo-européen *-ehr (type lat.
dont l'hypothèse a été faite aussi à propos des thèmes en *-ë- féminins (lit.
eram) et du suffixe baltique *-e- avec le suffixe statif indo-européen *-eh 1-
iëmé "terre" < *-ijii-): cette analyse pourrait permettre de comprendre
(type gr. Èl-lclVllV). Pour résoudre la difficulté, deux hypothèses paraissent
l'apparition d'une palatalisation dans les formes du participe prétérit actif
possibles. La première consiste à supposer que l'intonation douce est
(thème lit. sakius-). Mais elle ne pourrait valoir, à la rigueur, que pour les
ancienne dans la formation en *-ë-, où elle pourrait refléter un degré long
verbes du type sakyti "dire", dans lesquels le thème d'infinitif-aoriste
morphologique (par ex.
pourrait être ainsi ramené à l'unité: d'un prototype *sak-iH-, on pourrait
admettre qu'elle s'est étendue par analogie dans la formation en *-ii-
en effet tirer, d'une part, en position antéconsonantique, l'infinitif sakyti,
« *-eh r ), pour laquelle la reconstruction indo-européenne fait attendre une
d'autre part, en position antévocalique l'indicatif prétérit *sak-iH-ii- >
intonation rude. On voit mal, cependant, la motivation de cette analogie:
Hec1>aX'b / nes-e-ax'b)409.
siik-~ 12.
*-a-
et
*-e-,
*-e-, allongement de *-e-) ; en
ce qui interdit a
ce cas, il faudrait
Mais, il n'est pas possible de faire la même
la proximité des deux types morphologiques devait-elle nécessairement
analyse à propos de formes comme lit. vëd-é "il conduisit" (: thème de
entraîner un rapprochement de leurs formes? Une autre hypothèse serait
présent thématique *veda-), à moins d'admettre une extension analogique
d'admettre que l'intonation douce reflète une contraction ancienne des
qui n'est appuyée par aucun fait.
suffixes prétéritaux avec la voyelle thématique (par exemple, à un niveau
*sak-ijii- > lit.
indo-européen, *-eh2e- > *-a-, ou, à un niveau baltique, *-â-a > *-a) ; cette hypothèse, défendue notamment par Sandbach (1930, p. 71, § 34), revient 408. Notamment Wiedemann (1891, p. 187), Otrçbski (GJL, III, p. 211-212), Leumann (1957, p.159), K011n (1969, p.55), Mathiassen (1974, p.68), Stepanov (1981, p. 120-121). Analyse prudente en ce sens aussi chez Stang (1966, p. 386-387). 409. Sur l'imparfait slave, voir notamment Vaillant (1938, p.5-30), Stang (1942, p.81-85). 410. Notamment Erhart (1961), Schmalstieg (1961; 1965, p. 123-126; 1974, p. 160). Cf. Erhart (1984, p. 216). 411. En ce sens, par exemple, Jasanoff (1983, p. 54). 412. Le letton a refait le prétérit sur le thème d'infinitif lett. sacfja sur sadt "dire".
à mettre en doute l'existence d'une conjugaison semi-thématique dans le
prétérit baltique. La reconstruction des suffixes du prétérit baltique n'est donc pas sûre. Ce qui importe, en réalité, n'est pas tant le matériel linguistique qui a servi à marquer le prétérit en baltique que le système dans lequel il s'est installé et en particulier les formations indo-européennes qu'il a remplacées. Dans cette perspective, la question de l'apophonie radicale apparaît centrale, car il est possible qu'elle puisse nous renseigner sur l'origine des prétérits baltiques.
Catégorie du temps
300
301
Catégorie du temps
Une théorie traditionnelle enseigne qu'à l'origine, la distribution des
de présent, mais également de la structure du radical. Dans les verbes semi-
*-e- était liée à l'opposition des diathèses
thématiques, la formation du prétérit est à peu près toujours prévisible à
(diathèse intransitive, vs. transitive)413. Il est vrai qu'en lituanien, par
partir de celle du présent. Les verbes semi-thématiques à suffixe *-a- à
exemple, de nombreux prétérits en *-0- sont intransitifs, en particulier ceux
l'indicatif présent ont généralement le prétérit en
suffixes prétéritaux *-0- et
qui sont associés à des présents à infixe nasal ou à suffixe -sta- (type lit.
modification de leur radical (type lit. prés. sok-o
~
*-e- sans aucune
prét. sak-é, de salo/-ti
birti "se disperser", ind. prét. biro); ils s'opposent souvent à des prétérits
"dire"); un petit nombre seulement a un prétérit en *-0- précédé d'un
en *-e- dans les verbes transitifs correspondants (type lit. befti "disperser",
suffixe *-aj-, toujours sans aucune modification apophonique du radical
ind. prét. béré). Il est indéniable qu'une tendance a existé à utiliser la
(type lit. prés. bij-o
distinction des deux types de prétérit pour marquer l'opposition des
sarg-a ~ prét. sarg-âj-a, de sargâ-t "garder"). Les verbes semi-thématiques
diathèses. Mais cette tendance a peu de chances d'être ancienne en baltique,
à suffixe *-i- à l'indicatif présent ont régulièrement un prétérit en *-a-
et l'on ne saurait la transposer dans une préhistoire trop reculée, par
précédé d'un suffixe *-ej-, sans modification apophonique du radical (type
exemple en supposant, comme le fait Klingenschmitt (1982, p. 3-5), que le
lit. prés. séd-i ~ prét. séd-ej-o, de séde-ti "être assis"). On observe donc
*-e- représente la voix active, le prétérit en *-0- la voix moyenne
que l'opposition du présent et du prétérit dans les verbes semi-thématiques
prétérit en
de l'indo-européen. Car de nombreux prétérits en *-a- sont transitifs (par
~
prét. bij-oj-o, de bijo-ti "craindre", cf. lett. prés.
est régulière en lituanien et peut se définir dans les termes suivants :
ex. lit. sùkti "tourner", trans., ind. prét. sùko), et plusieurs prétérits en *-ë.
- le suffixe du prétérit est *-e- sauf là où il est précédé d'un yod ; en
sont, au moins synchroniquement, intransitifs (par ex. lit. gimti "naître",
ce cas, on a *-a- (-oj-o et -éj-o).
ind. prét. gimé). Cette tendance à lier type de prétérit et diathèse verbale a
- aucune apophonie radicale n'est observée entre le présent et le
pu être suscitée, d'une part, par l'association constante du prétérit en *-0-
prétérit.
avec les formations intransitives à infixe nasal et à suffixe *-sta-, d'autre part, par l'association elle aussi constante du prétérit en
*-e- avec les
formations transitives en *-ia- qui leur répondent.
Les verbes thématiques, en revanche, posent des problèmes complexes, qui touchent à la fois à la distribution des suffixes de prétérit (* -0- ou *-e-) et au problème de l'apophonie radicale. Pour les verbes radicaux
III. RAPPORT DES THÈMES DE PRÉSENT ET DES THÈMES DE
thématiques, W. P. Schmid (1966-1967, p. 286-296) a défini une série de
PRÉTÉRIT
règles qui permettent de prévoir assez précisément le prétérit d'après le présent414 . L'ensemble de ces règles peut être formalisé de la manière
Dans deux articles remarquables (1966-1967, p. 286-296 et 1967-1968,
suivante (cf. Schmid, 1966-1967, p. 291) :
p. 116-122), W. P. Schmid a prouvé que le rapport entre les formations de présent et les formations de prétérit obéissait, en lituanien, à quelques règles simples et dépendait en majeure partie non seulement de la formation 413. Cf. Stang (1942, p. 189) : "-a- hat das Intransitive, -ë- das Transitive bezeichnet". Voir aussi Stang (1966, p.376-378), Kazlauskas (1968, p.363), K011n (1969, p. 33), Rasmussen (1986, p. 441-442). Présentation de cette tendance chez Petit (1998, p. 278-279).
414. Symboles utilisés: C = occlusive ou sifflante, R = sonante, V = voyelle autre que e et a. Je modifie parfois assez sensiblement la présentation faite par Schmid des données linguistiques, ainsi que leur notation, adaptée à des lecteurs francophones. Voir aussi Kaukiené (1994, p. 89).
302
Catégorie du temps
VOYELLE RADICALE AU PRÉSENT
303
Catégorie du temps
C2~R
C2 == R, 0
Ce type est résiduel en lituanien moderne et concurrencé par d'autres fonnations (ainsi gema par gimsta). Il connaît, en outre, quelques
V=e
(1.) C leC2a ~ CleC2ë
(1.1.) CleRa ~ CIRé
V=a
(2.) ClaC2a ~ ClaC2ë
(2.1.) ClaRa ~ ClaRë
- Exceptions à (1.1.) Présent [CIeR-a] ~ Prétérit [CIR-o] :
V=eR
(3.) CleRC2a ~ CIRC20
(3.1.) CleR0a ~ C1Rao
= (3.1.) Présent [CieR-a] ~Prétérit [CIR-o]
V=R
(4.) CIRC2a ~ C I RC20
(4.1.) CIR0a ~ CIf0ë
• lit. ind. prés. del-a, prét. di/-o (inf. di/-ti "s'user"), mais il existe
V=v
(5.) C lvC2a ~ CIVC20
(5.1.) ClvRa ~ ClvRë ?
aussi un indicatif présent di/sta ou dila; lit. ind. prés. svël-a, prét.
exceptions :
svi/-o (inf. svi/-ti "couver, brûler"), variantes à l'indicatif présent Une comparaison des autres langues baltiques vient confinner, ou contraint à réécrire différemment, certaines de ces règles. On les passera ici
svi/sta, svila ; lit. ind. prés. vej-a, prét. vij-a (inf. ry-ti "1. chasser, 2. tresser"), variante à l'indicatif présent vij-a.
en revue, afin d'identifier au passage les fonnations qui sont liées à une
Pour le letton, les données sont difficiles d'interprétation. Il est impossible
apophonie radicale.
de distinguer en letton littéraire le type [CIeR-a] ~ Prétérit [C1R-ë] (type
- (1.) Présent [C 1eC 2-a] ~ Prétérit [C 1eC 2-é] :
lit. gem-a, prét. gim-é) du type exceptionnel en lituanien [CieR-a]
• par ex. lit. ind. prés. dëg-a, prét. dëg-é (inf. dèg-ti "brûler"), ind.
~Prétérit [CIR-a] (type lit.
prés. sëk-a, prét. sëk-é (inf. sèk-ti "suivre"), ind. prés. vëd-a, prét.
118) admet, dans un premier temps, une distribution ancienne: (a) Présent
vëd-é (inf. vès-ti "conduire")415 .
[CIeR-a] ~ Prétérit [CIR-a] (= type lit. dël-a, prét. di/-a), (b) Présent
Cette règle ne connaît pas d'exceptions en lituanien. Elle paraît également applicable au letton et au vieux prussien. Le vieux letton a par exemple un prétérit vede, et le vieux prussien a weddëdin / bracht sie "il la conduisit" (III, 101 17), cf. aussi part. prét. actif prawedduns / hindurch ge/uert "qui a conduit à travers, qui a fait traverser" (III, 119 18). La règle est donc protobaltique, comme l'a montré Schmid (1967-1968, p. 117); il faut, en ce cas, l'écrire de la manière suivante: Présent [C l eC 2-a] ~ Prétérit [C leC 2-ë]. - (1.1.) Présent [CIeR-a] ~ Prétérit [CIR-é] :
dël-a, prét. di/-a). Schmid (1967-1968, p. 117-
[CIR-a] ~ Prétérit [CIR-ë] (= type lit. min-a, prét. myn-é). Dans un second temps, en se fondant sur la flexion anomale du verbe "prendre" en lituanien (lit. ifhti "prendre", ind. prés. ima, prét. &né) et en letton (lett. fleint "prendre", ind. prés. fl?m, prét. fl?ma, v. lett. flëme), il reconstruit une autre règle de fonnation jugée plus ancienne: Présent [CieR-a] ~ Prétérit [ClëR-ë]. Cette règle me paraît peu vraisemblable, car elle repose sur un seul exemple, qui est synchroniquement irrégulier et doit résulter d'une évolution secondaire. On préférera donc revenir à la première fonnulation de Schmid, qui oppose deux règles de fonnation: d'une part, Présent [CleR-
• par ex. lit. ind. prés. gëm-a, prét. gim-é (inf. gim-ti, gifh-ti
a] ~ Prétérit [CIR-a] (= type lit. del-a, prét. di/-a), d'autre part, Présent
"naître"), ind. prés. gën-a, prét. gin-é (inf. gin-Ii "chasser"), ind.
[CIR-a] ~ Prétérit [CIR-ë]. Les données dialectales du letton confinnent
prés. mën-a, prét. min-é (inf. min-Ii "penser")416.
cette analyse: on trouve constamment un prétérit dzima
«
*gim-ii-) du
verbe dzimt "naître" (= lit. gimti), et aucune trace de tdzëme, qui obéirait à 415. Autres exemples: LKG (II, p. 229, § 319, b). Cf. Sandbach (1930, p.4748), Stang (1942, p. 110-112; 1966, p.331), Kaukienë (1994, p.92-94), Schmalstieg (2000, p. 137-141). 416. Cf. LKG (II, p. 230, § 322).
la règle de Schmid, ni de tdzime (= lit. gim-é). De la même manière, le prétérit de dzit "chasser" (= lit. ginti) est, dans les dialectes lettons,
304
Catégorie du temps
305
Catégorie du temps
seulement dzina ou dzyna, jamais tdzëne, ni tdzine (= lit. gin_é)417. Le
peu significatives:
type lituanien en *-ë- a des chances d'être secondaire. La règle doit donc
< thème factitif dérivé
être reconstruite comme suit: Présent [CIeR-a]
Prétérit [CIR-a]. Cela
(III, 73 2 < thème statif dérivé *-min-ë-ti-), minisnan / gedechtnis
n'implique pas cependant que le type lit. del-a, prét. dil-o en soit un
"souvenir" (II, 15 3, cf. menissnan, l, 13 11 , menisnan, l, 15 4 , II, 13 10_1 I,
prolongement direct: le prétérit en *-a- peut résulter, pour ce type de
pominïsnan / gedechtnis, III, 75 13 , pominisnan, III, 756 < thème statif
verbes, de l'hésitation qu'on observe dans les formes de l'indicatif présent.
dérivé *-min-ë-ti-). Quant au verbe "prendre", il présente, en vieux
-t
Les données prussiennes sont incertaines. Elle ne concernent que deux
V.
pl. menentwey / jUren "donner un nom" (l, 57
*min-in-ti-),
e
auminius / betru bt "troublé, pensif'
prussien, une flexion irrégulière non apophonique : inf. *im-t- (v. pro ïmt
r e sg.
r e pl.
verbes. Le plus clair est v. pro gemton / geberen "enfanter" (III, 105 4 ), qui
/ nemen, III, 99 14), ind. prés. *im-a (v. pro
répond au lituanien gimti et au letton dzimt. On observe, dans ce verbe,
immimai, III, 33 10 , III, 83 16, 2 e pl. immati, III, 115 19), ind. prét. *im-a
une tendance à étendre à l'indicatif prétérit le degré plein propre à l'indicatif
(v. pl. 3e p. imma, III, 75 2, immats, III, 75 7, etc.).
présent (d'où par ex. un participe prétérit actif
V.
pro gemmons / geborn
"né", III, 41 23 ), mais il subsiste plusieurs traces du degré zéro (par ex. part. prét. actif
V.
pro ainangimmusin / eingebornen "née seule", III, 113 24).
Aucune forme d'indicatif n'est attestée dans les textes, si bien qu'on ne sait pas si l'on a affaire au type de prétérit en *-a- ou en *-ë-. L'autre verbe à mentionner est V. pro limtwei / brechen "briser", dont il a été question un peu plus haut4 18 . Sur la base de l'optatif lemlai (III, 51 14), on est amené à reconstruire, à côté de [lim-], un thème [lem-], qui était sans doute à l'origine propre à l'indicatif présent, mais est passé secondairement à l'infinitif (peut-être lembtwey, l, 5 17), puis à l'optatif qui en dérive. Reste le problème du prétérit timauts (III, 75 3), qui a peu de chances, à mes yeux, de supposer un thème à voyelle longue [lëm-] ou [lfm-] : probablement, il doit s'agir d'une forme externe à la flexion primaire du verbe /imtwei "briser" (peut-être appartenant à un verbe dérivé
*llm-a-ti-),
ou, plus
simplement peut-être, d'une faute isolée pour */im-a-ts. Enfin, on signalera que, de la famille du lituanien mifiti "penser" (ind. prés. mëna, prét. miné), le vieux prussien n'a que quelques formes verbales ou nominales dérivées 417. Endzelïns (1909, p. 12 = DI, II, p. 101) cite un seul exemple dialectal d'une forme dzine, qu'il considère comme "fehlerhaft". Peut-être s'agit-il d'une contamination ponctuelle du prétérit du verbe dzit "chasser" (= lit. gifiti) avec celui d'un autre verbe *dzft "défendre" (= lit. ginti, prét. gyné), cf. aussi lett. dia!. dieiflu, qui correspond peut-être selon Endzelïns au lit. gYniau. 418. Cf. p. 258-261.
imma, III, 107 15 ,
- (2.) Présent [C1aCra] -tPrétérit [C 1aC 2-ë] : • par ex. lit. ind. prés. kas-a, prét. kiis-é (inf. kàs-ti "creuser"), lit. ind. prés. plak-a, prét. plak-é (inf. plàk-ti "frapper")419. Le letton a pratiquement éliminé ce type de verbes, en les faisant passer, à l'indicatif présent, soit au type suffixé en *-ia, soit au type à infixe nasal. Dans les deux cas, ces verbes ont un prétérit en *-a-, même dans les dialectes qui conservent par ailleurs des traces régulières du prétérit en *-ë-. En regard du lituanien kàs-ti "creuser" (ind. prés. kas-a, ind. prét. kiis-é), le correspondant letton kast a, dans l'ensemble des dialectes, un indicatif présent kas « *kas-ia) et un indicatif prétérit kasa « *kas-ii)420. Au lituanien làk-ti "lécher" (ind. prés. lak-a, ind. prét. lak-é), répond le letton
lakt "lécher" (ind. prés. lùok < *lanka, ind. prét. laka); de même, au lituanien ràk-ti "creuser" (ind. prés. rak-a, ind. prét. rak-é), répond le letton rakt "creuser" (ind. prés. rùok < *ranka, ind. prét. raka). On notera 419. Exemples: LKG (II, p. 229, § 319, a). Cf. aussi Stang (1966, p.333), Kaukienë (1994, p. 30-37,99-101). 420. Endzelîns (1909, p.21 = DI, II, p. 110). Le même passage au type en *-ia s'observe sporadiquement en lituanien. Un exemple probable est lit. iàgti "salir, rendre impur" (ind. prés. iZigia, ind. prét. iagé, cf. LKZ, xx, p. 64-67), auquel correspond, en letton, zagt "voler, dérober" (ind. prés. zùog < *zanga, ind. prét. zaga). Il faut poser, à l'origine, un verbe *iagti (ind. prés. *iaga, attesté dialectalement en lituanien iéiga, ind. prét. *iagZi, lit. dia!. iago), diversement refait dans les dialectes lituaniens et en letton. Voir, sur ce verbe, Kaukienë (1994, p. 33).
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Catégorie du temps
qu'en regard du lituanien plàk-ti "frapper" (ind. prés. pliik-a, ind. prét.
- (3.) Présent [C 1eRC 2-a] ~ Prétérit [ClRCI-o] :
plak-é), le letton a plakt "s'aplatir, s'amoindrir" (ind. prés. plùok
• par ex. lit. ind. prés. pefk-a, prét. pifk-o (inf. pifk-ti "acheter"),
< *planka, ind. prét. plaka), avec une diathèse intransitive liée au type à
lit. ind. prés. keihs-a, prét. kiihs-o (inf. kiihs-ti "fourrer, farcir"), ind.
infixe nasal. Dans tous ces verbes lettons, le prétérit est en *-a-, et l'on
prés. verk-a, prét. vilk-o (inf. virk-ti "tirer"), ind. prés. liëk-a, prét.
n'observe aucune apophonie radicale. Pour le proto-baltique, la règle de
lik-o (inf. lik-ti "laisser")425 .
formation doit vraisemblablement être réécrite de la manière suivante: Présent [C laC 2-a] ~ Prétérit [C laC 2-a]421.
Ce type est régulier en lituanien. Cependant, une tendance a pu exister à éliminer l'apophonie radicale qu'il impliquait, en généralisant le degré
- (2.1.) Présent [ClaR-a] ~ Prétérit [ClaR-el :
vocalique propre au prétérit (et à l'infinitif)426. Ce nivellement caractérise
• par ex. lit. ind. prés. bar-a, prét. bar-é (inf. bar-ti "quereller"), lit.
notamment le dialecte lituanien de Zietela, en Biélorussie (Sud du haut-
ind. prés. kal-a, prét. kiil-é (inf. kal-ti "forger")422.
lituanien du Sud), où l'on trouve régulièrement des formes comme pifka
Les verbes de structure [ClaR-a] obéissent, en lituanien standard, à la
"il achète" (au lieu de pefka) d'après le prétérit pifko, rifika "il rassemble"
même règle de formation que les verbes de structure [ClaC2-a] : ils ont
(au lieu de refika) d'après rifiko, lika "il laisse" (au lieu de liëka) d'après
régulièrement un prétérit en -é et ne manifestent aucune apophonie radicale. Cependant, dans de nombreux dialectes lituaniens, ils ont un prétérit en
liko, et de même gima "il naît" (au lieu de gëma) d'après gimé, vija "il chasse" (au lieu de vêja) d'après vijo, etc. 427 . La même innovation se
-0: en bas-lituanien, par exemple, on a baro au lieu de biiré à Kretinga,
rencontre sporadiquement dans quelques textes anciens, notamment
dans
e
Kuliai, Luoke (bas-lituanien du Nord), ainsi qu'à Pagramantis (bas-
les écrits de Sirvydas (XVU siècle, dialecte haut-lituanien de l'Est). On
lituanien du Sud)423. L'antiquité de ces formes dialectales est confirmée
relève, par exemple, dans son Dictionarium trium linguarum (DTL
par le letton, qui a constamment dans ces verbes un prétérit en *-a-, même
pirku "j'achète", DTL 3
3
,
3
):
142 (: lit. standard perkù), kirpu "je coupe", 3
dans les dialectes qui conservent le prétérit en *-ë-, par ex. lett. dial. bart
DTL , 426 (: lit. standard kerpù), pirj3u "je marie", DTL , 58 (lit. standard
"quereller" (ind. prés. bar, ind. prét. bara). Mais, en letton, le type a
persù)428. À l'inverse, certains dialectes ont tendance à étendre le modèle
tendance à s'assimiler au type en *-ia (type lit. karti "pendre", ind. prés.
du type pifkti - pefka - pifko à d'autres verbes, notamment aux verbes à
karia, prét. k6ré), d'où des formes palatalisées au présent, et une variation
infixe nasal, dans lesquels, à l'origine, il n'y avait pas d'apophonie
apophonique au prétérit: lett. standard bart "quereller" (ind. prés. bàr ou
radicale: de là des formes comme snefiga, au lieu de snifiga "il neige" (inf.
bàr < *baria, prét. biira < *bara)424. Il semble que la règle proto-baltique
snigti, ind. prét. snigo), ou leihpa, au lieu de liihpa "il colle" (inf. lipti,
ait été: Présent [ClaR-a] ~ Prétérit [ClaR-a]. 421. En ce sens, Schmid (1967-1968, p. 119). 422. Exemples: LKO (II, p.229, § 319, a). Cf aussi Stang (1942, p. 106· 107; 1966, p. 333), Kaukienè (1994, p. 30-37, 98-99). 423. Zinkevicius (1966, p. 355, § 653). Cf. aussi Stang (1942, p. 107), LKG (II, p. 135, § 196). 424. Autres exemples chez Endzelrns (1909, p. 21 = DI, II, p. 110). La même innovation a eu lieu dans le dialecte lituanien de Lazünai (Biélorussie): prét. boré (: lit. standard baré) de barti "quereller", k6lé (: lit. standard kâlé) de
kalfi "frapper, marteler", m61é (: lit. standard malé) de malti "moudre", cf Zinkevicius (1986, p. 75). 425. Autres exemples de ce type: LKG (II, p.220-221, § 300). Exemples lettons chez Forssman (2001, p. 165). Cf aussi Sandbach (1930, p.42-43), Stang (1942, p. 108-110, 1966, p. 331-332), Kurylowicz (1956, p. 215), Schmalstieg (2000, p. 142-143). 426. Sur cette innovation, cf. notamment Morkünas (1967, p. 172-173). 427. Zinkevicius (1966, p. 338, § 597). 428. Données plus complètes: Morkünas (1967, p. 172).
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Catégorie du temps
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ind. prét. lipo), attestées par exemple dans le dialecte de Linkmenys (haut-
avec *rinka au lieu de *renka (: lit. refika "il rassemble") d'après le
lituanien de l'Est)429. En letton, le schéma ancien est encore régulièrement
prétérit *rinkii (: lit.
attesté dans les radicaux à liquide et à nasale -m- : lett. pirkt "acheter", ind.
apophonique pourrait être l'impératif kyrteis / slo "frappe !", attesté chez
prés. pçrk, prét. pirka (= lit. pifkti "acheter", ind. prés. pefka, prét.
Grunau (GrA78 , GrF 77). Il paraît reposer sur un indicatif présent *kirta (au
pifko); lett. cirpt "couper", ind. prés. cçrp, prét. cirpa (= lit. kifpti
lieu de *kerta, lit. kefta "il frappe, coupe"), sans doute d'après le prétérit
v~lk,
*kirta (: lit. kifto )433. Il semble donc que le vieux prussien ait eu tendance à éliminer l'apophonie radicale dans ce type de verbes 434 . Un vestige
"couper", ind. prés. kefpa, prét. kifpo) ; lett. vi/kt "tirer", ind. prés.
prét. vi/ka (= lit. virkti "tirer", ind. prés. verka, prét. vifko); lett. krimst kr~mt,
rifiko)432.
Un autre exemple de nivellement
prét. krimta (= lit. krimsti "mâcher", ind. prés.
d'apophonie pourrait être suggéré par le rapprochement de l'impératif
kremta, prét. krifhto). Dans les radicaux à nasale -n-, du fait de l'altération
présent trencke / stos an "frappe!" (cf. Maziulis, PKEZ, IV, p. 198), qui
des diphtongues tautosyllabiques [en] et [in] en letton (> [ie] et [i]),
semble supposer un radical [trenk-], et du participe prétérit passif
l'alternance a été en général éliminée par une modification du type
pertrincktan / verstockten "obstiné" (III, 119 15 ) qui semble supposer un
morphologique: comparer, par exemple, lit. slifikti "passer, couler" (ind.
radical [trink-] ; on rapprocherait alors la flexion du lituanien dialectal
prés. slefika, prét. slifiko) et lett. slikt "couler, se noyer" < *slinkti (ind.
trifikti "battre, laver la laine" (ind. prés. trefika, prét. trifiko), en regard du
prés. slikst < *slinksta, prét. slika < *slinka). Une trace de l'ancienne
lituanien standard trefikti "battre, frapper"
alternance se trouve encore dans le letton list "entrer dans" « *lind-ti),
trefiké)435. Quant au type résiduel à alternance < ei / i > (::::: lit. < ie / i >,
"mâcher", ind. prés.
ind. prés. lied
« *lend-a)
ou lien
« *lend-na),
prét. lida
« *Und-a),
en
(ind. prés. trefikia, prét.
auquel se rattache, en synchronie, lit. ind. prés. lieka, prét. liko), il survit
regard du lituanien lfsti "entrer dans" < *lind-ti (ind. prés. lefida, prét.
lifido). Quant au type lit. likti "laisser" (ind. prés. lieka, prét. liko), qui présente apparemment une alternance comparable (apophonie < ie / i >, analysable comme < ei / i >, de même nature que l'apophonie < en / in > issue de < en /
Q.
»430, il se retrouve également en letton, où il est tout
aussi résiduel: lett. likt "mettre, poser" (ind. prés. liek, prét. lika), s1cist "penser" (ind. prés. sÎJiet, prét. s1cita)43I. En vieux prussien, le type pifkti
- pefka - pifko est mal attesté. L'apophonie radicale paraît avoir été nivelée dans l'indicatif présent senrlnka / samlet "il rassemble" (III, 4516)'
429. Cf. Zinkevicius (1966, p. 338-339, § 597). 430. Voir une description de ce type chez Sandbach (1930, p.41-42), Stang (1942, p. 107-108). Outre lit. likti "laisser" (ind. prés. /ieka, prét. liko), on ~e.ut citer lit. dial. snigti "neiger" (ind. prés. dial. sniega, prét. snigo), 1ett. S"t lsf "penser" (ind. prés. Slciet, prét. s~ita). 431. En letton, du fait de l'évolution de [en] en [ie], certains verbes à infi~e nasal se sont identifiés à ce type: 1ett. strigt "couler" (ind. prés. strieg, preto striga, cf. lit. striiiga, strigo). Cf. Stang (1942, p. 110).
432. En ce sens, Mafiulis (PKEZ, IV, p. 100-101). Mais on pourrait aussi admettre une évolution phonétique *-renka > *-rinka (règle "swints", cf. Smoczynski, 2000a, p. 13). 433. Le degré plein du radical est attesté, en vieux prussien, dans le dérivé kersle / sulaxe "hache émoussée" (E 534), cf. lit. dial. kefslas, auquel correspond, en lituanien littéraire, kifslas, refait d'après l'infinitif kifsti. Cf. Maziulis (PKEZ, II, p. 176-177). 434. Un dernier cas possible, quoique douteux, de nivellement apophonique pourrait être éventuellement le verbe powiërpt /lassen "laisser" (radical [verp-]), qui présente un degré radical *e dans l'ensemble du paradigme, à l'indicatif présent (par ex. impér. 2 e pl. powiërptei / lasset "laissez", III, 9522) et à l'indicatif prétérit (par ex. part. prét. actif powiërpuns / verlassen "qui a laissé", III, 10122), mais pour lequel il existe également quelques vestiges d'un degré zéro dans des dérivés (par ex. powïrps / frey "homme libre", III, 95 18) : a-t-on le droit de voir là une trace d'une ancienne flexion apophonique (ind. prés. *verp-a, prét. *virp-ii), concurrente de la flexion non apophonique (ind. prés. *verp-ia, prét. *verp-ë), qui est seule attestée dans les langues baltiques? L'exemple est très fragile. Cf. p. 261. 435. En ce sens, Mafiulis (PKEZ, III, p.274). L'exemple est cependant douteux, parce qu'une graphie [inC] dans le Ille Catéchisme pourrait recouvrir aussi bien un ancien [inC] qu'un ancien [enC], en vertu de la règle "swints" (Smoczynski, 2000a, p. 13-25).
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Catégorie du temps
Catégorie du temps
probablement à travers quelques vestiges en vieux prussien. Le contraste
vocalique *e de l'indicatif présent *meig-ti semble s'être introduit dans
< reis- / ris- > qui oppose l'infinitif perreist / verbinden "attacher" (Ill,
l'infinitif (d'où *meig-ti- au lieu de *mig-ti-), probablement en raison de
89z) et le participe prétérit passif senrists / verbunden "attaché" (III, 599)
l'homophonie de deux fonnes ; le prétérit est en *-ë- (v. pro ismigê), sans
pourrait refléter un ancien paradigme alternant: inf. *ris-ti-, ind. prés.
doute secondairement43 8 • D'une manière générale, la tendance s'est exercée
*reis-a, prét. *ris-ii. Dans cette analyse, le lituanien aurait innové en
dans toutes les langues baltiques à éliminer le type apophonique < eiC / iC
généralisant le thème faible (lit. rifti "attacher", ind. prés. rifa, prét. rifo),
> (lit. liëka - liko), alors même que le type < erC / irC > (lit. pefka
comme aussi le letton (lett. rist "attacher", ind. prés. ris, prét. risa), qui
- pifko) demeurait vivant. Dans son ensemble, cependant, l'alternance est
conserve, cependant, une trace dialectale du thème fort (lett. dial. riest
ancienne, quelle qu'en ait été l'évolution dans les diverses langues
"attacher", ind. prés. rief < *reis-ia, prét. riesa)436. Un autre vestige du
baltiques. Pour le proto-baltique, on doit reconstruire une règle : Présent
type /ieka -
[C1eRCz-a] ~ Prétérit [CIRCz-a].
liko en vieux prussien pourrait être le verbe "dormir", qui
présente peut-être un degré radical *e dans l'infinitif meicte / schlaffen (GrG34, GrGS9, GrFS9 < *meig-ti-) et un degré radical zéro dans l'indicatif prétérit ismige / entschlieff "il s'endormit" (III, 101 13 < *-mig-e-) et le participe prétérit actif enmigguns / geschlaffen "qui a dormi" (III, 8 hz
311
- (4.) Présent [CIRCz-a] ~ Prétérit [CIRCz-o] : • par ex. lit. ind. prés. dirb-a, prét. dirb-o (inf. dirb-ti "travailler"), lit. ind. prés. sùk-a, prét. sùk-o (inf. sùk~ti "tourner"), lit. ind. prés.
kif-a, prét. kif-o (inf. kif-ti "fourrer, mettre à l'intérieur")439.
< *-mig-). Selon Maziulis (PKEZ, II, p.45), ce contraste apophonique
pennet de reconstruire une flexion à alternance: ind. prés. athématique
*meig-ti (cf v. lit. miegti "il dort", devenu thématique en lit. modo miega), prét. *mig-ii- (cf lit. prét. migo), parallèle à celle de *liek-ti "laisser" (v. lit. liekti, devenu thématique en lit. modo lieka), prét. *lilca (lit. prét. liko). Le lituanien paraît avoir scindé l'ancien paradigme en deux verbes, d'une part: ind. prés. miega "il dort", prolongement du
V.
lit.
miegti (d'où inf. de type mixte mieg6ti, ind. prét. mieg6jo) ; d'autre part, ind. prét. migo "il s'endormit" (d'où inf. migti, ind. prés. à infixe nasal
miiiga)437. Le letton pourrait avoir conservé plus fidèlement la distribution ancienne ~
dans
migt
"s'endormir",
ind.
prés.
mieg
« *meig-a
athématique *meig-ti), prét. miga « *mig-ii-). En prussien, le degré
Les radicaux en syllabe fermée dont, au présent, la voyelle est la réalisation d'une sonante vocalisée ([ir], [il ou ru]) obéissent, en lituanien, à une règle simple: prétérit en -0, pas d'apophonie radicale. La même règle vaut, sans exceptions, également pour le letton, où l'on a par exemple: lett. rist "rouler", ind. prés. rit, prét. ri/a (= lit. risti "rouler", ind. prés. rita, prét.
rito) ; lett. sukt "tourner", ind. prés. suk, prét. suka (= lit. sùkti "tourner", ind. prés. sùka, prét. sùko) ; lett. skust "raser", ind. prés. skut, prét. skuta (= lit. skùsti "raser", ind. prés. skùta, prét. skùto); cf aussi lett. sist
"frapper, battre", ind. prés. sil, prét. si/a. La règle proto-baltique est donc: Présent [CIRCz-a] ~ Prétérit [CIRCz-a]. - (5.) Présent [C 1vCz-a] ~ Prétérit [C 1vCz-o] : • par ex. lit. ind. prés. bég-a, prét. bég-o (inf. bég-ti "courir"), lit.
436. En ce sens, Stang (1942, p. 114). Autre analyse chez SmoczYfis~i (2000a, p. 146, cf. aussi p. 151, note 225), qui suppose que la graph~e prussienne perrëist recouvre *perrist (= lit. pérristi), donc sans apophonIe radicale. Toutefois, il n'existe aucun bon exemple d'une graphie / ei / pour [i] en vieux prussien. 437. On observe la même coexistence d'un présent athématique et d'un présent à infixe nasal dans le v. lit. liëkti / lifika "laisser", qui a pu servir de modèle à miëgti / mifiga. Cf. aussi v. lit. et lit. dial. sniëgti / snifiga "il neige".
ind. prés. fok-a, prét. fok-o (inf. fok-ti "sauter, danser"), lit. ind. prés. gnyb-a, prét. gnyb-o (inf. gnyb-ti "pincer"), lit. ind. prés.
438. En ce sens, Maziulis (PKEt, II, p. 45). 439. Autres exemples de ce type: LKG (II, p. 220, § 298).
313
Catégorie du temps
Catégorie du temps
312
grûd-a, prét. grûd-o (inf. grûs-ti "broyer, piler"), lit. ind. prés.
• par ex. lit. ind. prés. min-a, prét. myn-é (inf. min-ti "fouler"), lit.
auga, prét. augo (inf. augti "croître")44 0 .
ind. prés. gin-a, prét. gyn-é (inf. gin-fi "défendre"), lit. ind. prés.
La même règle vaut pour les radicaux à voyelle longue ou diphtongue non
pi/-a, prét. pyl-é (inf. pi/-fi "verser, remplir")442.
et ne manifestent pas
Les radicaux en syllabe ouverte dont, au présent, la voyelle est la
d'apophonie radicale. La même situation se retrouve en letton. Exemples:
réalisation d'une sonante vocalisée ([in], [il]) obéissent, en lituanien, dans
leU. bêgt "courir" (ind. prés. b~g, prét. b~ga), lett. sâkt "commencer" (ind.
quelques cas particuliers, à la règle suivante: prétérit en -é, allongement
prés. sâk, prét. sâka), lett. aûgt "croître" (ind. prés. aûg, prét. aûga),
vocalique au prétérit. La règle est pratiquement limitée aux radicaux en [in]
parfois avec quelques altérations secondaires (par exemple le passage au
(lit. minti "fouler", ginfi "défendre", pinti "tresser", skinti "cueillir", tinti
type en *-ia à l'indicatif présent): lett. grûst "broyer, piler" (ind. prés.
