" " HERACLES AUX PORTES DU SOIR
Unité de Recherche
Associée au
C.N.R.S. 0338
Analyse des Formations Sociales de l'Antiquité
Ouvrage publié avec le concours du Conseil Scientifique de l'Université des Sciences Sociales de Grenoble
ISBN 2251604022
Centre de Recherches d'Histoire Ancienne Volume n° 89
Colette JOURDAIN-ANNEQUIN
HÉRACLÈS AUX PORTES DU SOIR MYTHE ET HISTOIRE
Annales Littéraires de l'Université de Besançon, nO 402 Diffusion Les Belles Lettres, 95, boulevard Raspail, 75006 PARIS - 1989-
Pour Muriel. Pour Jacques.
Remerciements
Cet ouvrage a d'abord été une thèse de Doctorat d'Etat. Les contraintes de l'édition en ont quelque peu modifié la présentation: certaines discussions sont passées dans les notes, elles-mêmes allégées; quelques illustrations ont été sacrifiées. Seule modification conséquente, une importante annexe iconographique, consacrée à l'examen du type d'HéraclèsMelqart à partir des statues - en partie inédites - découvertes dans son sanctuaire d'Arnrith, a été détachée de l'ensemble et sera publiée ailleurs, par les soins de la maison de l'Orient à Lyon. Cette thèse, déposée auprès de l'Université de Besançon en décembre 1986, a été soutenue en avril 1987 devant un jury présidé par M. Jean Pouilloux, membre de l'Institut, et réunissant les professeurs Pierre Lévêque, rapporteur, Pierre Briant, Françoise Dunand, Oddone Longo et Marie-Madeleine Mactoux. Que tous soient ici remerciés pour avoir fait de cet exercice universitaire qu'est la "soutenance" une discussion enrichissante et stimulante. Que Pierre Lévêque, en particulier, trouve dans ces pages l'expression de ma gratitude, lui qui, professeur, sut me communiquer sa passion de l'histoire ancienne, puis, directeur de thèse, me redonner le courage d'écrire, alors que la situation universitaire n'incitait ni à l'effort, ni à l'optimisme.. lui qui, enfin, accueille ce volume dans les publications du Centre d'Histoire Ancienne de Besançon. Et, s'il est vrai que, comme l'affirme Georges Bataille dans un petit ouvrage - fort original - qu'il consacre à une théorie de la religion, "le fondement d'une pensée est la pensée d'un autre", je tiens également à témoigner ici de ma reconnaissance envers tous ceux qui, connus ou inconnus de moi, ont, par leurs paroles ou par leurs écrits, éclairé, à un moment ou à un autre, le
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cheminement de cette recherche. Ma reconnaissance va encore - mais est-il besoin de le dire ? - à mon mari qui, presque autant que moi, vécut avec cette thèse et se garda de l'oublier lorsque son "territoire" d'historien croisait le mien ... Elle va, de même, à mon oncle, François Martine, qui voulut bien passer du latin au grec et des Pères de l'Eglise du Jura à ce païen, à ce paillard que fut Héraclès, pour discuter avec moi de mes traductions. .,. Elle va, enfin, à tous ceux qui firent des manuscrits infonnes que je leur confiais les trois volumes dactylographiés d'une thèse, puis le livre qu'ils sont devenus. A ce titre que Mmes Maillardet, Amiotte et Michel, que M. Royer, que S. Rémond surtout qui eut en charge la réalisation de l'ensemble, que la Faculté des Lettres et le Centre d'Histoire Ancienne de Besançon soient vivement remerciés. "'J'ai plaisir à évoquer encore l'appui du Conseil Scientifique de l'Université des Sciences Sociales de Grenoble, qui, par ses subventions, a tenu à participer à l'édition de cette recherche et je n'oublierai pas le soutien chaleureux du philosophe Henri Joly qui demanda la prise en charge, pour publication, de cette "géo-histoire" et "mythopoièse" d'un mythe. Je n'ai, hélas, pas eu la possibilité de l'en remercier: peu de temps après, il mourait tragiquement en mer.'" Je regrette profondément, enfin, de ne pouvoir associer à cet hommage Paul Petit, lui aussi trop tôt disparu. Acceptant de faire confiance à un professeur de lycée qu'il ne connaissait pas, il m'accueillit dans la section d'Histoire Ancienne de l'Université de Grenoble. Sans lui, en définitive, ce travail n'aurait jamais vu le jour.
Lyon, Octobre 1987 '" Octobre 1988
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"Ce n'est pas une science de s'être rempli la tête de toutes les extravagances des Phéniciens et des Grecs; mais c'en est une de savoir ce qui a conduit les Phéniciens et les Grecs à ces extravagances..." FONTENELLE (1)
"... car qu'aurions-nous donc à faire de ces histoires de dieux, souvent compliquées à l'extrême et peu sûres, d'ailleurs, tant elles ont été tranformées par la mémoire oublieuse et par l'infinie et plaisante fantaisie de notre esprit, qu'aurions-nous à en faire, si ce qu'elles racontaient était autre chose que notre propre histoire, qui est, elle aussi, compliquée, pas tellement sûre, car chaque existence humaine est pareillement pleine d'oubli d'ellemême et pareillement peuplée de fantaisie". CI. METTRA (2)
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"Nuit enfanta l'odieuse Mort, et la noire Kère, et Trépas. Elle enfanta Sommeil et, avec lui, toute la race des songes - et elle les enfanta seule, sans dormir avec personne, Nuit la ténébreuse. Puis elle enfanta Sarcasme, et Détresse la douloureuse, et les Hespérides, qui, au delà de l'illustre Océan, ont soin des belles pommes d'or et des arbres qui portent telfruit". Hésiode, Théogonie, 211-216 "Chrysaor engendra Géryon aux trois têtes, uni à Callirhoé, fille de l'illustre Océan. Celui-là, Héraclès le fort le tua, près de ses boeufs à la démarche torse, dans Erythée qu'entourent les flots, le jour où il poussa ces boeufs au large front vers la sainte Tirynthe, après avoirfranchi le cours d'Océan et tué ensemble Orthos, et Eurytion le bouvier, dans leur parc brumeux, au delà de l'illustre Océan". Hésiode, Théogonie, 287-294
C'est à dessein que nous choisissons Hésiode pour introduire cette étude des travaux occidentaux d'Héraclès. Témoin ancien, bien sûr, et historiquement plus facile à utiliser qu'un problématique Homère, il est aussi le premier qui nous donne à voir, pareillement situés "au delà de l'illustre Océan", les Hespérides et Géryon, protagonistes du héros dans les deux "épreuves" que la tradition prête à Héraclès, lorsque s'achève la série des athloi, imposés par Eurysthée (3) : épreuves toutes deux localisées aux confins des terres habitées ou supposées telles et dont la structure symétrique - qu'elle soit géographique ou symbolique - ne manquera pas de nous retenir. Or, pour Hésiode, incontestablement, la lutte contre Géryon est un épisode de la geste héracléenne. Il n'en est pas de même des Hespérides, qui, citées à d'autres reprises encore (4), ne sont jamais en relation avec Héraclès (5). C'est donc le mythe relativement proche encore de ses origines que nous restitue
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Hésiode, des mythes, plus exactement, qui n'ont pas achevé leur rencontre avec le héros, ne sont, en tout cas, pas encore subordonnés à une biographie, pas encore entrés dans ce cycle héroïque que l'activité fabulatrice des Grecs n'a cessé d'enrichir, le transformant bientôt en un véritable roman plein d'incohérence... roman qui ne trouve plus réalité et logique que dans le personnage du héros lui-même. L'écheveau est, à ce stade, bien difficile à débrouiller; aussi aurons-nous soin, en analysant le mythe arrivé au terme de son évolution, enrichi, transformé, détourné même par cette évolution, de ne jamais perdre de vue les allusions, sommaires peut-être, mais si puissamment évocatrices, d'Hésiode. Les Grecs distinguaient les deux fonctions du langage : la parole qui "raconte" (~üaOÇ') et celle qui "démontre" (A6yOÇ'). Du mQthos la loi du genre veut que nous fassions un logos.... puisse le mythe ne pas trop y perdre de son charme éternel.
TABLEAU 1 = LE DODÉCATliLOS DANS LA TRADITION LITTÉRAIRK
APOLLODORE II 74 - 126 = II, S,I • 12
DIODORE IV, 11 • 18
HYGIN Fables. XXX
TABULA ALBANA F. Gr.His/.
AUSONE Eglogues,
40 (1acoby p. 261-263
XXIV
SERVlUs
.....omme~/aire de /'Eneide.
PLANUDE, AII/hololli4 92
VIII. 299
1 - Lion
Lion
Lion
Lion
Lion
_,onn
Lion
2 -HvQrt
H'Idre
HvdIe
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Hvdre
HvdIe
H'Idre
SBDl!lier
Sanlllier
Sanlllier
Sanlllier
Sanl!lier
Caf ou biche
Cerf ou biche
Cerf ou biche
Cerf ou biche
Cerf ou biche Oiseau.,
3 - Cerf ou biche SBludier 4· Sanalier
. Caf ou biche
S -AURiu
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Oileaux
Oiseaux
Oiseaux
Oiseaux
6 -Oiseaux
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7 - Taureau
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8 -Cavales
Cavales
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Taureau
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Amazclnes
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Cerbàe
13 : "il dul rounùr cet effroVlb1e effort:
coucher en une seule nuil avec cinQuante filles ou _ " !
VOlT aussI O. GRUPPE, S.Il. HERAKLES, RE.
Suppl. Ill, 1918, Col. 1021-1022 .
-
I .N
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PROLOGUE
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1 - DES
POMMES D'OR DES HESPÉRIDES AUX A VENTURES OCCIDENTALES D'HÉRACLES L'ÉVOLUTION D'UN PROJET
Un peu comme un mythe, un projet de thèse évolue, pour peu qu'il soit longuement mûri 1... Parti d'une séquence précise de la légende héracléenne : la quête des pommes d'or des Hespérides, il s'enfle, se développe, se transforme, change de perspectives et se retrouve, à l'arrivée, profondément différent de ce qui avait été conçu. Le sujet paraissait simple, en tout cas clairement circonscrit, et pourtant, ce sont des problèmes de définition que nous avons dû résoudre dès le départ : Ainsi - et c'est la première question que nous nous sommes posée - quelle place devait-elle être faite au héros lui-même ? dans quelle mesure sa nature, sa "personnalité" pouvaient-elles éclairer la signification du mythe? Encore eût-il fallu, pour conduire une telle étude, que cette personnalité fût évidente et indiscutée, ce qui était loin d'être le cas. TI nous paraît inutile de reprendre, une fois de plus, les exégèses, on ne peut plus vari6es, qui, tantôt donnent à Héraclès une origine phénicienne, tantôt font de lui un héros aryen; tantôt voient en lui l'archétype du Dorien, tantôt un Achéen ou un Crétois... qui tantôt le considèrent comme un dieu solaire, tantôt comme un démon de la végétation (6)... Leur multiplication, la part de vérité qu'elles contiennent toutes, mais aussi l'échec relatif de chaque explication d'ensemble, prouvent assez l'hétérogénéité des sources, du culte et de la légende. Aussi les études consacrées à Héraclès sont-elles désormais plus partielles. Elles n'en sont pas moins enrichissantes pour autant et viennent éclairer certains aspects d'un héros pour le moins complexe et déroutant. On a pu découvrir ainsi, grâce à J. Bayet, un Hercule funéraire (7), grâce à M. Detienne, un Héraclès des savants et des philosophes (8) ; on a pu prendre la mesure des influences phéniciennes dans certains de ses cultes (9); et on nous promet d'éclairer ses rapports étranges avec le sacrifice (10)... On a vu monter la fortune du héros ou se transformer sa légende en fonction des circonstances politiques (11), mieux compris le passage de l'Héraclès grec à l'Hercule romain (12) et apprécié l'enjeu de la confrontation entre ce "sauveur" qu'était devenu le fils de Zeus et celui des Chrétiens (13). Dans le même temps était mieux connue l'iconographie du personnage mythique (14) et les particularités régionales d'un
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héros devenu dieu et désonnais vénéré dans tout l'Empire romain. La cohérence d'Héraclès n'a rien gagné à toutes ces recherches et c'est tant mieux dirons-nous. Comment, en effet, réduire à l'unité le dieu et le héros 1 L'Argien et le Thébain 1 Le géant et le dactyle 1 (15), la brute et le héros civilisateur 1... Le personnage, certes, a pris son autonomie au cours des temps, on lui a même constitué une biographie et c'est un véritable roman que celui de sa vie mais c'est, je crois, faire une erreur profonde sur le mythe que de l'interpréter à partir de ce qu'est - ou pourrait être - Héraclès et non pas à partir de ce qu'ilfait, de ce pourquoi il existe (16). Mieux vaut donc oublier, pour un temps, les théories déjà énoncées et, puisqu'il faut "présenter" le héros, prendre comme point de départ le visage d'Héraclès tel qu'il nous apparaît dans les plus anciens témoignages littéraires. Dans l'Iliade, il ne joue pas un grand rôle, mais ceux qui l'invoquent voient en lui un mort héroïque des temps passés, exactement ce que représenteront, pour les Grecs du Vème siècle, les héros de la guerre de Troie. Dès que les dieux l'ont ordonné, dit Achille, il a reçu le trépas: "le puissant Héraclès lui-même n'a pas échappé à la mort; il était cher cependant, entre tous, à sire Zeus, fils de Cronos, mais le destin l'a vaincu, et le courroux cruel d'Héré" (17). Héraclès "l'invincible" est donc mortel; il est dit fils de Zeus et d'Alcmène, et le seul épisode important qui lui soit consacré rapporte comment, à Thèbes, sa naissance fut retardée par Héra afin qu'il ne régnât pas" sur tous ses voisins", mais au contraire fût soumis à Eurysthée (18). Les autres allusions font'd'ailleurs large part à cette inimitié de la déesse (19). On connaît plus mal ses titres de gloire, la première expédition qu'il aurait menée contre Troie (20), et les "Travaux" (21) dont on ne souligne guère que l'aide constante apportée par Athéna : "n ne se rappelle guère", dit de son père la déesse, "combien de fois je lui ai, moi, sauvé son fils. lorsqu'il était à bout de souffle, au cours des travaux d'Eurysthée. Il pleurait alors vers le ciel, et c'était moi que Zeus, du haut du ciel, envoyait à son secours. Que n'ai-je su cela, en mon âme prudente, aux jours où Eurysthée l'expédiait chez Hadès aux portes bien closes, pour lui ramener de l'Erèbe le chien du cruel Hadès ! Il n'eût point échappé au cours profond du Styx" (22). Il n'est pas indifférent de noter que, si, dans l'Iliade, Héraclès apparaît uniquement comme un héros mortel, le seul des travaux imposés par Eurysthée qui soit jugé digne d'être rapporté,
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c'est. tout de même. sa victoire sur l'Hadès (23). Dans l'Odyssée le nom d'Héraclès n'apparaît que trois fois (24). et le passage le plus intéressant est celui où. dans la Nékyia. le poète nous plonge dans le royaume des morts. Parmi les héros antiques entrevus par Ulysse se trouve Héraclès. au sujet duquel s'expriment les hésitations de la tradition entre l'homme et le dieu : il évoque "les misères sans bornes" imposées "par le pire des humains". et encore une fois. un seul de ses exploits est mentionné: la capture du chien des Enfers; encore une fois c'est Athéna" la déesse aux yeux pers". c'est Hermès aussi qui lui servent de guide... mais au royaume des morts le héros n'est qu'une "ombre"; le véritable Héraclès. est. en effet. parmi les dieux : "parmi les Immortels. il séjourne en personne dans la joie des festins; du grand Zeus et d'Héra aux sandales dorées. il a la fille Hébé aux chevilles bien prises" (25). La tradition de l'immortalité d'Héraclès est donc connue. Seul héros à s'être fait une place parmi les dieux. dans ce monde homérique. où le fossé paraît infranchissable entre les "dieux toujours vivants" et les hommes qui "tels les feuilles ne vivent qu'une saison "(26). le cas du fils d'Alcmène est suffisamment exceptionnel pour être retenu (27). Il est vrai que cette Nekyia passe pour être un des passages de l'Odyssée composés. ou. en tout cas. ajoutés. tardivement. Hésiode cependant nous transmet un témoignage très voisin: "Et ce fut Hébé. fille du grand Zeus et d'Héra aux brodequins d'or. que le vaillant fils d'Alcmène aux fines chevilles. le puissant Héraclès. ayant achevé ses gémissants travaux. se donna pour chaste épouse dans l'Olympe neigeux héros bienheureux. qui. sa grande tâche accomplie. habite chez les Immortels. soustrait au malheur et à la vieillesse pour les siècles à venir" (28). Aucune ambiguïté dans ce texte où Héraclès est sans conteste devenu l'un des Olympiens. et cela, semble-t-il - nous y reviendrons - en récompense des travaux dont l'accomplissement est. en tout cas. présenté comme nécessaire et précédant directement l'immortalité. Faut-il voir là. comme le veut W.K.C. Guthrie. l'origine des hésitations de la tradition entre le héros et le dieu (29) ? Je suis pour ma part. loin de penser que. "lorsque d'autres auteurs disent d'Héraclès qu'il est à la fois dieu et héros. c'est cette élévation qui leur vient sans doute à l'esprit" (30). Il me semble. en effet. que la tradition d'un Héraclès dieu -celle qui embarrasse les auteurs grecs- lui suppose une origine divine. et que. si influence il y eut. ce pourrait être plutôt à l'inverse: une incitation à admettre l'accession finale au rang des dieux du fils de
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Zeus et d'Alcmène. Restons en là, pour l'instant, sur un problème auquel nous ramènera l'étude du mythe et retenons simplement que l'Héraclès qui transparaît dans les premiers témoignages littéraires (31) est un héros thébain - mais d'ascendance argienne - fils de Zeus et d'Alcmène, que l'inimitié d'Héra soumet au souverain d'Argos, qui l'a évincé: Eurysthée. Ce héros est encore essentiellement un archer, et nous sommes frappés de voir à quel point son image est, pour ces premiers Grecs, liée à la victoire sur la mort: qu'elle soit indirecte et passagère avec la prise de Cerbère - et l'Iliade semble en rester là - qu'elle soit définitive comme il apparaît dans la Nekyia et dans la Théogonie. Ce sont là, les seules données objectives que nous pouvons admettre comme point de départ. D'ailleurs, comment pourrait-on expliquer le mythe par la nature d'un héros avec lequel rien ne prouve qu'il soit véritablement lié dès l'origine... ou, autre façon de dire les choses, qui était le héros avant qu'autour d'un nom ne se soient rassemblés tel ou tel mythe ? Ce que nous tenterons de faire, c'est bien plutôt d'expliquer pourquoi le mythe a pu être attribué à Héraclès et comment une telle attribution a pu le modifier... Alors peut-être certains aspects de la "personnalité" du héros s'éclaireront-ils de surcroît.
* * * Nous rejoignons là le deuxième problème posé par cette étude: une séquence mythique se lit difficilement seule. Etait-il possible d'isoler tout à fait de l'ensemble de la légende cet épisode que représente la conquête des pommes d'or? Fallait-il au contraire le considérer comme partie intégrante d'un tout et l'étudier comme telle? Il est bien évident que, dans un cycle aussi complexe que celui d'Héraclès - le plus complexe sans doute de toute la mythologie grecque - nous ne pouvions tout retenir. Ni les douze travaux, dont l'ordre, d'ailleurs, change avec les mythographes, ni les Parerga, plus nombreux encore, ne constituent une . biographie cohérente, et ce, même dans la mythologie mise en ordre d'un Apollodore, ou d'un Diodore. De toutes ces anecdotes tant bien que mal juxtaposées, de toutes ces prouesses interchangeables, lesquelles sont vraiment significatives ? Lesquelles peuvent nous aider à mieux comprendre celles que nous avons choisi d'expliquer? Prenons un exemple : la rencontre d'Héraclès et d'Atlas: chez Apollodore, elle fait partie intégrante du llème exploit; c'est à Atlas, en effet, que, sur les
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conseils de Prométhée, Héraclès demande d'aller cueillir les pommes dans le jardin des Hespérides ; en l'absence du géant il portera à sa place le fardeau du monde et l'on sait la ruse qu'il doit inventer pour s'en libérer (32). C'est Phérécyde qui, au début du Vème siècle, passe pour avoir introduit cet épisode d'Atlas faux ami d'Héraclès (33), mais l'anecdote était connue à Olympie, à la même époque, par le sculpteur qui représenta les travaux d'Héraclès sur les métopes du temple de Zeus (34)... Elle l'était même dès le VIème siècle, si l'on en croit Pausanias qui l'a vu figurer sur le coffre dédié par Cypsélos dans ce même sanctuaire d'Olympie (35). Cependant Euripide, s'il ne l'ignore pas - il chante en effet dans son Héracl~s "la force d'un homme" qui parvint à soutenir "les palais étoilés des dieux" (36) curieusement la dissocie de la quête des pommes d'or (37). La relation est moins évidente encore chez Diodore de Sicile qui, très influencé par l'évhémérisme, explique "l'allégorie" selon laquelle le héros aurait reçu d'Atlas "le fardeau du monde" par les connaissances astronomiques que lui aurait enseignées le géant en reconnaissance de son intervention efficace contre les pirates, envoyés par Buriris pour enlever les Hespérides présentées ici comme les filles d'Atlas (38). On constate, dans cet exemple, l'embarras des auteurs face aux errements d'une tradition qui juxtapose des éléments probablement étrangers à l'origine; on constate également - par cette discordance entre des mythographes également tardifs - à quel point l'évolution du mythe a pu, ici ou là, s'accomplir différemment. Quel enseignement, dans ces conditions, tirer de cet épisode d'Atlas? Faut-il simplement l'expliquer par la force du héros, une force telle qu'il peut porter le ciel... C'est ce qui semble ressortir du plus ancien des témoignages littéraires évoqués, celui d'Euripide.. Faut-il, au contraire, lui attribuer, au profit d'Héraclès, une signification cosmogonique ? et dans ce cas à partir de quand ? et pourquoi ? EnÎm c'est aux confins du monde habité que les Hespérides . veillent sur les pommes d'or... C'est là aussi que le géant supporte le fardeau des cieux : la rencontre des deux mythes serait-elle pure coïncidence géographique? ou bien au contraire Héraclès a-t-il, comme le veut J. Carcopino (39) - après Wilamowitz (40) -, suivi Atlas, lorsque celui-ci a trouvé dans la chaine libyenne sa localisation défmitive ? auquel cas il faudrait entre eux supposer un lien plus puissant, un lien qui expliquerait aussi que ces colonnes du ciel, confiées, dans l'Odyssée, à la garde du géant soient devenues les colonnes d'Héraclès. Le problème, on le voit, est d'importance.
22 Mais si le rôle d'Atlas apparaît comme directement lié à l'obtention du fabuleux trésor, d'innombrables aventures, entrées dans le récit de la quête des pommes d'or, semblent bien n'avoir avec elle qu'un rapport on ne peut plus accidentel. Il n'est que de reprendre le texte d'Apollodore (41) pour s'en convaincre... Apollodore, qui d'ailleurs situe le jardin des Hespérides "non dans la Libye, comme le disent certains", mais "auprès de l'Atlas, dans le pays des Hyperboréens". Avant qu'Héraclès ne parvienne au terme de son voyage, mille aventures le retiennent : en Macédoine, il lutte contre Cycnos, fils d'Arès, puis, traversant l'Illyrie, il arrive au bord du fleuve Eridan, où, grâce aux Nymphes, il trouve Nérée "qu'il ne lâche point" avant d'avoir obtenu de lui qu'il lui dise où se trouvent les pommes d'or et les Hespérides. Son itinéraire devient ensuite tout à fait incohérent : il se rend en Libye (séjour imposé peut-être par le souvenir de la localisation la plus couramment admise !) et triomphe d'Antée qui gouverne alors la région; de la Libye il passe en Egypte (42) où il tue Busiris, le roi inhospitalier. Ici s'intercalent étrangement les aventures d'Héraclès à Rhodes, aventures qui prétendent expliquer un curieux rite des habitants de l'île (ceux-ci, en effet, lorsqu'ils sacrifient à Héraclès, l'accablent d'imprécations). Nous retrouvons notre héros en Arabie, où, dit Apollodore, il tue Emathion, fils de Tithon (43) ; par la Libye, il parvient ensuite à l'Océan où il emprunte la coupe du soleil et, grâce à elle, gagne l'Asie, délivre Prométhée sur le Mont Caucase et arrive enfm auprès d'Atlas et des Hespérides. Nous avons tenu à retracer - ici de la façon la plus "narve" qui soit - cet itinéraire extraordinaire pour mettre l'accent sur l'apparente incohérence d'un récit, compliqué, allongé à plaisir par des additions successives, des contaminations (44). Le rapport avec la quête des pommes d'or paraît purement fortuit, la géographie du voyage si peu intelligible qu'elle n'éclaire pas la localisation du jardin mythique, pas plus que la signification des différents épisodes ne semble éclairer le sens du mythe principal... Pourtant, dans ce véritable maquis où le conte folklorique côtoie la légende étiologique, certains thèmes se retrouvent avec insistance : celui de la lutte contre des souverains indigènes, par exemple, tels Emathion, Antée, et surtout Busiris, le roi qui massacre les étrangers... On peut encore s'interroger, dans ce dernier épisode, sur les rapports qu'entretient Héraclès avec le sacrifice... rapports qu'on retrouve, différemment exprimés, dans certains "doublets": l'aventure d'Héraclès à Rhodes, aition d'un rite ancien reprenant, sous une autre forme, semblable rencontre au pays des Dryopes.
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Or, ce voyage au pays des Hespérides. à certains égards, rappelle le voyage d'Héraclès vers l'île rouge de Géryon... Il lui ressemble tant que quelque confusion s'est introduite dans le déroulement des deux récits : pour Diodore, par exemple, les épisodes d'Antée et de Busiris appartiennent à l'expédition contre Géryon (45). L'impression naît ainsi d'une geste d'Héraclès aux bornes occidentales du monde, près de ces "colonnes" qu'il y a lui-même placées, geste enrichie ensuite d'épisodes variés sur les rivages de la Méditerranée, une geste à laquelle sa signification pourrait conférer une unité profonde, située qu'elle est près d'Océan, là où "se dresse l'effrayante demeure de l'infernale nuit" (46)... Là où "sélève en face de l'arrivant la demeure sonore du dieu des Enfers, le puissant Hadès, et de Perséphone la redoutable" (47). Si nous pensons encore que ces deux épreuves sont panni les dernières (48), que, dans certaines versions du mythe Héraclès rapporte lui-même les pommes d'or devant l'assemblée des dieux (49), nous accorderons une attention renouvelée au thème d'Héraclès vainqueur de la mort, important très tôt dans la légende, avons-nous vu (50), et très vite répété : c'est encore Héraclès qui ramène Alceste des Enfers (51) ; lui toujours qui arrache Thésée au royaume d'Hadès (52) ; c'est lui enfin qui connaît la mort divinisante sur le bûcher de l'Oeta (53). C'est ce thème qui, tout autant que la géographie "marginale" des deux derniers travaux d'Héraclès (et bien sûr, nous le verrons, l'un et l'autre structuellement liés), nous a paru définir l'unité profonde du champ d'enquête qui devait être celui de notre travail. Pour autant, était-il possible de s'en tenir rigoureusement à la sphère occidentale ? de ne connaître des exploits d'Héraclès que la quête des boeufs de Géryon et celle des pommes d'or? Nous avons craint, à nous limiter à ces épisodes, d'être conduite à envisager trop étroitement les "matériaux" du mythe: l'arbre, cette première structure, à la fois architecturale et vivante, que semblent s'être donnée les hommes, l'or, dont le rôle dans les mythes de souveraineté n'est plus à souligner; la pomme, le dragon (ou le monstre) dont il n'est pas besoin de dire qu'ils constituent les "images" fondamentales de toute mythologie... Une telle étude était certes possible (54), nous avons craint, à nous y livrer, de ne pouvoir éviter le danger d'un comparatisme débridé... Si les parallèles, en effet, ne manquent pas dans les mythologies de tous les peuples, en quoi, en les rapportant, aurons-nous mieux compris le sens précis que, pour les Grecs, prenaient ces symboles...?
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Aussi ne perdrons-nous pas de vue la place que tient ce jardin merveilleux dans le cycle d'Héraclès... "quête du pays transcendant", rêve du domaine ou de l'objet "interdit", lutte contre le monstre triple et conquête du bétail merveilleux, autant d'exploits qui, au fur et à mesure que nous poursuivions notre enquête, nous ont paru s'intégrer dans l'ensemble d'un destin, dont nous devinions le sens non seulement mythologique, mais bien encore historique... Comment comprendre l'aspect fortement initiatique de ces épreuves sans essayer de savoir si leur héros avait pu, dans le passé des Grecs - où qu'ils fussent -, avoir quelque rapport avec de telles pratiques d'intégration sociale ? Aussi ne s'étonnera-t-on pas des "détours" d'une étude, qui. pour mieux saisir le sens profond de ces deux légendes, paraîtra parfois s'en éloigner... Comment comprendre la localisation occidentale, et finalement précise de ces épisodes sans analyser les rapports entretenus par le héros grec avec le seigneur de Tyr, Melqart, présent non seulement à Gadès et à Lixos - théâtres des deux derniers exploits terrestres d'Héraclès - mais encore dans ses plus fameux sanctuaires : à Thasos, à Chypre et sur la côte phénicienne? Aussi ne s'étonnera-t-on pas si. à l'exemple même de ce héros voyageur que fut Héraclès. nous naviguons d'une rive à l'autre de la Méditerranée... Comment comprendre le mythe. enfin. sans savoir. comme l'écrit J.P. Vernant, "faire sauter le cloisonnement qui (sépare) la tradition proprement mythologique des témoignages appartenant aux autres secteurs de la vie matérielle, sociale et spirituelle des Grecs" ? (55) Ainsi se sont élargis, non seulement notre champ d'étude, mais encore les perspectives dans lesquelles nous abordions notre sujet. Disons, enfin - et nous en aurons terminé sur ce point - que nous avons tenté de tenir compte de ces nouvelles conquêtes des sciences de l'homme, qui aident l'historien à mieux cerner - voire à mieux penser - son enquête : linguistique et sémiologie, ethnologie et sociologie, psychanalyse enfin... On comprendra .que, dans cette matière aussi considérable que multiforme qui s'offrait à nous. nous n'ayons pu tout traiter. Nous nous sommes donc donné le droit de choisir, et, laissant dans l'ombre certains aspects du mythe, nous avons privilégié ceux qui nous paraissaient expliquer le mieux à la fois sa permanence et les formes multiples qu'au cours des siècles il devait finir par épouser.
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II.
LE MYTHE 1 MODE D'EMPLOI
Le mythe....Encore fallait-il savoir comment l'approcher ! L'époque était celle des beaux jours du structuralime.Cl. Lévi-Strauss l'appliquait, avec le retentissement que l'on sait, à l'étude des récits amérindiens et, avec l'éternelle histoire d'Oedipe, il se proposait de l'employer de même au décodage de la mythologie grecque. Cette méthode, qui paraissait si bien convenir à l'étude du mythe, n'était pas sans poser quelques problèmes à l'historien - nous y reviendrons - et l'engouement qu'elle suscita se traduisit d'abord, il faut l'avouer, par un véritable "blocage" au niveau de mes propres recherches. Elle eut aussi - et cet heureux effet dépasse, me semble-t-il, largement mon exemple personnel - l'immense avantage d'obliger à une réflexion méthodologique qui, sans elle, n'aurait sans doute pas paru aussi nécessaire. Sans retracer ici les longs détours de mes interrogations et de mes réflexions sur le mythe, sans refaire l'histoire d'une science dont il a beaucoup été question récemment (56), il me paraît nécessaire et désormais possible, avant d'aborder l'analyse des travaux occidentaux d'Héraclès, de "faire le point", de préciser les exigences méthodologiques d'une recherche, confrontée depuis plusieurs années aux théories - hégémoniques ou non - qui font l'histoire des religions antiques. La réhabilitation du mythe n'est plus à faire : il n'est plus pour personne, cette maladie du langage et la mythodologie, cette collection d'absurdités et d'horreurs, qui, selon M. Müller "ferait frissonner le plus sauvage des Peaux-Rouges" (57). Il n'est plus, non plus, la pensée d'une humanité dans l'enfance incapable de produire autre chose qu'une "philosophie de nourrice" (58), et, en ce qui concerne notre objet propre, la Grèce, on n'ose même plus écrire, comme le faisait P. Grimal en 1968, que le Mathos s'oppose au Logos "comme la fantaisie à la raison, la parole qui raconte à celle qui démontre" (59). La science moderne a donc réglé leurs comptes aux théories, qui, au début du siècle encore, "dévaluaient" le mythe comme explication fantaisiste, ou, au mieux, incomplète et erronée - parce que pré-scientifique - du monde... Elle n'est guère plus tendre d'ailleurs pour celles qui, à l'inverse, le "dévaluent" comme vision populaire tout entourée d'une gangue fabuleuse, d'un récit historique. Et peut-être faut-il soulever là un premier problème ?
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1 • Le mythe: "Une parole choisie par l'histoire" ? On a beaucoup critiqué, en effet, cette attitude - que d'aucuns appellent historiciste - et qui consiste à mettre en lumière, comme l'a fait J. Bérard pour les Nostoi, par exemple, le substrat de réalité historique que, parfois, recouvrent les légendes (60). Convenons que ramener le mythe à l'histoire c'est procéder par réduction et, dans une très large mesure, méconnaître la spécificité du discours mythique. Convenons encore que cette méconnaissance peut être préjudiciable au projet historique lui-même. Que penser, par exemple, de l'interprétation "réaliste" que donne R. Dion des travaux d'Héraclès, imposés par Eurysthée, qui, parce qu'il était roi et très riche n'hésitait pas à envoyer chercher jusqu'aux extrémités du monde "ce qui pouvait être utile à l'amélioration de sa cavalerie, de ses troupeaux, de ses vergers" ? (61). Accordons encore aux détracteurs d'une lecture "historicisante" que la découverte d'une inscription hiéroglyphique gravée pour Aménophis III et associant le nom de Nauplie aux Danaoi apparemment soumis au Pharaon (62) n'explique pas pourquoi "les Danaïdes sont à la fois des femmes qui fuient le mariage avec des mâles qui leur sont ttop proches et des épouses qui passent pour avoir introduit en Grèce le grand rituel du mariage, la fête des Thesmophories" (63). Certes, pour comprendre le mythe il faut, comme le dit M. Detienne, prendre en compte "le contexte ethnographique" et l'ensemble des mythes qui "comme celui des Lemniennes constitue son groupe de transformation". Mais n'est-ce pas aller trop loin qu'affirmer que le document de 1380, parce qu'il est "un document d'histoire politique", "ne peut rien expliquer" ? N'est-il vraiment d'aucun intérêt ce clin d'oeil du mythe à l'histoire dans la région d'Argos, au XNème siècle avant notre ère et dans le cadre de ces contacts entre Grecs et Egyptiens? De même, les relations qu'attestent les Nostoi entre la Grèce de l'âge du bronze et le monde méditerranéen occidental ne sont-elles vraiment d'aucun inrérêt, je ne dis pas pour l'historien mais pour le mythologue lui-même? C'est oublier, à mon avis, que le temps et le lieu peuvent être de quelque importance dans la constitution du discours mythique lui-même; que les contacts attestés, dans l'un et l'autre cas, sont des réalités d'importance; que si, pour les Danaïdes, ces contacts prennent la fonne de relations de dominant à dominé, ce n'est peut-être pas indifférent, pas plus que ne sont indifférentes les raisons commerciales de l'expansion vers l'ouest des peuples égéens. Un historien ne peut que s'insurger devant ce
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refus de la "perspective génétique" (64) et, si "la découverte de l'origine" n'est pas une fin en soi, si elle s'avère souvent difficile et hasardeuse, il n'est pas sûr qu'elle ne soit en rien éclairante. C'est pourquoi je voudrais revenir sur une étude de B. Sergent, parue en 1979 (65) et qui me paraît mériter plus d'attention qu'on ne lui en a portée. L'auteur prend la précaution de rendre au structuralisme ce qui lui revient (peut-être!) en le déclarant "le seul (traitement) exhautif' de cette matière multiforme qu'est la mythologie, et, se défendant de tout "historicisme", il n'en propose pas moins une étude où "l'histoire est prise pour elle-même comme plan de signification, comme objet codant" (p. 64). Cette attitude est justifiée par le fait que, se constituant, le mythe intègre des fragments de discours "portant soit sur l'astronomie, soit sur la culture matérielle, soit sur les hommes et les lieux etc..." c'est-à-dire des éléments d'une réalité intégrée à l'histoire. Il livre ainsi, pour B. Sergent, "une histoire découpée, hachée, triée, expurgée" (peut-être n'est-ce pas là d'ailleurs l'essentiel de la transformation opérée par le mythe), "une histoire qui n'est pas la vérité du mythe, parce qu'elle n'en constitue ni l'armature ni le message, mais que le mythe utilise" (p. 63). Si le détail - d'ailleurs touffu - de cette étude ne nous intéresse pas ici, on pourrait presque dire qu'à la "loi de Nilsson" bien connue (la coïncidence presque parfaite des principaux sites archéologiques achéens et des villes dont l'héritage mythologique est le plus riche), s'ajoute maintenant une "loi de Sergent", loi de la coïncidence chronologique (entre le cadre assigné, par Hérodote par exemple, aux temps héroïques et celui que les archéologues proposent aujourd'hui pour l'Helladique récent). Faut-il alors faire, avec l'auteur, l'hypothèse de travail que "tout élément de mythologie est historique" et qu'on peut utiliser cette dernière "comme corpus d'indications potentielles" ? Non, sans doute, et ces conclusions, à notre avis réductrices, peuvent paraître curieuses après les précautions méthodologiques du départ. Il reste qu'en gardant pleine conscience de la distance creusée entre l'événement et le mythe, il peut être bon de rappeler que le discours mythique est aussi le produit de l'histoire... non seulement parce qu'il véhicule, comme le dit B. Sergent, des "éclats" de telle expérience historiquement située, mais parce que sa mise en forme, elle-même, n'est pas sans rapport avec le moment: "Le mythe est une parole choisie par l'histoire" écrit, avec bonheur, Roland Barthes (66). "In illo tempore" dit le mythe, et sans doute est-ce là manière d'effacer un temps trop présent encore au creux du récit,
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volonté de retrouver le temps des origines - qu'il soit, avec les dieux, celui de la fondation du monde, ou, avec les héros, celui de la mise en ordre des sociétés - simple ruse du discours pour assurer au mythe et son efficace, et sa vie éternelle.
2 • Le mythe: "Un fait social total" Pour des raisons semblables il peut paraitre injuste de rejeter en bloc le "Fonctionnalisme" au rang des doctrines périmées. N'est-ce pas méconnaître ce que des anthropologues comme Malinowski ont apporté à la connaissance des mythes en soulignant le rôle qu'ils jouent effectivement dans le contexte social des peuples pour lesquels ils sont encore une réalité vivante (67)."Quelle que soit la réalité cachée de leur passé non enregistré, les mythes servent à voiler certaines contradictions engendrées par les événements historiques plutôt qu'à enregistrer fidèlement ces événements... l'application du point de vue historique à l'étude des mythes est donc intéressante en ce qu'elle montre que le mythe, envisagé dans son ensemble, ne représente pas une histoire froide et dépourvue de passion, puisqu'il est toujours créé volontairement pour remplir une certaine fonction sociologique, pour glorifier un certain groupe ou pour justifier un état de chose anormal" (68) écrivait Malinowski. On peut railler cet "optimisme finaliste" (69), regretter "ce curieux mélange de dogmatisme et d'empirisme qui contamine tout le système" (70). On peut souligner, à juste titre, que le discours mythique n'est pas le nécessaire reflet de la réalité et que le rapport qu'il entretient avec elle n'est pas toujours de l'ordre de la représentation, il reste que cette conception du mythe comme partie intégrante d'un ensemble plus vaste (la vie sociale en tant que système complexe d'institutions, de pratiques, de valeurs) sera aussi, à la même époque, celle de M. Mauss, puis, pour la Grèce, celle de L. Gernet. Enregistrant les conquêtes de la psychologie et de la linguistique, ces derniers fonderont la nouvelle science des mythes, fonderont également une nouvelle science des religions. Enfin, cette idée des "fonctionnalistes" que le mythe nait des contradictions de l'expérience humaine n'annonce-t-elle pas l'une des conclusions de Cl. Lévi-Strauss qui voit dans le mythe un outil logique opérant des médiations ou des connexions entre des termes contradictoires (71) ? En définitive, le plus gros écueil de l'interprétation fonctionnaliste parait bien être son refus de prendre en compte la dimension symbolique du mythe. Malinowski est, sur ce point,
29 très clair, pour ne pas dire brutal : "expression directe du sujet sur lequel il porte" le mythe n'est pas "une production symbolique" (72) et l'auteur s'en prend tout spécialement aux psychanalistes, "ces derniers venus, qui prétendent nous enseigner que le mythe ne représente pas autre chose qu'un rêve diurne de la race et qu'il n'est possible de l'expliquer qu'en tournant le dos aussi bien à la nature qu'à l'histoire et à la culture pour descendre dans le marais du subconscient, au fond duquel se trouvent relégués tous les accessoires et symboles de l'exégèse psychanalytique courante" (73).
3 • Le mythe, comme le rêve•••? Un peu comme Fontenelle - pour qui "tous les hommes se ressemblent si fort" (74) - les psychanalystes mettent l'accent sur l'universalité de certains schémas mythiques. Ils insistent, surtout, sur leur ressemblance avec les motifs oniriques et en déduisent qu'ils naissent de la même source: pour Freud et ses disciples, le mythe, comme le rêve, raconterait ainsi, en images, les méandres du psychisme humain. Mais si, comme le dit André Green, le psychanalyste se sent chez lui dans la mythologie - et plus encore s'il s'agit de celle des Grecs - il faut bien reconnaître que l'historien, quant à lui, a tendance à le considérer comme un intrus... Lorsqu'il lit qu'Aphrodite est un "phallos métamorphosé" ou encore "le phallos lui-même" ; lorsqu'on lui dit qu'Athéna est, tout simplement, au niveau fantasmatique, "la virilité de son père", il a quelque difficulté à penser qu'on parle le même langage que lui, pire encore, que l'objet d'étude est le même. Et, s'il veut bien admettre que ces divinités puissent être, effectivement, ce qu'en dit Georges Devereux (75), il n'aura pas de mal à démontrer qu'elles sont bien plus, et bien autre chose. On peut trouver aussi, comme G. Kirk, que, dans ces explications que donnent les psychanalystes des mythes grecs, le détail, trop souvent, "ne colle pas" (76)... Le détail et, disons-le, un peu plus, parfois, que le détail. Nous ne reprendrons pas, ici, le dossier d'Oedipe, avec, ou, comme le préfère Jean-Pierre Vernant, sans complexe, mais nous aurons, dans la suite de notre étude, l'occasion de revenir sur l'interprétation que propose Philip Slater des rapports ambigus qui à la fois unissent et opposent Héraclès à Héra (77). Pour lui Héra, c'est la mère d'Héraclès, et toutes les femmes de sa légende - épouses ou maîtresses-symbolisent, au fond, la même relation... Là encore,
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le détail ne respecte qu'imparfaitement la réalité: l'adoption, dans le mythe, ne peut traduire la maternité. Là non plus l'interprétation elle-même ne convient pas : on ne peut confondre Héra et Déjanire, Mégara ou Hébé... pour ne pas parler d'Omphale; et surtout il ne fait aucun doute que les rapports du héros et d'Héra exprimèrent, pour les Grecs, bien autre chose que "l'amère ironie de la relation entre la mère et le fils". TI faut donc bien reconnaître qu'en ce qui concerne le mythe grec, la démarche psychanalytique n'a pas toujours été, jusqu'ici, très éclairante (78). Affll'Iller, comme le fait N. Nicolaïdis (79) que le mythe se construit pour "mettre en forme les désirs d'un peuple" (p. 192) peut encore paraître - même s'il est désormais tenu compte de la spécificité culturelle - à la fois réducteur et globalisant. Réducteur, dans la mesure où l'expérience humaine se résume difficilement à l'expression de sa libido; globalisant, dans la mesure où tout discours, qu'il soit produit ou reproduit, met en scène des groupes ou des catégories sociales dont le rapport "aux pouvoir-dire et aux savoir-dire" n'est pas, comme le fait remarquer J. Jamin, sans influence sur le discours (80). Bref, la démarche psychanalytique ne permet guère de s'interroger sur les conditions sociales d'exercice de la parole, conditions qui, bien manifestement, en infléchissent et le sens et la valeur. Moins réductrices, sans doute, sont les théories de Jung et de Kérényi pour qui le symbole se situe moins "dans les marais du subconscient" pour reprendre l'expression péjorative de Malinowski que dans un inconscient collectif capable de saisir ce qui dépasse les limites du concept (81). Et leur vision du mythe nous paraît beaucoup plus juste, qui met en oeuvre à la fois des données objectives, celles de l'univers ambiant et un apport subjectif, celui par lequel la psyché transforme en symboles ces données objectives. Moins réductrices également, et plus riches de perspectives historiques sont les études de Georges Devereux, qui, de plus, connaît bien le maquis de la mythologie grecque et le milieu socio-culturel qui l'a vu naître. Jamais, en effet, l'inventeur de l'ethno-psychiatrie ne présente l'explication psychanalytique comme la seule valable, comme le recours ultime. Bien au contraire, d'autres -dit-il- sont "non seulement possibles, mais souhaitables"...puisqu'une interprétation psychanalytique, qui part du dedans de l'homme, est possible, une interprétation sociale, qui part "du dehors", est également possible et constituera le complément de l'interprétation psychanalytique. Pour Georges Devereux, un mythe (comme un rêve) qui ne serait expliqué que d'une manière ne serait pas complètement expliqué (82).
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C'est dans cet esprit, semble-t-il, que nombre de psychanalystes abordent désormais le mythe grec : c'est une réflexion analogue qu'ouvrant la colloque de Deauville, en 1981, R. Diatkine appliquait, pour sa part, à la genèse et à l'évolution des mythes. "Produits d'une élaboration collective, tant dans leur histoire la plus reculée que dans leur transmission", ils sont l'affaire de "la cité" (précision, bien sûr, par trop restrictive) et c'est à ce travail· collectif que le psychisme individuel a apporté sans cesse des matériaux. Encore ces éléments furent-ils "soumis à un traitement compliqué aussi bien pour devenir un récit commun que pour répondre aux nécessités sociales et historiques du groupe" (83). C'est dire, et les psychanalystes le disent, que personne aujourd'hui ne peut plus se satisfaire des "formulations superficielles" d'antan (84). C'est à dire qu'ils ne prétendent plus que rarement détenir à eux seuls la clef de ces "personnages" que, d'ailleurs, ne sont pas les héros ! (85). Et, si l'historien des mythes, finalement, gagne beaucoup à la lecture de certains de leurs ouvrages, c'est parce qu'il a lui-même beaucoup à apprendre de ces processus qui trop souvent lui échappent et par lesquels le mythe intègre, mais aussi transforme profondément les éléments de l'expérience humaine. Comment comprendre, par exemple (nous aurons l'occasion d'y revenir) les rites et, par conséquent, les mythes initiatiques sans le secours de la psychanalyse qui seule éclaire vraiment les rapports ambigüs qui, dans le psychisme humain, se tissent entre masculin et féminin et déterminent - les anthropologues l'ont compris depuis longtemps - tant de pratiques ou de récits dont la cohérence, au premier abord n'est pas évidente? (86). "Le mythe tout entier", écrit G. Devereux, "tout autant que chacun de ses éléments est surdéterminé" (87) et la psychanalyse est, sans nul doute, l'une des façons d'expliquer cette "surdétermination", cette "majusculisation" qu'opère le mythe, de comprendre comment s'effectue, sous-tendue et parfois déterminée par les activités de l'inconscient, la mise en forme mythique des événements, pratiques, croyances... Bref de tout ce qui constitue le "vécu" de l'homme, son histoire.