"amincir le fil d'une faux", trinti "frotter", Sinti-s "se frotter contre"); il
grûi < *grüd-ia, prét. grûda). Mais il subsiste une exception: le verbe letton nâkt "venir" (ind. prés. nâk) avait, à date ancienne, un prétérit en
existe un seul exemple en [il] (lit. pitti "verser, remplir"). Le letton présente une situation différente443 . Le prétérit de ce type de verbes est
*-e- (v. lett. nâce, chez EIger), dont témoigne, encore aujourd'hui, la
constamment en *-â-, même dans les dialectes qui ont encore des traces du
palatalisation de la consonne finale du radical (lett. niik- -+ nâc-, prét.
prétérit en *-e-, et, par ailleurs, dans la langue standard et dans bon nombre
niica)441. Si l'on néglige cette exception inexplicable, on peut établir, pour
de dialectes, il ne présente pas d'allongement vocalique: lett. mit "fouler"
le letton, la règle suivante, parallèle à celle du lituanien: Présent [C l vC 2-a]
(= lit. minti), ind. prés. min (= lit. mina), prét. mina
apophonique : ils ont en lituanien un prétérit en
-+
-0
Prétérit [C l vC 2-a]. On notera que Schmid (1966-1967, p. 290-291 ;
myna «
*min-a) ;
«
*min-â), dia!.
lett. pît "tresser" (= lit. pinti), ind. prés. pin (= lit.
1967-1968, p. 120-121) distingue deux règles: une règle pour les sonantes
pina), prét. pina « *pin-a), dia!. pyna « *pïn-a); lett. tît "enrouler"
vocalisées (4.) et une règle pour les voyelles longues (5.). Il me semble que
(= lit. tinti), ind. prés. tin (= lit. tina), prét. tina
ces deux règles pourraient être réunies en une seule: Présent [C I VC2-a]
« *tlÏ'l-a). Le vieux prussien fournit peu de données. En regard du
Prétérit [C I VC 2-a], en définissant [V] comme tout phonème vocalique
lituanien trinti "frotter" (ind. prés. trina, prét. tryné), le prussien a une
-+
autre que [e] ou [a]. - (4.1.) Présent [CiRo-a] -+ Prétérit [C l fC 2-ë]:
« *tin-a), dia!. tyna
fonne sémantiquement évoluée trinie / drowet "il menace" (III, 39t, cf. dérivé trinsnan / rach "vengeance", III, 93 1), qu'il faut sans doute lire
*trinia ou *trinija
C* lit.
trina), mais aussi un substantif dérivé trenien
/ drewen "menace" (III, 95 22 ) : l'ensemble pourrait, à la rigueur, s'intégrer dans un paradigme originellement apophonique (inf. *trin-ti-, ind. prés. 440. Autres exemples de ce type: LKG (II, p. 220, § 298). Exemples lettons chez Forssman (2001, p. 167). Cf. aussi Kurylowicz (1956, p. 217). 441. Cf. Endzelïns (1909, p.25 = DI, II, p. 114). Peut-être cette exception unique s'explique-t-elle par l'ambiguïté de la forme d'infinitif, qui peut appartenir ou bien à un verbe en *-a, ou bien à un verbe en *-ia: comparer, par exemple, lett. sâkt "commencer" (ind. prés. sâk < *sëik-a, prét. sâka < *sëik-i!) et lett. màkt "presser" (ind. prés. màc < *mëik-ia, prét. màca < *mëik-ë, refaIt en *-ëi). Descriptivement, le verbe nëikt "ve?ir~' .(ind. prés. nëik, prét. nëica) est intermédiaire entre les deux types. Sur 1 OrIgme de ce verbe, cf. Kortlandt (1994, p. 191-193).
*tren-a, prét.
*trin-â-,
cf. lit. dia!. trena au lieu de trina), paradigme
ultérieurement modifié par passage au type en *-ia ou en *-ija à l'indicatif présent. Mais on gardera quelque réserve sur cet exemple, étant données les
442. Autres exemples de ce type: LKG (II, p. 230, § 321). Cf. Stang (1942, P.115-116). 443. Données lettones: Endzelïns (1909: 12 = DI, II, lOI).
314
315
Catégorie du temps
Catégorie du temps
difficultés d'analyse posées dans le Ille Catéchisme par les graphies / enC /
schmid (1967-1968, p. 117) suppose que l'allongement de la voyelle
et / inC /. Le cas du verbe v. pro *stin-twei "souffrir" est tout aussi
radicale au prétérit va toujours de pair avec un prétérit en *-e-. Il reconstruit
incertain: on ne trouve qu'un participe prétérit stïnons / gelitten "qui a
donc la règle proto-baltique comme suit: Présent [C I R0-a] ~ Prétérit [CIR-
souffert" (III, 41 z4 , III, 127 10), avec variantes styienuns (II, 7 16 ), stenuns (l,
é]. On reviendra plus loin sur le problème de l'indicatif présent et de sa
7 16), et un dérivé nominal abstrait stinsennien / leyden "souffrance" (III,
reconstruction en baltique.
43 19). Les formes du prétérit paraissent supposer un thème *sten-, celles du dérivé nominal un thème *stin-. Maiiulis (PKEZ, IV, p. 157) propose
Au total, on peut formuler les règles suivantes pour les verbes radicaux thématiques du proto-baltique444
:
deux hypothèses. Tout d'abord, il suggère de reconstruire un paradigme: inf. *stin-, ind. prés. *sten-, prét. *sten-, paradigme qui serait, selon lui,
VOYELLE
Cz =R,0
Czt:-R
RADICALE
apparenté au type lit. sémti "puiser" (ind. prés. semia, prét. semé), mais ne
AU PRÉSENT
disposerait d'aucun parallèle pour la reconstruction du thème d'infinitif. Il
V=e
(1.) CleCZa ~ CleCZe
(1.1.) CleRa ~ CIRe / CIRa
fonnule ensuite une seconde hypothèse en reconstruisant un paradigme:
V=a
(2.) ClaCza ~ ClaCza
(2.1.) ClaRa ~ ClaRa
inf. *stin-, ind. prés. *sten-, prét. *stln- (cf. lit. dial. trinti "frotter", ind.
V=eR
(3.) CleRCza ~ CIRCza
prés. trena, prét. tryné). Qu'on parte, à l'indicatif prétérit, d'un thème
Vt:-e,a
(4.) CIVCza ~ CIVCza
(4.1.) CIRa ~
CJÏ~. e
*stën- ou *stfn-, l'aboutissement attendu dans le Ille Catéchisme est *st'in-, noté / stïn- / (v. pro stfnons, III, 4b4, III, 127 10) ; quant à la graphie er
/ sten- / du 1 Catéchisme (v. pro stenuns, l,
716),
elle ne peut noter que
*sten-, ou, à la rigueur, *sten-. Cela signifie que les fonnes du
V.
prussien
stenuns (1) et stfnons (III) ne peuvent être ramenées à l'unité qu'autour
Dans les autres verbes thématiques, la situation est différente. Pour les verbes en -ia du lituanien, Schmid (1966-1967, p. 292-294) a reconstruit un système de règles de formation qui permettent de classifier toutes les variations observées :
d'un thème *sten- ; autrement, si l'on reconstruit *stfn- pour stfnons (m), il faut interpréter stenons (1) comme une forme secondaire qui aurait emprunté son degré vocalique au thème de présent (* sten-, cf.
V.
pro
gemmons), ce qui n'est, du reste, pas impossible. Cette seconde solution permettrait d'intégrer les formes prussiennes à un type connu par ailleurs en baltique oriental. On proposera donc éventuellement de reconstruire un paradigme: inf.
*stin-,
ind. prés.
*sten-,
prét.
*stfn-.
On notera que le
prussien paraît supposer l'antiquité du type lituanien dialectal ind. prés.
trena, au lieu de trina. Toutefois, rien ne permet encore d'affirmer avec certitude qu'il s'agisse là du type le plus ancien: cela pourrait être une innovation du vieux prussien, parallèle à ce qu'on observe dans les dialectes lituaniens. Il est, en outre, difficile de savoir quelle formation de prétérit, en *-a- ou en *e-, est la plus ancienne dans ce type de verbes;
VOYELLE RADICALE
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
AU PRÉSENT
CIVC z
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
ClvR
(1.)e
(1.) CleCzia ~ CleCZe
(1.1.) CleRia ~ CléRe
(2.) a
(2.) ClaCzia ~ CloCzé
(2.1.) ClaRia ~ CloRé
(3.) i
(3.) CdCzia ~ ClyCzé
(3.1.) CdRia ~ ClyRe
(4.) u
(4.) CluCzia ~ ClüCzé
(4.1.) CluRia ~ ClüRé
444.Cf. Schmid (1967-1968). On notera quelques points de divergence entre sa reconstruction et celle qui est ici proposée. Tout d'abord, je réunis en un seul type (4.) les types (4.) et (5.) distingués par Schmid. Ensuite, pour des raisons énoncées plus haut, je reconstruis (1.1) comme CleRa ~ CIRe / CIRa, non comme CleRa ~ CleRe. On notera, au passage, que je laisse ouverte la question de savoir quel type de prétérit est le plus ancien dans cette catégorie, CIRe ou CIRa; les faits parlent plutôt en faveur de CIRa.
316
Catégorie du temps
Catégorie du temps
-
317
VOYELLE
RADICAL EN SYLLABE
disparaître au profit d'une fonne unifiée du radical. Le lituanien standard
RADICALE AU PRÉSENT
LOURDE
atteste côte à côte une flexion apophonique slJgti "comprimer" (ind. prés.
C]VRC2
OU
C]VC2
(5.) toute
(5.) C]vRC2ia ~ C 1vRC2è
prét. slégé)446; comparer, de même, inf. grbsti "menacer" (ind. prés.
voyelle (6.) voyelle
grésia, prét. grésé) à Vilkaviskis (haut-lituanien de l'Ouest), en regard du (6.) ClvC2ia ~ C 1VC2è
lit. standard inf. grésti (ind. prés. gresia, prét. grésé). La même unifor-
longue
misation a eu lieu en letton, où bien souvent l'on ne trouve pas -
VOYELLE RADICALE AU PRÉSENT
slêgia , prét. slJgé) et une flexion non apophonique sIegti (ind. prés. sfegia,
RADICAL À FINALE VOCALIQUE
(7.) finale vocalique
d'apophonie: voir, par exemple, lett. slèpt "cacher" (= lit. slJpti), ind. prés. slèpj
«
*slep-ja
::F-
lit. slepia), prét. slèpa (z lit. slJpé); lett. slêgt
"comprimer" (= lit. dia!. slégti), ind. prés. slêdz (= lit. dial. slégia # lit.
slêgia), prét. slèdza (= lit. dia!. sfegé). Toutefois, le letton conserve quelques vestiges d'apophonie radicale: lett. lèkt "sauter" (= lit. lJkti), ind. prés. lee (= lit. lekia), prét. lèea (= lit. l&é)447. Dans ce type de
On passera en revue ces différents types, en identifiant au passage ceux qui s'accompagnent d'une apophonie vocalique. - (1.) Présent [C 1eC2ia] ~ Prétérit [C]éC 2é] :
verbes, le prétérit en *-e- est ancien, à en juger par les données dialectales du letton (par ex. leU. dia!. sl'êfiu
=
lit. slépiau, de slJpti "cacher", lett.
dia!. strçbe = lit. srébé, de srJbti "avaler")448, et par la palatalisation régulière de la consonne finale du radical en letton standard (par ex. lett.
• par ex. lit. ind. prés. slep-ia, prét. slép-é (inf. slép-ti "cacher"), lit. ind. prés. sleg-ia, prét. slJg-é (inf. slJg-ti "comprimer"), lit. ind. prés. gres-ia, prét. grJs-é (inf. grJs-ti "menacer"), lit. ind. prés.
kvep-ia, prét. kvJp-é (inf. kvJp-ti "respirer"), lit. ind. prés. dves-ia, prét. dvJs-é (inf. dves-ti "crever")445 . En lituanien, ce type n'apparaît que dans des verbes dont la variante longue présente une intonation radicale douce. On n'observe aucune alternance dans les verbes dont la voyelle radicale est d'intonation rude: on peut ainsi opposer lit. plésti "répandre, déployer", ind. prés. plecia, prét. plJté (alternance radicale < plét- / plet- », et lit. plesti "déchirer", ind. prés.
plesia, prét. plesé (radical [plés-] sans alternance). Dans quelques dialectes lituaniens, la variante brève de l'indicatif présent a parfois tendu à 445. Autres exemples de ce type: LKG (II, p. 234, § 329, b). Cf. aussi Sandbach (1930, p. 44-45), Otr~bski (GJL, II, p. 332-333, §§ 556-558), Kazlauskas (1968, p.351).
446. Zinkevicius (1966, p.341, § 598): dialectes de Kursènai (baslituanien du Sud), Sakyna (haut-lituanien de l'Ouest), Vilkaviskis (hautlituanien de l'Ouest), Birzai (haut-lituanien de l'Est) et Dusetos (hautlituanien de l'Est). Cf. Büga (RR(B), II, p. 491). 447. Le cas du verbe lett. plest "ouvrir, répandre" est intéressant. En regard du correspondant lituanien plcistï, qui a gardé le type ancien (ind. prés. pleCia, prét. piété, alternance radicale *plet- / *plét-), le letton a étendu le vocalisme bref de l'indicatif présent pies « *plet-ia) à l'infinitif plest « *plet-ti) et à l'indicatif prétérit pleta « *plet-li) ; mais il existe, dans la langue standard, une variante du prétérit à voyelle longue plèta « *plet-li). Cette distribution singulière s'explique, selon toute vraisemblance, du fait de l'homonymie qui risquait de se produire avec un verbe proche, lett. plèst "déchirer" (= lit. plesti). Dans plest "ouvrir, répandre", le vocalisme bref a été généralisé (contre la règle générale qui conduisait à généraliser le vocalisme long) là où le vocalisme long créait une confusion avec plèst "déchirer": à l'indicatif présent pies (= lit. plècia) et à l'infinitif plest (t: lit. plésti), cf. respectivement ind. prés. plès "i 1 déchire" (= lit. ptesia), inf. plèst "déchirer" (= lit. plesti). Au prétérit, aucune confusion ne pouvait avoir lieu entre plèta "il répandit" (::::: lit. pIété) et plèsa "il déchira" (::::: lit. plesé), d'où la conservation de la forme ancienne à vocalisme long plèta "il répandit" à côté de la forme normalisée pleta. 448. Endzelïns (1909, p. 22-23 = DI, II, p. 111-112).
319
Catégorie du temps
Catégorie du temps
lèca de lèkt "sauter", slèdza de slêgt "comprimer"). Les données
lituanien plésti - pleCia - piété n'est donc, en réalité, pas attesté en
prussiennes sont presque inexistantes et demeurent incertaines. Elles se
prussien45 0 • Pour le proto-baltique, la règle de formation paraît avoir été la
réduisent à un verbe *lëz-fi- "ramper", dont sont attestées les fonnes
suivante: Présent (C 1eC2ia] -7 Prétérit (ClëC 2ë].
318
suivantes: ind. prés. tise / kreucht "il rampe" (III, 1073 ), part. prét.
- ( 1.1.) Présent (C 1eRia] -7 Prétérit (C 1ëRë] :
sammay lesuns / nidergestigen "étant descendu" (l, 7 17- 18 ), semmay lysons
• par ex. lit. ind. prés. ger-ia, prét. ger-é (inf. gér-ti "boire"), lit.
(II, 7 18), semmai tisuns (III, 127 12), semmailisons (III, 43 2 ). Le vocalisme
ind. prés. kel-ia, prét. kél-é (inf. kél-ti "lever"), lit. ind. prés. vem-
long est constant dans les formes prussiennes qui supposent toutes un
ia, prét. vem-é (inf. vém-ti "vomir"), lit. ind. prés. ber-ia, prét. bér-
thème *lëz-. Toutefois, Mafiulis (PKEZ, III, p.70-71) reconstruit une
é (inf. ber-ti "disperser")451.
flexion alternante: inf. *lëi-ti- (= v. sI. -JI'BCTH / -lesti, russe JIe3Tb / lezt'
Le type est fréquent en lituanien, autant dans les verbes à intonation
"grimper", pol. leié "ramper"), ind. prés. *lei-ia, prét. *lëi-ë, qui serait
radicale rude (par ex. lit. gérti "boire", geria, geré; lit. tvérti "saisir",
du même type que, par exemple, lit. plésti "répandre, déployer" (ind. prés.
tveria, tveré; lit. vérti "ouvrir", veria, véré) que dans les verbes à
plëcia, prét. pIété). Cette hypothèse, dépourvue de fondement en prussien
intonation radicale douce (par ex. lit. berti "disperser", beria, béré; lit.
même, s'appuie uniquement sur l'idée que le verbe appartient à la racine
perti "battre, fouetter", peria, péré; lit. sverti "peser", sveria, svéré).
indo-européenne *let- "être couché", dont le vocalisme bref est seul ancien
L'intonation est toujours la même à l'infinitif et à l'indicatif prétérit, mais
et se trouve par ailleurs attesté en prussien (v. pro lasinna / leget "il
l'ambiguïté de l'indicatif présent a pu conduire à des flottements dans les
coucha", III, 113 7 , lasto / bette "lit", E 209, 492), ainsi qu'en slave (v. sI.
dialectes lituaniens, d'où des formes comme lit. dial. bérti "disperser"
JIelliTH
long
(: lit. standard berti), beré (: lit. standard béré), faites sur beria d'après le
s'expliquerait, en ce cas, par la pression du type morphologique, qui était
modèle de geria (: inf. gérti "boire", ind. prét. géré)452. L'alternance apa-
associé à une apophonie quantitative; il aurait été secondairement
phonique est ancienne, car elle se retrouve directement attestée en letton.
généralisé en
prussien. Mais, pour supposer l'existence d'une ancienne
On mettra ainsi en parallèle: lit. gérti "boire" (ind. prés. geria, prét. géré)
apophonie quantitative, on n'a pas le moindre commencement de preuve:
et lett. dzeft "boire" < *ger-ti (ind. prés. dzèr ou dzèJ; < *ger-ia, prét.
cette hypothèse ne repose, en définitive, que sur une spéculation
dzèra < *gërii) ; lit. kélti "lever" (ind. prés. ke/ia, prét. kélé) et lett. celt
étymologique, qui peut être contestée449 • La flexion prussienne du verbe
"lever" < *kel-ti (ind. prés. cel < *kel-ia, prét. cèla < *këlii); lit. vémti
*lëz-ti- "ramper" l'apparente plutôt au type non apophonique du lit. ind.
"vomir" (ind. prés. vemia, prét. vemé) et lett. vernt ''vomir'' < *vem-ti (ind.
prés. grebia, prét. grebé (inf. grebti "ratisser") qu'au type apophonique du
prés. vern) < *vem-ia, prét. vèma < *vëmii), etc. L'antiquité de la formation
lit. plésti "répandre, déployer" (ind. prés. pleCia, prét. pIété). Le type
en *-ë- est elle-même assurée par les formes dialectales du letton: lett. dia!.
. */v.-.h 449. Plutôt que de tirer le balto-slave */ëz-ti- "ramper" de la racme eg "être couché", comme le font MaZiulis (PKEZ, III, p. 70-72) et avant lui V~iIlant (GeLS/., HIll, p. 145-146, § 428), en expliquant son vocalisme long SOIt par une flexion apophonique du type lit. plésti, plëCia, pIété (Ma.ziulis), soit par un allongement propre à l'ancien parfait (Vaillant), il estJ'lus vraisemblable de séparer les deux familles en distinguant une racine *U~g - "être couché" (IEW, p.658-659, LI V, p.357) et une racine *Iehit'- "ramper" (IEW, p.660, LIV, p.359).
450. On ne peut tirer aucune information du substantif v. prussien niidewisin / seufftzen "soupir" (III, 8914 < *nii-d~is-in < *ni!..-dvës-i-), dérivé du verbe *dvës-ti-, cf. lit. ind. prés. dvës-ia, prét. dvés-é (inf. dvés-ti "crever"). 451. Autres exemples de ce type: LKG (II, p.233-234, § 328), Otrçbski (GJL, II, p. 330-332), Kazlauskas (1968, p. 350), Schmalstieg (2000, p. 177 sq.).
/
lesti "se
V.
coucher,
Koql.àa8ul ").
Le
vocalisme
,..
452. Cf. Petit (1998, p. 265-267).
320
Catégorie du temps
Catégorie du temps
dzëre (= lit. geré), de dzeft "boire" (= lit. gérti), cële (= lit. kelé), de ceÎt
Smoczynski (2000a, p. 172, cf. aussi 2000c, p. 163, note 11)456. Il tire le
"lever" (= lit. kélti), vëme (= lit. vemé), de vernt "vomir" (= lit. vémtz),
participe etwiriuns d'un verbe *atvirft, dénominatif à suffixe *-ija- d'un
etc. 453 . Les données du vieux prussien sont confuses. Le seul cas à peu
adjectif *atvirs (= lit. iitviras "ouvert") ; à l'appui de cette hypothèse, qui
clair d'un verbe présentant cette structure est celui du verbe *etwer-twei
a le mérite de résoudre le problème morphologique, Smoczynski signale le
"ouvrir", dont les formes suivantes sont attestées: ind. prés. etwëre
fait que la formation dénominative (*atvirs "ouvert"
/ thust... auff "tu ouvres" (III, 83 10), impér. prés. etwerreis / oÏfne
pourrait être due au modèle de l'allemand (mha. offen "ouvert"
"ouvre !" (III, 117 19-119 1), part. prét. act. etwiriuns / auffgethan "qui a
"ouvrir"). Du point de vue de l'apophonie grammaticale, cette forme n'est
ouvert" (III, 11727). La forme d'indicatif présent etwëre (III, 83 10) est
pas exploitable. On ne possède donc aucune forme assurée du thème de
certainement fautive et ne saurait refléter *-vër-, qui aurait donné *-vfr-
prétérit; seul le thème de présent est documenté, avec une voyelle brève
régulière dans le Ille Catéchisme); il faut
(ind. *etwere, impér. etwerreis) qui se retrouve en lituanien et en letton
probablement la corriger en *etwere, avec une voyelle brève *e, confirmée
(lit. àtveria, lett. atvèr ou atvèr). Il reste à mentionner un verbe qui
par la forme d'impératif présent etwerreis (III, 117 19-119 1), dans laquelle la géminée -rr- indique la brièveté de la voyelle antécédente454 . On peut donc
pourrait avoir eu la même structure morphologique, mais dont on ne peut
(avec l'évolution *-ë- > *-ï-
321
---7
*atvirït "ouvrir") ---7
offenen
tirer aucune information: v. pro wimbmis / speien "cracher" (GrG37), wynis
reconstruire un indicatif présent *atveria, correspondant au lituanien àtveria
/ spey "crache !" (GrA I6), wynis / vome "vomis !" (GrF36), wyms (GrH).
"il ouvre" (inf. atvérti "ouvrir", ind. prét. atveré) et au letton atvèr ou
Ces formes supposent probablement un thème d'infinitif *vem-, mais ne
atvèr "il ouvre" (inf. atvert "ouvrir", ind. prét. atvera). Quant à la fonne
permettent pas de reconstruire un paradigme apophonique comparable à
de participe prétérit actif etwiriuns (III, 117 27 ), elle peut être interprétée de
celui du lituanien vémti "vomir" (ind. prés. vemia, prét. vemé). Pour le
deux façons. Elle peut reposer, comme l'admettent Toporov (PrJ, II,
proto-baltique, malgré l'absence de données prussiennes, on peut restituer
p. 113) et Maziulis (PKEZ, l, p. 303), sur un indicatif prétérit *et-wfr-e
une formation: Présent [CleRia] ---7 Prétérit [CleRe].
< *at-ver-e, correspondant au prétérit lituanien atveré et letton atvera. La forme attendue *etwfruns aurait été refaite en etwiriuns d'après le modèle des formes du type bill-funs "qui a parlé" (inf. billït "parler"). Mais on voit mal comment cette finale -ï-uns, propre aux verbes en -ït
« *-ï-fi- ou
- (2.) Présent [C laC 2ia] ---7 Prétérit [C I OC 2é] : • lit. ind. prés. viig-ia, prét. vog-é (inf. vog-ti "voler, dérober"). Ce type est exceptionnel en lituanien. Le seul exemple vivant dans la
*-ë-ti-) et à eux seuls, cf. klausïuns (: klausiton "écouter"), mi/ijuns
langue littéraire en est précisément vogfi "voler"457. Ni le vocalisme
(: mi/ijt "aimer"), perschliisiuns (: *perschliisïtwei "gagner sa vie comme
l'infinitif, ni le vocalisme -a- à l'indicatif présent n'impliquent en général
serviteur"), klantïuns (: *klantïtwei "blasphémer")455, se serait introduite
d'apophonie radicale, comme le montrent les exemples suivants: d'une
dans un verbe d'un autre type morphologique: le cas serait tout à fait
part, lit. bloksti "jeter" (ind. prés. bloskia, prét. blOs'ké), lit. dvokti "puer"
isolé. Une autre analyse plus convaincante a été proposée récemment par
-0-
à
(ind. prés. dvokia, prét. dvoké), lit. kopti "1. récolter du miel, 2. creuser" (ind. prés. kopia , prét. kopé) ; d'autre part, lit. zàgti "salir, rendre impur"
DI, II, p. 112-113, cf. 1923, p. 594, § 625). 454. En ce sens, Toporov (PrJ, II, p. 113). 455. Sur J'extension de la finale participiale -iuns en v. prussien, voir une analyse différente chez Smoczynski (l989b, p. 182-187). 453. Endzelïns (1909, p. 23-24
=
(ind. prés. ziigia, ind. prét. ziigé). Mais, dialectalement, certains de ces 456. Voir, en ce sens, déjà Endzelïns (l931b, p. 46 457. Cf. LKG (II, p. 234, § 329, a).
=
DI, IIII, p. 587).
322
Catégorie du temps
323
Catégorie du temps
verbes appartiennent au type vogti "voler" : lit. dial. blOkS'ti "jeter" (ind.
prussien est aussi incertain:
prés. bliisïcia, prét. blosïcé), dvokti "puer" (ind. prés. dvakia, prét. dvoké),
/ auJfgefahren "arrivé" (III, 12713), vnsey gobuns (l, 91), vnseigubons (II,
kopti "1. récolter du miel, 2. creuser" (ind. prés. kiipia , prét. kopé)458. En
91)' vnsaigiibons (III, 43 3-4), gubas pour *gubans (III, 7923), pergubuns
letton, aucune apophonie radicale n'est attestée. Le correspondant du lit.
/ gekommen "arrivé" (l, 9 3-4 ), pergubons (II, 9 4 ), pergübons (III, 43 6, III,
kopti "récolter du miel" (ind. prés. kopia, lit. dial. kapia, prét. kiipej
127 15),pergübans (III, 113 6- 7). Maziulis (PKEZ, l, p. 419) reconstruit une
présente une voyelle longue constante: lett. kàpt "prendre, récolter"
flexion apophonique du type lit. vogti "voler": inf. *giib-, ind. prés.
« *kap-ti-), ind. prés. kàpj « *kap-ia), prét. kàpa « *kapii). Les données
*gab-, prét. *giib-. Mais cette reconstruction, qui repose sur le postulat
prussiennes sont, ici encore, peu exploitables. La forme de participe v. pro
d'une parenté étymologique avec le v. lit. gobtis "saisir" (ind. prés.
encops / begraben "creusé" (l, 7 17, cf. enquoptzt, II, 7 17 , enkopts, III, 43 1_2,
gabia-si)461 , n'est appuyée, en vieux prussien, par aucun fait, puisque les
III, 65 1, III, 127 11 ) reflète probablement *en-kaptas (*en-kiip-tas ou
seules formes attestées sont celles d'un participe prétérit, toutes pourvues
*enkoptas aurait donné tenkiipts dans le Ille Catéchisme)459; on peut en
d'une voyelle radicale longue. Malgré l'absence de données lettones et
déduire l'existence d'un infinitif *kap-ti "creuser", qui se rapproche par son
l'obscurité des données prussiennes, il paraît possible d'attribuer au type
vocalisme bref du lituanien dialectal kàpti "creuser" (ind. prés. kiipa, prét.
lituanien vogti une certaine antiquité; on proposera donc de reconstruire un
kapé) et se sépare, en revanche, de la forme connue ailleurs en lituanien
type proto-baltique: Présent [C 1aC 2ia] -t Prétérit (C 1âC 2ë].
kopti "creuser" (ind. prés. dial. kapia, mais dans la langue littéraire kopia,
- (2.1.) Présent [C1aRia] -t Prétérit [CloRe] :
prét. kopé). On notera que le dérivé attesté en lituanien littéraire kaplys
• lit. ind. prés. kar-ia, prét. k6r-é (inf. kcir-ti "pendre").
"sorte de hache émoussée" paraît impliquer l'existence ancienne d'un infinitif *kàpti, comparable à celui qui est ici supposé en vieux prussien (cf lit. gréblys "rateau" de grebti "ratisser"). Il n'est pas impossible que la flexion apophonique du lituanien dialectal kopti (kapia, kopé) et, à travers elle, la flexion non apophonique du lituanien littéraire kopti (kopia, kOpé) représentent des innovations du baltique oriental46 0 • Un autre exemple 458. Données dialectales dans Zinkevicius (1966, p.340, § 598, 5). Kazlauskas (1968, p. 351) rattache également à ce type les verbes suivants: lit. sli5pti "s'étouffer", smogti "frapper, porter un coup", gobti "prendre, saisir". Ces verbes ont, dans la langue littéraire actuelle, une flexion non apophonique et, en général, une intonation radicale rude: lit. sl6pti (-sta, -0), g6bti (-ia, -el, mais smogti (-ia, -é). Voir aussi Sandbach (1930, p.45-46), Kaukienê (1994, p.43-50). 459. Autre analyse chez van Wijk (1918, p.43) et Endzelïns (1934-1935, p. 138 = DI, IIh, p. 205), qui partent d'une forme à voyelle longue *-kop-tas, cf. lit. kui5pti "racler, râtisser". Sur cette analyse, voir aussi Stang (1966, p. 30, 38). 460. L'antiquité d'une flexion à voyelle radicale brève, suggérée par l~ vieux prussien, pourrait être confirmée par le slave (v. sI. KonaTH 1 kopat' "creuser, UKâTITElV" = verbe dérivé lit. kap6ti, lett. kapât "creuser") et plus
V.
pro part. prét. actif vnsei giibans
Ce type est exceptionnel en lituanien, le principal exemple étant précisément kcirti "pendre"462.
Dans quelques
dialectes
lituaniens,
notamment à Tverecius et à Dusetos (haut-lituanien de l'Est), on trouve un autre exemple de la même alternance: lit. dial. cirti "labourer" (ind. prés.
aria, prét. 6ré) ; la langue littéraire a généralisé le vocalisme bref (lit. cirti, ind. prés. aria, prét. aré). Kazlauskas (1968, p. 350) cite également:
atkcilti "repousser (un métal)" (ind. prés. àtkalia, prét. atk6Ié), en regard du lit. standard atkcilti (ind. prés. àtkala, prét. àtkalé). Il n'est pas exclu lointainement le grec (gr. KÔTITW "couper" = lit. dial. kapiù). Autre analyse chez Vaillant (1968, p. 253), qui sépare la famille du balto-slave *kap- et celle du grec KÔTITW pour proposer un rapprochement avec celle du latin capio "prendre". Sur l'ensemble du dossier, voir Toporov (PrJ, II, p. 49-50). 461. Voir, dans la Postilla de Dauksa (1599): inf. g6ptis (7941), gôptiS (80 17 , 28911), vs. ind. prés. géJbias (24821), gabias (514 38 ). Données chez Kudzinowski (1977, p.242). Le lituanien moderne a généralisé le vocalisme long: inf. gob-ti (ind. prés. gob-ia, prét. gob-é) ou inf. g6b-ti (ind. prés. g6b-ia, prét. g6b-é), cf. LKt (III, p. 470). 462. Cf. LKG (II, p. 232, § 326). Voir aussi Kazlauskas (1968, p. 350).
324
325
Catégorie du temps
Catégorie du temps
que le type ait connu une plus grande extension à date ancienne. En letton,
ù;as (= lit. iria-si), prét. réfl. ïros (== lit. yré-si); lett. slift "distinguer"
la distribution ancienne est encore attestée dans kart "pendre"
« *kiirti,
avec *-a- par allongement phonétique de *-ar- tautosyllabique, au lieu de
*kaf!
= lit. karti),
« *karia),
prét. kara
«
lit. skirti), ind. prés. slir ou iljir (= lit. skiria), prét. slfJra (::::: lit. skfre),
etc. Mais certains dialectes lettons ont tendu à niveler le vocalisme au
*karii).
profit de la voyelle brève: on peut ainsi rencontrer dialectalement un
Le type a dû posséder, à date ancienne, une certaine productivité, car il
prétérit vila au lieu de vîla (: lett. viÎt "tromper"). Le prétérit en *-ë- est
s'est étendu à quelques verbes appartenant à l'origine au type en *-a- (type
ancien, cf. lett. dia!. prét. vile (: vilt "tromper"), sïieire (: sliPt
lit. barti "quereller", ind. prés. bara, prét. baré), auparavant dépourvus
"distinguer"), dzïrës (: dzif!iês "projeter")465. Le vieux prussien n'a
d'allongement au prétérit: d'où, en letton, bart "quereller" (ind. prés. bàr
qu'un exemple de ce type : v. pro ind. prét. prowela / verraten wardt "il a
prét. bara < *bara)463. Dans le verbe "labourer", en
trahi, trompé" (l, 13 4 , II, 13 4), part. prét. passif prawilts / verrathen (III,
revanche, le letton présente, comme le lituanien standard, un radical unifié:
752)' Le verbe appartient à la famille du lituanien vi/ti "tromper" (ind. prés.
lett. aPt (= lit. arti), ind. prés. àr ou àr (= lit. aria), prét. ara (=:: lit. iiré).
vil-ia, prét. vYl-e). Le participe prétérit passif prawilts (III, 75 2 ) suppose un
Le prétérit en *-ë- est ancien, cf. leU. dia!. kora (= lit. k6ré) de kart
thème d'infinitif *vil-ti-, comparable au lituanien vi/ti et au letton viÎt. En
"pendre". Pour le proto-baltique, la règle de formation est donc: Présent
revanche, l'indicatif prétérit 3 pers. prowela (1 et II) se distingue du
(C1aRia] --7 Prétérit [C1aRë].
lituanien vf!-é et du letton dialectal vïle non seulement par son type
ou bàr <
*baria,
ind. prés. kàr ou kàr
(===
- (3.) Présent (CâC 2ia] --7 Prétérit (C 1yC 2é]. Ce type n'est pas représenté dans les langues baltiques.
e
morphologique (prétérit en *-ii-), mais aussi par l'absence d'allongement morphologique (*wel- dans l et II ne peut refléter que *vJ/- ou, à la rigueur
*vel-, mais certainement pas *vïl-). Visiblement, le vieux prussien (au
- (3.1.) Présent (CâRia] --7 Prétérit [C1yRé] :
moins le dialecte des deux premiers Catéchismes) a nivelé le vocalisme à
• par ex. lit. ind. prés. dir-ia, prét. dyr-e (inf. dir-ti "déchirer"), lit.
partir de l'indicatif présent et refait le type morphologique. Il s'agit sans
ind. prés. vil-ia, prét. vy!-e (inf. vil-ti "tromper").
aucun doute d'une innovation. Pour le proto-baltique, on doit reconstruire
Le type est bien représenté en lituanien littéraire464 . Tous les verbes de ce
une règle: Présent [CâRia] ----? Prétérit [CâRë].
type ont une intonation radicale rude (lit. gilti "piquer", vilti "tromper",
- (4.) Présent (C 1uC 2ia] --7 Prétérit [CIÜC1é] :
girti "louer", irti(s) "ramer", skirti "distinguer", spirti "donner un coup
• par ex. lit. ind. prés. tùp-ia, prét. tup-é (inf. tup-ti "se poser").
de pied, forcer", tirti "étudier, examiner"). En letton, l'apophonie radicale est conservée: lett. viÎt "tromper" (= lit. vi/ti), ind. prés. vil (= lit. vilia), prét. vîla (::::: lit. vYle) ; lett. dzif! "louer", surtout réfl. dziftiês "se vanter, projeter de" (= lit. girti), ind. prés. dzir ou dzir, réfl. dziras ou dzù;as
(= lit. non réfl. giria), prét. dzïra, réfl. dzïros (::::: lit. non réfl. gyre) ; lett.
if! "ramer", surtout réfl. iftiês "ramer" (= lit. irti-s), ind. prés. réfl. iras ou 463. Autres exemples chez Endzelïns (1909, p. 21 = DI, II, p. 110). 464. Exemples: LKG (II, p. 234, § 328, c). Cf. aussi Kazlauskas (1968, p.350).
Ce type est rare en lituanien. Outre lit. tup-ti "se poser", on peut encore citer pus-ti "souffler", radical [püt-] (ind. prés. pùc-ia, prét. put_é)466. Dans quelques dialectes haut-lituaniens de l'Ouest (Sakyna, Dauksiai) ou de l'Est (Birzai), la forme à allongement s'est étendue à l'indicatif présent (lit. dia!. tupia au lieu de tùpia). La même extension apparaît en letton: lett.
465. Endzelïns (1909, p. 16 = DI, II, p. 105, cf. aussi 1923, p. 590-592, § 623). 466. Cf. LKG (II, p. 234, § 329, c). Voir aussi Sandbach (1930, p. 46).
326
Catégorie du temps
pùst "souiller"
«
« *püsti),
ind.
prés. pùs
Catégorie du temps
« *püt-ia),
327
ar son type morphologique (prét. en *_â_)471. On notera qu'à la différence
*piit_ii)467. Le prétérit en *-e- est ancien, cf. lett. dia!. püte (: pÙst
:e la forme prowela (1 et II), qui présente une extension du vocalisme bref,
"souftler")468. Malgré l'absence de correspondant letton, il est probable
la forme küra (III) suppose une conservation du vocalisme long: différence
que la règle proto-baltique doit être reconstruite comme: Présent (C luC 2ia]
dialectale entre la langue des deux premiers Catéchismes et celle du
~ Prétérit
(C lüC 2ë].
, J'e'me trOIS
Catéchisme?. Il est difficile de fonder une hypothèse sur un seul
- (4.1.) Présent (CluRia] ~ Prétérit (ClüRè] :
exemple. Pour le proto-baltique, on doit probablement reconstruire une
• par ex. lit. ind. prés. kùr-ia, prét. kûr-é (inf. kùr-ti "allumer, créer,
règle: Présent (C1uRia] ~ Prétérit [ClüRë].
fonder"), lit. ind. prés. kùl-ia, prét. kûl-é (inf. kùl-ti "battre du
- (5.) Présent [C lvRC 2ia] ~ Prétérit [C lvRC 2e] :
grain"), lit. ind. prés. dùm-ia, prét. dûm-é (inf. dùm-ti "souffler").
• par ex. lit. ind. prés. feidi-ia, prét. ieïd-é (inf. ieis-ti "blesser"),
Ce type est bien représenté en lituanien littéraire469 . Tous les verbes
lit. ind. prés. klaus-ia, prét. klaus-é (inf. klaus-ti "demander"), lit.
concernés ont une intonation rude radicale (cf. lit. kùrti "allumer", bùrti
ind. prés. méli-ia, prét. méli-é (inf. méli-ti "traire"), lit. ind. prés.
"rassembler", dùrti "piquer, percer", kùlti "battre du grain", dùmii
vefk-ia, prét. vefk-é (inf. vefk-fi "pleurer"), lit. ind. prés. stémb-ia,
"souffler", stùmti "pousser"). Le type est régulier également en letton, où
prét. stémb-é (inf. stémb-ti "résister")472.
l'on a par exemple: lett. kuft "allumer" (= lit. kùrti), ind. prés. kùr ou kùr
Les verbes comportant une syllabe radicale lourde du type [C lvRC 2ia] se
(= lit. kùria), prét. küra (:::< lit. kûré); lett. kuTt "battre du grain" (= lit.
fléchissent régulièrement, en lituanien, sans apophonie radicale. Ils ont
kùlti), ind. prés. kùl (= lit. kùlia), prét. kûla (:::< lit. kûlé); lett. stumt
systématiquement le prétérit en *-ë-, à une exception près (lit. léisti
"pousser" (= lit. stùmti), ind. prés. stum} (= lit. stùmia), prét. stûma
"laisser", ind. prés. léidiia, prét. léido). En letton standard, ces verbes ont
(:::< lit. stûmé). Le prétérit en *-ë- est ancien, cf. lett. dia!. prét. büre (: burt
le prétérit en *-â-, mais les données dialectales montrent qu'ils avaient à
"rassembler"), düre (: duft "piquer, percer"), küre (: kuft "allumer"),
date ancienne le suffixe *-ë-, comme en lituanien, cf. par ex. lett. dia!. prét.
(: kuTt "battre du grain"), stume (: stumt "pousser")470. Le vieux prussien
lauze (: laûzt "briser") = lit. prét. lauié (: lit. lauiti "briser"), etc.
atteste un seul exemple: v. pro ind. prét. küra / bawet "il a créé" (m,
faits de palatalisation du letton standard viennent confinner cette analyse:
101 15 ), qui présente certes l'allongement vocalique attendu à l'indicatif
lett. standard kàukt "hurler" (= lit. kaûkti), ind. prés. kàuc (= lit. kaûkia),
prétérit (v. pr. (kür-], dans kura
= lit.
Les
(kür-], dans kûré), mais se signale
prét. kàuca (:::< lit. kaûké) ; lett. liekt "courber" (= lit. leiikti), ind. prés. liec (= lit. leiikia), prét. lieca (:::< lit. leiiké), etc. 473 . Le vieux prussien fournit au
467. Au lituanien tùpti "se poser" correspond, en letton, un verbe réfléchi à vocalisme bref généralisé: tuptiês (ind. prés. non réfléchi chez Bielenstein· tupj, prét. tupa), cf. Endzelfns (1909, p. 13 = DI, II, p. 102, cf. aussi 1923, p. 592, § 624). En letton standard et dans la plupart des dialectes, la formation de l'indicatif présent est différente: ind. prés. tupstas (forme réfléchie < *tup-stasi). 468. Endzelfns (1909, p. 16 = DI, II, p. 105). 469. Cf. LKG (II, p. 234, § 328, d). 470. Endzelïns (1909, p. 17 = DI, II, p. 106).
471. Sur la forme prussienne, voir Toporov (PrJ, IV, p.300-307, sur son type morphologique p. 301). 472. Autres exemples: cf. LKG (II, p. 232, § 326). Cf. aussi Sandbach (1930, p,48-49). 473, À la différence du lit. léisti "laisser" (ind. prés. léidiia, prét. léido), dont le prétérit en *-a- est irrégul,ier, .Ie letton ~ialect~l a, pou: I~, m~me ;:erbe, des traces d'un prétérit en *-e- reguher: lett. dlal. laide (: lalst laIsser), cf. Endzelïns (1909, p. 29 = DI, II, p. 11 ~). ~~ I~tton s~anda:~, ~e /r~té~it de ~e verbe a le suffixe *-a- : lett. laîst "laisser, md. pres. lalz ( laid-la), preto laîda « *laid-a).
329
Catégorie du temps
Catégorie du temps
moins une fonne dépourvue d'ambiguïté, l'indicatif prétérit pertràuki
meluati "mentir") ou, exceptionnellement, avec prétérit en -é (seul
/ schlofl..·zu "il ferma" (III, 101 14 < *-trauk-ë-), qui prouve l'antiquité du
exemple: sluoti "balayer"). La même distribution vaut pour le letton (par
prétérit en *-e- dans ce type de verbes. Pour le proto-baltique, la règle est
ex. lett.jât "aller à cheval", ind. prés. jâj, prét. jâja
donc: Présent [C lvRC 2ia] ~ Prétérit [C lvRC 2e].
j6ja, prét. j6jo), à cette différence près que les types irréguliers ont été
328
- (6.) Présent [C 1vC 2ia]
~
= lit. joti, ind. prés.
ramenés à la règle générale (par ex. lett. mçluôt "mentir", ind. prés. mçluôj
Prétérit [C 1VC 2è] :
• par ex. lit. ind. prés. d6b-ia, prét. d6b-é (inf. dob-ti "piquer"), lit.
< *meluoja, prét. mçluôja < *meluojii, lett. dia!. mçlava < *melavii)475.
Le vieux prussien se rapproche ici du lituanien, avec un type
ind. prés. grebia, prét. grebé (inf. grebfi "ratisser").
*-auja,
prét.
*-avii, cf. v. pro ind. prét. dinkowatz / dancket "il remercia" (l, 13 5 ), La même règle vaut pour les radicaux comportant à l'indicatif présent une voyelle longue suivie d'une consonne: type [C lvC 2 ia]. Le letton offre des données comparables, du moins dans les dialectes qui conservent le prétérit en *-ë- (par ex. lett. dia!. prét. plçse de plèst "déchirer" = lit. prét. plesé de
plesti "déchirer")474. En letton standard, les verbes présentant cette structure ont le prétérit en *-ii- (par ex. lett. prét. plèsa), mais les faits de
dinkowatz (l, 13 14 ), dïnkauts (III, 75 3), dinkauts (III, 75 8), dinkautzt (Ill, 13 5), dinkauczt (II, 13 14). Si l'on laisse de côté les types irréguliers, la règle proto-baltique peut être reconstruite comme: Présent (Clvja] Prétérit (C1vja]. Au total, on peut fonnuler les règles suivantes pour les verbes thématiques à suffixe *-ia du proto-baltique :
palatalisation montrent qu'à date ancienne, le prétérit en *-e- y était régulier (cf. par ex. lett. màkt "comprimer", ind. prés. màc < *miik-ia, prét.
màca < *miik-ë). Pour le proto-baltique, la règle est donc la suivante: Présent [C lvC 2ia]
~
VOYELLE RADICALE AU PRÉSENT
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
CIVC2
ClvR
Prétérit (C lvC 2 e].
- (7.) Présent (Clvja]
~
Prétérit (Clvjo] :
• par ex. lit. ind. prés. gUe-ja, prét. gUe-jo (inf. gUe-ti "enduire"), lit. ind. prés. jo-ja, prét. jo-jo (inf. j6-ti "aller à cheval"), lit. ind. prés. se-ja, prét. sé-jo (inf. se-ti "semer").
Plusieurs types
(1.)e
(1.) CleC2 ia ~ ClëC2ë
(1.1.) CleRia ~ ClëRë
(2.) a
(2.) ClaC2ia ~ C laC2ë
(2.1.) ClaRia ~ ClaRe
(3.) i (4.)
u
irréguliers: (a) lit. ind. prés. badduja, prét. badiivo (inf. badduti
VOYELLE
"avoir faim"), (b) ind. prés. meluoja, prét. meliivo (inf. meluofi
RADICALE AU PRÉSENT
(3.1.) CtiRia ~ CliRe (4.) CluC2ia ~ ClüC2e
RADICAL EN SYLLABE LOURDE
C l vRC2
OU
CIVC2
"mentir"), (c) ind. prés. sluoja, prét. Slàvé (inf. f/Uo-ti "balayer"). Quelques cas particuliers restent à évoquer. Les verbes en *-ia dont le radical est à finale vocalique ont, en lituanien, le prétérit en
-0,
si le radical
s'y termine par la sonante -j-, après laquelle le suffixe -é est impossible: d'où, par exemple, lit. jo-fi "aller à cheval" (ind. prés. jo-ja, prét. jo-jo). Il existe des types irréguliers, avec prétérit en
-0
474. Endzellns (1909, p.23 = DI, II, p.112).
~
(5.) toute
(5.) C lvRC 2ia ~ C lvRC2e
voyelle
(6.) voyelle
(6.) ClvC 2ia ~ ClvC2ë
longue
(type badduti "avoir faim",
475. Cf. Endzellns (1923, p. 627,681).
(4.1.) CluRia ~ ClüRe
330
Catégorie du temps
Catégorie du temps VOYELLE RADICALE
331
dial. kduja (au lieu de kauna), krauja (au lieu de krduna), griduja (au lieu RADICAL À FINALE VOCALIQUE
de griduna), ce qui est certainement un archaïsme (cf. lit. dial. Muja
AU PRÉSENT
=
lett.
kaûj, russe KyëT 1 kujët, pol. kuje; lit. dial. krauja = lett. krailj, pol. (7.) finale
(7.) Clvja
4
Clvja
kryje). L'hésitation entre le type en -na et le type en -ja se retrouve, dans
vocalique
des conditions différentes, dans le verbe irrégulier du lit. standard iluoja, vs. bas-lit. iluona (: inf. iluoti "balayer", prét. s1avë). On notera, enfin,
Pour les autres types suffixés thématiques du lituanien, on peut définir les
que, dans quelques dialectes lituaniens (domaine haut-lituanien de l'Est et
règles suivantes :
Dzükija), ces verbes ont un prétérit en
-0
sans allongement, par ex. lit.
dial. kavo (: lit. standard k6vé, inf. kauti "frapper, marteler"), savo (: lit. VERBES À SUFFIXE
-na-
(1.) C1(i)âuna
~
Cl(i)ove
standard i6vé, inf. sauti "tirer avec une arme à feu"). Ce modèle n'est représenté dans la langue standard que par le prétérit irrégulier gavo (inf.
VERBES À INFIXE NASAL
(2.) ClvNC2a ~ C 1VC20
-sta-
(3.) ClvC2sta ~ CIVC20
VERBES À SUFFIXE
gauti "recevoir"), pour lequel, du reste, certains dialectes offrent une variante régularisée g6vé ; il est également représenté par tous les verbes polysyllabiques à suffixe -auti (par ex. lit. badduti "avoir faim", ind. prés.
Les verbes à suffixe -na, qui sont peu nombreux en lituanien, présentent en règle générale tous la même structure: leur radical comporte une diphtongue [au] d'intonation rude, à laquelle s'oppose au prétérit une séquence [6v], cf. par ex. lit. kauti "frapper, marteler" (ind. prés. Mu-na, prét. kov-é), krauti "entasser" (ind. prés. krau-na, prét. kr6v-é), jauti "retourner" (ind. prés. jau-na, prét. jov-é), griauti "abattre" (ind. prés. griau-na, prét. gri6v-é), bliauti "meugler" (ind. prés. bliau-na, prét. bliov-é), etc. 476 . Trois exceptions sont à signaler pour la langue standard:
badauja, prét. badàvo). Le letton, comme on l'a vu, répond aux verbes lituaniens en -na par des verbes en -ja (par ex. lett. kaût = lit. kauti, ind. prés. kaûj
= lit. dial. kauja) ; seuls certains dialectes offrent des traces du
type en -na (lett. dial. kaûn
=
lit. kauna). Le prétérit de ces verbes atteste
régulièrement un allongement en letton standard (par ex. lett. prét. kava < *kàv-ii) et, dialectalement, un suffixe -ë (par ex. lett. dial. kiive = lit.
kOvé)477. On se trouve donc en présence de quatre schémas possibles : - si l'on part d'un présent [C1auja], on peut reconstruire:
d'une part, lit. gauti "recevoir" (ind. prés. gau-na, prét. gav-o), dont le
ou bien:
(a) Présent [C1auja]
~
Prétérit [ClaVa],
prétérit est irrégulier; d'autre part, lit. ailti "chausser" (ind. prés. au-na,
ou bien:
(b) Présent [C1auja]
~
Prétérit [C1avë].
prét. aV-é), qui présente deux particularités, une intonation radicale douce et
- si l'on part d'un présent [C1auna], on peut reconstruire:
un prétérit à voyelle brève; enfin, lit. erti "aller" (ind. prés. er-na, prét.
ou bien:
(c) Présent [C1auna] 4 Prétérit [ClaVa],
~j-o), ancien athématique (v. lit. eimi), qui est à tous égards irrégulier dans
ou bien:
(d) Présent [Clauna] 4 Prétérit [C1avë].
la langue moderne. Aux verbes en -na de la langue standard correspondent, dans les dialectes haut-lituaniens de l'Ouest, des verbes en -ja, par ex. lit. 476. Exemples: LKG (II, p.230-231, § 324). Cf. aussi Sandbach (1930, p.27-28), Stang (1942, p. 128-129; 1966, p. 358), Zinkevicius (LKIG, II, p. 8889, § 538), Schmalstieg (2000, p. 167-168).
Il est encore difficile de dire lequel de ces schémas peut prétendre à une certaine antiquité et où se situe l'innovation. On peut seulement noter le
477. Cf. Endzelïns (1909, p. 26-27
=
DI, II, p. 115-116).
332
Catégorie du temps
Catégorie du temps
fait qu'un seul de ces schémas n'est pas isolé, mais s'intègre dans une
les voyelles nasales i et {/ produites par la rencontre avec l'infixe nasal ont
structure d'ensemble. Le type (b)[Clauja]
~
[Clave] est, en effet, parallèle
au type (2.1.) des verbes en -ia, [ClaRia]
~
[ClaRe] (type lit. karti
"pendre", ind. prés. kària, prét. k6ré), si on l'interprète comme l'aboutissement de [Clayja]
~
[Claye] : les deux types se ramènent à la même
333
été confondues avec les voyelles longues corrélatives y et il, d'où par ex. lit. visti "se développer", ind. prés. vysta
«
*v[s-sta < *vifis-sta), prét.
viso. Cette évolution secondaire donne, synchroniquement, l'apparence d'une alternance vocalique
«
y / i > et < u / u ». Historiquement, elle
formule [ClaRia] ~ [ClaRe] (avec [R] = sonantes r, l, m, n, !! et 1), à lUle
résulte d'un accident phonétique et ne témoigne pas d'une alternance
différence de syllabation près (lit. kària vaut [ka-r'a], tandis que lit. dia!.
morphologique. La règle de formation est donc toujours identique:
kauja vaut [kau-ja]). Il n'est, dès lors, pas invraisemblable de penser que ce
[C1vCzsta] ~ [ClvCza].
type [Clauja] ~ [ClaVe] s'explique de la même manière que le type
Les verbes à infixe nasal obéissent, en lituanien, à la règle de formation
[ClaRia] ~ [ClaRe] ; il resterait à en déterminer la distribution par rapport à
suivante: [ClvNCza] ~ [ClvCza]. Différentes variations peuvent se produire
l'autre modèle [Clauja]
~
[Clava]. On proposera donc de reconstruire les [Clava] et [Clauja] ~ [ClaVe],
finale du radical (occlusives dentales t, d ou dorsales k, g, occlusives
d'autre part, de manière parallèle, [Clauna] ~ [Clava] et [Clauna] ~ [Clave].
labiales p, b, liquides l, r, sonantes j, v, sifflantes s, z, chuintantes 1, Z).
schémas suivants: d'une part, [Clauja]
~
du fait de la voyelle radicale (a, e, i, u) ou de la nature de la consonne
Les verbes à suffixe thématique -sta- obéissent, en lituanien, à une règle
On obtient le tableau suivant479
:
simple: ils ne présentent aucune apophonie radicale et ont le prétérit en -o. Exemples478
VOYELLE
: OCCLUSIVES
- lit. ind. prés. alksta, prét. alko (inf. alkti "avoir faim"), ind. prés. megsta, prét. mego (inf. megti "aimer"), ind. prés. dingsta, prét. dingo (inf. dingti "disparaître"), ind. prés. témsta, prét. temo (inf. témti "s'assombrir").
DENTALES
-t-, -dOCCLUSIVES DORSALES
-k-, -g-
Quelques accidents phonétiques peuvent parfois se produire, sans que la règle de formation en soit fondamentalement modifiée: disparition des
OCCLUSIVES
occlusives dentales devant sifflante (par ex. lit. vifsti < *virt-ti "se tourner,
LABIALES
-p-, -b-
devenir", ind. prés. virsta < *virt-sta, prét. vino), assimilation de la sifflante à une chuintante antécédente (par ex. lit. plysti "se déchirer", ind. prés. plysta < *plys-sta, prét. plYso). Dans quelques verbes, le suffixe -sta est accompagné d'un infixe nasal (par ex. lit. gèsti "s'éteindre", ind. prés. g?sta < *gens-sta, prét. geso) ; dans les verbes à voyelle radicale i ou
LIQUIDES
-1-, -r-
-a-
VOYELLE
-e-
VOYELLE
-i-
VOYELLE
-u-
• ràsti "trouver" (raiida, riido)
• gèsti "se gâter" (gefida, gedo)
• kàkti "arriver" (kafika, kiiko)
• sèkti • snigti "baisser" "neiger" (sefika, seko) (snifiga, snigo)
• trùkti "durer" (trufika, trùko)
• tàpti "devenir" (tampa, tiipo)
• stèbti "s'étonner" (stemba, stebo)
• tipti "coller" (limpa, tipo)
• grùbti "raidir" (grufhba, grùbo)
• ba/ti "blanchir" (bg/a, bii/o)
• gvérti "branler"
• kilti "se lever" (ky/a, kilo)
• gùrti "s'émietter" (gura, gùro)
(gv~ra,
gvero)
• kristi "tomber" (krifita, krito)
• jùsti "bouger" (jufida, jùdo)
U,
478.Exemples: LKG (II, p.226-228, §§ 311-318). Autres exemples: Otr~bski (GJL, II, p.320-326, §§ 535-542). Cf. aussi Zinkevicius (LKIG, II, p. 88, § 537).
479. Cf. LKG (II, p. 223-225, §§ 305-309). Autres exemples chez KaukienëPakalniskienë (1990, p. 119-125). Cf. aussi Kazlauskas (1968, p. 317), Zinkevicius (LKIG, II, p. 87, § 536), Schmalstieg (2000, p. 150-156). Exemples lettons chez Forssman (2001, p. 171-176).
334
Catégorie du temps
SONANTES
-j-, -v-
SIFFLANTES
-s-, -z-
CHUINTANTES
-5-,
-z-
335
Catégorie du temps
• variation < brid- / bred- > : lit. bristi
• pûti "pourrir" (puva, pùvo)
• gyti "guérir" (gjija, gijo)
*brid-ti) "marcher dans
l'eau", ind. prés. brefida « *breNd-a), prét. brida, cf. LKZ (e, p.l056-1060). • variation < skrid- / skred- >: lit. skristi «
• driksti "se déchirer" (dryska, drisko) • tiksti "goutter" (tjska, fisko)
«
*skrid-ti)
"voler (en
avion)", ind. prés. skrefida « *skreNd-a), prét. skrido, cf. LKZ (XII, p. 1080-1086). • pliùksti "maigrir" (pliuska, pliùsko)
L'existence d'une apophonie radicale dans l'indicatif présent de ces verbes est une irrégularité, qui a toute chance d'être secondaire. Certains dialectes lituaniens (domaine bas-lituanien, haut-lituanien de l'Ouest) ont une forme d'indicatif présent breda sans infixe nasal. Au XVlf siècle, dans le
Dans les verbes dont le radical comporte une liquide, une sonante, une
dictionnaire de Sirvydas (DTL 3 , p. 22), on trouve, d'une part, Bredu
sifflante ou une chuintante, la rencontre de ce phonème avec l'infixe nasal
(traduisant Brnç / Bradzç, Tranfeo jluvium, Vado, as), d'autre part, Brindu
produit des accidents phonétiques qui aboutissent régulièrement à la
(traduisant Bradze pa wodiie. Ambu/o in aqua). Cette dualité pourrait
constitution de voyelles nasales: [an] donne alors
[~],
[en] donne [ç], [in]
donne [U, [un] donne [V]. Ces voyelles ont été dénasalisées dans la langue
conduire à supposer l'existence de deux verbes proches, tous deux réguliers48 l
moderne et sont devenues des voyelles longues, ce qui, dans le cas de i et de
~,
:
- (a) d'une part *brèsti, ind. prés. *breda, prét. *bredé, du même type que vèsti "conduire", ind. prés. veda, prét. vëdë.
a conduit, dans ces verbes, à leur confusion graphique avec les
voyelles corrélatives y et ü. D'où, par exemple, lit. ind. prés. ky/a < *ki/a
- (b) d'autre part, *bristi, ind. prés. *brifida, prét. *brido, du
< *kiN/a (: inf. ki/ti "se lever", prét. ki/o), ind. prés. gura < *g~ra
même type que sklisti "se répandre", ind. prés. sklifida, prét. sklido.
< *guNra (: inf. gùrti "s'émietter", prét. gùro), ind. prés. gj!ja < *gfja
Ces deux verbes se seraient ensuite contaminés pour aboutir à une flexion
< *giNja (: inf. gyti "guérir", prét. gijo), ind. prés. puva < *p~va
aberrante: lit. bristi, ind. prés. brefida, prét. brido. La même situation
< *puNva (: inf. pûti "pourrir", prét. pùvo). Cette altération particulière
s'observe en letton, où l'on a brist, ind. prés. bried
présente, synchroniquement, l'apparence d'une
«
«
alternance vocalique
«
*brefid-a) ou brien
y / i » ; elle n'est, en réalité, qu'un accident phonétique.
*brefid-na), prét. brida « * brid-a)482. L'existence d'un doublet *bred- / *brid- se retrouve dans les langues slaves : un degré *e radical
Les verbes à infixe nasal sont en général dépourvus d'apophonie
constant caractérise les formes apparentées du slovène (ind. prés. 1re sg.
radicale. Toutefois, en lituanien, quelques verbes de ce type ont une alternance anomale du radical à l'indicatifprésent. Les principaux exemples sont les suivants480 :
480. Ajouter peut-être lit. dial. ind. prét. refita, prét. rito (: inf. risti "rouler"), cf. LKZ (XI, p. 684). Le lituanien standard a un indicatif présent sans infixe nasal et sans variation apophonique rita. Cf. Smoczynski (1994, p. 508
== 2001, p. 391). Autres exemples possibles chez Kazlauskas (1968, p.324);
voir aussi Kurylowicz (1956, p. 221), Schmalstieg (2000, p. 147). 481. Analyse comparable chez Kazlauskas (1968, p.323-324). Noter cependant que le dialecte de Sirvydas fait passer les séquences [en] à [in]: la forme brindu peut donc s'y interpréter soit comme *brindu, soit comme *brendu. 482. Cf. ME (1, p. 332-333).
336
Catégorie du temps
Catégorie du temps
brédem, inf. brésti), et peut-être du russe (ind prés 1re sg 6 . . . . pe.o;y / bredu mf. 6pecTH / bresti "marcher dans l'eau" sauf si l'on ad t l ' * ," . ' me que e thème bred- de 1 mfimtIfprolonge phonétiquement *brld- ce qui est 'bl " . ' P O S S I e); un degre zero radIcal apparaît en v. slave Henpt6ph .a:OMb / neprebrbd '" ft . orrl1. In an~hIssable" (suppose un présent *brldQ), en vieux tchèque (v. tch. brdu, mf. bfisti) et indirectement en polonais (pol
patauger barboter" < *brldnQti)483. Il paraît possible de reconstruire, sur la base d~ slave,
une flexion
alternante en
balto-slave,
•
brnnc""
ind.
't"
prés.
*breda
337
Il reste à évoquer quelques verbes irréguliers qui présentent une apophonie radicale. En lituanien, deux verbes se signalent par un prétérit irrégulier à allongement: • variation < im- / ém- >: lit. iihti "prendre", ind. prés. ima, prét. émé.
• variation < ei- / éj- >: lit. eïti "aller", ind. prés. elna, prét. éjo (dia!. ejo). Il n'est pas du tout sûr que l'allongement de la voyelle radicale au prétérit
« *bhred'-efo-, alb. bredh "sauter"), inf. *bristi (au lieu de *birsti <*bhliri'- t'1-)484 , dont certames . langues auraient généralisé le degré plein
représente quelque chose d'archaïque dans ces verbes. Le rapprochement
(*bred-, type slovène ind. prés. 1re sg. brédem, inf. brésti), d'autres le
ancien, et souvent répété, du prétérit émé et du parfait latin emï
degré zéro (*brid-, type v. tch. brdu, inf. bfisti). En baltique, cette flexion
(éventuellement analysé comme un parfait à redoublement *h 1e-h1m-)485 est
alternante aurait été, elle aussi, modifiée par une généralisation du degré *e
certainement anachronique: on attendrait une intonation rude en baltique.
(d'où lit. *brèsti, ind. prés. *breda, prét. *bredé) ou du degré zéro (d'où
La solution la plus simple consiste à supposer que la voyelle longue des
lit. *bristi, ind. prés. à infixe nasal secondaire *brifida, prét. *brido);
prétérits émé et qo est secondaire; l'existence d'une forme dialectale ejo,
seule la seconde forme aurait survécu, mais en adoptant à l'indicatif
sans allongement, semble appuyer cette hypothèse. On peut admettre, avec
présent, pour des raisons qui restent à définir, le vocalisme de la première.
ZinkeviCius (LKIG, II, p. 110, § 566), que la voyelle longue a été tirée
La flexion du' verbe lit. skristi (ind. prés. skrefida, prét. skrido) serait,
secondairement des formes négatives contractées: *nè-ejo > *nqo ~ éjo et
quant à elle, simplement analogique de celle de bristi. Si l'on néglige ces
*nè-emé > *némé ~ émé. Dans cette analyse, le verbe "aller" ne présente
cas isolés, la formation à infixe nasal apparaît, tout autant que la formation en -sta, dépourvue de degré apophonique propre.
plus d'apophonie radicale et n'oppose que deux allophones,
[ej-]
antévocalique (lit. dial. ej-o) et [ei-] antéconsonantique (lit. el-ti, el-na). Quant au verbe "prendre", il pose des problèmes complexes qu'on ne peut aborder ici que brièvement. Les données baltiques sont diverses et ne peuvent se comprendre que comme des réfections secondaires à partir d'un
483. Données slaves: LIV (p. 75), Trautmann (BSW p 37) Cf. aussi Stang (1942, p. 109). ,. . . 484. P,our *br~d- .degré zé!'o de *bred- au lieu de *bird- « *bhrcl'-ti-), cf. le cas 'p~rallele de . kllp-. degre zéro de *klep- au lieu de *kilp- « *kJp-): le partIcipe v. pro n.l.aukllpts ~vnuerborgen "qui n'est pas caché" (III, 12314-15) s~ppo~e ~n I~fimtl,f secondaIre *klipti au lieu de *kilp-ti- « *kJp-ti-), en regard d ~n . mdlcatlf present *klep-efo- (cf. got. hU/an "voler, KÀÉrrTElv", et plus lomtamement gr. KÀÉITTW). En lituanien, cette racine est représentée par le dérivé ~lastà "r.use, astuce" « *klap-sta)? Le: question reste posée du rapport ety~ologlque avec la famille du li~. slépti '~cacher" « *s-(k)lep-, avec *s mobl~e ?), cf. LIV (p. 323-324). VOIr le dOSSier étymologique de la fonne prussIenne chez Toporov (PrJ, 1, p. 149-150) et Maiiulis (PKEZ, III, p. 184).
état apophonique ancien devenu anomal. En indo-européen, la racine *h1em- "prendre" dont dérive le verbe "prendre" en baltique était typi-
quement une racine aoristique (ponctuelle), et il est probable qu'elle fournissait avant tout un aoriste radical. On peut proposer de reconstruire, pour l'indo-européen, un aoriste radical athématique, probablement moyen, *h1em-to "il prit", à degré *e radical, parallèle à i.-e. *gem-to "il saisit" (> gr. homo
yÉVTO
"il saisit"). Dès l'indo-européen, un présent secondaire
485. En ce sens, par exemple Stang (1942, p. 117).
339
Catégorie du temps
Catégorie du temps
s'est constitué sur cette racine aoristique. Ce présent est du type radical
im ma / nam "prit" (III, 75 2 < *im-a-). En lituanien et en letton, l'état
thématique, i.-e. *h1em-efo- (> lat. emo "prendre, acheter", v. ir!. -eim,
apophonique ancien (inf. *im-, ind. prés. *em-, prét. *em-) a été modifié par
-emat "prendre") ; l'innovation est en tous points comparable à celle qui a
l'introduction d'une voyelle longue au prétérit, sans doute à partir de la
créé, en regard de l'aoriste *gem-to (> gr. Y~VTO), un présent radical
fonne négative (*nè-ëmé > *némë ~ émë), d'où un paradigme composite,
thématique *gem-efo- (> gr. Y~llw "prendre, occuper, remplir> être chargé",
attesté largement dans les dialectes lituaniens (haut-lituanien de l'Est, de
incertain: lat. gemo "gémir" < "presser le souflle" ?)486. Dans quelques
l'Ouest, bas-lituanien): inf. *im-ti, ind. prés. *em-a, prét. *ëm-ë, cf. lit.
langues, un présent d'un autre type a été créé: i.-e. *h1em-iefo- (> hitt.
dial. jimti, ind. prés. jëma, prét. jémé. Ce paradigme était cependant
w-emiyezzi "il trouve", v. sI.
jemljQ "je prends"); ailleurs
aberrant, parce qu'il contredisait le principe du "bithématisme apo-
encore, l'ancien prétérit athématique a été refait en aoriste sigmatique (> v.
phonique" qui prévaut dans tout le système verbal des langues baltiques :
irl. -ét "il prit" < *ëm-s-t). Le balto-slave pourrait avoir hérité de l'indo-
il opposait, en effet, trois thèmes [im-], [em-] et [ëm-]. La nécessité
338
I€MJIhlK /
«
*h l 1p.-ti-), ind. prés. *em-e-
s'imposait dès lors de réduire cette opposition tripartite des thèmes
« *h1em-efo-, cf. lat. emo, v. ir!. -eim, -emat), prét. *em-t(a), *em-s-tfJ,« aoriste radical athématique i.-e. *h]em-to, éventuellement refait en
temporels à une opposition bipartite. En lituanien littéraire, cette réduction
aoriste sigmatique). Cette flexion anomale aurait été diversement
iihti, ind. prés. ima (au lieu de *ema), prét. émé, qui permettait de limiter
normalisée en baltique et en slave.
la variation apophonique à une opposition binaire < im- / ëm- >. À
européen le paradigme suivant: inf. *im-ti-
En baltique, le prétérit sigmatique (qui prolongerait, en l'occurrence, un
s'est faite au profit du thème faible de l'infinitif, d'où un paradigme: inf.
l'inverse, en letton, c'est le thème de l'indicatif présent qui s'est étendu à
« *em-ti),
ancien aoriste radical athématique) a disparu sans laisser de traces directes;
l'infinitif, d'où, en letton dialectal, un paradigme: inf. jemt
il a été remplacé par le prétérit en *-ë-. D'où un paradigme proto-baltique:
lieu de jimt «
inf. *im-ti-, ind. prés. *em-a, prét. *em-ë, qui a connu des évolutions
prés. jfm
diverses dans les différents dialectes. Le vieux prussien a généralisé le
/ (j)ëm- >. Le letton standard, enfin, a contaminé l'initiale du verbe jemt
thème faible de l'infinitif, nivelant le paradigme autour d'un thème unique
avec celle de son synonyme nemt "prendre", ind. prés. nfm, prét. n~ma
*im-: inf. lmt /nemen "prendre" (par ex. III, 99 14), ind. prés. imma /neme
(emprunté à l'allemand nehmen), d'où, en letton standard, un paradigme :
"je prends" (par ex. III, 107 15 ), ind. prét. imma / nam "il prit" (III, 752).
inf. {lemt, ind. prés. {lfm, prét. fl?ma.
résiduellement dans le dialecte de Kaunata), ind.
*em-a), prét. jëme
«
*ëm-ë), avec variation binaire < (j)em-
En slave, l'ancien aoriste radical athématique *h1em-to survit dans la
On notera qu'en prussien, le prétérit hésite, dialectalement, entre le type en *-ë et le type en *-ii, cf. v. pro ymmeits / nam "prit" (II, 13 5 < *im-ë-), vs.
«
*im-fi,
au
e
2
/
3e pers. sg. de l'aoriste
V.
sI.
làTb
/j'it'b "tu pris, il prit" (prolongeant
i.-e. *h1em-to, avec finale refaite), forme isolée· à l'intérieur d'un paradigme 486. Sur ce verbe, voir le LIV (p. 165). Autres exemples de la coexistence d'un aoriste radical athématique et d'un présent radical thématique: gr. homo OÉ"KTO "il reçut" « aoriste radical athématique *dek-to), vs. gr. ion. OCKOllaL, att. OÉ"XOllaL "il reçoit" « présent radical thématique *dek-'1o-) ; gr. homo ÀÉ"KTO "i 1 se coucha" « aoriste radical athématique *let-to), vs. gr. ÀÉ"XETaL' KOLllàTaL "il est couché", Hésychius, got. ligan "être couché, KEtaeaL", v. irl. la(i)gid "se coucher" « présent radical thématique *let-efo-); gr. homo xtJTO "il fut versé" « aoriste radical athématique *tu-to), vs. gr. XÉ"w "il verse" « présent radical thématique *tey-efo-).
secondaire d'aoriste sigmatique (v. sI. lACOM'b /
r e pers. sg. làC'b / jÇS'b, 1re pers.
pl.
jçsom'b)487. À côté de cette forme archaïque, le proto-slave a
hérité, comme d'autres langues, d'un présent thématique secondaire. Alors 487. Sur cette particularité de l'aoriste slave, cf Vaillant (GCL8L., III/l, p. 54-56, §§ 365-366). Mise en relation avec l'aoriste radical athématique chez Stang (1942, p. 65-68).
340
Catégorie du temps
Catégorie du temps
qu'en baltique, ce présent est radical thématique (lit. dial. jëma), comme' en latin (lat. emo), en slave, il est thématique suffixé en *-jo/(r , comme en hittite (hitt. w-emiyezzi): v. sI. I€MJI~ / jemljQ "je prends"
*h1em-jefo-).
« i.-e.