4 • Le mythe "Discours ultime" ? C'est encore cette "surdétermination" ou cette "majusculisation" opérée par le mythe que retiennent les "Symbolistes" pour qui le mythe représente le "discours ultime" (88).
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Pour 1. Rudhardt, par exemple, le mythe exprime ainsi un "vécu global" que ne pourrait pas percevoir la pensée conceptuelle sans le désintégrer; il est, pour les Grecs, "le moyen d'exprimer leur pensée sur des sujets singuliers, en rattachant de telles pensées particulières au sens sacré de toutes choses" (89). Loin d'être une forme "inférieure" de la pensée le mythe serait donc l'instrument par excellence capable de dévoiler le sens de l'expérience humaine, "le dernier mot prononçable" au sens où van der Leeuw admet que le sens religieux est celui auquel ne peut accéder aucun sens plus profond. Comment alors pourrait-on comprendre le mythe grec ? Il faudrait pour cela "refaire soi-même l'expérience intérieure dont il fut conjointement l'expression et l'instrument" (90), démarche que l'auteur reconnaît irréalisable. De plus, quand bien même en aurait-on saisi le sens, on ne saurait que le suggérer, puisque l'exprimer en termes conceptuels serait, nous l'avons vu, l'abolir.... Théorie qui, pour avoir le mérite d'inciter à la prudence, ne doit pas pour autant conduire au renoncement, à l'abandon de toute attitude scienfique.
5 • Le mythe, un langage à décoder ? On le savait, et l'on aura senti, une fois de plus, tout au long de cette mise au point, le débat contemporain sur le mythe porte en lui la marque profonde du structuralisme, théorie pendant de longues années hégémonique, en ce domaine en tout cas. C'est une véritable coupure épistémologique qui s'introduit lorsque, appliquant au mythe le modèle de la linguistique structurale, on déplace l'attention du chercheur, de la chaîne syntagmatique du récit qui l'occupait jusqu'alors, sur ses unités constitutives (les mythèmes) et les relations qui les unissent (ou opposent) en système. Dans son Anthropologie struturale, Claude Lévi-Strauss appliquait lui-même sa méthode à la Grèce, en "décodant" le mythe d'Oedipe (91) et, si les hellénistes refusaient généralement cette lecture (92), certains d'entre eux allaient reprendre et parfaire l'analyse, l'appuyant sur une connaissance approfondie "du contexte ethnographique" dont Lévi-Strauss avait d'ailleurs montré le rôle essentiel dans le déchiffrement de la geste d'Asdival (93). Vingt ans après cette "vague structuraliste" Marcel Detienne s'interroge "d'abord pour avoir cru, en bonne et amicale compagnie, que, sur ce territoire, une réflexion théorique neuve allait permettre d'écrire une vraie grammaire du langage
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mythique, après quelques années de pratiques et de formes d'analyses inédites" (94). Faut-il voir là l'aveu d'un échec? la démission du "théoricien" que paraît encore attendre la conclusion du même ouvrage? (95). Ce serait oublier que les recherches ainsi conduites ont souvent fait apparaître le sens profond d'un mythe qu'une lecture de surface laissait échapper, oublier qu'on leur doit les analyses parmi les plus pénétrantes jamais consacrées à la mythologie : celles que Jean-Pierre Vernant, singulièrement, a données du mythe des Races, des mythes de Pandore et de Prométhée chez Hésiode (96) ; ce serait oublier d'une façon plus générale, l'intérêt des travaux du groupe des Hautes Etudes, même si, au fur et à mesure de leur développement, d'aucuns se laissaient peu à peu prendre au piège de ce qui, facilement, pouvait se figer, devenir un formalisme... un formalisme lourd des dangers dont on le sait porteur et qu'avouent trop souvent les procédés répétitifs et les "tics" de langage bien connus! N'est-ce pas, là d'ailleurs, la raison du désenchantement perceptible dans le dernier livre de Marcel Detienne? (97). Incontestablement, après l'engouement des premières années, l'analyse structurale pose problème. Problème qui se situe peut-être au niveau du "modèle" lui-même, c'est-à-dire de l'application à l'étude du mythe des méthodes de l'analyse linguistique. Le mythe, certes, est parole, mais "ceci ne veut pas dire" - et c'est Roland Barthes qui l'affmne - "qu'on doive traiter la parole mythique comme la langue" (98). Le mythe relève, en fait, de la sémiologie, mais - et là encore l'auteur de Mythologies l'a très bien expliqué - c'est un système sémiologique second : en effet, ce qui est signe (il entend par signe le "total associatif' du signifiant et du signifié) dans le premier système, celui du langage, devient simple signifiant dans le second, celui du mythe... système agrandi, décalé "déboîté" donc par rapport à celui du langage qui préexiste au mythe. Le troisième terme de cette chaîne sémiologique nouvelle - celle du mythe - n'est plus alors le "signe", il est la "signification"... Un mot que l'auteur justifie par la double fonction du mythe: certes "il désigne et il notifie", mais encore "il fait comprendre et il impose" (99). Une telle analyse montre à la fois la nécessité d'une approche formelle du mythe, mais aussi ses limites. Citons encore une fois Roland Barthes: "c'est le jeu intéressant de cache-cache entre le sens et la forme qui définit le mythe" (100). C'est encore le modèle même de l'analyse structurale du mythe que critique P. Ricoeur, lorsqu'il suggère de faire place, à côté du modèle structural qui conduit à accentuer la texture
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syntaxique du mythe, au modèle métaphorique qui permet de mettre en valeur le jeu interne des contenus sémantiques eux-mêmes (101). Et cela d'autant plus que, si les mythes étudiés par Lévi-Strauss multiplient les constructions de type classificatoire et par là même se prêtent bien à l'analyse structurale, les mythes grecs (comme ceux de tout le domaine indo-européen et sémitique) ont une richesse sémantique telle que, permettant des réinterprétations dans des contextes sociaux variés, elle leur donne une relation différente au temps et à l'histoire (102). Le temps et l'histoire. C'est là précisément que se situe la difficulté de l'interprétation "structuraliste" pour l'historien qui, bien souvent, a l'impression qu'elle n'épuise pas l'intelligence des mythes (103). On peut en juger dans les études, au reste remarquablement intéressantes, que N. Loraux a récemment consacrées aux mythes de l'autochtonie athénienne (104). Contre "l'autonomie souveraine du discours mythique" (105) l'auteur affmne "qu'il n'est pas de mythe qui soit totalement autonome à l'égard du réel" et forme le projet "de lire, en historien, des mythes dans leur ancrage civique", méthode avec laquelle nous ne pouvons qu'être d'accord et c'est très certainement ce souci constant de retrouver le mythe, dans la cité, "tissé dans la multitude de ses manifestations et de ses discours" (106), qui rend si pertinentes et si convaincantes les réflexions consacrées à "l'impossible figure athénienne de la femme" (107). Mais peut-on en rester là ? Dire que le mythe "est toujours déjà là dans la cité" ? ... Parier "que c'est la cité qui parle, là-même où le mythe raconte des histoires saugrenues", n'est-ce pas encore mutiler le mythe, ou en tout cas le fixer, le priver de son contenu dynamique? En témoigne, à notre sens, la figure centrale de l'autochtonie athénienne: Athéna, la divinité poliade. Elle est, pour N. Loraux, ce qu'en dit la cité: la Parthénos "image rassurante d'une féminité entièrement absorbée par le service de l'andreia " (108). C'est joliment dit - et de plus c'est juste -, mais Athéna n'est-elle que la Parthénos ? La déesse de l'arbre et du serpent sur l'Acropole, la "Dame du palais" aux fonctions beaucoup plus complexes ne peut-elle, en aucune manière, expliquer la Poliade, et le mythe, qui n'est pas né dans la cité, n'était-il pas déjà "tissé dans la multitude des manifestations et des discours" de cette société d'avant la cité, de ces temps où, pour les Grecs déjà, s'emmèlent la mythologie et l'histoire ? Même si la cité l'adopte, le transforme au point de le resémantiser, le mythe n'aurait-il rien conservé de son contexte historique et social primitif? Encore une fois, peut-on ainsi
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effacer le temps ? Et encore: "Il n'y a pas de mythe qui soit totalement autonome à l'égard du réel", écrit, nous l'avons vu, N. Loraux, et elle poursuit "que l'on donne à ce réel un contenu "réaliste" ou qu'on le définisse comme l'ensemble des représentations partagées dans la cité" (109). Que ces "représentations" existent et très fortement, c'est bien évident, qu'elles apparaissent "partagées dans la cité" c'est presque aussi évident, qu'elles entrent au nombre des données à partir desquelles s'élabore le mythe, l'auteur le souligne à juste titre. Mais cet "imaginaire" - dont on parle beaucoup - faut-il lui donner même statut qu'au réel ? Il existe, bien sûr, mais pour qui? pour tous les Athéniens? ou pour certains d'entre eux seulement? ou plus exactement quelle est la situation de ces Athéniens face à ces représentations : sont-ils acteurs? sont-ils objets? C'est là me semble-t-il qu'un rejet trop catégorique du fonctionnalisme peut créer l'illusion. Le mythe grec "fonctionne" lui aussi; même lorsqu'il est écrit, lorsqu'il est interprété, il l'est dans un contexte historique et social dont il constitue encore l'une des productions. Faire du réel sur lequel il s'articule un imaginaire valable pour tous n'est-ee pas tomber dans l'illusion intégratrice du mythe ? n'est-ce pas oublier, comme le rappelle fort utilement J. Jamin, que la parole se trouve prise dans un réseau social qui n'est pas sans la déterminer? (110)
6 - Le mythe, "Un jeu de cache-cache entre la forme et le sens" Il ne pouvait être question de refaire ici une histoire de la science des mythes ; aussi nous sommes nous contentée d'envisager les principales approches sans à priori, refusant d'opposer doctrines périmées et méthodes nouvelles hors desquelles point ne serait de salut, cherchant au contraire à retrouver dans quelle mesure chacune d'elles pouvait concourir à l'étude du mythe, en constituer l'une des possibles lectures.. lectures qui toutes méritent d'être prises en compte si l'on veut dépasser l'explication partielle, schématique et mutilante et donner du mythe une vision globale. Quant à l'analyse structurale inspirée de Lévi-Strauss, s'il faut reconnaître qu'il n'est plus possible, depuis, de poser dans les mêmes tennes les problèmes anciens, on peut remarquer aussi que le "pari en faveur de la synchronie" (111) qu'à sa suite avaient fait certains hellénistes s'est, à l'usage, sagement nuancé (112) ou qu'il provoque
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aujourd'hui de sérieux doutes chez ceux qui ont tenté de le tenir le plus loin possible (113). J'ai, quant à moi, fait l'expérience, au cours de mes recherches, que, même dans le domaine du mythe qui paraissait si bien lui convenir, l'historien ne pouvait se satisfaire de l'analyse structurale, alors même qu'elle s'impose à lui comme une étape nécessaire. Pragmatisme, éclectisme? Je n'en crois rien et je ferai mienne, sur ce point, cette profession de foi de Roland Barthes : "l'important, c'est de voir que l'unité d'une explication ne peut tenir à l'amputation de telle ou telle de ses approches, mais, conformément au mot d'Engels, à la coordination dialectique des sciences spéciales qui y sont engagées" (114). D'ailleurs, le mythe est-il toujours et partout justiciable du même traitement? Pour retrouver Héraclès, la version que donne Diodore de Sicile de la geste occidentale du héros, peut-elle être simplement considérée comme une "variante" des travaux d'Héraclès chez Homère ou chez Hésiode ? Certainement pas (115). Pour réduire la difficulté que présente une approche multiforme, et sans pour autant partager une conception du mythe conçu comme "module de l'histoire", (116) j'emprunterai aux recherches de Gilbert Durand la distinction qu'il établit entre ce qui dans le mythe est pérennité: son "aspect sempiternel" et ce qui est dérivation (l'excès de dérivation pouvant aboutir à un seuil critique où "se perd le fil conducteur de l'ensemble du mythe", où "s'use le mythe") (117). Cette distinction fort pertinente, et qu'on peut d'ailleurs retrouver, sous des formes voisines, chez d'autres théoriciens (118), justifie, nous semble-t-il, une démarche qui, tout en respectant la spécificité du mythe, rend toute sa place à l'histoire. L'étude même des dérivations, justiciables parfois d'explications évhéméristes, accidentelles, d'explications au niveau de l'événement, - au sens le plus large - justiciables aussi, dans certains cas, d'analyses structurales, ne permettrait-elle pas de mieux comprendre, de mieux atteindre, ce qui, dans le mythe, est "pérennité", ce qui se maintient toujours. Qu'on ne s'y trompe pas, il ne s'agit pas de la . recherche du "mythe introuvable" à laquelle se refuse Marcel Detienne (119), mais d'un essai pour cerner au plus près, au-delà des réinterprétations multiples, des resémantisations qui sont le fruit de l'histoire, ce pourquoi dure cette "prégnance symbolique" dont parle E. Cassirer. Dans ce va-et-vient continu entre le monde du rêve et celui de la réalité objective (120) c'est peut-être la part du "rêve" que nous devrons laisser, mais le plus tard possible, aux symbolistes le soin d'élucider (121).
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III • DES MOTS ET DES IMAGES (122)
AUX SOURCES
DU DISCOURS MYTHIQUE
DES MOTS... Le mythe est, avant tout récit. Notre documentation, en conséquence, restera, pour l'essentiel celle des textes, et, préciserons-nous, des textes littéraires. Il nous arrivera, certes, d'utiliser telle ou telle inscription. Qu'un document épigraphique de Malte, par exemple, traduise : Notre Seigneur Melqart, maître de ~or (Tyr) par 'Hpax).iit" ApXTlY&'tTI'" (123), ne soit pas indifférent pour notre propos, on le comprendra sans peine... Qu'il ne soit pas sans intérêt non plus, de lire, sur un bloc calcaire trouvé aux confins des territoires de Sélinonte et de Ségeste qu'un sanctuaire à Héraclès existait (là 1) dès le tout début du VIème siècle (124), cela ne fait aucun doute. Reste que les inscriptions, liées au culte beaucoup plus qu'au mythe, ne seront guère évoquées qu'à titre documentaire, et à l'appui de tel ou tel point de notre développement. Elles ne seront jamais la substance de notre recherche et on ne doit pas s'attendre à trouver ici une étude épigraphique. Tout autre, bien sûr, se présente l'utilisation du texte littéraire, fondement même de notre travail. Partie d'un corpus relativement circonscrit: les textes qui - grecs ou latins - évoquent le mythe des pommes d'or et celui de Géryon, nous avons rapidement pris conscience, au moment même où évoluait notre conception d'ensemble du sujet, de la nécessité d'ouvrir plus largement ce corpus. La seule présentation du héros le prouvait, qui, dans nos première pages invoquait sans exclusive les premiers textes portant témoignage sur le fils de Zeus et d'Alcmène. Nous en userons de même avec les grandes synthèses mythographiques : chez Diodore, loin de nous limiter au récit des dixième et douxième exploits, c'est, très rapidement toute la geste occidentale d'Héraclès, puis, non moins nécessairement, l'ensemble de cette véritable biographie romancée que reconstitue Diodore qu'il nous a fallu prendre en considération. De même chez Apollodore c'est la totalité de la vie du héros et même, en ce qui concerne certains termes du vocabulaire, l'ensemble de l'oeuvre, qui nous ont retenue, et non seulement les dixième et onzième "travaux" auxquels d'ailleursnous y reviendrons - cet auteur donne un assez faible développement. Cette "inflation", on le voit, ne s'est pas limitée à la "matière" mythique. Lorsque la possibilité nous en a été donnée,
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nous avons utilisé cet outil incomparable qu'est l'ordinateur (125), en ce qu'il facilite l'étude exhaustive du vocabulaire et peut ainsi donner accès à une autre vérité du texte, atteindre l'imaginaire, conscient ou inconscient, de l'auteur. Plus modestement, nous nous sommes toujours refusée à traiter le mythe comme un élément à part, qu'il serait possible d'appréhender et d'analyser seul. C'est dans leur rapport les unes avec les autres, et en fonction les unes des autres que se comprennent bien, non seulement les différentes manifestations du fait religieux, mais encore les représentations les plus diverses du monde et de l'action humaine. Prendre en considération le thème initiatique qui transparaît si vivement dans la séquence mythique opposant Héraclès à Géryon, l'adversaire triple, dans la conquête des fruits d'or ou, plus généralement encore, dans le "motif' du voyage vers l'Ouest, impliquait une recherche dans le domaine des cultes et des pratiques d'intégration sociale auxquels le héros, d'une façon ou d'une autre pouvait être lié... supposait, en conséquence, la référence à d'autres auteurs que les mythographes, aux historiens peut-être, à Pausanias, surtout, qui, dans sa Périégèse a laissé une description si minutieuse des cultes et des usages des cités grecques, aux auteurs tardifs enfin, souvent si précieux (126). De même une interrogation à la fois plus générale et plus profonde sur la notion même de "travaux" appliquée aux exploits d'Héraclès (dits athloi, mais aussi ponoi, mochthoi, voire erga) impliquait un élargissement de l'enquête à la réalité si complexe du travail en Grèce... (127). On aura bien d'autres exemples de telles extensions du champ d'enquête rendues nécessaires par notre conviction que seule une conception synthétique de l'histoire est susceptible de rendre intelligible cette recherche des articulations et des équilibres que peut révéler le mythe. C'est ainsi d'un corpus démesurément étendu que nous avons dû disposer. De ce corpus, il ne pouvait plus être question - c'était pourtant notre idée première - de donner une présentation intégrale. Nous avons choisi un autre parti, confortée en cela par une certitude de plus en plus ferme au fur et à mesure que se poursuivaient nos recherches: l'Héraclès des poèmes homériques (et ce singulier est déjà fort abusif) n'est pas celui de Pindare. Celui des Tragiques (et, là encore, comment confondre le héros d'Euripide et celui de Sophocle!) n'est évoqué que d'assez loin par le "personnage" des biographies reconstituées par les mythographes 1... Autant de remarques qui seraient simples truismes, s'il n'était pas aussi fréquent - dans les analyses
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structurales en particulier - de voir toutes ces sources "mises à plat" et toutes ensemble constituer le corpus d'une seule et même grille de lecture. Les méthodes nouvelles de lecture du texte ont permis, en atteignant ses niveaux les plus complexes, de lire, dans son fonctionnement, à la fois le reflet des données objectives d'une époque, d'une société, et celui de l'imaginaire d'un auteur. Elles conftrment notre impression qu'une utilisation, sur le même plan, des sources - des plus archaïques aux plus tardives, des plus construites aux plus ténues -, que l'élaboration d'une grille de lecture qui refuserait la constante référence à telle époque, à telle société ne pourraient que fausser les perspectives... Remarque qui plaide, bien sûr, pour une reprise en considération de la diachronie et d'un contexte qu'on peut dire ethnologique, tout aussi bien qu'historique, mais qui va bien au delà: en témoignent deux auteurs qui tous deux se réfèrent à la mise en ordre, relativement tardive, de la mythologie, et qui nous ont laissé les deux synthèses "'majeures" des faits et gestes du héros que nous avons choisi d'étudier. Que Diodore de Sicile, dans la longue notice qu'il consacre à Héraclès, s'inspire d'une Géryonide composée à Himère - une colonie grecque aux frontières de la zone d'influence des Phéniciens - n'est pas sans conséquence sur la vision qu'il a et qu'il donne du héros (128)... Qu'Apollodore, au contraire, tire la plus grande partie de son récit des dixième et onzième travaux du fils d'Alcmène d'une source purement grecque, Phérécyde, explique que des "exploits" apparemment identiques soient à la fois les mêmes (129) et témoignent d'une "philosophie" fort différente (130). L'auteur athénien, en effet, au Vème siècle, résume dans l'expédition contre Géryon le voyage d'Héraclès aux marges occidentales du monde, alors que la localisation du jardin des Hespérides dans l'extrême Nord paraît obéir, dans son esprit, à la volonté de meubler l'univers entier des actions retentissantes du héros. Mais plus que de telles divergences dans la géographie des travaux, c'est la conception du héros qui nous retiendra. Dans la Bibliothèque d'Apollodore, l'image d'Héraclès reste archaïque et son mythe assez proche - nous y reviendrons - des sources primitives; celle de Diodore fortement empreinte d'évhémérisme rationalise le mythe et le transforme profondément Tout autre encore nous apparaît l'image d'Héraclès qui, tel un tableau impressionniste, se compose à la lecture de Pausanias. Ces multiples touches faites de l'observation de cultes ou d'usages locaux, de quelques récits mythiques évoqués au hasard de ses promenades rendent bien compte de la représentation que
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pouvaient se faire du héros non plus seulement un poète, non plus les mythographes ou les "docteurs" auxquels ceux-ci se réfèrent si fréquemment, non plus une aristocratie sociale ou religieuse qui bien souvent est la seule à s'être exprimée, mais, pour une fois, les usagers du culte, les "destinataires" de la parole mythique qu'il est trop facile de confondre sous le dénominateur commun de Grecs. Nous avons cherché à tenir compte de telles différences dans l'utilisation de nos sources : pas de présentation globale, pas de grille de lecture qui leur donne même statut: une volonté, au contraire, d'insister sur ce qui les individualise et fait l'intérêt majeur de chacune d'elles. A Pausanias nous demanderons de nous éclairer sur les rapports que, dans tant de cités grecques (ou, nous le verrons, sur leurs marges indécises), le héros entretient avec la jeunesse et, plus précisément avec les pratiques d'intégration qui l'introduisent dans le monde des adultes (131). C'est en revanche dans le récit de Diodore que nous chercherons à comprendre comment, pour les colons grecs d'Occident, le voyage vers l'ouest d'Héraclès, préfigurant leur expansion propre, a fait du héros le paradigme de l'Archégète, le modèle de leur action acculturatrice... C'est enfin à la Bibliothèque d'Apollodore que nous aurons recours pour tenter de retrouver trace des éléments les plus archaïques du mythe, des héritages anciens... Je ne dis rien ici du témoignage qu'il est convenu d'appeler "homérique" (132), rien non plus d'Hésiode. Ils furent notre point de départ, ils resteront la référence constante, obligée et comme le pivot de notre recherche. Je ne dis rien non plus de tant d'auteurs qui sur tel ou tel point - et non des moindres auront un rôle capital. Il faut bien, ici, simplifier. Qu'on sache bien cependant que, si, à tel moment ou à tel autre, l'utilisation d'un auteur est privilégiée, elle n'est, bien sûr, jamais exclusive. Peut-être entre-t-il une certaine part de "jeu" dans cette option, après mûres réflexions, librement choisie. Elle nous paraît surtout présenter l'immense avantage de réunir, dans un même effort d'unité, l'approche des sources et le projet d'ensemble. Par delà les diversités d'interprétation où nous pourrons retrouver trace .des dérivations successives de la légende, ce qui, chez tous ces auteurs rendra le même son, nous permettra, nous l'espérons, d'atteindre à la "pérennité" du mythe (133).
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DES IMAGES... "Le mythe est une parole" disait Roland Barthes (134). Le définir ainsi n'est pas le limiter; nombreuses, en effet, sont les formes que peut prendre cette parole; l'image en est une, par exemple, qui, système de communication au même titre que le discours - qu'il soit oral ou écrit - est, elle aussi, "message" (135). TI nous paraît commode, pour dire ce que nous attendons de l'image comme source de notre étude, de reprendre la distinction, appliquée aux "produits des temps culturels" par M. Foucault entre le document - qui peut se lire de manière directe, en fonction du référent que l'on a soi-même posé - et le monument qui doit être considéré du point de vue de sa logique interne, de ce qu'il a à dire en tant que tel (136). L'image est à la fois l'un et l'autre et il n'est pas question ici, de privilégier l'un par rapport à l'autre. L'image-document, l'image-témoignage pourrait-on dire aussi, est ce qu'est tout vestige archéologique : jalon chronologique, signe d'une présence. Une présence qu'il nous sera souvent bien utile de rencontrer... telles ces représentations d'un Héraclès-Melqart par exemple, qui, tant à Chypre que sur la côte syrienne - et très vite pensons-nous à Rome même (137) traduisent l'assimilation du héros grec et du dieu tyrien plus d'un siècle avant qu'Hérodote nous en donne l'attestation formelle (138).. tels ces portraits d'Héraclès sur les monnaies de telle ou telle cité, de tel ou tel empereur (139)... telles surtout, reproduites à l'envi sur les vases, ces images du héros luttant, tuant, domptant, se reposant, et finalement pénétrant en vainqueur dans la société des Immortels. La peinture, elle aussi, est d'abord document, témoignage : lorsque K. Schefold reconnaît sur le bouclier de Tirynthe - la première peinture monumentale que l'art . grec, dit-il, nous ait conservée - le triomphe d'Héraclès sur la reine des Amazones, il ne peut être indifférent qu'autoW' du héros soit née "l'une des premières images mythologiques qu'ait créée la conception homérique de l'homme" (140). Lorsque V. Karageorghis propose de lire, sur une céramique chypriote du XIème siècle, le combat du héros contre l'hydre (141), tout, dans ce témoignage, nous intéresse : la date, le lieu, et, bien sûr, le fait qu'un des premiers mythes attestés dans l'art grec soit ainsi celui d'Héraclès... On sait pour en terminer avec cet aspect de la question, tout ce que, dans un esprit semblable, H. Metzger a pu tirer de l'étude des céramiques attiques du Nème siècle (142) : faveur nouvelle pour certains épisodes de la légende, oubli de certains autres, goût prononcé pour la représentation du repos héroïque, évolution donc dans la conception du héros et de la
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valeur attachée à ses actes. La peinture cependant - et, en ce qui concerne la Grèce, on peut préciser qu'elle est essentiellement celle des poteries décorées - n'est pas un objet archéologique comme un autre. Au flanc des vases en effet et dans le creux des coupes figurent et agissent, non seulement les personnages de la vie quotidienne des Grecs, mais aussi leurs dieux et leurs héros, déroulant ainsi sous nos yeux (mais pas pour nos yeux !) de véritables scènes mythologiques. Le temps n'est plus où ces scènes n'étaient lues que comme illustrations et, dans le meilleur des cas, compléments du texte. Claude Bérard naguère, et d'autres après lui, ont rendu hommage à ceux qui, comme Charles Dugas, ont su revaloriser la fonction de l'image et poser de façon théorique le problème de ses rapports au texte (143). De même que l'étude des textes a désormais dépassé le stade de la philologie (exégèse et étude des filiations), l'étude des vases peints s'est faite interrogation sur l'image elle-même, sur les règles de sa construction, sur son contenu et, de là, sur sa fonction ... l'image est devenue "monument" pour reprendre la terminologie de Michel Foucault, et c'est à créer une véritable "sémantique de l'image visuelle" que travaillent désormais les spécialistes (144). Nous l'avons dit déjà, notre étude sera fondée essentiellement sur les textes littéraires; une thèse d'ailleurs est en cours qui, analysant les "aspects de la légende d'Héraclès dans l'art grec archaïque" (145), nous invite à ne pas développer outre mesure l'aspect iconologique de la question. Il reste que nous ne pouvons ignorer ce "discours sur les signes" qu'est l'analyse de l'image, comme l'est aussi, on l'a déjà noté, l'analyse des mythes. C'est Claude Bérard, en effet, qui remarquait à quel point "l'imagerie est adaptée à l'expression de la mythologie", à quel point "elles possèdent des affinités structurales qui les rendent solidaires" (146). Et il est vrai que, comme l'écriture qui traduit le mythe, l'image "est fonnée d'une matière déjà travaillée en we d'une communication appropriée", comme l'écriture elle "appelle une lexis" (147), comme elle toujours, elle est, pour le mythe, matière première, tenne final d'une première chaîne sémiologique et élément premier du système "agrandi", et "dérivé" qu'édifie le mythe lui-même (148). Le sémiologue est ainsi fondé, selon Roland Barthes, "à traiter de la même façon l'écriture et l'image: ce qu'il retient d'elles, c'est qu'elles sont toutes deux des signes, elles arrivent au seuil du mythe, douées d'une même fonction
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signifiante, elles constituent l'une et l'autre un langage-objet" (149). On ne peut mieux résoudre le problème des rapports de l'image et du texte : tous deux ont simplement, en ce sens, même statut (150). On peut, je crois, en ce qui concerne la Grèce et singulièrement le discours sur le mythe, qu'il soit dit, écrit ou figuré, aller plus loin: on connaît l'importance, pour la mythologie, de l'épopée homérique et, au delà, de cette longue tradition de poésie orale qui finit par s'organiser, se figer, s'écrire. Processus impossible à reconstituer, en ce qui concerne la Grèce, mais sur lequel, me semble-t-il, l'Orient peut apporter quelque lumière avec la multiplicité des textes qui, du Vème au 1er millénaire, racontent la même épopée de Gilgamesh (l'exemple bien sûr n'est pas pris au hasard). Ici chaque version a trouvé son écriture, des premiers éléments sumériens aux tablettes plus complètes de la bibliothèque d'Assurbanipal au VIIème siècle, en passant par les exemplaires de la première dynastie babylonienne et même les fragments hittites... Une aventure qui invite à songer à la longue histoire des mythes grecs, une histoire dont les sources littéraires ne donnent que l'aboutissement... la partie émergée de l'iceberg, en somme. Or les traits spécifiques de cette tradition orale sont maintenant mieux connus, grâce aux travaux de M. Pany et de son disciple A.B. Lord et aux comparaisons qu'ils inaugurèrent avec les sociétés contemporaines où l'oralité est encore la règle (151). On connaît bien, maintenant, la stratégie discursive du style formulaire. Reprenons, par exemple, la définition que donne de ce mode d'expression P. Zumthor (152) : "Le style formulaire, dit-il, enchasse dans le discours, au fur et à mesure de son déroulement et intègre en les y fonctionnalisant, des fragments rythmiques et linguistiques empruntés à d'autres énoncés préexistants, en principe appartenant au même genre et renvoyant l'auditeur à un univers sémantique qui lui est familier", et pour M. Parry qui élabora sa théorie à partir des "épithètes homériques" c'est tout un système de formules que met en oeuvre le poème épique, formules reliées entre elles par des rapports complexes d'équivalence, de complémentarité ou d'oppositions soit sémantiques, soit fonctionnels. Si nous abordons ici ce problème du style formulaire, c'est qu'il nous paraît évoquer d'assez près ce "trésor" d'objets, de signes, de formules que retrouvait Claude Lévi-Strauss dans l'art brut, ces "unités formelles", cet "ensemble d'éléments déjà
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constitué, fixé et donc limité" dont usent les imagiers de la Grèce selon Cl. Bérard (153). Et il est bien vrai que l'image est une formalisation du réel beaucoup plus qu'une représentation du réel, que le cadre de l'image crée un espace autonome, que les personnages représentés sont des "catégories" plus encore que des portraits (154), que pour être lisible par ses destinataires l'image doit opérer des sélections, utiliser des codes compréhensibles par tous (tel attribut: la massue par exemple ou la léonté, suffIra ou aidera à identifier le héros : Héraclès)... toute cette combinatoire de signes, tout ce vocabulaire de l'image qui, comme la formule, renvoient le destinataire à un univers qui lui est familier, c'est ce que l'analyse de l'image doit permettre de décrypter. Alors, autant, sinon plus que le texte, l'image permettra de retrouver ces "attitudes fondamentales" d'une époque, s'il est vrai - et il semble bien que ce puisse l'être - que les unités essentielles des sociétés apparaissent comme des unités de représentation (155). Encore faut-il, dans cette étude, ne pas perdre de vue la perspective diachronique: le récent travail de J.M. Moret le prouve, qui, étudiant alternativement les thèmes légendaires de l'Ilioupersis dans la céramique italiote puis les formes et procédés de composition, montre bien comment le même "motif', celui de la saisie par les cheveux, par exemple, voit son sens évoluer au cours des siècles. S'il indique nettement, à l'origine, que l'un des adversaires sera mis à mort, ce sens premier s'est déjà affaibli au Vème siècle; il s'est perdu tout à fait au Nème siècle, puisqu'on l'applique systématiquement à la représentation du rapt de Cassandre par Ajax, et qu'il s'introduit même dans les scènes d'enlèvement amoureux (156). L'auteur, à ce sujet, fait remarquer que, si l'archéologue peut, dans la mesure où il dispose d'un matériel s'étendant sur la longue durée, embrasser "d'un seul regard toute l'histoire d'un thème iconographique", la position des anciens - et des peintres en particulier - était bien différente dans la mesure où la fragilité du matériel et l'habitude d'enterrer les plus beaux vases avec les morts les privaient de cette vision synthétique: eux n'ont pu connaître "qu'une portion infime de l'immense production que les fouilles nous ont restituée" (157). Ainsi s'explique, sans doute, l'évolution de ces "codes" qu'on aurait tort de croire immuables, le principe d'analogie jouant - Panofsky déjà l'avait montré - un rôle déterminant dans ces transformations iconographiques, comme, d'ailleurs, dans l'évolution des langues (158). Une conséquence: si nous voulons tenter de retrouver, par
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la médiation de l'image - comme par celle du texte littéraire - la façon dont, comme le disent d'aucuns, les Grecs "se donnent à voir", si nous voulons reconnaître le travail de cet "imaginaire social" dont on peut se demander s'il est aussi homogène que les mêmes veulent bien le dire, il faut donc tenir compte - il nous plaît de l'avoir vu démontrer - de la diachronie. Il faut aussi tenir compte de cette double sphère, ou, comme le dit G. Livet, de ce double espace dans lequel se développe l'image: l'espace intérieur de la créativité, l'espace extérieur - qu'on pourrait appeler l'espace social - de la diffusion, l'un et l'autre établissant entre eux, bien sûr, "tout un système de relations, d'échanges inconscients" et qui "se font miroir" (159). Encore une fois le processus évoque la poésie orale et singulièrement, les "péripéties de ce drame à trois qui se joue... entre l'interprète, l'auditeur et le texte" (160) et qu'on a pu observer aussi bien chez les Manobo des Philippines que chez les Mossi du Burkina Faso, dans les tavernes yougoslaves où Parry venait écouter les récits du gus/ar, ou chez les nomades Kirghiz de Radloff. Partout le récitant - et sans doute en allait-il de même de l'aède en Grèce - adapte son récit à l'auditoire, module le ton, le geste, mais aussi l'ordonnance même du récit. Radloff a vu ainsi les chanteurs épiques d'Asie Centrale intégrer des généalogies flatteuses pour les nobles, critiquer vertement les riches devant les pauvres... essayer même de s'adapter au public que constituait Radlofflui-même ! (161). Si ce "conU'Ôle social" de l'auditeur se fait moins direct (et encore) avec le spectateur de théâtre et surtout avec le lecteur, le peintre, comme le potier, reste, - cela paraît logique - beaucoup plus dépendant de sa clientèle, puisqu'il faut bien oser donner sa réalité économique à l'image quelque peu désincarnée du "récepteur" ! Cette prise en considération du destinataire du message c'est-à-dire, ne l'oublions pas, de l'objet vendu - est, me semble-t-il, plus avancée pour d'autres périodes que la nôtre. Georges Mounin, pour ne prendre qu'un exemple, à montré, il y a quelques années, comment les tableaux de crucifixion non seulement véhiculaient des informations (dont les traits pertinents sont relativement faciles à mettre en évidence), mais parce qu'ils étaient, de surcroît, destinés à émouvoir, à provoquer des réactions, des sentiments, rendaient plus complexe la sélection de ces traits pertinents, obligeaient à une prise en considération du récepteur (162)....
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Or, qu'en est-il pour la Grèce? Si les critères historiques et culturels (ceux que dicte la cité par exemple), si les goûts du moment, la mode, sont parfois évoqués, que sait-on de la clientèle du potier ? On connaît la théorie de l'image, divertissement des masses et instn1ction des fidèles, langage que chacun comprend, partage et communique, alors que les autres arts... musique, théâtre, littérature seraient le privilège de quelques Happy few... Mais est-ce bien vrai de la Grèce? C'est vrai sans doute de l'oeuvre des historiens et des mythographes - et encore ! - Certes ils "embaument" un savoir, mais à quelles fins? Celle peut-être de le transmettre plus largement... C'est bien peu vrai, en tout état de cause, du théâtre qui, comme nous le savons, était une fête de la cité tout entière. Dans ce cas précis il semble que le public - l'auditeur - soit mieux connu que les clients de tel ou tel potier. Les destinataires de vases peints étaient-ils athéniens? (et de quelle condition ?) Croyaient-ils aux mythes qu'ils avaient "achetés" avec leur poterie? Etaient-ils grecs, et de quelle cité? (quelles préférences étaient leurs quant aux dieux, quant aux héros et aux exploits qu'ils voyaient représentés sur leur vaisselle ?) Etaient-ils étrangers, étn1sques par exemple? (et on sait qu'ils le furent souvent !). Autant d'indices qui nous seraient précieux, à nous qui ne sommes pas les destinataires de ces images, à nous qui voyons les choses de si loin. Une "sémantique de l'image visuelle" peut-elle ainsi, en ce qui concerne la céramique grecque, se constituer de façon indépendante? Ne serait-il pas nécessaire de mener conjointement l'étude sociale des destinataires de ces images et même celle des courants de commerce qui emportèrent ces dernières sur tous les rivages de la Méditerranée? Peut-être serait-il alors plus facile de décrypter les messages brouillés qu'elles nous adressent? Constat de carence, hélas, pour l'instant et ce n'est pas nous qui, dans le cadre de cette recherche, pourrons mener à bien pareil programme. li semble cependant raisonnable de penser que, malgré les lacunes et l'aspect mouvant d'une documentation toujours susceptible de s'enrichir et de modifier les données du problème, malgré les incertitudes qui pèsent souvent sur le matériel ancien, une telle étude ne soit pas sans signification. Si nous prenons l'exemple des représentations du combat d'Héraclès contre Géryon sur 37 vases dont la provenance est connue (c'est-à-dire beaucoup plus de la moitié), 24 ont été trouvés en Etrurie (surtout à Vulci), 4 proviennent de
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Grande-Grèce et 3 de Sicile, alors que 6 seulement ont été utilisés en Grèce propre (163). Il paraît légitime de lire, dans cette écrasante disproportion, la volonté des potiers grecs de plaire à la clientèle occidentale, en lui offrant l'image d'un mythe "local" et sans doute fort populaire depuis que Stésichore l'avait chanté dans sa Géryonide. Faut-il en attribuer la responsabilité à Pisistrate et à ses désirs d'expansion vers l'Occident (164) ? La coïncidence chronologique est certes remarquable mais dans quelle mesure pouvait-il dicter leurs modèles aux peintres de vases ? Ce qui, en revanche, est incontestable, c'est que cet opportunisme commercial se nourrissait de la propagande des tyrans athéniens qui, on le sait, avaient fait d'Héraclès leur héros favori (165). Mais pour que de telles constatations prennent tout leur sens, c'est une analyse rigoureuse et systématique de toutes les représentations de la légende d'Héraclès dans la céramique qu'il faudrait conduire. D'autres, rappelons-le, l'ont entreprise. Plus modestement nous utiliserons le témoignage des scènes figurées en gardant à l'esprit cette égalité de statut, en tant que langage du mythe, de l'image et du texte ; leur relative indépendance (166), les lois d'évolution propres de l'une et de l'autre, la nécessaire exigence de prendre en considération le lecteur, l'auditeur, le spectateur - qu'il soit celui du théâtre ou celui de l'image -... bref le contexte historiquement daté, socialement et culturellement déterminé dans lequel (l'auteur lui aussi dépend de son milieu) et pour lequel, le texte, comme l'image ont été produits. Des mots et des images... Nous en userons conjointement et, si c'est du texte littéraire que se nourrit la substance de cette étude, c'est cependant l'image qui, nous le verrons, aura le dernier mot.
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IV - PERSPECTIVES Les grands mythes occidentaux d'Héraclès ont évolué dans le temps et dans l'espace, se sont investis dans des projets nouveaux. C'est dans ce sens que nous souhaiterions, d'abord, interroger ces récits laissés par une longue tradition, d'un héros confronté à ses derniers exploits "terrestres", près d'Océan, aux bornes du monde habité. Le poids de l'histoire, sorte d'écume des temps, nous choisirons donc de l'appréhender, d'abord, au terme de l'aventure, au moment où l'Héraclès grec va se désister en faveur de l'Hercule romain.
1 - Héraclès et l'écume des temps: l'enquête historique.
1.1 Enquête historique, et ajoutons-le géographique, car c'est à situer, dans la géographie des Grecs, le théâtre des travaux occidentaux d'Héraclès que nous nous attacherons d'abord. Sans doute n'accorderions-nous pas, dans cette étude, tant de place à la géographie, si, au-delà de toutes les traditions divergentes, le témoignage dHésiode et la version "défmitive" ne concordaient pas sur ce point. C'est au-delà de "l'illustre Océan" que le poète béotien situe le jardin des pommes d'or et les "Hespérides sonores" (167), au-delà de l'illustre Océan également que, "dans leur parc brumeux", Héraclès s'empare des boeufs de Géryon (168). C'est là, enfm, qu'à Lixos pour les Hespérides, à Gadès pour les troupeaux de Géryon, on finira par situer le mythe, non loin de ces colonnes qui, depuis longtemps, portent le nom du héros (169). Cette tradition est bien établie au 1er siècle après J.-C. et réputée d'origine grecque, mais, ni Strabon - qui s'excuse du "caratère merveilleux de ces récits" (170) -, ni Pline l'Ancien - qui rapporte "ces prodigieuses inventions des Grecs" (171) -, n'éprouvent malheureusement le besoin de citer leurs sources (172). Cette localisation des deux mythes, aux confins du monde habité procède d'un curieux esprit de symétrie. En témoignent les cartes qui tentent de donner une représentation figurée de l'oicouméM et qui, du monde d'Hécatée au monde de Strabon, traduisent, certes, le progrès des connaissances géographiques mais sans pour autant échapper à la catégorie des "cartes images" que G. Kish oppose aux "cartes instruments" des modernes (173). L'essentiel du schéma primitif subsiste en effet (174). La
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mer extérieure a, certes, remplacé le "fleuve puissant" qu'était l'Océan d'Homère (175) et c'est un monde moins circulaire qu'elle délimite, mais ce monde, comme autrefois, s'organise autour d'un axe intangible, sur lequel, de Gibraltar à l'Inde, les géographes mesurent désormais la plus grande largeur de l'oicouménè et sur lequel, depuis longtemps, on s'efforce de retrouver toutes sortes de correspondances : à l'Est par exemple, la limite des errances de Dionysos correspond aux bornes qu'Héraclès, à l'Ouest, avait lui-même placées à ses travaux (176). Or, sur ce "diaphragme" se trouvent le détroit de Gibraltar et les colonnes d'Héraclès (177). De part et d'autre de ces colonnes, Gadès et Lixos occupent une position extrême sur le méridien le plus occidental de la terre habitée: "Hominumfinem Gadis". écrit Silius Italicus, "terrarum finis Gades", répète-t-il (178). C'est donc, aux frontières du monde connu, une place pleine de signification qu'occupent Gadès et Lixos, théâtres des deux derniers exploits terrestres d'Héraclès. Pays verts, pays féconds où "les fruits de toutes sortes viennent sans culture et en telle quantité que partout les désirs sont rassasiés" (179), ces régions atlantiques brillent encore, pour les Anciens, de toutes les séductions des métaux rares, l'argent, l'étain, l'or peut-être et c'est - alors que nous pensions être sur le terrain confortable des "realia", de la géographie, des richesses naturelles -l'image d'un véritable "mirage occidental" qui finit par s'imposer, comme si, à ce niveau déjà, le mythe avait magnifié les très réels attraits de ces régions lointaines, théâtre des efforts d'Héraclès, certes, théâtre aussi des très historiques efforts des hommes pour en acquérir les richesses. 1.2. Sur ces marges occidentales du monde grec, nous rencontrons les traces de cette dévaluation "historiciste" du mythe dont il était question plus haut: pour certains auteurs modernes, en effet, ces épreuves lointaines du héros sont les dernières, non seulement parce qu'elles terminent sa carrière terrestre, mais aussi, et surtout, parce qu'ils les imaginent plus tard venues dans la geste d'Héraclès. C'est A. Schulten, peut-être, qui exprime le plus nettement cette opinion, lorsqu'il affirme que "la légende s'enrichit de trois nouveaux exploits quand les Phocéens arrivent à Tartessos" (180). Certes les Grecs d'Occident, qu'ils soient Rhodiens ou Phocéens - et c'est oublier le rôle des Chalcidiens (181) - ont certainement joué un grand rôle dans la diffusion du culte
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d'Héraclès et même de sa légende, voire dans la précision de certaines localisations (182), peut-être même dans l'attribution au cycle d'Héraclès du mythe des Hespérides; ils ont aussi - nous y reviendrons - profondément retouché le sens des exploits d'Héraclès, mais le voyage vers l'Ouest n'est pas né de la colonisation, puisqu'au moment où Phocéens et Rhodiens abordent ces rivages lointains, l'époque est passée où Hésiode chantait le triple Géryon et ses "boeufs à la démarche torse" qu'Héraclès le fort avait capturés "dans Erythie qu'entourent les flots" (183). D'ailleurs la localisation à Lixos et à Gadès des deux derniers exploits terrestres d'Héraclès invite à suivre une autre piste. Ces deux établissements sont en effet des fondations phéniciennes auxquelles la tradition attribue une grande ancienneté : ils seraient, avec Utique, les premières colonies de Tyr en Occident Gadès, ou plus exactement Gadir -en phénicien "l'enclos" (184) - aurait été créée vers 1110 avant notre ère (185), Utique peu après (1101) ; quant à Lixos, le souvenir précis de ses origines n'a pas été conservé, mais le périple d'Hannon, si on peut lui reconnaître quelque autorité (186), fait état des Lixites et Scylax, au milieu du Ne siècle, mentionne expressément la ville comme étant phénicienne (187). Pline, enfin, rapporte que près de Lixos un sanctuaire à Hercule passait pour être plus ancien que celui de Gadès (188). Nous interrogerons les archéologues pour nous faire une idée plus précise de ce qu'à la suite de W.F. Albright et de P. Bosch-Gimpera nous appellerons le "climax" des entreprises phéniciennes dans la Méditerranée occidentale, mais nous n'aurons garde d'oublier que, quelles que soient leurs conclusions quant aux établissements eux-mêmes, c'est à propos d'Héraclès seulement et non de la ville que Pline fait état des prétentions des Lixites à l'antiquité vénérable de leur sanctuaire (189) et que Pomponius Méla, de même, ne mentionne les fondateurs tyriens et l'époque de la Guerre de Troie qu'à propos de cet Hercule qu'il dit d'ailleurs "égyptien" (190).