Parallèlement à l'ancien aoriste athématique et au présent
thématique secondaire, il a dû exister aussi une forme nominale à degré
341
Il existe un dernier verbe apophonique en lituanien et en letton490 : - variation < vir- / vér- >: lit. virti "cuire, bouillir" (ind. prés. vér-da, prét. vir-é) = lett. vif! "cuire, bouillir" (ind. prés. v{?fd, prét. vira).
zéro radical, qui en est venue à assumer les fonctions de l'infinitif: balto-
Le parallélisme des formes en lituanien et en letton montre l'ancienneté du
slave *im-ti- « i.-e. *h1rp-ti-). Ces deux formes ont développé chacune des
paradigme. Le prétérit est en
paradigmes complets, opposés par l'aspect:
conservent le prétérit en *-ë- (cf. par ex. 1re pers. sg. ryru à Kaunata, en
- (a) présent perfectif, v. sI. inf. !ATH / jçti "prendre, KpaTElv, ÈTTLÀal-l~
fondé sur la forme ancienne d'infinitif *im-ti. La
analogique du type v. sI. )KATH / içti
« *im-o-) est probablement "presser" « *iim-ti- < i.-e.
«
*iim-o-, au lieu de *iem-o-
forme de l'indicatif présent HM~ / imQ *grp-ti-), ind. prés. )KHM~ / iimQ
< *gem-efo-, gr. yÉl-lw), qui s'oppose également à un ancien aoriste
radical athématique *gem-to (gr. yÉVTO "il saisit")488. - (b) présent imperfectif, v. sI. ind. prés.
I€MJI~
/ jemljQ "je
prends", fondé sur l'ancien présent thématique i.-e. *h1em-jtfo-. La forme apophonique de l'infinitif HMaTH / imati
« *lm-a-) est
secondaire: elle s'intègre dans un type imperfectif qui a été productif en slave, cf. v. sI. CThJIaTH / stllati "étendre, ŒTPWVVUVQl"
« *stil-ati-
~
i.-e.
*stJ-ti-),
ind. prés.
CTeJI~
/ steljQ
« *stel-io-,
gr. ŒTÉÀÀw)489.
*-a- en
letton, même dans les dialectes qui
regard du lit. viriaii)491; le prétérit en *-ë- du lituanien doit être secondaire. Si l'on fait abstraction de la suffixation en dentale à l'indicatif présent, le verbe est donc comparable au type lit. gifhti "naître" (ind. prés. gema, prét. gimé), dont la formation a été définie plus haut comme:
Présent [CleR-a]
~ Prétérit
[CIR-a]. Il est possible qu'à l'origine il ait
existé deux verbes, un verbe intransitif non-marqué (inf. *vïr-ti- "bouillir", ind. prés. *ver-a, prét. *vir-ii), appartenant au type lituanien .gifhti, et un verbe intransitif de sens intensif (inf. *vër-d-ë-ti- "bouillir, bouillonner", ind. prés. *vër-d-a, prét. *vër-d-ëj-ii). Le cas serait en partie parallèle à celui du lituanien skilti "se déchirer, se fendre" (ind. prés. à infixe nasal skyla, prét. skilo) et skéldéti "se fendre, se crevasser" (ind. prés. skélda ou skéldi, prét. skéldéjo)492. Par la suite, les deux verbes se seraient
contaminés, d'où un paradigme hétéroclite: inf. *vïr-ti- "bouillir", ind. prés. *vër-d-a, prét. *vir-a. Un facteur qui a pu jouer un rôle dans la réfection morphologique est le risque de collusion homonymique avec la
On ne saurait, en définitive, souscrire à l'opinion de Vaillant (GCLSL.,
famille du verbe lit. vérti "frapper, enfiler, fermer / ouvrir" (ind. prés. veria,
11112, p. 310, § 540), qui estime que le baltique a confondu deux présents
prét. vere). C'est, du reste, probablement ce même facteur qui explique la
*ime- et *jem(l)je- conservés distincts en slave: c'est, en réalité, le slave
baltique sous une forme modifiée.
490. Il n'y a rien à tirer de la forme prussienne auwerus / sindir "scorie (d'un métal)" (E 529), qui recouvre probablement *au-vir-a-, cf. lit. nuoviros "écume (d'un liquide qu'on fait bouillir)" (: inf. nu-virti "faire bouillir, évacuer en faisant bouillir"). Sur cette forme, cf. Toporov (PrJ, l, p. 176-177), Maziulis (PKE2, l, p. 125-126).
488. Analyse comparable chez Vaill~nt (GC,LSL., I!I/l, p. !94,. § 458), qui signale également l'importance de l'anCIen aOrIste radIcal athemattque dans le développement de ce type. 489. Exemples slaves: Vaillant (GCLSL., 11112, p.309-319, §§ 540-546, p. 309-310 sur le slave imati).
491. Cf. Endzelïns (1909, p. 12 = DI, II, p. 101). 492.Cf. Smoczynski (1984, p. 124 = 2001, p.478). Analyse dans le même sens chez Stang (1942, p. 142-143). Sur l'origine de la dentale, cf. Smoczynski (1987a, p. 197-212), Bammesberger (1992, p. 7-13). Analyse peu convaincante chez Forssman (200 1, p. 171).
qui a séparé deux verbes à partir d'un paradigme unique, conservé en
342
Catégorie du temps
343
Catégorie du temps
double diathèse actuelle du verbe virti en lituanien (intrans. "bouillir" et
contrastes apophoniques historiquement attestés <
trans. "faire bouillir")493:
koré), <
une forme causative
apophonique
était
e/ e>
(lit. ke/ia, vs. kélé), <
r/
a/ a >
(lit. kêiria, vs.
ï > (lit. giria, vs. gjré),
impossible dans ce verbe (elle aurait dû être tvérti, homonyme de vérti
< U / ü > (lit. kùria, vs. kûré), il a pu exister également, à date ancienne,
"frapper, enfiler, fermer / ouvrir").
un contraste < 0/ () >, devenu par la suite <
Pour finir, on signalera le cas d'un
a/ Q>
(v. pro -pall-, vs. lit.
verbe dont la diversité
puol-). Cette analyse pose une difficulté d'ordre chronologique: elle
morphologique dans les langues baltiques pourrait conduire à reconstruire un ancien paradigme à apophonie radicale4 94 :
contraint à supposer que la formation à voyelle longue à l'indicatif prétérit
- lit. inf. pùlti "tomber, attaquer" (ind. prés. puola, prét. puolé), cf
est un fait de très haute antiquité, puisqu'elle précèderait le passage de *0 à *iî en proto-baltique. À mon sens, les données étymologiques permettent de contredire cette
LKZ (X, p. 884-906) ;
- v. lett. inf. pult "tomber-" (ind. prés. puol, prét. pul), cf. ME (Ill,
hypothèse. Parler d'allongement à l'indicatif prétérit n'a de sens que si
p.409) ;
l'on admet, comme le font implicitement Stang (1966, p. 334), Toporov
- v. pro ind. prés. (sien) aupallai / sich. .. befindet "befindet sich, il
(PrJ, l, p. 160) et Maziulis (PKEZ, l, p. 120), une racine indo-européenne
se trouve" (III, 69 19), aupallai / findet "findet, trouve" (III, 8120, III,
*pel-, attestée constamment au degré fléchi *pOl- (>
1076), aüpallai (III, 7920-21 ), part. prét. actif nom. pl. masc.
allongement au prétérit, *pol- (> letto-lit. puol-). Mais, on observe que les
aupallusis "qui ont trouvé" (III, 11726).
formes du baltique oriental ont une intonation radicale rude (lit. puola), œ
Selon Maziulis (PKEZ, l, p. 120), le paradigme proto-baltique était: inf. *pal-, ind. prés. *pal-, prét. *pol-. Le baltique occidental aurait généralisé
le thème faible de l'indicatif présent (*pal- >
V.
pr. -pall-), le baltique
oriental le thème fort de l'indicatif prétérit (*pol- > letto-lit. puol-), thème qu'il aurait seulement altéré phonétiquement à l'infinitif devant consonne (*puol-C- > *pùl-C-, lit pùlti,
V.
lett. pult, d'où, par analogie,
V.
lett.
ind. prét. pul). La confrontation du thème *pal- du vieux prussien et du thème *pol- du baltique oriental suggère une ancienne apophonie paradigmatique. Kazlauskas (1968, p. 353) suppose ainsi que le vocalisme long était propre, à l'origine, à l'indicatif prétérit, en regard d'un indicatif présent à vocalisme bref. Formellement, cela signifie qu'à côté des 493. Sur la double diathèse dans le verbe lituanien virti, cf Petit (l999a, p. 78-82). Ce processus a pu être favorisé également par la proximité sémantique entre, d'une part, virti "bouillir", d'autre part, dègti "brûler" et kèpti "cuire", eux aussi verbes à double diathèse. 494. Sur ce verbe, voir notamment Kaukiene (1994, p.53, sur la forme de prétérit, p. 104-106), Schmalstieg (2000, p. 145). Sur la forme prussienne, voir Toporov (PrJ, l, p. 159-160), Maziulis (PKE2, l, p. 120).
V.
pr. -pall-) et, avec
qui contredit l'idée d'un allongement morphologique. En outre, la racine indo-européenne est actuellement reconstruite d'une manière différente, non pas comme *pel-, mais comme *peh3lH- (LI V, p.418). En ce cas, le contraste entre le v. prussien -pal/- et le letto-lituanien puol- ne s'interprète pas comme prolongeant l'opposition d'un vocalisme bref et d'un vocalisme long (ou allongé), mais bien plutôt comme prolongeant celle d'un degré zéro et d'un degré plein du radical: le i.-e. *ph 3lH- (cf. germanique *fallan,
V.
V.
prussien -pall- reflète
isl. falla "tomber", réfection de
*phJ!-né/n-H-), tandis que le letto-lituanien puol- reflète i.-e. *peh 3lH- (cf.
arm. p lanim "tomber", réfection d'après l'aoriste p law < *p 'ul- < *polH< *peh 3IH- )495. Comme le montrent les correspondants étymologiques, il
n'est pas impossible que la forme prussienne continue un ancien présent à infixe (> suffixe) nasal *phJ!-né/n-H- (attesté en germanique), la forme letto-
495. Il n'est pas impossible, comme le suggère le LIV (p. 414 et 418), que le slave naCTH, na}:(~ / pasti, padÇ! "tomber" résulte de la contamination d'un radical *pëd- « i.-e. *ped-, avec allongement dû à la loi de Winter, cf sanskrit véd. pcidyate "tomber") et d'un radical *piil- « i.-e. *peh3/H-, cf. lit. pua/a).
Catégorie du temps
344
34S
Catégorie du temps
lituanienne un ancien aoriste radical (attesté indirectement en arménien). Il
• Type thématique suffixé (-ia-) :
semble que ce verbe ait eu, en indo-européen, une flexion ind. prés. *ph 31né/n-H- (à infixe nasal), vs. aor. *peh 3 IH- (radical), d'un type connu par
ailleurs, ainsi dans la racine *bh eiH- "frapper": ind. prés. *bhi-né/n-H(> v. irl. -ben, -benat "frapper"), aor. *bheiH- (> v. sI. d'où présent secondaire
6RTR, 6R~ /
6R /
bi "il frappa",
VOYELLE RADICALE AU PRÉSENT
(1.) e
biti, bijQ "frapper"). Sur cette base,
(2.) a
les langues baltiques auraient généralisé soit le degré vocalique propre à
(3.) i
l'ancien présent à infixe nasal (*ph 31-(H)- > v. pr. _pall_)496 , soit le degré
(4.) u
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
RADICAL EN SYLLABE LÉGÈRE
ClVC2
ClvR
(1.) CIeC2ia
~
(2.) CjaC2ia
~
CjëC2ë CjaC2ë
(1.1.) CjeRia
~
CjëRë
(2.1.) CjaRia
~
CjaRë
(3.1.) CjiRia (4.) CjuC2ia
~
CIÜC2ë
(4.1.) CjuRia
~
~
CjïRë CIüRë
vocalique propre à l'ancien aoriste radical (*peh)-(H)- > letto-lit. puol-) ; rien à voir, donc, avec le type à allongement du prétérit, qui est VOYELLE RADICALE
probablement une innovation des langues baltiques.
AU PRÉSENT
IV. GENÈSE DES APOPHONIES RADICALES DANS LE SYSTÈME
(S.) toute
RADICAL EN SYLLABE LOURDE
ClvRC2 ou ClVC 2 (S.) ClvRC2ia ~ ClvRCë
voyelle
TEMPOREL BALTIQUE
(6.) voyelle
Les règles de formation examinées ci-dessus permettent d'isoler
(6.) C lvC 2ia ~ C l VC 2ë
longue
quelques types dans lesquels l'opposition du thème de présent et du thème de prétérit est accompagnée d'un contraste apophonique. Ces types sont les suivants (présentés en italique dans les tableaux) :
VOYELLE RADICALE
(7.) finale
• Type thématique (-a-) : VOYELLE RADICALE
RADICAL À FINALE VOCALIQUE
AU PRÉSENT
(7.) Clvja ~ Clvja
vocalique
C2t:-R
C2=R,0
AU PRÉSENT
L'examen de ces tableaux permet de distinguer deux types d'apophonie radicale dans l'opposition des thèmes temporels 497
~
(l.)e
(1.) CleC2a ~ Cle2ë
(1.1.) CIeRa
(2.) a
(2.) ClaC2a ~ ClaC2a
(2.1.) ClaRa ~ ClaRa
(3.) eR
(3.) CIeRC2a
(4.) e, a
(4.) C lVC 2a ~ ClVC2a
~
CIRa
CjRC2a
:
- (a) une apophonie qualitative < eR / iR > (historiquement *< eR
/ R », associée au prétérit en *-ii-, et qui apparaît dans deux soustypes:
(4.1.) CjRa ~ CIRë
496. Stang (1942, p. 161) admet même que la forme prussienne provient directement de l'ancien présent à infixe nasal *ph31-né/n-H- à travers une évolution *palna-ja > v. pro -pal/ai.
497. Voir la présentation d'Endzelïns (1923, p. 671, § 682 sq.).
346
Catégorie du temps
- (b) une apophonie quantitative <
v / v >,
Catégorie du temps
associée au prétérit en
*-e-, et qui apparaît dans les sous-types suivants:
347
- gr. ÈÂl TTOV "je laissai"
«
prés. gr. À.cL TTW, dial.
ÂlIJ. iTci vw), vs.
*likw-efo-, racine *leik w- "laisser", cf.
lit.
liko "il
• CIRa
~
CIRe
«
• C 1eC 2ia
~
C leC2e
lifika).
• ClaC 2ia
~
C laC 2e
-
• CluC 2ia
~
C lüC 2e
"s'éveiller, prendre conscience", cf. prés. gr. homo
• CleRia
~
CleRe
TTvvecivol.lal), vs. lit. bùdo "il s'éveilla"
• ClaRia
~
ClaRe
européen *bhucf-ii-, cf. prés. lit. bufida).
• CIiRia
~
C)ÏRe
• CluRia
~
ClüRe
laissa"
transposé en indo-européen *likw-ii-, cf. prés. lit. /ieka, dial. gr. ÈTTVeÔJ-lTlV "j'interrogeai"
«
*bhucf-efo-, racine *bheycfiTE1)eO~al,
class.
« transposé en indo-
Significatif à cet égard est le fait qu'en grec les présents à infixe nasal s'opposent, en général, à des aoristes radicaux thématiques (type gr.
Là où une apophonie radicale se manifeste, le prétérit en *-iï- implique
À.a~~civw "prendre", aor. ÈÂa~ov, gr. TVYXcivw "recevoir", aor. ETVXOV,
donc un passage au degré zéro, le prétérit en *-e- un allongement vocalique.
etc.) et qu'en lituanien tous les présents à infixe nasal s'opposent à des
Cette distribution, qui est régulière dans les langues baltiques, reflète
prétérits en *-iï- (type lit. rafida "trouver", prét. riïdo, lit.
certainement un trait ancien de ces deux formations, ou, plus exactement
"s'éveiller", prét. bùdo, etc.). On sait, en outre, que le slave a conservé des
peut-être, des formations qu'elles ont remplacées au cours du temps. Il est
aoristes
clair, en tout cas, que la question de l'apophonie radicale est essentielle
indépendante (v. sI. JIe)f(e / leze, aoriste de JIelliTM / le/Ii "se coucher,
pour qui s'interroge sur l'origine des prétérits baltiques.
KOl~àŒeaL"),
radicaux
thématiques
non
seulement
comme
bufida
formation
mais aussi de manière résiduelle à l'intérieur de la formation e
e
La genèse de ces apophonies radicales a donné lieu à de nombreuses
sigmatique (v. sI. 2 _3 pers. sg. Hece / nese en regard de 1re pers. sg. Htcb
analyses. En général, on leur a cherché des correspondants externes dans les
/ nes'b, aoriste de HecTM / nesti "porter, epÉpElV"); dans plusieurs cas, des
autres langues indo-européennes. Ainsi, s'agissant de l'apophonie quali-
prétérits en *-iï- leur correspondent dans les langues baltiques, ainsi
«
e
V.
sI.
e
*-a-,
aoriste 2 _3 pers. sg. 6b,ne / b'bde en regard du lit. bùdo "il s'éveilla",
une comparaison a pu être faite avec l'aoriste thématique indo-européen,
v. sI. aoriste 2 _3 pers. sg. rrpM-JIbrre / prilbpe en regard du lit. lipo "il se
qui présente, par rapport au présent thématique, un contraste apophonique
colla". Par ailleurs, le slave a trace d'un suffixe *-ii-, qui apparaît, comme
du même ordre. L'opposition d'un degré *e dans le présent lit. pefka "il
en baltique, lié à un degré zéro du radical, cf.
achète" et d'un degré zéro dans le prétérit lit. pifko "il acheta" rappelle en
6bpaxb / bbrax'b de 6bpaTM / bbrali "choisir, cueillir, ÈKÂÉynv" (prés.
effet celle qui sépare, en grec, le présent radical thématique iTÉpew "ruiner,
6epR / berQ), aor. 1re pers. sg. rbHaXb / g'bnax'b de rbHaTM / g'bnali
piller" « *bhercf-) de l'aoriste radical thématique ËiTpaeOV
"chasser, ÈÂauvElv,
tative < eR / iR >
eR / R » qui caractérise certains prétérits en
«
*bhrcf-), ct:
encore gr. ÂEl iTW "laisser", aor. ËÂl TTOV, gr. epEUYW "fuir", aor. Ëepvyov,
e
e
OlWKElV"
V.
sI. aor. 1re pers. sg.
(prés. )f(eHR / zenQ)498. Il est donc
vraisemblable que le prétérit en *-ii- des langues baltiques est un
etc. La correspondance s'étend même à quelques unités lexicales plus précises, comme les suivantes : 498. Autres exemples: Stang (1942, p. 34, comparaison avec le lit. p. 7576).
348
Catégorie du temps
Catégorie du temps
remplacement de l'ancien aoriste radical thématique de l'indo-européen499.
les deux formes, en contraste avec l'indicatif présent. Cela a eu une
Dans cette analyse, le degré apophonique zéro qui marque certains prétérits
conséquence importante: dans l'opposition des thèmes temporels en
baltiques en *-ii- peut s'interpréter comme le vestige de l'ancien degré zéro propre aux aoristes radicaux thématiques. On notera cependant une
baltique, thème de prétérit et thème d'infinitif forment en général une unité apophonique et s'opposent au thème de présent 500 .
différence importante entre le type indo-européen, tel qu'il est reflété par
S'agissant du prétérit à allongement, on a souvent été tenté de lui
exemple en grec, et le type baltique. En grec, un aoriste radical thématique
attribuer une antiquité indo-européenne et de le rapprocher de formations
peut être constitué sur des radicaux à sonante (type Ënpa80v
sur TTÉ pSw
prétéritales à allongement attestées ailleurs, par exemple en latin (type lego
"ruiner, piller") comme sur des radicaux sans sonante (type Ëaxov sur
"je lis", prés. < *leg-, vs. legl "je lis", prét. < *leg-, uenio "je viens",
Ëx w "avoir"). Dans les langues baltiques, la formation apophonique qui
vs. uenl "je vins", fodio "je creuse", vs. JOdl "je creusai") ou encore en
dérive de l'ancien aoriste radical thématique s'est limitée aux radicaux
germanique (got. nemum < *nem-, prét. 1Te p. pl. de niman "prendre,
comportant une sonante susceptible de se vocaliser (type lit. pif'ko sur
Àal-l~âvElv" <
pefka "acheter", gimé au lieu de *gimo sur gema "naître") ; les radicaux
gebum, prét. 1Te p. pl. de giban "donner, oLoé>vaL "), mais aussi et surtout
sur ËTTO~aL "suivre" < *sek
seké < *sek
w -,
ÉaTTô~TW
r e p.
pl. de bairan "porter,
< *-sk _%_
dans l'aoriste sigmatique indo-européen, tel qu'il est reflété en védique
et lit. sèkti "suivre", ind. prés. seka, prét.
(véd. étbhiir < *bher-s-t, aoriste 3e p. sg. de bhétrati "porter" < *bher-), en
sans sonante en ont été exclus (comparer par ex. gr. w -,
*nem-, berum, prét.
349
w
sans apophonie). Le domaine de l'apophonie s'est donc
latin (lat. uexï, perfectum de ueho "conduire") et en slave (v. sI.
Bi>Cb
réduit, en baltique, aux seuls radicaux susceptibles de la réaliser aisément
/ veso < *yed'-s-om, aor. 1Te p. sg. de BeCTI1 / vesti "conduire,
d'un point de vue phonétique.
< *yed'-). Cette théorie traditionnelle, défendue après Wiedemann (1891)
On observe, au passage, que cette apophonie spécifique des anciens aoristes
radicaux
thématiques
concorde
avec
celle
des
notamment par van Wijk (1914-1915, p. 367-383), Stang (1942, p. 193 ;
infinitifs
1966, p.389) et Kazlauskas (1968, p.360-361), pourrait s'appuyer sur
apophoniques : le prétérit lituanien pifko se distingue de l'indicatif présent
quelques rapprochements ponctuels, comme celui du prétérit lituanien à
pefka, mais se rapproche de l'infinitif pif'kti. Cette convergence est certes
allongement béré de befti "disperser" et du prétérit pluriel gotique berum
secondaire, puisque le degré apophonique du prétérit prolonge le degré zéro
(i.-e. *bher- ?) ou celui du prétérit lituanien &né de ifhti "prendre" et du
de l'ancien aoriste radical thématique, tandis que celui de l'infmitif
parfait latin emï (i.-e. *em- ?). D'une manière plus précise, Wiedemann
prolonge le degré zéro d'une ancienne formation nominale à suffixe *-ti-;
(1891, p. 143) admet que certains prétérits baltiques à allongement
mais le rapprochement du prétérit et de l'infinitif était si manifeste qu'il a
remontent à d'anciens parfaits indo-européens, notamment lit. émé de ifhti
dû donner aux locuteurs le sentiment d'une cohérence apophonique entre
"prendre", éjo de e'iti "aller", et peut-être édé de esti "manger"501. Encore aujourd'hui, de nombreux spécialistes inclinent à penser que la voyelle
499. Le rapprochement du prétérit baltique en *-a- et de l'aoriste thématique indo-européen est ancien. Voir notamment Jasanoff (1983, p. 63) : "in Lithuanian the a-preterite has replaced the thematic aorist". Cf. aussi Sandbach (1930, p. 36), Stang (1966, p. 379), Erhart (1984, p. 219), Kaukiené (1994, p.91). Cette analyse n'est pas compatible avec l'hypothèse de Schmalstieg, qui voit le prolongement de l'aoriste thématique indo-européen dans le prétérit baltique en *-ë-, cf. Schmalstieg (1961, p. 93-97; 1965, p. 123126; 1974, p. 160; 1992, p. 30-32 ; 1994, p. 54-56 ; 2000, p. 288 sq.).
longue de ces prétérits reflète un ancien parfait à redoublement; ils analysent, par exemple, lit. émé comme lat. emï < *He-Hm-, ou lit. édé
500. Observation comparable chez v. d. Osten-Sacken (1922, p. 146). 501. Même analyse chez Sandbach (1930, p. 31-32).
350
Catégorie du temps
Catégorie du temps
comme lat. ëdï < *He-Hd-502 • Mais, comme le remarque à juste titre van
conclusions qui s'imposent. Car il faut expliquer pourquoi les deux
Wijk (1914-1915, p. 367), aucun de ces verbes n'a un indicatif présent en
suffixes prétéritaux des langues baltiques impliquent, l'un dans certains cas
-ia. Or c'est précisément dans les verbes en -ia que l'allongement
un allongement, l'autre dans tous les cas une absence d'allongement.
351
vocalique au prétérit est le mieux représenté. En outre, les théories qui
Un fait frappe dès l'abord quand on observe les prétérits baltiques à
projettent le prétérit baltique à allongement dans la préhistoire indo.
allongement. C'est la relation qui existe entre l'intonation radicale des
européenne font souvent l'économie d'une réflexion sur le problème des
verbes concernés et la présence d'un allongement dans leur prétérit.
intonations: pourquoi émé et béré ont-t-il une intonation douce, édé et
L'exemple des verbes thématiques en -a- est significatif. Quand on examine
kélé une intonation rude? D'une manière plus générale, enfin, la question
les verbes de ce type qui ont un allongement au prétérit, on observe certes
des allongements vocaliques dans les langues baltiques a été longtemps
qu'ils ont tous un prétérit en *-ë-, mais aussi et surtout qu'ils présentent
brouillée, elle l'est encore aujourd'hui pour de nombreux savants, par les
tous une intonation radicale rude: lit. minti "fouler" (prét. myné), ginti
allongements résultant de la loi de Winter. Pendant longtemps, on
"défendre" (prét. gyné), pinti "tresser" (prét. pyné), skinti "cueillir" (prét.
cherché à intégrer aux phénomènes d'allongement morphologique
skYné), tinti "amincir le fil d'une faux" (prét. tfné), trinti "frotter" (prét.
verbes comme lit. bégti "courir", ésti "manger", sésti "s'asseoir", dans
tryné), Sinti-s "se frotter contre" (prét. syné-si), pi/ti "verser, remplir" (prét.
lesquels la longue est constante et s'explique par la loi de Winter. Il me
pYlé). À l'inverse, les verbes de même structure présentant une intonation
semble, en réalité, que la question du prétérit baltique à allongement nt
radicale douce n'ont pas d'allongement au prétérit: lit. miiiti "penser"
peut être résolue par un recours inconsidéré à la comparaison
(prét. miné), gifiti "chasser" (prét. giné), gifhti "naître" (prét. gimé). Il
européenne: il s'agit d'un processus propre aux langues baltiques et
paraît donc raisonnable de supposer que l'allongement au prétérit est lié
s'explique par des factetrrs internes. Il convient donc de faire table rase de
d'une manière ou d'une autre à l'intonation rude de ces verbes. Or, on sait
toutes les hypothèses qui reconstruisent un prétérit indo-européen· à
que,
allongement et de revenir sur les données baltiques considérées en elles.. mêmes.
diphtongues à premier élément long: il est probable qu'à date ancienne le premier élément de [in] possédait encore une quantité longue *[ïn]. Ces
Si l'on compare deux verbes de structure identique à l'infinitif, lit. dUti
diphtongues longues proviennent en l'occurrence d'anciennes sonantes
"s'user" et lit. pi/ti "verser, remplir", on est amené à observer le fait
vocalisées suivies de laryngale *[lJ.H]. On entrevoit dès lors une possibilité
suivant. L'indicatif prétérit du premier verbe ne présente aucun allon-
d'expliquer l'opposition quantitative qui caractérise le paradigme de ces
gement, et il est du type en *-iï- (prét. di/-o), celui du second verbe
verbes: une séquence *[lJ.H] aboutit en effet, en position antévocalique, à
présente un allongement, et il est du type en *ë- (prét. pYI-é). La présence
*[IJ(H}-V] > *[IJ-V] > *[ln-V], avec chute de la laryngale devant voyelle,
d'un allongement est donc liée au prétérit en *-ë- ou au type qu'il a
mais, en position antéconsonantique, à *[I)H-C] > *[ij-C] > *[ïn-C], avec
remplacé; elle constitue en tout cas une pièce importante dans
allongement compensatoire. Ultérieurement, ces diphtongues longues se
l'interprétation historique qu'on peut en proposer. Ce fait est bien connu
sont abrégées devant consonne, en vertu de la variante baltique de la loi
depuis longtemps, mais on n'en a pas tiré, à mon sens, toutes les
d'Osthoff, d'où *[in-C], mais il a existé une époque où l'opposition de la
dans
les
diphtongues,
l'intonation
rude reflète
d'anciennes
fonne antévocalique du radical et de sa forme antéconsonantique était 502. Pour le latin, cette analyse remonte à Benveniste (1949, p. 17).
réalisée comme une opposition quantitative. Pour comprendre le paradigme
352
Catégorie du temps
353
Catégorie du temps
d'un verbe comme lit. minti "fouler" (ind. prés. mina, prét. myné), on peut alors proposer de reconstruire les évolutions suivantes:
Pour que l'hypothèse ici proposée soit jugée valide, il est nécessaire d'admettre plusieurs postulats. Tout d'abord, l'analyse n'a de sens que si,
- position antévocalique: ind. prés. thématique (a) *[mçH-efo-] >
à l'origine, les radicaux concernés se trouvaient au prétérit en position
(b) *[ml}-efo-] > (c) *[mln-a-], lit. min-a.
antéconsonantique, ce qui préservait de l'amuïssement leur laryngale finale,
- position antéconsonantique: inf. (a) *[ml}H-ti-] >(b) *[mij-ti-]
c'est-à-dire si le suffixe prétérital commençait par une consonne. Ce
> (c) *[mfn-ti-] > (d) *[min-ti-], lit. min-ti.
postulat peut se justifier si l'on admet, comme le fait la majorité des
(a) *[ml}H-C-] > (b) *[mij-C-] > (c) *[mfn-C-] ~ *[mfn-V-], lit.
chercheurs, que le prétérit baltique en *-ë- représente le remplacement de l'ancien aoriste sigmatique *-s- de l'indo-européen so4 . La validité de ce
mYné.
rapprochement est prouvée par le fait qu'à des prétérits baltiques en *-ë-
-
position antéconsonantique, puis antévocalique: ind.
prét.
À l'indicatif présent, la disparition de la laryngale finale devant voyelle
amenait à la constitution d'une séquence [ln] brève en proto-baltique, séquence directement reflétée dans le lit. mina [ml-na]. À l'infinitif, l'association de la sonante et de la laryngale produisait une diphtongue longue [fn] en proto-baltique, diphtongue ultérieurement abrégée en
[ln],
l'ancienne quantité longue étant encore reflétée à travers l'intonation rude [in], d'où minti [mln-ti] < [mfn-ti]. À l'indicatif prétérit, enfin, il faut supposer
qu'à
l'origine
le
radical
se
trouvait
en
position
antéconsonantique, d'où la conservation de la laryngale et la constitution d'une diphtongue longue [fn] , comme à l'infinitif, puis que le suffixe prétérital, à l'origine consonantique, a été remplacé, avant que n'opère la
correspondent, dans bon nombre de cas, des aoristes sigmatiques du slave ou d'autres langues indo-européennes. Comparer par exemple lit. vëdé, prétérit de vèsti "conduire", et v. sI. BtC'b / ves'b « *yëd'-s-om), aoriste de BeCTM / vesti "conduire" « v. sI. HtC'b / nes'b
«
*yect-) ; lit.
nësé, prétérit de nèsti "porter", et
*h1nëk-s-om), aoriste de Hecru / nesti "porter"
« *h1nek-); lit. édé, prétérit de ésti "manger", et v. sI. mc'b / jas'b
«
*h 1ëd-s-om), aoriste de mCTH / jasti "manger"
«
*h1ed-); cf. aussi lit.
këpé (prétérit de kèpti "cuire"), et gr. ËTIE4JŒ (aoriste de TIÉ(Jaw), véd. apâks.ït (aoriste de pacati), lat. coxï (perfectum de coqua "cuire") ; lit. dëgé
(prétérit de dègti "brûler"), et véd. adhiiks.ït (aoriste de délhati "brûler")Sos. Si l'on accepte l'idée que le prétérit en *-ë- remplace l'ancien aoriste
loi d'Osthoff, par un suffixe vocalique *-ë-, d'où l'absence d'effet de la loi d'Osthoffet la conservation de la quantité longue: myné [mf-në], réfection morphologique d'un plus ancien *[mfn-C-] avant que celui-ci n'évolue en *[mln-C-]5°3 .
503. On peut trouver une conception similaire, bien qu'énoncée d'une manière trop sommaire et imprécise, chez v. d. Osten-Sacken (1922, p. 145-146), qui parle, pour les prétérits à allongement d'une "Übertragung des im antekonsonantischen Infinitivstamm lautgesetzlich entstandenen Langdiphthongs in antevokalische Stellung" (voir une formulation proche chez Stan~, 1966, p. 19, 122, 389). Mais, plutôt que de parler de "transposition" depUIS l'infinitif jusqu'au prétérit, je préfère supposer que le prétérit présentait, à l'origine, un thème antéconsonantique, comme l'infinitif, et que c'est ce thème qui a été transposé en position antévocalique. Une formulation comparable se trouve chez Kurylowicz (1956, p. 287) : "Le degré long du balto-slave repose
dans une large mesure sur l'introduction de diphtongues longues en position antévocalique". Mais l'analyse que fait Kurylowicz du prétérit en *-ë- (p. 298302) est différente de celle qui est proposée ici. 504. Jasanoff (1983, p.63, note 17): "In general, the Baltic ë-preterite appears to have replaced the lE. s-aorist". Voir aussi Kaukiené (1994, p. 91). 505. Il est intéressant de noter l'absence d'allongement dans les prétérits lituaniens vëdé (: vèsti "conduire") et nesé (: nèsti "porter"), en regard de l'allongement dans les formes slaves d'aoriste BtCb / veso (: BeCTM / vesti "conduire") et HtCb / neso (: HeCTM / nesti "porter"): c'est bien la preuve, à ?1on sens, que l'allongement vocalique dans le prétérit lituanien est Indépendant de l'allongement indo-européen tel qu'il apparaît dans l'aoriste sigmatique du slave. Il est raisonnable de penser qu'en héritant de l'aoriste ~igmatique, le proto-baltique a supprimé l'allongement vocalique qu'il Impliquait (comme, du reste, l'a fait le grec); ce n'est que secondairement qu'un nouvel allongement vocalique a vu le jour dans ce qui prolonge historiquement la formation sigmatique, c'est-à-dire le prétérit en *-ë-.
Catégorie du temps
354
355
Catégorie du temps
sigmatique indo-européen, par ailleurs disparu en baltique, on peut risquer
conservé sans changement en lituanien, à ceci près que le prétérit y
l'hypothèse que c'est précisément cette fonnation sigmatique à initiale
est passé secondairement au type en *-e- : lit. giiiti "chasser" (ind.
consonantique (*-s-) dont témoigne l'allongement vocalique dans le
prés. gëna, prét. giné).
prétérit lituanien. On peut alors refonnuler plus précisément l'évolution
-
sigmatique a été remplacé par le prétérit en *-e-, d'où: *gïn-ti
suggérée plus haut: > (b) allongement
"défendre", ind. prés. *gen-a, prét. *gïn-ë-. La diphtongue longue
*[mfn-s-]
[fn] fut ensuite abrégée à l'infinitif en vertu de la loi d'Osthoff, d'où
remplacement de la fonnation sigmatique, à initiale conso-
un paradigme: *g'in-ti "défendre", ind. prés. *gen-a, prét. *gïn-ë-.
*[mfn-ë-],
Ce paradigme, conservé en lituanien dialectal, posait un problème,
- indicatif prétérit sigmatique (a) compensatoire ~
*gïn-ti "défendre", ind. prés. *gen-a, prét. *gïn-s-. L'aoriste
*[mij-s-]
>
*[mI}H-s-]
(c) diphtongue
longue
nantique, par une fonnation en *-e-, à initiale vocalique
car il opposait trois thèmes [ln] à l'infinitif, [en] à l'indicatif présent
lit. mYné.
et [fn] à l'indicatif prétérit, en contradiction avec le principe du
L'hypothèse ici proposée ne se comprend, en outre, qu'à travers une
bithématisme apophonique. L'opposition tripartite a donc été
chronologie précise de l'évolution phonétique et morphologique. Elle
ramenée à une opposition bipartite: lit. ginti "défendre" (ind. prés.
amène, en effet, à supposer que le remplacement du suffixe prétérital consonantique *-s- par le suffixe vocalique *-e- a eu lieu après la constitution de diphtongues longues en proto-baltique ([I)HC] > [fnC]), mais avant l'abrègement de type "loi d'Osthofl" ([fnC] > [InC)). Rien ne s'oppose à cette chronologie, car la constitution des diphtongues longues est un phénomène qui remonte probablement au balto-slave commun, tandis que la loi d'Osthoff est, en baltique, un processus récen4 probablement réalisé de manière indépendante dans chacune des langues. Cette reconstruction peut être modifiée, ou plutôt complétée, sur un point. Le type gifiti "chasser" (ind. prés. gëna, prét. giné) et le type ginti "défendre" (ind. prés. gina, prét. gyné) sont distingués non seulement par l'absence ou la présence d'un allongement à l'indicatif prétérit, mais aussi par la présence ou l'absence d'un degré apophonique *e à l'indicatif présent. Les deux types peuvent être réconciliés, si l'on admet que, dans le second type comme dans le premier, l'indicatif présent avait à l'origine un degré radical *e. On reconstruira donc les deux types comme suit:
gina, prét. gyné).