1.3. Lixos et Gadès sont, en effet, des sanctuaires à Héraclès-Melqart et c'est l'histoire des religions que nous retrouvons au terme de cette étude de la localisation occidentale des travaux d'Héraclès; plus précisément encore, le problème du syncrétisme entre le héros grec et Melqart, le "Maître de Tyr" (B'L SWR) ou mieux encore le "Roi de la Cité", comme
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l'indique son nom (MLK QRT ou MLQRT) (191). Pour les historiens modernes il ne fait guère de doute, en effet, qu'en Occident les colonnes de Melqart ont précédé celles d'Héraclès, pas plus qu'ils ne contestent que, de ce pays miroitant de toutes les séductions, de ce pays de rêve, les Phéniciens, déjà, avaient fait une réalité. Lixos et Gadès symbolisaient leur réussite, toutes deux consacrées au dieu garant de leur succès. Melqart, en effet, les accompagne partout où ils s'installent, auprès des mines de cuivre de Chypre (192), à Thasos, plus intéressante par la proximité de l'El Dorado thrace que par ses propres gisements métallifères (193), en Sardaigne (194), peut-être même à Rome, en ce lieu de passage que fut très tôt le Forum Boarium (195). fi était avec eux, déjà, lorsqu'au IXe siècle ils fondèrent Carthage (196) ; bref, il est pour son peuple l'archégète, qu'est devenu aussi Héraclès et l'inscription bilingue de Malte (197) est du plus haut intérêt qui traduit: "Notre Seigneur Melqart, maître de ~or (Tyr) par 'HpaxAlk' ' ApXTlY&TTK" Où se fit la rencontre du dieu phénicien et du héros grec ? A Tyr, comme le veut J. Carcopino? ou à l'un de ces carrefours commerciaux fréquentés également par les Grecs? Dans ce pays de Tartessos où ils luttèrent d'influence avec les Phéniciens? A Thasos où les colons de Télésiclès, vers 720, trouvèrent l'archéologie le prouve - une ne déjà occupée? (198), à Chypre, enfin, selon l'hypothèse la plus probable? .... Une étude qui, on le voit, nous conduira, poussés par les vagues de l'histoire, d'une rive à l'autre de la Méditerranée.
2· Héraclès et le modèle absent de la cité : Le "Schéma structuraliste" Après avoir tenté de fixer le plus scrupuleusement possible, ce qui, dans le mythe d'un Héraclès occidental, pouvait être tributaire de la géographie et des grands remous de l'histoire, c'est le récit lui-même qu'il fallait interroger. Nous choisirons, pour ce faire, celui que donne Diodore de Sicile de la quête des boeufs de Géryon et du retour du héros, conduisant le troupeau conquis depuis la lointaine Ibérie jusqu'à l'Argolide. Véritable périple de la Méditerranée occidentale, l'expédition d'Héraclès vers l'île rouge de Géryon, le meurtre du tricéphale lui-même, ont
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pris pour Diodore un sens très clair: voyage vers l'Ouest, certes, mais surtout voyage "civilisateur" ; Héraclès y apparaît comme celui qui, partout où il passe, répand "les bienfaits de la civilisation" (199). C'est en effet ainsi que ce Grec d'Occident interprète les "pénibles travaux entrepris au profit du genre humain" (200) et il apparaît vite que cet ordre, qu'oppose ainsi le héros grec à la sauvagerie barbare, c'est celui de la cité... nature/culture; ordre/sauvagerie... Ces oppositions, bien sûr, rappellent avec suffisamment de force le "schéma" structuraliste pour que nous tentions de saisir dans quelle mesure et dans quelles limites il était possible de l'appliquer à l'étude du mythe d'Héraclès. Dans un réquisitoire très acerbe que dans L'homme et la Société (201) Laura Makarius dresse contre le structuralisme, elle fait remarquer que l'atout essentiel de l'anthropologie structurale est l'opposition société/nature... une opposition qui, ironise-t-elle, "offre l'utile ubiquité d'une dichotomie omni-présente". Or, et c'est sur ce principe que se fonde toute son argumentation, cette antithèse est radicalement étrangère à la pensée primitive: les structuralistes, en fait, "baptisent du terme de nature leur ignorance des faits ethnologiques". Un ensemble de notions antithétiques à société existe, certes, mais sous les formes de la violation de l'interdit social : l'opposition en question, loin d'être "structure inconsciente de l'esprit", serait donc, elle aussi, "issue d'une expérience collective entièrement déterminée par les conditions sociales". (La confusion naîtrait de ce qu'on se débarrasse de la souillure - imprimée par la violation du tabou - dans les forêts, sur les montagnes, dans les lieux lointains et isolés, bref hors de l'espace social). n faut souligner la pertinence d'une critique, qui, sur la base des observations de Dürkheim et de Mauss, peut aussi s'appliquer à la Grèce primitive: l'étude de la religion minoenne et mycénienne (et parallèlement l'étude du pouvoir à cette même ~poque) soulignent assez, effectivement, l'extraordinaire solidarité perçue entre la société/la nature/1'univers tout entier solidarité dont la religion grecque portera longtemps la marque d'ailleurs, ne serait-ce que dans la persistance de certaines pratiques comme celle de l'hiérogamie. La critique cependant paraît moins opérante lorsqu'elle s'adresse, par exemple, à l'interprétation qu'a donnée P. Vidal-Naquet de la cryptie lacédémonienne. Situant l'institution du côté de la nature, du "cru", l'historien en fait le symétrique de l'armée hoplitique, située, elle, du côté de la "culture", du "cuit" (202). Pour
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l'anthropologue, au contraire, les conditions de vie du crypte sont subordonnées à un fait principal : le meurtre des hilotes ; dans cette perspective son isolement est celui de l'être souillé par le crime, par la violation d'un tabou social. On peut certes objecter que nos sources les plus anciennes laissent dans l'ombre - ou ignorent - le meurtre des hilotes et que rien ne prouve, en conséquence, qu'il soit une donnée originelle. Point n'est d'ailleurs besoin de l'invoquer, il y a, nous semble-t-il et nous le verrons ailleurs (203), une raison beaucoup plus simple à la marginalité du crypte en ces temps primitifs. Et, en tout état de cause, il faut bien reconnaître que, quel que soit le bien-fondé des positions de principe de L. Makarius, quelle que soit la pertinence de ses réserves pour les temps primitifs, lorsque P. Vidal-Naquet l'envisage, c'est-à-dire lorsque l'usage, probablement plus ancien est récupéré, réinvesti par la cité, lorsqu'elle est devenue institution, la cryptie est bien telle qu'il l'analyse. Non parce qu'elle était telle à ses débuts, mais parce qu'elle porte la marque d'une structure nouvelle: celle de la cité. Peut-être faut-il faire remarquer, d'ailleurs, que loin d'être une structure de l'esprit celle-ci est, bien au contraire, le fruit d'une expérience à la fois économique, sociale et politique originale. Il reste qu'elle n'est en rien née de l'imagination du chercheur, comme semble le penser Laura Makarius. Nous sommes moins loin qu'il n'y parait de l'objet précis de notre étude, et, pour mieux apprécier encore la valeur opératoire de l'analyse structurale appliquée, cette fois, au mythe d'Héraclès, attardons nous un peu sur la lecture qu'il y a quelques années, donnait W. Burkert du mythe de Géryon (204). Trois thèmes s'associent, dans cette aventure d'Héraclès, celui du voyage dans l'au-delà, celui du combat contre le monstre, celui enfin de la capture du bétail... thèmes sans doute indépendants du point de vue narratif, remarque l'auteur qui se propose de trouver les raisons de leur interconnexion dans le mythe. Ces raisons, il les cherche d'abord dans une analyse structurale, confrontant le récit de Géryon et d'autres, qui, "avec certaines variations", manifestent une combinaison analogue des trois thèmes (mythe d'Hercule et de Cacus ; mythe d'Indra ; mythe de l'origine des Scythes). Mais qu'apporte à l'intelligence du mythe l'étude des parallèles envisagés ? L'interprétation d'Erythie comme une médiation "entre brillant et noir, entre ciel et terre" (p. 277) ne paraît guère éclairante et, si le problème de la "maîtrise des animaux" se pose effectivement, c'est en ajoutant une donnée aux termes de l'analyse structurale que l'auteur nous
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y conduit (205). Il reconnaît d'ailleurs lui-même qu'il faut "chercher plus profond" un principe unifiant qu'il trouvera finalement dans le rituel des peuples de chasseurs, en revenant, donc, à l'étude génétique. Et pourtant, malgré sa prudence de son pragmatisme, G.S. Kirk reconnaît que, s'il est un mythe qui supporte l'analyse structurale et justifie l'opposition nature/culture, c'est bien le mythe d'Héraclès (206). Tout notre effort portera précisément à démontrer comment et dans quelle mesure; toute notre attention se concentrera, dans la seconde partie de notre étude, à mieux comprendre le rôle de la cité dans cette nouvelle dimension donnée au héros. Car c'est bien la cité, pensons-nous, qui, organisant l'espace et la société, mais aussi l'univers mental des hommes de manière nouvelle, permet - ou creuse - cette opposition. Le mythe d'Héraclès, tel que le diffusent, tel que l'utilisent sans doute aussi les colons grecs d'Occident est d'abord et avant tout un mythe revu, reconstruit par la cité.
3· Héraclès entre le rêve et la réalité: Symbolisme et fonctionnalisme
3.1. Malgré l'existence de quelques variantes qui ont pu faire penser à une progression vers l'Ouest de l'aventure héracléenne (207), il est bien évident que le voyage du héros vers l'extrême Occident n'est pas une création coloniale. Hésiode, nous l'avons dit, sait que c'est "au-delà de l'illustre Océan" qu'Héraclès s'empare des boeufs de Géryon (208) et c'est là aussi qu'il situe le jardin aux pommes d'or (209), même si, à son époque, le mythe n'a pas encore rencontré le héros. Ce pays des "Hespérides sonores" il le place "aux frontières de la nuit", "aux limites mêmes du monde" (210). Peut-être n'est-il pas nécessaire de faire appel à son interpolateur qui, lui, dévoile plus clairement ce que sont "ces extrémités de tout" : "l'effrayante demeure de l'infernale nuit", certes, mais encore "la demeure sonore du dieu des Enfers, le puissant Hadès, et de Perséphone la Redoutable" (211). Une fois de plus nous retrouvons Héraclès aux frontières du monde des hommes, mais il s'agit cette fois de frontières mythiques, celles où le soleil disparaît - et dans certaines versions, Héraclès, pour s'y rendre emprunte la coupe d'or d'Hélios (212) -, celles où l'on passe du jour à la nuit, celles surtout, où l'on passe de la vie à la mort...
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Nous n'insisterons pas ici sur l'identité profonde, bien souvent soulignée (213), entre les représentations du pays des dieux, du pays des fruits merveilleux, de l'âge d'or et du pays des morts; nous ne reviendrons pas, non plus, sur le caractère infernal de Géryon le monstre tricéphale, symbole des puissances de la mort pour certains (214), bouvier des morts pour d'autres (215) ; nous rappellerons simplement la très belle étude d'A. Motte sur les prairies et jardins de la Grèce antique (216). Le À&\JL~v fameux d'Erythie où paissent les boeufs de Géryon, le xijnaç des dieux où poussent les pommes d'or offertes à Héra, lors de ses noces avec Zeus sont bien - et c'est pourquoi nous y reviendrons longuement dans notre quatrième partie - "des images exemplaires de la vie", mais pour cela-même, parce qu'elles peuvent s'offrir à l'imagination des Anciens "comme des foyers où se boucle le cycle de la génésis et de la phthora" (217), elles sont aussi "marquées d'un sceau funèbre" ... lieux où l'on rencontre la mort, lieux ouvrant sur la renaissance à un autre monde. De plus, l'île rouge de Géryon, l'île du soleil couchant, et le pays des Hespérides, ces nymphes du soir, sont "aux extrémités de tout", "aux frontières de la nuit"... aux frontières de Nuit, la Divine, la Redoutable, la mère des Hespérides, mais aussi des Kères et des Moires à qui, chez Hésiode, elles sont associées, la mère, encore, d'Hypnos et de Thanatos, souvent représentés ensemble auprès des morts de l'épopée homérique (218). Ce sont bien des "portes du soir" qui par deux fois sont le théâtre des derniers exploits terrestres d'Héraclès, deux seuils où se croisent Jour et Nuit, où le sommeil et la mort peuvent surprendre... La prairie d'asphodèles, "où habitent les ombres, fantômes des défunts", n'est-elle pas déjà, chez Homère, située par-delà le cours d'Océan, non loin des portes du soleil (219) ? Et justement, que nous apprend Homère d'Héraclès? De ses "gémissants travaux" imposés par Eurysthée et menés à bien grâce à l'aide constante d'Athéna, un seul, mérite, nous l'avons vu, d'être rapporté: la capture de Cerbère, le chien des Enfers, la victoire d'Héraclès sur Hadès (220).. Hadès que d'ailleurs, il avait blessé "à Pylos, au milieu des morts" (221). De plus, si, dans l'Iliade, le héros vaincu par "le cruel courroux d'Héré" n'échappe pas lui-même à la mort (222) et si, dans la Nekyia, Ulysse l'entrevoit "ombre au royaume des morts", Homère paraît savoir, dans l'Odyssée, que le véritable Héraclès séjourne parmi les Immortels "dans la joie des festins" (223), seul héros à avoir vaincu la mort, à être admis au rang des dieux.
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Ce thème du héros vainqueur de la mort peut, à bon droit, paraître fondamental. C'est avec lui, très certainement, quelque chose qui tient de la perennité du mythe que nous atteignons. L'insistance même avec laquelle les Grecs l'ont repris, au profit d'Héraclès, sous des formes différentes le prouve (224). Elle prouve aussi de quel poids pesait cette angoisse. Et, tout à coup, l'utilisation d'un passé et la spécification à la Grèce deviennent gênantes. Ce sont là non seulement les inquiétudes d'une culture, mais celles de l'humanité tout entière... Ici l'historien semble devoir s'effacer devant le psychanalyste, le philosophe... le théologien peut-être, à moins qu'il ne se fasse lui-même psychanalyste... philosophe... théologien... De toute façon il n'évitera pas une explication de type symboliste. Mais celle-ci suffIra-t-elle 1 ne doit-il pas l'inscrire à son tour dans le contexte grec : tenter de cerner au plus près la façon dont s'est traduite cette préoccupation universelle dans l'univers particulier des Grecs... voir, enfin, la signification sociale qu'ont pu prendre de telles représentations 1 On nous pennettra de ne choisir parmi tous ces symboles qu'un seul exemple: l'épisode de Géryon et de ses boeufs dérobés. Plus tôt lié au cycle du héros que celui des Hespérides, puisqu'attesté dès le VIlle siècle dans la littérature et au siècle suivant dans l'art (225), il est aussi mieux connu, non seulement en Occident où la Géryonide de Stésichore ne pouvait manquer de le répandre (où peut-être il rencontre des traditions locales avec lesquelles il pouvait se confondre), mais encore dans la Méditerranée orientale, à Chypre par exemple, où le thème est très populaire (peut-être parce que, grâce à Melqart et aux Phéniciens, les contacts avec la lointaine Ibérie furent de bonne heure très vivants). Plusieurs représentations sculptées du monstre tricéphale en proviennent en effet (226), et, bien sûr, le très beau bas-relief de la collection Cesnola qui, sur deux registres oppose Héraclès (vêtu d'une peau de lion à longue queue rappelant celle de Bès) à Eurytion le berger et à Orthros le chien - ici à trois têtes - de Géryon (confusion avec Cerbère ou peut-être avec Géryon lui-même 1). Près du berger, s'éloigne, en rangs pressés, le fameux troupeau (227). Avec cet épisode, nous avons l'impression - nous y reviendrons - d'être en présence, non pas d'un motif surajouté, capté par un héros dont le succès attire à lui traditions, interprétations, voire réflexions nouvelles, mais d'une coïncidence très forte entre la matière mythique et, peut-être, la réalité profonde d'Héraclès. Le thème est, de plus, particulièrement riche, puisqu'il concentre les deux aspects du
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chthonien: celui qui tient aux couches superficielles de la terre celles qui donnent les récoltes, celles qui donnent l'abondance et celui qui a pour lieu la terre en ses profondeurs - celle qui retient les morts, celle qui est le domaine d'Hadès - (le double aspect, des Leimones d'Erythie qui nourrissent des troupeaux fabuleux et sont défendus par des monstres infernaux), mais il possède aussi cette troisième dimension - pourrait-on dire - de l'inconnu, cette troisième profondeur (228) qu'est le "nocturne" sur laquelle ouvre aussi Erythie, l'Ile du soleil couchant avec ses "brumeux" paturages.
3.2. Image mythique certes, que celle de ces prairies, de ce gardien infernal, de ces troupeaux en qui H.J. Croon veut voir les âmes des morts (229). Mais ce monstre dont triomphe Héraclès est, chez Hésiode, et dès ses premières représentations, un monstre tricéphale, et, dans ce combat contre l'adversaire triple, très tôt, G. Dumézil devait reconnaître une épreuve initiatique des jeunes guerriers indo-européens (230). Poursuivant cette voie, B. Lincoln admet à la suite de W. Kirfel, que, si le tricéphale est une figure majeure du panthéon des peuples pré-indo-européens de l'Inde et du domaine méditerranéen, il ne figure jamais dans celui des Indo-Européens eux-mêmes, il est l'aborigène, l'autochtone (et les auteurs reconnaissent là que sa monstruosisté même en fait un être en étroite relation avec la terre). "He is the aborigine, uncivilized and bound to his land, who opposes the lE. invader and meets defeat at his hands... The description of the tricephal's defeat is thus the description of the Indo-European victory". Le jeune initié, dans son combat, retrouve ces temps primordiaux, redevient Trito, le héros, le premier guerrier "and he assimilates himself to the entire lE. onslaught that overthrew aboriginal opponents in every corner"... (231). Nous avons laissé à l'auteur la responsabilité de ses écrits, car, si l'existence de l'épreuve initiatique ne pose guère de problèmes, la signification qui lui est donnée ici paraît suspecte, et cela pour plusieurs raisons: d'abord parce qu'on peut douter des prémisses du raisonnement, parce qu'ensuite, l'auteur donne d'Hésiode (Théogonie, 287-294) une lecture pour le moins étonnante, faisant de Géryon lui-même le meurtrier d'Eurytion et d'Orthros (la grammaire ne s'y oppose pas, dit-il, et le mythe est ainsi plus en accord avec le prototype indo-européen... raisons qu'on peut trouver un peu légères pour bouleverser une tradition aussi bien établie); parce qu'enfm le raisonnement paraît quelque peu vicieux : si Trito est le héros guerrier proto-indo-européen
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(232), comment son combat peut-il représenter la conquête indo-européenne, la victoire sur l'autochtone, où qu'il soit..? serait-ce alors une préfiguration? il Ya là plus qu'un problème. Si l'on tient compte, d'ailleurs, du scénario initiatique partout où il est pratiqué, le combat contre le monstre prélude souvent à cette mort fictive qu'est l'initiation (lorsqu'elle n'en est pas la manifestation même), le jeune homme qui s'y soumet devant renaître à un état nouveau (233). La rencontre du monstre infernal et des pratiques rituelles intégrant les adolescents à la société des adultes paraît assez logique et, quelle que soit la signification du mythe à l'époque historique, à l'époque de la colonisation, il nous paraît difficile de faire ainsi de Géryon, dès l'origine, le symbole de l'autochtone barbare! En revanche l'existence attestée de ce tricéphale indo-européen, et la signification initiatique du combat qui l'oppose au héros, nous paraissent du plus haut intérêt pour expliquer, peut-être, le succès du culte d'Héraclès en Occident, et, en particulier, chez les peuples italiques. On peut voir dans le mythe de Cacus une création assez tardive, une fable "née à Rome d'imaginations grecques" (234), on peut-être sensible au fait que, chez Properce seulement, Cacus est un monstre à trois têtes (235), mais on peut également mentionner la tradition indigène, qui attribue la victoire sur Cacus à un héros local nommé "Recaranus"... (236) : un" tricaranos", et les stèles dauniennes, étudiées par S. Ferri, représentent des monstres infernaux qui pourraient très bien se rapporter au mythe indo-européen du 'Tpueapavo," : parmi ces stèles, un Héraclès à trois cornes de l'époque archaïque... (237). Le héros, ainsi, aurait attiré à lui un vieux mythe italique probablement d'origine indo-européenne. Quant à la signification - ou à l'utilisation - initiatique du mythe, elle explique peut-être, non seulement les multiples "épreuves" du héros, mais encore les liens qu'il entretient avec l'initiation des jeunes gens. Le témoignage de Diodore sur Agyrion est, à ce titre, extrêmement précieux. Après avoir été pour la première fois honoré comme un dieu par les Agyréens et avoir laissé chez eux de nombreuses traces de son passage, il consacre deux enceintes - encore vénérées par les indigènes à l'époque de Diodore - l'une au "héros Géryon", l'autre à Iolaos son neveu "et compagnon d'armes" à qui, - sous peine de devenir muets - les enfants doivent faire l'offrande de leurs chevelure. Nous aurons, bien sûr, l'occasion de revenir sur ce rituel sicilien dont la signification est assez claire et nous verrons que ce lien d'Héraclès et des pratiques initiatiques n'est pas un
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"accident" dans ses aventures occidentales et qu'en Grèce même survivent quelques vestiges du rôle qu'aurait pu jouer Héraclès dans l'intégration sociale des jeunes gens (239). Faut-il alors interpréter le mythe de Géryon, et même tout le personnage d'Héraclès comme une représentation de la fonction guerrière chez les Indo-Européens ? C'est ce qu'a tenté G. Dumézil (240) en montrant comment l'histoire du héros était jalonnée par trois épisodes "idéologiquement solidaires", trois "péchés" du guerrier et la "punition" qu'ils entraînent: l'hésitation à accomplir les travaux imposés par Zeus, sanctionnée par la folie que lui envoie Héra (manquement à la première fonction) ; la ruse contre Iphitos, frère d'Iole et fils d'Eurytos (infraction au code de l'honneur du guerrier, en réparation de laquelle il doit, pour retrouver la santé, se vendre comme esclave chez Omphale) ; enfin l'installation, qu'il envisage, de Iole dans son propre foyer, "péché" contre la troisième fonction, cette fois puni par la mort... Mais les excès d'Héraclès me paraissent dépasser largement ces "accidents" ainsi expliqués dans le cadre de la trifonctionnalité indo-européenne (241) ; la construction, d'autre part, s'applique à la légende plus qu'aux mythes primitifs, et surtout au personnage du héros plus qu'à ses actes essentiels: ces athloi qui semblent bien être, et dans la tradition et dans la logique, l'essentiel. Qu'Héraclès, en revanche, ait capté à son profit ce schéma mythique, qu'il soit devenu le prototype du guerrier et même du guerrier indo-européen, c'est trop évident, puisque pour les Grecs eux-mêmes il a fini par devenir le héros dorien par excellence (242). Il n'est pas jusqu'au thème du "vol" des troupeaux de Géryon qui ne porte la marque des sociétés indo-européennes. Sur ce point B. Lincoln remarque fort justement, non seulement l'extraordinaire importance du bétail dans la vie économique de ces sociétés pastorales, mais aussi, et c'est sans surprise, dans leurs représentations idéologiques (243). Ainsi, sans accompagner B. Lincoln jusqu'au bout de sa démonstration et sans admettre que le vol des troupeaux de Géryon soit la version grecque du "prototype" établi par Trito pour ses descendants indo-européens (244), il n'est est pas moins certain qu'un des éléments de son succès fut, outre l'importance considérable de l'élevage chez les Indo-Européens, l'utilisation initiatique, et peut-être didactique, qu'ils ont su faire d'un mythe qui, à bien des égards, semble antérieur à leur arrivée en Grèce.
3.3. Ce qui frappe, en effet, c'est l'adéquation étroite qui
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existe entre le mythe et le héros. Depuis J. Bayet, on connaît bien le caractère assez particulier d'Héraclès en Italie méridionale. Il apparaît comme garant de l'abondance pour les agriculteurs avec un· aspect apotropaïque fortement marqué : à Métaponte il est destructeur de sauterelles (comme d'ailleurs en Grèce dans la région de l'Oeta où on le nomme xopvon lwv) ; à Crotone il chasse les mouches; entre Locres et Rhégion il est l'ennemi des cigales; un Héraclès-bouvier est d'ailleurs plus particulièrement connu en Campanie sur le territoire de Rhégion et, près de Crotone, étroitement uni à Héra Lacinienne, il protège avec elle les troupeaux bovins (245)... Si l'on quitte l'Italie grecque, ce caractère paraît s'affIrmer à Rome, que ce soit dans le mythe (greffé sur le récit du retour du héros avec les boeufs arrachés à Géryon, et lui-même victime d'un vol de bétail), dans la localisation des cultes, sur le Forum Boarium ; dans le rituel peut-être, s'il est vrai que la dîme, dont la tradition fait un usage très ancien, ait pû être, au départ, une offrande pastorale au dieu assurant la sécurité des échanges. Offrande sans doute consommée dans un repas rituel (246). Plus encore que l'Hercule romain, vite détourné de ses préoccupations pastorales par la croissance de la ville et son avenir de dieu offIciel, l'Hercule adopté par les populations italiques (singulièrement dans les régions montagneuses de l'Italie centrale) garde très fortement ses attaches populaires, comme en témoigne l'extraordinaire diffusion des petits bronzes le représentant, et ce dès l'époque "archaïque", les VIe-IVe siècles av. J. -Co (247). Or, lorsque l'étude des découvertes est conduite avec précision - comme pour le territoire des Paeligni, par exemple - elle démontre la présence du dieu dans "les endroits fréquentés essentiellement par les bergers... près d'une source ou d'une fontaine, lieu de repos pour les troupeaux", ou encore dans "ce centre de rencontre des agriculteurs de la vallée et des bergers des montagnes environnantes" qu'est Corfmium (248). Emprunt aux divinités, aux génies indigènes qui l'ont précédé... ou affinité ayant pu, elle-même favoriser l'association? C'est bien plutôt ce que nous pensons. En Orient certains rapprochements ont fort bien pu se faire sur des bases voisines : nous ne traiterons pas ici d'un problème sur lequel nous souhaitons revenir plus longuement (249), mais les représentations fIgurées - notre élément le plus ancien jusque là polU' attester du syncrétisme avec Melqart, toujours assez obsclU' prouvent le rôle qu'a pu jouer un Héraclès "noTvl~· ).eOVTCI)V· (250), comme l'était Bès, le dieu égyptien représenté à Chypre
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dès la période du bronze récent, comme l'était encore Gilgamesh, dont la légende présente tant de points communs avec celle d'Héraclès, comme l'était le Babylonien Nergal, par exemple, tueur de fauves et roi des Enfers (251). Maître cres fauves, le dieu, ou le héros, n'est-il pas le protecteur naturel des troupeaux (252). Cela apparaît très clairement en tout cas dans cette "vulgate" du mythe héracléen qu'est le texte d'Apollodore : le héros qui grandit auprès des troupeaux de boeufs d'Amphitryon tue son premier lion - celui du Cithéron - parce qu'il ravageait le bétail de son père (253); la plupart de ses "travaux" sont présentés comme une protection des champs, mais surtout du bétail des propriétaires du Péloponnèse et, tout au long de son histoire, les épisodes qui l'associent - ou l'opposent - à des bouviers sont légion... jusqu'à sa fin sur l'Oeta, puisque c'est encore un berger, venu chercher ses troupeaux qui, seul, accepte d'allumer le bûcher qu'il s'est fait préparer (254). Enfin, puisque nous avons retrouvé la Grèce, revenons aussi au mythe de Géryon. Héraclès, certes, rapporte à Eurysthée les boeufs arrachés à leur monstrueux gardien, mais c'est à Héra qu'ils seront finalement consacrés (255). Héra, la grande déesse d'Argos, Héra que des liens très forts - aussi bien dans l'étymologie que dans le mythe - unissent sans doute à Héraclès, avant qu'ils ne l'opposent à ce fils, né d'une infidélité de Zeus (256).... Et c'est pour elle, déesse de la terre riche en boeufs, pour elle dont la fête principale était les Hécatombaia, que le héros rapporte le fabuleux bétail de Géryon.
Enquête historique, perception du schéma structuraliste, conscience de la fonction qui fut, à un moment ou à un autre, celle du mythe pour les sociétés qui l'ont porté, prise en compte de sa prégnance symbolique... Autant d'approches qui - on voudrait en avoir convaincu le lecteur - non seulement ne s'excluent pas, mais participent de la même volonté de saisir le mythe comme un "tout" (257), de prendre conscience d'une polysémie qui lui est propre, de comprendre, aussi, comment son évolution dépend, en dernière analyse, de l'histoire. Peut-être faut-il, ici, lever une équivoque? Si, dans la ligne de notre étude méthodologique, nous avons tenu à présenter séparément ces niveaux d'intervention, il est bien évident qu'il y a là quelque artifice. Le mythe signifie et enseigne tout à la fois ; et
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c'est à tout moment, aussi, que l'histoire le charge d'une force nouvelle. Seule l'explication structuraliste nous a paru cofncider avec un moment précis: celui où le discours mythique est pris en charge, "structuré" (nous tenons à la répétition du terme) par la cité. Nous n'irons pas plus loin, mais il nous semble qu'il y a là matière à douter quelque peu de la valeur universellement opératoire d'une méthode... Cela d'autant plus que le mythe d'Héraclès dans la cité plus que jamais "fonctionne", intègre, utilise des héritages, resémantise, joue à la fois des permanences et des dérivations, bref plus que jamais nous paraît requérir cette approche multiforme que nous avons tentée.
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NOTES DU PROLOGUE
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FONTENELLE, De l'origine des Fables, éd. G.B. DEPPING, t. II. Genève 1968 (réimpression de l'édition de 1818, Paris), p. 398. Fontenelle poursuit d'ailleurs : "Tous les hommes se ressemblent si fort qu'il n'y a point de peuple dont les sottises ne nous doivent faire trembler". Cl. MElTRA, Saturne ou l'herbe des dmes, Paris, 1981, p. 21. Sur la place de ces deux mythes, dans la série des travaux d'Héraclès, voir le tableau I. Disons sommairement ici qu'ils occupent généralement les lOe et Ile places, avant la descente d'Héraclès aux Enfers, d'où le héros doit ramener le chien Cerbère. HÉSIODE, Théogonie, 173-275; 517-519. Contrairement à ce qu'affIrme DORRBACH, in,DAGR, III, 1, S.v. Hercules, pp. 78-128. On trouvera dans V. BÉRARD (De l'origine des cultes arcadiens, Paris, 1894, pp. 27-28) et O. GRUPPE (Die griechische Mythologie und Religionsgeschichte, 1906, 1, pp. 450-501 et R.E., Supl. III, 1918, V, col. 910-1121) la discussion des hypothèses "indianistes" et "linguistiques" de l'école de Kuhn et Max Müller. On verra dans O. MÜLLER et surtout U. von WILAMOWITZ (Euripides Herakles, 1889, 1895, 1909, et nouvelle édition, Darmstadt, 1959) l'exposé de la théorie "dorienne" d'ailleurs quelque peu modifIée dans Der Glaube der Hellenen de ce dernier auteur, théorie reprise par B. SCHWEITZER (Herakles, Tübingen, 1922) qui cherche du côté des Doriens "indegermaniques" l'origine du héros. J.E. HARRISSON (Themis, 1912, pp. 363-381) offre une opinion plus nuancée des origines d'Héraclès, en qui, cependant, elle souligne surtout l'aspect chthonien. Les plus anciennes théories sont exposées par DORRBACH ( DAGR., III, 1 s.v. Hercules, pp. 78-124) et par M DELCOURT, Ugendes et cultes des héros en Grèce, Paris, 1942, pp. 119-120. La théorie "solaire" des douze travaux d'Héraclès a été reprise par L. DRESS, Der Ursprung der olympischen Spiele, Stuttgart, 1962 et critiquée par P. LEVEQUE, Des dieux et des jeux d'Olympie, REG, LXXXVII, 1974, pp.
341-344. 7-
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J. BAYET, Hercule Funmure, Mélanges d'archéologie et d'histoire, 39 (1921-1922), pp. 219-266 et 40 (1923), pp. 19-102, repris dans Idéologie et plastique, Paris-Rome 1974, pp. 199-330. M. DETIENNE, Héraclès, héros pythagoricien, RHR, 1960,2, pp. 19-53; cf. aussi J. CARCOPINO, Les origines pythagoriciennes de l'Hercule romain, dans Aspects mystiques de la Rome pafenne, Paris 1941.
65 A Gadès, à Rome et à Thasos selon D. VAN BERCHEM, Sanctuaires d'Hercule - Melqart, contribution à l'étude de l'expansion phénicienne en Méditerranée, dans Syria, XLIV, 1967, pp. 73-109 et 307-338. Cf. aussi R. REBUFFAT, Les Phéniciens à Rome, MEFRA, LXXVIII, 1966, l, pp. 7-48 10 - C'est, semble-t-il, l'une des orientations de l'analyse du système sacrificiel opérée par le Centre de Recherches comparées sur les sociétés anciennes des Hautes-Etudes. Cf. M. DETIENNE dans La cuisine du sacrifice en pays grec, Paris, 1979, p. 13. Le thème d'Héraclès "victime récalcitrante" du sacrifice organisé par Busiris est encore évoqué dans L'invention de la mythologie, Paris, 1981, du même auteur, pp. 100-101. Cf. désormais, J.L. DURAND, Sacrifice et labour en Greee ancienne, Paris, Rome, 1986, singulièrement. chap.
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J. BOARDMAN, Peisistratos and Sons, RA 1972, l, pp. 57-72, et, du même auteur, Herakles, Peisistratos and Eleusis, JHS, XCV, 1975, pp. 1-12 ou encore Heraldes Delphi and Kleisthenes of Sikyon, RA, 1978,2, pp. 227 sq. En ce qui concerne Rome, Cf. R. SCHll..LING, L'Hercule romain en face de la réforme religieuse d'Auguste, RPh, 1942, pp. 31-57 ; P. M. MARTIN, Héraclès en Italie d'après Denys d'Halicarnasse, Athenaeum, L, 1972, pp. 252-275 ; M. JACZYNOWSKA, Le culte de l'Hercule romain au temps du Haut-Empire, ANRW, II, 17, 2, 1981, pp. 631-661 et tout récemment, M.A. LEVI, Roma Colonia e Commodo Conditor, Colloque de Bressanone, (oct. 1981) Religione e città nel monda antico, Rome, 1984, pp. 315-320. J. BAYET, Les origines de l'Hercule romain, Paris, 1926. M. SIMON, Hercule et le christianisme, Paris, 1959. Cf. en particulier, F. BROMMER, Herakles, Die rwlJlj Tatelt des Helden in anti/cer Kunst lUId Literatur, MOnster-Cologne, 1953-1972 et du même auteur Vasenlistelt zur griech. Heldeltsage, 1960 (2) DenJaniJlerlisten zur Heldensage, l, Heraldes (1971). C'est pourtant le dactyle idéen qui est censé avoir fondé les jeux en l'honneur de son père à Olympie (cf. DIODORE, V, 64, 3·7 ; STRABON, VIn, 3, 30 - qui d'ailleurs rejette cette tradition - ; PAUSANIAS, V, 7,6-7) et sur le même site, les dimensions exceptionnelles du stade, tracé par Héraclès, auraient permis à Pythagore de calculer la taille du héros, elle aussi exceptionnelle (AULU-GELLE, après Plutarque, Les Nuits attiques, l, 1). Cf. J.-P. VERNANT, La personne dans la religion, dans Mythe et pensée chez les Grecs, Paris, 1969 (le éd.) p. 278 : "Ce qui le définit (le héros) au sein même de son destin d'homme, ce sont les actes qu'il a osé entreprendre et qu'il a pu réussir: ses exploits. L'exploit héroYque condense toutes les vertus, et tous les dangers de l'action".
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lliade, XVIll, 115-118. lliade, XIX, 98-133. C'est elle qui, retardant la naissance d'H&aclès, le soumet à Eurysthée (cf. supra note 18) ; à son retour de Troie, elle suscite une tempête pour le perdre (Iliade, XIV, 249-262) ; elle est à son tour blessée par "le trait à trois arêtes" d'HUaclès (Iliade, V, 392-394). Iliade, V, 638-643 et XIV, 249-262. Déjà mentionnés en XIX, 131-133. Iliade, VITI, 360-369. Nous disons bien "le seul... qui soit jugé digne d'être rapporté" et non pas le seul à être connu. Nous reviendrons sur ce problème plus tard. Cf. pp. 460sq. a) Odyssée, VIII, 223. Ulysse se vante de son habileté à tirer à l'arc, mais ne prétend pas égaler les anciens héros "tel Héraclès et tel Eurythos d'Oechalie ; car ceux·là c'est les dieux qu'à l'arc ils égalaient". Remarquons que, de même que dans l'Iliade, l'arc est donné comme l'anne caractéristique d'Héraclès. b) Odyssée, XXI 24-30 (épisode d'Iphitos tué par Héraclès). Le passage est jugé comme étant une interpolation: les vers 15 à 41 du chant XXI en effet mentionnent Messène que le poète, et pour cause, ne pouvait connaitre. Il peut paraitre curieux également qu'Ulysse rencontre une future victime d'Héraclès, lequel est déjà pour lui un héros. c) Odyssée, XI, 601-626. C'est, encore une fois, en archer qu'Héraclès apparaît à Ulysse dans la "maison d'Hadès". Là encore V. BÉRARD (Les Belles Lettres, 1924) dénonce l'interpolation reconnue dès les Alexandrins, mais contestée encore de nos jours. Cf. J.T. HOOKER, The apparition of Heracles in the Odyssey, LCM, 1980, pp. 64-67. Cf. sur ce problème J. PEPIN, Héraclès et son reflet dans le néoplatonisme, dans, Le Néoplatonisme. Actes du Colloque de Royaumont (9-13 juin 1969), CNRS, 1971, pp. 167-192. Odyssée, XI, 602-604. Iliade, VI 146-150 : "Comment naissent les feuilles, ainsi font les hommes; les feuilles tour à tour, c'est le vent qui les épand sur le sol et la forêt verdoyante qui les fait naitre, quand se lèvent les jours du printemps, ainsi des hommes : une génération nait à l'instant même où une autre s'efface". Cf. W.K.C. GUTHRIE, Les Grecs et leurs dieux, traduction française de S.M. Guillemin, Paris, 1956. L'auteur pense qu'on a voulu "faire concorder ici deux traditions différentes et expliquer la plus nouvelle dans les termes de l'ancienne" ; "cet effort", ajoute-t-il, "n'a pas été absolument couronné de succès". HÉSIODE, Théogonie, 950-955. Hésiode rapporte également la naissance d'Héraclès, ms d'Alcmène "unie d'amour à Zeus assembleur
67 des nuées" (943-944), et, au hasard de ses généalogies, quelques uns des travaux imposés au héros: la lutte contre "Géryon aux trois têtes" (287-294 et 979-983) ; contre l'hydre (312-318) ; contre le lion de Némée (327-332) ; la délivrance de Prométhée (526-534). 29 - "Ce héros, ce dieu..." disait déjà Pindm'e, Néméennes, III, 22. Nous aurons à revenir sur les théories des auteurs postérieurs. 30 - W.K.C. GUTHRIE, op. cit., p. 264. 31 - Nous n'avons pas l'intention de traiteJ' ici de la "question homérique". Nous parlerons d'Homère comme l'a toujours fait une tradition qui cependant· et cela, dès les Alexandrins· doutait de l'existence d'un seul auteur. Nous tiendrons pour acquise l'antériorité de l'lliode par rapport à l'Odyssée (une génération, environ, séparerait les deux poèmes composés selon l'opinion la plus couramment admise vers le milieu du VIIIème siècle pour le premier, à la fm de ce même vmème siècle • peut-être même au début du Vllème • pour le second). De plus grande impŒtance nous paraît être le problème du témoignage homérique. Nous ne sommes pas convaincue par la théorie bien connue de M.I. FINLEY, pour qui le monde homérique ne représente ni Mycènes, ni la Grèce des VIIIe.vne siècles, mais la société· déjà assez lointaine pour être magnifiée • qui suit les invasions doriennes : celle des Xème-IXème siècles. (Sur ce point voir la critique de P. VIDAL-NAQUET, Homère et le monde mycénien, AlUUJles E.S.C., 1963, p. 703 sq.). Nous insisterons, quant à nous, sur la complexité d'un témoignage où se mêlent des souvenirs de différentes époques, où la poésie et la fiction ont également leur part. Sans épiloguer ici - ce n'est guère le lieu de le faire - sur la composition de l'Iliade et de l'Odyssée il nous paraît nécessaire de rappeler qu'à la source des poèmes homériques • qui ne seront finalement rédigés qu'au VIème siècle· se trouve une longue IJ'adition de poésies épiques d'oogine et de date probablement fort différentes. Nous reviendrons plus tard sur ce problème capital pour nous, de la poésie orale (Cf. infra pp. 43-45), nous voudrions simplement inclure dans cette problématique la question des "interpolations" qui ne nous paraissent pas devoir jeteJ' la suspicion sur un texte, mais parachever ce lent travail d'élaboration ; et, s'il faut tenir compte du décalage chronologique qu'elles introduisent peut-être· qu'il est parfois possible d'évaluer d'ailleurs nous dirions volontiers, comme L. GERNET qui proteste contre la tentation d'éliminer ces fragments: "comme si "Homère" ne consistait pas, pour une bonne part, en interpolations" 1 (Delphes et la pensée religieuse en Grèce, AlUlQ/es. X, 1955, pp. 526-542, repris dans Les Grecs sans miracle, Paris, 1983, p. 224). En ce qui concerne Hésiode, on peut abandonner la chronologie haute encore adoptée, par exemple, par J. Carcopino, Le Maroc antique, Hème édition, 1943 (IXème siècle) et admettre, avec HUodote, qu'il fut "contemporain d'Homère" ;
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son oeuvre serait à situer entre le milieu du VIlle siècle et le début du Vllème siècle, M.L. West, dans son édition de la Théogonie le place dans le dernier tiers du VIIIème siècle. (Hésiod. Theogony, Oxford, 1966, 1971) et c'est cette datation que nous retiendrons. APOLLODORE, Biblioth~que, II, V, Il ; Apollodore mentionne aussi la tradition selon laquelle Héraclès aurait lui-même cueilli les pommes d'or des Hespérides. Scholie à APOLLONIOS, IV, 1396. "Atlas, ayant donné à Héraclès le ciel à porter sur ses épaules, alla vers les Hespérides, en recut les pommes et revint vers Héraclès; mais il lui dit qu'il porterait lui-même les pommes à Eurysthée pendant qu'Héraclès continuerait de porter le ciel à sa place. Héraclès - qui le lui avait promis - remit pourtant Ouranos sur la tête d'Atlas, grAce à une ruse que lui avait conseillée Prométhée: il pria Atlas de reprendre le ciel jusqu'à ce qu'il eût fait un coussin pour mettre sur sa tête". Nulle trace ici, cependant, d'une quelconque hostilité entre les deux personnages; Atlas semble se conduire en partenaire désintéresé. Cf. aussi, pour la céramique, E. SELLERS, Three attic lecythoi from Eretria. JHS, xm, 1892-1893, pp. 1 à 12 et pl. xm. PAUSANIAS, V, 18,4. C'est une version plus dramatique qui est représentée sur le coffre : Héraclès marche contre Atlas l'épée à la main. Pour la datation, cf., résumant les autres interprétations: E. Will, Korinthiaka, Paris, 1955, p. 412. Cf. aussi PAUSANIAS VI, 19, 8, pour les sculptures de Théoclès qu'avaient consacrées les Epidamniens à Olympie et V, Il,5, pour les peintures des balustrades qui entouraient le IrOne de Zeus. EURIPIDE, Héracl~s, 404-408. EURIPIDE, Héracl~s, 395 sq. Cest cette version d'Héraclès vainqueur du dragon que retient aussi SOPHOCLE, Trachiniennes, 1099-1100. c'est encore elle que reprendront APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, IV, 1396-1407 et QUINTUS DE SMYRNE, VI, 255-260, qui s'en inspire sans doute dans sa description du bouclier d'Eurypyle. L'effroi des Hespérides n'est, en effet, pas habituel, et c'est plus tardivement que dans l'iconographie elles sont représentées en spectatrices non plus bienveillantes, mais épouvantées de l'exploit d'Héraclès: cf. P. LÉVEQUE, Un fragment inédit de la frise du théâtre de Delphes, BeH, LXXIV, 1950, pp. 224-232. Pour un commentaire de ces différentes traditions, voir notre quatrième partie. DIODORE DE SICILE, IV, 27. J. CARCOPINO, Le Maroc antique, Il éd., 1943, pp. 70-71. U. VON WILAMOWITZ, Euripides HeraJcles, op. cit., Commentaire au vers 394, pp. 303-309. APOLLODORE, Bibliothlque, II, V, 11. Un épisode vient, parfois, se greffer à cet endroit de la légende, celui
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d'Héraclès assailli par les Pygmées qu'il retient prisonniers dans la dépouille du lion de Némée: cf. DORRBACH,loc. cit., p. 96 et note 5. Emathion était roi d'Ethiopie suivant DIODORE DE SICILLE (IV, 27). Nous reviendrons, bien sûr, sur cet itinéraire dans notre quatrième partie. DIODORE DE SICILE, IV, 18. HÉSIODE, Théogonie, 744·745 (interpolation). HÉSIODE, Théogonie, 767-768 (interpolation). Nous aurons à revenir sur l'interprétation du "triple" Géryon, disons simplement ici qu'il est souvent considéré comme un être infernal : cf. WILAMOWIlZ, Herakles, 1,2, pp. 45 et 65 ; L. WIKCIŒR, R.E., 1913, VIII, col. 516-528 ; B. SCHWEITZER, H~raklis, 1922, p. 87 ; J. BAYET, Hercule funéraire, MEFR, XXXIX, 1921-1922, pp. 219-266 et XL, 1923, pp. 18-102, ou encore F. Benoit, La légende d'Héraclès et la colonisation grecque dans le delta du RhÔne, Lettres d'humaniti, VIII, 1949, pp; 104-148 : "Le dieu cueille les fruits d'immortalité après avoir tué le monstre tricéphale qui symbolise les puissances de la mort". Dans certains cycles, la quête des pommes d'or représente le dernier des douze travaux d'Héraclès, semblant ainsi clœe sa carrière terrestre : cf. DIODORE DE SICILE, IV, 26; Table Farnèse, 354. Cette version de la légende est représentée sur deux vases attiques du Vème siècle; cf. FURTW AENGLER, Rochers LexiIcon, col. 2228. Cf. supra, pp. 18-20. C'est le sujet de la tragédie d'EURIPIDE, A/ceste. DIODORE DE SICILE, IV, 26, 2. Héraclès, avec l'aide de Thésée, délivre aussi PirithoOs. Cf. Y. BÉQUIGNON, La Vallée du Spercheios des origines au Ne nicle, BEFAR, 1937, pp. 201-230. Nous aurons, bien sOr, à revenir sur cette autre forme de la légende "qui substitue à l'immortalité magique, donnée par les pommes, une immortalité transcendante résultant de l'apothéose", écrit M. DELCOURT, op. cit., p. 127. C'est par exemple, un aspect important d'une thèse de l'Université d'Amsterdam, Van WILLEM SCHULTE NORDHOLT, De tuin der HesperiMn, 1951. J.P. VERNANT, introduction à l'ouvrage de M. Detienne, Lesjardins d~nis,Paris, 1972, p. IV. Sur cette nécessité d'inclure le mythe dans le système culturel dont il est le produit, cf. encore Cl. CALAME, Le discours mythique dans S~miotique.l'üolede Paris, Paris, 1982, pp. 85-102. On nous permettra de choisir ici l'étude à la fois historique et méthodologique de J. -P. VERNANT, Raisons du Mythe, dans Mythe
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et Société en Grèce ancienne, Paris 1974, et plus récemment, les interrogations de M. DETIENNE dans l'Invention de la Mythologie,
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Paris 1981 : "c'est sm la légitimité d'une science des mythes que nous nous sommes interrogés..." (p. 13). Mentionnons encore, P. VEYNE, Les Grecs ont-ils cru d leurs mythes?, Paris, 1983. F.M. MüLLER, Nouvelles leçons sur la science du langage, traduit par G. HARRIS et G. PERROT, Paris 1968 ; cité par M. DETIENNE, op. cit., p. 18. Sur cette école de mythologie comparée, voit 1. -P. VERNANT, loc. cit., pp. 218-219 (éd. 1974). E.B. TYLOR, Primitive Culture, Researches into the development of
Mythology, Philosophy, Religion, Language, Art and Custom, Londres 1903. Cité par M. DETIENNE, op. cit., p.34. Sur récole anthropologique anglaise voir 1. -P. VERNANT, loc. cit., pp. 59 -
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219-221 (éd. 1974). P. GRIMAL, La mythologie grecque, Paris 1968, pp. 6-7. 1. -P. VERNANT (loc. cit., p. 196 sq.) rapproche au contraire la valeur sémantique des deux termes mûthos et logos et l'on peut. à bon droit, souligner que le mythe par excellence est souvent dit hkros logos. En fait. chez les Grecs eux-mêmes, si le mythe est encore vérité pour Homère et Hésiode, il est devenu, pour Platon, l'affaire des poètes (ceux que la République chassera de la cité comme menteurs) et pour Aristote ceux qui "usent du mythe" sont indignes qu'on s'occupe d'eux sérieusemenL (Métaphysique, III, IV, 14, Locb, 1968). Sur la philologie historique voir 1. -P. VERNANT, loc. cit., pp. 221-224. R. DION, Géographie historique de la France, Annuaire du Collège de France, Paris 1962, p. 388 (383-406). Cf. P. FAURE, Aux sources de la légende des DanaIdes, REG, 82, 1969, pp. XXVI-XXVIII. Pour PAUSANIAS (IV, 35, 2), Nauplie a été fondée par les Egyptiens et la Danarde Amymonè. M. DETIENNE, Mythes grecs et analyse structurale, Il Mito Greco (Actes du colloque d'Urbino, mai 1973), Roma 1977, p. 85. Faut-il d'ailleurs admettre, avec M. Detienne, que le document de 1380 date les aventures de Danaos et de ses filles ? La soumission des DanaoY est-elle "évément historique" ou s'inscrit-elle dans une certaine durée ? En fait le document ne constitue pas "l'acte de naissance" du mythe puisque les DanaoY figurent déjà dans un tribut apporté en Egypte vers 1450 sous le règne de Thoutmosis III. Paul Faure fait remarquer que les chroniques grecques héritées. des prêtresses d'Argos placent le crime des DanaYdes, meurtrières de leurs cousins d'Egypte, à la même époque. 1. -P. VERNANT, loc. cit., p. 225. B. SERGENT, Mythologie et histoire en Grèce ancienne, DRA, V, 1979, p. 59-101. Cf. encore C. BRILLANTE, La leggenda eroica et la civiltd micenea, Rome 1981.
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R. BARTHES, Mythologies, Paris, 1957, coll. Points, p. 194. B. MALINOWSKI, Le mythe dans la psychologie primitive, dans Trois essais SUT la vie sociale des primitifs, réed. 1980. Le mythe, écrit Malinowski (p. 103), "n'a rien d'une explication destinée à satisfaire l'intérêt scientifique, mais constitue une résurrection narrative d'une réalité ancienne, destinée à satisfaire de profonds besoins religieux, des aspirations morales, à appuyer des exigences et des revendication sociales, voire à venir en aide à des nécessités pratiques. Dans la civilisation primitive, le mythe remplit une fonction indispensable : il exprime, rehausse et codifie les croyances, il sauvegarde et favorise la morale ; il garantit l'efficacité du rituel et contient des règles pratiques pour la conduite de l'homme...." Il est encore "un élément vital des rapports pratiques qui existent entre l'homme et le milieu (p. 153)"... Bref, "la fonction du mythe consiste à renforcer la tradition, à lui conférer un prestige et une valeur plus grande, en la faisant remonter à une réalité initiale plus élevée, meilleure, d'un caractère plus surnaturel" (p. 152). B. MALINOWSKI, loc. cit., p. 130. J. -P. VERNANT, loc. cit., p. 232 qui cite Cl. Lévi-Strauss: "dire qu'une société fonctionne est un truisme; mais dire que tout, dans une société, fonctionne est une absurdité". Anthropologie Structurale, Paris, 1958, p. 17. LÉVI-STRAUSS, op. cit., p. 21. La même critique s'applique aux "continuatews" de Malinowski, en particulier à M. Mead. Op. cit., p. 254. "S'il est vrai que l'objet du mythe est de fournir un modèle logique pour résoudre une contradiction..." Pour M. DETIENNE cependant (Il mito Greco. loc cit., p. 11) c'est par un "contresens fooctionnaliste" que l'anthropologue anglais Ed. LEACH (Genesis as Myth and other Essays. Londres. 1969) en déduit que l'aspect médiateur du mythe est sa seule fonction. B. MALINOWSKI loc. cit., p. 103. B. MALINOWSKI, loc. cit., p. 101. De l'origiM des Fables, voir exergue et supra note 1. G. DEVEREUX, Femme et mythe, Paris, 1982, p. 116 et p. 151. L'auteur, il est vrai, parle de "naissances divines" et ne préjuge pas de ce que fera l'histoire de ces figures mythologiques. Sur les théories de G. Devereux voir ùifra pp. 30-31. Même lorsque la légèreté de l'auteur n'a pas de conséquences sur l'interprétation, on s'étonne de voir certains psychanalystes lire aussi rapidement le mythe grec, confondre les personnages... etc... Cf. par exemple: "Le pleutre Egysthe" (sic) remplace Eurysthée dans l'article de M.T. NEYRAUT-SUTTERMAN. Héraclès et l'épilepsie, Mythes (Colloque de Deauville) Revue Française de Psychanalyse, XLVI, 1982, p. 854.
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Ph. SLATER, The Glory 0/ Hera, Greek Mythology and the Greek Family, Boston, 1968. N. LORAUX a critiqué, déjà, cette interprétation dans Héraklès, le surmâle et le féminin, Mythes, op. cit., pp. 697-792, singulièrement p. 704 et p. 721. Sans ouvrir à nouveau le dossier d'Oedipe (cf. J. -P. VERNANT dans Raison prisente, 4, 1967 pp. 3-20 repris dans Mythe et tragidie en Grèce ancienne, Paris, 1972) il faut reconnaître que les tentatives de D. Anzieu et G. Devereux n'ont guère convaincu les hellénistes et les historiens. N. NICOLAIDIS, Oedipe, le message de la différence, dans Psychanalyse et culture grecque, Les Belles Lettres, Paris 1980, pp. 183-195. Du même auteur et dans le même volume voir aussi: Mythes et écritures, moyens d'approche de l'appareil psychique, pp. 197-214. J. JAMIN, Les lois du silence. essai sur la/onction sociale du secret, Paris 1977, p. 10 - L'objet de l'étude de J. Jamin est la parole (ou le secret) initiatique et l'auteur s'attache à retrouver la fonction de reproduction sociale de l'initiation, souvent négligée, dit-il, voire évacuée, au profit de ses fonctions pédagogiques, symboliques et culturelles (p. 90). Pour lui la "ruse" de la "raison initiatique" consiste précisément, sous le sceau du secret et du silence, à dissimuler des rapports de force et de pouvoir, voire des rapports de production, à les rendre donc "ni assignables, ni contestables" (p. 95). Ces remarques peuvent paraitre d'un grand intérêt pour qui étudie la mythologie grecque, et tout particulièrement la mythologie hérorque pour laquelle les rapports avec les cérémonies initiatiques sont au moins fortement probables. En ce qui concerne Héraclès, voir infra, notre troisième partie. Cf. C.G. JUNG et Ch. KERENYI, Introduction à l'essence de la mythologie, Paris 1974 (4). G. DEVEREUX, op. cit., p. 98. De ce rapprochement - dont nous prenons la responsabilité - rien ne serait plus faux que de conclure que G. Devereux est un disciple de Jung. C'est lui qui, au contraire, qualifie "d'absurde" sa théorie des archétypes. R. DIATKINE, Mythes. op. cit., p. 692. R. DIATKINE, ibid. p. 693. Dans cette "fonnulation superficielle" qui postule "que les religions et les mythes ont emprunté leurs thèmes aux théories sexuelles et aux fantasmes des enfants" on reconnaît, bien sQr, la doctrine de Freud. La tentation parfois reste proche. Cf. M. T. NEYRAUT-SUTTERMAN, loc. cit.,(Mythes) p. 853 à qui "le décryptage, psychanalytique du personnage d'Héraclès à l'aune de son épilepsie... fournit .. un lieu de compréhension du héros apparemment si polymorphe"
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Cf. infra, notre érode des rapports d'Héraclès aux pratiques initiatiques (troisième partie). G. DEVEREUX, op. cit., p. 98. L'expression est de G. DURAND, Figures mythiques et visages de l'oeuvre, l'Ile Verte, 1979, p. 28. On ne saurait toutefois faire de ce théoricien de l'imaginaire un "symboliste". Il se définit lui-même comme un "structuraliste mitigé" (ou encore un "structuraliste figuratif") Actes du colloque de Chantilly. Prob/~mes du mythe et de son interprétation. Paris 1978, pp. 27-50. Sur les travaux de ces "symbolistes" dont l'interprétation ouvre sur le sacré voir J .P. VERNANT,loc. cit., pp. 227-232. J. RUDHARDT, La fonction du mythe dans la pensée religieuse de la Grèce, Il Mito Greco, Rome 1977, p. 317. J. RUDHARDT,loc. cit., p. 314. Cl. LEVI-STRAUSS, Anthropologie structurale, Paris 1958, pp. 235 sq.. Cf. par exemple, M. DETIENNE,loc. cit., II Mito Greco, pp. 70-71. Pour la présentation de la méthode mise en oeuvre autour de J. -P. VERNANT, M. DETIENNE et P. VIDAL-NAQUET à la IVe section des Hautes Etudes voir, par exemple, J. -P. VERNANT, Lectures et problèmes du mythe, loc. cit., pp. 244-250 et M. DETIENNE, Mythes grecs et analyse structurale, II Milo Greco, pp. 69-90, repris dans le chapitre: Les Grecs ne sont pas comme les autres, Dionysos mis à mort, Paris 1977, pp. 17-47. M. DETIENNE, L'invention de la mythologie, Paris 1981, pp. 9-10. M. DETIENNE, op. cit., p. 242 "une dernière histoire en attendant le théoricien. On raconte qu'à Syracuse....ete•..". Il semblerait bien que les plus grandes réussistes soient les interprétations les plus "libres"... en particuliez celles qui poussent au plus loin le déchiffrement d'un texte précis (ici Hésiode),l'intégration dans le contexte historique et culwrel est alors possible, ce qui n'est pas le cas, lorsqu'il s'agit, à l'exemple de Lévi-Strauss, de dégager l'armab.lre commune d'une multib.lde de versions de nature et d'q,oques
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Cf. supra note 95. Déjà en 1973, au Colloque d'Urbino, M. DETIENNE prenait quelque distance avec le structuraiime de Cl. LÉVI-STRAUSS, loc. cit.• II Mito Greco, p. 69-90. Quand à J. -P. VERNANT, en 1974 (Mythe et Société p. 250), il se tournait "vers les linguistes, les logiciens, les mathématiciens" dont il espérait "le modèle structural d'une logique qui ne serait pas celle de la binarité, du oui ou du non, IUle logique autre que la logique du logos". R. BARTHES, op. cit., p. 195. R. BARTHES, op, cit., p. 202.
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Mythologie. 114 - R. BARTHES, op. cit., p. 197. 115 - Sur les mythographes voir M. DETIENNE, art. Mythe (mythe et écriture: les mythographes), Dictionnaire des Mythologies, op. cit., pp. 141-143. 116 - Cf. G. DURAND, Figures mythiques et visages de l'oeuvre, l'Ile verte, 1979, p. 31 "C'est le mythe qui, en quelque sorte, distribue les rOles de l'histoire et permet de décider ce qui "fait" le moment historique, l'âme d'une époque, d'un siècle, d'un Age de la vie. Le mythe est le module de l'histoire et non l'inverse". Il est bien difficile à un historien de souscrire à pareille théorie, même - et surtout lorsqu'il affmne l'importance du mythe "fait social total", comme le disaitL.GerneL 117 - G. DURAND, Pérennité, dérivations et usure du mythe, dans Actes
du Colloque de Chantilly. Probl~mes du mythe et de son interprétation, Paris 1978, pp. 27-50. 118 - On peut, en effet, dans une certaine mesure estimer que cette distinction rencontre celle qu'établit Lévi-Strauss entre "parties
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cristallines" et "parties probabilistes" du récit ou M. Eliade entre la fonction d'instauration du mythe et ses représentations. M. DETIENNE, loc. cit.• Il Mito Greco, p. 74. E. CASSIRER, La philosophie des/ormes symboliques, II, La pensée mythique, Paris 1972, p. 58. Redisons, une fois de plus, que nous n'approuvons pas l'économie générale du projet: cf. en particulier p. 20, ce paragraphe que l'on comparera à la citation de G. Durand (cf. note 116) : "Dans le rapport entre la mythologie et l'histoire, la mythologie apparaît toujours comme le terme premier et l'histoire comme le terme secondaire et dérivé. Ce n'est pas son histoire qui détermine la mythologie d'un peuple, mais à l'inverse la mythologie qui détermine son histoire - ou, qui plus est, la mythologie ne détermine pas, elle est elle-même le destin de ce peuple". C'est cette démarche que nous avons suivie dans une communication au Colloque de Bressanone (oct. 1981), Religione e citta' nel mondo antico, Rome, 1984, pp. 9-29. Ce titre est aussi celui de la communication de G. LIVET au colloque de Strasbourg: Méthodologie iconographique, (1979), éd. G. SIEBERT, Strasbourg, 1981. CIS 1,122 ou IG, XIV, 600. Cf. infra notre étude sur Melqart. Cf. M. T. PIRAINO, Iscrizione inedita da Poggioreale, Ko/calos, V, 1959, pp. 159-173. Iscrizioni greche Iapidarie dei museo di Palermo, 1973, p. 60 sq. nO 35, pl. XXII, 35; Su a1cuni documenti epigraphici della religiosità siceliota (Actes du Colloque de Bressanone, 1981), op. cit., Rome, 1984, pp. 165-170. Pour l'auteur l'inscription date de la fin du VIIème siècle ou du début du Vlème siècle et pourrait n'être qu'un réemploi par les indigènes. Cf. encore M. GUARDUCCI, Annuario, 1959-1960, p. 272, pl. IV. C'est ainsi que, dans le cadre de notre participation aux travaux du Centre de Recherches de Besançon (U.A. 338 du CNRS : Analyse des formations sociales de l'Antiquité) et à l'ATP "PolythéIsmes" du CNRS (Analyse du discours mythologique chez Apollodore), nous avons pu disposer de l'enregistrement informatisé du texte d'Apollodore (Edition R. WAGNER, Mythographi graeci. l, Apollodori Bibliotheca, Teubner, réimpression de Stuttgart, 1965). Cf. notre troisième partie. Cf. notre quattième partie (chapitre 1). Nous reviendrons sur ce point dans notre nème partie, chapitre 1. On s'en apercevra par certaines constantes du vocabulaire. Cf. IVème partie, chap. 1. Voir le premier chapitre de la deuxième partie. Voir notre troisième partie. Nous aurons l'occasion de revenir, sinon sur la "question homérique", du moins sur le problème, plus important pour nous, de la poésie
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orale, condition même de l'existence, en Grèce comme ailleurs, du discours mythique. Sur ce point voir R. FINNEGAN, Oral Poetry. Its Nature. signifiance and social context, Cambridge, 1977 ; P. ZUMTHOR, Introduction à la polsie orale, Paris 1983 et surtout, en ce qui concerne la Grèce, les travaux de M. PARRY dans l'édition qu'en donne A. PARRY, The Making ofHomeric Verse, Oxford 1971 et J. SVENBRO, La parole et le marbre. aux origines de la poltique grecque. Lund, 1976. Pour l'acception de ces termes (dérivation/pérennité) v. supra p. 36 et notes 116 et 117. R. BARTHES, Mythologies, op. cit., p. 193. Poursuivons la définition que donne du mythe R. BARTHES (op. cit., p. 193) "... Ce qu'il faut poser fortement dès le début, c'est que le mythe est un système de communication, c'est un message". Cf. M. FOUCAULT, L'archéologie du savoir, Paris, 1969, p. 182. Cf. notre Epilogue. Cf. notre première partie chap. 4 et l'étude que nous avons consacrée à ces représentations (à paraitre). Sans doute est-il nécessaire, pour interpréter correctement une image monétaire, de chercher, comme le demande O. PICARD (Problèmes de numismatique thasienne, CRAf. 1982, pp. 412-424) "à déchiffrer sa signification proprement monétaire en la replaçant dans le système monétaire de la cité". Peut-être y a-t-il quelque excès, cependant, à affirmer que le choix d'un type monétaire (celui de l'Héraclès ou du Dionysos imberbes plutôt que celui de l'Héraclès ou du Dionysos barbus par exemple), loin de traduire "une évolution à une sensibilité religieuse...(ou) une transformation du goQt" obéirait à "une nécessité financière" et aurait "pour fonction première de marquer les diverses étapes de l'histoire monétaire de la cité, de faciliter le contrÔle des espèces circulant, de permettte de les trier mieux que ne le ferait une simple évolution stylistique...". K. SCHEFOLD, Poésie homérique et art archarque, RA, 1,1972, fig. 2 et du même auteur = Texte et image à l'époque archaJque grecque dans Texte et Image, Actes du Colloque international de Chantilly (oct. 1982), Paris, 1984, pp. 41-52. Voir aussi Gotier und Heldensagen der Griechen in der sptJtarchaCschen KJUlSt, MUnchen, 1978. V. KARAGEORGHIS, De l'adaptation et de la transformation de la mythologie grecque à Chypre durant la période archaïque et classique, Colloque du CNRS nO 593, addendum p. 86 et planche VI, 2. H. METZGER, Les reprlsentations dans la clramjque attique du Wème siècle, Paris, 1951 ; et Recherches sur l'imagerie athénienne, Paris, 1965. Ch. DUGAS, Décoration et imagerie dans la cmunique grecque,REG,
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49. 1936 pp. 440 sq. et. du même auteur: Tradition littéraire et tradition graphique. AC. 6. 1937. pp. 5 sq. Pour un historique et une bibliographie de la question voir CL. BÉRARD. Anodoi. essai sur l'imagerie des passages chthoniens. NeuchAtel. 1964. Voir aussi F. LISSARRAGUE et A. SCHNAPP. Imagerie des Grecs ou Grèce des imagiers? Le temps de la réflexion. n. 1981. pp. 275-297 et Image et Céramique grecque, Actes du colloque de Rouen éd. par F. LISSARRAGUE et F. THÉLAMON. Rouen. 1983. E. H. GOMBRICH. L'Art et l'illusion. 1971. p. 28 (sémantique traduit ici "linguistics"). A l'Université de LYON n. Cf. Bulletin de liaison de la Société des amis de la Bibliot~que Salomon-Reinach. 1985.3. p. 63. CI. BÉRARD. Anodoi. op.cit.• p. 47. R. BARTHES. op. cit.• p. 195. Cf. supra p. 33. R. BARTHES. op. cit.• p. 200. Ce qui. bien entendu. n'implique en rien une identité de fODCtiOD. Voir notre note 132. Les livres cités de R. FINNEGAN et P. ZUMTHOR donnent une vue synthétique du problème. On peut donner quelques exemples de ces traditions orales contemporaines: Cf. J. BARRE-TOELKEN. The pretty Langage ofyellowman. 1969; E. MAQUISO. Ulahingan. An Epic of the SoUlhern Philippines, Dumaguete - City. 1977 ; I. OKPEWHO. The Epic of Africa. New-Yorlc.1979. P. ZUMTHOR. op. cit.• p. 116. Notons encore la fonnule (au sens habituel du tenne ici) de P. ZumthŒ pour qui la fonnule (de l'épopée) "neutralise l'opposition entre la continuité de la langue et la discontinuité du discours" (p. 119). CI. BÉRARD. Anodoi, op. cit., p. 47. Cf. encore U. ECCO. La structure absente. Introduction d la recherche sémiotique. ttad. française de 1972. p. 178 : "Les signes iconiques reproduisent certaines conditions de la perœption de l'objet, mais après les avoir sélectionnés selon des conventions graphiques". Cf. F. LISSARRAGUE. A. SCHNAPP. loc. cit.• p. 281 : "Vieillard. femme. cavalier. hoplite. par exemple. qui sont dans l'image des agents narratifs. non des données statistiques". G. LIVET. loc. cit.• p. 6. J.M. MORET. L7lioupersis dons la céramique italiote. les mythes et leur expresSÎOnfigurée au W~me s~cle. Genève. 1975. chapitre 12 et p. 194. Le "schéma agenouillé" qu'étudie aussi l'auteur subit, au cours des siècles. la même évolution sémantique. J.M. MORET. op. cit.• p. 294. L'auteur étudie également les phénomènes de synonymie (représentation d'un même épisode légendaire au moyen de schémas
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graphiques différents) p. 297, et d'homonymie (images d'aspect identique, ou presque, mais auxquelles on donne un sens différent) p. 298. Toutes ces transformations ne sont pas sans influence sur le mythe lui-même "dans ce jeu d'actions et de réactions exercées par le mythe sur l'image et par l'image sur le mythe, il y a métamorphose des deux entités" (p. 297). L'iconographie d'Héraclès offre d'ailleurs un exemple intéressant de telles "déviations" de l'image. Lorsque les chrétiens donneront leurs premières représentations du péché originel (fresques de la basilique des Saints Martyrs de Citimile en Campanie, par exemple), ils figureront Adam sous les traits d'Héraclès au jardin des Hespérides. Le thème du "jardin" se prètant - comme d'ailleurs le "sauveur" qu'était devenu Héraclès· à l'interpretatio christiana. Cf. L. TOOISCO, Modelle classica par le prime espressioni figurative deI peccato originale, AFLB, XXIII, 1980, pp. 163-186. G. LIVET, op. cit., p. 7. P. ZUMTHOR, op. cit., p. 233. Pour la bibliographie voir supra note 132. G. MOUNIN, La crucifixion, approche sémiologique d'un thème.... dans les Actes du Colloque d'Aix-en-Provence : Iconographie et histoire des mentalités, CNRS, Marseille, 1979, pp. 33-38. L. TIBERI, Stesicoro e le raffigurazioni vascolari della Gerioneide, Arch. Class., XXIX, 1, 1977, pp. 175-179, pl. XLIV et XLV. M. ROBERTSON, Geryoneis : Stesichorus and the vase-painters, CQ. XIX, 1969, pp. 207-221 ; P. BRIZE, Die Geryoneis des Stesichoros und diefrahegriechische Kunst, Würzburg, 1980. L. TIBERI, loc. cit., p. 178. Cf. J. BOARDMAN, Peisistratos and Sons, RA, 1972, l, pp. 57-72 ou encore JHS, XCV, 1975, pp. 1-12. Encore faut-il remarquer avec D.WIlLIAMS (Herakles, Peisistratos and the Alcmeonids, Colloque de Rouen, op. cit., pp. 131-140) que les Pisistratides reprenaient là un thème développé d'abord par les Alcméonides. J.M. MORET qui avait entrepris sa thèse afin d'étudier les rapports entre la tragédie et la céramique peinte d1talie méridionale et pensait que le résultat confmnerait l'origine théâtrale des scènes de vases a, au terme de ses recherches, "ramené à de plus justes proportions le rôle des influences littéraires et restitué à la tradition figurée la part d'invention qui lui revient" (op. cit., p. 6). HÉSIODE, Théogonie, 215, 273-75 et 517·519. Nous avons déjà noté que, chez Hésiode, les Hespérides ne sont jlUnais mises en relation avec Héraclès, contrairement à ce qu'affmne DÜRRBACH, in, DAGR, III, 1, S.V., Hercules, p. 78-128. HÉSIODE, Théogonie, 287-294 n faut préciser toutefois qu'avant les colonnes d'Héraclès, les Grecs avaient connu les colonnes d'Atlas (Odyssée, 1,52-55: "Atlas cet
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esprit malfaisant... qui veille, à lui seul, sur les hautes colonnes qui gardent écarté de la terre, le ciel"). Leur "fonction" - et c'est encore celle que leur prête la Théogonie (517) - est par conséquent düférente (plus cosmogonique que géographique) de celle qu'assument les colonnes d'Héraclès, dressées par le héros "pour maintenir ouverte la route qu'il a creusée entre l'océan extérieur et notre mer intérieure" ou au contraire "pour empêcher les monstres de l'Océan d'envahir la Méditerranée" (DIODORE, IV, 18). Il est d'ailleurs intéressant de remarquer que Diodore n'éprouve pas le besoin de choisir entre les deux versions: seule survit donc, dans l'utilisation qu'il fait du mythe sa fonction ordonnatrice, fonction passée de l'ordre cosmogonique - et divin - à l'ordre géographique (une géographie retouchée pour l'homme), fonction passée aussi d'Atlas à Héraclès. Au Vlème siècle, l'expression est suffisamment liée au héros pour faire partie du vocabulaire géographique courant : si dans un fragment d'Hécatée de Milet ne sont mentionnées que les colonnes sans référence à Héraclès epiYXl1 n6Àl" ntpl Tà" O'T~Àa" F.H.G., l, frg. 325, p. 25, Müller = 372 Nenci = 356 Jacoby) chez PINDARE (Néméennes, III, 37) elles sont bien les colonnes d'Héraclès et, au Vème siècle, Hérodote emploie couramment l'expression (cf. IV, 8; 1,20; IV, 43 ; IV, 96 ete...). Cf. encore PLATON (Timée, 25e) qui nomme les "Hpax).tou(" O'TilÀal et les "Hpax>.t'oU(" lSpOl. STRABON, XVII, 3, 3. PLINE L'ANCIEN, Histoire naturelle, V, 3-5. Strabon est plus précis dans sa description de la Turdétanie, lorsqu'il cite Homère et les "poètes postérieurs qui multiplient à l'envie les récits analogues, décrivant les expéditions faites pour conquérir les troupeaux de Géryon et les pommes du jardin des Hespérides, les fameuses pommes d'or" (111,2, 13). Il attribue même Il Stésichore la localisation à Erythie, ile voisine de Gadeira (=Gadès), le lieu de la naissance du bouvier Géryon (III, 2, Il). Cf. infra, notre deuxième partie. Cf. G. KlSH, La carte image des civilisations, Paris, 1981; R. BALADIÉ (Le Péloponnèse de Strabon, étude de géographie historique, Paris 1980), rappelle utilement que Strabon lui-même ne permet pas, véritablement. de cartographier les pays qu'il décrit: "des données où voisinent de façon à peu près inextricable la vérité et l'erreur: orientations inexactes dans bien des cas, localisation vague des points remarquables sur lesquels repose la construction de l'ensemble, évaluation quelquefois exacte, le plus souvent approximative, des distances, confusion, erreurs caractérisées, flottement résultant de la valeur du stade..." (p. 37). Cf. infra fig. 1 et pp. 92 sq.
80 175 - lliade, XVIII, 606; lliade, XVIII, 399, Odyssée, XII, 1-2 et XX. 65. C'est une image toute semblable qui se dessine encore dans la Théogonie d'Hésiode (242; 265 ; 292; 776; 787-790). 176 - Cf. J. GAGE, Hercule Melqart, Alexandre et les Romains à Gadès, REA, XLII, 1940, pp. 425-438, et, du même auteur, Gadès, 11nde et les navigations atlantiques dans l'Antiquité, RH, 205, 1951, pp. 189-216. a. encore A. BERTHELOT, Les données numériques de la géographie antique d'Eratosthène à Ptolémée, RA, XXXVI, 1931, pp. 1-34. 177 - Pour l'identification des "colonnes" voir infra p. 103 ; Calpé (aujourd'hui Gibraltar) sur la CÔte espagnole et, sur la cOte marocaine, Abyla (soit le Mont Acho au N.E. de Ceuta, soit le Mont aux singes, au S.W.) Cf. en particulier, St GSELL, Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, II, pp. 167-168. 178 - SILIUS ITALICUS, Les Puniques, 1,141; XVIII, 637. 179 - PLINE L'ANCIEN, Histoire Naturelle, V, 6. 180 - A. SCHULTEN, La geste d'Héraclès, dans Tartessos, Contribuci6n a la historia mas antigua de Occidente, Madrid 1924 ; et id., Die Griechen in Spanien, dans Rh. M. LXXXV, 1936, p. 302, voir infra pp. 97sq. 181 - Pour J.H. CROON, The Herdsman of the Dead. Studies on some Cuits, Myths and Legends of the ancient greek colonization-aera, Amsterdam 1942, la légende de Géryon est apportée par les Chalcidiens dans la région de Cumes et en Sicile et ce sont les Phocéens, leurs alliés commerciaux qui la transportent à Gadès, sur les lieux de leurs expéditions lointaines. Sur les mythes d'Héraclès à Cumes voir N. VALENZA-MELE, Eracle euboico a Cuma. La Gigantomachia e la via Heraclea, dans Recherches sur les cultes grecs et l'Occident, Cahiers du Centre Jean Berard, V, Naples 1979. 182 - Il faut rappeler là, l'importance de la Géryonide de Stésichore d'Himère vers 600 à qui Strabon (III, 2,11) rapporte la localisation de Géryon à Erythie. 183 - HÉSIODE, Théogonie, 287-294. Même pour qui ne partage pas tout à fait "le doute méthodique" de J. -P. Morel, loc. cit., p. 419 sur la colonisation phocéenne à Tartessos ou, d'une façon générale, sur la présence ancienne des Rhodiens et Phocéens dans les mers occidentales, il est certain que cette présence est postérieure à l'époque d'Hésiode (qui d'ailleurs paraît tout ignorer de la colonisation). L'aventure de Colaios, rapportée par HERODOTE (V, 152) témoigne sans doute du rôle important joué par les Samiens "associés à l'activité commerciale des Phocéens" (p. VILLARD, La céramique grecque de Marseille, essai d'histoire économique, Paris 1960, p. 56 et 72), mais, malgré les dates hautes proposées par A. SCHULTEN (op. cit, p. 45), MAZZARINO (Fra Oriente et Occidente, p. 117) et A. GARCIA Y
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BELLlDO (Hispania Graeca, l, p. 115 et 130), il reste fmalement daté de 630 environ. PLINE L'ANCIEN, Histoire Naturelle, IV, 120. STRABON, m, 5, 5. Nous aborderons dans une annexe à la première partie ce problème encore très controversé. Contentons-nous de renvoyer ici à J. DESANGES, op. cit., pp. 39-85 pour un état de la question et pp. 392-403 pour la présentation et la traduction de la version d'Heidelberg et des sources relatives à ce périple. Cf. du même auteur, Le point sur "Le périple d'Hannon", controverses et publications récentes, dans Enquêtes et documents. Nantes-Afrique-Amirique, VI, 1981, pp. 13-29, et les deux articles de R. REBUFFAT, D'un portulan grec du XVlème siècle au périple d'Hannon, Karthago, XVII, 1976, pp. 139-151 ; Recherches sur le bassin du Sébou, II, le périple d'Hannon, BAM, XVI, 1985-1986, pp. 257-284. SCYLAX (ou Pseudo-Scylax), 112 : cf. J. DESANGES p. 113. Selon F.C. MOVERS. Die PhlJnizier, p. 540, l'étymologie du nom de la cité pourrait être phénicienne (mais on préRre généralement reconnattre une origine berbère au nom primitif de la ville Lw) et St. GSELL a pu démontrer que les textes épigraphiques, bien rares et mutilés il est vrai, "y ressemblaient à ceux de la cÔte syrienne beaucoup plus qu'à ceux de Carthage" (op. cit., II. p. 73). PLINE L'ANCIEN. Histoire Naturelle, XIX, 63. PLINE L'ANCIEN, Histoire Naturelle, XIX, 63. POMPONIUS MELA, m, 6. Notons que si, comme nous le pensons, cette assimilation est ancienne, elle éclaire peut-être le problème de la double nature - héros et dieu - d'Hm.clès. Voir infra le quatrième chapitre de natte première partie. Voir ilifra, notre première partie pp. 158-161. Une dédicace de ThalTos se rapporte à un sanclU8ire d'Hercule-Melqart (cf. Ph. BERGER, CRAI, 1901 pp. 578 et M. LIDZBARZKI, Ephemlar Semit.Epigr., II, p. 62). On peut mentionnez la légende qui s'attache à la colonisation de la Sardaigne (pAUSANIAS, X, 17,2) et le rasoir cathaginois, qui, figurant d'un cOté Héraclès-Melqart, de l'autre Sardos. parait se rapporter à la même légende (CRAl, 1905. pp. 325-327 ; R. DUSSAUD, loc. cit., pp. 214 fig. 3). Pour les témoignages les plus récents se référer à F. BONDI, loc. cu., Colloque de Cortona, 1981. Cf. D. VAN BERCHEM, loc. cit., Syria, pp. 307-338. Nous pensons, quant à nous, que les éléments sémitiques, certes frappants, dans le culte de l'Ara Maxima, peuvent s'expliquez, aussi bien que par un contact direct avec les Phéniciens, par l'intermédiaire des Grecs présents plus tôt et plus intensément qu'on ne le pensait - à Rome et
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dans le Latium (cf. par exemple, PP., 1977, Lazio arcaico e mondo greco). Ceux-ci ayant pu apporter, non seulement le culte des colonies de Grande-Grèce et de Sicile (cf. J. BAYET, us origines de l'Hercule romain, Paris 1926), mais aussi celui d'un Héraclès-Melqart déjà connu en Orient. Nous pensons au type de l'Héraclès chypriote qu'évoque la gmnde terre cuite architectonique qui ornait, dès la deuxième moitié du VIe siècle, le temple archarque de l'aire sacrée de S. Omobono et que rappellent aussi de très nombreux petits bronzes dits étrusco-italiques. On se reportera à notre épilogue. Melqart avait un temple à Carthage (CIS, 264). Tous les ans la ville envoyait une ambassade au dieu de la métropole, et au Ile siècle avant J.C.,lui adressait encore la dîme (JUSTIN, XVIII, 7, 7 et DIOOORE, XX, 14 et XIII, 108). Cf. encore QUINTE-CURCE, Histoire d'Alexandre, IV, 2, 10 et IV., 3, 22 ; ARRIEN, Anabase. II, 24,5 et POLYBE, XXXI, 12 et 20. Cf. C. BONNET, Le culte de Melqart à Carthage: Un cas de conservatisme religieux, Studia Phoenicia, IV, Religio Phoenicia, 1986, pp. 209-222. CIS, l, 122, ou IG, XIV, 600. Cette inscription est du Ile siècle avant J.-C. Les marins tyriens réclament de même à Délos un téménos pour leur Héraclès qu'ils qualifient à la fois d'ArcMgète de Tyr et de bienfaiteur de l'humanité (l519, lignes 14-16). Cf. J. POUILLOUX, loc. cit., p. 309 et du même auteur, ArclUloque, Fondation Hardt, X, p. 22. DIODORE DE SICILE, IV, 8, 5. DIODORE DE SICILE, 1,2,4. L. MAKARIUS, Ethnologie et structuralisme, l'apothéose de Cinna, mythe de naissance du structuralisme, L'homme et la société, 1971,4, pp. 191-210. P. VIDAL-NAQUET, Le chasseur noir et l'origine de l'éphébie athénienne, Annales ESC, XXIII, 1968, pp. 947-964 repris (et remanié) dans u Chasseur Noir, Paris 1981. Cf. infra dans notre troisième partie. L'étude des rapports entretenus par Héraclès avec les jeunes gens nous conduira à aborder le problème des pratiques initiatiques. W. BURKERT, Le mythe de Géryon: perspectives préhistoriques et tradition rituelle, dans Il Mito Greco. op. cit., pp. 273-283. n faudrait ajouter les critiques de D. SABBATUCCI sur l'utilisation qui est faite du mythe de Cacus, op. cit., p. 284. G.S. KIRK, Methodological reflexions on the myths of Heracles, Il Mito greco. op. cit., pp. 285-297. Nous ne partageons pas, cependant, la conviction exprimée p. 286 que les contradictions d'Héraclès appartiennent probablement à la tradition orale pré-homérique. Cf. supra, pp. 43 sq. Cf. encore pp. 221 sq. ; cf. enfin notre quatrième partie.
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HÉSIODE, Théogonie, 289-294 (cf. encore 980-983). HÉSIODE, Théogonie, 215-216. HÉSIODE, Théogonie, 273-275; 517-520. HÉSIODE, Théogonie, 744-745; 767-768 (interpolation). PISANDRE aurait, le premier, donné cette précision (frg 5K apud ATHENEE, XI, 469c) reprise au Ve siècle par PANYASIS (frg. 7K apud Athénée ibid.) et encore MACROBE, Saturnales, V, 21, 19. Pour APOLLODORE (lI, V, 10) c'est au retolD' qu'Héraclès obtient la coupe du soleil dans laquelle il entasse les troupeaux de Géryon. Dans cette coupe G. DUMEZIL retrouve la "cuve" présente dans les légendes indo-européennes du cycle de l'ambroisie (Le festin d'immortalité, Paris 1924, pp. 116-125). Cf. par exemple, par L. GERNET, La cité future et le pays des morts, REG, 46, 1933, pp. 293-310... Peut-être même n'est-il pas nécessaire de parler comme HJ. ROSE (Handboolc of Greelc Mythology, London 1958, p. 216) et L.R.FARNELL (Greelc Hero Cuits, Oxford 1921, p. 171) d'une conquête de l'immortalité par la recherche des fruits de l'arbre de vie. On ne peut cependant dénier à l'épisode des Hespérides, comme le fait J.O. HANSON (Museum A/ricum, 1, 1972, pp. 1-3), sa valeur symbolique sous prétexte que "l'idée de l'arbre de vie ne vient pas des Grecs, mais des Hébreux" (p.l), que les pommes sont généralement liées à l'amour et à la beauté plus qu'à la mort (p.2) et que, si l'un des exploits d'Héraclès est une quête de l'immortalité, c'est sa victoire sur l'Enfer ou peut-être la défaite de Thanatos dans le mythe d'Alceste (p.2). n peut paraître plus faux encore d'affmner que l'immortalité n'a été pour Héraclès que la récompense des services rendus à l'humanité (p. 1). Cest certes ce que dit Diodore, c'est ce qu'est devenu le mythe, mais c'est loin d'en être une donnée première (cf. Homère). Cf. par exemple, WILAMOWITZ, op. cil., 1, pp. 45 et 65 ; ZWICKER, R.E. 1913, VIII, col. 516-528 ; B. SCHWEITZER, op. cit., p. 87 ; J. BAYET, Hercule funéraire, MEFR, XXXIX, 1921-1922, pp. 219-266, et 1923, pp. 18-102 ; F. BENOIT, La légende d'Héraclès et la colonisation grecque dans le delta du RhOne, Lettres d'humtJnités, VIII, 1949, pp. 104-148. Cf. J.H. CROON, The Hersdsman 0/ the Dead, (op. cit.) : cf. encore l'hypothèse d'un "bouvier de Dis" au Vélabre par A.W.J. HOLLEMAN, Larentia, Hercules et Maler Matuta (Tib. n, 5), AC, 45, 1976, pp. 197-207. A. MOTIE, Prairies et jardins de la Gr~ce antique. de la religion d la philosophie, Bruxelles 1973. Cf. aussi G. SOURY, La vie de l'au-delà. Prairies et gouffres, REA, 46, 1944, pp. 169-178. A. MOTTE, op. cit., p. 241.
84 218 - C. RAMNOUX, La nuit et les enfants de la nuit, Paris 1959, pp. 48 sq.. 219 - HOMBRE, Odyssée, XXIV, 11-13. 220 - HOMBRE,Iliade, VIII, 360-369; Odyssée, XI, 618-626. 221 - HOMBRE, /liade, V, 395-398. Hadès partage en cela le sort d'Héra elle aussi cruellement blessée au sein par "le rude enfant d'Amphitryon... le fils de Zeus qui tient l'égide". Peut-être faut-il encore souligner que le choix de Pylos (=la porte) pourrait, lui aussi, être signifiant. 222 - HOMBRE,Iliade, XVIII, 115-118. 223 - HOMBRE, Odyssée, XI, 602-604. Le passage il est vrai est douteux. 224 - Ce thème est lié à l'aspect très fortement chthonien du héros ; en témoignent ses rapports avec les sources chaudes, les liens qui l'unissent aussi aux grandes divinités chthoniennes : Héra en Grande Grèce, Déméter et Coré en Sicile, pour nous limiter à l'Occident grec. 225 - Alors que les Hespérides ne sont, avec certitude, mises en rapport avec le héros qu'au VIe siècle dans l'art, et au Ve siècle dans la littérature, on trouve, au VIIe siècle, des représentations de Géryon dans l'art, et dans la littérature, cf. BROMMER, Die zwlJlf Taten ...op. cit., tableau p. 54. Remarquons que l'oeuvre d'Hésiode est, depuis les lravaux de P. Walcot et ML. West, plus généralement située dans le dernier tiers du Vmesiècle. 226 - Cf. infra, pp. 163-165 et fig. 20. 227 - JL. MYRES, op. cit., nO 1368. Cf. infra, fig. 33. 228 - Cf. C. RAMNOUX, op. cit., p. 37. L'auteur dans son étude sur "le chthonien et le nocturne" (pp. 37-40) part de la distinction établie dans l'Orestie par Eschyle (dont les mots "sont mots de eatalogue, lourds d'intentions et de sens") entre un Hermès Chthonios et un Hermès' Nychios. 229 - HJ. CROON, op. cit., reprenant la thèse de O. GRUPPE, pour qui Héraclès n'était pas lui-même de nature chthonienne et n'était considéré comme tel que parce qu'il avait vaincu et supplanté des génies chthoniens, voit en Géryon un autre Hadès, un bouvier des morts, accompagné d'ailleurs du chien Orthros, comparé au Cerbère des Enfers. 230 - G. DUMÉZn.., Mythes et dieux des GemuJins, Paris 1939, pp. 92-106 et surtout du même auteur, le combat contre l'adversaire triple, dans, Horace et les Curiaces, Paris 1942. 231 - B. LINCOLN, The Indo-European CaUle Raiding Myth, HR, XVI, 1976, pp. 42-61. Cf. aussi W. KIRFEL, Die dreiklJpfige Gottheit, Bonn 1948. 232 - B. LINCOLN, loc. cit., Tableaux p. 46 et 60. 233 - Nous renvoyons, sur ce point à notre troisième partie. 234 - J. BAYET, Origines..., p. 233. Signalons encore la théorie de D. SUTTON (The greek origins of Cacus myth, CQ, XXVII, pp.
85 391-393) pour qui la légende de Cacus est un "remake" d'un vieux mythe italique hellénisé par sa rencontre avec le mythe de Sisyphe volant les chevaux de Diomède (seul mythe grec qui unisse Sisyphe et Héraclès). 235 - PROPERCE, Elégies, IV, 9, 10. On peut remarquer cependant que l'élément triple est, sous différentes formes, présent dans la plupart des versions de la légende : chez PROPERCE, encore, la massue frappe trois fois (IV, 9, 15), chez OVIDE (Fastes, l, 575) elle est dite trinodis, chez VIRGILE (Enéide, 230 sq.), trois fois Héraclès parcourt l'Aventin, trois fois il s'évertue à forcez la retraite du fils de Vulcain, trois fois, tombant de fatigue, il doit s'asseoir. Notons pour notre part, que ce rythme ternaire peut-être relevé aussi chez Apollodore, très proche des sources grecques anciennes. 236 - De origine gentis Romanae, VII, VIII. On retrouve sans doute la même tradition chez SERVIUS (Sur l'Enérde, VIII, 203) lorsqu'il rapporte que Verrius Flaccus donnait au vainquem de Cacus le nom de
Garanus. 237 - S. FERRI, Mostri inferi delle stele daunie, RAL, XXIV, 1969, pp. 133-153. Cf. aussi G. PUCCIONI, Hercules Trikaranos nell origo gentis Romanae, Scripta Untersteiner, 1970, pp. 235-239. 238 - DIODORE, XXIV, 4-6. 239 - Ce sera l'objet de notre troisième partie. 240 - G. DUMÉZll.., Heur et malheur du guerrier, Paris 1969 ou Mythe et Epopée, II, Paris, 1971, pp. 117-124. Cf. encore Mariages épiques, Héraclès, Sigurdr, dans, Mariages indo-européens, Paris 1979, pp. 59-65. G. Dumézil retrouve dans les mariages ou unions d'Héraclès le parallèle des mariages que l'Inde appelle brahma (Mégara), asura (Déjanire) raJcsara (Iole) et éventuellementgandharva (ses nombreuses unions). 241 - Cf. C. JOURDAIN-ANNEQUIN, Héraclès héros culturel, loc.cit., Héraclès mortel ou immortel, héros-bête, comme nous le nomtre la comédie, ou héros-dieu comme l'écrit PINDARE (Néméennes, m, 22). Moins homme que les hommes, non pas seulement par son apparence et ses excès mais aussi par ces transgressions de l'humain que sont la folie de l'esclavage; plus dieu qu'homme par ses victoires répétées sm l'Hadès et sa mort divinisante sur le bûchez de l'Oeta. C'est dans cette tension permanente que se trouve l'intérêt du personnage et nous serions tentée d'en faire, comme A. BRELICH, le héros par excellence, celui qui parcourt tout l'hinterland entre le monde d'en bas et celui des dieux. Cette ambigurté fondamentale d'Héraclès appara1t également dans l'article que N. LORAUX consacre au héros dans Dictionnaire des Mythologies. op. cit., l, pp. 492-497. 242 - Quant à la bibliographie moderne nous n'y reviendrons pas.Cf. note 6. 243 - Cf. B. LINCOLN,loc. cit., pp. 62-65. Nous reviendrons sur ce point
86 dans le deuxième chapitre de notre quatrième partie. 244 - La fonnule. un peu hasardeuse semble-t-i1. est de B. LINCOLN. loc. cit., p. 63. Une interprétation du mythe d'Héraclès, en particulier de l'épisode de Cacus par comparaison avec les mythologies indo-européennes a déjà été donnée par B. SCHWEIlZER, op. cit. pp. 211-219 ; M. BRÉAL. Hercule et Cacus. Paris 1863, contra RJ. ROSE. Chthonian Caule, Humen, l, 1954. pp. 213-227 qui voit, dans le mythe d'Héraclès et Géryon. un récit des populations non
indo-européennes. 245 - J. BAYET. Origines.... p. 410 sq.. Cf. TITE LIVE, 24. 3, 2. 246 - J. TOUTAIN. Observations sur le culte d'Héraclès à Rome, REL. 1928. pp. 200-212 (p. 208). Cf. infra. notte quatrième partie pp. 485-487 et notre Epilogue. 247 - G. COLONNA, Bronzi votivi umbro-sabellici a figura humana.. l, periodo "arcaico". Florence 1970. Cf. aussi J. -Ch. BALTY, Note sur un type italique de l'Hercule Promachos. dans Bull. Art et Hist. 4ème série. 33. 1961. pp. 2-26 et, du même auteur, a propos de quelques séries de bronzes italiques et du culte d'Hercule en Italie Centtale. Problèmes et orientations des recherches dans. Alumni. XXXIV. Bruxelles 1964, pp. 45-54. 248 - F. V AN WONlERGHEM, Le culte d'Hercule chez les Paeligni. AC. XLII. 1973, 1, pp. 36-48. 249- A la fm de notre première partie. 250 - Nous maintenons, sachant très bien. cependant que P. CHANTRAINE ne l'admet qu'au féminin. -l'expression de "nlnV\OC'" l&6vTca>v. Elle est la seule qui convienne parfaitement au "mattte des lions" que les archéologues rettouvent si fréquement au Moyen Orient Cf. infra. pp.