La même reconstruction peut être appliquée aux autres verbes présentant un allongement vocalique au prétérit, c'est-à-dire principalement aux verbes en -ia. Ayant traité de ce type dans une publication récente (Petit, 1998,
p. 265-267), je me contenterai ici de résumer les faits le plus brièvement possible. Le point de départ de l'évolution, en l'occurrence, réside dans ce qu'on peut appeler la "loi
Pinault" (Pinault,
1982b, p.265-272,
notamment p. 269). Cette loi, qui postule dès l'indo-européen une disparition des laryngales hétérosyllabiques devant yod, c'est-à-dire une évolution [CVCH-i-] > [CVC-i-], peut être illustrée en baltique par un cas aussi clair que lit. kraiijas "sang", d'intonation douce
«
*kriaii-jas
< *krep-(h2)-jom)S06. Dans les racines verbales de type se~, la loi Pinault
conduisait à une disparition de la laryngale finale dans la forme d'indicatif présent à suffixe *-ia
«
i.-e. *-)%-). On prendra comme exemple le verbe
lituanien gérti "boire", qui repose sur une racine indo-européenne *gWerh r "dévorer, avaler" (cf gr. ~l~pwaKw, lat. uoro "dévorer"). Le baltique a
- *g'in-ti- "chasser", ind. prés. *gen-a, prét. *g'in-%-. L'aoriste
thématique a été remplacé en baltique par le prétérit en *-ii-, d'où: *g'in-ti- "chasser", ind. prés. *gen-a, prét. *g'in-ii-. Le type a été
506. Pour la laryngale finale, cf. gr. KpÉUS' "viande" « *kreJ,!-h r ) ; pour l'évolution phonétique, cf. sanskrit védique kravyafJl "viande sanglante"
«
*kreJ,!-(h2)-jom).
356
Catégorie du temps
généralisé, dans ce verbe, le degré radical
*e
Catégorie du temps
(le degré zéro survivant
résiduellement dans girtas "ivre" < *gW[hrto-, gr. ~pWTÔS). À l'infinitif, la forme restituable *gW[hrti-, gr.
*gWerhrti-
~PW(Jls)
(secondaire au lieu de l'indo-européen
IND. PRÉs.
*CleR(H)-ieJo- > *CleRia
IND. PRÉT.
*CleRH-s-
~
> *CleR-s-
*C1eRe
357
> CleRia
geria
> CleRe
géré
aboutit en proto-baltique à une forme *gerH-ti-,
d'où, avec allongement compensatoire résultant de la chute de la laryngale,
(b)
I.-E.
BALTIQUE
LITUANIEN
MODÈLE
*gër-ti-, et enfin, avec loi d'Osthoff, lit. gérti "boire". À l'indicatif
INFINITIF
*CloRH-ti-
> *ClaRti
> ClaRti
karti "pendre
présent, l'application de la loi Pinault dès l'indo-européen produisait une
IND. PRÉs.
*CloR(H)-ieJo- > *ClaRia
> ClaRia
kiiria
IND. PRÉT.
*CloRH-s-
> ClaRe
k6ré
évolution *gWerhrielo- > *gWer-ielo-, d'où baltique *ger-ja > lit. gëria "il boit", avec une voyelle radicale originellement brève. Pour l'indicatif prétérit, on partira d'un ancien aoriste sigmatique
*gWerhrs-,
en proto-baltique à une forme *gerH-s-, puis,
~
*ClaR-e
aboutissant
avec allongement
compensatoire résultant de la chute de la laryngale,
> *ClaR-s-
*gër-s-
et, avec
substitution de suffixe, *gër-ë > lit. géré "il but". Il en résulte un paradigme composite en lituanien: • inf. gérti [ger-ti-], ind. prés. gëria [ger-'a], ind. prét. géré [gër-ë].
(c)
I,-E.
BALTIQUE
INFINITIF *Cd~{H-ti-
> *C]ÏRti
IND. PRÉs.
*CIR(H)-iefo-
> *CliRia
IND. PRÉT.
*CIRH-s-
> *ClïR-s-
LITUANIEN
MODÈLE
dirti > CdRti "déchirer"
~
*CliR-e
> C1iRia
diria
> ClïRe
dyré
D'un point de vue historique, il ne s'agit donc pas réellement d'un type à allongement au prétérit, mais bien plutôt d'un type à abrègement au
(d)
présent (en vertu de la loi Pinault) et à l'infinitif (en vertu de la loi
INFINITIF
d'Osthoft). Mais, en synchronie, l'isolement du vocalisme long dans la
IND.
forme de prétérit pouvait donner le sentiment qu'il constituait une marque secondaire, en regard du vocalisme bref régulier dans les autres formes so7 ,
I.-E.
BALTIQUE
LITUANIEN
MODÈLE
*CIRH-ti-
> *ClüRti
> ClùRti
kùrti "fonder'
PRÉs.
*CIR(H)-iefo-
> *CluRia
> CluRia
kùria
IND. PRÉT.
*CIRH-s-
> *ClüR-s-
> ClüRe
kûré
~
*ClüR-e
ce qui favorisait son extension dans d'autres catégories où il n'était pas motivé historiquement. À l'origine, le prétérit à vocalisme long n'apparaissait que dans les racines se~ comportant une sonante interne, c'est-à-dire dans les types suivants :
Ultérieurement, l'allongement conçu comme marque spécifique du prétérit en *-ë- s'est étendu à quelques autres catégo:rjes. Il s'est d'abord installé dans quelques radicaux ani~ présentant une structure comparable à l'indicatifprésent [CleR-ia], d'après la proportion analogique suivante508
(a) 1
INFINITIF
I,-E.
*C1eRH-ti-
BALTIQUE
> *CleRti
LITUANIEN
> CléRti
MODÈLE
• inf. gérti "boire" : ind. prés. gëria : prét. géré
gérti "boire"
• inf. befti "disperser" : ind. prés. bëria ~ prét.
507. C'est ainsi, du reste, que le perçoit Akelaitienë (1994, p. 5-10) dans une perspective synchronique.
:
b~ré
508. Voir Kurytowicz (1956, p.287; 1968, p.321; 1977, p.9 et 36), Petit (1998, p. 266-267).
Catégorie du temps
Catégorie du temps
L'intonation du prétérit apparaît, dans ce processus, réglée sur celle de
kéJuti "frapper" (ind. prét. k6vé). On peut prolonger, ou plutôt corriger,
l'infinitif, d'où befti~béré (intonation douce) en regard de gérti ~géré
cette analyse sur un point important. Il est probable qu'au moins dans une
(intonation rude). Enfin, l'allongement s'est étendu à quelques verbes dont
partie des verbes en -éJuti, l'allongement du prétérit résulte d'une extension
le radical ne comportait pas de sonante interne, mais une occlusive ou lllle
secondaire: le type ancien en lituanien a pu être, pour certains verbes, ind.
siftlante, et dont l'indicatif présent pouvait apparaître comparable. D'où,
prés. -auja, prét. -iivo. La question se pose de savoir quels verbes en -éJuti
par analogie:
avaient, à l'origine, un allongement au prétérit et quels verbes, au
358
contraire, en étaient dépourvus.
(a) • ind. prés. gëria
: prét. géré
• ind. prés. bëria
: prét. béré
• ind. prés. lëkia
~ prét.l&é et secondairement inf. l&ti
Il est possible qu'à l'origine, la distribution ait dépendu de la position
• ind. prés. viigia (c) • ind. prés. kùria • ind. prés. tùpia
maintenait, à date ancienne, à la fois en position antéconsonantique
: prét. koré ~ prét.
de la laryngale. Dans les structures de type *-eh 2ll- (par ex. lituanien kauti "frapper, marteler", racine *keh2ll-, LIV, p. 308), le vocalisme long se
Et, parallèlement, avec d'autres voyelles radicales : (b) • ind. prés. kiiria
359
*-eh 2ll-C- > *-iill-C- et en position antévocalique *-eh2ll-V- > *-iill-V-.
vogé et secondairement inf. vogti
Ultérieurement,
la
diphtongue
longue
s'est
abrégée
en
position
: prét. kûré
antéconsonantique, d'où lit. -au-C-, mais a été conservée comme longue en
~ prét. tupé et secondairement inf. tupti
position antévocalique, d'où *-iiv-V- > lit. -ov-V-, ce qui créait le
Dans tous ces types secondaires, la voyelle allongée présente tllle
sentiment d'un allongement au prétérit et, par conséquent, justifiait le
intonation douce, ce qui dénonce son caractère récent. L'infinitif s'est
choix du prétérit à suffixe *-ë- (lit. kéJuti, prés. kéJuna, vs. prét. kové). Dans
associé à cette innovation, respectant l'isolement de l'indicatif présent, qui
les structures de type *-eyH-C- (par ex. lit. gauti "recevoir", racine
est régulier dans la plupart des types à alternance, et la cohérence
*geyH-, LIV, p. 167), la diphtongue évoluait de manière différente en
apophonique qui unit thème d'infinitif et thème de prétérit
509
•
position antéconsonantique, où elle aboutissait à *-eyH-C- > *-iayH-C- >
Une analyse comparable peut rendre compte, en dernier lieu, du type
*-iiiy-C- > lit. *-iau-C-, et en position antévocalique, où elle aboutissait à
lituanien kauna - kOvé (inf. kéJuti "frapper, marteler", cf. pol. kué "forger,
*-eyll-V- > *-ey-V- > *-ev-C- > *-av-C- (variante devant voyelle d'arrière
battre, marteler"). L'ensemble des formes procède d'un radical unifonne
par hannonie vocalique) > lit. *-av-V-, sans allongement perceptible au
*kiiJ,!- (prolongeant un i.-e. *keh 2J,!-), tantôt en position antéconsonantique (*kiiJ,!- > lit. kéJu-, avec loi d'Osthoff), tantôt en position antévocalique
prétérit, ce qui favorisait le type prétérital en *-ii-. Il en résultait un paradigme hétérogène: inf. *-iauti, prét. *-avo, aussitôt nivelé par
(*kiill- > lit. kov-). Selon Sandbach (1930, p. 20), ce modèle s'est étendu
élimination de l'initiale palatalisée: inf. -éJuti, prét. -iivo (type lit. gauti
du fait d'une analogie secondaire aux verbes présentant une diphtongue
"recevoir", prét. gavo). Le slave présente un nivellement du même ordre
«
*-ëJ,!- < *-ell-H-): leur prétérit, qui devrait avoir une
(slave: prés. -u-jQ, prét. -ov-a, au lieu de *-iu-jQ, prét. *-ov-a). Ces
fonne t-ëv- « *-ëll- < *-ey-H-), aurait une fonne *-iov-, d'après le parallèle
processus phonétiques expliquent que le lituanien possède deux types de
du type *-au- / *-ov-, cf. lit. grüiuti "détruire" (ind. prét. griové) d'après
verbes en -auti :
radicale *-üiu-
- d'une part, des verbes présentant un paradigme -éJuti, prét. -ové, et 509. Analyse comparable chez v. d. Osten-Sacken (1922, p. 150).
360
Catégorie du temps
Catégorie du temps
361
reposant à l'origine sur des structures du type *-eh 211- (type lit.
uniforme, dépourvu d'apophonie. En d'autres termes, les variantes attestées
kauti).
ne constituent pas des allomorphes, mais des allophones; dans ces
- d'autre part, des verbes présentant un paradigme -auti (au lieu de
conditions, on ne saurait plus parler d'apophonie radicale, si l'on définit
*-iauti), prét. -avo, et reposant à l'origine sur des structures du type
l'apophonie comme un phénomène morphonologique. On peut en tirer
*-ellH- (type lit. gauti).
cette conclusion qui peut paraître extrême et paradoxale, mais me semble
On notera que les verbes baltiques suffixés en -auti, ainsi que leurs
pleinement justifiée: l'apophonie radicale a été largement éliminée, en
correspondants slaves en -ovati, appartiennent au second type : lit. bad-auti
baltique, dans l'opposition des thèmes temporels et n'y survit plus que
"avoir faim", prét. badavo, cf. s.-cr. kùpujë, kùpova "acheter". Leur suffixe
dans un petit groupe de prétérits apophoniques en *-a- (type lit. perka, vs.
doit donc être reconstruit comme *-eJ.)ll-, ce qui n'est pas sans conséquence
pirko, lit. gëma, vs. *gimo
pour une analyse étymologiqueS! o. On observe, enfin, que l'ambiguïté de
attesté dans les prétérits en *-e- étant, quant à lui, une création interne aux
la forme d'infinitif (lit. -auti dans les deux cas) a pu conduire à des
langues baltiques, résultant d'évolutions secondaires.
flottements ou à des confusions dans la distribution des deux types. Le lituanien a régulièrement kauti, prét. k6vé, mais quelques vieux textes et plusieurs dialectes contemporains présentent un paradigme secondaire
kélUti, prét. kavo, analogique du type gauti. En letton, le verbe kaût "frapper" hésite, au prétérit, entre kava (= lit. dial. kavo) et kâva (=:: lit.
k6vé). Dans bien des cas, la distinction étymologique apparaît brouillée: le type non marqué sans allongement tend à s'imposer au détriment du tyPe marqué à allongement. Cette analyse présente, à mon sens, l'avantage de ne faire intervenir que des processus internes aux langues baltiques. Un recours à la comparaison indo-européenne me semble ici déplacé et peu éclairant. L'allongement apparaît comme le résultat de traitements phonétiques divergents à partir d'un radical unique: qu'on fasse appel à la loi Pinault, à la loi d'Osthoff, à la chute des laryngales en position antévocalique, il s'agit toujours d'évolutions phonétiques, et l'on doit supposer, à l'origine, un radical 5 10. L'analyse ici proposée contredit le rapprochement souvent avancé avec les verbes grecs en -EVw (type gr. ~aolÀ.Eûw "régner") Car, pour le baltoslave, il faut partir d'une forme verbale suffixée à diphtongue brève suivie de laryngale *-eylf-C-, seule structure susceptible d'expliquer la séquence brève du prétérit lit. -av-o « *-ey-(H)-ii), tandis que, pour le grec, il faut partir d'une forme verbale dénominative de substantifs suffixés à diphtongue longue non suivie de laryngale *-ëy-C- (type gr. ~aaLÀ.EV5' "roi", ace. homo ~aaLÀ.iÏa < *-ëY-JT1)·
~gimé),
l'allongement vocalique largement
CONCLUSION
I. L'APOPHONIE DANS LES LANGUES BALTIQUES
Traditionnellement, on enseigne que les langues baltiques ont largement préservé les apophonies héritées de l'indo-européen et même qu'elles leur ont donné une certaine productivité à date historiqueS Il . Cette conception s'appuie sur le sentiment, motivé en synchronie, de la richesse des alternances vocaliques dans ces langues. On observe, par exemple, qu'un radical baltique comme *gen- "chasser, défendre" « i.-e. *g..Jzen _ "frapper") peut présenter les formes suivantes: *gen- (lit. gën-a "il chasse"), *gan- (lit. gan-yti "faire paître", gan-i6ti "chasser", intens.), *giin- (lit. nakti-gon-ë "pâture de nuit"), *gain- (lit. gain-i6fi "chasser",
intens.), *gin- (lit. gin-fi "chasser", gin-ti "défendre", gin-a "il défend"), *gin- (lit. gyn-ë "il défendit"), *gun- (lit. gùn-dyti "détourner, tenter"), *guin- (lit. pa-gùin-a "il effraie, chasse"). L'antiquité de certaines de ces
alternances vocaliques ressort clairement de la comparaison indo511. En ce sens, voir Stang (1966, p. 120).
364
Conclusion
Conclusion
européenne; on peut ainsi rapprocher le lituanien gen-a "il chasse" et le
travailla"), ni dans les verbes de structure [CeC-], dont la structure
« i.-e. *g..hen-ti, présent radical athématique,
consonantique exclut l'alternance (type lit. veda "il conduit", vs. vedé "il
thématisé en baltique), le lituanien gan-as "pâtre" et le védique ghanal)
conduisit"). Cette analyse, qui conçoit l'apophonie comme une propriété
"massue" « i.-e. *g..hon-os "qui frappe"), le lituanien ginti "chasser" et le
du radical, amène donc à distinguer des "allomorphes", c'est-à-dire des
védique han-fi "il frappe"
«
v. haut-allemand gund- "combat"
i.-e.
*g..hl)-ti-
365
"le fait de frapper").
variantes du radical déterminées par sa structure morphonologique. Dans
Mais il ne fait aucun doute que de nombreuses alternances vocaliques sont
cette perspective, l'apophonie se définit comme un contraste vocalique
de date baltique et ne remontent pas à l'indo-européen. C'est le cas, en
résultant de l'opposition d'allomorphes.
l'occurrence, de l'apophonie quantitative qui apparaît dans le radical *gïn-
Toutefois, cette conception ne suffit pas à la description des faits
(lit. gyn-é) par rapport au radical *gin- (lit. gin-ti, gin-a). Plus clairement
d'apophonie dans les langues baltiques. On observe, en effet, que des
encore, les phénomènes de "déraillement apophonique" (aIl. Ablauts-
radicaux présentant la même structure peuvent manifester une apophonie ou
entgleisung), qui sont si fréquents dans les langues baltiques, montrent à
ne pas en manifester selon la formation morphologique dans laquelle ils
quel point la productivité historique des apophonies y a été grande : un
apparaissent. Ainsi, une structure radicale [CeRC-] implique régulièrement
radical comme *giin- (lit. nakti-gon-é), par exemple, a été tiré secon-
une alternance vocalique à l'indicatif prétérit [CiRC-] dans les verbes
a>
radicaux thématiques en -a (type lit. pefka "il achète", vs. pifko "il
h 2 >; une innovation comparable se
acheta"), mais pas dans les verbes thématiques suffixés en -ia (type lit.
trouve dans le lituanien drobé "toile de lin" en regard de drabùiis
vefkia "il pleure", vs. vefké "il pleura"). Bien plus, dans quelques cas, des
dairement de *gan- (lit. gan-yti) sur le modèle de l'alternance < li / issue historiquement de *< eh2 "vêtement" «
i.-e. *drob
h
/
d'une racine *dreb
h
élargie de *der-
radicaux de même structure peuvent présenter deux formes différentes
"déchirer"). Ces faits, dont le détail a été étudié par Venckuté (1971,
d'apophonie selon le type morphologique: on opposera ainsi, sur un
p. 79-88), illustrent bien la diversité des apophonies baltiques qui ne
radical similaire (Cem-], une apophonie qualitative dans le type radical
reflètent pas toujours des apophonies indo-européennes.
thématique en -a (type lit. gema "il naît", vs. gimé "il naquit"), et une
-
-,
Dans les langues baltiques, l'apophonie peut être envisagée sous
apophonie quantitative dans le type thématique suffixé en -ia (type lit.
différents aspects. On peut l'interpréter, tout d'abord, comme une propriété
vemia "il vomit", prés., vs. vémé "il vomit", prét.). La structure du
du radical : c'est, en effet, avant tout la structure du radical qui autorise, ou
radical n'est donc pas le seul facteur qui intervienne dans les
au contraire exclut, l'existence d'alternances vocaliques. Dans le système
manifestations de l'apophonie ; il faut également prendre en compte le type
verbal, par exemple, les verbes thématiques en -a ne présentent
morphologique dans lequel ce radical est attesté. L'apophonie apparaît
d'apophonie que si leur radical en admet la réalisation, c'est-à-dire, d'une
donc associée à la réalisation de certains morphèmes, avec lesquels elle
part, si leur voyelle radicale est susceptible d'alternance, d'autre part, si
forme ce qu'on peut identifier comme des "morphèmes discontinus". Dans
leur structure consonantique l'autorise : une alternance vocalique est ainsi
cette perspective, elle se définit comme une composante de morphèmes, un
possible dans les verbes de structure [CeRC-], qui alternent avec [CiRC-] à
élément accompagnant leur apparition.
l'indicatif prétérit (type lit. pefka "il achète", vs. pifko "il acheta"); elle
Cette seconde analyse pose, elle aussi, des problèmes. On ne saurait
n'apparaît ni dans les verbes de structure [CiRC-], dont la voyelle radicale
dire que l'apophonie soit entièrement imputable aux formations morpho-
est dépourvue d'alternance (type lit. dirba "il travaille", vs. dirbo "i 1
logiques, car on observe, dans certains cas, qu'un même morphème
366
367
Conclusion
Conclusion
implique tantôt une apophonie du radical, tantôt une absence d'apophonie.
rapprochement est fortuit et la distinction sémantique semble secondaire:
Le suffixe prétérital *-ë-, par exemple, est lié à une apophonie radicale dans
il n'existe pas, entre les deux formes, de rapport de fondation (lit. graiYbé
le type lituanien ke/ia -t kelé, mais ne s'accompagne d'aucune apophonie
est fondé sur graiùs "beau", lit. grozybé sur gratis "beauté"). Rien
dans le type lituanien veda -t vedé. L'apophonie n'est donc pas déterminée
n'autorise donc à attribuer à l'apophonie une fonction propre.
uniquement par le type morphologique, de même qu'elle ne se laisse pas prévoir exclusivement de la structure du radical. En réalité, elle résulte de l'association
des
deux
facteurs:
elle
est
suscitée par
le
type
morphologique, elle est rendue possible par la structure du radical.
Il. APOPHONIE ET CATÉGORIES GRAMMATICALES
L'apophonie apparaît. associée en baltique à deux types de rapports de fondation. Elle se rencontre, tout d'abord, fréquemment dans la dérivation,
Les fonctions de l'apophonie sont apparemment diverses dans les
c'est-à-dire dans le rapport d'une fonne fondée indépendante à sa forme de
langues baltiques. Il convient, cependant, de préciser qu'aucune de ces
fondation (type lit. nèsti "porter", vs. nastà "fardeau"). Mais elle apparaît
fonctions n'incombe à l'apophonie seule, mais plutôt aux morphèmes
aussi dans l'expression de catégories grammaticales, c'est-à-dire de
dont elle est une composante. Comme l'a montré Urbutis (1978, p. 229),
catégories constitutives de paradigmes, par exemple dans l'opposition des
il n'existe en lituanien aucune fonne fondée qui s'oppose uniquement par
thèmes temporels (type lit. pefka "il achète", vs. pifko "il acheta"). Ces
le degré apophonique à sa fonne de fondation 5 12. L'apophonie ne possède
deux types d'apophonie, apophonie lexicale d'une part et apophonie
en soi aucune fonction; elle accompagne seulement des morphèmes, et
grammaticale d'autre part, se distinguent nettement par leur productivité.
c'est d'eux qu'elle reçoit sa fonction. Parler, comme le fait Akelaitienè
L'apophonie lexicale est très bien représentée en baltique ; elle apparaît
(1995, p. 9), d'une "fonction iconique" de l'apophonie n'a donc pas
dans de nombreuses formations où elle fournit un nombre élevé de
réellement de sens, surtout s'il s'agit de supposer une relation, bien
lexèmes. En revanche, l'apophonie grammaticale est attestée moins
aléatoire, entre l'apophonie et le sémantisme des verbes 513 • Dans quelques
fréquemment, et l'on observe qu'elle a disparu dans un grand nombre de
cas rares, signalés par Urbutis (1978, p.228), la présence ou l'absence
catégories. L'objet de la présente étude était précisément de déterminer
d'une apophonie paraît liée à une différence sémantique, par ex. < abstrait
dans quelle mesure ce type d'apophonie s'est prolongé dans les langues
/ concret> dans lit. graiybè "beauté", vs. groiybé "chose belle". Mais ce
baltiques et quelles modifications il y a connues. Un examen des différentes catégories grammaticales permet de les distinguer, du point de vue
512. D'une manière générale, cette restriction semble être un fait de structure déjà indo-européen; voir notamment Kurylowicz (1956, p. 383): "l'apophonie n'est qu'un sous-morphème ou un morphème .acc~sso1fe surajouté au morphème constitutif'. Le contre-exemple me~tl?n?e ~a~ Akelaitienë (1995, p. 5) - lit. mëte (prétérit de mèsti "jeter") .oppose. a ht. mete (prétérit de metyti "jeter", intensif) - n'en est pas un, car 11 n'eXIste pas de rapport de fondation direct entre les deux formes. , 513. Akelaitienë (1995, p.9) suppose ainsi que l'allongement observe dans les verbes itératifs et intensifs du type lit. metyti "jeter" (en regard d.e mèsti) imite l'action prolongée qu'ils expriment. Sur l'allonge~ent dIt "iconique" en lituanien, voir notamment Urbutis (1978, p. 228), Levm (1982, p. 230-245), Schmalstieg (2000, p. 124-129).
de l'apophonie, en quatre groupes : - (a) catégories qui, dès l'indo-européen, étaient dépourvues d'apophonie radicale, et n'en présentent aucune trace dans les langues baltiques : la catégorie de la personne. - (b) catégories dont l'expression, en indo-européen, pouvait éventuellement s'accompagner d'une apophonie radicale, mais qui n'en ont gardé aucune trace dans les langues baltiques: la catégorie du nombre,
368
369
Conclusion
Conclusion
peut-être la catégorie du genre (mais, dès l'indo-européen, l'apophonie
langues modernes permet parfois d'observer comment des apophonies
radicale y était rare).
grammaticales ont disparu progressivement encore à date historique. Le cas
- (c) catégories qui pouvaient impliquer en indo-européen une
du participe présent du verbe "être" est ici exemplaire: il était encore
apophonie radicale, mais n'en présentent plus, dans les langues baltiques,
apophonique en v. lituanien (acc. masc. sg. s-ant{ < i.-e. *h1s-ont-rp en
que des traces indirectes à travers des membra disjecta : la catégorie du
regard de l'indicatif es-mi < i.-e. *h1es-mi), mais il a refait son vocalisme
cas.
d'après l'indicatif correspondant en lituanien moderne (acc. masc. sg. es- (d) catégories qui pouvaient manifester une apophonie radicale en
an!{ d'après es-ù). L'élimination des apophonies grammaticales ne s'est
indo-européen et ont gardé, voire développé, cette possibilité dans les
pas réalisée d'un coup; elle a connu différentes étapes dont il est
langues baltiques : la catégorie du mode, la catégorie du temps.
naturellement difficile de reconstituer le cheminement, mais
dont
Cette classification associe deux perspectives, l'une fondée sur
l'existence ne fait pas de doute. En indo-européen, les apophonies radicales
l'évolution diachronique (conservation / perte de l'apophonie radicale
pouvaient apparaître dans toutes les catégories grammaticales à l'exception
indo-européenne),
synchronique
de celle de la personne; en proto-baltique, elles étaient probablement
(présence / absence d'apophonie radicale en baltique). L'apophonie radicale
limitées aux catégories du mode, du temps et du cas; en lituanien
n'apparaît plus, en baltique, que dans un domaine limité qui comprend
moderne, elles ne se rencontrent plus que dans les catégories du mode et
exclusivement les catégories du mode et du temps. Les autres catégories
du temps. Cette restriction du domaine de l'apophonie est, du reste, un
sont toutes dépourvues d'apophonie radicale, soit qu'elles en aient perdu
processus vivant qui n'est pas achevé: dans certains dialectes lituaniens,
la possibilité (catégories du nombre, du genre et du cas), soit qu'elles ne
l'apophonie radicale tend à s'effacer même dans la catégorie du temps (par
l'aient jamais eue (catégorie de la personne). Ces remarques superficielles
ex. à Zietela où le contraste apophonique pefka, pifko est nivelé en pifka,
doivent être complétées par des considérations portant, d'une part, sur la
pifko). Les différentes langues baltiques ont poussé cette tendance plus ou
chronologie des évolutions, d'autre part, sur la constitution des catégories
moins rapidement à son terme: en v. lituanien et en v. prussien, le
grammaticales.
participe du verbe "être" gardait encore une apophonie radicale (v. lit.
l'autre
sur
une
description
Entre l'indo-européen et les langues baltiques historiquement attestées, il a dû exister une étape intermédiaire, le "proto-baltique", dans laquelle
sant{, v. pro -sins), tandis qu'à la même époque leur correspondant letton
l'avait déjà perdue (v. lett. çsuôss "étant").
l'apophonie grammaticale était plus répandue qu'elle ne l'est au moment
À l'intérieur d'une même catégorie grammaticale l'élimination des
où ces langues sont documentées. C'est ce que montrent, par exemple, les
apophonies radicales ne s'est pas produite uniformément; plusieurs étapes
nombreux vestiges d'apophonie casuelle attestés en baltique à travers des
doivent être reconstruites. Dans la catégorie du mode, par exemple,
membra disjecta : pour ne citer qu'un exemple, la divergence qui sépare
l'apophonie radicale caractérise encore fréquemment aujourd'hui l'oppo-
aujourd'hui le lituanien vanduo et le letton ûdèns "eau" ne peut se comprendre autrement que comme le reflet d'un stade antérieur dans lequel les deux radicaux alternaient au sein d'un même paradigme (probablement nom. *vâdo(n), gén. *üd-n-és). La comparaison des textes anciens et des
sition de l'infinitif et de l'indicatif (type lit.pifkti "acheter", vs. pefka "il achète") ; elle a disparu, en revanche, à date historique dans l'opposition de l'indicatif et du participe (type lit. esmi, esù ''je suis", vs. v. lit. acc. sant{ ~ lit. moderne acc. esant{ "étant"). Dans la catégorie du temps, un
contraste apophonique se rencontre encore régulièrement entre l'indicatif
370
371
Conclusion
Conclusion
w -
présent et l'indicatif prétérit (type lit. pefka "il achète", vs. pirko "il
(cf. */eik w- dans le présent ÀEl TTW, *lik w_ dans l'aoriste
acheta"); l'indicatif futur, en revanche, a perdu dès le proto-baltique tout
dans le parfait
degré apophonique propre et se fonde désormais sur l'infinitif (type lit.
restriction et peut refléter jusqu'à trois allomorphes indo-européens dans
liksiu "je laisserai" sur likti "laisser", en regard du grec ÀEl q;w). Ces
une même catégorie grammaticale (cf.
disparités sont significatives, à mes yeux, d'une tendance constamment
*bhor- dans le parfaitjabhâra, *bhër- dans l'aoriste sigmatique abhiir).
ÀÉ ÀOl TTa);
ËÀl TTOV,
*loik
le sanskrit paraît lui aussi libre de toute
*bher-
dans le présent bharati,
répétée en baltique à réduire le domaine de l'apophonie à une opposition
Au-delà de cette tendance générale au "bithématisme apophonique", on
binaire : l'apophonie radicale ne subsiste par exemple, dans l'expression
peut se demander pourquoi certaines catégories grammaticales ont conservé
du temps, qu'à travers le couple binaire < présent / prétérit> ; de la même
en baltique une apophonie radicale, tandis que d'autres l'ont perdue.
manière, dans l'expression du mode, elle n'apparaît plus qu'à travers le
Pourquoi, par exemple, l'apophonie modale s'est-elle limitée au couple
couple binaire < indicatif / infinitif>. Il est probable qu'à date ancienne la
< indicatif / infinitif >, à l'exclusion de l'optatif, de l'impératif et du
même tendance a joué dans la catégorie du cas. Dans les noms-racines, qui
participe? pourquoi l'apophonie temporelle s'est-elle polarisée sur
conservent le mieux des témoignages indirects d'apophonie radicale, on
l'opposition < présent / prétérit>, au détriment de l'indicatif futur? Et,
constate que la reconstruction du stade proto-baltique ne permet de
s'agissant du système verbal dans son ensemble, pourquoi la catégorie du
distinguer que deux variantes apophoniques: les schémas apophoniques
temps a-t-elle conservé l'apophonie radicale, tandis que la catégorie du
indo-européens, qui étaient si complexes et si divers, ont été systéma-
nombre l'a totalement perdue dès le proto-baltique, même dans les verbes
tiquement ramenés en baltique à une opposition binaire
514
.
Nulle part à
athématiques, par ailleurs si archaïques ?
l'intérieur d'une même catégorie grammaticale, l'apophonie radicale
On ne saurait apporter une réponse unique à ces questions; il est
n'oppose trois allomorphes. Cette tendance au "bithématisme apo-
probable que plusieurs facteurs ont joué un rôle dans la conservation ou la
phonique" (j'emprunte le terme à Wojciech Smoczynski) est un des traits
perte des apophonies radicales en baltique. Tout d'abord, on peut penser
les plus frappants du système grammatical des langues baltiques; elle a
que les apophonies radicales les plus faibles, celles qui étaient déjà rares et
profondément modifié la configuration des apophonies radicales dans ces
exceptionnelles en indo-européen, ont été très tôt nivelées en proto-
langues. Il serait intéressant d'étudier si une tendance comparable a existé
baltique. Dès l'indo-européen, leur faible représentation les prédisposait à
dans d'autres langues indo-européennes. Il semble que le slave en ait subi
disparaître. C'est le cas notamment des apophonies radicales associées à
lui aussi les effets et se comporte à cet égard comme le baltique. Le grec,
l'expression du genre grammatical (type gr. ds "un" < *sem-s, masc.,
en revanche, ne présente aucune limitation de ce type, puisqu'il peut
vS.Il La "une" < *sm-ih 2, fém.) : rares en indo-européen, elles n'ont laissé
encore opposer trois allomorphes dans une même catégorie grammaticale
aucune trace en baltique. Dans le système nominal indo-européen, l'expression du nombre n'impliquait éventuellement une apophonie
514. Le nom du "cœur" est le seul cas probable de "trithématisme apophonique" en baltique (* sër- dans le v. pr. seyr, * sïrd- dans le lit. sirdis et *sërd- dans le lit. serdis "cœur d'un arbre"). Mais chacune des langues baltiques a imposé de nouveau un système bithématique, plus co~~orme à la règle générale: le baltique occidental oppose *sër- (v. pro seyr) et *slrd- (v. pr. sirsdau), le baltique oriental oppose *iïrd- (lit. sirdis) et *§ërd- (lit. serdis).
radicale que dans une catégorie marquée, de nature plus lexicale que grammaticale, le "collectif" : le baltique n'en a gardé que deux vestiges isolés et dépourvus de toute signification synchronique, le nom du "foie" (*jok
W _,
sg., vs. *iek w-, coll.) et le nom du "mot" (*yorJ'-, sg., vs.
*y[J'-, coll.).
Conclusion
372
Conclusion
373
On peut évoquer, en second lieu, des facteurs formels. Dans les verbes
rition de l'apophonie dans certaines catégories grammaticales, mais c'est
radicaux athématiques, le balto-slave a développé une tendance à ne
aussi la modification du statut des formes qui les manifestent. À cet égard,
conserver que des radicaux monosyllabiques (type *es-mi "je suis", *ei-mi
il semble que la conservation ou la disparition de l'apophonie soit liée à la
"je vais", *ëd-mi "je mange"). Certains allomorphes apophoniques liés à
plus ou moins grande grammaticalisation de la catégorie en question. Les
*s-me "nous
catégories les plus touchées en baltique par le processus d'élimination de
l'expression du nombre contredisaient cette règle (par ex. pl.
*dedë-mi "je
place", *dedo-mi "je
leur
l'apophonie radicale (la personne, le nombre, le genre, et plus récemment
élimination a conduit à l'unification des paradigmes (d'où pl. *es-me, sg.
le cas) sont celles dont la grammaticalité est la plus grande. Par "gramma-
*ded-mi, *dod-mi); par la suite, ce processus s'est étendu à tous les
ticalité" il faut entendre une relation morphologique étroite dont la
verbes athématiques, même à ceux qui ne posaient pas ce problème formel
définition même dépend du rapport des éléments en présence. Dans la
(d'où par ex. *ei-mi "je vais", pl. *ei-me "nous allons" au lieu de *i-me).
catégorie de la personne, l'interlocuteur se définit uniquement par oppo-
Le souci d'éviter la formation de monosyllabes a également joué un rôle:
sition au locuteur et ne saurait exister sans lui; dans la catégorie du
dans l'évolution du participe du verbe "être" en lituanien, l'importance de
nombre, le pluriel est conçu par opposition au singulier; dans la catégorie
ce facteur peut être saisie directement, puisque c'est d'abord dans les
du genre, le féminin est défini par son opposition au masculin; dans le
formes qui risquaient d'être monosyllabiques (nom. masc. sg. tsgs et pl.
système casuel, enfin, les différents cas se définissent les uns par rapport
tsg) que le vocalisme de l'indicatif s'est introduit (d'où nom. masc. sg.
aux autres. Dans toutes ces catégories, où les formes s'impliquent les unes
esgs et pl. esg, à une époque où l'accusatif polysyllabique était encore
les autres, les langues baltiques ne présentent pas d'apophonie radicale : la
apophonique santi). Mais le facteur le plus important, à mes yeux, quoique le plus difficile
définition des éléments constitutifs de la catégorie dépend entièrement de leur relation, et celle-ci est si étroite qu'elle implique une dépendance
à évaluer, est le degré de dépendance morphologique qui permet de
morphologique. La catégorie du mode présente, pour sa part, une situation
distinguer le matériel linguistique en formes de fondation et en formes
intéressante. Les participes relèvent directement de la catégorie du temps,
fondées. Dans les catégories où l'apophonie grammaticale a disparu, les
telle qu'elle se manifeste dans les formes de l'indicatif: on distingue
formes concernées apparaissent désormais comme fondées, c'est-à-dire
autant de participes qu'il existe de temps (présent, passé, futur). Il en
subordonnées à des formes de fondation auxquelles elles doivent leur degré
résulte une dépendance morphologique étroite et, dès lors, une tendance à
vocalique. Les participes, par exemple, ne présentent plus dans les langues
éliminer l'apophonie radicale. L'infinitif, en revanche, est indifférent dans
baltiques modernes aucune apophonie spécifique:
reproduisent
les langues baltiques à la catégorie du temps: une forme comme lit. duoti
simplement le degré vocalique des indicatifs correspondants sur lesquels
"donner" n'a de relation particulière ni avec l'indicatif présent, ni avec
ils sont fondés. La disparition de l'apophonie a donc partie liée avec un
l'indicatif prétérit; son indépendance sémantique explique et justifie son
changement du statut morphologique des formes en question: elles cessent
indépendance apophonique. Dans la catégorie du temps, enfin, si le thème
d'être des formes indépendantes et deviennent des formes fondées. À
de présent et le thème de prétérit sont souvent indépendants du point de
l'inverse, ce qui amène à dire que ces formes sont des formes fondées, c'est
vue de l'apophonie, c'est sans doute parce que présent et prétérit ne se
précisément le fait qu'elles ne possèdent plus de degré apophonique
définissent pas seulement l'un par rapport à l'autre, mais possèdent des
propre. Ce qu'il importe d'expliquer n'est donc pas seulement la dispa-
caractéristiques sémantiques propres : le présent n'est pas uniquement le
sommes", sg.
donne"):
ils
374
Conclusion
non-passé, de même que le passé n'est pas uniquement le non-présent. On ne peut donc dire que l'un des thèmes soit fondé sur l'autre : ils sont en réalité indépendants l'un de l'autre, ce qui laisse ouverte la possibilité d'une apophonie radicale. Cette analyse montre dans quelles limites l'apophonie grammaticale a été conservée dans les langues baltiques: limites formelles (altération de
INDEX VERBORUM
certaines séries apophoniques, contraintes liées à la structure des radicaux), limites morphologiques (bithématisme apophonique, productivité des morphèmes), limites sémantiques (indépendance sémantique des formes apophoniques). L'originalité des langues baltiques n'est pas tant d'avoir conservé vivantes de nombreuses apophonies indo-européennes que de les avoir intégrées à un système fait de contraintes et d'innovations dans lequel elles ont pu connaître encore une certaine productivité.