566sq. Cf. H. SEYRIG, loc. cit., Syria. 1944-1945. Cf. par exemple, R. DUSSAUD. /oc. cit.• Syria. p. 221. APOLLODORE, II, IV. 9. APOLLODORE. II, VII. 7. APOLLODORE, VII. 10. Sauf ceux qu'Héra avait elle-même dispersés dans les montagnes de Thrace où il redevinrent sauvages. comme ces apheta zoo. g61éralement réservés pour le sacrifIce. 256 - Héraclès formé sur Héra et cléos signifIerait, selon une étymologie déjà donnée par les Anciens "gloire d'Héra" (Etym Magn.• p. 435 ; APOLLODORE. II. 73; DIODORE de SICILE. 1. 24. 4 et IV, 10. 1). Sur cette relation "probable et pour le moins étymologique" entte Héra et Héraclès voir M DELCOURT. Ugendes et cultes des héros en Gr~ce, 1942, p. 118; L. SÉCHAN et P. LÉVEQUE. Les grandes divinités de la Gr~ce •• Paris. 1966, p. 177 et note 55 p. 187 ; P. CHANTRAINE. Dictionnaire étymologique de la langue grecque.
251 252 253 254 255 -
n.
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257-
Paris, 1968, s.v. "Hpa, pp. 415-416. WILAMOWI1Z, déjà, voyait en Héraclès la "gloire d'Héra" ; P. KRETSCHMER (Glotta, 8, pp. 121 sq.) estime que ce nom devait être un nom théophore répandu à Argos avant de s'appliquer, singulièrement, à Héraclès. Pour W. POETSCHER (Emerita, 39, 1971, pp. 169-184), c'est une réinterprétation ultérieure du mythe qui ferait des exploits accomplis pour la gloire commune de la déesse et du héros des athloi imposés par une Héra jalouse de ce fils de Zeus et d'une mortelle. II donne ainsi quelques exemples des liens qui unissent plus qu'ils n'opposent ceux qui, à l'époque mycénienne, devaient, pense-t-il, former un couple divin (cf. aussi, du même auteur, Héra und Héros, Rhein. Mus., 104, 1961, pp. 302 sq.). Nous proposerons, dans cet ouvrage, d'autres éclairages pour comprendre et cette interprétation du mythe et la probable valeur initiatique de ce deuxième nom (Héraclès se serait d'abord appelé Alcide). Contre la conception parfois acceptée d'Héraclès comme le "héros" ou le "jeune héros" voir A; MORESCmNI-QUATTORDIO, "Hpa ed "1lp<..)" Un tentativo di exegesi etimologica, SSL, 19, 1979, pp. 167-198. De façon plus générale, contre une étymologie "à la grecque", nous ne retiendrons pas l'argumentation de G. Donnay (Autour de l'Héraclès chypriote, npaxT1xà l'OU B '8u:9voUç xunptoÀoytXOU cruvE8p{ou, l, ed. par Th. Pappadopoulos et S.A. Hadjistyllis, Nicosie, 1985, pp. 373-377 : son appel à une comparaison, pour le moins saugrenue, ne disqualifie en rien une explication fondée sur le nom de la déesse. Quant à l'étymologie proposée par H. SCHRETTER et reprise par l'auteur (p. 374), elle reste hautement hypothétique et les rapports d'Héraclès et de Nergal, s'ils existent effectivement (voit infra p. 169) sont loin d'avoir la prégnance de ceux que, tant dans le mythe que dans le culte, le héros entretient avec Héra. Au sens où l'entend L. ALTHUSSER lorsqu'à plusieurs reprises il oppose la catégorie de "totalité", qu'il "laisse" à Hegel à la catégorie de "tout" qu'il revendique pour la pensée marxiste. Totalité: tentation de l'immobilité, cercle (ou sphère) qui se ferme et renvoie à un centre; tout : complexe et inégal, qui fait sa place au devenir.
PREMIÈRE PARTIE D'UNE RIVE A L'AUTRE DE LA MÉDITERRANÉE
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"Au point de jonction de la mer de Roum et de l'Océan se trouvent les phares de cuivre et de pierre bdtis par Hercule, le héros. Ils sont couverts de caractères et surmontés de statues qui semblent dire du geste "i! n'y a ni route ni voie derrrière nous pour ceux qui, de la mer de Roum, voudraient entrer dans l'Océan" . La tradition arabe associe ainsi, en l'an 332 de l'Hégire (1), le nom d'Héraclès au passage difficile d'une "mer de Roum" -qu'il faut, bien sûr, identifier avec notre Méditerranée- vers un océan, "dont on ne connaît ni l'étendue ni la fin", une "Mer des Ténèbres" ou "Mer Environnante" qui évoque d'assez près, nos plus anciens textes grecs. Ce héros, lié aux bornes occidentales du monde connu, comme l'était Dionysos à ses limites orientales, est celui qui, chez Diodore, (2) profita de son expédition contre Géryon pour retoucher le détroit de Gibraltar dont les deux rives étaient soudées selon certaines traditions, ou trop distantes selon d'autres. C'est aussi celui qui, chez Apollodore, érige ces fameuses colonnes, lorsqu'avant d'obtenir la coupe du soleil qui le conduira vers l'île d'Erythie, il passe de la Libye au royaume de Tartessos (2). Enfin - mais cela nous l'avons déjà dit (4) - la tradition tardive rejoint le témoignage d'Hésiode pour situer le jardin aux pommes d'or et les parcs brumeux de Géryon près d'Océan, et localise ainsi, non loin des colonnes qui portent le nom dHéraclès, les deux derniers exploits terrestres du héros. Peut-on dire, alors, avec Jérôme Carcopino, que "l'éden" où chantaient "les voix claires des nymphes du soir s'est déplacé avec l'horizon des Grecs" (5), de même que, sur les rivages septentrionaux de la Méditerranée, l'île d'Erythie, séjour de Géryon, gagnait progressivement l'Espagne? Certes, il est vrai que dans la seconde moitié du VIème siècle on cherchait le jardin merveilleux "dans des îlots du lac Triton, c'est-à-dire des Syrtes" (6), mais il n'en est pas moins vrai qu'Apollonios de Rhodes situe toujours la rencontre des Argonautes et des nymphes dans la même région... (7). On n'en conclura pas, pour autant, que vers 200 avant J. -C., la Cyrénaïque demeurait la limite occidentale du monde connu. Il est vrai, aussi, qu'à la fin du VIème siècle, Hécatée de Milet plaçait Erythie, l'île du bouvier monstrueux, au large de
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l'Epire (8). Mais doit-on imaginer qu'il est en retrait par rapport aux connaissances géographiques des contemporains d'Hésiode ? Tous deux paraissent plutôt représenter des traditions divergentes par rapport à la version première qui d'emblée - et pour cause! - localise Erythie et le Jardin des Hespérides à l'extrême Ouest. Il est curieux, en effet, que tous les historiens citant ce fragment du logographe, conservé par Arrien, laissent à penser qu'Hécatée ne connaît qu'une localisation des prairies de Géryon; le texte pourtant - qui oppose l'Ibérie à l'Epire - paraît plutôt traduire un choix - ratifié par Arrien - choix en faveur de la vraisemblance, dans la mesure où l'Ibérie est jugée trop lointaine. Et c'est une attitude comparable qu'on retrouverait chez l'auteur de l'écrit pseudo-aristotélicien Mirabiles Auscultationes qui polémique contre la version occidentale du mythe et, comme Hécatée (comme Lycos de Rhégion et Théopompe encore), situe le dixième expoit d'Héraclès dans la zone adriatico-épirote (9). D'ailleurs, si Hécatée situe Erythie dans la mer Ionienne, il sait parfaitement que là n'est pas l'Océan; c'est du moins ce que prouve la carte de l'oicoumén~ (10), que, reprenant et corrigeant à la fois Anaximandre, il aurait ajoutée à la Description de la te"e (11). Malgré la part d'arbitraire que suppose toute reconstitution, il ne fait aucun doute qu'y triomphe la conception d'un Océan "extérieur", embrassant l'univers, conception qui rappelle tout à fait ce que nous en apprennent nos premières sources littéraires. Dans l'Iliade, en effet, l'Océan est considéré comme un fleuve puissant (12), et c'est une conception semblable qui s'exprime dans l'Odyssée où le "cours d'Océan" est opposé au "flot du grand large" (13). Continuellement, dans les deux épopées, en effet, on le distingue de la "mer immense", de la Méditerranée, et on le définit par son courant. R. Dion (14), insiste sur la singularité de ce courant : un courant qui revient sur lui-même (15), qui semble ne pouvoir se déverser nulle pan, et au contraire, trouve en lui sa propre fm. C'est une représentation toute semblable qui se dessine dans la Théogonie d'Hésiode: image d'un "fleuve sans rival" dont Héraclès un jour franchira "le cours" (16). Dans un passage, il est vrai d'utilisation délicate, c'est l'expression même de l'Iliade qui se retrouve : l'Océan est un fleuve qui "revient vers sa source" ; plus loin même, il est dit d'Océan qu'il "s'enroule autour de la terre et du large dos de la mer" (17). Pour R. Dion, il ne fait aucun doute que ce courant revenant sur lui-même traduit l'expérience - directe ou indirecte - que pouvaient avoir les Grecs de la marée dans le détroit de Gibraltar.
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Peut-être... ; ce qui est bien certain, en tout cas, c'est que ce "fleuve" représenté par Héphaïstos autour du monde exemplaire du bouclier d'Achille, ce fleuve "enroulé autour de la terre", correspond à une conception rigoureusement symétrique d'un monde embrassé sur toute sa périphérie par les eaux d'Océan. C'est cette représentation que nous restitue la carte ionienne, celle encore que critique Hérodote (18), sans d'ailleurs rien pouvoir lui opposer. Ainsi il nous paraît difficile de retrouver la progression des connaissances géographiques des Grecs à travers une évolution dans la localisation du mythe, qui semble bien n'avoir été ni aussi simple, ni aussi linéaire qu'on l'a prétendu. Le problème sans aucun doute est mal posé. Il semble qu'on puisse admettre une situation d'emblée occidentale et, par là-même, océanique du mythe. Ce que nous chercherons à expliquer c'est la précision d'une localisation qui à Lixos pour les Hespérides, à Gadès pour les troupeaux de Géryon est, à l'époque romaine, couramment admise.
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CHAPITRE PREMIER LIXOS ET GADES, BORNES OCCIDENTALES DU MONDE CONNU
1.1 Dans sa description des Maurétanies, Pline l'Ancien mentionne Tingis, "jadis batie par Antée", (19) et, à trente-deux milles, Lixos, que Claude venait d'ériger en colonie. "C'est là", dit-il, "qu'on plaçait, et le palais d'Antée, et son combat avec Hercule, et les jardins des Hespérides. Un estuaire, qui se glisse en replis sinueux dans les terres, offre, selon les explications modernes, quelque ressemblance avec le dragon qui les gardait: au milieu se trouve une île qui, bien qu'isolée et plus basse que les alentours, n'est jamais inondée par la marée. On y voit encore un autel d'Hercule ; mais, à l'exception de quelques oliviers sauvages, rien ne donne l'idée de la fameuse forêt d'arbres aux fruits d'or" (20). Il est bien regrettable que Pline ne dise pas d'où lui viennent ces "progigieuses inventions des Grecs"f Pas plus que lui, Strabon n'avait éprouvé le besoin de citer les sources de ce que, lui ausi, considérait comme "fables mensongères" (21). En s'excusant du "caractère merveilleux de ces récits", il rapportait cependant qu'au Sud de Lixos se trouvait "un antre à l'intérieur duquel la mer, à marée haute, pénétrait jusqu'à sept stades" et qu'en avant de cet antre, s'étendait un terrain plan où s'élevait un autel d'Hercule que ne recouvrait jamais le flux. (22). Le jardin des Hespérides était-il l'une de ces "fables inventées par les historiens" à propos de cette côte de la Libye extérieure '1 Strabon ne le dit pas, mais il est permis de supposer qu'il connaît, sinon cette localisation, du moins une localisation très voisine. Dans sa description de la Turdétanie (ou Bétique) il évoque en effet les allusions qu'ont pu faire à ces régions Homère et les "poètes postérieurs"... Ceux-ci, dit-il, ont multiplié à l'envi les récits analogues "décrivant les expéditions faites pour conquérir les troupeaux de Géryon et les pommes du jardin des Hespérides, les fameuses "pommes d'or", et nommant Iles des Bienheureux certaines îles dont nous savons qu'elles se voient aujourd'hui encore non loin de l'extrémité de la Maurusie qui fait face à Gadéira" (23). L'association des trois thèmes nous parait d'un intérêt capital, et pour la signification de ces exploits occidentaux et pour leur localisation. C'est un domaine atlantique chargé de valeurs
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mythiques qui se dessine: les côtes ibériques près de Gadès, les côtes maurétaniennes qui leur font face et les îles voisines, que très tôt les Grecs ont considérées comme le séjour des bienheureux. Quant à la date de ces poèmes simplement dits "postérieurs à Homère", nous n'avons malheureusement aucune certitude, même si l'ensemble du texte donne l'impression que ce sont des légendes anciennes que Strabon évoque ici (24). Peut-être, cependant, pourrions-nous déduire, de la longue citation qu'au livre IV, ce même auteur nous fait du combat d'Héraclès contre les Ligyens, qu'Eschyle, en tout cas, connaissait cette localisation; c'est en effet lorsque "Prométhée instruit Héraclès des routes qui mènent du Caucase au Jardin des Hespérides" (25) qu'il lui annonce cette épreuve nouvelle. Le chemin de la Crau, semble bien mener vers les régions atlantiques - il écarte en tout cas la possibilité d'une localisation en Cyrénaïque, mais -depuis Diodore - on imagine plutôt cette "voie héracléenne" suivie par le héros, avec les boeufs qu'il a ravis à Géryon et emmène à Tirynthe... preuve supplémentaire, s'il en était besoin, des étroits rapports qui unissent les deux "exploits". Enfin ce désert de pierres qu'est la Crau, ce vent froid que Strabon nomme Mélamborée - notre mistral- mais qui, dans le Prométhée Délivré était tout simplement Borée (26), la tradition d'Apollodore, qui nous présente Héraclès, guidé par Prométhée, dans la dernière partie de son voyage, vers le pays des Hyperboréens... autant de raisons qui nous incitent à la prudence (27). Sans développer, pour l'instant, l'intérêt que représente ce passage conservé d'Eschyle quant à la signification du mythe, nous nous en tiendrons, en ce qui concerne sa localisation, à un petit nombre de certitudes. Au 1er siècle après J. -C., une tradition bien établie et réputée d'origine grecque, a fixé le souvenir d'Héraclès, dans ces parages de la Libye atlantique. Le héros a cueilli là les fruits d'or - localisation qui, pour être plus précise, n'en est pas moins conforme à ce qu'en savait déjà Hésiode -. Il y a vaincu Antée (28), il y reçoit un culte (29).. tout cela non loin des "colonnes", qui, depuis très longtemps dans la géographie grecque, portent son nom (30). Au-delà de ces colonnes, mais au Nord, sur la côte ibérique s'était, depuis plus longtemps, précisée la localisation d'Erythie, l'île de Géryon, l'île "rouge", "l'île du soleil" (31) qu'Hésiode plaçait simplement au delà de l'Océan. Stésichore le premier, semble-t-il, l'aurait située dans le pays de Tartessos, face au fleuve "aux racines d'argent" (32) (le Baetis, ou Guadalquivir) ;
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au début du siècle suivant, Phérécyde nommait plus précisément Gadeira (Gadès) (33), alors que "d'autres auteurs" indiquaient plutôt" une île qui s'allonge parallèlement à la ville, de "l'autre côté d'un détroit large d'un stade" (34). C'est aussi "près de Gadès" qu'Hérodote (35) et Scymnos (36) situent les pâturages de Géryon: la tradition ne variera plus guère. Pline par exemple, rapporte que c'est dans une "île oblongue" qu'était primitivement Gadès, île qu'Ephore et Philistide appelaient Erythée, et dans laquelle "quelques auteurs" plaçaient "les Géryons qu'Hercule dépouilla de leurs boeufs" (37).
L'évolution est on ne peut plus intéressante: le rôle décisif que semble avoir tenu Stésichore d'Himère dans la précision géographique des lieux, la mention de ce pays de Tartessos qui fut l'El Dorado des premiers colons, autant de facteurs qui incitent à considérer le rôle, certainement très grand, qu'a sans doute eu l'expansion grecque de la période archaïque dans la diffusion des légendes vers l'ouest, et tout particulièrement des derniers exploits d'Héraclès.
1-2 Les derniers exploits d'Héraclès... TI semble qu'on ait parfois confondu la matière mythique, et l'histoire de ce mythe; pour certains auteurs, nous l'avons vu, ces épreuves occidentales du héros sont les dernières, non seulement parce qu'elles terminent sa carrière terrestre, mais aussi et surtout parce qu'ils les imaginent plus tard venues dans la geste d'Héraclès. Sans nier - nous venons de le souligner et nous aurons l'occasion d'y revenir longuement (38) - le rôle fondamental de la colonisation grecque, nous ne pouvons que nous élever contre de telles opinions : comment, en particulier, suivre A. Schulten lorsqu'il affmne que la légende "s'enrichit de trois nouveaux exploits quand les Phocéens arrivent à Tartessos" " (39). Comment croire, avec P. Laviosa-Zambotti (40), que la légende de Géryon rappelle les rapports primitivement hostiles entre Phocéens et Tartessiens ? L'hypothèse rhodienne, préférée par A. Garcia y Bellido (41) et H. Rolland (42). ne paraît pas plus satisfaisante. La colonisation a certainement joué un grand rôle dans la diffusion de la légende et du culte d'Héraclès. voire dans la précision de certaines localisations. peut-être même dans l'attribution au cycle d'Héraclès du mythe des Hespérides (nous aurons à revenir sur ces différents points), mais elle ne peut en aucun cas expliquer la création des exploits occidentaux d'Héraclès, puisqu'au moment où les colons grecs découvrent
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ces rivages lointains, Hésiode, depuis longtemps, a situé au delà d'Océan l'ile brumeuse de Géryon et les jardins des Hespérides (43). Pourquoi donc ces bornes occidentales ? Pourquoi, plus précisément, Lixos et Gadès ? Il semble que, si l'on pouvait - tout en restant pour l'instant, nous le rappelons, dans le domaine des réalités positives - déceler de quelles valeurs les chargeaient les Anciens, on comprendrait mieux ensuite qu'elles aient fixé la légende. Or, il est frappant de remarquer une certaine concordance dans les témoignages littéraires : ces régions atlantiques sont représentées comme des terres merveilleusement riches. Strabon et Pline, s'ils doutent des inventions mensongères des Grecs, se rejoignent dans leur étonnement devant une nature exceptionnelle: le premier rapporte, vraisemblablement d'après Poséidonios, que ce sont les excellents pâturages d'Erythie qui auraient suscité la légende des troupeaux de Géryon, "car le lait du bétail qu'on y met à paître ne caille pas. Pour en faire du fromage, on doit y mêler une grande quantité d'eau, tant il est gras. Quant au bétail, il meurt par suffocation au bout de trente jours, si on ne lui retire une certaine quantité de sang au moyen d'une incision. En effet, l'herbe dont il se nourrit est sèche, mais très engraissante" (44). La flore apparaît ainsi particulièrement luxuriante. Elle comprend même des espèces inconnues ailleurs, tel cet arbre signalé par Poséidonios et auquel Strabon cherche vainement des équivalents: ses rameaux, dit-il, "se recourbent vers le sol, avec des feuilles en forme de glaive, dont la longueur atteint souvent une coudée et la largueur quatre doigts... Si quelqu'un en rompt une branche, il s'en écoule du lait, et, si l'on en coupe une racine, il en sort un liquide de vermeil" (45). Cet arbre, qu'A. Garcia y Bellido identifie au dragonnier (46), est sans doute celui dont nous parle aussi Philostrate et qui, selon lui, "distillait du sang" (47). Or, cet auteur, au début du IIIème siècle de notre ère, rapporte que les habitants l'appellent "arbre de Géryon" et que deux de ces arbres poussent sur le tertre élevé au-dessus de son corps. Faut-il citer encore cet arbre que Pline croit connaître, au large de Cadix, un arbre "dont les rameaux s'étendent tellement que c'est pour cette raison qu'il n'est jamais entré dans le détroit"! (48).
Cette herbe dont les propriétés "engraissantes" sont d'autant plus mystérieuses qu'elle est dite "sèche", ces arbres aux feuilles immenses (49), leurs particularités saisissantes font du pays même de Géryon un pays propice à la légende, un pays de rêve
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pour des agriculteurs qui ne connaissent que les terres sèches de la Grèce. Or, c'est une image assez semblable qui nous est donnée du pays des Hespérides - si du moins on s'en tient à la localisation marocaine - Hérodote, déjà, opposait la Libye sèche, basse et sablonneuse, à la Libye occidentale (à partir du Triton), "celle des cultivateurs... montagneuse, boisée, riche en bêtes..." (50). Strabon encore, loue cette opulence de la Maurusie" : "Elle est extrêmement riche en forêts hautes et denses; tout y pousse. Ainsi ces tables d'une seule pièce, aux couleurs variées, si grandes, c'est elle qui les fournit aux Romains... (On raconte qu')il y pousse une vigne, si grosse que deux hommes ne peuvent en embrasser le tronc; elle donne des grappes d'une coudée environ; toutes les herbes y sont hautes" (51)...ete... et la faune participe aussi de cette exubérance. Le tableau est le même chezPline qui connaît aussi ces citres dont on fait des tables (52), décrit ces forêts "épaisses", profondes formées par une espèce d'arbre inconnue et bien sûr remarquable (53) ; il n'y manque même pas le prodige: une mauve arborescente, précisément située "dans l'estuaire où se trouve la ville de Lixos" et "où furent, dit-on, les jardins des Hespérides" et qui, haute de vingt pieds, est, comme la vigne de Strabon, "si grosse que personne ne peut l'embrasser" (54). Terminons enfin par cette description qui pourrait être celle d'un paradis terrestre ou de l'âge d'or: "Les fruits de toutes sortes y viennent sans culture et en telle quantité que partout les désirs y sont rassasiés" (55). Le parc "brumeux" où Géryon tient enfermé son bétail correspondrait-il à une expérience géographique? (56) Celle d'un pays océanique, d'un pays de marais où la quantité des herbages est telle qu'elle donne valeur exemplaire à ces rapts de bétail, au reste si courants dans la société archaïque qu'à plusieurs reprises la mythologie s'en inspire. Quant aux arbres des Hespérides, peut-être n'est-il pas besoin de les identifier, comme le faisait le roi Juba, avec les citronniers de son royaume (57), pour estimer que leurs fruits devaient paraître particulièrement désirables, venant d'un pays aussi fécond (58), d'un pays où, comme le dit Pline, "tous les désirs sont rassasiés". Mais ces régions atlantiques ne sont pas seulement pour les Anciens des pays verts, ce sont aussi des pays brillant de toutes les séductions des métaux rares. l'argent. l'étain. l'or peut-être... La réputation du pays de Tartessos est suffisamment connue pour qu'il soit permis de passer rapidement. Peut-être savait-on déjà. au moment où s'élaboraient les poèmes homériques. que l'argent venait de ces régions occidentales...
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(59) Stésichore en tout cas connaît vers 600 -et dans cette ville d'Himère dont le monnayage est très précoce- l'existence du fleuve "aux racines d'argent" (60), et, à l'autre extrémité du monde grec, Anacréon fait un parallèle éloquent entre la come d'Amalthée et "un règne de cent-cinquante années à Tartessos" (61). C'est ensuite, rapportée par Hérodote, l'aventure du Samïen Colaios et de ses compagnons qui tirèrent de la vente de leur cargaison de tels bénéfices qu'ils purent offrir une dîme somptueuse à l'Héraion de Samos (62). C'est enfin l'histoire de ce "bon roi" Arganthonios avec lequel les Grecs se lièrent d'amitié et qui, s'ils refusèrent l'offre de s'établir dans le pays, reçurent assez d'argent pour constuire les murs de Phocée menacée (63). Diodore évoque, dans son développement sur les Ibères, les grandes richesses métallifères du pays et plus particulièrement les mines d'argent "très belles, très abondantes, et très productives pour ceux qui les exploitent" (64). Lui aussi croit à l'existence de ruisseaux d'argent pur, nés de la combustion des
Pyrénées (65), et rapporte que dans leur naïveté les Ibères échangèrent le métal contre des marchandises de peu de prix aux Phéniciens qui gagnèrent ainsi d'immenses richesses et après avoir continué longtemps ce commerce "devinrent si puissants qu'ils envoyèrent de nombreuses colonies dans la Sicile et les fies voisines, ainsi que dans la Libye, la Sardaigne et l'Ibérie" (66). Mais c'est Strabon qui, encore une fois, nous instruit le plus et sur "la richesse stupéfiante" qu'avait à son époque conservée le pays du Baetis et sur la réputation qu'il avait chez ses prédécesseurs (67). "En aucun lieu de la terre", estime-t-il, "on n'a pu voir jusqu'à présent ni l'or, ni l'argent, ni le cuivre, ni le fer être produits en quantités si grandes et avec une telle qualité". (68). Toutefois sa description des richesses minières n'est rien à côté de celle de Poséidonios, qui, de l'aveu même de Strabon, "se livre à l'enthousiasme de l'hyperbole" et accorde crédit "à la fable selon laquelle la terre de cette contrée, précieux composé d'argent et d'or, aurait jadis fondu dans l'embrasement des forêts.. puisque, dit-il, chaque montagne, chaque colline de l'Ibérie est en réalité, par le fait d'un destin incomparablement prodigue, un amas des matières dont on tire la monnaie" (69). Quant à l'étain, Strabon rapporte l'opinion de Poséidonios qui affirme qu'on l'extrait du sol, contre l'idée assez répandue qu'on le trouve à la surface (70)... C'est pourtant cette théorie que reprendra Aviénus : "Au dessus des marais, dit-il, s'allonge le mont Argentarius, ainsi nommé à cause de son éclat: l'étain resplendit sur ses flancs; il fait surtout jaillir la lumière dans les
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airs, quand le soleil de ses rayons frappe sa tête élevée. Le fleuve Tartessos roule des flots chargés de parcelles d'étain, et apporte aux villes ce riche métal" (71). En réalité la région de Tartessos-Gadès semble n'avoir été longtemps qu'un entrepôt pour l'étain que ses marins allaient chercher au delà de l'Océan. Aviénus, d'ailleurs, sait que les Tartessiens commercent avec les îles Oestrymnides "riches de leurs mines d'étain et de plomb", (72) mais il ne nous appartient pas, ici, de faire la part de la vérité et du merveilleux (73). Nous dirons même que, pour l'heure, le merveilleux nous intéresse également dans la mesure où nous importe surtout l'image de ce pays tout auréolé de légende. Retrouverons nous au pays des Hespérides pareilles séductions, pareilles richesses ? C'est en tout cas ce que pense Jérôme Carcopino. Il estime, en effet, que Lixos était le centre "d'un réseau de négociations et de voyages" qui, périodiquement, y amenaient "l'or du Soudan et l'argent de l'Atlas marocain". (74). Nous reprendrons ici, en quelques mots son argumentation. Pour l'or, elle se fonde sur le passage bien connu d'Hérodote rapportant, d'après - dit-il - les Carthaginois, comment ceux-ci commerçaient avec les Libyens au delà des colonnes d'Héraclès. "Le trafic de l'or soudanais se pratiquait au Vème siècle avant notre ère exactement selon les naïves méthodes qu'il y a cinquante ans les Européens employaient encore avec les orpailleurs du Sénégal "remarque-t-il" et la simplicité enfantine qu'affectent ces échanges, immuables pendant deux millénaires et demi, nous engage à en attribuer le mécanisme, au delà d'Hérodote qui, pour la première fois, l'a décrit, aux Phéniciens qui, six siècles auparavant, avaient arrêté à l'étape de Lixos leur prodigieuse aventure" (75). Peut-être... Lixos serait aussi l'entrepôt de l'argent et la base de dépan "pour la prospection des mines d'argent de l'Atlas" et les "palabres avec les indigènes" dont elles étaient la propriété... Comme le pays de Tartessos, la Libye aurait sa montagne d'argent, celle où Promathos de Samos, repris par Aristote, situait et les sources du Nil, et celles d'un fleuve "Chrémètès" tributaire de l'océan Atlantique (76). Cette montagne d'argent serait le Grand Atlas, où Juba et Vitruve, repris par Pline, placent aussi l'une des sources du Nil, et le Chrémètès correspondrait au F/wnen Darat de Pline (77), au Dyris de Vitruve (78), au Darados de Ptolémée (79), c'est-à-dire à l'Oued Draa. Selon Jérôme Carcopino toujours, la traduction grecque insisterait sur l'aspect "lucratif' du fleuve; Ptolémée au
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contraire aurait conservé, "sous sa fonne déguisée", le vocable phénicien, fonné sur le nom même de l'argent (80). Ainsi, au même titre que Gadès pour les mines de Huelva et de la Sierra Morena, Lixos serait la clef d'un El Dorado africain, et les pommes d'or, peut-être, le reflet mythique du "fabuleux métal" qu'on allait y chercher... Reconnaissons cependant que la réputation de la Libye est, dans ce domaine, loin d'atteindre celle du pays de Tartessos, et qu'elle n'a guère frappé les imaginations antiques... Certes, on peut essayer de trouver des explications à ce relatif silence, la moindre connaissance qu'ont eue les Grecs de ces régions, la rupture peut-être de ces relations avec l'Afrique profonde, alors que l'Espagne, plus proche de Rome continuait d'être exploitée ? TI n'empêche que le doute peut planer... que Lixos apparaît surtout, d'après le témoignage de l'archéologie, comme une cité vivant de la pêche et de la fabrication du garum (81), ou de l'agriculture (82), comme le prouvent encore, à l'époque romaine, les nombreuses exploitations dégagées, avec leur pressoir à huile ou à vin, leurs cuves et leurs silos. Même si les deux types d'activité ne sont pas exclusifs, même s'il est difficile de retrouver des traces du commerce des métaux, même si l'archéologie ne peut porter qu'un témoignage partiel et toujours susceptible de s'enrichir ou de se renouveler, il restera toujours une disproportion entre l'image merveilleuse que nous ont laissée les Anciens de Tartessos, et celle, nettement plus terne, de la Libye occidentale. Tenninons, cependant, par l'opinion d'Hérodote susceptible, peut-être, de nuancer ces considérations par trop réalistes : dans sa description des "extrémités du monde", au livre III, il constate que celles-ci sont liées à la possession de l'ambre, de l'étain et de l'or et termine ainsi: "Quoi qu'il en soit, il paraît que les régions extrêmes qui entourent le reste du monde et l'enfennent entre elles possèdent seules les choses que nous estimons les plus belles et qui sont les plus rares" (83). Les troupeaux de Géryon, les fruits d'or des Hespérides, n'étaient-ils pas, pour les Grecs, de ces choses les plus belles, les plus rares.
1-3 Ce texte d'Hérodote, certes, nous confmne dans l'idée que nous avions d'un "mirage occidental" propre à conférer à ces régions atlantiques, enveloppées de mystère, toutes sortes de vertus merveilleuses. TI offre également l'intérêt tout aussi capital, de nous rendre compte, une fois de plus, de cet esprit de symétrie
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qui semble avoir guidé les Anciens dans leurs tentatives pour se représenter le monde. La localisation à Gadès d'une part, à Lixos, d'autre part, des deux derniers travaux d'Héraclès, nous paraît procéder de ce même esprit de géométrie: on en jugera mieux en reprenant ces cartes qui tentent de donner une représentation figurée des connaissances géographiques acquises à une époque donnée (84). Ces dernières se précisent, surtout à partir d'Eratosthène, et, grâce à l'expédition d'Alexandre sans aucun doute, l'Asie, en particulier, voit ses proportions et ses contours s'améliorer. Mais, sur la carte du monde "selon Strabon" (85) encore, l'essentiel de la symétrie primitive subsiste et, en particulier, cet axe intangible, ce parallèle censé diviser le monde en deux parties égales et sur lequel, de Gibraltar à l'Inde, les géographes mesuraient la plus grande largeur de l'oicoumén~ (86), sur lequel aussi on s'ingéniait, nous l'avons dit, à retrouver toutes sortes de correspondances largement mythiques (limite des errances de Dionysos à l'Est, bornes qu'à l'Ouest Héraclès lui-même avait mises à ses travaux), et qui disent assez que l'imaginaire l'emporte sur la représentation "scientifique" du monde! Sur cette "carte-image" que nous avons tenté de reconstituer (fig. 1) figure donc ce diaphragme, et sur ce diaphragme se trouvent précisément le détroit de Gibraltar et les colonnes d'Héraclès (87), le Mont Calpé sur la côte espagnole, le Mont Abyla, sur la côte africaine (88). De part et d'autre de ces colonnes, Gadès (la Gadeira de Strabon) et Lixos occupent une position extrême sur le méridien le plus occidental de la terre habitée : "la terre, le monde des hommes, finissent à Gadès" écrit Silius Italicus (89). Les deux villes sont des finistères, parfaitement symétriques et cette symétrie, déjà, avait frappé Strabon qui, dans sa description de la "Maurusie" mentionne "une petite ville qui domine la mer, Trinx selon les Barbares, Lynx d'après Artémidore, Lixos selon Eratosthène" ; cette petite ville est, dit-il, "en face de Gadeira dont elle est séparée par un bras de mer de huit cents stades; la même distance sépare les deux villes des colonnes d'Hercule" (90). Que le théâtre des deux derniers exploits terrestres d'Héraclès occupe dans ces projections de l'oicoumén~ cette place pleine de signification n'est pas pour nous étonner; nous nous étonnerons moins encore quand nous saurons qu'à Lixos comme à Gadès, fondations phéniciennes, était vénéré le dieu Melqart, auquel, si souvent, le héros grec est associé, voire identifié.
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Fig. 1 : Les travaux occidentaux d'Héraclès et l'oicouménè Deux "cartes-images" o
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Ces cartes s'inspirent de celles qu'ont réalisées J.O. THOMSON (History of Ancient Geography) et KH. BUNBURY (A History of Ancient Geography ).
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DEUXIEME CHAPITRE LIXOS ET GADES FONDATIONS PHÉNICIENNES.
2-1 Lixos et Gadès, théâtres des deux derniers exploits terrestres d'Héraclès, sont, en effet, des fondations phéniciennes. La tradition leur confère une grande ancienneté : elles seraient, avec Utique, les premières colonies de Tyr en Occident et précéderaient ainsi Carthage dans le rôle d'entrepôt qui devait plus tard être le sien. Gadès, ou plus exactement Gadir, - en phénicien "l'enclos" (91) - aurait été créée vers 1110 avant notre ère (92), Utique peu après (1101) ; quant à Lixos, le souvenir précis de ses origines n'a pas été conservé, mais le périple d'Hannon, si on peut lui reconnaître quelque autorité (93), fait état des Lixites et Scylax, au milieu du Nème siècle, la mentionne expressément comme étant une ville phénicienne (94). Selon F.C. Movers, l'étymologie du nom même de la cité pourrait être phénicienne (95) et Stéphane Gsell a pu démontrer que les textes épigraphiques, bien rares et mutilés il est vrai, y "ressemblaient à ceux de la côte syrienne beaucoup plus qu'à ceux de Carthage" (96). Pline, enfin, rapporte que, près de Lixos et à deux cents pas de l'Océan, un sanctuaire à Hercule passait pour être plus ancien que celui de Gadès (97). Pour P. Cintas "c'est asssez dire que l'on peut bien croire que la ville de Lixos est une création phénicienne et que les Phéniciens la construisirent assez tôt" (98). Stéphane Gsell et, après lui, Jérôme Carcopino, éprouvent cependant le besoin d'invoquer à l'appui de ce qui n'est guère qu'une forte présomption, cette symétrie plusieurs fois soulignée déjà; "la géographie, écrit J. Carcopino, dispose Gadès et Lixus... à égale distance du détroit de Gibraltar, comme escale, sur leur retour, des navigateurs tyriens voguant vers leurs bases..." (99). Encore faudrait-il que soit conflI'lllée la tradition qui fait des deux autres comptoirs des fondations de la fin du second millénaire: les textes bibliques, s'il faut les retenir, tendraient plutôt à prouver que Gadès n'existait pas encore en tant que cité au moment où sont mentionnés les rapports avec Tarshish (100); et c'est à partir d'Hérodote, seulement, que les sources nomment Gadès (101).; certaines, d'ailleurs, font de la cité phénicienne "l'héritière" de Tartessos : pour Salluste, c'était là l'ancien nom de Ga~s (102). Pline (103), et plus tard Festus Aviénus (104) \
106 laissent plutôt entendre que Gadès a succédé à Tartessos. Quant aux auteurs qui essaient de situer dans le temps cette fondation, ils s'accordent sur sa haute antiquité: "Les Phéniciens amassèrent de grandes richesses et ils résolurent de naviguer sur la mer qui s'étend en dehors des colonnes d'Héraclès et qu'on appelle l'Océan. Tout d'abord ils fondèrent en Europe, près du passage des colonnes, une ville à laquelle ils donnèrent le nom de Gadeira", écrit Diodore (105). Velleius Paterculus, (106) Strabon (107) et Pomponius Méla (108) sont plus précis, qui estiment que Gadès fut fondée peu après la guerre de Troie (109). Faut-il encore que pareille tentative ait été faite pour Carthage (110), dont la naissance est bien sûr liée à celle de ses "soeurs occidentales" mettre en doute systématiquement les données d'une tradition, pour une fois unanime... ? Le problème est peut-être d'interpréter cette tradition, et ce, à la lumière de l'archéologie. Il faut bien le dire, les découvertes archéologiques faites à Cadix ne répondent guère à notre attente; mais les modifications qu'a subies le littoral à cet endroit depuis l'antiquité sont sans doute en partie responsables de cette carence, et peut-être aussi l'agglomération actuelle dont l'emplacement ne doit pas être très différent de celui de la ville antique. Cette ville antique, cependant, était une île et, nous l'avons vu, les sources ne laissent aucun doute à ce sujet. Pomponius Méla la décrit ainsi: Gadès "n'est séparée du continent que par un petit bras de mer semblable à une rivière. Du côté de la terre elle est presque rectiligne; du côté de la mer elle s'élève et fonne une courbe terminée par deux promontoires, sur l'un desquels est une ville florissante du même nom que l'île, et sur l'autre un temple d'Hercule... " (111). L'île, ainsi que le montre bien la reconstitution de A. Garcia Y Bellido (112), s'étendait donc de la ville actuelle à l'îlot de Santipetri, distant de 18 km (113).. L'île, ou plutôt les îles: le périple du Pseudo-Scylax signale en effet des îles (raBelpa vijaol ) dont "l'une d'entre elles possède une ville" (114). C'est bien un archipel qu'il faut imaginer, "un archipel d'îlots entre lesquels la mer circulait ou stagnait, "écrit Victor Bérard qui décrit ainsi le site : "La ville a toujours occupé le plus grand de ces îlots; d'autres subsistent à quelques mètres du rivage (Castello de San Sebastian) ou plus au large (Los Cochinos, Los Puercas etc...). L'île de Cadix est aujourd'hui reliée à la terre ferme, par une bande de sables; sur 15 kilomètres de long, cet isthme n'a, par endroits, que 200 mètres de large entre la mer extérieure et le golfe boueux où le Guadalete pousse son multiple delta; dix et vingt bras de ce fleuve découpent en de nombreuses îles la terre ferme" (115). La présence d'eaux peu
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2 - Cette mème côte dans l'Antiqui~ d'après A. GARCIA Y BElLIDO). 1 - La côte Ktuelle eDtre Cidix et l'Dot de Santi Petri (L'indicaliOll dei proCoadeun est dotm6e en IŒtres).
Ces deux canes IODt extraites de A. GARCIA Y BELLIDO. Hercules Gadirœuu. Madrid, 1964, fig. 1 et 2, p. 76.