1. INTRODUCTION
Les mots sont classés dans l'ordre alphabétique de la langue considérée; pour des raisons de commodité, les mots sanskrits sont classés dans l'ordre alphabétique latin. 1. BALTIQUE
378-396
- LITUANIEN
378-388
-LETTON
389-392
- VIEUX PRUSSIEN
392-395
-ZINOV
II. INDO-EUROPÉEN
396
396-398
III. ANATOLIEN
398
-HITTITE
398
-LOUVITE
398
- LYCIEN
398
IV. TOKHARIEN
398-399
- TOKHARIEN A
398
- TOKHARIEN B
398-399
V. INDO-lRANIEN
399-400
- SANSKRIT VÉDIQUE
399-400
376
-AVESTIQUE - VIEUX PERSE - PEHLEVI - PERSAN MODERNE -PASHTO - BALOUTCHI - YIDGHA -ORMURI -OSSÈTE - V. KHOTANAIS
Index verborum
377
Index verborum
400 400 400 400 400 400 400 400 400 400
- NÉERLANDAIS
407 407 407 407-408 408 408 408 408
XII. ITALIQUE
408-409
-LATIN
- VIEIL ANGLAIS - ANGLAIS MODERNE - VIEUX SAXON - VIEUX HAUT-ALLEMAND - MOYEN HAUT-ALLEMAND - ALLEMAND MODERNE - MOYEN BAS-ALLEMAND
-PORTUGAIS
408-409 409 409 409 409 409 409
X. SLAVE
403-406
XIII. CELTIQUE
409-410
- VIEUX SLAVE
- GAULOIS
- POLABE
403-404 404 404-405 405 405 405 405 405 406 406 406
XI. GERMANIQUE
406-408
VI. GREC
400-402
- OSQUE
-MYCÉNIEN
-OMBRIEN
- GREC ALPHABÉTIQUE
400 400-402
VII. ARMÉNIEN
402-403
- ITALIEN
- FRANÇAIS
VIII. PHRYGIEN
403
- ESPAGNOL
IX. ALBANAIS
403
- BULGARE - SERBO-CROATE - SLOVÈNE - RUSSE - UKRAINIEN - BIÉLORUSSE - TCHÈQUE - SLOVAQUE - POLONAIS
- GOTIQUE - VIEIL ISLANDAIS -FRISON
406 407 407
- CORNIQUE
409 410 410 410
-BRETON
410
XIV. LANGUES NON INDO-EUROPÉENNES
410
- FINNOIS
410 410 410 410 410
- VIEIL IRLANDAIS - GALLOIS
- ESTONIEN -LIVE - LAPPON -MORDVE
378
Index verborum
1. BALTIQUE -LITUANIEN
akmuo : 93. âknos, dial. : 100, 107. o alkanas : 221. o alkti : 221, 332, ind. prés. alksta 332, ind. prét. alko 332. o afitinas : 177, 184, 189. o antis, gén. p\. anCi7J: 26 (n.14), 34,177,184,189. o apvi/ti : 154. o arti : 323, 324, ind. prés. aria 323, 324, ind. prét. aré 323, 324, dia\. oré 323. o astufitas : 94 (n. 151). o astuoni : 94 (n. 151). o ateitis : 248 (n. 357). o atefitis : 242. o atkalti : 323, ind. prés. àtkala 323, dia\. àtkalia 323, ind. prét. atkalé 323, dial. atk6lé 323. o atvefpti, dia\. : 211, ind. prés. atvefpia 211. o atvérti : 320, ind. prés. àtveria 206, 211, 320, 321, ind. prét. atvéré 320. o atviras : 321. o augti : 312, ind. prés. auga 312, ind. prét. augo 3 12. o ailti : 294, 330, ind. prés. ailna 294, 330, ind. prét. avé 330. o avis: 26, gén. pl. aviy 26. o aieras, dial. : 111. o badauti : 328, 329, 331, 360, ind. prés. badauja 328, 331, 360, ind. prét. badâvo 328, 331, 360. o ba/tas : 221, 285. o ba/ti : 221, 285, 333, ind. prés. bçla 285, 333, ind. prét. balo 333. o barti : 250, 306, 324, ind. prés. bara 250, 306, 324, ind. prét. baré 250, 306, 324. o bégis : 9. o bégtè : 247. o bégté : 247. o bégti : 9, 94 (n. 150), 250, 273, 311, ind. prés. béga 250, 273, 311, ind. prét. bégo 250, 273, 296, 311. o befidras : 66. o o
bendré : 66. bérnas : 177, 178, 182, 183, 185. o beftas : 228, 229. o befti : 228, 229, 249, 270, 278, 279 (n. 387), 284, 285, 292 (n. 398), 300, 319, 349, 357-358, ind. prés. beria 229, 270, 278, 279 (n. 387), 285, 300, 319, 357-358, ind. prét. bèré 279 (n. 387), 319, 349, 350, 357-358. o bèsti : 271, ind. prés. beda 271, ind. prét. bedé 271. o bij6tt : 30 1, ind. prés. bijo 301, ind. prét. bij6jo 301. o byl6ti : 260, 261, ind. prét. byl6jo 260. o bi/ti : 260. o birti : 284, 285, 300, ind. prés. birsta 285, ind. prét. biro 300. o blauzdà : 102 (n. 168). o bliauti : 330, ind. prés. bliauna 330, ind. prét. bli6vë 330. o bli5ksti : 321, 322, ind. prés. bfofkia 321, 322, dia!. blafkia 322, ind. prét. bli5fkë 321, 322. o boginti : 94 (n. 150), 95. o briaunà : 29 (n. 21). o bristi : 335-336, ind. prés. brefida 335-336, ind. prét. brido 335-336. o brolis : 67. o broterélis : 67. o bruvis, v., dia\. : 28-29. o bùré : 110. o bùrti : 326, ind. prés. bùria 326, ind. prét. bûré 326. o bùsti : 347, ind. prés. bufida 347, ind. prét. bùdo 347. o bûti : 17, 134-136, 138, 203, 244, 248 (n. 357), ind. prés. es~, esi, yrà 131, 134-136, v. esmz, esi, esti 131, 133, 134-136, 141,219,236,239,369, ind. prét. buvail, v. bW 294 (n. 400), diaI. bit 294 (n. 400), ind. fut. bûsiu, bùs, bûsime 17, 203, cond. bûciau, v. bütumbiau, büCia 220, permissif teesie 219, 220, 239, 287. o o
Index verborum bütis, dia\. : 248 (n. 357). ciùpti : 157 (n. 244). o dabaf': 81 (n. 131). o daigas : 10. o daiginti : 161. o dainuoti, dainuotas : 226. o dangùs, dia\. dengùs : 234 (n.327). o dantis : 152. o degtas : 274. o dègti : 272, 302, 342 (n.493), 353, ind. prés. dega 272, 302, ind. prét. degé 272, 302, 353. o defigti : 234 (n. 327). o desimt : 233 (n. 326), 258 (n.366). o déti: 138-143, 228, 248, 274275, 277, ind. prés. dedù, deda 138-143, 274, v. demi, desi, dest 138-143. o détis : 248. o didelis, didel é : 190. o diegas : 10. o dievas : 51 (n. 64). o dygti : 161. o di/ti : 303, 350, ind. prés. dela, di/sta, dyla 303, 304, 350, ind. prét. dilo 303, 304, 350. o difigti : 332, ind. prés. difigsta 332, ind. prét. difigo 332. o dirbti : 195-196,205,311, ind. prés. dirba 311, 364, ind. prét. dirbo 311, 364. o dif'ti, dia\. : 284, ind. prés. dera 284. o dirti : 324, 357, ind. prés. diria 324, 357, ind. prét. dyré 324, 357. o d6bti : 328, ind. prés. d6bia 328, ind. prét. dobé 328. o drabùûs : 364. o drailsti, draildzia : 211. o drébti : 16-1 7, ind. prés. drebiù,drebia 16-17, ind.prét. drébiail, drébé 16-17. o driksti : 334, ind. prés. dryska 334, ind. prét. drisko 334. o dr6bé : 364. o druskà : 51. °dukté: 67,81 (n.129), 173 (n.261). o
o
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o dùmti : 326, ind. prés. dùmia 326, ind. prét. dûmé 326. o duoti : 19, 140 (n. 218), 143150, 203, 218, 226, 228, 244, 275, 277, 289-290, 373, ind. prés. duodu, duoda 131, 140 (n.218), 143-150, 289-290, v. dumi, dusti 131, 133, 136 (n.21O), 141, 143-150, 292, ind. prét. daviail, davé 290, ind. fut. duosiu, dui5s, duosime 19, 203,290, impér. duok 218. o dùrys : 49-51. o dùrti : 326, ind. prés. dùria 326, ind. prét. dûré 326. o dvaras : 50. o dvésti : 316, 319 (n. 450), ind. prés. dvesia 316, 319 (n. 450), ind. prét. dvésé 316, 319 (n. 450). o dvi5kti : 321, 322, ind. prés. dvi5kia 321, dia\. dvâkia 322, ind. prét. dvi5ké 321, 322. o Édelé : 93. o édmenys : 93. o édrà : 79. o édrùs : 93. o éduonis : 79, 93. o égéré, dia\. : 110. o eiti: 136-138, 203, 240-244, 248 (n. 357), 251, 266 (n. 379), 330, 337, 349, ind. prés. einù, eini, eina 131, 132, 136-138, 251, 330, 337, v. eimi, eisi, eiti 131, 132, 133, 136-138, 141, 242, 330, ind. prét. ëjail, ~o 251, 266 (n. 379), 330, 337, 349, ind. fut. ei'siu 203, impér. e'ik 218 (n.311). o ejanti, ace. v. : 240-244, 287. o eknos, dia!. : 100, 107, 110. o enti, ace. : 11 0, 235, 240-244, 287. o esçs : 236-239, 241, 287, 372. o esti : 93, 147, 150-154, 156, 274, 349, 353, ind. prés. édu, éda 132, 150-154, 274, v. émi, ést 132, 141, 144, 150-154, ind. prét. édé 274, 349, 350, 353. o esù : voir bûti. o ezeras : 111.
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Index verborum
• gaidys ; 173 (n. 262). • gaini6ti : 363. • ga/và : 250. • ga/voti : 250. • gaminti : 257 (n. 364). • ganas : 364. • ganioti : 363. • ganyti ; 363. • gauti : 330, 331, 359, 360, ind. prés. gauna 141 (n. 220), 330, 331, 359, ind. prét. gavo 330, 331, 359. • gé/à : 180. • gé/béti : ind. prés. gé/béja, gé/bi 131, v.gelbt 131. • genys ; 262. • gentis ; 66-67, 69, dial. gintis 69. • geras, gerà : 172. • geràsis : 237 (n. 331). • gértas ; 228, 284. • gérti : 228,284,319,320, 355-358, ind. prés. geria 319, 355-358, ind. prét. géré 319, 320, 355-358. • gérvé ; 176 (n. 269), 177, 184. • gervinas ; 176 (n. 269), 177, 184. • gèsti "s'éteindre" ; 332, ind. prés. g~sta 332, ind. prét. geso 332. • gèsti "se gâter" : 333, ind. prés. gefida 333, iud. prét. gedo 333. • gied6ti ; iud. prés. gieda 131, v. giest 131. • gi/ti ; 279, 324, iud. prés. gilia 279, iud. prét. gf/é 279. • gilùs : 278. • gimti ; 253, 256-258, 259, 279-280, 300, 302, 304, 307, 341,351, iud. prés. gema, gimsta 253, 256, 257, 259, 279, 302, 303, 307, 341, 348, 365, iud. prét. gimé 253, 257, 259, 279, 300, 302, 303, 307, 341, 348, 351,365. • gifiti : 200, 254, 262, 267 (n. 381), 279, 284, 286, 302, 303, 304 (n. 417), 351, 354355, 363-364, iud. prés. gena 140, 200, 254, 262, 267
(n. 381), 279, 284, 286, 302,
354-355, 363-364, iud. prét. giné 254, 279, 302, 304, 351, 354355, 363-364. e ginti ; 224, 252, 279, 280, 304 (n. 417),313,351,354355, 363-364, jnd. prés. gina 8, 224,252,279,280,313,363_ 364, ind. prét. gyné 8, 224, 252, 279, 280, 313, 351, 354-355, 363-364. e girdéti : 226, ind. prés. girdiiù 132, v. girdmi 132. e girtas : 285, 356. e girti : 279, 324, iud. prés. giria 165, 279, 324, 343, iud. prét. gfré 279, 324, 343. • gfti : 18, 20, 334, ind. prés. gyja 334, ind. prét. gijo 334, ind. fut. gfsiu, gis, gfsime 18, 20. e gjvas : 207. e gyvénti ; 251, ind. prés. gyvena 251, ind. prét. gyveno 251. e glieti ; 328, iud. prés. g/ieja 328, ind. prét. g/iejo 328. e g/odnas, djal. : 85. e g/osti : 85. e gnybti ; 311, ind. prés. gnyba 311, ind. prét. gnybo 311. e gobti ; 322 (n. 458), ind. prés. gobia 322 (n. 458), ind. prét. gobé 322 (n. 458). e gobtis, v. : 323, ind. prés. v. gabiasi 323. e goti ; 276. e graiybé ; 366, 367. e graiùs ; 367. e gréb/ys : 322. e grébti: 318,322,328, ind. prés. grébia 318, 328, ind. prét. grébé 318, 328. e grèsti : 316, 317, ind. prés. gresia 316, 317, ind. prét. grèsé 316, 317. • griauti ; 330, 331, 358, ind. prés. gritiuna 330, 331, 358, ind. prét. griové 330, 358. • griûti : 18, jnd. fut. griûsiu, griùs, griûsime 18. e groiybé ; 366, 367. e groZis : 367.
Index verborum e grùbti : 333, ind. prés. grufhba 333, ind. prét. grùbo 333. e grûsti ; 312, jud. prés. grûda 312, ind. prét. grûdo 312. e gùdnas, dial. : 85. e gùndyti, gùndinti : 262, 363. e gùrti : 333, 334, ind. prés. gura 333, 334, jnd. prét. gùro 333, 334. e gùsti : 85. e gvérti : 333, jnd. prés. gvçra 333, ind. prét. gvero 333. e ikras, pl. ikrai "œufs de poisson" : 102,106,113,114,115. e ikras, V. "mollet" ; 102 (n. 168). e ifhti ; 253, 255, 264-266, 303, 337-340, 349, ind. prés. ima 129, 253, 255, 264-266, 303, 337340, 349, ind. prét. èmé 253, 255, 264-266, 303, 337-340, 349, 350. e inté, dial. ; 67-68. e irti : 279, 324, 325, jnd. prés. iria 279, 324, jnd. prét. yré 279, 324. e (sa/as ; 52. e isvysti ; 161. e iiu/ùs, iiUlùs ; 87. e jaknos, dial. : 100, 107, 113, 116, 118, 243. e jakstis,jekstis, dia!. ; 111. e jauti : 330, ind. prés.jauna 330, jud. prét.jové 330. e jaura, dial.jauré : 53-54. e jégà : 110. e jégéré, dial. ; 110. e jeknos, V. dial. : 79, 100-118, 124, v.jekanas 100. e jenté, v. : 66-69, 110. e jèieras, dial. : 111. e joti : 276, 328, 329, ind. prés. joja 276, 328, 329, iud. prét.jojo 276, 328, 329. eJovardas, Jovardà,Jovarda, Jovardé: 126. e Jovirdas, Jovirdà, Jovirda, Jovirdé: 126. e Judrà : 91. e judrùs : 91. e jùngas : 83. e jùngti : 83.
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Juodas ; 91. juodas : 91. e juokas : 88, 183, 250. e juokauti : 250. e jûra, dial.jûrios,jûrés : 5354. e jùsti : 333, ind. prés.jufida 333, ind. prét.jùdo 333. e kaklas : 128. e kàkti : 333, iud. prés. kafika 333, iud. prét. kako 333. e kalti : 306, ind. prés. ka/a 306, iud. prét. kalê 306. e kampas : 184. e kampa : 184. e kaplYs : 322. e kapoti : 322 (n. 460). e kara/ius, kara/iené : 174. e karstas : 186, 187. e karti : 306, 323, 324, 332, 357, 358, iud. prés. karia 306, 323, 324, 332, 343, 357, 358, iud. prét. korê 306, 323, 324, 332, 343, 357, 358. e kàsti : 226, 305, iud. prés. kasa 305, iud. prét. kiisé 305. e kata/yti, katiiryti : 117. e kailkti : 327, iud. prés. kailkia 327, ind. prét. kailké 327. e kauti : 330, 331, 332, 358360, iud. prés. kauna 330, 331, 332, 358-360, ind. prét. kové 330, 332, 358-360. e kefstas : 221. e kefsti : 221, 282, ind. prés. kefcia 282, ind. prét. kefté 282. e ke/ias : 38. e kéltas : 221, 284. e ké/ti : 19, 221, 282, 283, 284, 285, 286, 293, 297 (n. 407), 319, 320, ind. prés. kelia 10, 282, 283, 285, 293, 319, 343, 366, ind. prét. kélé 10, 282, 283, 293, 319, 320, 343, 350, 366, iud. fut. kélsiu, keTs, ké/sime 19. e kepenys : 101, V. kepanos, képenos, képinas 101. e keptas : 274. e kèpti : 101, 270, 342 (n. 493), 353, jud. prés. kepa 270, jnd. prét. kepé 270, 353. e
e
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Index verborum
• kermuo, kermenaï, dia!. : 61. • kjboti : 9, 10. • ki/tas: 221,285. • ki/ti : 282, 283, 285, 286, 333, 334, ind. prés. kYla 282, 283, 285, 333, 334, ind. prét. kilo 282, 283, 333, 334. • kimsti : 252, 286, 307, ind. prés. kemsa 252, 286, 307, ind. prét. kimso 252, 307. • kif'pti : 286, 307, 308, ind. prés. kefpa 286, 307, 308, ind. prét. kifpo 307, 308. • kifslas, dia!. kefslas : 309 (n.433). • kifsti : 286, 309, ind. prés. kefta 286, 309, ind. prét. kifto 309. • kisti : 282, ind. prés. kifita 282, ind. prét. kito 282. • kisti : 311, ind. prés. kisa 311, ind. prét. kiso 311. • klastà : 336 (n. 484). • klausti : 327, ind. prés. klclusia 327, ind. prét. klousé 327. • kliedéti : ind. prés. kliedi, klieda 132, v. kliest 132. • kopti : 267, 321, 322, ind. prés. kopia 267, 321, dia!. kêipia 322, ind. prét. kopé 321, 322. • k6séti : 132, ind. prés. k6siu 132, v. kosmi 132. • krafitas, dia!. kranta : 184. • kraüjas : 355. • krauti : 248 (n. 357), 330, 331, ind. prés. krauna 330, 331, ind. prét. kr6vé 330. • krimsti : 286, 308, ind. prés. kremta 286, 308, ind. prét. krimto 308. • kristi : 294, 333, ind. prés. krifita 294, 333, ind. prét. krito 333. • krütis : 248 (n. 357). • kùlti : 326, ind. prés. kùlia 326, ind. prét. kûlé 326. • kuoka : 184. • kuopti : 322 (n. 459). • kùrké : 177, 185. • kufkinas : 177, 185.
• kùrti : 326, 357, 358, ind. prés. kùria 326, 343, 357, 358, ind. prét. kûré 326, 343, 357, 358. • kvépti : 316, ind. prés. kvëpia 316, ind. prét. kvépé 316. • laï, dia!. : 215. • laidnùs : 85. • laïkas : 162, 183. • laïvas : 184. • làkti : 305, ind. prés. lêika 305, ind. prét. lêiké 305. • laükas : 183. • laukti, lauktas : 226. • lauzti : 327. • léisti : 226, 327, ind. prés. léidzia 327, ind. prét. léido 327, part. prét. pass. léistas 226. • lékti : 252, 255, 268, 269, 317, 358, ind. prés. lëkia 252, 255, 268, 269, 317, 358, ind. prét.léké 252,255,269,317, 358. • lémti : 259, 260, ind. prés. lëmia 259, 260, ind. prét. lemé 259, 260. • lefikti : 10, 256 (n. 363), 285, 327, ind. prés. lefikia 327, ind. prét. lefiké 327. • lèsti : 272, ind. prés. lësa 272, ind. prét. lësé 272. • lydeti : ind. prés. lydZiù 132, v. lydmi 132. • liepa : 91. • Liepëlé : 91. • lietùs : 247, 249. • likti : 162, 252, 253, 254, 263, 267, 268, 291, 307, 308, 311,347,370, ind. prés.liëka 131, 168, 252, 253, 254, 263, 26~ 268, 307, 308, 30~ 310, 311, 347, v. liekmi, liekti 131, 167, dia!. lifika 167, 263, ind. prét. liko 252, 253, 254, 263, 307,308,309,310,311, 347, ind. fut.liksiu 291, 370. • limti : 259, ind. prés. limsta 259, ind. prét. limo 259. ·/ifikti: 10,251,256 (n. 363), 285, ind. prés. !ifiksta 251, ind. prét. !ifiko 251.
Index verborum • lipti "co11er" : 251, 307, 333, ind. prés. limpa 251, 307, 333, ind. prét. lipo 251, 307, 333, 347. • lipti "monter" : 267, ind. prés. lipa 267. • lf!sti : 286, 308, ind. prés. lefida 286, 308, ind. prét. !ifido 286, 308. • lyti: 18, 247, 249, 267, ind. prés. IjJja 267, ind. prét. lijo 267, ind. fut. lis 18. • liüdeti : 86. • /iudnas : 85-86. • liusti : 85. • liutas : 188. • !iuté : 188. • lokYs, 16ké: 174. • 16ti : 276. • maisas : 184. • moisé : 184. • maitinti : 161. • malti : 307 (n. 424), ind. prés. mêila 307 (n. 424), ind. prét. mêilé 307 (n. 424). • manyti : 16, ind. prés. manaü, mêino 16. • màno : 16. • mêiras : 56. • marinti : 10. • mauraï, dia!. : 183. • megti : 332, ind. prés. megsta 132, 332, v. mêgt 132, ind. prét. mego 332. • mègzti : 273, ind. prés. mëzga 273, ind. prét. mëzgé 273. • meluoti : 328, 329, ind. prés. melitoja 328, ind. prét. melêivo 328. • mélzti : 253, 327, ind. prés. mélzia 253, 327, ind. prét. mélzé 253, 327. • mënas : 78 (n. 124). • mérdéti : ind. prés. mérdZiu 132, v. merdmi 132. • mefkti : 278, 283, 285, 286, ind. prés. mefkia 278, 283, 285, ind. prét. mefké 283. • mèsti : 200 (n. 291), 223-225, 226, 271, 366 (n. 512), ind. prés. mëta 223, 271, ind. prét. mëté
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224, 271, 296, 366 (n. 512), mèsk 200 (n. 291). • metyti: 366 (n. 512), 366 (n. 513). • mieg6ti : 168, ind. prés. miëga 131,168,310, v.miegmi, miegti 131,168,310, ind.prét. mieg6jo 310. • migti : 310, ind. prés. mifzga 310, ind. prét. migo 310. • mi/zti : 253, ind. prés. mélZia 253, ind. prét. mi/zo 253. • mineti : 298. • mifitas : 229. • mifiti: 8,10,229,247,249, 252, 260, 267, 268, 270, 278, 279, 280, 281-282, 283, 285, 286, 287, 302, 304, 351, ind. prés. mëna 8, 10, 229, 252, 260, 267,268, 270, 278, 279, 281, 283, 285, 286, 287, 302, 304, ind. prét. miné 252, 260, 279, 281, 283, 302, 304, 351. • minti : 255, 259-260, 278, 279,281-282,303,313,351, 352, 354, ind. prés. mina 255, 260, 278, 279, 282, 303, 313, 352, ind. prét. myné 255, 260, 279,282,303, 313, 351, 352, 354. • mintis : 248. • mifkti : 278, 283, 285, 286, ind. prés. mifksta 278, 283, 285, ind. prét. mifko 283. • mifsti : 280, ind. prés. mifsta 280. • mifti : 9, 247, 280, ind. prés. mirsta 280, ind. prét. miré 280. • mirtis : 247. • misti : 161. • mokinti : 250, ind. prés. mokina 250, ind. prét. mokino 250. • m6kytojas, m6kytoja: 174. • m6teris, v. maté: 58, 67. • mati: 276. • murvas : 185. muûs : 9, 88. • mùsti : 9, 88, 226. • naktigoné : 363. • naktis : 16, 32-33. • nasrai, dia!. nastrai: 35-37. impér. prés.
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Index verborum
• nastà : 8, 9, 367. • naujas : 111, 277. • nèsti : 8, 9, 21, 226,272, 353, 367, ind. prés. ni!Sa 21, 216, 272, ind. prét. nèsé 272, 353. • nièiti : 132. • nykti : 294, ind. prés. njfksta 294. • nosis : 35-37. • nuogas : 95. • nuolaidnùs : 85. • nuolaidùs : 85. • nuoviros : 341 (n. 490). • nuvirti : 341 (n. 490). • odmenis, dia!. : 73, 93. • Odmuo : 73, 74, 82, 85, 86, 92-94. • ojis, dia!. : 73 (n. 117). • pakibti : 9, 10. • pagùina : 363. • paojus, dia!. : 73 (n. 117). • pardavejas, pardaveja : 174. • pâskui, paskul: 272. • pavardè : 63, 126. • pawelmi, pawelt, v. : 154-156. • pavidalas : 161. • pavjfdas, pavydeti : 161. • pavojus : 73 (n. 117). • penki, dia!. pinki : 69. • pefiktas : 236. • perti : 319, ind. prés. pèria 319, ind. prét.pèré 319. • periengt, v. : voir ieiigti. • pèsti : 272, ind. prés. piFfa 272, ind. prét. pèsé 272. • piemuo : 80, 98, 99, 120. • pienas : 188. • pièné : 188. • piètüs : 247. • pjflé, dia!. : 34. • pylimas : 30 (n. 23). • pUis, gén. pl. pUig. : 26 (n. 14), 29-30. • pilnas : 188 (n. 285). • pilti : 30 (n. 23), 254, 270, 279, 313, 350, ind. prés. pila 254, 270, 279, 313, 350, 351, ind. prét. pylé 254, 279, 313, 350,351. • pirvas : 188 (n. 285).
• pinti : 267, 279, 313, 351, ind. pina 267, 279, 313, ind. prét. pyné 279, 313, 351. • pif/ai: 194, 223, 225, 252, 253, 254, 256, 261, 262, 263, 268, 278, 283, 285, 286, 307, 308, 311, 348, 369, ind. prés. pefka 194, 223, 252, 253, 254, 256, 261, 262, 263, 268, 278, 283, 285, 286, 307, 308, 311, 346, 348, 361, 364, 365, 367, 369, 370, ind. prét. pifko 194, 224, 252, 253, 254, 256, 263, 283, 296, 307, 308, 311, 346, 348, 361, 364, 365, 367, 369, 370, cond. pirkty 194. • pirstas : 42. • piriti : 286, 307, ind. prés. persa 286, 307, ind. prét. pifso 307. • pyti : 247. • plàkti : 305, 306, ind. prés. plâka 305, 306, ind. prét. pléiké 305, 306. ·platùs: 187. • plèsti : 316, 317 (n.447), 318, 319, ind. prés. plèCia 316, 317 (n.447), 318, 319, ind. prét. plèté 316, 317 (n. 447), 318, 319. • pleiti : 316, 317 (n.447), 328, ind. prés. pléSia 316, 317 (n.447), 328, ind. prét. pléSé 316,317 (n. 447),328. • plysti : 332, ind. prés. ply'Sta 332, ind. prét. plyso 332. • pliùksti : 334, ind. prés. pliuska 334, ind. prét. pliùsko 334. • prabilti : 260 (n. 368), 261, ind. prés. prabjfla 260 (n. 368), ind. prét. prabilo 260 (n. 368). • pradeti : ind. prés. pràdeda 131, v. pradest 131. • pùlti : 250, 253, 255, 267268, 342-344, ind. prés. puola 253, 255, 268, 342-344, ind. prét. puolé 253, 255, 268, 342344. • puodas : 95. • puras, p!. pural, dia!. : 183. • purùs : 188 (n. 285). prés.
Index verborum • purvas : 188 (n. 285). • pusti : 325, ind. prés. pùcia 325, ind. prét. puté 325. • pulls: 47-48. • pûti : 18, 334, ind. prés. puva 334, ind. prét. pùvo 334, ind. fut. pûsiu, pùs, pûsime 18. • ràkti : 305, ind. prés. râka 305, ind. prét. râké 305. • ràsti : 224, 225, 226, 333, ind. prés. raiida 224, 333, 347, , ind. prét. râdo 224, 333, 347. • raildas : 66. • raildé, dia!. : 66. • raudoti : 157-158, ind. prés. rauda 132, 157-158, v. apraust 132, 157-158. • railkti : 282, ind. prés. railkia 282, ind. prét. railké 282. • règzti : 273, ind. prés. rèzga 273, ind. prét. rèzgé 273. • remti : 259, ind. prés. rèmia 259, ind. prét. rèmé 259. • rimtas : 221. • rimti : 221, 259, ind. prés. rimsta 259, ind. prét. rimo 259. • riiikti : 252, 286, 307, 309, ind. prés. refika 252, 286, 307, 309, ind. prét. rifiko 252, 307, 309. • risti : 311, 334 (n. 480), ind. prés. rita 311, 334 (n. 480), dia!. refita 334 (n. 480), ind. prét. rito 311, 334 (n. 480). • riiti : 264, 310, ind. prés. risa 264, 310, ind. prét. rlso 264, 310. • ryti : 18, ind. fut. rysiu, ris, rysime 18. • ruduo : 80. • rùkti : 282, ind. prés. rufika 282, ind. prét. rùko 282. • sakYtas : 221. • sakYti : 19-20, 221, 251, 293, 298, 30 l, ind. prés. séiko 251, 293, 301, ind. prét. sâké 251, 293, 298, 301, ind. fut. sakYsiu, sakjJs, sakYsime 19-20, dia!. sakis 19-20. • sant{, v. : 231, 233, 235, 236239, 241, 287, 369, 372.
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• sâpnas : 117, 250. • sapnuoti : 250. • sargas : 188. • sargé : 188. • saulé: 69-71. • sàvo : 16. • sédeti : 293, 298, 301, ind. prés. sédi 293, 301, ind. prét. sédejo 293, 301. • sègti : 272, ind. prés. sèga 272, ind. prét. sègé 272. • sèkti "suivre, etc." : 271, 302, 348, ind. prés. sèka 271, 302, 348, ind. prét. sèké 271, 302, 348. • sèkti "baisser" : 333, ind. prés. seiika 333, ind. prét. sèko 333. • sémti : 314, ind. prés. sèmia 314, ind. prét. semé 314. • sémuo : 61. • sènas : 250. • senèlis, senèlé : 174. • seneti : 250. • sénti : 280, ind. prés. sénsta 280, ind. prét. sèno 280. • septifitas : 94 (n. 151). • sérgéti : ind. prés. sérgi 131, v. serkti 131. • sesti : 94 (n. 150), 180, 273, ind. prés. séda 273, ind. prét. sedo 273. • sesuo : 80. • seti : 180, 275, 328, ind. prés. seja 328, ind. prét. sejo 328. ·siena: 187. • sirgti : 286, ind. prés. serga 286. • siûti : 19, 253, 255, 267, ind. prés. siùva 253, 255, 267, ind. prét. siùvo 253, 255, 267, ind. fut. siûsiu, sius, siûsime 19. • skaityti, skairytas : 226. • skéldéti : 341, ind. prés. skélda, skéldi 341, ind. prét. skéldéjo 341. • skçsti : 200, 236, ind. prés. skçsta 200, ind. prét. skeiido 200. • skilti : 341, ind. prés. skjJla 341, ind. prét. skilo 341. • skinti : 254, 279, 313, 351, ind. prés. skina 254, 279, 313,
386
Index verborum
ind. prét. skYné 254, 279, 313, 35l. • skirti : 324, 325, , ind. prés. skiria 324, 325, ind. prét. skYré 324, 325. • sklisti : , ind. prés. sklinda , ind. prét. sklido . • skristi : 335-336, ind. prés. skrenda 335-338, ind. prét. skrido 335-338. • skùsti : 311, ind. prés. skùta 311, ind. prét. skùto 311. • slégti: 316, 317, ind. prés. slegia 316, 317, ind. prét. siégé 316, 317. • slépti: 252, 316, 317, 336 (n. 484), ind. prés. slepia 252, 316, 317, ind. prét. slépé 252, 316, 317. • slinkti : 286, 308, ind. prés. slenka 286, 308, ind. prét. slinko 308. • slogà : 95. • s16pti : 322 (n. 458), ind. prés. slopsta 322 (n. 458), ind. prét. slopo 322 (n. 458). • sluogas : 95. • smogti : 322 (n. 458), ind. prés. smogia 322 (n. 458), ind. prét. smogé 322 (n. 458). • sniegas : 184. • snigti : 168, 307, 308 (n. 430), 333, ind. prés. sninga 168, 307, 310 (n. 436), 333, v. et dia!. sniegmi, sniegti 133, 168, 310 (n. 436), dia!. sniega 168, 308 (n. 430), ind. prét. snigo 307, 308 (n. 430), 333. • sodas: 85. • sodinti : 94 (n. 150), 95. • sodnas, dia!. : 85. ·solymas: 51-52. • spéti : 275. • spirti·: 279, 324, ind. prés. spiria 279, 324, ind. prét. spyré 279, 324. • srébti : 317, ind. prés. srebia 317, ind. prét. srébé 317. • staCias : 277. • statas, statà, dia!. : 278. • staryti : 278.
• statùs : 277. • stèbti : 333, ind. prés. stefhba 333, ind. prét. stebo 333. • stefhbti : 327, ind. prés. stembia 327, ind. prét. stembé 327. • stipra, stiprùs : 277. • stirna : 177, 184. 'stifninas: 177, 184. • st6tas : 277. • stoti : 20, 275, 277, ind. fut. stosiu, stos, st6sime 20, dia!. stàs 20. • stovéti : 19, ind. prés. stoviu 132, v. stovmi 132, ind. fut. stovésiu, stovés, stovésime 19, dia!. stovès 19. • stùmti : 326, ind. prés. stùmia 326, ind. prét. stûmé 326. • stuomuo, stuomas, stomuo : 94. • sukimas : 194. • sùktas : 221. • sùkti : 194, 221, 250, 300, 311, ind. prés. sùka 129, 250, 311, ind. prét. sùko 250, 295, 299, 300, 311. • sünùs : 173 (n. 261). • suodiiai : 95. • svadinti, dia!. : 95. • svefkas : 9. • svéikinti : 9. • svefti : 319, ind. prés. sveria 319, ind. prét. svéré 319. • svilti : 303, ind. prés. svela, svilsta, svyla 303, ind. prét. svilo 303. • svifnas, dia!. svirna : 184. • svyroti : 260, 261. • svirti : 260. • sakafnis : 79. • saknis : 79. • saltas : 221. • salti : 221. • sarka : 177, 184. • safkinas : 177, 184. • saukti, sauktas : 226. • sauti : 331, ind. prés. sauna 331, ind. prét. sové 331. • serdis, dia!. serdé: 39-47, 119, 370 (n. 514).