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profondes, alentour, rend ainsi plausible la modification du dessin de la côte, de même que les importantes alluvions du Guadalete et les fortes marées expliquent qu'ait pu être rattachée au continent l'extrémité nord de l'île. Autant de bouleversements rendent compte de la pauvreté de Cadix en "Antiquités" - pauvreté plus grande encore aujourd'hui qu'au XVIIlème siècle, lorsque J.R. Suarez de Salazar en faisait une scrupuleuse description (116) - et de la faiblesse de la documentation archéologique. Celle-ci provient essentiellement d'une importante nécropole, située au sud de la ville ancienne (117). Le matériel recueilli dans les tombes, bijoux d'argent et d'or souvent très précieux, témoigne de la résidence, en ce lieu, d'une population aisée, mais ne permet guère de remonter au delà du Vlème siècle, bien loin donc de la date donnée par la tradition à la fondation de la ville. "Cette opulence cependant, fait remarquer P. Cintas, postule une très longue occupation antérieure des lieux" (118), et il reste, pour sa part, persuadé que les nécropoles connues jusqu'à présent à Cadix sont loin d'être les plus anciennes. Le vestige le plus reculé dans le temps d'une présence phénicienne à Gadès est un chapiteau proto-éolique du VlIIème siècle, qui, retrouvé au large de l'îlot d'Erythéia, pourrait avoir appartenu au sanctuaire d'Astarté dont le culte - c'est loin d'être un exemple unique - est bien attesté auprès de celui de Melqart (119). Il n'en reste pas moins vrai qu'à l'heure actuelle l'archéologie paraît à Gadès justifier les théories des sceptiques qui, tel P. Bosch-Gimpera, ou Rhys Carpenter, soutiennent que la ville n'a pu être fondée avant le VlIIème ou même le VIIème siècle (120). P. Bosch-Gimpera, par exemple a, depuis longtemps, insisté sur les difficultés présentées par la date qu'assigne la tradition à la fondation du temple de Melqart à Gadès. Elle pourrait, suggère-t-il, se rapporter au temple de Tyr, restauré après les destructions des Peuples de la Mer; puis, cette date de 1100 ayant été utilisée par les prêtres du temple de la flliale de Gadès comme le début d'une ère nouvelle, elle aurait été rapportée plus tard à la fondation de celui-ci (121). Contrairement à W.F. Albright qui, sans admettre la date traditionnelle, propose encore, pour la fondation d'Utique et de Gadès, une époque relativement haute et situe les entreprises phéniciennes dans la Méditerranée entre 950 et 750 (122), P. Bosch-Gimpera estime, pour sa part, que, si l'on peut "à la rigueur" faire remonter Utique au Xlème siècle, Gadès n'aurait, quant à elle. été fondée que vers la fm du IXème siècle (au plus tôt). "Ce ne fut qu'après des rapports avec la Sardaigne que (les
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Phéniciens) découvrirent qu'une partie des métaux d'Occident, notamment l'argent et le plomb, venaient d'une source plus lointaine et se lancèrent à sa recherche", explique-t-il. Ainsi Gadès ne serait pas à dissocier des autres entreprises phéniciennes pour lesquelles il admet la chronologie donnée par "Eusèbe-Diodore" à leur thalassocratie: entre 836 et 791, pendant les règnes de Metten et Pygmalion (123). 2-2 Le problème particulier de Gadès pose ainsi celui, plus général, de la fréquentation des côtes ibériques et même des mers occidentales par les Phéniciens. Or, il faut le dire, en ce domaine, l'hypercriticisme (124) n'est plus de règle. Les progrès de l'archéologie dans la péninsule ibérique ont alimenté les discussions du Vème Symposium d'archéologie préhistorique de Jerez et, si l'idée qu'on se faisait de la présence grecque en Espagne a quelque peu souffert (Torre deI Mar encore reconnu naguère comme la Mainaké des Grecs s'avèrait par exemple être un site phénicien !), il paraît bien certain désormais, que, conformément aux enseignements de la tradition, les Phéniciens ont, avant les Grecs, découvert les richesses de l'Andalousie. De ce progrès des recherches archéologiques témoigne bien la deuxième édition de l'ouvrage que José Maria Blazquez a consacré à Tartessos et aux origines de la colonisation phénicienne en Occident (125) : près de 100 pages d'addenda et 67 planches ont été nécessaires pour rendre compte des fouilles qui, depuis 1968 - date de la première parution - attestent de la pénétration des influences orientales chez les indigènes du Bronze final et du premier âge du Fer au Sud et au Sud-Ouest de l'Espagne (126). Dans la vallée du Guadalquivir, coutumes funéraires et objets de luxe prouvent que ceux-ci ont très tôt échangé leurs métaux avec des Orientaux (sans qu'on puisse toujours se prononcer sur leur origine exacte : Syriens ? Phéniciens 1 Chypriotes peut-être 1). La région des rios Amanzora et Alméria, près des mines de cuivre et de plomb argentifère de la Sierra de Montérilla, semble avoir été ainsi très tôt fréquentée: les nécropoles de Los Millares, d'El Argar, celle surtout de Fuente Alamo avec ses perles de pâte vitrifiée, typiquement égyptiennes, permettent de dater de la fin du second millénaire ces premiers contacts (127). Mais c'est à coup sûr la présence phénicienne qui, dès la fm du IXème siècle, est attestée dans la nécropole d'Almunecar, fouillée par Manuel Pellicer Catalan, sur un site reconnu comme étant celui de Sexi (128). A cette nécropole, désormais célèbre,
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s'ajoutent celles de Cortijo de Las Sombras, de Tramayar et de Jardin. De même qu'à l'habitat de Torre deI Mar, riche en céramique phénicienne, mais que des tessons grecs du début du VIIème siècle ont permis de faire remonter à la fin du VIIIème siècle (129), une série de "comptoirs" semblent fonner autant d'échelles phéniciennes: Cerros deI Penon, Alarcon, Aljaraque, Toscanos surtout, près de Malaga (130). Dans le même temps les sites proprement tartessiens (Cabazos de San Pedro et de la Esperanza, Colinda de los Quemados, Los Saladares Vinarragell) et les nécropoles indigènes (La Joya, Osuna, Setefilla, Bajo Alentejo) trahissent des influences phéniciennes... Reste que, si la présence des Phéniciens en Andalousie n'a plus rien d'hypothétique, certains documents, déjà, ont été discutés. "Il n'existe malheureusement guère de témoignages univoques d'une présence phénicienne en Extrême-Occident avant le VIIIème siècle, dans la mesure, il est vrai, où la chronologie archéologique est assurée" écrivait en 1976 Guy Bunnens (131). En 1981, cependant, au colloque de Cortona, Martin Almagro Gorbea distinguait une étape de précolonisation (dès les X-IXe siècles) et une colonisation proprement dite ne commençant qu'au VIIIème siècle, ceci bien sûr pour la Péninsule ibérique (132). Dans la Méditerranée centrale, la situation est plus claire encore: certes, le "Melqart de Sciacca" trouvé au large de Marsala n'est pas une preuve suffisante de la fréquentation de ces eaux par les Phéniciens des XIIè-XIème siècles, (133); mais les influences sémitiques relevées par Luigi Bernabo-Bréa sur certaines civilisations indigènes du début de l'âge du Fer sont plus troublantes (134), et si, pour certains historiens, rien n'est à Motyé - la plus ancienne des fondations siciliennes - antérieur à 700, d'autres restent persuadés que les Phéniciens étaient, dès la deuxième moitié ou à tout le moins dès la fin du VIIIème siècle, présents dans la Sicile de l'Ouest (135). Plus tôt encore, ils fréquentèrent la Sardaigne. Malgré Rhys Carpenter et G. Garbini, on ne doute plus guère que les inscriptions archaïques - depuis longtemps connues - de Nora et de Bosa datent bien du IXème siècle (136). Elles constituent les indices sérieux d'une présence phénicienne très ancienne dans cette île, qui comme la Côte du Soleil espagnole, les attirait par sa richesse métallifère... une présence désonnais confmnée par de nombreux sites de la côte sarde, qu'il s'agisse d'Antas (137) ou de Tharros (138). Ce dernier chantier surtout a livré, outre un Tophet, un abondant matériel archaïque (139), et, à l'époque punique, il reste sans aucun doute le centre de commerce le plus important de l'île (un commerce dirigé vers la Sicile occidentale, l'Ibérie, l'Etrurie et la
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Gaule méridionale), alors que Sulcis semble avoir eu pour fonction de rassembler la production agricole et les minerais de l'intérieur et que Nora était vraisemblablement la "capitale" de l'administration punique en Sardaigne (140). On retrouve à Malte cette même exploitation par les Carthaginois des positions phéniciennes. Après une occupation ancienne - qu'on mesure bien dans le sanctuaire mégalithique de Tas Silg fréquenté dès la Préhistoire et voué à une divinité féminine qui, avec eux, deviendra Astarté, - les Puniques feront de l'île un centre stratégique d'une importance fondamentale sur la route de l'Orient à l'Occident (141). Et c'est encore le rôle qu'ils assignèrent à Ibiza, dans les Baléares, dès le VIIème siècle (142). Ainsi, se précisent, progressivement, les jalons de la présence phénico-punique dans les mers occidentales. Ainsi s'affine, également, la réflexion sur la signification et les modalités de cette expansion. Particulièrement significative fut, à ce titre, la rencontre organisée conjointement à Rome, en mars 1985, par l'Université, le CNR et l'Academia Belgica (143). Pour notre propos, nous en retiendrons quelques enseignements : 1. L'idée de plus en plus affirmée qu'entre le grand mouvement mycénien de l'âge du Bronze et ce qui - à tort probablement - fut appelé la thalassocratie phénicienne, une phase de transition vit des marchands orientaux fréquenter les mers occidentales : Syriens, Chypriotes de la fm de l'âge du Bronze (144), Sidoniens sinon Tyriens pourraient avoir assuré cette continuité entre le second et le premier millénaires (145). 2. Peut-on, dans ce cas, donner à la première phase de l'expansion phénicienne, bien antérieure - personne n'en doute plus (146) - au VIDème siècle, le nom de précolonisation ? ni Federico Mazza - qui demande qu'on précise et qu'on approfondisse les limites de son champ de validité pour les Phéniciens (147) - ni Vincenzo Tusa (148), ni Guy Bunnens (149) n'estiment le terme adéquat: - découvertes, voyages, commerce essentiellement, même s'il s'y ajoute, dans certains cas l'exploitation minière, telles sont les réalités de ces premiers contacts. 3. Cette recherche des métaux - mobile essentiel de ces expéditions - explique que les Phéniciens aient été très rapidement attirés par les richessses de l'Ibérie et de la Sardaigne (150). (Nous laissons de côté, pour l'instant le problème de la côte italienne) (151). Le cas de l'Afrique du Nord, de Malte, et de la Sicile occidentale paraissant quelque peu différent: le rôle de
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Malte est essentiellement en effet celui d'un centre commercial et stratégique ; les villes phéniciennes de Sicile paraissent, quant à elles, très tôt liées aux échanges avec les fondations coloniales grecques (152). 4. Enfin, c'est à partir du VIIIème siècle qu'on peut commencer à parler de colonisation (avec, là encore, quelque réticence à utiliser ce terme pour une réalité aussi différente dans ses motivations et ses réalisations de ce qu'est la colonisation grecque), les fondations phéniciennes pouvant apparaître non seulement comme une conséquence des relations commerciales qui les ont précédées, mais encore, peut-être, comme une réaction à la présence grecque (153). Sommes-nous si loin du témoignage de Diodore qui rapporte comment les Ibères ignorant l'usage de l'argent le vendirent, en échange de marchandises de peu de prix, aux marchands phéniciens et comment ceux-ci, amenant cet argent "en Asie, en Grèce et dans d'autres nations" amassèrent d'immenses richesses" ? (154). Les Phéniciens continuèrent longtemps ce commerce, ajoute Diodore, et "devinrent si puissants qu'ils envoyèrent de nombreuses colonies dans la Sicile et les îles voisines, ainsi que dans la Libye, la Sardaigne et l'Ibérie" (155). C'est, semble-t-il, lors de cette deuxième étape que, parce qu'ils souhaitaient naviguer au-delà des colonnes d'Héraclès, "ils fondèrent d'abord... une ville qu'ils appelèrent Gadeira"... Expéditions précoloniales (et nous utilisons le tenne dans sa seule acception chronologique, difficilement contestable), puis, dans un second temps, fondation de cités dont le mouvement s'amplifie lorsque Carthage recueille l'héritage phénicien, tel semble bien être le schéma général de l'expansion phénico-punique. Certes, le problème de Gadès reste posé puisqu'à son propos, les sources entendent bien qu'il s'agit d'une fondation ("Ils y firent toutes les constructions convenables", précise Diodore qui, il est vrai, ne mentionne que le temple d'Héraclès) (156). Nous laisserons sans solution cette discordance entre la tradition et l'archéologie (discordance qu'on peut toujours espérer provisoire !) et retiendrons l'essentiel : la présence de Phéniciens dans les mers occidentales, et aux confms de l'Océan en cette époque charnière entre le second et le premier millénaire, entre les navigations mycéniennes et les établissements grecs de la colonisation historique.
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Fig. 3: Lixos et l'estuaire du Loukkos
1.
D'après M. TISSOT, Recherches sur la géographie comparée de la Mauritanie Tingitane, 1977, p. 77.
2.
L'estuaire vu des premières pentes de l'acropole de Lixos.
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2-3 Comme Gadès, plus que Gadès peut-être, Lixos paraît faire mentir les sources antiques; pourtant, contrairement à son homologue ibérique, la ville antique ne présente pas l'inconvénient d'être oblitérée par une ville moderne. La cité, est, comme bien des villes phéniciennes, située près de l'Océan (1,5 km) sur l'avancée d'un petit plateau, plus salubre que les terres marécageuses qui l'entourent. Elle domine, en effet, les méandres paresseux du Loukkos, méandres qui, pour Pline, offraient quelque ressemblance avec le dragon gardien des pommes d'or (fig 3). Il semble d'ailleurs qu'ici, comme à Gadès, le tracé de la côte ait été quelque peu modifié et que les navires antiques aient pu, plus facilement qu'ils ne le pourraient aujourd'hui, accéder au pied de l'acropole de Lixos : près du port dont subsistent quelques quais, s'étendent en effet d'importants quartiers artisanaux qui traitaient le poisson et fabriquaient le garum, tellement apprécié dans l'antiquité. Il n'entre pas dans notre dessein de décrire ces ruines importantes (157), dont, jusqu'ici, seuls les niveaux maurétanien et romain sont véritablement dégagés, mais de tenter d'y retrouver les traces de la présence phénicienne. Or, la difficulté de la tâche est considérable : comme sur bien des sites antiques la stratigraphie est bouleversée et de nombreux fours à chaux (plus de dix pour le quartier des temples) témoignent du pillage et de la destruction de la ville ancienne. "Retrouver dans un sondage le niveau d'habitat punique en place à moins d'un mètre de profondeur y est chose aussi courante que d'y reconnaître les niveaux d'époque médiévale à trois ou quatre mètres en dessous de la surface du sol" déplore Michel Ponsich (158) qui, près de quinze ans après les dernières campagnes de fouilles, publie, sans la collaboration de Miguel Tarradell qui dirigeait le chantier, une description des principaux édifices de la ville haute et des conclusions chronologiques concernant l'évolution de ce quartier des temples (159). Les couches anciennes de l'habitat avaient été, une première fois, atteintes par des sondages effectués par Miguel Tarradell au versant méridional de l'Acropole (160). Un matériel important avait été recueilli: poteries indigènes de tradition néolithique, puis céramique à couverte rouge lustrée, typique, selon l'archéologue, du commerce phénicien dans la, Méditerranée au VIIème siècle (161). Ainsi les premières conclusions supposaient l'existence d'un site indigène, pénétré dès cette époque d'influences phéniciennes et envisageaient la fondation d'un établissement permanent et déjà important dès le VIème siècle (162).
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Lors des fouilles du quartier des temples ces niveaux anciens ont à nouveau été retrouvés : des sondages dans le temple F (163) ont produit "le même matériel archaïque que l'on trouve à Lixus dans tous les sondages à une certaine profondeur : céramique typiquement phénicienne à vernis rouge d'excellente qualité, des Vllème siècle et Vlème siècle av. J.C., mêlée à de la céramique brune réticulée de production indigène, et des fragments d'amphores, toutes préromaines" (164). Analyse du matériel et datation sont encore, on le voit, fort imprécises, et il en est de même pour la céramique retrouvée, lors de la campagne 1962-63, dans une citerne située dans la partie ouest du temple F et comblée après la construction des fondations de ce même temple, à l'époque des rois maurétaniens Juba II et Ptolémée au 1er siècle de notre ère. Cependant quelques ampoules de type chypriote à col renflé sont plus précisément datées du Vllème siècle (165) ; elles sont fréquentes à Mogador (166), sur les sites puniques d'Afrique du Nord et notons-le "omni-présentes à Chypre" (167) ; significatives encore de l'époque phénicienne sont les lampes à coupelle et à deux becs qu'on retrouve aussi bien en Afrique du Nord qu'en Espagne, et les oenochoés à bobèche recouvertes de cet enduit rouge très lustré, qui en Espagne (168) comme à Mogador (169) se retrouvent dans les niveaux des VIIème et Vlème siècles et que P. Cintas, constatant leur absence à Carthage, considère comme ne pouvant être d'origine punique (170). Ce même matériel- et c'est à ce point précis qu'il est pour nous d'un intérêt capital - est encore celui qui apparaît dans les sondages faits en divers points de l'abside du temple H et permet ainsi de dater la construction de l'édifice des VIIème - début Vlème siècle en "en faisant ainsi le plus ancien temple de Lixos" (171). L'étude précise du matériel recueilli sur le site reste à faire ; il ne semble pas moins admis que les céramiques trouvées dans les couches les plus profondes de la cité (niveau 5) et en particulier dans les fondations du temple H ne remontent pas au-delà du Vllème siècle. Encore une fois, nous sommes loin des données de la tradition. Il est un point, cependant, que les récentes découvertes archéologiques permettent de considérer comme acquis: la certitude qu'au Maroc, l'influence proprement phénicienne a effectivement précédé les entreprises puniques; c'est, on vient de le voir, probable à Lixos, contrairement à une opinion communément répandue (172); les travaux de M. Ponsich pour la région de Tanger le prouvent avec évidence (173). Les
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Fig. 4: Lixos
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,
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1. Plan des fouilles de Lixos
2. Lixos : vue aérienne du quartier des temples d'après: Chroniques de l'archéologie marocaine, Lixus, BAM 1964, Pl. IV et Pl. 1 p. 369.
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nécropoles ont fourni des bijoux des VIIème-VIème siècles avant notre ère, des "céramiques imitées ou dérivées des vases phéniciens dont le plus ancien, le vase en chardon, est généralement daté des VIIIème et VIIème siècles". Enfin l'absence de céramique classique carthaginoise, amphores et lampes, situe l'âge de ces nécropoles "avant la venue d'Hannon, c'est-à-dire avant le début du Vème siècle" (174). C'est, pense l'archéologue, dès le VllIème siècle avant notre ère qu'aurait commencé d'être utilisée, par exemple, la nécropole de Djebila (175) (près des grottes dites d'Hercule !), mais pour l'essentiel elle daterait, comme celle d'AYn Dalhia, des VIème et Vème siècles. Ces découvertes confirment les conclusions qu'il était possible, déjà, d'apporter après les fouilles de l'îlot de Mogador (176). Dans la même couche stratigraphique (couche IV) voisinaient en effet de la céramique phénicienne archaïque, de très nombreux tessons lustrés rouges analogues à ceux de Lixos et, permettant de les dater, des fragments d'amphores attiques "SOS" de la seconde moitié du VIIème siècle et de la céramique ionienne, rhodienne ou chypriote du VIIème siècle également. C'est un véritable comptoir qui est ainsi attesté jusqu'à la deuxième moitié du VIème siècle, époque à laquelle il paraît abandonné. Ainsi, que ce soit dans la région du détroit ou 700 km plus au Sud, la présence phénicienne est désormais établie sur les rivages atlantiques du Maroc, et, par-là même, l'intérêt que pouvaient représenter pour ces Orientaux les contacts avec l'Afrique profonde. Un autre enseignement, tout aussi important pour nous, se dégage de ces recherches : le matériel recueilli dans les nécropoles, ou, comme à Mogador, sur le site de ce qui devait bien être un comptoir, invite à tourner les regards non pas tant vers la lointaine Phénicie que vers le Sud de l'Espagne, et pourquoi pas, Gadès... (177) C'est en particulier le cas de la céramique lustrée rouge et, semble-t-il, aussi, des importations grecques au Maroc, trop rares pour avoir été l'objet d'un commerce direct, trop mêlées aux vestiges phéniciens pour ne pas être arrivées avec eux. (178). Une fois de plus nous trouvons liés les destins de Lixos et de Gadès, et, contrairement à l'habitude, c'est au témoignage littéraire que nous demanderons de confmner les déductions des archéologues ; nous invoquerons Strabon, en effet, et le récit qu'il fait des aventures "d'un certain Eudoxe de Cyzique, qui sous le règne du second Evergète vint en Egypte comme ambassadeur et héraut". n rencontre là un Indien, échoué sur les
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côtes du Golfe Arabique, le suit dans une expédition qui doit le conduire en Inde, et trouve, sur les côtes d'Ethiopie où il dérivait, une figure de proue "d'un bateau venu de l'Ouest", il apprend, nous dit Strabon, "qu'elle venait de Gadeira : dans cette ville en effet, tandis que les riches arment de grands navires, les pauvres frètent de petits bateaux qui portent le nom de "chevaux" à cause des figures sculptées à la proue; ils s'en servent pour aller pêcher jusque vers le Lixos en Maurusie. Il y eut même des armateurs pour reconnaître dans cette figure de proue celle d'un bateau comme il y en avait tant qui, partis au delà du Lixos, n'étaient jamais revenus" (179). Laissant Eudoxe à ses aventures maritimes et Strabon à ses attaques contre Poséidonios qui rapporte une histoire à laquelle il ne veut pas croire, nous ne retiendrons de ce passage que le témoignage - involontaire - de ces relations maritimes entre Lixos et la côte marocaine, qui, au Hème siècle avant J.e., semblent avoir été aussi courantes qu'ancrées profondément dans les habitudes des marins de Gadès. Ainsi se précise, avec les découvertes archéologiques, ce qu'à la suite de W.F. Albright et de P. Bosch-Gimpera, nous appellerons le "climax" des entreprises phéniciennes dans la Méditerranée Occidentale. Il semble bien en particulier que les résultats des recherches récentes ruinent les théories des "hypercriticistes" et permettent d'envisager la présence phénicienne dans ces régions, dès le début du 1er millénaire... Rien de tel n'est encore prouvé pour le Sud de l'Espagne, peut-être même est-illégitime d'affIrmer - comme le témoignage de Diodore nous invite à le faire - que les marins de Tyr ne s'installèrent en ces lieux" qu'après avoir ramassé de grandes richesses" en deçà des colonnes d'Héraclès (180) ; mais il n'est pas interdit de penser non plus - des exemples illustres le permettent en effet (181) - que les expéditions les plus lointaines ne furent pas obligatoirement les plus tardives, que la présence ancienne des Phéniciens attestée par la tradition, au-delà des colonnes d'Hercule, n'a pas forcément, dès le début, pris la forme d'un établissement et d'un commerce régulier, et que les marins fréquentant ces côtes ont pu y laisser d'autres traces de leur passage. Il est temps de rappeler, en effet, que c'est à propos d'Héraclès seulement et non de la ville, que Pline fait état des prétentions des Lixites à l'antiquité vénérable de leur sanctuaire (182) et que Pomponius Méla, de même, ne mentionne les fondateurs tyriens et l'époque de la guerre de Troie qu'au sujet de cet Hercule, qu'il croit d'ailleurs égyptien (183).
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TROISIEME CHAPITRE HÉRACLES • MELQART ET SES SANCTUAIRES DE LIXOS ET GADES
C'est en archégète qu'apparaît ainsi le Melqart tyrien. "Seigneur de la ville", comme l'indique son nom (MLQRT), il étend aussi sa protection aux entreprises des marins tyriens et les accompagne partout où ils s'installent, à Chypre (184), à Carthage (185), en Sardaigne (186), au delà des colonnes d'Héraclès (187). Et nous avons déjà signalé l'intérêt de cette inscription bilingue de Malte qui traduit Melqart, roi de Tyr, par Héraclès archégète . Nous ne possédons malheureusement qu'assez peu de renseignements sur cette divinité, pourtant essentielle, du panthéon tyrien (189). C'est une inscription araméenne du IXème siècle, trouvée près d'Alep, qui, pour la première fois, atteste de son existence (190) et, au Vllème siècle, il figure dans le traité d'alliance du roi assyrien Asarhaddon (191) ; son sanctuaire à Tyr, n'a pu être retrouvé, il aurait, d'après Hérodote, été "établi en même temps que l'on fondait Tyr" (192), et, comme Tyr "était habitée depuis 2 300 ans", il faudrait supposer que la ville et le sanctuaire eussent existé depuis 2750 environ avant notre ère. D'après Ménandre d'Ephèse, au contraire, l'aménagement du sanctuaire remonte seulement à Hiram 1er, contemporain de Salomon (193) ; c'est cependant après avoir démoli l'ancien temple qu'Hiram en reconstruit un nouveau; le culte de Melqart à Tyr, s'il est est donc bien établi au début du 1er millénaire, pourrait -rien n'interdit de le penser- avoir ainsi des racines plus anciennes. R. Dussaud, qui fait remarquer son absence dans les textes de Ras-Shamra et d'El Amama, pense qu'il a pu se constituer au début de l'âge du Fer, et plus précisément avec le développement de la puissance tyrienne : l'organisation ou la réorganisation du culte par Hiram s'entend alors beaucoup mieux et apparaît comme un acte politique au moins autant que religieux. Pour comprendre comment le dieu phénicien a pu être assimilé à l'Héraclès grec, il serait capital de connaître la nature, les fonctions de Melqart... Pour R. Dussaud il serait le produit d'un syncrétisme entre Ba'al (dont il garderait parfois le nom: Ba'al $or = Ba'al de Tyr) et le dieu de la mer Yam (195) ; C. et G. Ch. Picard ne croient pas à cette identité profonde de Melqart et de Ba'al, qui, pour eux, appartiennent à deux catégories
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divines absolument distinctes : "celle des dieux suprêmes, tout puissants, impassibles, qui trônent souverainement au sommet de l'Empyrée" et "celle des dieux actifs, combattant et à l'occasion souffrant par lesquels la providence communique avec le monde", et ils ajoutent qu'à Carthage, loin de s'associer, les deux divinités semblent s'exclure (196). La documentation, en ce qui concerne Melqart, est, en réalité, très indigente et on pourrait même dire qu'à son sujet la science moderne a les mêmes hésitations qu'au sujet d'Héraclès, hésitations que résume fort bien E. Lipinski, (197). On l'a successivement considéré, dit-il, comme étant, 'à l'origine, une personnification de la planète Saturne (W. Genesius) ou un dieu du feu (F.K. Movers) ; une divinité solaire (W.W. Baudissin) ou au contraire infernale (pour W.F. Albright, il serait "le roi de la cité des morts"); un dieu de la foudre et de la pluie (Du Mesnil du Buisson) ou une divinité agraire (H. Seyrig) ; un dieu de la conquête et des conquêrants (J. Gagé) ; une figure issue d'un syncrétisme entre le dieu de l'orage, Baal Hadad et le dieu de la mer Yam (R. Dussaud), voire le dieu El lui-même (M.H. Pope) ... C'est désormais dans une autre direction que semblent s'engager les historiens de la religion phénicienne (198) et il nous plaît de constater que leurs travaux confirment ce que l'étude du syncrétisme qui fmit par l'unir à l'Héraclès grec nous permet d'entrevoir (199).
3-1 La mode semble en être passée (200), revenons cependant sur le rôle qu'aurait pu tenir Melqart au sein de l'une de ces triades méditerranéennes dont on a peut-être - au moins en ce qui concerne l'Orient - trop parlé. V. Bérard, déjà, faisait de lui un dieu fils du panthéon phénicien (201) ; H. Seyrig, bien qu'il hésite à parler de triade (202), réunit cependant un faisceau de documents littéraires, épigraphiques, ou iconographiques qui témoignent en ce sens. C'est d'abord la généalogie, rapportée par Eudoxe de Cnide, au début du Nème siècle avant notre ère, d'un Héraclès phénicien, donné comme fils de Zeus et d'Astérie (203).. Zeus qu'il est possible d'identifier avec certitude avec Ba'al (plus souvent nommé Ba'alshamen en Phénicie), et Astérie dont l'aspect très grec lui paraît recouvrir visiblement celui d'Astarté, dont le culte est, par ailleurs, bien attesté à Tyr.
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(204) Ce sont aussi deux inscriptions de Tyr dont l'une mentionne, associée à Héraclès, la déesse Astronoé (205), l'autre témoignant simplement de la survivance, aux Vème et Vlème siècles de notre ère, du nom d'Astronoé appliqué à l'un des deux ports de Tyr (206). Pour H. Seyrig, comme pour R. Dussaud, l'identité d'Astronoé et d'Astarté ne fait aucun doute, pas plus que la nature "astrale" de la divinité primitive. Ces relations familiales seraient exprimées dans un bas-relief de Tyr (fig. 5) conservé à l'Université Américaine de Beyrouth (207). Une scène de naissance y est représentée, "dominée par un arbre enflammé, au tronc duquel s'enroule un serpent. Sur un lit est étendue une femme souffrante. Sous l'arbre, une biche cornue allaite un enfant, vers qui rampe un serpent. Un aigle est perché sur le dos de la biche". H. Seyrig partage l'avis de E. Will, pour qui l'arbre enflammé et le serpent caractérisent le lieu de la scène : le célèbre sanctuaire tyrien d'Héraclès (208), mais n'hésite pas, quant à lui, à reconnaître dans les personnages, ceux-mêmes d'une naissance d'Héraclès: le dieu serait l'enfant jouant avec le serpent, l'accouchée Astronoé-Astérie, et "sur le dos de la biche, l'aigle de Zeus, l'époux d'Astérie et le père du jeune dieu". Ainsi, au 1er siècle de notre ère, ce bas-relief représenterait la famille divine tyrienne, telle qu'elle était connue, cinq siècles auparavant, par Eudoxe de Cnide: Ba'alshamen Astarté et Melqart (209). Enfin, il serait possible, peut-être, de retrouver la trace d'une pareille organisation dans les cultes d'Oumm el'Ahmed (210), localité située à 19 km à vol d'oiseau de Tyr, sur la route de Ptolémaïs et très certainement dépendante de Tyr, ainsi qu'en témoignent, par exemple, les monnaies recueillies dans les fouilles. Or, parmi les inscriptions - toutes phéniciennes trouvées sur le site, huit sont des dédicaces, attribuées par M. Dunand au temple de Milkashtart où se trouvaient d'ailleurs deux d'entre elles (211). Quatre s'adressent à "Milk'Ashtart dieu de Hammon" (212) ; une le mentionne en compagnie d'Ashtart (213) ; les autres s'adressent à Ba'alshamen, à El et Ousir (214). M. Dunand propose de voir dans ce dieu Milk'ashtart, jusqu'alors inconnu en Phénicie, un Melqart (époux) d'Astarté (215)... traduction que H. Seyrig changerait volontiers en Melk (qart) (fils) d'Astarté ; on retrouverait ainsi, dans la bourgade voisine de Tyr, le reflet des cultes de la métropole, et, en particulier, puisqu'Ashtart (Astarté) et Ba'alshamen sont honorés conjointement avec Milkashtart dans ce qui semble bien avoir été le sanctuaire principal d'Oumm el'Ahmed, "du groupe trinitaire qui occupait la tête du panthéon" de Tyr. Le rapprochement ainsi
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Fig 5: Relief de l'Université américaine de Beyrouth (nO 4721) (photo du musée de l'Université, 1970).
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établi avec Melqart, trouverait d'ailleurs sa confmnation dans une statue d'Héraclès à la peau du lion (216), dans un fragment de corniche, aussi, où se détache une massue en relief (217). Cette filiation est loin d'être tout à fait claire (218) ; elle n'est, de plus, attestée que pour l'époque hellénistique: Melqart serait alors, à Tyr, fils du dieu suprême Ba'al, et d'une déesse, en qui tantôt domine l'aspect astral (219) et tantôt celui d'une déesse mère, dont les rapports avec le jeune parèdre adolescent trouvent de fréquents parallèles dans le monde méditerranéen (220). Ajoutons que, si l'on se risque à parler de triade ce doit être en gardant à l'esprit deux ordres de réalités assez différentes: 1. Celle de l'interprétation grecque d'abord et des défonnations qu'elle ne manque pas d'entraîner pour qui cherche à retrouver, en deçà, la réalité d'origine. Qu'il y ait une tentation des mythographes grecs à traduire sur le plan des rapports de parenté des affinités qui peuvent fort bien ne correspondre à rien de tel dans la religion phénicienne est difficile à nier : la forte organisation donnée à leur panthéon par la famille olympienne les y incite, tout autant que le caractère généalogique de leurs grandes classifications mythologiques. Précisons cependant que, même lorsqu'elles défonnent la réalité sémitique, de telles interprétations ne peuvent être négligées, par qui, précisément, étudie les phénomènes de syncrétisme. 2. Il se pourrait d'ailleurs - c'est en tout cas notre sentiment - que ces structures familiales, loin d'être purs artifices, redonnent vie à de très anciens schémas, qui, dans les religions méditerranéennes, organisent de façon spécifique l'imaginaire, autour de cultes exaltant la fertilité/fécondité et, plus généralement, les forces vives de la nature: en Grèce, dans le cas des divinités féminines, le mythe traduit en tennes de parenté (la relation mère/fille qui unit Déméter et Coré par exemple), les deux pôles à la fois successifs et complémentaires de la féminité (221). L'enfant divin peut être également - et cela paraît plus fréquent en Orient - le ms/amant de la déesse, le parèdre qui, si souvent, lui est associé dans le culte. Que cette famille divine se complique ou se complète - ne change rien à ses fonctions : l'hiérogamie elle-même reste gage de fécondité/fertilité, et, si la disparition de la déesse fille symbolise le cycle végétatif, la mort et la résurrection du jeune dieu paraissent bien, dans certains cas, s'être chargées d'une symbolique beaucoup plus complète. dans le cadre de la royauté sacrée, des vastes pouvoirs qu'elle assume et qui doivent être périodiquement redupliqués. Peut-être d'ailleurs - et ce serait plus légitime encore en Orient qu'en Grèce - faut-il, comme le fait P. Xella, mettre
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l'accent, non pas tant sur la triade (que, pour sa part, il rejette nettement), mais bien plutôt sur un couple divin "dont l'élément le plus solide pourrait être une déesse au caractère peu spécifique, composite, presque universel" (222) et c'est encore une dyade qui, pour B. Servais-Soyez, règne sans contestation possible sur les panthéons hellénistiques et romains de Phénicie (223). Et il est tout à fait vrai que, dans le cas de Melqart, c'est son association avec Astarté qui constitue la donnée la plus sûre, la plus largement répandue, la plus durable... même si en certains de ses sanctuaires - à Chypre par exemple - on a l'impression que le jeune dieu a peu à peu évincé une déesse, effectivement primordiale. La nature du dieu tyrien n'en demeure pas moins assez mystérieuse : dieu solaire a-t-on dit - invoquant l'orientation qu'aurait donnée Salomon à son temple à l'imitation de celui de Tyr (224) - et son "réveil", qui chaque année à Tyr, depuis Hiram 1er, était célébré au mois de Péritios (225), c'est-à-dire en février-mars, pourrait le confirmer. A moins qu'on entende plutôt ce rite de l'lYEpa\C' comme la "résurrection" d'un dieu mourant et renaissant, résurrection à laquelle la légende rapportée par Eudoxe de Cnide s'efforcerait de donner une explication étiologique (226). C'est généralement cette interprétation qui prévaut, et on tend à admettre que Melqart est un dieu chthonien, un dieu agraire au sens le plus large du terme ; H. Seyrig, toutefois, fait bien remarquer qu'à l'inverse d'Adonis et d'Eshmoun, dont le culte met surtout l'accent sur les rites de la mort, en été, Melqart au contraire "est avant tout un dieu ressuscité, dont la tète printanière célèbre le triomphe" (227)... Le triomphe et la force ajouterions nous volontiers : Melqart est un dieu-roi dont la force vitale est garante non seulement de la fertilité de la terre, de la fécondité de l'espèce humaine, mais encore du fonctionnement ordonné du Cosmos et de l'équilibre harmonieux de la communauté qu'il protège. C'est à refaire cette force vitale que sert l'egersis et l'on conçoit que le rite ait pu être essentiel à la dynastie de Tyr, qu'il ait été repris et célébré par les communautés installées au delà des mers, des côtes phéniciennes à Gadès, en passant par Carthage (228). Le sanctuaire de Melqart n'a pas été identifié, qui apporterait sans doute des informations complémentaires (229) ; E. Will, nous l'avons dit, pense en avoir retrouvé les éléments essentiels sur le bas-relief de Tyr : l'olivier enflammé et le serpent, éléments attestés, au reste, dans deux ouvrages tardifs,le roman d'Achille Tatius, Leucippé et Clitophon, et les Dionysiaques de Nonnos. Le premier rapporte au sujet de Tyr un
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oracle byzantin : "Il est une ville dans une île, et le sang qui l'habite a son nom d'une plante; elle est en même temps un isthme et un détroit sur la terre fenne : là Héphaïstos est joyeux de posséder à jamais Athéna aux yeux pers. C'est là que je t'invite à apporter à Héraclès l'hommage de ton sacrifice". Oracle, à vrai dire, fort obscur, mais heureusement expliqué: c'est à Tyr, cette ville "qu'attire la mer comme l'attire aussi la terre" et qui "participe à leurs deux natures", qu'il faut envoyer une ambassade. "L'énigme fait allusion à l'olivier et au feu qui, chez nous, cohabitent. Il y a en effet un champ sacré entouré de murs, où pousse un olivier au feuillage luisant ; du même champ, près de lui, naît du feu qui envoie de grandes flammes parmi les branches, et c'est la cendre de ce feu qui fait prospérer l'olivier" (230). Ainsi, le palmier est l'arbre dont les Phéniciens tirent leur nom, Athéna l'olivier et Hesphaïstos le feu qui l'embrase et le sanctuaire, sans nul doute possible, celui d'Héraclès-Melqart à Tyr. Cette description est à la fois confirmée et précisée par un passage des Dionysiaques (231) ; elle est d'autre part, mise en rapport avec la fondation de Tyr. Celle-ci doit avoir lieu près des "roches ambrosiennes; il pousse là un olivier, que les flammes enveloppent sans le consumer; un aigle est perché au sommet de l'arbre et un serpent s'enroule autour du tronc" ; nous retrouvons l'olivier enflammé, l'aigle et le serpent figurant sur le relief de l'Université américaine de Beyrouth... Quant "aux roches ambrosiennes", elles se trouvent sur des monnaies tyriennes du mème siècle après notre ère, parfois représentées avec l'olivier, parfois jointes à l'image d'Héraclès, et dans ce cas, "elles semblent marquer le point de départ d'un écoulement d'eau"... (232). Il est évidemment très tentant de rapprocher ces roches ambrosiennes qui, sur les monnaies, sont représentées comme deux bétyles, ou deux stèles, de celles qu'Hérodote a vues, précisément dans le temple de l'Héraclès tyrien (233), deux stèles l'une d'or massif, l'autre d'émeraude... Plus tard Théophraste cite cette dernière comme la plus grande émeraude connue, et, reprenant son témoignage, Pline (234) se demande si ce n'était pas là plutôt "'une fausse émeraude". Quoiqu'il en soit et sans vouloir absolument identifier les roches ambrosiennes aux colonnes vues par Hérodote (235), la conclusion de E. Will nous paraît légitime, qui estime que les témoignages ainsi réunis "forment une chaîne unique et solide prouvant l'existence, dans le sanctuaire d'Héraclès à Tyr, de deux stèles, d'un olivier et d'un
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feu sacré". (236). 3-2 Beaucoup moins mal connu, le sanctuaire de Gadès confirme ce que laisse pressentir notre information du sanctuaire et du culte de Tyr. Il ne fait aucun doute, avons-nous vu, qu'il s'agit là d'un sanctuaire à Melqart, puisque toutes nos sources donnent à cet Héraclès gaditan une origine tyrienne (237). Le sanctuaire était situé à la pointe Sud-Est de l'île (238) (Santi Pétri) et avait conservé ses fidèles à l'époque romaine; il était même l'objet d'une grande vénération (239) et ses richesses frappaient d'admiration Pomponius Méla (240). Philostrate nous en donne une longue et très intéressante description : "L'île où se trouve le temple est juste de la dimension de celui-ci, et l'on n'y voit aucun rocher, car on l'a rendue aussi lisse qu'une borne de stade. Dans ce temple, ils nous disent que l'on rend un culte aux deux Héraclès, sans qu'il y ait de statue ni de l'un ni de l'autre, mais seulement deux autels de bronze en l'honneur d'Héraclès l'Egyptien, sans aucun dessin ni inscription, et un seul en pierre, en l'honneur du Thébain ; sur celui-ci, nous disent-ils, sont gravés les hydres et les chevaux de Diomède et les douze travaux d'Héraclès. L'olivier d'or de Pygmalion est aussi consacré dans le sanctuaire d'Héraclès, ouvrage digne d'être admiré, nous disent-ils, d'abord à cause de ses fruits, car il est couvert d'émeraudes... Les colonnes qui se trouvent dans le temple sont faites d'or et d'argent fondus ensemble de façon à obtenir une seule couleur; elles sont hautes de plus d'une coudée et de forme carrée, comme des enclumes; sur leur partie supérieure, une inscription en caractères qui ne sont ni égyptiens, ni indiens et que l'on ne peut comprendre". (241). De ces stèles Apollonios, inspiré par "Héraclès l'Egyptien", devait dire qu'elles étaient "les liens unissant la Terre et l'Océan"... C'était reprendre la légende des colonnes, dressées par Héraclès (le héros ou le dieu 7), aux bornes du monde, c'était reprendre aussi l'opinion rapportée par Strabon, mais jugée par lui peu raisonnable, selon laquelle les colonnes d'Héraclès seraient "les piliers d'airain de huit coudées du sanctuaire d'Héraclès à Gadeira" (242). Ajoutons, pour compléter cette description du sanctuaire, qu'il y avait, d'après Polybe, une fontaine dont le régime variait avec le flux et le reflux, ou plus simplement, selon Poséidonios, deux puits (243), et que, sur l'un des autels au moins, Silius Italicus l'affirme (244), les prêtres entretenaient, comme à Tyr, une flamme perpétuelle. Ainsi se retrouvent, à l'autre extrémité de la Méditerranée,
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les éléments constitutifs du sanctuaire de la métropole tyrienne : les stèles (245). l'olivier (246) et le feu sacré; nous y ajouterons la source, si toutefois c'est bien elle qui coule au pied des "roches ambrosiennes", lorsqu'Héraclès est, avec elles, représenté sur les monnaies tyriennes (247). Ainsi se retrouvent également les éléments caractéristiques d'un culte phénicien: il n'y a dans le temple, dit Philostrate, aucune statue de l'un ou l'autre Hercule, et les deux autels consacrés "à l'Héraclès tyrien" ne portent ni dédicace, ni ornement (248). Interdiction sémitique bien illustrée par l'Ancien Testament, mais progressivement transgressée en Orient, fait remarquer D. van Berchem, qui voit dans la rigueur avec laquelle les prêtres maintiennent l'interdit à Gadès, la preuve d'une origine assez haute du sanctuaire. Des prêtres sont attachés à ce santuaire, qui ont le crâne rasé, ceint d'un bandeau et qui portent une longue tunique de lin blanc (249). La présence d'un clergé "professionnel", d'interdits caractéristiques comme celui du porc dans les sacrifices par exemple, ou la défense faite aux femmes d'assister aux cérémonies (250) paraissent à D. van Berchem appartenir incontestablement au fond cananéen du culte (251). Peut-être faut-il citer ce curieux passage de Pausanias dans lequel L.R. Farnell pense reconnaître une fausse interprétation du rituel par lequel le Melqart phénicien aurait été, à Gadès, sacrifié. et brûlé en effigie. On pourrait alors supposer que dans la métropole aussi existait ce rite complémentaire à l'égersis et que chaque année était représentée la mort du dieu (252). Le rituel évoquerait ainsi celui de Sandas en Cilicie (253) ; or, on sait que le dieu de Tarse a été lui aussi interprêté comme étant un Héraclès... (254) peut-être cette convergence, et la présence en Grèce même de ces rites de crémation appliqués à Héraclès (255) apportent-elles quelque lumière sur le difficile problème des rapports entre le héros grec et ses homologues asiatiques. Si les éléments du culte sont, à Gadès, assez bien connus, il est plus difficile de se représenter le sanctuaire; seule la chaussée qui depuis Gadès y conduisait a été retrouvée, et le petit édicule reposant sur un podium à deux degrés, prostyle et tétrastyle qui figure sur des monnaies tardives, peut difficilement être un autre temple que celui, tellement illustre, d'Héraclès gaditan.(256).
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3-3 Peut-être, en revanche, le site de Lixos, suppléera-t-il au silence archéologique de l'Héracléion de Gadès ? Les fouilles de l'acropole ont en effet dégagé un très important complexe cultuel au coeur d'un ensemble de bâtiments dont l'idenfication n'a pas toujours été possible (257). Si les édifices A (fondé peut-être aux VIème - Vème siècles), C (une salle de réunion ?) et E (à peu près contemporain du précédent) sont mal connus, on peut admettre que B, D, F, G, et H sont bien des sanctuaires. C'est du moins ce que propose M. Ponsich, dans son étude préliminaire d'un site dont on peut regretter que l'exploitation archéologique ne soit pas poursuivie plus avant. Dans l'état actuel de la recherche, les fouilles témoignent avec certitude de l'existence d'un culte que prudemment l'auteur attribue à "une divinité pré-romaine" (258), et dont l'importance serait prouvée par la persistance, tout au long de l'histoire de Lixos, d'un sanctuaire de très vastes proportions. De la première période monumentale de la cité, définie comme "phénico-libyque" (259), date la construction du temple H, le plus ancien et également le plus vaste des sanctuaires dégagés, "ce qui, si l'on en croit la légende, l'assimilerait à celui de Malkart, cité par les textes anciens" (260). De cet édifice imposant, dont le plan devait, plus tard, inspirer les architeétes des temples F et G, ne restent que quelques murs transversaux qui donnent une idée de la surface couverte (la plus grande partie de l'esplanade) (261) et une abside semi-circulaire construite en grès et en grand appareil "de type mégalithique" (262). D'énormes blocs d'apparence cyclopéenne sont stabilisés par des empilements de pierres plates, selon une technique qui se retrouve dans d'autres constructions pré-romaines de Lixos (263). Dans l'axe de l'abside, un renforcement rectangulaire (3,50xl,60m) avait probablement un rôle cultuel, puisqu'on le retrouve dans les absides des temples F et G. Au centre, une base massive de 3 mètres de côté pourrait avoir constitué, d'après les archéologues de Lixos, le support d'un autel qui fut systématiquement détruit (264)... On pourrait aussi imaginer que s'élevait là un édicule plus original, qui, lors de la romanisation de la cité, n'aurait plus trouvé sa place dans le culte. De part et d'autre de l'abside, enfin, deux murs construits avec la même technique, délimitaient une enceinte sacrée et des éléments de colonnes enduits ou peints, retrouvés en réemploi
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Fig. 6: Lixos, le quartier des temples, première étape: le temple H.
\ 1.
L'abside du temple Het le tracé reconstitué du sanctuaire, en rapport avec les édifices postérieurs. D'après M. PONSICH, Lixus, le quartier des temples, Rabat, 1981, fig. 37 p. 13.
•
2.
III 1
.~
Plan partiel du temple H: l'abside,d'aprèsM. PONSICH,
op. cit., fig. 30 p. 90.
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Fig. 7: Lixos, le temple H, détails d'architecture.
"
1-
2-
type d'appareil
le renfoncement de l'abside du temple H
d'après M. PONSICH, Lixus, le quartier des temples, Rabat, 1981, Planches XXXIII et XXXV
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dans les édifices postérieurs, pourraient, en raison de leur diamètre important (0,65m), avoir appartenu à la colonnade d'un péristyle de ce temple H. Cet édifice, de proportions peu courantes, est sans conteste le temple de Melqart, dont les auteurs anciens disent qu'il pouvait rivaliser avec celui de Gadès. Sa construction, diversement datée au cours des campagnes de fouilles successives (265), est désormais, sur la foi de plusieurs sondages réalisés en divers points de l'abside, attribuée au VIIème siècle (266). Restent, il faut le dire, quelques éléments d'incertitude: D'abord, si, comme le disent les auteurs, ce temple, "majestueux... symbolise à la fois la puissance et aussi la réussite économique de la cité", peut-il être pris comme point de départ de l'isntallation des colons phéniciens en ces lieux? Ensuite d'autres questions se posent qui concernent la construction même de l'édifice : René Rebuffat remarque - et la figure 7 - 2, effectivement, suffit à le repérer (267) - un bloc de réemploi dans le renfoncement de l'abside, ce qui tendrait à prouver que H n'est pas le plus ancien édifice de la cité... (ou alors remettrait en question sa datation !). Bref bien des mystères subsistent sur la ville haute de Lixos et l'acte de naissance de la cité ne nous paraît pas définitivement fixé, pas plus que ne nous convainc l'hypothèse de Michel Ponsich faisant de Lixos une fondation de ceux des marins "de Tyr ou de Sidon" qui, laissant une partie des leurs s'établir sur la côte tunisienne (et fonder Carthage) auraient poursuivi leur voyage vers l'Occident (268). Rien ne prouve, d'ailleurs, qu'ici se trouvait le premier établissement phénicien. On fait souvent remarquer en effet que la butte de Rekada (cf. fig. 3) était autrefois une île dans l'estuaire de Louqqos, île plus proche de l'océan, plus proche aussi des descriptions laissées par les auteurs anciens... (269). Si nous abandonnons un instant cette obsédante question des débuts de la colonisation phénicienne et revenons au problème d'Héraclès-Melqart qui nous occupe, c'est - à défaut de réglements cultuels -le temple F qu'il faut interroger (fig. 8). Ce sanctuaire, encore en usage à l'époque romaine, fut en effet érigé sur les ruines du temple H et, à bien des égards (orientation, alignement et, pour autant qu'on puisse en juger, plan) paraît une réplique de ce dernier. De dimensions plus modestes, il n'en constitue pas moins un complexe monumental imposant, couvrant plus de 3 000 m2 (la presque totalité du plateau) et s'organisant en trois ensembles principaux (270) : 1 - dans la partie nord, le temple proprement dit, s'ordonne autour d'une area à ciel ouvert entourée sur trois côtés d'un
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Fig. 8 : Lixos, le temple F et ses annexes
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1. Plan du temple F. D'après: Chronique de l'archéologie marocaine, BAM, V, 1964, fig. 1.
2. Essai de reconstitution D'après: M. PONSICH, Lixus, le quartier des temples, Rabat, 1981, fig. 13 p. 56.
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Fig. 9: Lixos, le complexe cultuel de l'acropole (photos 1969).
Le temple F, l'abside du temple H, le temple G et la communication entre les deux ensembles (photos 1969).
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vaste péristyle à colonnes stuquées. Au Nord, une abside semi-circulaire de 11,25 mètres de diamètre, reproduit, avec son renfoncement central, le plan de celle du temple H ; en face, un massif de maçonnerie reposant sur de puissantes fondations se prolonge par un naos dont le mur sud forme lui aussi une abside mais à très faible courbure. 2 - A l'Ouest, un ensemble de pièces et de courettes à colonnades était sans doute destiné aux prêtres et administrateurs du sanctuaire. Cette annexe ouvrait directement sur le temple par quatre entrées. 3 - Un vaste corridor à péristyle donnait accès aux temples G et F et à la galerie latérale ouest sur laquelle s'ouvraient une série de salles. Plus au Nord, le temple G, construit de façon identique (avec abside semi-circulaire, cour et abside plane), mais plus petit (650 m 2 ), communiquait avec le précédent par la galerie à colonnes, le long des remparts dont nous avons vu qu'ils longeaient aussi le temple F. Le complexe cultuel ainsi constitué appartient à la période maurétanienne de Lixos (271). La datation de l'édifice F, en effet est donnée avec précision par la céramique retrouvée dans une citerne située dans la partie ouest de la cour et comblée après la construction des fondations du temple : le matériel couvre une large période. des débuts de l'habitat. nous l'avons vu, jusqu'aux règnes de Juba II et de Ptolémée. Le temple F daterait ainsi de la fm du 1er siècle avant notre ère (272) ou du début du 1er siècle de notre ère (273). Le temple G, qui laisse transparaître les traces de transformations successives jusqu'au lIIème siècle et semble correspondre à une extension au-delà des annexes de F, est jugé comme "quelque peu postérieur ou le dernier construit" (274), il daterait des débuts de l'occupation romaine. sous le règne de Claude (275). Cette chronologie dépend étroitement. on le voit. du matériel recueilli dans la citerne. un matériel dont la publication exhaustive et l'analyse rigoureuse n'ont pas été faites. La datation a déjà été contestée. et repoussée. pour le temple F au delà de l'annexion de la Maurétanie par Rome (276). Il serait évidemment capital de connaître avec précision ce moment où toute l'acropole s'organise autour du temple F, prouvant ainsi l'importance décisive accordée au culte qui y est rendu (une importance qui pourrait fort bien, notons-le. s'expliquer par les goûts des rois maurétaniens et de Juba II tout particulièrement). Il n'en reste pas moins vrai que. s'ils furent crées dans une Maurétanie indépendante, les temples F et G traversent l'époque romaine avec quelques changements certes.