Index verborum • sefnas, sérnas, sérné 176, 182, 183, 185. • Sintis : 279, 313, 351, ind. prés. sînasi 279, 313, ind. prét. synési 279, 313, 351. • sirdis : 39-47, 119, 370 (n.514). • Sirsé : 177, 184. • sifsinas : 177, 184. • sifvas : 185. • sluoti : 328, 329, 331, ind. prés. 'Slitoja 328, 331, ind. prét. s/avé 328, 331. • sokti : 19-20, 250, 311, ind. prés. soka 250, 311, ind. prét. soko 250, 311, ind. fut. soksiu, soks, soksime 19-20. • suo : 84 (n. 136). • sventas : 66, 234. • sventé : 66. • tàpti : 333, ind. prés. tampa 333, ind. prét. tapo 333. • tarnas : 187. • taukaf: 183. • tàvo : 16. • te- : 214-216. • tegùl : 214-215. • tegùli, dia!. teguly : 214. • témti : 332, ind. prés. témsta 332, ind. prét. temo 332. • tempti, temptas : 226. • tèpti : 271, ind. prés. tepa 271, ind. prét. tepé 271. • testà, dia!. : 214. • qsti, t~sia : 211, 233, 236. • tik'Sti : 334, ind. prés. tyska 334, ind. prét. tisko 334. • tipti : 286, ind. prés. teTpa 286. • tinti : 279, 313, 351, ind. prés. lina 279, 313, ind. prét. ryné 279, 313, 351. • tirti : 279, 324, ind. prés. tiria 279, 324, ind. prét. ryré 279, 324. • trenkti : 309, ind. prés. trenkia 309, ind. prét. trenké 309. • trinti : 254, 279, 313, 314, 351, ind. prés. trina 254, 279, 313,314, ind. prét. tryné 254, 279,313,314,351. • trùkti : 333, ind. prés. trunka 333, ind. prét. trùko 333.
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• tupti : 252, 254, 255, 268, 325, 326 (n. 467), 358, ind. prés. tùpia 252, 254, 255, 268, 325, 358, ind. prét. tupé 252, 254, 255, 325, 358. • turéti: 164. • tvérti : 319, ind. prés. tveria 319, ind. prét. tvéré 319. • ûdra : 72, 74, 77, 82, 86, 87, 88,97. • üdrinis, üdarà, üdrijos eieras, üdrijà : 72. • üdroti : 93. • ugnis : 60, 81. • ûkanas, dia!. : 221. • ukas : 221. • unduo, dia!. t : 72. • uodas : 94 (n. 150), 153. • uoga : 95. • uosti : 95. • ùpé: 81. • Vadà, Vadas, Vadé, Vadavé, Vadinis, Vadin élis, Vadoksnas, Vaduvà, vaduva, Vadvà: 72-73, 74, 82, 86, 89, 90-92, 93. • vadà : 73. • Vadaksnis, Vadakstà, Vadukstà, Vadaktà, Vadakstis, Vadaktis, Vadaktà, Vadakstà: 72-73. • vadaksnis : 73. • vadé : 73, 91-92. • vaidas, v. : 162. • vaidéntis : 160. • vaidilà : 160. • vaidinti : 160. • vaidmuo : 160, 162. • vaistas : 160, . • vafzdas : 160, 162. • vaizduoté : 160, 162. • vakaras : 116. • valgyti : 150. • valià : 154. • valioti : 154. • vanduo : 71-100, 119, 125, 368. • vafdas : 63, 126-129. • varié : 73-74. • Vafnas : 91. • vafnas, varna: 91, 175-191.
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Index verborum
vcirpa : 184. e vafpas : 184. e vaftai : 114 (n. 183). e varùs : 187. e viisara : 79, 116, v. vasera 116. e véidas : 161. e véizdéti : ind. prés. véizdiiu, véizdi 133 (n. 204), dial. véimu 133 (n. 204). e veldeti : ind. prés. véldi 132, v. welst 132. e velyti : 154, 156. e vélti : 154. e véltui : 154. e vémti : 319, 320, 321, ind. prés. vemia 319, 320,321,365, ind. prét. vemé 319,320,321,365. e vefgas, vérgas, vefgé, vérgé: 178, 182, 183, 185. e vefkti : 327, ind. prés. vefkia 327, 365, ind. prét. vefké 327, 365. e vefsti : 42. e vérti: 281, 319, 341, ind. prés. veria 319, 341, ind. prét. veré 319,341. e vèsti : 92, 271, 293, 302, 335, 353, ind. prés. veda 129, 271, 293, 302, 335, 365, 366, ind. prét. vedé 271, 293, 296, 298, 299, 302, 335, 353, 365, 366. e vèiti : 273, ind. prés. veia 273, ind. prét. vezé 273. e virkas, vilké: 175-191. e virkti : 252, 286, 307, 308, ind. prés. velka 252, 286, 307, 308, ind. prét. virko 252, 307, 308. e vilna: 187. e vi/ti : 154, 324, , ind. prés. vilia 154, 324, ind. prét. vylé 324. e vi/tis : 154, 156. e vi/fis, -ies : 154. e vyras : 32. e vifsti : 332, ind. prés. vifsta 332, ind. prét. vifto 332. e virti : 140 (n. 218), 185, 187, 252, 253, 254, 280-281, 293, 341-342, ind. prés. vérda 140 (n. 218), 252, 253, 254, 280281, 293, 341-342, ind. prét. viré e
252, 253, 254, 280-281, 293, 295, 341-342. e visti : 333, ind. prés. vysta 333, ind. prét. viso 333. e visuf: 238. e vistà : 173 (n. 262). e vyti : 18, 253, 256, 267 (n. 381), 286 (n. 394), 303, 307, ind. prés. vela 253, 256, 267 (n.381), 303, 307, (n. ), ind. prét. vijo 253, 256, 267 (n. 381), 303, 307, ind. fut. vysiu, vys, vysime 18. e viJgti : 252, 253, 255, 267, 268, 321, 322, 323, 358, ind. prés. viigia 252, 253, 255, 267, 268,321,322,358, jnd. prét. viJgé 252, 253, 255, 321, 322, 358. e zuïkas, zuïkis, zùiké : 175191. e zàgti : 305 (n. 420), 321, ind. prés. ziiga, ziigia 305 (n. 420), 321, ind. prét. iiigé 305 (n. 420), 321. e i{lsis, gén. pl. i{ls~ : 30-31. e ieïsti : 327, ind. prés. ieïdzia 327, ind. prét. ieïdé 327. e iemas : 64, 66. e iemé : 64-66, 298. e Zemeda : 93. e iefigti : ind. prés. iefigia 132. e iénklas : 233. e iéntas : 67, 69, dia!. iintas 69. e iiaurùs : 31 (n. 28). e iynys : 160, 162. • iinoti : 19-20, 159, 160, 245, ind. fut. iinosiu, iinôs, iinosime 19-20, dia!. iinàs 19-20. • iîrgas : 183. ·iiùrké : 177,185. • iiufkinas : 177, 185. • imuô, v., dia!. : 66, 85 (n. 136). • iùkmistras, dia!. : 28. • zùksparnis, dia!. : 28. • iuti : 18, ind. fut. iusiu, iùs, zusime 18. • iuvis, gén. p!. iuv~ : 26, 27-28. • zuvùké, iùviké, iuviké, dia!. : 28 (n. 17). • ivéris : 31-32.
Index verborum -LETTON
acs : 109. e adata : 108. e aka : 108. e aklis : 108. e akmèns : 109. e aknas : 101-118, v. acknis 101, dial. aknys 107-109. e alkàns : 108. e aft : 324, ind. prés. àr, àr 324, ind. prét. ara 32'. e asara : 108. easins: 79,109,117. e astuô1Ji : 108. e astuôtais : 94 (n. 151). e atvert : 320, ind. prés. atvèr, atvèr 320, 321, ind. prét. atvera 320. e aûgt : 312, ind. prés. aûg 129, 312, ind. prét. aûga 312. e aût : 294, ind. prés. aûn ou aûj 294. e bart : 306, 324, ind. prés. bàr, bàr 306, 324, ind. prét. biira 306, 324. e bêgt : 273, 312, jnd. prés. bêg 273, 312, ind. prét. béga 273, 295, 312. e bçrns : 177, 178, 182, 183. e best : 271, ind. prés. bfd 271, ind. prét. beda 271. e briilis : 67. e brist : 335-336, jnd. prés. brien, bried 335-336, ind. prét. brida 335-336. e buôdzinât : 95. e buft : 326, ind. prés. bùr, bùr 326, ind. prét. bura 326. e bût: 20, 134-136, inf. bût 138, 203, 244, 248 (n. 357), ind. prés. fsmu, esi, ir 133, 134-136, 214, 238, ind. prét. biju 214, jnd. fut. bûsu, bûs 20, 203, cond. bûtu 220. e càrptu, dia!. : 249 (n. 359). e cèls: 38. e cel! : 319, 320, ind. prés. cel 319, ind. prét. cèla 319, 320. e cept : 270, jnd. prés. cfP 270, ind. prét. cepa 270. e
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cirpt : 249 (n. 359), 308, ind. cçrp 308, ind. prét. cirpa 308. e degt : 272, 296, ind. prés. dfg, dedz 272, ind. prét. dega, dedza 272, 296. • dfgùns : 35. e dét "pondre" : 138-143, 274, ind. prés. déju, dê}, dê} 138-143. e dét "allaiter" : 275. e druska : 51. e duôt : 143-150, 244, jnf. duôt 203, 275, ind. prés. duôdu, duôda 143-150, ind. prét. devu, ind. fut. duôsu 203. e duft : 326, ind. prés. dùr, dùr 326, ind. prét. dura 326. e dùrvis : 49-51. e dzenis : 262. e dzeft : 319, 320, ind. prés. dzèr, dzèr 319, ind. prét. dzèra 319, 320. e dzerve : 176 (n. 269). e dzi{s : 278. e dzimt : 256-258, 279, 303, 304, ind. prés. dzçm 256, 303, ind. prét. dzima 257, 303. e dzift, réfl. dziftiés : 324, ind. prés. dzir, dzir 324, réfl. dziras, dziras 324, ind. prét. dzïra 324, réfl. dzïros 324. e dût: 254, 262, 303, 304, ind. prés. dzçn 254, 262, jnd. prét. dzina 254, 304. e egle : 108. e eju : voir iét. e çlkuônis : 108. e es : 108. e fsmu : voir bût. e êst : 150-154, 274, ind. prés. çdu, çd 150-154, 274, ind. prét. êda 274. e fSUÔSS : 238. • fzçrs : 108. e ezis : 109. e ga} : voir iêt. e giitis : 248 (n. 357), 276. e grûst : 312, ind. prés. grûz 312, ind. prét. grûda 3 12. e iesàls : 52. e
prés.
390
Index verborum
Index verborum
• iêt: 136-138, inf. iêt 203, 244, 248 (n. 357), 276, ind. prés. eju, ej, iêt 136-138, 214, 241 (n. 342), ind. prét. gaju, gaj 214, 276, ind. fut. iêsu 203, opt. dia!. iêsiëm 203 (n. 295). • iëtala, dia!. : 67. • ietere : 67. • ikri "œufs de poisson": 102, 106. • ikri "mollet" : 102 (n. 168). • ift, réfl. if'tiês : 324, ind. prés. réfl. iras, ù;as 324, ind. prét. réfl. iros 325. • jât : 329, ind. prés.jâj 329, ind. prét.jâja 329. • jçknas, dia!. : 101, 107. • jentere, dia!. : 67. • jûgs : 83. • ju6ks : 183. • jura,jura, v.jure : 53-54. • kakIs: 128. • katis : 176. • kapât : 322 (n. 460). • kàpt : 322, ind. prés. kàpj 322, ind. prét. kàpa 322. • karalis, karaliêne : 174. • kart: 324, ind. prés. kàr, kàr 324, ind. prét. kara 324. • kast : 305, ind. prés. kas 305, ind. prét. kasa 305. • kàukt : 327, ind. prés. kàuc 327, ind. prét. kàuca 327. • kaût : 331, 360, ind. prés. kaûj 331, 360, ind. prét. kâva 331, 360.
• kraûklis : 175. • kraut : 331, ind. prés. krauj 331, ind. prét. krava 331. • krimst : 308, ind. prés. kr~mt 308, ind. prét. krimta 308. • krist : 294, ind. prés. kri! 294. • kuft : 326, ind. prés. kùl326, ind. prét. killa 326. • kùoks : 184. • kuF! : 326, ind. prés. kùr, kùr 326, ind. prét. kura 326. • tèrmenis : 61. • labs, laba : 172. • lâcis, lâcene : 174. • lài, lai: 215. • laiks : 183.
·laist: 215,327 (n. 473), ind. laiz 327 (n.473), ind. prét. laida 327 (n.473). • laiva : 184. • lakt : 305, ind. prés. lùok 305, ind. prét. laka 305. • lat: 276. • lauks : 183. • laûzt : 327. • lèkt : 255, 317, 318, ind. prés. lçc 255, 317, ind. prét. lèca 255,
prés.
317,318. • lest: 272, ind. prés. lçs, les 272,
lesa 272. • liekt : 327, ind. prés. liec 327, ind. prét. lieca 327. • liêtus : 247, 249. • likt : 255, 308, ind. prés. liek 255, 308, ind. prét. lika 255, 308. • list : 308, ind. prés. lied, lien 308, ind. prét. lida 308. • lit : 249. • màkt : 328, , ind. prés. màc 328, ind. prét. màca 328. • mat: 276. • mate: 67. • maurs : 183. • megzt : 273, ind. prés. mçgz 273, ind. prét. mçgza 273. • mçluât : 329, ind. prés. mçluâj 329, ind. prét. mçluâja 329, dia!. mçlava 329. • mest : 223-225, 271, , ind. prés. mçt 224,271, ind. prét. meta 224, 271, 296, dia\. mete 296. • miesa : 105. • migt : 310, ind. prés. mieg 310, ind. prét. miga 310. • miF! : 280, ind. prés. mifst 280, ind. prét. mira 280. • mit: 255, 313, ind. prés. min 255, 313, ind. prét. mina 255, ind. prét.
313.
• mîtus : 247. • nakt : 296, 312, ind. prés. nak 312, ind. prét. naca 296, 312, v. nace 296,312. • nakts : 32-33. • nass, nase: 35-37.
• nav, dia!. navaid, navaida, nevaid, nevaida : 160, 164
• sadt : 293, 298 (n. 412), ind. saka 293; ind. prét. sacija
prés.
(n.255), 167. • nest : 21, 272, ind. prés. nçsu, nes, nçs 21, 217, 272, ind. prét.
nesa 272. • nikt : 294, ind. prés. nikst 294. • 1}efnt : 255, 265, 303, 338340, ind. prés. 1}~m 130, 255, 265, 303, 338-340, ind. prét. 1}fma 255, 265, 303, 338-340. • pàrdevëjs, pârdevëja : 174. • pèrt : 293, ind. prés. per ou pèr 293. • pestiês : 272, ind. prés. pçsas, pesas 272, ind. prét. pesas 272. • pfle : 34. • pils : 29-30. • pirksts : 42. • pirkt : 224, 225, 254, 308, ind. prés. pirk 224, 254, 308, ind. prét. pirka 224, 254, 295, 308. • pît : 313, ind. prés. pin 313, ind.
pina 313. • plakt : 306, ind. prés. plùok 306, ind. prét. plaka 306. • plest : 317 (n. 447), ind. prés. pIes 317 (n. 447), ind. prét. pleta, plèta 317 (n. 447). • plèst : 317 (n. 447), 328, ind. prés. plès 317 (n. 447), 328, ind. prét. plèsa 317 (n. 447), 328. • priëde : 48. • pult, v. : 255, 342-344, ind. prés. puol 255, 342-344, ind. prét. pul 255, 342-344. • pûri : 183. • pùst : 326, ind. prés. pùs 326, ind. prét. pùta 326. • rakt : 305, ind. prés. rùok 305, ind. prét. raka 305. • rast : 224, 225, ind. prés. rùod 224, 225, ind. prét. rada 224, prét.
225.
• raûdât : 157. • reigît : 273. • rist : 311, ind. prét. rUa 311. • rist : 310, ind. prét. risa 310.
391
prés.
rit 311,
ind.
prés.
ris 310,
ind.
293, 298 (n. 412). • sâkt : 312, ind. prés. sâk 312,
sâka 312. • sâls : 51-52. • safgât : 301, ind. prés. safga 301, ind. prét. safgâja 301. • saule : 69-71. • sêdêt : 293, ind. prés. sêz 293. • segt : 272, ind. prés. sçg, sçdz 272, ind. prét. sega, sedza 272. • sekt : 271, ind. prés. sçk 271, ind. prét. seka 271. • sefde : 39-47. • sçrns : 176. • sêstiês : 273, ind. prés. sêstas ou sêias 273, ind. prét. sêdéis ind. prét.
273.
• sët: 140, 275. • siëviëte : 58. • sifds : 39-47. • sist : 311, ind. prés. sU 311, ind. prét. sUa 311. • skust : 311, ind. prés. skut 311, ind. prét. skuta 311. • sku6luâtajs, sku6luâtaja : 174.
• slêgt: 317, 318, ind. prés. slêdz 317, ind. prét. slèdza 317, 318. • slèpt : 317, ind. prés. slèpj 317, ind. prét. slèpa 317. • slikt : 308, ind. prés. slikst 308, ind. prét. slika 308. • sniëdze : 184. • sniegs : 184. • spët : 275. • stât : 275. • statît : 278. • stats : 278. • stràdât : 196. • strigt : 308 (n. 431), ind. prés. strieg 308 (n. 431), ind. prét. striga 308 (n. 431). • stuiht : 326, ind. prés. stumj 326, ind. prét. stuma 326. • sukt : 311, ind. prés. suk 311, ind. prét. suka 311. • s1Jift : 325, ind. prés. s1Jir, s1Jir 325, ind. prét. s1Jira 325.
392
Index verborum
• stist : 308, ind. prés. stiet 308, ind. prét. stita 308. • sut: 256, ind. prés. suj 256, ind. prét. suva 256. • tàuki : 183. • tept : 271, ind. prés. tçp 271, ind. prét. tepa 271. • fît : 313, ind. prés. tin 313, ind. prét. tina 313. • tuptiês : 326 (n. 467), ind. prés. tupstas 326 (n. 467), ind. prét. tupa 326 (n.467). • ûdèns : 71-100, 119, 368. • ûdrs : 72, 74, 77, 82, 88. • ugùns : 60. • uôds : 153. • vada : 73, 91-92. • Vadakste : 73. • vade/e : 73, 91-92. • vads : 73. ·vaï: 160. • vaïdêt : 160. • vaïds : 160. • vala : 154. • valuôt : 154. • varde, dia!. varg/e : 73-74. • vârds : 63, 126-129. • varna: 175-191. • Vârnuka/ni : 175. • veïds : 161. • veïduôt : 161. • vè/te : 154. • vernt : 319, 320, ind. prés. vemj 319, ind. prét. vema 319, 320. • vçrgs, verdzene : 178. • vêrst : 42. • vest : 92, 271, 293, ind. prés. vçdu, vçd 129, 271, 293, ind. prét. veda 271,293,296, v. vede 296, 302. • vfdêt : 161. • vîdêt : 161. • viedêt : 161. • vi/ks, vi/cene: 175. • vi/kt: 308, ind. prés. v~lk 308, ind. prét. vi/ka 308. • vi ft, viÎtiês : 154, 324, 325, ind. prés. vil 154, 324, 325, ind. prét. vîla 324, 325. • viltus : 247.
Index verborum
• vift : 254, 293, 341-342, ind. prés. vefd 254, 293, 341-342, ind. prét. vira 254, 293, 341-342. • vît : 256, 267 (n. 381), ind. prés. vij 256, 267 (n. 381), ind. prét. vija 256. • vizinât : 273. • zagt : 305 (n. 420), ind. prés. zùog 305 (n. 420), ind. prét. zaga 305 (n. 420). • zatis, zatene : 175. • zeme : 64-66. • z~ms : 64. • zinât : 160, 244. • zivs, dia!. zuvs, zuve : 27-28. • zùoss : 30-31. ·zvçrs: 31-32. -
VIEUX PRUSSIEN
• ainangeminton : 256 (n.364). • ainangimmusin : 257, 304. • ainawfdai : 161. • aytegenis : 262. • tintersgimsennien : 257. • antis : 34. • ape : 81. • asmai : voir biiton. • assanis : 117. • assaran : 60, 111. • astin : 248 (n. 357). • attrtiiti : 208. • auklipts : 336 (n. 484). • au/tiikings : 263. • auminius : 305. • aupallai : 342-344, part. prét. actif nom. pl. masc. aupallusis 342-344. • auskiend/ai : 200-201, 236. • austo : 105. • auwerus : 341 (n. 490). • auwirpis : 262. • begeyte : 273. • bilitwei, bititwi : 246. • billa, billtits : 260. • billft : 320, part. prét. actif billïuns 320. • bousennis : 257. • brote, brtiti : 67. • bucawarne : 175. • buton : 134-136, 138, inf. bout, büton 195, 199, 201,
213,245, 248 (n. 357), 257, ind. prés. asmai, assai, ast, astai 130, 134-136, 163, 194, 199, 20 1, ind. prét. bhe 194, 199, impér. seiti 195, 198, 20 1, 202, 204, 205, 206, 208, 213, 219, 287, opt. bousei 195, 198, 199, 201, 202, 204, 213, seisei 201-202, cond. boülai 195, 199, 213. • buttan : 80 (n. 128). • C/ynteyne : 233 (n. 326). • co/warnis : 175. • crauyawirps : 262. • crixtits : 195. • dagis : 272. • dangus : 234. • dëit, daton, dëitwei : 143-150, 195, 211, 245, 246, 275, ind. prés. dtise, dëist, dast 130, 143150, 163, 292, impér. dtiiti 208, 211, opt. dtisai, dase 198. • dauris : 49-51. • deiws, deywis : 51 (n. 64), 60. • dengenennis : 234. • dessempts, dessimpts, dessimton : 233 (n. 326), 258 (n.366). • dfnkauti : 209, 329, ind. prét. dinkowatz, dïnkauts 295, 329. • draudieiti : 211,212. • duckti : 67. • ebsentliuns : 233. ·ëit: 136-138,213,248 (n. 357), ind. prés. ëisei, eit, perëit, pereit, perëimai 130, 136-138, 163, impér. ieis, ieiti, ieithy, pergeis 198, 20 1, 208, 212 (n. 304),213,220 (n. 313), 287, opt. pareysey 199, 201, cond. ëi/ai 199, 213. • embaddusisi : 271. • emmens, emnes, emnen, emmen, emnan : 60-63, 126. • emprijkisins : 230-236, 287. • emprïki : 230. • encops, enquoptzt, enkopts : 322. • endirïs : 206 (n. 299). • engaunai : 141 (n. 220). • engemmons : 256. • enimmewingi : 265.
393
• enimt, enimton : 264, part. prét. 264, part. prét. pass. animts, enimts 264. • enimumne : 265. • en/aipints : 295. • enmigguns : 295, 310. • ersinnat : 245. • etgimsannien : 257. • etskïsai : 130, 163. • etwerpsannan, attwerpsannan, etwerpsennian : 261. • etwerpsniï : 262. • etwiërpt, etwïerpt, etpwërpt : 261-262, 294, ind. prés. etwerpe, etwërpimai 164, 165, 261-262, 294, impér. etwerpeis, atwerpeis, etwerpeis 21 1, 26 1, part. prét. pass. etwierpton 261. • etwëre : 164, 320, impér. etwerreis 206, 211, 320, 321, part. prét. actif etwiriuns 320-321. • gauuns : 223. • gëide, giëidi : 164. • gemton : 256-258, 304, part. prét. actif gemmons, gemmans 223, 256, 304. • genix : 262. • genno : 56-58. • genneniskan : 57. • gerbais, gerbaiti : 198, 208. • gerdaus : 208. • gertis, gerto : 174. • Gynneboth : 262. • Ginthawte, Gynthaute : 262. • girrimai : 164. • giwa : 224, part. prés. giwtintei 224. • giwan, gijwan, geïwan, geiwan : 207. • gruntpowïrpingin : 262. • gübans, gobuns, gubons, gübons, gubas : 323. • guntwei : 262, 284, ind. prés. gunnimai 262. • yccroy : 102 (n. 168). • imt : 264-266, 293, 305, 338339, ind. prés. imma, immimai, immati 129, 208, 264-266, 293, 305, ind. prét. imma, immats 264-266, 305, 338339, impér.jmants, ymais, actif enimmans
394
Index verborum
ymais, immaiti 208, part. prét. actif immusis 264, part. prét. pass. imtii 264. • ismige : 295, 310, 311. • issprestun : 294. • ïst, ist, istwei, istwe: 150154,245,274, part. ïduns 150, 195, impér. ïdeiti, idaiti, ydieyti, edeitte 150, 198, 206, 208, 213, 274. • Jowirde : 125. • iürin : 53-54. • kelan : 78. • kermens, kermenen, kermenan, kermenes : 61. • kersle : 309 (n. 433). • kirdïtwei : impér. kïrdeiti, kirdijti 206, 208, 209. • kyrteis : 309. • kittawidin : 161. • klantemmai, klantïuns : 165, 320. • klausiton : 320, part. prét. actif klausïuns 320. • klente : 233 (n. 326). • knieipe : 164. • künti : 164. • küra : 295, 326, 327. • labs, labba, labban : 172. • lagno : 101-118, 124, 235. • laiküt : 225, 293, ind. prés. liiiku 293, part. prét. pass. laiküts 225, . • laipinna : 295. • lasinna : 318. • lasto : 318. • limtwei : 200, 258-261, 304, inf. limtwei, limtwey, lembtwey 200, 258-261, 304, ind. prét. lïmauts, limatz, lymuczt 258261, 295, 304, cond. lemlai 200, 258-261, 304. • lïse, lesuns, lysons, lïsuns lisons: 318. • ludis, ludini : 174. • luriay : 53-54, 101. • maitatunsin : 246. • meicte : 310. • meltan : 80 (n. 128). • menentwey : 305. • menso, mensii: 105.
• mettan : 80 (n. 128). • mi/ijt : 320, impér. mi/ijs, mi/ijti 206 (n. 299), part. prét. actif mi/ijuns 320. • minisnan : 305. • mothe, muthi, milti : 67. • niidewisin : 319 (n. 450). • naktin : 32-33. • naunagemmans : 256. • naunangimsenin : 257. • naunagimton : 257. • noseproly : 35. • nozy : 35-37. • panicke, paniko, pannike, panick: 58-60. • panna: 58-60, 82. • pansdau : 39. • panustaclan : 58. • pereit, pereit, pereimai : voir ëit. • pergilbans, pergilbons, pergubuns, pergubon : 323. • pergimmans : 257. • përgimnis : 257. • perrëist : 264, 310. • perschlilsiuns : 320. • pertraüki : 295, 328. • pertrincktan : 309. • perwaidinsnans : 159. • peuse : 48. • Peusebalten : 48. • Pewselauk : 48. • piencts : 236. • Pillekaym : 29. • pintis, peentis, pentes: 3738, 234. • pirsdau : 39. • pirsten : 60. • pobrandisnan : 257 (n. 364). • pobrendints : 257 (n. 364). • pogaüt : 294, ind. prés. pogiiunai 294. • poklausïmanas : 195, 223. • pokilnsi : 199. • poliiikt : 167, 263, 294. • polïnka,polijnku : 167,263, 294. • pomests : 223, 271. • pominïsnan : 305. • panasse: 35. • poprestemmai : 294, .
Index verborum • postatwei : 203, 275, ind. prés. postiinai 203, ind. prét. postai 203, ind. fut. postasei 194, 203. • powierpt : 209, 261, 309 (n.434), impér. powierptei 208, 209, 210, 261, 309 (n. 434), part. prét. actif powiërpuns 261, 309 (n.434). • Powirpen, Pawirpen : 262. • powïrps : 262, 309 (n. 434). • prawedduns : 302. • prawilts : 154,295,325. • preidïnkaut : 209. • preigimnis : 257. • preistattinnimai : 278. • prowela : 154, 295, 325, 327. • Proyden : 48. • quoitïlai, quoitïlaiti: 199. • sagis : 272. • sali, sai, salli : 51. • same, semme, samyen, semmien, semien, semman, semmin, semmey, semmiey : 64-66. • Sanselin : 30. • sansy : 30-31. • sasnis : 176. • sasnitinklo : 176. • Sassenpi/e : 29, 176. • saule : 69-71. • Sawliskreslil : 69. • sch/ilsilai : 199. • semen : 61. • semmai : 64. • senditans : 139, 274. • senrïnka : 308-309. • senrists : 264, 310. • seyr, sïras, sïru, siran, sijran, sirans: 39-47, 119, 370 (n.514). • sindats, syndens, sïdons, sïdans : 273, 274. • sïrisku : 39. • sirsdau : 39, 40, 43, 370 (n. 514). • skelliints : 195, 223. • slayo, slayan : 79, 105. • stïnons, styienuns, stenuns : 314. • stinsennien : 314. • suckis, ace. pl. suckans : 27-28.
395
• swints : 234. • swïrins : 31-32. • Tawtegynne : 262. • teikü : 224, part. prét. teiküuns 224. • tenseiti, tiënstwei : 211, 233, 236. • trencke : 309. • trenien : 313. • trinie : 164, 313. • trinsnan : 313. • Tulewirde : 125. • turrïtwei : 164, 293, ind. prés. turri 164, 293, , cond. turrïlai, turïlai, turrïlimai 199. • udro : 72, 74, 82. • unds : voir wundan. • Wadanga : 73. • Waidelotte : 159. • waidinna, waidinnasin 159. • waidleimai : 159. • waisnan : 159. • waist : 159-167, ind. prés. waisei, waidimai, waiditi 130, 133 (n.204), 159-167. • walnint, walnennint, walnennien: 155. • warnaycopo : 175. • warnis, warne : 175-191. • warta: 49, 105, 114 (n. 183). • wessis : 273. • westwey : 271, ind. prét. weddë 271, 295, 302, impér. weddais, wedeys, weddeis 198,206, 208, 211, 216, 219, 271. • widdai : 160. • widekausnan : 160-161. • Wilkaskaymen : 175. • wi/kis : 175. • wimbnis, wynis, wyms : 321. • wïrds : 63, 125-129. • wïrstmai : 131. • Worlyne : 74. • Wosispille : 29. • WOSUX, wosee : 174. • wubri : 28. • wundan, wunda, unds : 71100,119. • wurs : 53-54. • Zanseynen : 30.
396
Index verborum
-ZINOV
• barnaj : 177. • dodi : 143. • eid: 137. • emt : 265. • ward: 126. • zem : 64. • iuwo : 27.
II. INDO-EUROPÉEN • *bhecf- : 271. • *bheg w_ : 44, 273. • *bheicf- : 269. • *bh eiH- : 344. • *bher- : 129, 183 (n. 279), 228, 229, 269, 349, 371. • *bhercf- : 346. • *bher-nom : 183 (n. 279). • *bheJJet- : 347. • *b hh2-ti- : 227. • *b hh2-tO- : 227. • *bhici'-ti- : 269. • *bhrecl'- : 336. • *b hreh2-ter- : 67. • *bhf-ti- : 228, 229, 249, 269, 292 (n. 398). • *bhf-to- : 228. • *bhuci'-no- : 84. • *deh3- : 143-150,210,275. • *deiY-o- : 51 (n.64). • *dek- : 338 (n. 486). • *der- : 222, 284, 364. • *dh3-ti- : 227, 248, 275. • *dh 3-to- : 227. • *diëJJ-s, *dieJJ-rp, *diJJ-~6s : 25. • *dom-s *dem-s : 23. • *drafru- : 74 (n. 119). • *dreb h- : 364. • *drepanii: 74 (n. 119). • *df-ti- : 284. • *dr-to- : 222. • *cfet-t:fom : 64-66. • *cfeg..n_ : 272. • *eteg..n-to- : 274. • *ci'eh 1- "placer" : 138-143, 148149, 158, 228, 274. • *cfeh 1- "allaiter" : 275. • *ci'tuH- : 26, 27-28. • *ci'hl-ti- : 228. • *ethl-tO- : 228.
• *ci'orh3-JJo-: 187 (n. 284). h • *d ugh2-ter- : 67. • *ci'JJor-, *ci'ur- : 49-51, 119, 120. • *geJJH- : 359. • *gus-tu- : 248. • *gem- : 337, 340. • *tans- : 30-31. • *teJ,!- : 338 (n. 486). • *tJJër- : 31-32. • *gWeh2- : 276. • *gWen-h2, *gWn-eh2s : 23, 5658. • *gWerh3- : 228, 355-358. • *gWrp_ti_ : 276, 279. • *gWf h 3-ti- : 228, 356. • *gW{h3-to- : 228, 285, 356. • *gW en- : 130, 140, 363-364. • *gwhI)-ti- : 284, 363-364. • *gwhon _o _ : 364. • *Ht:fog-ni-: 60. • *HJJerg- / *HJJreg-: 183 (n.279). • *h1d-ont- : 152. • *hled- : 150-154, 210, 214, 274, 353. • *hled-mt:fon- : 93. • *hled-rln- : 93. • *hlei- : Il, 12, 124, 130, 136138, 197,210,212,213,218 (n. 311), 240-244. • *hlem- : 337-340. • *hles- : 12, 130, 134-136, 156, 197,210,213,229-239, 369. • *hlesh2-rln- : 117. • *hles-rln-: 117. • *hleyH-r-, *hluH-r- : 53-54. • *hJi-ont- : 110, 235, 240-244. • *hdeJJci'- : 291 (n.397). • *hlneh3-ml)- : 60-63, 126. • *hlnef- : 272,353. • *hlOd-o- : 153. • *hlor-J,!o- : 187 (n. 284). • *hlosh 2-rln- : 117. • *hlos-rln- : 117. • *hls-ontll)t- : 229-239, 369. • *hluHci'-mt:/on- : 93. • *hluHdh-rln- : 93. • *h2ef-mt:fon- : 93. • *h2ef-rln-: 93.
Index verborurn • *h2enh1- : 36. • *h2enh2-t- : 34. • *h2eyS-OS, *h 2us-s-t:/os : 24. • *h20J,!-i- : 26. • *h2JJers- : 54. • *h3bhrUh2- : 28-29. • *h30Ih2-JJo- : 187 (n. 284). • *iekw-or : 100-118. • *iekw-rln: 100-118. W • *J..ëg -eh 2 : 110. • *ieh2-: 276. • *ienh2-ter- : 66-69, 110. • *ieJJH-r-, *iuH-r- : 53-54, 119, 120. • *iokw-rln- : 100-118, 119. • *jug-om : 83, 137 (n. 213). • *iunélng-mi : 83. • *keh 2J,!- : 358-360. • *kelhl- : 297 (n. 407). • *kerH- : 187. • *kerp-ml}- : 62 (n. 87). • *klep- : 336 (n.484). • *kot-rln- : . • *kreyh 2 -io-m : 355. • *fër, *Kfd-t:/os, *ferd-i : 3947, 119. • *fuJJ-on, *fun-t:fos : 84 (n. 136). • *kWei- : 291 (n.397). • *kWekwl-os : 128. • *kWel-t:/os : 78. • *kWjH-to- : 285. • *let- : 318,338 (n.486). • *leh1t- : 318. • *leh2-w: 276. • *le,ik - : 167-168, 263, 291, 347, 371. • *les- : 272. • *likW-ti- : 268. • *linekw-mi : 167. w • *loik -h2e: 167-168, 263. • *meh2- : 276. • *meh 2-ter- : 67. • *men- : 248,268. • *men-t:/os : 78 (n. 124). • *men-tu- : 248. • *mesl- : 273. • *met- : 271. • *ml}-ti- : 248, 249, 268. • *mor-o- : 56. • *neh2s- : 35-37.
397
• *neJJ-o- : 277. • *neJJ-io- : 277. • *l}g-ni- : 60. • *nogW-t-s, *negw-t-s : 32-33. • *nom-o- : 56. • *peh 2 -J,!r, *ph 2-JJen-s : 58-60, 96. • *peh3IH- : 343-344. • *pef- : 272. • *pek w_ : 270. • *pekW-to- : 274. • *pent- : 38 (n. 43). • *pent-oh2- : 37-38, 234. • *peJJf-, *PUK- : 48, 119, 120. • *ph2-ter- : 67. • *ph3-ti- : 227. • *ph3-tO- : 227. • *pleh 1- : 30 (n. 23). • *pjhl- : 29-30. • *pjhl-nt:/o- : 188 (n. 285). • *pjh1-u- : 188 (n. 285). • *pod-s, *ped-s : 25. • *poi-mon : 80. • *Pf-tu- : 248. • *resl- : 273. • *reJJdH- : 157-158. • *sed- : 180,273. • *seg- : 272. • *sel- : 12. • *sehj- : 61, 180, 275. • *seh1-ml}- : 61. • *seh 2 -1-, *sh2-1- : 51-52, 119, 120. • *seh2-IJl-, *sh2-JJen-s : 69-71. w • *sek - : 271, 348. • *sem-s, *sm-ih2: 12, 171172, 371. • *septrn-to- : 94 (n. 151). • *speh 1- : 248, 275. • *sreJ,!- : 269. • *sru-ti- : 269. • *steh2- : 275,277. • *sth 2-ti- : 276. • *sth 2-to- : 277, 278. • *sJ,!enet- : 83 (n. 134). • *S IJep-rln- : 117. • *sJJop-rln-: 117. • *sJJesor: 80,103 (n. 172). • *tep- : 271. • *teJJp- : 157 (n. 244). • *tokW-o- : 56.