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mais ceux-ci n'affectent pas leur aspect général malgré d'assez importantes destructions sur l'ensemble du site. C'est à l'époque chrétienne seulement que, la ville se resserrant dans la partie haute, l'habitat gagne le quartier des temples, alors que le culte chrétien est célébré dans une basilique dont les dimensions exiguës donnent une idée de l'importance modeste de la cité. Ainsi a perduré pendant des siècles un type de sanctuaire dont "le caractère original" et "le manque total des comparaisons architecturales" semble avoir gêné ceux qui l'avaient découvert (277)... un sanctuaire dont le plan insolite se comprend mieux si on tourne les yeux du côté de l'Orient: c'est en effet une même cour à ciel ouvert qui est attestée à Arnrith, à Byblos, à Oumm-el'Ahmed, aussi (278). C'est elle encore qu'on retrouve à Chypre, à Kition, cour parfois entourée de portiques, cour encadrant généralement un même naos central. C'est donc sur ces rives lointaines que nous chercherons à retrouver la conception sémitique du temple qui semble bien avoir été celle des édifices successifs de Lixos.
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QUATRIEME CHAPITRE HÉRACLES.MELQART, D'UNE RIVE A L'AUTRE DE LA MÉDITERRANNÉE
Ce sont les témoignages littéraires qui nous ont permis de comparer le sanctuaire du Melqart tyrien à celui de l'Héraclès gaditan. A Lixos, en revanche, c'est l'archéologie qui sollicite des comparaisons, c'est elle que nous interrogerons désormais sur ces rives orientales de la Méditerranée où fut honoré Héraclès-Melqart. 4-1 A Amrith, l'ancienne Marathus, le sanctuaire d'Héraclès-Melqart a été identifié grâce aux nombreuses statuettes découvertes en 1926 dans unejavissa voisine et représentant le dieu vêtu de la peau du lion et brandissant la massue (279). Cette identification vient, il est vrai, d'être contestée par P. Bordreuil, qui, déchiffrant les inscriptions phéniciennes d'Amrith, tente de retrouver, à travers elles, le destinataire du culte et fait valoir les droits d'Eshmoun (280)... Hypothèse rapidement contestée (281) et, nous semble-t-il, à juste titre. La première de ces inscriptions, en effet, datée du Vlème siècle, est une dédicace (282) ; le nom du dédicataire n'est malheureusement pas lisible (283) et, si le dédicant est un théophore d'Eshmoun, mention est faite de son areul Bodmelqart (dans la main de Melqart), ce qui, loin de porter atteinte à l'idée d'une dévotion à Melqart dans la région d'Amrith, ne fait que conforter l'impression de son ancienneté en ce lieu. Quant à la seconde inscription, communiquée en 1982 à P. Bordreuil, elle paraît plus tardive d'environ un siècle (fin du Vème siècle) (284) et constitue, sans contestation possible, la dédicace d'une statue (probablement un ex-voto) à Eshmoun. Ce dieu avait donc son effigie à Amrith, on ne peut le nier, et c'est là, comme le dit P. Bordreuil, "un témoignage positif' de la vénération qui lui était concédée. Faut-il pour autant remettre en question l'identification proposée - sur la foi de statues autrement plus nombreuses - par tous ceux qui d'Ernest Renan à M. Dunand et N. Saliby ont fouillé le site (285) ? Nous n'en croyons rien. Faut-il alors, comme le propose l'épigraphiste, "penser à un synoecisme entre ces deux dieux ou peut-être même à une intégration plus poussée, puisque les inscriptions
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phéniciennes de Kition le réunissent sous le nom d'Eshmoun-Melqart et que le traité d'Asarhaddon avec le roi de Tyr les énumère, l'un après l'autre, en leur assignant la même tâche" (286) ? Lorsqu'on connaît la plasticité des dieux phéniciens, cette idée que le Ma'abed d'Amrith aurait pu être dédié à "une divinité polymorphe, ou à plusieurs facettes" (287) peut séduire et, en tout état de cause mérite réflexion. Eshmoun, on le sait, est le grand dieu de Sidon et, dans la cité phénicienne, il a sans doute joué le rôle de Ba'al de la ville, été le Seigneur, maître et protecteur qu'était aussi Melqart à Tyr... Peut-être est-ce d'ailleurs pour cette même raison que le traité d'Asarhaddon, qui les juxtapose, assigne aux deux dieux les mêmes fonctions protectrices (288). Or Eshmoun est connu, non loin d'Amrith, à Tel Kazel (289) ; il est aussi très connu à Chypre, à Kition, si l'on en juge par le nombre des anthroponymes qui renvoient à lui (290) ; mieux même, dans ce fief de Melqart, de nombreuses inscriptions (généralement des dédicaces sur des vases de pierre) trouvées à Batsalos, au bord du lac salé, associent les deux divinités. Encore faut-il préciser que toutes (une vingtaine) appartiennent à la même époque: le IVème siècle av. lC. C'est à cette époque également qu'à Amrith le sanctuaire se transforme, s'entoure de portiques que les archéologues comparent aux portiques d'incubation des sanctuaires d'Asclépios en Grèce (et c'est bien leur Asclépios que les Grecs reconnaîtront dans le phénicien Eshmoun), à cette époque (ou un peu plutôt peut être, puisque la dédicace d'Amrith appartient à la fin du Vè siècle), que les eaux rituelles de Melqart deviendraient des eaux guérisseuses. Que cette fonction nouvelle appelle aussi la protection d'Eshmoun, et même celle de Shedrofé (=Shed guérisseur) (291) n'aurait alors rien d'étonnant. Faut-il, pour autant, attribuer le temple à Eshmoun ? Faut-il même parler de "synoecisme" (ou de syncrétisme) ? Une démarche aussi systématique et rigide ne nous paraît pas nécessaire ; elle nous paraît même peu compatible avec la réalité très souple qui est celle de la religion phénicienne, une réalité où, plus que les "spéculations métaphysiques" - M. Yon l'a fort justement souligné - dominent pratiques et rituels, "appels à des fonctions qui selon les cas s'adressent à la divinité sous telle ou telle épiclèse, tel ou tel aspect, avec tel ou tel attribut". C'est pourquoi nous continuerons à voir dans Héraclès-Melqart le dieu principal du ma'abed d'Amrith. Marathus, d'ailleurs, était, avec quelques autres cités de la côte tyrienne, dite "fille d'Arvad" (292), dépendante donc de l'île
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de Rouad toute proche. Or, le culte d'Héraclès-Melqart est connu, dans l'île, par une inscription bilingue gréco-phénicienne (293), par les monnaies arvadites (294) et l'Héraclès imberbe et coiffé de la léonté apparaît sur des monnaies au type d'Alexandre le Grand (295). Sans aucun doute Arnrith honorait-elle les mêmes divinités que sa plus puissante voisine, et, puisque dans toute la série des sculptures (456 fragments) provenant du sanctuaire, le personnage d'Héraclès-Melqart est la seule "divinité" qui puisse être identifiée, il paraît véritablement difficile de ne pas admettre que le temple lui ait été dédié.
Le sanctuaire: le Ma'abed n'est que la partie la plus remarquable des ruines, traversées par un ruisseau, le Nahr Arnrith, qui seul a conservé le nom de l'antique cité. De celle-ci subsistent encore d'autres sanctuaires (296), un immense stade, de curieux tombeaux, d'imposantes carrières, et bien sûr des quartiers d'habitation (297) (fig. 10) Le Ma'abed' est une vaste cour (298), évidée dans le rocher, de manière à se trouver de plain-pied avec la vallée du Nahr Arnrith sur laquelle ouvre le quatrième côté (Nord). Les trois autres côtés sont bordés d'un trottoir rocheux de cinq mètres de large, qui devait être couvert, si l'on en juge par les piliers monolithes conservés au Sud. Ce trottoir domine ce qui, de nos jours, apparaît comme une prairie très marécageuse et qui, dans l'antiquité, était sans doute un bassin (299) : l'eau semble en effet avoir joué un grand rôle dans le sanctuaire, puisqu'une source est aménagée, au milieu de la paroi orientale, de même qu'un réseau de canalisations. On entend d'ailleurs courir l'eau sous la végétation exubérante qui masque actuellement le fond de la cour et, au centre de celle-ci, un bloc de pierre épargné dans le rocher (300) pour servir de base au naos, conserve, dans sa partie inférieure, les traces d'un séjour prolongé dans l'eau. Le naos lui-même est plutôt une sorte de "tabernacle" (ou de caaba ) fermé de trois côtés et ouvert, comme l'enceinte elle-même, face à la vallée (fig. 12). Le toit, monolithe, s'avance en formant une sorte d'auvent, probablement soutenu par des colonnes. A l'intérieur et sur les côtés sont ménagées deux banquettes, et, sur les parois latérales, deux trous placés en regard l'un de l'autre "semblent avoir été creusés pour recevoir une tringle en fer ou en bois, le long de laquelle courait une courtine destinée à cacher l'intérieur de la chambre et les objets sacrés qui y étaient déposés" (301). A l'époque où l'a vu Renan, le bandeau et la corniche ornant, sur les quatre côtés, la dalle supérieure (302) formaient le
140
Fig. 10: Plan dl Amrith
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D'après E. RENAN, Mission en Phénicie, Paris, 1964, pl. VII. Plan complété par N. SALIBY, dans M. DUNAND et N. SALIBY, Le temple d'Amrith dans la pérée d'Aradus, Paris, 1985, fig. 1.
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Fig. Il : Arnrith, le Ma'abed. (photos 1971)
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2 • Essai de reconstitution D'après M. DUNAND, N. SALffiV Le temple d'Amrith dans la pérée d'Aradus, Paris, 1985 pl. LXII et LXIII.
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seul ornement de l'édifice; on l'a aujourd'hui couronné de merlons crénelés retrouvés tout autour, au fond du bassin et semblables à ceux du méghazil "assyrien" ou à ceux du temple de Bel à Palmyre (Fig. Il). Cette conception du sanctuaire, constitué par une chapelle ou un tabernacle situé au centre d'une cour, est foncièrement orientale (303). Pour E. Renan, la simplicité, la sévérité même du style, "l'idée de force et de puissance qu'éveillent les énormes dimensions des matériaux employés", le goût du monolithisme, l'emploi du bloc tel qu'il sort de la carrière, l'évidement même de la roche en place, paraissent donner à tous les monuments d'Arnrith une grande unité et il note "leur air de fraternité" avec les murs de Rouad qu'il a jugés phéniciens.. Même s'il estime que l'unité du style ne suppose pas obligatoirement une même période de construction, il est évident que, pour lui, c'est à une haute antiquité qu'il faut faire remonter le Ma'abed. C'est ce que conteste M. Dunand, qui, après examen des documents d'Arnrith, affirme que "rien dans la construction, dans leur économie, dans leurs éléments décoratifs, n'est l'indice irrécusable d'une époque antérieure au Vlème siècle" (304). La gorge égyptienne du Ma'abed, les merlons crénelés à l'assyrienne, sont, dit-il, les éléments architecturaux courants dans la Syrie hellénistique et même romaine et "ne peuvent être retenus comme un indice d'ancienneté" ; on trouverait de même des exemples récents - Pétra pour ne citer qu'elle - de monuments aménagés dans le roc. La céramique recueillie près des tombeaux confirmerait leur date relativement basse (1er siècle avant J.C.), le stade serait également de tradition hellénistique (305) et le temple ne paraîtrait "pas pouvoir être trop isolé chronologiquement" ; l'idée d'entourer la cour d'un portique, par exemple,serait une adaptation hellénique: "en Phénicie, elle se fait jour au IVème siècle dans le temple de Baal Hamrnon à Oumm-el'Ahmed". Dans un premier temps M. Dunand proposait donc de "faire descendre jusqu'aux alentours de cette date ou après l'établissement du Ma'abed d'Arnrith" (306). Il est désormais revenu sur ces conclusions et distingue un état ancien, s'ouvrant vers la fm du Vlème siècle, "avec tout un peuple de statues" (représentant Melqart ou ses fidèles), et daté par une céramique caractéristique des Vlème et Vème siècles (307), un "temple nu" qu'il rapproche "des grands podiums de magnificence établis... par les Achéménides à Byblos, Sidon, Jérusalem, pour y asseoir les temples des dieux nationaux". C'est en remplacement de ce premier sanctuaire que, toujours autour de la source sacrée, s'organiseraient ensuite le bassin monumental et les portiques
144
périphériques (308). Ces conclusions sont légitimes, peut-être, en ce qui concerne les éléments d'architecture de la ville et même du sanctuaire: mais la cour évidée dans la roche en place, l'aménagement de la source, le bloc central épargné sont autant d'éléments qu'il est bien impossible de dater, même si l'on constate que cette pratique a perduré longtemps, et rien ne permet, jusqu'à présent, de proposer une date pour l'implantation du culte. De l'aveu même des archéologues les fouilles seront à reprendre (309). C'est pourquoi les sculptures nous paraissent présenter un intérêt tout particulier; c'est pourquoi il nous a paru utile également de les rapprocher des statues très voisines, mais de provenance chypriote, que possède le musée du Louvre, et ce à la lumière des études très précises qu'ont faites, de cette statuaire chypriote, les membres de l'expédition archéologique suédoise (310), à la lumière aussi des découvertes plus récentes du Département des Antiquités de Chypre et des nombreuses missions étrangères travaillant dans cette île qui fut le lieu privilégié de la rencontre de l'Orient et de l'Occident (311).
"Tout peuple qui veut conquérir l'Orient doit partir de Chypre. C'est ce que firent Alexandre, Auguste, Richard et Saint Louis. Tout peuple qui veut conquérir l'Occident doit partir de Chypre. C'est ce que firent Sargon, Ptolémée, Cyrus, Baroum el Rachid..." W. HEPWORTH DIXON, British Cyprus, 1887, cité par L. DURRELL, Citrons acides, p. 7.
4-2 Cette situation exceptionnelle de Chypre, au carrefour du monde oriental et de l'Occident, que l'impérialisme anglais traduit ainsi sur le plan stratégique - et qui, hélas, fait toujours de .l'île l'enjeu et la proie d'ambitions rivales! - nous l'envisageons, ici, sous le seul angle des contacts qui mêlùent, sur son sol, des peuples, leurs cultures et surtout leurs dieux. Nous avons quelque raison de penser en effet, que, comme les grands conquérants cités par W. Hepworth-Dixon, - ou mieux, s'il est vrai que ce dernier fabule (312) - Héraclès-Melqart, lui aussi, partit de Chypre à la conquête du monde .œdi~n.
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Il faut dire que la position remarquable de l'île au seuil du monde égéen, du Moyen-Orient, de l'Egypte encore, n'est pas son seul atout : Chypre est, avant tout peut-être pour les Grecs xUnpoç l'île du cuivre (313). Ile du cuivre, Chypre paraît l'avoir été dès son entrée dans l'histoire : les archives économiques de Mari comportent plusieurs mentions d'Alasà = Chypre, en rapport avec le précieux métal (314) et les tablettes récemment découvertes à Tell Mardikh par la mission italienne de Paolo Matthiae (315) ont prouvé que, cinq siècles plus tôt, la grande cité protosyrienne d'Ebla contrôlait déjà les sources de l'éru alasu-u "du cuivre d'Alasa" (316). L'île, dans la mouvance occidentale d'un Empire plutôt orienté vers l'Euphrate, tenait déjà son nom du cuivre (en sumérien alas) qu'elle produit en abondance (cf. fig 13). Plus tard, au Bronze récent, c'est probablement sous la domination hittite qu'elle prend le nom d'Alas-iya (317). La ville considérable découverte près du village d'Enkomi témoigne de la puissance de ce royaume d'Alasia dès l'âge du Bronze moyen, et surtout au Bronze récent. Ce site - et beaucoup d'autres depuis - prouvent également que les relations commerciales de Chypre ne se limitaient pas au Moyen-Orient, mais incluaient l'Egée, l'Egypte où les lettres de Tell Amama font état d'importations de cuivre d'Alasia, la Crète, et ce dès le Bronze moyen. La reconstitution de véritables circuits commerciaux dans la Méditerranée orientale a même pu être tentée, par le Professeur Renfrew au second symposium international d'archéologie de Nicosie, consacré aux relations de Chypre et de la Crète (318). La jarre de Lapithos (tombe 6A), sur la côte du Nord de l'île, est l'un des premiers témoignages de ces très anciens contacts avec la Crète (319). Dès cette époque d'ailleurs l'extraction du minerai avait commencé, comme le prouve la découverte de matériel de fonderie à Ambélikou (320). A partir du XYlème siècle les échanges avec le monde égéen s'amplifient et, si l'hypothèse d'une "colonisation" de Chypre avant 1200, fort discutée au symposium de 1972, n'a plus guère de partisans (321), il reste que l'île est, à partir de cette époque envahie par une céramique mycénienne, probablement véhicule de différents onguents et huiles parfumées et que la culture créto-mycénienne gagne Chypre: des cornes de consécration apparaissent dans les édifices religieux (à Myrtou Pigadhès, à Kition, à Paléopaphos (322) pàr exemple). Parallèlement, on trouve dans le monde égéen des exportations chypriotes (323) (moins toutefois que dans le Levant palestinien et en Egypte !) (324) et, dès cette époque, Chypre est connue dans les tablettes en Linéaire B, par son nom classique: Ku-pi-ri-jo (325).
147
li semble que ce large développement des échanges avec le monde mycénien (surtout, à partir de la destruction du palais de Cnossos, vers 1380) corrresponde à un essor non moins considérable de la production du cuivre chypriote, celle-ci étant manifestement devenue la raison d'être du commerce (326). L'exploitation continue à Ambélikou - Aletri ; du "Middle Chypriot" daterait encore le travail du métal à Alambra, non loin de l'ancienne Idalion (327), et, à l'âge du Bronze récent, les centres urbains les plus importants de la côte Sud-Est de l'île: Enkomi, Kition, Hala Sultan Tekké paraissent avoir recueilli l'essentiel de cette activité métallifère (328).
Nous nous arrêterons à l'un d'entre eux, qui fut la ville de Melqart: Kition. Le site, en partie recouvert par la ville moderne de Larnaca, est bien connu par la tradition pour avoir été le centre d'un royaume phénicien du 1er millénaire jusqu'à la conquête de Chypre par Ptolémée à la fm du Nème siècle avant notre ère. En fait, les travaux du Département des Antiquités, et en particulier de Vassos Karageorghis, ont prouvé que la ville était plus anciennement établie et qu'elle participait de cet essor urbain - très lié à l'exploitation du cuivre - de l'âge du Bronze récent (329). En effet, si des traces d'habitat remontent à l'âge de la pierre et si un établissement existe déjà à Kition dès les débuts de l'âge du Bronze (330), c'est à cette époque du Bronze récent, vers 1300, qu'il se développe en une cité importante, défendue par un rempart (331). Les tombes (Area 1) illustrent les rapports commerciaux que nous venons d'évoquer, tant avec l'Egée que le Moyen-Orient et l'Egypte (en fait, comme à Enkomi, l'influence syrienne paraît dominante, au niveau des coutumes funéraires, par exemple) et le quartier des sanctuaires, à Kathari, (Area II) démontre avec force l'étroite union de l'activité métallifère et de la religion : les restes de plusieurs temples auprès de fourneaux pour fondre le cuivre et d'ateliers artisanaux mettent - c'est une évidence - la base économique de la cité sous la protection des dieux... ces dieux qui, telle la petite "Astarté" nue conservée à Oxford ou le dieu au lingot d'Enkomi (332) se dressent sur les fameux lingots, en forme de peau de boeuf qui ont fait la fortune de Chypre (333). Mieux, au nord de Kition à Athiénou sur la route empruntée par le cuivre entre les mines et les fonderies de la ville, un sanctuaire du Bronze récent témoigne de la même association d'une divinité et de la métallurgie : dans la cour de grandes quantités de cuivre ont, en effet, été découvertes (334). C'est cette association que nous retiendrons, de même que
148
ce rôle de carrefour qu'a toujours tenu Chypre entre le monde égéen, le Moyen-Orient, l'Egypte. Si ces données nous imponent tant, c'est qu'elles sont, à Kition, la toile de fond sur laquelle les Phéniciens vinrent apposer leur propre empreinte, apporter leurs propres dieux... C'est sur ce "terreau", en effet, que se développa le culte syncrétique d'Héraclès-Melqart, peut-être à Bamboula (= la colline) sur une éminence qui, contrairement à une idée reçue, n'est en aucun cas l'acropole antique de Kition (335). En 1929, Einar Gjerstad, après quelques semaines de sondages, avait découvert en ce lieu les preuves d'une longue occupation et un sanctuaire archaïque qu'il pensait être le premier édifice sacré et datait du milieu du "Cypro-Archaic 1", c'est-à-dire de 650 environ (336). L'essentiel était constitué par les fondations d'un long mur Est-Ouest et d'une pièce à peu près rectangulaire construite au Nord de ce mur ; l'espace au sud de ce long mur était pavé d'un sol de galets délimitant sans doute une vaste cour... un téminos, à ciel ouvert, une chapelle jouxtant cette cour. C'était aussi, selon lui le plan du "temenos de l'Acropole Ouest d'Idalion, c'est encore, ajouterons-nous, un plan familier dans l'architecture religieuse sémitique, celui, par exemple, du sanctuaire de Byblos que reproduisent des monnaies frappées dans cette ville, mais il est vrai tardives, puisqu'elles datent de l'empereur Macrin (337) (fig. 14).
Fig. 14 : Monnaie frappée à Byblos sous l'Empereur Macrin (217·218 ap. J.-C.)
Fig.15 : Le site de Kition-Bamboula
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Plan (état 1987) dessin O. CALLOT dans M. YON, Mission Archéologique Française de Kition Bamboula, 1976-1984, ArchaeoloRY in Cyprus, Nicosie 1985, p. 220.
2.
Vue généràïe des fouilles de Kition-Bamboula Photo : Maison de l'Orient (1981) Au premier plan les bâtiments classiques et les égouts. Au second plan le sanctuaire archaïque.
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La découverte de plusieurs autels d'époque classique prouvait que le culte avait perduré jusqu'à l'époque hellénistique, et des statues calcaires retrouvées dans un bothros et datées de la fin du Vlème à la fin du IVème siècles avant notre ère lui pennettaient d'identifier le temple. Ce jeune homme portant léonté et massue ne pouvait être qu'Héraclès-Melqart, divinité protectrice de la dynastie phénicienne de Kition, comme le suggéraient les monnaies (338). L'histoire de la ville s'étant considérablement enrichie grâce aux découvertes de Vassos Karageorghis, des recherches reprirent à Bamboula, confiées à une mission archéologique de l'Université de Lyon II sous la direction de Marguerite Yon (339). Très vite il devait apparaître - la découverte d'un autel de pierre monolithe du IXème siècle ne laissant aucun doute à ce sujet - que, dès cette éPoque (le milieu du Chypro-géométrique lIn, l'emplacement était un lieu sacré (340). Tout laissait donc à penser qu'on pouvait remonter le sanctuaire d'Héraclès-Melqart découvert par Einar Gjerstad jusqu'à cette date, c'est-à-dire jusqu'au moment même de l'installation des Phéniciens à Kition (341). Les aménagements correspondant à cet autel et au sanctuaire du IXème siècle sont encore très mal connus (c'est l'un des objectifs du nouveau programme de fouilles que d'en préciser l'organisation), mais d'ores et déjà un naos a été identifié (une salle rectangulaire oblongue de 3 x 5,80 m). Ce naos est séparé de la rue, située au Sud, par un espace libre qui servait de cour (fig. 16). Très tôt un réaménagement a protégé cette cour, par un mur, devant l'entrée et entouré le bâtiment central de constructions annexes, encore très incomplètement fouillées (342). Plusieurs remaniements sont visibles du VIDème au Vlème siècle (343), mais le plan d'ensemble se maintient (voir. fig. 17) avec une architecture de brique crue sur des murs construits avec soin en moellons et en galets (sur lm. environ). L'extension du sanctuaire - qui probablement correspond à la fonune de la ville et au succès accru du culte - se traduit, à chaque phase, par un agrandissement de la cour dont le rôle paraît ainsi considérable. Cette cour abrite diverses installations (bassins calcaires (344), foyers et autels de brique crue, réseau de canalisations) qui "suggèrent des cérémonies utilisànt l'eau et le feu" (345). Le sanctuaire du Vlème siècle (celui qui correspond aux figures d'Héraclès-Melqart découvertes en 1929), dégagé sur une surface plus étendue, est mieux connu (fig. 18). La cour a
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Fig. 16: Le Sanctuaire de Kition.8amboula
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Premier état: début du Chypro-Géométrique Ill. Le mur du sanctuaire (254) et l'autel Photo : Maison de l'Orient (1981)
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Niveaux géométriques et archaïques dégagés de la cour classique qui les recouvrait. Au fond occupation hellénistique. Au Nord du mur 432 (c.a.d. à droite sur la photo) les aménagements du port classique. Photo : Maison de l'Orient (1987)
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Fig. 17: Le Sanctuaire de Kition-Bamboula Deuxième état: Le sanctuaire archaïque
1 - Le sanctuaire archaJque w depuis la rue S08 vers le Nord Photo Maison de l'Orient (1981).
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désormais recouvert une grande partie des bâtiments antérieurs, mais c'est à la fin du Vème siècle seulement qu'intervient un véritable bouleversement du sanctuaire, considérablement agrandi, d'une part, et surtout plus intégré à l'urbanisme de toute cette partie de la ville : l'orientation de l'ensemble, en effet, différente de celle des bâtiments archaïques, est alors celle des constructions du quartier. Une nouvelle cour recouvre désonnais non seulement le sanctuaire archaïque, mais encore la rue qui le bordait; cependant ses aménagements: plates-fonnes et autels de pierre, conselVent l'orientation ancienne, ce qui atteste de la pennanence du culte. Cette cour est désormais limitée au Sud par un très grand bâtiment d'environ 30 mètres de long et manifestement en relation avec le sanctuaire qu'il borde (fig. 15). L'eau paraît toujours jouer un rôle considérable; le bâtiment comporte deux puits, il s'y ajoute une citerne au IVème siècle; puits perdus puis égouts raccordés à un grand collecteur urbain s'y succèdent. La proportion importante de cratères et de petits vases à boire importés de l'Attique incite les archéologues à supposer que ce bâtiment abritait "les banquets elles rites de libations" (346). Une dernière réorganisation, au début du IIIème siècle, correspond sans doute aux bouleversements entraînés par la mort de Pumiathon, le dernier roi de la dynastie phénicienne, en 312, et à la prise de Chypre par Ptolémée. Moins d'un siècle après, à la fin du IIIème siècle, le lieu semble avoir perdu son caractère sacré et, après une période d'abandon, des installations artisanales (moulin, four) apparaissent dans la cour même du sanctuaire. Les enseignements de ces découvertes archéologiques de Kition Bamboula sont pour nous d'un intérêt capital. Contrairement au sanctuaire d'Amrith dont rien ne prouve qu'il remonte à haute époque (347), celui-ci est parfaitement daté: né avec les débuts de la présence phénicienne à Kition, nul ne peut mettre en doute ses origines. Or ses éléments essentiels sont en place dès sa fondation et, malgré les multiples remaniements ultérieurs, on les retrouvera toujours : une ou plusieurs cours à ciel ouvert; dans cette cour, un puis des autels, auprès d'eux une chapelle (ou plusieurs) ; naos ou cella nos tennes classiques sont bien impropres pour définir le saint-des-saints du sanctuaire, tant la conception de l'ensemble est orientale... orientale au sens large d'ailleurs, car rien ne serait plus faux que d'en faire un caractère spécifique de l'architecture religieuse phénicienne : pour s'en tenir au domaine chypriote, les découvertes d'Ayia lrini, d'Ayios Iakovos, d'Idalion (348), comme celles de Mynou-Pigadhès,
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1. La troisième phase archaïque (550-500) Plan: A. CAUBET, IDe. cit., p. 114 fig. 5.
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L'autel de brique crue (nO 279) Photo Maison de l'Orient (1979).
3.
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155
(349) ont montré quel rôle fondamental jouait l'espace à ciel ouvert dans le sanctuaire, un rôle confInné par la petite maquette de terre cuite découverte dans une tombe de Vounous (350). De même les temples de Kition, depuis les temples jumeaux 2 et 3, traversent les vicissitudes historiques et les phases architecturales caractérisées par différents appareils de construction sans pour autant changer de plan : des murs délimitent un espace rectangulaire (dont l'entrée est toujours déportée vers un angle) ; face à l'entrée, un mur isole une pièce étroite: "Le Saint des Saints". généralement (sauf pour le temple 4 qui est phénicien) orienté à l'Ouest (351). C'est. d'après la reconstitution proposée, la seule pièce couverte de l'édifIce; la cour est, quant à elle, parfois bordée de portiques et c'est dans cette cour qu'on a retrouvé les différents dispositifs indispensables au déroulement du culte : foyers. autels. tables à offrandes, banquettes (352)... Ce plan est aussi, à peu de chose près, celui du sanctuaire du dieu au lingot, à Enkomi (353). Ce qui varie surtout, d'un sanctuaire à l'autre, c'est l'importance et la complexité des bâtiments annexes, dont nous avons vu qu'ils peuvent devenir de véritables quartiers administratifs et artisanaux.. Une importance et une complexité révélétrices du rôle du sanctuaire dans la vie économique de la cité et par là même des fonctions dévolues aux dieux. Ce qui varie encore - et qui. en conséquence. renseigne plus précisément sur les fonnes cultuelles - ce sont les dispositifs qui, dans la cour. servent au rituel : à Kition-Bamboula, l'autel primitif (IXème siècle) évoque de fort près par ses proportions certains autels palestiniens (354). D'autre part. dans la vaste cour, qui. lors de la troisième phase archaïque, recouvre les anciens bâtiments (on comparera pour s'en rendre compte les fIgures 17 et18), deux autels foyers (284 et 294) entourés d'une couche de charbon dans laquelle ne fIgurent aucun débris organique, mais de nombreux fragments de vases et de fIgurines de terre cuite brûlés, ont manifestement servi à des pratiques de destruction par le feu. On pense bien sûr aux rites de crémation parfois attestés pour Héraclès et peut-être trahis par le mythe. Enfin les archéologues de Kition sont frappés par l'importance qu'avait sans doute l'eau. Marguerite Yon propose même d'entendre "le maître de l'eau" mentionné dans les comptes d'un sanctuaire (355) comme étant le maître du lieu Melqart. L'inscription, qui mentionnait "le temple d'Ashtart de Kition" (aux lignes 4-5) avait été mise en rapport avec le très grand temple de cette déesse découvert en 1967-1970 au Nord de la cité par Vassos Karageorghis. Forte des installations considérables de
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Kition-Bamboula, l'archéologue lyonnaise suggère qu'il pourrait appartenir à ce sanctuaire ; le texte datant du début du IVème siècle, les quatre bâtisseurs (selon O. Masson) ou architectes (selon G. Amadasi) mentionnés dans ces comptes mensuels, pourraient être ceux qui, à la fm du Vème siècle prirent en charge l'important réaménagement du temple (voir figure 15) ; les prostituées sacrées ne posent aucun problème (B. 9) pas plus que les multiples serviteurs, sacrificateurs, scribes et boulangers; les "chiens" et les "minets" surprennent davantage (sont-ils, puisqu'ils reçoivent un salaire, non pas des animaux, mais, comme le suggèrent d'aucuns, des prostitués mâles ?) Quant au "Maître de l'eau" (BA) B. Peckham voyait en lui le propriétaire de l'eau vendue au temple, et O. Masson, un fonctionnaire préposé au service de l'eau pour les cérémonies cultuelles. Il serait, pour M. Yon, le dieu lui-même: Melqart. Et c'est, bien sûr, le problème du maître du sanctuaire qui est posé : Melqart était là chez lui à la fin de l'archarsme, les statues retrouvées par Einar Gjerstad le prouvent, mais, dans le matériel correspondant aux états antérieurs, rien ne permet d'affirmer sa présence... Ce matériel, il est vrai, inexistant jusque là, pour le sanctuaire géométrique, reste très rare pour le haut archaïsme : vaisselle importée de Phénicie et de Palestine (Samarian ware) et quelques fragments de figurines, en particulier de déesses aux bras levés (356) ; plus tard, dans le charbon des autels foyers du Vlème siècle, les figurines de terre cuite brûlées comprennent une forte proportion de têtes de femmes et des stèles miniatures (8 à 10 cm de haut) portant un masque hathorique (357) simples reproductions, semble-t-il, des chapiteaux de pierre au même motif retrouvés au 19ème siècle dans ce secteur de la colline de Bamboula (358). Rien de comparable donc à l'importante série de représentations exhumées lors des fouilles suédoises. Les figurines aux bras levés (359) conduisent les archéologues de Kition à envisager que le sanctuaire ait pu être "consacré depuis le Chypro-géométrique à une divinité de la fertilité, peut-être associée à un dieu mâle, dont la personnalité évolue au cours des temps.. "(360). Marguerite Yon, quant à elle, pense plus précisément à Astarté, ce qui - les associations de Melqart déjà connues le prouvent - (361) paraît on ne peut plus logique. Si, comme elle le suggère, les comptes du sanctuaire sont bien ceux du complexe de Bamboula, Astarté serait la "Reine Sainte" pour laquelle les boulangers de l'inscription pétrissent le gateau (1.9) et au service de laquelle se dévouent les chantres qui résident dans un quartier du temple (1.6).
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TI faut ajouter que, sur la même pierre (face B), est mentionné le temple de MKL = Mikal. Pour Olivier Masson "il ne s'agirait pas de deux temples distincts, mais d'un seul grand temple, celui d'Astarté, dans lequel une partie était consacrée au culte de MKL" ; Marguerite Yon, quant à elle, imagine un espace sacré dans lequel coexisteraient plusieurs cultes : ceux d'Astarté, de Mikal, d'Héraclès (Mikal attesté par l'inscription; Héraclès Melqart par l'iconographie). Le problème se pose alors de savoir quel lien unit Mikal et Melqart, quels rapports s'établissent entre les divinités et elle propose deux solutions entre lesquelles elle ne choisit pas. On honorerait dans le sanctuaire - soit le couple Astarté + MikaVMelqart - soit une triade Astarté + Mikal + Melqart. Les plus grandes divinités de Tyr auraient ainsi chacune deux lieux de culte à Kition. Un grand sanctuaire à Astarté a en effet été mis au jour dans le quartier de Kathari, au Nord de la ville. Reconstruit au IXème siècle, à l'emplacement d'un temple du Bronze récent, il fut identifié grâce aux figurines qui y furent trouvées et plus précisément encore par la dédicace à la déesse figurant sur un "bol à barbe" de poterie phénicienne red-slip (362). Or, dans le même lieu, la fouille d'un bothros devait produire un bol plus tardif (du Vlème siècle) avec le nom de Melqart (363). Dans la ville, comme dans son port de Bamboula, les deux divinités paraissent ainsi avoir été étroitement associées. 4-3 Ce sont ces données archéologiques que nous aimerions reprendre à la lumière de notre étude de la tradition littéraire, à la lumière peut-être aussi des nouveaux textes dont dispose désormais l'historien des religions orientales.
1. En ce qui concerne les sanctuaires à HéraclèsMelqart. Nous avons rapproché, déjà, les descriptions qu'ont laissées les auteurs anciens du sanctuaire de Gadès et celle que nous possédons pour le temple d'Héraclès Melqart à Tyr et nous avons souligné le rôle important qu'y jouaient l'eau et le feu (364). Si, à Tyr, une source coule au pied des roches ambrosiennes, à Gadès Polybe a vu une fontaine à laquelle on accède par quelques marches, fontaine qui tarit avec la marée montante et se remplit avec la marée descendante (365) ; Poseidonios, tout en maintenant le lien avec les marées, affinne que le phénomène se traduisait sur l'eau de deux puits (366) et,
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s'il paraît plus crédible, c'est, certes, à cause de la vraisemblance, mais aussi parce qu'il paraît avoir passé "plusieurs jours dans le sanctuaire d'Héraclès à Gadeira lors du solstice d'été, au moment de la pleine lune" et qu'il y a étudié les marées (367). A Bamboula, proche de la mer, le dispositif hydraulique suppose, bien sûr, avant tout des cérémonies rituelles en faisant grand usage, mais rien n'interdit de penser que les rites eux-mêmes pouvaient être mis en rapport avec les variations annuelles de la marée... on ne saurait oublier que le site était alors en bordure de la mer et que, d'une façon plus générale, ces sanctuaires sont ceux de peuples marins, comme le prouvent les ancres de pierre qui, si souvent, y sont consacrées, depuis l'âge du Bronze (368). A Arnrith - où les représentations héracléennes témoignent d'une forte influence chypriote - le rôle de l'eau était de même considérable (369). A Thasos, si l'on admet que l'Héracléion fouillé par Marcel Launey (370) est bien le sanctuaire de l'Héraclès "phénicien" visité par Hérodote (371), on pensera à la fosse circulaire située dans la cour triangulaire qui jouxte l'arrière de l'édifice aux oikoi, non loin du plus ancien monument de l'Héracléion : l'édifice polygonal. Dans cette ouverture circulaire donnant accès à une fosse creusée en forme de pithos, et qui, selon le fouilleur, pouvait aussi bien constituer la margelle d'un puits que la base d'une sorte de tholos, on préféra reconnaître le bothros, nécessaire aux sacrifices héroïques rendus à un Héraclès fils d'Alcmène. L'eau, abondante - qui d'ailleurs interrompit les fouilles - pourrait au contraire, prouver que là était déjà la fonction première du dispositif dans l'Antiquité (372). A Lixos, où les installations souterraines semblent moins bien connues, l'eau paraît cependant avoir joué un rôle indispensable au culte, si l'on en juge par la citerne des temps primitifs et le bassin du temple F construit lorsque cette dernière n'était plus en usage (373).
L'eau donc, mais aussi le leu: à Gadès, comme à Tyr, Silius Italicus l'affmne (374), les prêtres entretenaient, sur l'un des autels au moins, un feu perpétuel. Sans doute même des rites de crémation y étaient-ils pratiqués, si l'on en croit l'anecdote - il est vrai, assez obscure - que Pausanias tient de Cléon de Magnésie: ce dernier, lors d'un séjour à Gadès, aurait été, comme toute la population, contraint de quitter l'île, sur ordre d'Héraclès. Au retour, il aurait vu sur la grève "un homme marin" qui, jeté à terre, couvrait à peu près cinq arpents, et brûlait encore! (375)... un rite qui, plus mal compris encore par
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Fig. 19: Thasos, l'Héracléion
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Plan d'après B, BERGQUIST, HéracUs on Thasos, Uppsala, 1973. (1) "L'autel rupestre à cupules", de M. LAUNEY a perdu, depuis les fouilles récentes de Thasos, tout caractère sacré. (2) Ce "propylon" est, pour G. ROUX, un monument votif d'~poque hell~nistique, (3) L'Edifice polygonal, d'abord interprét~ comme le temple où sur l'eschara int~rieure on c~l~brait le culte d'H~raclès-h~ros, pourrait être une première salle de banquet (B. BERGQUIST, G. ROUX). (4) Nouvel hestiatorion: milieu Ve s. (B. BERGQUIST), IVème siècle (M. LAU NEY J. POUILLOUX), d~but Ille (G. ROUX). (5) Puits plutôt que bothros . (6) Temple ~riptère ionique sous lequel viennent d'être identifi~s les fondations d'un temple archaique (A) da~ de la fm du VIIème siècle (J. DES COURTILS, BeH, 109, 1985, pp. 882, 884 et 110, 1986, pp. 802-806 et figure 16).
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Pomponius Méla, lui aurait fait conclure que le sanctuaire de Gadès possédait les cendres d'Héraclès (376) ! On pense bien sûr à la grande fête du "réveil" de Melqart, renaissance du dieu par la vertu du feu qui, à Tyr, se célébrait au cours du mois phénicien de Péritios (février-mars) (377)... Une fête que Denis van Berchem propose de reconnaître, à Thasos, dans les Sôteria, en anthestérion (378). Il retrouve de même, dans le foyer situé au centre du petit mégaron primitif de l'Héracléion, le souvenir du feu perpétuel qui brûlait en l'honneur de Melqart à Tyr (p. 98) et, s'il est vrai que - comme à Kition, remarquons le - l'absence de débris organiques dans les cendres prouve que ce feu n'a pu servir à la combustion des victimes (379), on pourra toutefois faire remarquer que - contrairement cette fois à Kition l'autel-foyer à l'intérieur du temple - si toutefois temple il y avait et il est fortement permis d'en douter (380) - semble plus volontiers de tradition pré-hellénique que phénicienne! Sans douter le moins du monde de la présence des Phéniciens à Thasos - comment le pourrait-on, alors que se confmne - ce que ne savait pas encore Denis van Berchem - la présence d'or, dans la région même ou Hérodote dit avoir vu leurs mines! (381) ; alors que les fouilles prouvent que les colons pariens du VIIème siècle trouvèrent, à leur arrivée, une île déjà exploitée (382). Sans douter non plus que les Phéniciens aient, comme à Chypre, installé le culte de Melqart - et à ce titre le réglement sacrificiel découvert en 1913 est, effectivement assez probant! (383) - nous ne sommes pas persuadés qu'il faille voir dans l'Héraclès thasien le seul Héraclès-Melqart. Denis van Berchem, d'ailleurs, lorsqu'il oppose les Grandes Héracléia - de tradition hellénique - aux Sôtéria - qui perpétueraient les rites phéniciens - n'apporte-t-il pas, sans le dire bien sûr, des arguments à ceux qui, comme Jean Pouilloux, restent persuadés que le héros grec, le fils d'Alcmène, était, lui aussi, en honneur à Thasos (384), et que dans l'île, comme à Sicyone, c'est bien un double culte qui était rendu à Héraclès (385). Une fois de plus le témoignage de Pausanias est capital, qui, à propos d'une statue de bronze d'Héraclès consacrée par les Thasiens à Olympie rapporte: "J'ai entendu dire que les Thasiens vénèrent le même Héraclès que les Tyriens ; mais, par la suite, à partir du moment où ils furent complètement hellénisés, ils ont adopté l'usage de rendre aussi un culte à Héraclès fils d'Amphitryon" (386). De ce double culte témoigne la présence de rituels différents, correspondant vraisemblablement à des fêtes différentes, mais, au moment où nous pouvons les saisir (387), on peut se demander si ces cultes restent parfaitement
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individualisés : il est frappant, par exemple, que l'Héraclès dit phénicien ne soit pas connu sous le nom de Melqart (comme à Chypre, à Gadès ou à Lixos), mais "naturalisé" par l'épithète "thasios"; frappant encore que son culte ne soit pas célébré par un collège professionnel de prêtres comme à Gadès ou Thasos, mais par un seul magistrat (388). Il reste que l'épithète "thasios", précisément, confère à Héraclès un caractère poliade qu'il ne possède pas d'ailleurs et qui pourrait trouver une explication, si l'on admet qu'il a hérité des fonctions de Melqart, le maître de la cité. Dans de telles conditions comment attribuer avec certitude, au héros ou au dieu, l'Héracléion de Thasos (389) ? Il n'est pas interdit de penser, d'ailleurs, que dans la région de l'agora, près de ce "passage des théores" où fut affiché le réglement relatif au culte d'Héraclès (390), des fouilles ultérieures ne mettront pas au jour un nouveau sanctuaire d'Héraclès (391) ? Si nous avons ainsi tenu à comparer le dispositif du seul Héracléion jusque là découvert à Thasos à ceux qui furent, sans contestation possible des lieux de culte à Melqart, c'est, certes, en raison des rapprochements possibles, tant dans l'apparence que dans la fonction des lieux, mais en gardant à l'esprit les difficultés d'une telle interprétation (392). Nous resterons donc prudents, en ce qui concerne le sanctuaire thasien, mais pouvons en revanche affirmer que les sanctuaires occidentaux à Héraclès-Melqart portent bien la marque de l'origine orientale d'un culte qui fut celui de Melqart avant d'être celui du dieu syncrétique auquel ils sont dédiés (393).
2 • En ce qui concerne Melqart. Ce qu'apprend l'archéologie du sanctuaire chypriote peut paraître, dans ce domaine également, du plus haut intérêt. Melqart apparaît, à Kition, comme le dieu mâle, parèdre d'abord évanescent puis dominant, d'une grande déesse de la fertilité, manifestement Astarté, ce qui, en aval, éclaire, soulignons-le ici, mais nous y reviendrons, ses rapports avec l'Aphrodite d'Eryx (394). Faut-il envisager ces rapports comme étant déjà résiduels? (Le fils dans la triade primitive étant susceptible de se transformer facilement en parèdre (à la fois fils et amant) d'un couple ultérieur)? La tradition a, nous l'avons vu, conserv~ le souvenir d'un Héraclès phénicien donné comme ms de Zeus (identifié avec Ba'al) et Astérie (Astarté) et tant Victor Bérard, qu'Henri Seyrig voyaient en Melqart, effectivement, un dieu fils du panthéon phénicien dans le cadre d'une triade qu'attesteraient encore les
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cultes d'Oumm el'Ahmed non loin de Tyr (395). On aurait ainsi, dans l'archéologie et l'épigraphie de la cité chypriote, la confirmation d'une tradition jusque là attestée seulement à l'époque hellénistique; c'est peut-être le décalage chronologique qui, à l'époque des syncrétismes, aurait attribué à Ba'alle rôle du dieu-père de la triade... Les textes de Kition, eux, mentionnent Mika!. Le culte de Mikal est connu à Chypre, où ce dieu est parfois assimilé à Reshef. Le temple d'Idalion a livré plusieurs dédicaces à Reshef-Mikal et, en particulier, la célèbre inscription bilingue qui a permis le déchiffrement de l'écriture chypriote (396) et si, comme le pense René Dussaud, Reshef était à Chypre considéré comme le père de Melqart (397), le système apparaîtrait assez cohérent. C'est hélas sans aucune preuve qu'est avancée l'hypothèse. Reshef et Melqart, parfois associés dans les cultes hellénistiques, semblent plus volontiers liés par des rapports d'équivalence que par de telles relations de parenté (398) et rien, en définitive, n'atteste avec certitude de l'existence d'une triade à Kition. Il faut, au contraire, reconnaître que, comme le remarquent ailleurs les historiens de la religion phénicienne, c'est, une fois de plus, un couple divin qui paraît régner sur le sanctuaire de Bamboula et un couple divin dont l'élément le plus ancien, si l'on en juge par l'archéologie, le plus durable, encore, si l'on admet que l'inscription relative au sanctuaire d'Astarté s'y rapporte, est bien une divinité féminine (399). Et il nous semble que - plus que sa place au sein d'une éventuelle triade - c'est le rôle joué par Melqart auprès de cette déesse qui doit retenir l'attention. Or, à cet égard les nouvelles découvertes d'Ebla (400) sont du plus haut intérêt, qui permettent de penser que l'archétype de Melqart, le roi de Tyr, pourrait avoir été le Malik de la ville proto-syrienne (401). Non seulement le roi de la cité y serait un malikum, la reine une maliktum (402), mais de nombreux noms théophores: en -na -Ma -lik, en -si -ma -lik, eb-du-Malik, ip-hur-Ma-lik (403) - y feraient référence à un dieu Malik... Ainsi, par l'intermédiaire des marchands d'Ebla dont nous savons que très tôt ils fréquentèrent l'île du cuivre, les Chypriotes auraient pu se familiariser avec ce "Seigneur" d'une ville qui n'était encore ni Tyr, ni Kition, avec ce dieu qui n'était pas encore Melqart (404), avec ce roi divin qui, comme Héraclès, tient à la fois et des hommes et des dieux (405).