398
Index verborum
• *trej-es, *tri-h 2 : 172. • *yed-ôr : 12, 78 (n. 125), 79, 96, 98-99, 115, 124, 125. • *yeet- : 90,271, 353. • *yegh- : 273. • *yehir- : 54. • *yejd- : 158-167. • *yeli-r/n- : 116. • *yelh}- : 154-156, 197. • *yencf- : 83 (n. 134). • *yercl'-o- : 125-129, 169. • *yerg- : 183 (n. 279). • *yerg-o- : 128. • *yerH- : 187-188. • *yert- : 42. • *yes-r/n- : 116. • *Ylr-o-, *yiHr-o- : 32. • *yJkw-o- : 182, 188. • *J,lod-r/n- : Il, 12, 71-100, 115, 119, 120, 124, 125. ·*J,loid-h2e: 124, 158-167, 169. • *J,loli-r/n- : 116. • */Joret-o- : 125-129. • *J,lorg-o- : 128. • *J,lorH-neh 2 : 185, 187-188. • *J,lorH-u- : 187-188. • *J,los-r/n- : 116. • *J,I[dh-o- : 125-129, 169.
III. ANATOLIEN -
HITTITE
• asanza : 230. • ëdmi, adanzi : 151, 152. • ekuzi, akuanzi : 152. • ëpzi, appanzi : 152. • esbar : Il 7. • ësmi, ëszi, asanzi : 134, 152. • banna: 63 (n. 92). • kir: 40, 47, gén. sg. kardas, kardiyas 41, loc. sg. kirti 41, 47. • kuenzi : 130, 284. • kuinnassan : 57. • kurur : 31 (n. 28). • laman : 62, 63. • lessuwanzi : 272. • nekuz : 33. • nekuzzi : 32. • pabbur,pabbuenas : 59,96. • seszi, sasanzi : 152. • suppariya- : 117.
• tekan : 64. • tëmi : 139. • tepnu- : 187. • tepu- : 187. • uwatemi : 139. • warnuzzi : 186, 187. • wiitar : Il, 12, 75, 76, 86, 96, 124. • wëkzi, wekkanzi : 153. • wemiyezzi : 338, 340. • widar : 12, 80, 124. -LOUVITE
• adaman : 63. • wana- : 56 (n. 76). • warsa- : 54. -LYCIEN
• qàti : 63 (n. 92).
IV. TOKHARIEN TOKHARIEN A • kal, saI: 297 (n. 407). • kukal : 128. • nakcu : 33. • fiom : 63. • parwal'fl : 28-29. • por : 59. • sale: 52. • Siil'fl : 57. • ~piil'fl : Il 7. • tkal'fl : 64, 65. • war : 54. • wril'fl : 54 (n. 74).
-
TOKHARIEN B • kal, sala: 297 (n. 407). • kel'fl : 64, 65. • kokale : 128. • niik- : 63 (n. 92). • nekciye : 33. • fiem : 63. • oko : 95. • parwiine : 28-29. • puwar : 59. • salyiye : 52. • sanmetse : 117. • sana: 57. • ~pane : 117. • twere : 50. • war : 54. • wraufia : 181. • Wrauske : 181.
-
Index verborurn •
wriye~~e
: 54 (n. 74).
v.
INDO-lRANIEN
-
SANSKRIT VÉDIQUE
• cidmi : 151, 152, impér. addhi 197. • agnâYI : 179 (n. 272). • agni- : 60, 179 (n. 272). • ciniti : 36. • anudra- : 76. • cipihita- : 227. • cipihiti- : 227, 274. • arayt : 179 (n. 272). • ari- : 179 (n. 272). • asti: 112, 130, 134, 213, subj. asati 197, opt. syât 12, 197, 213. • ascini- : 93. • asma : 93. • ciiri-: 93. • avi- : 26. • ayam, iycim : 172. • ati- : 26 (n. 14), 34. • budhna- : 84. • bharati : 129, 269, 349, 371, opt. bharet 218, 219. • bhrâtii : 67. • bh[ta- : 285. • bh[ti- : 269. • bhrûl) : 28. • cakra- : 128. • carman- : 61-62. • dadati : 142, 143, 144, 146, 150 (n. 231). • dadhati: 139, 140-141, 142. • dagdha- : 274. • dahati : 272, 353. • devatta- : 150 (n. 231). • dàti- : 248. • duhitâ : 67. • dvâ : 49 (n. 61). • dvâram : 50. • dvârah, duraI), duraI), dvârau : 49. • dhlta- : 275. • éti : Il, 124, 130, 137, 165, 214, impér. ihi, eta, ita 197, 198, opt. iyât 214. • gata- : 227. • gati- : 227, 276, 280. • gnâs pati- : 57.
399
• ghanci- : 364. • ghorci- : 31 (n. 28). • hal'flsa-, fém. ha7J7st : 30. • hanti : 130, 284, 364. • hata- : 284. • hârdi : 41 (n. 47). • hita- : 228. • hvarate : 31 (n. 28). • i~(a- : 227. • i~(i- : 227. • jani : 57. • kravya7J7 : 355 (n. 506). • klPâ : 62 (n. 87). • k~am- : 64, 65. • mcintu- : 248. • mati- : 248. • mâta : 67. • nakta7J7 : 33. • nar, nârl: 179. • nâman-: 62. • nâsa, nasal), nasâ : 35-37. • pcicati : 270, 353. • padyate : 343 (n. 495). • pakta- : 274. • panthal) : 37-38, 234. • pitâ : 67. • puru- : 188 (n. 285). • pûr : 26 (n. 14), 29-30. • rajju- : 273. • râja: 12. • râjfil: 12. • rinakti : 167. • raditi, rudanti: 157. • sacate : 271. • sali/a- : 52 (n. 70). • (a)sajati : 272. • san, satal) : 229, 231. • sphàti- : 248. • sravati : 269. • sruti- : 269. • sthita- : 277. • suvar- : 70. • sûra-, sûrya- : 70. • iraddadhiiti : 46 (n. 54). • sroati : 12. • trayal), trt: 172. • udaka7J7, udnal), udani : 75, 77,84,86,96, . • udra- : 75, 77. • unatti, undimti : 82-84. • u~âh : 24.
400
Index verborum
• utsa- : 77. • udhar, udhnah : 93. • vadhu- : 271. . • vahati : 273. • varsati : 54. • vâr,' vâri : 54. • véda, vidma : 124, 158, 163, 164, 165, 167. • vïra- : 32. • vfka-, v[kt- : 182, 188, 189. • vPJïté, av(u)ri : 155, 156. • yak[t: 103, 104, 112, 113. • yan: 243. • yiita- : 276. • yâtii: 68. • yugalJ1 : 83. • yunakti : 83. -AVESTIQUE
• iitars: 186. i • da8ii ti, dazdë : 141. i • da8ii ti : 143. • d?J1Jg paitif: 23. • duuar, duuara- : 50. • haxma, haxjmçm : 12. • hu.uar~, xv?J1Jg : 70, 71. • ja'ni- : 57. • niiman : 62, pl. niimÇJn 78 (n. 125), 115. • niiI)haiia, niiI)hiibiia : 35. • pamâ : 37-38. • p~r;ltu- : 248. • udra- : 75. • Uru()~n : 157. • usa: 77. • v~r~'Jtë : 155. • yiikar;l : 103, 104, 113. • zâ, z;lma, z;lmi : 65. -
VIEUX PERSE
• carman : 61. • duvara- : 50. • niiham, ace. : 35, 36. -PEHLEVI
• Jagar : 104. • variiy, variik : 181. -
PERSAN MODERNE
• Jigar : 103, 104, 113. -PASHTO
• y/na: 103, 104, 112. • vroy, vrëy : 181.
-BALOUTCHI
• 8ÉKOllaL, att. 8ÉXOllaL: 338
• guriiy : 181.
(n.486).
-YlDGHA
• 8ÉKTO : 338 (n. 486). • 8Épw : 222, 270 (n. 382). • OEUTIOTllS : 23. • 8lowllL : 143, 144, 146, 149. • ooms : 227, 228, 248, 275,
• 'yëy~n : 104. -ORMURI
• ka'J°wraya : 181. -OSSÈTE
277.
• ace, accœ: 34. • fandag, fandiig: 37.
228.
- v. KHOTANAIS • gyagarrii,jatiirra: 104. VI. GREC -MYCÉNIEN
• a-pe-o-te : 230. • e-e-si : 232. • i-jo-te : 244. • u-do-ro : 76. -
401
Index verborum
GREC ALPHABÉTIQUE
• dyaSés, dya8it : 171. • d8EÀepos, d8EÀeplÎ : 173. • aKl-lwv : 93. • àÀouv8vll : 76, 84. • éiÀs : 52. • dVE8E', dial. : 158. • avv8pos : 76. •' Apll'LepaTos : 284. • aaTV : 30 (n. 23). • ~ava, dia!. : 57. • ~aaLÀEvs : 360 (n. 510). • ~aaLÀEvw : 360 (n. 510). • ~aaLS : 276, 280. • ~L~pwaKw : 355. • ~pWULS : 228, 248, 356. • ~pwTés : 228, 285, 356. • ~pWTVS : 248. • yÉj..lw : 338, 340. • yÉVOS : Il. • yÉVTO : 337, 338, 340. • Yl YVOj..laL, ind. fut. YEvfraoj..laL, aor. ÈYEVOj..lT]V, parfait yÉyova
291. • YVVTr : 57. • 8aKpv : 74 (n. 119). • 8aIJ.vllIJ.L : 141 (n. 220). • 8apaLS : 270 (n. 382). • 8dKVVIJ.L, ind. fut. 8Ei.çw, aor. Ë8ELça : 203 (n. 296).
• 80TOS : 150 (n. 231), 227, • 8ouÀoS', 80VÀll : 171, 173. • opETIaVll : 74 (n. 119). • ~wm- : 248. ·Ëap : 116. • ËOj.1.EVaL, ËOOllaL, EOEUKE
151. • ÈÉÀ8wp : 125. • ELIlL : 130, 134, 213, 232, subj. EW 197, opt. ELTJV 197, 204,
213. • ElIlL : 12, 124, 130, 137, 165, 212 (n. 304), 214, impér. 'LeL 197, opt. '(OLIlL 212 (n. 304),214. • ElVaTÉpES', homo : 68. • ElS, Illa: 12, 171,371. • ind. fut. ÈÀEvaOlJ.aL, ind. aor. T)Àv8ov : 291 (n.397). • ËÀwp : 125. • ÈvaTTJp : 68. • ËVLUTIE : 272. • ËVTEpa : 105. • ÈVTl, dia!. : 232. ·'EvVllaKpaTî.oas, dial. : 62. • ËTIOllaL, ind. aor. ÉUTIOIlllV :
271, 348. ·Ëpyov : 128, 183 (n. 279). • ÈU8lW, homo Ëu8w : 151. • ÈXETIEVKTrS' : 48. • EXW, ËUXOV : 12,348. • Èwv, wv : 230.
• ZEfs: 25. • (uyov : 83. • hEVTES', dia!. : 232.
• f)~TJ : 110.
• NÀLOs, ~ÀLOS' : 70. • ~Ilap, homo : 116. • l1IlÉpa : 116. • T)VEYKOV : voir epÉpw. • ~TIap : 103, 104, 113. • i)wS' : 24. • 8aLpoS : 50.
• 8ElvW : 140. • 8ÉrrTavOS : 274. • 8ÉaLS' : 228, 274, 277. • 8ETOS : 228.
•8frp : 31. • SOPVVllaL : 187 (n. 284). • Boupos : 187 (n. 284). • 8uyaTllP : 67. • Bupa, dia!. BVPll, p!. Bupal : 50. • Svpa(E : 49. • 8upoa, 8oo8EV, dia!. : 49. • '(KpLOV : 102 (n. 168). • '(TIrroS' : 173 (n. 262).
• LWV : 244. • LXBuS' : 26, 27-28. • KaM8vaL : 76. • Kapoî.a, homo Kpaoî.ll : 41, 43. • Kfjp, homo : 40. • KÀÉTITW : 336 (n. 484). • KOTITW : 323 (n. 460). • Kopaç : 186. ·KoPWVll : 185,186. • KpÉaS' : 355 (n. 506). • KtIKÀOS' : 123, 128. • KVpTOS : 222. • KVWV : 84 (n. 136). • Àaj..l~avw, ind. aor. D.a~ov
347. • ÀElTIW, ind. fut. ÀEl1j;w, aor. ËÀL1TOV, parfait ÀÉÀOL TIa : 167, 168 (n. 258), 203 (n. 296), 263,
291, 346, 347, 370, 371. • ÀÉXETaL : 338 (n. 486). • ÀÉKTO : 338 (n. 486). • (f)Àfjv : 156. • ÀL TOS' : 222. • ÀUKOS', ÀUKaLva : 182. • ÀuuElas, ÀUUELE : 205. • llalVOllaL, ind. aor. Èj..laVllv
298, 299. ·IlÉvoS : 78 (n. 124). • IlTrTTJP : 67, 173 (n. 261). • vEo8apToS': 222. • vfjTTa, dial. vàuua : 34. • VTrXw : 34. • VOIlOS : 56. • vuç : 33.
• o(w : 95. • oloa, 'LullEv : 124, 158, 163,
164, 165, 167. • OLS' : 26.
402
Index verborum
Index verborum
• oÀÀv~aL : 187 (n. 284). • OVOj.lU, dia\. OVV~U : 62. • OVOj.lUl : 63. • O'TT
• TlST)j.ll : 139, 141, 149, 158, 232. • Tl VW, ind. fut. TE lO'W, aor. ETELO'U: 291 (n.397). • TpEtS', TplU : 172. • TVYXavw, ind. aor. ETVXOV: 347. • ü8oS' : 77, 78. • ü8pu, ü8poS' : 75. • ù8ptu : 76. • ü8wp : 75, 76, 80, 86, 96, 114, 115,125. • ünup : 117. • ünvoS' : 117. • ùno8pu t8wv : 161. • <paTLS', <paalS' : 227. • UTOS' : 227. • É~O~Ql : 273. • Épw, ind. fut. o'Law, aor. "VEYKOV, parfait Èvi]voxu: 129, 203 (n. 296), 216, 229, 232, 272, opt. ÉpOl 204, 207, 218, 219. • EÛYW, ind. aor. EuyOV : 346. • paTllP : 124 (n. 188). • pUTplU : 124 (n. 188). • XUj.lUl : 64,65. • XÉw : 338 (n. 486). • xilv : 30. • XSUj.luÀOs- : 65, 66. • X8wv : 64, 65. • XUTO : 338 (n. 486). VII. ARMÉNIEN • al: 52. • ayr: 56. • anown : 62. • artasowk<: 74 (n. 119). • artewan : 74 (n. 119). • get : 75, 77 (n. 123). • gore : 128. • gort : 74. • dowrn : 50. • dowrk<: 50. • em : 135. • leard : 101 (n. 166), 103 (n. 170). • kin : 56. • hnoe< : 59. • hown : 37-38. • howr : 59.
• jowkn : 27-28. • jowr: 54. • mi : 172. • ner : 68. • owtem : 152. • sirem : 135. • sirt : 40. • tam : 143. • town : 23. • P Ïanim, p 'law : 343. .pows: 48. VIII. PHRYGIEN • ~E8v : 75. • 'E~EÀWS' : 65. • LaVUTEPU : 68. IX. ALBANAIS • bredh : 336. • émër, èmën : 63. • natë : 33. • ujk, ujk6një: 182. X.SLAVE -
VIEUX SLAVE
• 6ecnbHbHb : • 6HTH:
70 (n. 109).
344.
274. 271. • 6paTpHIa : 124 (n. 188). • 6paTpb : 124 (n. 188). • 6pbBb: 28. • 6b,lJ,e : 347. • 6bITH : 246. • 6bpaTH : 229,283,284, 347, ind. prés. 6epx 129, 283, 284, 347, aor. 6bpaXb 347. • Ben'ÈTH, Benb1K : 155. • BeCHa: 116. • BecTH : 271, 349, 353, ind. prés. Be,ll,X 271, aor. B'ÈCb 349, 353. • BeCTH : 90, 273, ind. prés. Be3X 273. • Be'-Iepb : 116. • BnbKb : 182. • BO,lJ,a : 80, 81-82, 83, 89-90, 91,96. • BonHTH, BOJIb1K : 155. • BpaHb : 186. • 6narO,ll,'ÈTb :
• 60CTH :
403
105, 114 (n. 183). 75, 88, 90. • BbIMA : 93. • B'È,ll,pO : 76, 89. • B'È,ll,'È, B'ÈMb : 141, 163, 165167. • rbHaTH : 140, 283, 284, 347, ind. prés. )KeHX 140, 283, 284, 347, aor. rbHaXb 347. • BpaTa :
• BbI,ll,pa :
• ,ll,aMb, ,ll,aCTb, ,l),a):{ATb, ,ll,aTH :
141,142, 144, 145, 146,246, 275, 277. • ,ll,BOpb : 50. • ,ll,Bbpb, ,l),BbpH : 50. • ,ll,06a : 81 (n. 131). • ,ll,bpaTH : 36 (n. 39), 283, 284, ind. prés. ,ll,epx 283, 284. • ,ll,'ÈTH, ,ll,e)K,ll,X : 140, 228, 274, 277. • ,ll,'ÈTH "enfants" : 275. • )KeHa : 57. • )KelliTH : 272. • )Kb,ll,aTH : 283, ind. prés. )KH,ll,X 283. • )KATH: 340, ind. prés. )KHMX 340. • 3alàllb : 243 (n. 347). • 3B'Èpb : 31. • 3eMnIa : 65, 66. • 3MbIa: 66. • 3HaTH : 246. • 3bBaTH : 283, ind. prés. 30BX 283. • 3bnb : 87. • Hro : 83, 137 (n. 213). • Hrpa : 13 7 (n. 213). • H,ll,X, HTH : 137, 138, 246. • HMaTH : 265, 338-340, ind. prés. I€Mn~ 265, 338-340. • HMA: 62. • KaMbI : 81 (n. 131). • Ko6bIna : 173 (n. 262). • Kono : 78. • KOHb : 173 (n. 262). • KonaTH : 322 (n. 460). • KpbITH : 248 (n. 357). • naCKpb,ll,b : 41 (n. 48).
404
Index verborum
• JlamTH : • JlelliTH :
276. 318, 347,
• TeTH :
aor. Jle)Ke
347. 318. MamTH : 276. MeCTH : 271. MeTaTH : 271.
• -JltCTH : • • •
41 (n.48). • Ha,ne)K,na : 140. • Henpt6ph,nOM"b : 336. • HeCeH"b : 221. • HeCTH : 221, 272, 347, 353, impft. HectaX"b 298, aor. HtC"b 347, 353. • HOB"b : 277. • H03,npH : 35-36. • HOC"b: 35. • HOlliTh : 33. • OBa,n"h : 153. • orHh : 60, 81. • OTHTH : 137 (n. 213). • naCTH, na,nx : 343 (n. 495). • nelliTH : 270. • npHJlhne : 347. • npHcAlliTH : 272. • np"bCTO : 42. • nhpaTH : 283, ind. prés. nepx 283. • nXTh : 37-38. • paG'h, paGa : 173. • phI,naTH : 157. • CJl"hHhue : 70. • COJlh : 51-52. • cntTH : 275. • Cpb,nhue : 41. • cpt,na : 41. • CTaTH : 276, 277. • CTp'hraTH : 284, ind. prés. CTPOY)K~ 284. • CThJlaTH : 284, 340, ind. prés. CTeJI~ 284, 340. • C"bH'h : Il 7. • ChI, CXIllTa : 230, 231. • CtMA : 61. • CtCTH : 273, ind. prés. CA,nX 273. • CtTH, CtIaTH : 275. • MHJlOCp"b,n"b :
Index verborum
• TOK"b:
271, 56.
ind. prés. Tenx
• TA)KhKOCp"b,n"h : • oYCTa : • lfHCTH :
105. 290,
271.
41 (n. 48).
• brésti : 336,
141, 143, 144, 151, 153, 274, 353, aor. faC'h 353. . • mxaTH : 276. • I€CeHh : Il 7. • I€CMh, f€CTO, CXTO : 130, 135, 136, 141. • M.TH : 265, 338-340, ind. prés. HMX 265, 338-340, ind. aor. M.C'h, M.TO, M.COM"h 338-340. • x,nHua, x,na : 83 (n. 134). -BULGARE
135.
SERBO-CROATE
• dâm, dadêm, dadû : 144 (n.225).
• iéi, idem: 137 (n. 213). • ikra : 103. • imâm, imadêm, imajû : 144
brédem
-RUSSE • GpaT, pl. GpaTh.H :
ind. prés. Gpe,ny
28. 273,
ind. prés. Gtry,
336. • GpOBh:
• GtlfH, v. :
v.273. 76. 81. • BOpOr : 183 (n. 279). • BOpOH, BopOHa : 179, 186 (n.283). • BOpOHOit : 186. • BhI,npa : 75. • Be,npO : • Bo,na :
• Bt,ntTH, Bt,naTH, moyen-russe:
166. • BtMh, BtCTO, v. : • raTh :
• ,nBeph :
(n. 109).
• otféi, àdem, otfdem : 137 (n.213).
• ovâd : 94 (n. 150). • pùriti : 59. • pût: 37. • sô : 51. • srijèda, ékavien sréda : 41. • sûnce : 70. • ùfva : 34. • vtdra : 75. • vjèdro : 76. • vrân, vràna : 179, 181, 187,
186 (n. 283). 186 (n. 283).
• rOJlyGoit :
• jêm,jèdêm,jèdû: 144 ·jèsam, sam,je: 135. • jetra : 106. • jêtrva : 68. • kùpujë, kùpovii : 360. • nôs : 35. • oposun, croate dial. : 70
166.
276.
• rOJlyGh :
(n.225).
124 (n. 188).
336,
• GpecTH :
(n.225). • l'me: 62.
189.
ind. prés.
336.
• mCTH, IaMh, faCTO, m,nATO :
-
(n.225). -SLOVÈNE
ind. prés. lfhTX
290.
• C"bM, CH, e :
• zèm/ja : 65. • znâm, znadêm, znàjû: 144
•
30. 50. ,nBOp"h : 50. e)Ka : 144.
• 3aBOHh, dial. : • 3Beph : • 3eMJl.H :
-UKRAINIEN • GilfH :
273, 30.
ind. prés. Giry
• HenOThIp, v. :
-
82 (n. 132).
273.
33 (n. 32).
BIÉLORUSSE
• 3aÜKa :
31. 65.
• 3HaTh, 3HaIO :
35. 33. • OrOHb : 60. • OceHh : Il 7. • nelfeHh : 10 1. • ne'-lh : 101. • nOCOJlOHh : 70 (n. 109). • npo,na)Ka : 144. • nYTh : 37. • CBeKphI, v. : 68. • cep,nue : 41. • cepe,na : 41. • cepe,nHHa : 41 . • COJlHue : 70. • COJlh : 51. • cpe,na : 41. • cpe,nH : 47. • C"hJlHhue, v. : 70. • y,nOl.J:Ka : 83 (n. 134). • y,nHJla : 83 (n. 134). • YTKa : 34. • .HTpOBh, dial. : 68. • .HTphI, v. : 68. • HOC:
• HO'-lh :
• rYCh :
• ryCh :
•
405
• .HKHhI :
176. 100.
-TCHÈQUE
• bfisti, 166.
103104,113,114,115. • HKpa "mollet" : 102 (n. 168). • HM.H : 62. • KOTopa, KOTepa, v. : 117. • KyëT : 331. • Jle3Th : 318. • JIH : 203 (n. 297). • MH3rHph, Ma3raph : 273. • Hen"bThIph, v. : 33 (n. 32). • HenTYPYH, dial. : 33 (n. 32). • HeTonhIph : 33. • H03,np.H : 35-36. • HKpa "œufs de poisson" :
v. :
336,
ind. prés.
336.
• brva : 28. • jatra : 105. • jdu,jiti : 137 (n. 213). • jikra : 103. • netopyr : 33. • pout: 37. • pyfi: 59. • pyfiti se : 59. • slunce : 70. • stfeda : 41. • vedro : 76. • vodne, v. : 82 (n. 132). • vran, vrana : 179. • vydra : 75.
brdu
406
Index verborum
-SLOVAQUE
-POLABE
• ikra : 102 (n. 168).
• wabbra : 28.
-POLONAIS
• brama: 59. • bramka ; 59. • brew, brwi ; 28. • brnçé : 336. • drzwi ; 50. • dwor: 50. • firana : 59. • firanka : 59. • g?s: 30. • gra: 137 (n. 213). • ikra : 103. • imi? : 62. • jakny, dial. : 100. • jçtrew, v. : 68. • jesien ; 117. • kryje ; 331. • kué, kuje ; 331, 358. -leié : 318. • milosirdy, v. : 41 (n.48). - nietoperz : 33. • niosge : 237 (n. 334). • noe ; 33. • nos; 35. • ogien : 60. • pçé, v. ; 37-38, 234. • seree: 41. • s/onee, v. s/unce : 70. • sol; 51. • swgd : 83 (n. 134). • sroda : 41. • srodek : 41. • swi?ty : 234 (n. 328). • w?dka : 83 (n. 134). • w~dzié : 83 (n. 134). • w~dzid/o : 83 (n. 134). • w~dzony : 83 (n. 134). • wiadro : 76. • wiem : 166. • wiesé; 90. • wi~dnçé : 83 (n. 134). • woda ; 81, 90. • wodzié : 90. • wojewoda : 90. • woziwoda ; 90. • wprzeki, v. ; 230. • wydra: 75. • ziemia ; 65. • zwierz ; 31.
XI. GERMANIQUE -GOTIQUE
• asans : 117. • augo ; 80. • bairan, bar, berum : 290, 349, opt. bairai 204, 207, 218, 219. • daur ; 50. • filu : 188 (n. 285). • finjJan ; 38 (n. 43). • fon, funins: 59. • gadejJs : 275. • gakusts : 248. • galisan ; 272. • gamunds : 248. • giban, gaf, gebum ; 349. • hairto : 41. • hlifan : 336 (n. 484). • im, ist, sind: 130, 134, 232. • itan : 152, 274. • juk : 83. • ligan : 338 (n. 486). • missadejJs : 275. • nahts : 33. • namo, pl. namna : 78 (n. 125), 105, 115. • naqajJs : 95. • nas : 35. • niman, nam, nemum : 349. • qens : 57. . • qino : 57. • sailtJan : 271. • salt: 52. • savil : 70. • sunja : 230. • sunno : 70. • wailadejJs : 275. ·wait,witum: 158,163,164, 167. • waljan : 155. • warmjan : 185. • wato : 75, 76, 80, 86, 87, 89, 96, 125. • waurd: 126, 128. • wiljau, wilda : 155, 156, 197. • windan : 83 (n. 134). • wintrus : 83 (n. 133). • wrikan : 183 (n. 279).
Index verborum -
VIEIL ISLANDAIS
• dad: 275. • dyrr : 49. • eta : 152. •talla: 343. • funi : 59. • furr,fYrr : 59. • gas : 30. • hjarta : 41. • hvel : 78. • hvél ; 128. • hyrr ; 186. • kona : 57. • kostr : 248. • kvein : 57. • lifr : 101 (n. 166), 103 (n. 170). • nafn : 62. • n6tt : 33. • mis; 35. • Qnd: 34. • ord: 126. • otr : 75, 77, 87. • sannr ; 230. • segja : 272. • sunna: 70. • svefn : Il 7. • ulfr : 182. • ur : 54. • vatn : 75, 77. • veitr : 86-88. • verk: 128. • vetr : 83 (n. 133). • ylgr : 182, 188. -FRISON
• nomia, v. : 62. • sende, v. : 230. -
VIEIL ANGLAIS
• blœe : 186. • bru; 28. • cwën: 57. • ewene: 57. • dœd: 275. • éar : 54. • ened: 34. • etan : 152. • gos : 30. • heorte : 41. • hweol : 128. • nama ; 62.
407
• niht, neahte : 33. • nosu, nasu : 35. • rëotan : 157. • sojJ : 230. • sunne : 70. • synn : 230. • wœt: 86. • word: 126. -
ANGLAIS MODERNE
• eat : 152. • eyebrow : 28. • heart ; 41. • king: 173 (n. 262). • path : 37. • quean : 57. • queen : 57, 173 (n. 262). • sun: 70. • wet: 86. • word: 126. -
VIEUX SAXON
• bréew, brég : 29 (n. 21). • sundea : 230. • watar : 75, 76, 96. -
VIEUX HAUT-ALLEMAND
• ano, ana: 173. • anut : 34. • aran : 117. • bëran, përan : 269. • brawa : 29. • ezzan : 152. • faz : 95. • feehtan : 272. • fiuhta : 48. • fiur : 59. • furt : 248. • gans : 30. • giburt : 269. • gund : 364. • herza : 41. • lebara : 101 (n. 166), 103 (n. 170). • lesan : 272. • mittawëeho : 41. • naht : 33. • nahtigala : 33. • namo : 62. • ottar : 75. • quena : 57. • riozan : 157. ·sagën : 272.
408
Index verborum
• sunna: 70. • suntea : 230. • swintan : 83 (n. 134). • tiit : 275. • teta, tatun : 141. • tuon : 143. • turi : 49. • wazzar : 75. • werc : 128. • winter : 83 (n. 133). • wort : 126. • wulfs, wulpa : 182. -
MOYEN HAUT-ALLEMAND
• benuomen : 62. • hader : 117. • offen : 321. • offenen : 321. • vanke : 59. • wimpro : 28. • worde : 127. -
ALLEMAND MODERNE
• Augenbraue : 29. • Berg: 123 (n. 188). • essen : 152. • Fichte: 48. • Fürhang : 59. • Gebirge : 123 (n. 188). • gegenwèirtig : 231. • Herz : 41. • Jéiger : 110. • Leber : 105. • nehmen : 339. • Pfad: 37. • sei: 202. • sein: 202 (n. 294). • Sonne: 70. • Streich : 271. • streichen : 271. • Tor: 50. • Wasser : 80. • Wort : 126. -
MOYEN BAS-ALLEMAND
• exe : 111. • kone, kan: 58 (n. 79). • würde : 127. -
NÉERLANDAIS
• noemen : 62.
XII. ITALIQUE -LATIN
• absëns : 230, 231, 236. • amabam : 203 (n. 295). • anas : 26 (n. 14), 34. • anser: 30. • ater : 186. • bos : 173 (n. 262). • capio : 323 (n. 460). • carbo : 186. • cedo : 218 (n. 311). • coctus : 274. • conuentio : 276, 280. • coquo, coxï: 270, 353. • cor, cordis : 41, 43. • cornix: 185, 186. • corpus : 62 (n. 87). • coruus : 185, 186. • crëdo: 46 (n. 54). • datio : 275. • diës : 25. • edo, ës, ëst, ëdï : 151, 152, 274, 350, subj. edim 214. • emo, ëmï: 337, 338, 340, 349. • eo, ïs, ïre : 137, impér. ï 197, 218 (n.311). • equus, equa : 173. • est, esse: voir sumo • factus : 228. • ferëns : 231. • fero : 129, 269. • ferus, fera : 31-32. • filius,filia : 173. • flagro : 186. • fodio,fOdï : 271, 349. • foras, acc.,forïs, abl. : 50. • forës : 49. • fors, fortis : 269. • forum: 50. • foueo : 272. • frater: 173 (n. 261). • fundus : 84. • furor : 31. • gemo : 338. • genitricës : 68. • gustus : 248. • humilis : 65, 66. • humus: 64, 65. • iëns, euntis : 244. • ignis : 60. • inquit : 272.
Index verborum • inuideo : 161. • inuï/us : 155. • is, ea : 172. • ianitricës : 68. • iecur, iocineris : 103, 104, 112, 113, 118. • iocus : 88. • iugum : 83. • iungo : 83. • Iüpiter, ace. Iouem : 25. • lego, lëgï : 290, 291, 349. • linquo, lïquï : 167. • locus, loca : 129. • lupus, lupa : 182, 189. • media hebdomas : 41. • mens, -tis : 248. • narës : 35-36. • nassus, nasus, nasum : 3536. • niger : 32. • nomen : 62, pl. nomina 78 (n. 125), 105. • nox, nactis : 33. • ouis : 26. • pando : 84. • pecto : 272. • pella, pepulï: 290. • pës : 25. • pons: 37-38. • portus : 248. • praesëns : 230, 231, 236. • restis : 273. • rubëta : 74 (n. 120). ·rudo: 157. • saI, salis: 52. • safio : 275. • secundus : 272. • sedeo : 273. • sëmen : 61. • sequor : 271. • seruus, serua : 173. • sol: 70. • sons, sontis : 230, 232. • sonticus : 230. • sopor : 117. • soror : 173 (n. 261). • spatium : 275. • statio : 276. • status : 277. • sum, est, esse: 130, 134, 135, 213, ind. impft. eram 297, 299,
409
erG 197, subj. v. siem 156,197,204,213. • unda : 76, 78 (n. 125), 80, 83, 84, 85 (n. 137). • ürïna : 54. • ueho, uëxï: 273, 349. • uel : 155. • uelim : voir ualo. • uenio, uënï: 349. • uër : 116. • uerbum : 126-129. • uerto: 42. • uir : 32. • uïs : 155. • uolëns : 232. • uolo, uult, uelle : 155, 156, subj. uelim 155,156, 197,214. • ualuntas : 232. • uoro : 355. ind. fut.
-OSQUE
• edum : 151. • praesentid: 230. -OMBRIEN
• pir, pure: 59. • utur, une: 75, 76, 96. • uerfale : 126. • zeref: 231. -FRANÇAIS
• bœuf: 173 (n. 262). • chauve-souris: 33 (n. 32). • feuillage: 123 (n. 188). • feuille: 123 (n. 188). • prof: 173 (n. 262). • vache: 173 (n. 262). • vendeur, vendeuse: 173. -
ITALIEN
• mezzedoma,
v. :
41.
-ESPAGNOL
• gansa, ganso : 30. • puerco, puerca : 173. -PORTUGAIS
• gansa, gansa : 30. XIII. CELTIQUE -GAULOIS
• deuo.gdonioi : 64.
Index verborum
410 -
VIEIL IRLANDAIS
• ainim : 63. • ainm : 62. • -antar : 63. • ben, mna : 56. • -ben, -benat : 344. • brai, brae : 28. • cretim : 46 (n. 54). • cride: 41,43. • cruth : 62 (n. 87). • dor : 50. • du : 65. • eim, emat, ét : 338. • fedim : 271. • fir : 54.
• géis : 30. • is(s) : 152. • ithe : 151. • ithid: 151, 152. • i(u)chair : 103, 113, 114, 115. • laigid : 338 (n. 486). • ochtach, moy. : 48. • rochim : 272. • sai!- : 52. • siur : 103 (n. 172). • sui! : 70. • uisce : 77. • ur : 59. -GALLOIS
• anu V., enw moy. : 62. • cry!: 62 (n. 87). • haul : 70. • pryd : 62 (n. 87). • ys : 151. -CORNIQUE
• hanow : 62. -BRETON
• hano,
moy.
anu : 63.
XIV. LANGUES NON INDO-EUROPÉENNES -
FINNOIS
• hanhi : 30. • jiirvi : 53. • panu : 58, 59. • purje : 110. • varis : 182. • virsi : 125, 127. -
BmLIOGRAPIDE
ESTONIEN
• hani : 30. • jiirv : 53. • vir's, virre : 125, wirtz, virts 125. -LIVE
• jâra : 53. -LAPPON
• javrre : 53. -MORDVE
• piinakud : 58.
v.
wirt,
1. ABRÉVIATIONS GÉNÉRALES abl. = ablatif ace. = accusatif adj. = adjectif adv. = adverbe alb. = albanais aIl. = allemand ang. = anglais aor. = aoriste apr. = après arm. = arménien av. = avant avest. = avestique balt. = baltique celt. = celtique cond. = conditionnel corn. = comique dat. = datif dial. = dialectal dor. = dorien du. = duel éd. = édition esp. = espagnol eston. = estonien fém. = féminin fr. = français fris. = frison fut. = futur gén. = génitif germ. = germanique got. = gotique gr. = grec hitt. = hittite homo = homérique id. = idem i.-e. = indo-européen Il. = Iliade
impér. = impératif impft. = imparfait ind. = indicatif inf. = infinitif instr. = instrumental intens. = intensif ir. = iranien id. = irlandais isl. = islandais ital. = italien 1. = ligne lat. = latin latgal. = latgalien lett. = letton lit. = lituanien loc. = locatif m.=moyen masc. = masculin mha. = moyen haut-allemand Mt. = Matthieu mye. = mycénien n. = note néerl. = néerlandais nom. = nominatif nt. = neutre ad. = Odyssée ombr. = ombrien opt. = optatif p. = personne par ex. = par exemple part. = participe pass. = passif pers. = perse pft. = parfait phr. = phrygien pl. = pluriel
412
Bibliographie
pol. = polonais pro = prussien prés. = présent prét. = prétérit réc. = récent réfl. = réfléchi sax. = saxon s. = siècle s.-cr. = serbo-croate sg. = singulier sI. = slave
subj. = subjonctif tch. = tchèque tokh. = tokharien ukr. = ukrainien v. = vieux véd. = védique vha. = vieux haut-allemand vOC. = vocatif v. pr. = vieux prussien vs. = versus vulgo = vulgaire
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