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3 - Un milieu éminemment favorable au syncrétisme religieux. Chypre, lieu de rencontre dès sa plus lointaine histoire, c'est, me paraît-il, la leçon essentielle de l'archéologie dans l'île du cuivre. C'est, en effet, ce poids d'un passé foisonnant de traditions qui explique la richesse de son panthéon, qui rend compte de la complexité - et peut-être aussi de la plasticité - de ses dieux. Enfin - et il semble bien que, dans le cas de Melqart, ce ne soit pas une figure de style - c'est cette histoire faite de rencontres, voire de dominations successives, qui a, progressivement, donné aux dieux leurs visages définitifs... Civilisations du Moyen-Orient, civilisations égéennes, l'ancienne Kition, celle du Bronze récent, en est, nous l'avons vu, héritière. Si l'on en juge par les objets égyptiens retrouvés dans ses tombes des XIVème et XIIIème siècles, le commerce entretenu avec l'Egypte devait être considérable également... Que ce commerce ait apporté autre chose que des objets d'usage, la représentation en ivoire du dieu Bès, trouvée dans l'un des temples fouillés par Vassos Karageorghis en témoigne (406), de même que ces chapiteaux à figures hathoriques encore imités au VIème siècle, puisqu'on les trouve en nombre dans l'autel-foyer de Kition-Bamboula (407). Ce jeu des influences multiples on le trouve à Chypre - et à Kition comme dans la plupart des centres urbains du Bronze récent - dès avant l'arrivée des Phéniciens. Mais Kilion est précisément la ville la plus importante de l'île et les dieux de Tyr s'y installent. Melqart, le "Seigneur de la ville", est là, déjà, sans aucun doute, proche d'Astarté comme dans la métropole où Hiram reconstruit en même temps leur temple. Certes, pour une haute époque, on ne retrouve pas son image. Lacune provisoire peut-être... à moins que, comme tant de dieux sémitiques, le maître de Tyr ne tolère pas d'être représenté...hypothèse d'autant plus crédible qu'elle est affmnée pour son homologue de Gadès tant par Silius Italicus (408) que par Philostrate (409). Les premières représentations, d'ailleurs, portent la marque de l'étranger: le Moyen-Orient, l'Egypte, mais encore l'Assyrie (présente à Chypre dès la conquête de Sargon II en 709) s'y rencontreraient pour façonner un dieu, jusque là sans visage... Les influences grecques bientôt seront décisives. Une tombe de la nécropole royale de Salamine prouve qu'existaient des contacts étroits dès le VIIIème siècle : trente-quatre vases grecs d'époque géométrique y ont été découverts, ce qui est
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exceptionnel. Il est vrai que la défunte - incinérée alors que son mari était inhumé - était très probablement d'origine grecque ! (410). Commerce donc, mariages chypro-grecs, les raisons de connaître l'Héraclès grec à Chypre ne manquent pas: au Vlème siècle des artistes chypriotes, influencés par la glyptique grecque, gravent les travaux d'Héraclès (et parfois de Thésée4 portant, comme le fils d'Amphitryon, massue et peau du lion) sur une série d'intailles, qui, par certains détails (exergue hachuré de type phénicien, ankh à l'égyptienne) participent aussi de la tradition orientale (411). Les exploits d'Héraclès y sont donc connus très tôt, et en particulier le plus lointain d'entre eux : la lutte contre Géryon pour les boeufs d'Erythie. On connaît bien la plaque gravée de la collection Cesnola sur laquelle le troupeau de Géryon tient encore tant de place (412); on connaît moins les représentations du monstre tricéphale retrouvées à Chypre. Guerrier aux six jambes, aux trois boucliers, Géryon, sur l'une d'entre elles, offre la représentation des travaux d'Héraclès : sur la tunique, la lutte contre le lion; sur les boucliers, la lutte contre un centaure, l'enlèvement des Cercopes, auxquels se mêle, là encore, un exploit discordant: la décapitation de la méduse (413). Enfm, Véronique Tatton-Brown a récemment attiré l'attention sur une terre cuite du British Museum (414): Géryon au triple buste et casqué menace un ennemi (Héraclès 7) d'un même mouvement de ses trois bras, probablement armés d'une lance aujourd'hui disparue; un seul bouclier subsiste, mais l'arrachement des deux autres est très perceptible. Les éléments de l'armure et le casque conique ("funnel shaped") étudiés par l'archéologue lui permettent de confIrmer la date traditionnellement donnée à cette sculpture, le milieu du VIème siècle apparaissant toutefois comme un terminus ante quem, dans la mesure où les traits du visage (les grands yeux en demi-lune; le nez proéminent, dans une face presque triangulaire) sont nettement caractéristiques des figures du style proto-chypriote daté, quant à lui, du Vllème siècle. Ainsi, les "travaux" d'Héraclès étaient-ils bien connus à Chypre... peut-être même l'étaient-ils depuis fort longtemps s'il est vrai, comme le suggère Vassos Karageorghis, que le combat du héros contre l'hydre figure déjà sur un plat de fabrique "white painted f' de la fm du XIeme siècle: deux personnages (il s'agirait alors d'Héraclès et de Iolaos) armés, l'un d'un arc, l'autre d'un poignard (ou d'une épée courte) attaquent un énorme serpent à deux têtes et à deux queues, au milieu d'un bestiaire (oiseau et animaux) dans lequel on pourrait tenter, peut-être, de retrouver les autres fauves auxquels dut s'affronter le héros (voir figure 20-3) (415). Encore convient-il de noter que, lorsqu'elle est
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représentée en Grèce (sur des fibules de bronze béotiennes du VIIIème siècle, par exemple) (416), l'hydre n'est pas un serpent à deux têtes, mais bien plutôt à sept (fig. 20-1) à l'image, dirait-on, de ces représentations orientales connues par des sceaux sumériens : c'est en effet un monstre à sept têtes que combat un héros (?) sur une empreinte de Tell Asmar (fig. 20-4) : deux d'ailleurs sont coupées et brandies triomphalement par le vainqueur (417). Il reste que ce document chypriote, découvert dans une tombe de Paléopaphos, est pour nous d'une importance capitale: qu'il témoigne de la présence à Chypre à la fin du second millénaire d'un Héraclès achéen dont la légende serait déjà en partie constituée, qu'il soit simplement inspiré d'une mythologie orientale ayant pu concourir à la constitution de cette légende, il donne Chypre, dans tous les cas, comme un lieu privilégié de la rencontre entre IHéraclès grec et ses homologues orientaux.
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Figure 20: Autour du combat contre l'hydre.
2.
Plaque d'une fibule béotienne bronze - dernier quan du VIIIème siècle Philadelphie University Museum.
1.
Détail d'une fibule béotienne bronze - 2ème moitié du Villème siècl Londres B.M.
D'après R. HAMPE et E. SIMON, Un millénaire d'art grec, 1600-600, fig. 92 et 93, Fribourg 1980.
3.
Héraclès, Iolaos et l'Hydre à Chypre? Plat de "White painted 1" Xlème siècle Diamètre 28 cm provenant de Paléopaphos (Tombe 58 - nO 104) Musée de Nicosie d'après KARAGEORGHIS, Cyprus jrom the Stone Age to the Romans, Londres, 1982, fig. 94.
4.
Un modile Oriental? Impression d'un sceau sumérien de Tell Asmar (v. 2500), d'après G.R. Lévy, The oriental origin of Herakles, J HS, UV, 1934, p. 40.
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CONCLUSIONS
Notre enquête nous a ainsi emportée, bien loin de Gadès et de Lixos, auprès de ces rivages phéniciens d'où partirent marins et commerçants de Tyr, et avec eux, l'archég~te de leur peuple: Melqart. Il ne fait aucun doute, en effet, que la présence à Lixos et à Gadès d'un temple au dieu qu'on devait appeler "l'Héraclès tyrien" a entraîné la localisation près de ces deux cités, du jardin des Hespérides et des paturages de Géryon. C'est pourquoi nous nous sommes efforcée d'en reconstituer avec précision le cadre géographique, les données historiques et le contexte religieux... Bref, l'ensemble des réalités qui ont pu ftxer le mythe. La toile de fond, telle qu'elle est peinte dans les plus détaillées de nos sources, est celle d'un pays à la nature généreuse... d'un pays où les fruits de la terre sont plus beaux, plus désirables; où le bétail qu'elle porte est plus fort, plus exceptionnel. .. d'un pays, aussi, où la terre renferme d'inépuisables richesses. C'est presque un pays de rêve,... il est d'ailleurs aux conftns de la terre habitée. Peut-être est-ce tout ce qu'Hésiode en connaît" Mais, de ce pays de rêve, déjà les Phéniciens avaient fait une réalité, et deux villes symbolisaient leur réussite, toutes deux consacrées au dieu garant de leur succès, Melqart... Melqart, qu'on trouve aussi à Kilion, la ville aux trois fonderies, auprès des mines de cuivre de Chypre, à Thasos "la brumeuse" ou "la brillante" (418) comme l'île lointaine de Géryon, en Sardaigne enftn, où l'on met au jour nombre de ces lingots de cuivre qui firent la fortune de Chypre (419)...Melqart que les Grecs apprirent à connaître - cela ne fait aucun doute - sur les routes commerciales que, pour les mêmes raisons, ils fréquentaient aussi. Où se ftt la rencontre, nous demandions-nous" Au terme de notre étude, Chypre, l'île de cuivre, plus que jamais nous paraît être ce creuset, où fut, au mieux, réalisée, la condition indispensable à tout syncrétisme : une certaine symbiose des populations. Carrefour de l'Orient, les influences babyloniennes, hittites, assyriennes, très tôt s'y exercèrent; relais de l'Occident, ses rapports avec la Crète, puis avec le monde mycénien sont désormais bien connus et il est manifeste qu'à l'âge du Bronze récent, des Achéens s'y installèrent. Ils furent, on le sait, suivis de peu par les Phéniciens; l'influence grecque
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enfin y laissa une forte empreinte - on en juge par l'art chypriote dès l'âge archaïque. Condition nécessaire encore: la forte présence de Melqart dans les villes phéniciennes de l'île et, tout particulièrement à Kition, la plus puissante sans doute d'entre elles, puisqu'elle fut très tôt transformée en royaume (420) et qu'il lui arriva de dominer Idalion (421). Or Melqart est. ici comme à Tyr. le Seigneur de la ville, le garant de ses entreprises. et le dynamisme même de la cité qu'il protège nous paraît être un facteur essentiel, tant il est vrai que les syncrétismes sont rarement spontanés, mais, bien au contraire. dépendent "surtout de la volonté centralisatrice d'un clergé conscient, s'appuyant sur un pouvoir politique fort" (422). Enfin. nous l'avons vu. l'Héraclès grec semble avoir été bien connu dans l'île, et ce jusque dans le détail de sa légende. comme en témoignent les multiples représentations du rapt des troupeaux de Géryon ou du monstre triple lui-même ! Et il convient. je crois. de souligner cette familiarité des Chypriotes avec le plus occidental des "travaux" d'Héraclès. L'explication la plus simple prend en compte. bien sûr. le rÔle du commerce phénicien à Gadès où très tôt paraît s'être fixée la légende. elle prend en compte également la présence de Kition elle-même en Occident. en ces lieux où règne le souvenir d'Héraclès. en Sardaigne, en particulier. où l'inscription de Nora mentionne. dès le IXème siècle. un temple érigé par des Phéniciens de la ville chypriote (423). Mais peut-être faut-il aussi redire le rôle ancien de Chypre dans le commerce méditerranéen ? Rappeler sa présence dans les mers occidentales à la fin de l'âge du Bronze. et ce rôle capital. qu'on commence à pressentir (424). des Etéochypriotes. entre l'expansion achéenne et celle des Phéniciens ? Si l'on admet. en effet. que c'est à Chypre que Melqart a rencontré Héraclès. ou plus exactement - car. pour ce qui est de la rencontre, elle a pu se faire en bien des lieux - si c'est à Chypre qu'on a décidé de les associer, voire de les confondre. il reste à répondre à une question essentielle: De quel Héraclès s'agit-il ? Lorsque, contrairement à l'usage sémitique - et fort vraisemblablement sous l'influence des Grecs - on représente volontiers le dieu de Kition dans son sanctuaire. c'est sous les traits du héros grec qu'il apparaît (425) et chacun peut très facilement reconnaître dans la massue et la peau du lion les attributs du fùs d'Alcmène: la tradition ne fait-elle pas de la lutte contre le lion de Némée le premier des travaux d'Héraclès? n'attribue-t-elle pas l'invention de la massue à Pisandre de
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Rhodes ou à Stésichore '1 (426). Une chose, en tout cas, est certaine, contrairement à ce qu'on a cru longtemps, le type divin connu à Chypre ne provient pas de Tyr : dans la ville phénicienne, Melqart n'apparaît sous les traits d'Héraclès à la massue que sur les monnaies de la fin du second siècle avant notre ère (427) ; auparavant il semble bien que le dieu tyrien n'ait emprunté que son arc au héros grec, et ce depuis le Vème siècle seulement (428). Les modèles donc sont ailleurs. La Grèce certes, mais laquelle '1 et pas seulement la Grèce! Contrairement aux représentations contemporaines de la céramique grecque (429), ou même à d'autres images retrouvées dans l'île (430), l'Héraclès "Chypriote" est, en effet, un dieu jeune et imberbe, un dieu plus proche, comme le fait remarquer M. Dunand, du Shadrafa de la Stèle d'Amrith (431) ou du Reshef de Ras Shamra que du dieu barbu de la stèle de Breidj, conservée au musée d'Alep et qu'une inscription désigne expressément comme étant Melqart! (432). fi est le dieu victorieux, le "smiting god" et il nous a semblé qu'une étude approfondie de ce type plastique pouvait apporter quelque lumière dans ce difficile problème du syncrétisme d'Héraclès/Melqart ainsi traduit dans l'iconographie plus d'un siècle avant qu'Hérodote ne l'atteste formellement (433). Dieu au lion, dieu victorieux, dieu redoutable. C'est aussi ce qu'est Sandas, si souvent invoqué avec les "violents", les brutaux", "ceux qui sont revêtus de robes sanglantes", (434), Sandas le Cilicien que deux textes grecs identifient avec Héraclès (435) ; c'est encore ce qu'est Nergal, en Babylonie "le dieu de la guerre, de la peste et de la chasse aux grands fauves" (436), qui fut, lui aussi, assimilé à Héraclès par les Grecs... Et il est permis de se demander si cet Héraclès est bien le héros, fils d'Alcmène, ou s'il n'est pas plutôt une figure plus ancienne de leur panthéon ou de leur mythologie, plus conforme. en tout cas. aux modèles orientaux qui lui seront proposés. une figure qui pourrait bien n'être pas tout à fait oubliée d'Homère (437) et que parfois retrouve la tradition postérieure : celle du héros terrible des Argonautiques d'Apollonios de Rhodes. par exemple (438).
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Fig. 21: l'Héraclès chypriote et l'Héraclès d'Arnrith (photos 1971)
H&acl~s d'Amrith..!avissa,
nO 225
Louvre, réserve Lefuel, MNB, 315.
Amrith,favissa, nO 229
H&acl~s chypriote,
Louvre, réserve Lefuel. AM 641.
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NOTES DE LA PREMIERE PARTIE
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En l'an 943. Ce texte de MASOUDI est emprunté à l'article de R. REBUFFAT, Bronzes antiques d'Hercule à Tanger et Azila. Antiquités Africaines, V, 1971, pp. 179-191. L'auteur utilise, pour son étude, des textes portugais du XVlème siècle (en particulier de V. FERNANDEZ) dont bien des thèmes paraissent empruntés à la tradition arabe. C'est d'ailleurs un Héraclès protecteur des navigateurs que paraissent connaître les géographes arabes qui croient à l'existence d'un colosse de bronze qui, aux Açores, aurait indiqué leur route aux voyageurs : cf. R. HENNIG, Eine arabische Umdeutung der hellcnischen Sage von den Saülen des Herakles, AKG, XXVI, 1935, pp. 337-341 ; 1936, pp. 337-341. De ce texte arabe on rapprochera le Roman dufort Hercules de Raoul Le Fèvre, chapelain de Philippe le Bon, qui se représente les colonnes comme des "Hercules" dont l'un tiendrait une pancarte : "Ne passe oultre pour quérir terre, Ne pour loingz royaulmes conquerre. Plus en Occident t'en yras Et moins de terre trouveras". cité par M.R. JUNG, Hercule dans la littérature française au XV/~me siècle, Paris, 1966. DIODORE DE SICILE, IV, 18,4 et 5. APOLLODORE, II, 106-108. On se reportera à notre prologue. J. CARCOPINO, op. cit., p. 69. J. CARCOPINO, ibid, p. 69. Nous reviendrons plus tard sur les localisations successives du mythe ; cf., à ce sujet, WILAMOWI1Z, Euripides Herakles, pp. 303-309 (v. 394) et plus récemment J. DESANGES, op. cit., qui, à propos du périple d'Hannon, parle du "transfert vers l'Atlantique de données concernant la Tripolitaine, la Petite Syrte et l'arrière-pays saharien" (pp. 80-81). APOLLONIOS DE RHODES, Les Argonautiques, IV, 1460 sq. CLAUDIEN, Eloge de Stilichon, l, 252, cite encore "Le Triton voisin des jardins Hespérides". HÉCAlÉE, F. Gr. Hist., 1 F 26. (ARRIEN, Anabase, II, 16,5). Cf. G. VANOrn, Gerione in Aristote 830 a, Mir. ausc, 133, dans Epigraphica, XXXIX, 1977, pp. 161-168. Cf. l'essai de reconstitution de la carte ionienne de J.O. THOMSON, Everyman's classicaJ atlas, Londres et New York, 1961, carte n°1. Les croquis se trouvent déjà avec de plus amples explications dans History of ancient geography, Cambridge, 1948, fig. Il p. 99 et 10 p. 97 du
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même auteur. On se reportera aussi à notre fig. 1. Sur la genèse de cette carte voir P. LÉVEQUE et P. VIDAL-NAQUET, Clisthène l'Athénien, Paris, 2ème éd., 1983, chap. V et cartes p. 79 et 81 et encore E.H. BUNBURY, A History of ancient Geography, 2ème éd., 1959 ; P. PÉDECH,La Géographie des Grecs, Paris 1976 ; St. GSELL, Connaissances géographiques des Grecs sur les cOtes africaines de l'océan, dans Mémorial Henri Basset, t. 1., 1928 pp. 293-312, repris dans Etudes sur l'Afrique antique. Scripta Varia, Lille 1981. Enfm, pour l'étude des textes littéraires on peut se reporter désonnais il l'étude de J. DESANGES, Recherches sur l'activité des Méditerranéens aux confins de l'Afrique, Paris/Rome 1978. HOMERE, lliade. XVIll, 606. 607. '&V B'tTî9&\ nOTal1oïo JLiya
a9tvOC" ·Ox&at.)()ïo 4vreya nàp nUI1I1TT\v aâx&OC' nUxa nO\T\Toïo . Cette représentation de la "force puissante" du "fleuve Océan" est particulièrement intéressante; on la trouve, en effet, dans la description du bouclier qu'HéphaYstos forge pour Achille, il l'extrême
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bord de ce bouclier, autour donc de ce microcosme qu'avait voulu y figurer le dieu "aux savants pensers". HOMERE, Odyssée, XII, 1-2. R. DION, Tartessos. l'Océan homérique et les travaux d'Hercule, RB., 224. 1960, pp. 27-44. Le fleuve qui revient vers sa source" dit l'Iliade, XVIII, 399 : aljlopp6ou ·Ox&avoïo. C'est une idée sans doute semblable qui est exprimée dans l'Odyssée, XX, 65 (où ces "bords où l'Océan reflue" sont, bien entendu, le séjour des morts). HÉSIODE, Théogonie. 242, 292; cf. aussi 265. HÉSIODE, Théogonie. 776; 787-790. HÉRODOTE, Histoires, II, 23 : "Je ne connais pas, quant il moi, l'existence d'un fleuve Océan ; Homère, je pense, ou quelqu'un des poètes précédents, a inventé ce nom et l'a introduit dans la poésie". Cf. aussi Ill, 115 et IV, 126. PLINE L'ANCIEN, Histoire Naturelle, V, 2. PLINE Histoire Naturelle, V, 3-5 ; cf. aussi PLINE ibid., XIX, 63 ; cependant PLINE connaît lui aussi, la version divergente situant en Cyrénaïque le jardin des Héspérides : cf. XIX, 41 ; V, 5. Il pourrait s'agir d'un périple ancien considéré comme le premier périple de la Mez Extérieure: celui d'APELLAS ou d'OPHELAS dont le souvenir est conservé, au Bas-Empire, par MARCIEN D'HÉRACLÉE. La description faisait une grande place il Gadès, Lixos, aux Iles des Bienheureux. donc il la légende d'Héraclès. Cf. J. SCHOO. Herakles im fernen Westen der alten Welt dans Mnemosyne. Ill, 7. 1. 1939, pp. 1-24. Cf. aussi J. DESANGES, op. cit., pp. 4-5.
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STRABON, XVII, 3, 3. STRABON, III. 2, 13. F. LASSERRE, Strabon, II, Les Belles lettres, 1966, p. 49, note 2, remarque que la forme XpuaEla - une forme poétique- et la place insolite de l'adjectif dans la phrase "pourrait signaler une citation", citation qu'il semble chercher dans la poésie épique du VIIème siècle ou chez STÉSICHORE, donc chez les poètes "post-homériques" au sens étroit du terme. Mais, dit-il, "STRABON ne parait pas avoir ici de référence précise à l'esprit". On sait, en effet, que les exploits d'Héraclès avaient été chantés par les poètes épiques, et on connaît l'existence d'une Prise d'Oechalia et d'une Héraclée attribuées à CRÉOPHILE DE SAMOS (A. et M. CROISET, Histoire de la littérature grecque, 1, pp. 453-454 ; Wll.AMOWITZ, op. cit., 1, p. 313 ; DORRBACH, loc. cit., p. 81), d'une autre Héraclée. oeuvre du spartiate CINAETHON (Scholie à Apollonios, 1, 1357), d'une troisième, composée par le rhodien PISANDRE, soit au VIlème siècle (A. et M. CROISET, op. cit., 1, pp. 456457) soit au début du Vlème siècle (WILAMOWITZ, op. cit., 1, p. 309)... malheureusement toutes ces oeuvres sont perdues et ne nous permettent pas de savoir si leurs auteurs connaissaient cette localisation. Même incertitude quant à la vaste composition de PANYASIS d'HALICARNASSE au Vème siècle ; ce dont nous sommes certains, en revanche, c'est que, pour MIMNERME au VIIème siècle (frg. 12 ; PL.G. II 4 p. 30) et même STÉSICHORE (frg. 8 ; PL.G. II, 14 p. 209) les Hespérides habitent encore la région imprécise où "le soleil chaque jour s'abime dans les flots". Pour une étude plus systématique et plus complète des sources on se reportera à notre seconde partie (chapitre "retolD' aux sources"). STRABON, IV, 1, 7, citation du Prométhée délivré d'ESCHYLE (frg. 199 NAUCK, frg. 326 METTE). Selon F. LASSERRE, op. cit., p. 133, si STRABON a pris sa citation chez POSÉIDONIOS, ce que le commentaire final sembJe indiquer, il est "probable" que celui-ci "la tenait lui-même de TIMEE ou d'ÉPHORE, voire d'ÉPHORE au travers de TIMÉE". Cf. aussi DENYS d'HALICARNASSE, 1, 41, 3 et HYGIN De Astrol.• II, 6 (METTE, 326, b et c). Cf. la citation du Prométhée délivré d'ESCHYLE, conservée par le PSEUDO-GALIEN et retenue par F. BENOIT, loc. cit., pp. 104-148 : "Ne t'écarte point de ce chemin. Il te conduira d'abord dans une contrée battue par Borée: prends garde que la violence de ce vent ne t'enlève de terre". N'oublions pas, cependant, que d'après PLINE (XXXVII, 32) Eschyle aurait dit "que l'Éridan se trouvait en Ibérie, c'est-à-dire en Espagne, et qu'il s'appelait aussi le Rhône". Cf. par exemple, PINDARE, Isthmiques, IV, 87-93. POMPONIUS MÉLA, au 1er siècle, mentionne, lui aussi, la grotte
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"consacrée à Hercule", la ville de Tinge, "ville très ancienne fondée à ce qu'on dit, par Antée" et les deux monts Abyla et Calpé, nommés, dit-il, les colonnes d'HeICule (l, 5). APOLLODORE, II, 10; DIODORE, IV, 18 et Plill..OSTRATE, Vie d'Apollonios de Tyane, V, 1, rapportent la légende; STRABON, dans un très long passage, cherche à l'interpréter (III, 5, 5-6). On se reportera à la note 169 du prologue pour les colonnes d'Atlas qui, dans la mythologie grecque, précédèrent les colonnes d'Héraclès. L'expression (cf. la même note) est, dès le Vlème siècle, suffisamment liée à Héraclès pour être passée dans le vocabulaire courant. Pour V. BERARD (Les Phlniciens et l'Odyssée, 1902), notre source la plus ancienne et la plus précise serait fournie par le périple d'Aviénus, 82-88 : "A l'endroit où la mer profonde sort de l'Océan pour venir en se déroulant former notre Méditerranée, se trouve la mer atlantique. Là, sont les colonnes de l'infatigable Hercule, Abyla et Calpé, Calpé sur la rive gauche, Abyla voisine de la Libye". L'Ora Maritima est-elle, comme la Descriptio Orbis, la traduction ou la paraphrase d'un périple du VIème siècle, périple généralement considéré comme marseillais, parfois comme carthaginois ? Est-elle au contraire l'oeuvre personnelle d'AVIÉNUS "qui le dit formellement et assemble des renseignements d'origine multiple, colligés avec un parti-pris d'archarsme" (A. BERTHELOT, Les Ligures, RA, 1933, 1, p. 115 et note 1 et FESTUS AVIÉNUS. Ora maritima, Paris, 1934). A. SCHULTEN et P. BOSCH GIMPERA (Fontes Hispaniae Antiquae, Barcelone, 1955) ont, semble-t-il, fait accepter l'idée d'un vieux périple massaliote, remontant à la première moitié du VIème siècle, caché dans le texte d'Aviénus. Les références à Himilcon qui avaient pu faire penser à un texte carthaginois (A. HERRMANN, Die Erdkarte der Urbibel mit eine Anhang iJber Tartessos und die Etruskerfrage, 1931, p. 766 sq.) ne seraient qu'interpolées, ainsi qu'un long fragment du périple attique d'Euctémon se rapportant à l'époque de Périclès. Dans ces conditions, on peut certes admettre la mention des colonnes d'Hercule, on peut aussi douter de la précision géographique : Calpé sur la rive gauche (Gibraltar), Abyla voisine de la Libye (Le Mont Acho ou le mont aux Singes voir infra p. 103 et note 88). Sur ce sujet, voir encore R. DION, Géographie historique de la France, Annuaire du Coll~ge de France, 59, 1959, pp. 504-508; M. ALMAGRO et A. GARCIA Y BELLlDO, in R. MENENDEZ PIDAL, Historia de Espana. l, 2, 2e éd., pp. 540-550. Nous reviendrons en détail dans notre quatrième partie sur le problème de la localisation et noterons simplement ici que, pour gagner le pays de Géryon, Héraclès emprunte au soleil sa coupe d'or ; cf. APOLLODORE, II, 10, qui semble bien, encore une fois, avoir suivi PHÉRÉCYDE (apud A'Î'HÉNÉE, XI, 470). On remarquera encore
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qu'Erythie, est aussi pour HESIODE, l'une des Hespérides, d'après SERVIUS, Commentaire de l'Enéide, IV, 484, frg. 270 R. D'après STRABON, III, 2, 11. (Frg. 7 de PAGE). STRABON, III, 5, 4 (F Gr Hist 3F 18b) ; cf. ausi FESTUS AVIÉNUS, Ora Maritima, 309-312. STRABON, III, 5, 4; les auteurs en question seraient ÉPHORE (FIiG, l, frg. 40 p. 244 F. Gr. Hist, 70 F 129) à qui l'on devrait la citation de PHÉRÉCYDE (F.Gr.Hist, 3 F 18b) et celle de PHILISTIDES (F.Gr.Hist, 11 F3). Cf. encore PLINE, Histoire Naturelle, IV, 120. J. CARCOPINO, op. Cil., p. 66, attribue à tort les deux traditions que Strabon, on le voit, oppose, au même Phérécyde. HÉRODOTE, IV, 8. SCYMNOS, 150-162. PLINE, Histoire Naturelle, IV, 22, 120 (Loeb): "ab eo latere, quo Hispaniam spectal. passibusfere Caltera insula est M longa passus M. lata, in qua prius oppidum Gadiumfuit ; ... Vocatur ab Ephoro et Philistide, Erythea... in hac Geryones habitasse a quibusdam exislimantur, quorum armenla Hercules abduxerit". Cf. aussi, POMPONIUS MÉLA, III, 6. Dans notre seconde partie. Cf. A. SCHULTEN, La geste d'Héraclès, in Tartessos, ContribuciOn a la historia mas antigua de Occidente, Madrid, 1924 ; et id. Die Griechen in Spanien, in RhM, LXXXV, 1936, p. 302. P. LAVIOSA-ZAMBOTTI, 1l Mediterraneo, l'Europa. L'[talia durante la preistoria. Enc. Classica, III, X, II,1964, pp. 97-384. A. GARCIA Y BELLlDO, AEA, XIV, 1940, XIV, 1940-41, p. 115 et Historia Mundi, III, p. 352. H. ROLLAND, A propos de Saint Blaise., REA, LI, 1949, p. 84. On se souviendra du "doute méthodique" prÔné naguère par J.P. MOREL, (Les Phocéens en Occident, certitudes et Hypothèses,PP, 1966, pp.378-420), quant à la colonisation phocéenne à Tartessos, ou, d'une façon plus générale, à la présence ancienne des Rhodiens et des Phocéens dans les mers occidentales. L'aventure du Samien Colaios rapportée par Hérodote (V, 152) témoigne peut-être du rôle important joué par les Samiens" associés à l'activité commerciale des Phocéens" (F. VILLARD, La céramique grecque de Marseille, Essai d'histoire économique, Paris, 1960, p. 56 et 72), mais, malgré les dates hautes proposées par A. SCHULTEN, (op. cit., p. 45), S. MAZZARINO (Fra Oriente e Occidente, Florence, 1947, p. 117) et A. GARCIA Y BELLIDO (Hispania Graeca, l, pp. 115 et 130), il reste généralement daté des environs de 630 (cf. J.P. MOREL,loc. cit., p. 390 et note 43 de la même page). Il est douteux que les Grecs aient eu une connaissance directe de l'Espagne avant le dernier tiers du VIIème siècle
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et. si leur présence dans la région de Tartessos est aujourd'hui prouvée par la trouvaille d'un casque corinthien de bronze de la fin du VIIème siècle sur les rive du Guadalete, dans la province de Cadix, il est bien certain que cette présence est postérieure à l'époque d'Hésiode. Le Vème Symposium International de Prehistoria (Jerez 1968) a d'ailleurs montré combien les découvertes archéologiques récentes invitaient à la prudence, en ce qui concerne l'expansion grecque en Espagne ; combien au contraire elles prouvaient l'importance des contacts avec les Phéniciens (J. MALUQUER, Nueves orientaciones en al problema de Tartessos : Tartessos y sus problemas, Barcelone 1969). Les grands gagnants de ce colloque, écrivait J.P. MOREL (Les Phocéens en Extrême Occident vus depuis Tartessos, PP, XXV, 1970, pp. 285-289) furent les Tartessiens eux-mêmes et les Phénico-Puniques (pp. 286). On se reportera enfm à l'étude bibliographique récente de P. ROun..LARD. Phéniciens, Grecs et Puniques, Histoire et archéologie de la Peninsule Ibérique antique, REA, 81, 1979, pp. 116-123. STRABON, III, 5, 4. F. LASSERRE, op. cit., p. 200 note 7 cite E.H.F. Meyer, Botanische ErlaUterunfen, 10 sq., selon qui "l'herbe en question pourrait être une variété de genêt très abondante à Cadix, le Spartium monospermum. la retama des Espagnols. Dira-t-on qu'Ho DE MONTHERLANT, encore, dans Les Bestiaires, chante "l'herbe grasse" au vert profond et presque sombre de ces prairies du Guadalquivir, de ces "marais nourriciers de bêtes sauvages (il s'agit bien sûr des taureaux 1) et qui ne s'arrêtent que dans la mer" (p. 40 et 74, 00. 1954, Paris).
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STRABON, III, V, 10. POSEIDONIOS, qu'il cite souvent, connaissait bien le pays puisqu'il avait. vers 90 av. J.-c., séjourné un mois à Gadès retenu par les vents d'Est A. GARCIA Y BELLIDO, Iocosae Gades, Princeladas para un Cuadro sobre Cadiz en la Antiguedad, BRAH, CXXIX, Juillet-Septembre 1951, pp. 73-122. Cet arbre produit en effet une résine rose appelée "sang de dragonnier". Il serait originaire des Canaries où il reste assez répandu.
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PHILOSTRATE, Vie d'Apollonios de Tyane, V, S. PLINE, Histoire Naturelle. IX, 3, 4. Une coudée et quatre doigts équivalent à 46 et 8 cm. HÉRODOTE, IV, 191. STRABON, XVII, 4. PLINE, Histoire Naturelle, XIII,91. PLINE, Histoire Naturelle, V, 14. PLINE, Histoire Naturelle, XIX, 63. PLINE, Histoire Naturelle, V, 6. Même témoignage chez POMPONIUS MÉLA, m, X : les céréales poussent, même si on ne les sème pas. Reconnaissons que le jardin des Hespérides tel que le
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décrit le Pseudo-Scylax (Périples libyques, 7) n'est pas moins luxuriant. "Il est couvert de l'ombre des arbres entrelacés aussi serrés que possible. Ces arbres sont le lOtos, des pommiers de toutes sortes, des grenadiers, des poiriers, des arbousiers, des mûriers, des vignes, des myrtes, des lauriers, du lierre, des oliviers, des oléastres, des amandiers, des noyers" (91 F 108 H). Or ce jardin est situé près de Cyrène. Sur le périple du Pseudo-Scylax voir J. DESANGES, op. cit., pp. 404-415. HÉSIODE, Théogonie, 294. Mais on aurait tort d'oublier que l' anp est aussi ce qui rend invisible, que c'est, en particulier, ce qui caractérise Hadès. Cf. à ce sujet, J.BAYET Hercule funéraire, MEFR, XXXIX, 1921-22, pp. 219-266 et XL, 1923 pp. 18-102 ; cf. aussi L. GERNET, La Cité future et le pays des morts, REG., 46, 1933 pp. 293-310, ou Anthropologie de la Gr~ce antique, Paris, 1968, pp. 149-150 et note 67. Cf. JUBA, apud ATHENEE, III, 83, b (FHG., III frg. 24 p. 472 ou F. Gr. Hist, 275 F 6). Cf. aussi ANTIPHANE, frg. 58. Un épi de blé figure déjà sur des monnaies à légende punique, cf. St. GSELL, Histoire de l'Afrique du Nord, II, p. 13. Cf. Th. REINACH, La tête d'Elche au musée du Louvre, REG. 1898, p. 55 : et Revue Celtique, XV, p. 209. Cf. supra, note 32, STRABON III, 2, Il ou Frg. 7 de PAGE. STRABON III, 2, 14. Mais peut-on dire, comme le fait R. THOUVENOT, Essai sur la province romaine de Bétique, 1940, p. 63 qu'ANACREON "mieux infonné (que Stésichore) vante la longévité de ce roi tartessien, qu'Hérodote appellera Arganthonios" ? HÉRODOTE, IV, 152. HÉRODOTE, l, 163. On situe généralement le règne de cet "homme de l'argent" dans les années 630/620 à 550-540. Cf. J.P. MOREL,loc. cil., p. 391 et note 4. Pour DlXON, The Iberians of Spain, (p. 28) il ne s'agirait pas d'un seul roi, mais d'une dynastie favorable aux Grecs et pour T.J. DUNBABIN, The western Greeks, p. 399, ce règne symboliserait seulement la période des contacts entre les Grecs et le pays de Tartessos. Pour P. BOSCH-GIMPERA (phéniciens et Grecs dans l'Extrême-Occident, La Nouvelle Clio, III, 1951, pp. 269-296) les Tartessiens trouvèrent sans doute dans la présence grecque le contrepoids nécessaire au monopole exercé dans le commerce par les Phéniciens (p. 282), opinion réaffumée par M. MALUQUER de MOTES au Symposium de Jerez (Tartessos y sus Problemas, Barcelone, 1969). DIODORE de SICll.E, V, 351. DIODORE de SICll.E, V, 35, 3. DIODORE de SICILE, V, 35, 4 et 5.
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STRABON III, 2, 8-14. STRABON III, 2, 8. POSÉlDONIOS (F.H.G., III, frg. 48, p. 272 ou F.Gr. Hist., 87 F 47, cité par STRABON III, 2, 9). La fable dont il est question est celle de l'embrasement des Pyrénées (cf. aussi, DIODORE, V, 35). Sur ce sujet, voir F. LASSERRE, op. cit., p. 190. Cf. un développement analogue chez DIODORE DE SICILE, V, 38,
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FEsrus AVIÉNUS, Ora Maritima, 291-298 : "At mons paludem.
4. incumbit Argentarius. Sic a vetustis dictus ex specie sui : stanno iste namque latera plurimo nitet, magisque in auras eminus lucem evomit. quum sol ab igni celsa perculerit juga. Idem amnis autem fluctibus stanni gravis. Ramenta volvit. invehitque moenibus. dives metallum".
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EPHORE, au IVème siècle av. J. -C., avait une vision très comparable, apud, PSEUDO-SCYMNOS, 165 et STEPHANE DE BYZANCE, s.v. Tartessos : "Elle s'appelle Tartessos, ville illustre arrosée par un fleuve qui charrie d'énormes quantités d'étain, d'or et de cuivre...." Cf. A. GARCIA Y BELLlDO, Tartessos, p. 252 et note 36. FESTUS AvIÉNUs, Ora Maritima, 113-116. Les fies Oestrymnides sont probablement celles qui se trouvaient dans le golfe aujourd'hui comblé de la Grande Brière. Aviénus ne dit rien ici des Cassitérides, pourtant plus connues des Anciens (HERODOTE, III, 115, DIODORE, V, 38 et surtout STRABON, III, 5, 11). Sur le problème de la locaIisation de ces fies (près de la Grande Bretagne ou de l'Ibérie) cf. R. DION, Le problème des Cassitérides, Latomus, XI, 1952, pp. 306-314 et Les routes de l'étain, l'isthme gaulois et le carrefour de Paris, Hommes et Mondes, 7, 1952, pp. 547-557; F. VILLARD La Céramique grecque de Marseille, Paris, 1960, pp. 137-161 : R. ÉTIENNE, Bordeaux Antique, Bordeaux, 1962, pp. 65-71. Cf. surtout: J. RAMIN, Le problème des Cassitérides et les sources de
l'étain occidental depuis les temps protohistoriques jusqu'au début de notre ère, Paris, 1965, et, en dernier lieu l'article méthodologique et
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bibliographique de S. LEWUll..LON, Polémiques et méthode, à propos d'une question historique: pour des "îles Cassitérides", DHA, 6, 1980, pp. 235-266. Cf. en particulier l'étude bibliographique de J.P. MOREL, loc. cit., p. 390 et la deuxième édition de l'ouvrage de J .M. BLAZQUEZ,
Tartessos y los origines de la colonisaci6n fenicia en Occidente.
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Salamanque, 1975, qui cependant étudie plutôt les témoignages de la présence phénicienne à Tartessos. Cf. encore P. CINTAS, Manuel d'archéologie punique, l, Paris, 1970 chap. III. J. CARCOPINO, op. cit., p. 53. J. CARCOPINO, ibid, p. 53. Pour cet auteur, c'est aussi la "passion
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de l'or" qui expliquerait le périple d'Hannon, entrepris "pour assurer à Carthage la maîtrise de l'or du Soudan" (p. 154) et c'est la petite île de Cernè, dans la baie de Rio de Oro, qui aurait été le centre des transactions. Cf. ARISTOTE, Météorologie, l, 12,21 ; Liber inundationis Nili, dans Les fragments d'Aristote édités par Didot, p. 214. Cités par J. CARCOPINO, p. 54 et note 1 de la même page. PLINE, Histoire Naturelle. V,9. VITRUVE, VIII, 2, 6. PTOLÉMÉE, IV, 6, 3. J. CARCOPINO, op. cit., p. 54 et note 7. M. PONSICH et M. TARRADELL, Garum et industries antiques de salaison dans la Méditerranée occidentale, Bibliothèque et l'Ecole des Hautes Etudes Hispaniques, XXXVI, Paris, 1965. Cf. aussi M. TARRADELL, Lixus, Valence, 1959, et Historia de Marruecos Punico, Tetouan, 1960. Dans un périple attribué à SCYLAX (Périples Iibyques. 7) et dont la rédaction remonte probablement à la seconde moitié du IVème siècle, l'auteur termine "par une description prolixe de la CÔte de Libye au delà des colonnes d'Héraclès, qui juxtapose maladroitement des indications empruntées à des sources diverses" (J. DESANGES, op. cit., p. 110) et après avoir passé Lixos (et il est vrai Cerné) il mentionne "une ville que les Phéniciens gagnent par voie de mer "dans laquelle on a parfois cru reconnaître Lixos (une nouvelle fois) et les Ethiopiens "qui font beaucoup de vin du produit de leurs vignes, un vin que les Phéniciens emportent" (95 F 112 M) ; cf. J. DESANGES, (Ioc. cit., p. 414). Quelle que soit la valeur de cette identification il faut remarquer que l'archéologie confirme l'intense activité agricole de la région (M. PONSICH, Contribution à l'atlas archéologique du Maroc : région de Lixus, BAM, VI, 1966, pp. 377-423) et que les monnaies pré-romaines émises par la cité confIrment et le rOle de la pêche (thons) et celui de l'agriculture (grappes de raisin ou épis). Cf. L. MULLER, Numismatique de l'Ancienne Afrique, nI, Copenhague, 1862, pp. 78-183 et suppl. 1874, pp. 69-81 ou J. MAZARD, Corpus NummorumNumidiae Mauretaniaeque, Paris, 1955, p. 191 et nO 138. Cf. aussi H. BESNIER, La géographie économique du Maroc dans l'Antiquité, Archives marocaines, Paris, 1906. F. VILLARD, Céramique grecque du Maroc, BAM, IV, 1960, pp. 1-26 remarque d'ailleurs que, si les amphores à vin forment l'essentiel des importations de Mogador au VIIème siècle, elles sont, au contraire, très rares à Lixos. HÉRODOTE, III, 116. Cf. les remarques et indications bibliographiques des notes 10 et II supra.
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Cf. la carte du monde habité selon Strabon, dans G. AUJAC, Strabon, Géographie, Les Belles Lettres, 1,2,1959 hors texte.
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Cf. A. BERTHELOT, Les données numériques de la Géographie antique d'Eratosthène à Ptolémée, RA, XXXVI, 1931, pp. 1-34; J. GAGE, Gadès, l'Inde et les navigations atlantiques dans l'antiquité, R.H., 1951, 205, pp. 189-216. Pour le PSEUDO-SCYLAX (Périples libyques, 7, 94 F 111), c'est aussi dans les parages de Gadeira "que sont les colonnes d'Héraclès, l'une de hauteur modeste, en Libye, l'autre, élevée, en Europe". Sur les colonnes d'Héraclès, cf. note 169 du Prologue et supra note 30. Pour leur identification, cf. M. TISSOT, Recherches sur la Géographie comparée de la Maurétanie Tingitane, extrait des Mémoires présentés à l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres, 1ère série, IX, 1877. Cf. aussi V. BÉRARD, pour qui le mont Abyla des géographes serait l'Atlas d'HOMERE (Odyssée, l, 52-55), peut-être même encore celui d'HÉRODOTE (Vll, 174), les deux mots formant d'ailleurs un de ces doublets gréco-sémitiques, d'après lui, très fréquents. (Ils désigneraient "celui qui porte un fardeau", le pilier). L'identification proposée est, comme pour M. TISSOT, le Mont Acho, point culminant de la Sierra d'Almina, sur la cOte marocaine, ou le Mont aux Singes voisin, l'autre étant, sur la cÔte espagnole, le rocher de Gibraltar. cf. aussi M. BESNIER, Géographie ancienne du Maroc, Archives Marocaines, III, 1904, pp. 301-365 : St. GSELL, op. cit. II, pp. 167-168. R. ROGET, Index de topographie antique du Maroc, PSAM, IV, Paris 1938 ; J. CARCOPINO, op. cit., p. 57 cf. encore, plus récemment, M. PONSICH, Recherches archéologiques à Tanger et dans sa région, Paris, 1970, pp. 7-8 et représentation, fig. 1 p. 8 ; F. BENET, La columna de Hercules en Libia, BAM XVI, 1985-1986 pp. 409-413 se prononce, pour sa part pour le Mont Musa à l'ouest de Ceuta. SILIUS ITALICUS, Les Puniques, l, 141 ; XVII, 637. STRABON, XVII, 3, 2. Ce passage nous paraît conférer plus de valeur encore à son témoignage cité supra quant aux derniers travaux d'Héraclès (III, 2, 13). PLINE, Histoire Naturelle, IV, 120 Après, peut-être, plusieurs tentatives malheureuses, si l'on en croit STRABON (III, 5,5). DIODORE rapporte également que la fondation de Gadès avait été précédée par une intense activité commerciale des Phéniciens en Occident (V, 20). C'est un problème très controversé qu'il ne nous appartient pas de développer ici ; on trouvera cependant, dans une annexe à cette première partie une bibliographie sommaire et une mise au point rapide sur les problèmes que pose le périple quant à l'existence de Lixos.
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SCYLAX ou PSEUDO-SCYLAX,112, G.G.M., l, p. 92 (=95F112)
nOTalû>Ç JL&yaç Ai(oç xal n6Àlç cpolVixCa>v Ai(oç. On considère généralement que ce périple a pu être rédigé vers 335 avant notre ère. On en trouvera le texte (établi par B. Fabricius en 1878, Teubner) et la traduction dans J. DESANGES op. cit., pp. 404-415. 95 - F.C. MOVERS, Die PhOnizier, p. 540. On préfère généralement reconnaître une origine berbère au nom primitif de la ville: Liks. 96 - St. GSELL, op. cit., l, p. 73; cf. en dernier lieu, M. TARRADELL, Marruecos Punico, Tétouan, 1960. 97 - PLINE, Histoire Naturelle, XIX, 63. 98 - P. CINTAS, op. cit., p. 246. 99 - J. CARCOPINO, op. cit., pp. 50-51 ; P. BOSCH-GIMPERA, Phéniciens et Grecs dans l'Extrême Occident, La Nouvelle Clio, III, 1951, p. 276 note l, ne croit pas à cet argument d'ordre géographique et estime que l'établissement d'une escale sur la cÔte africaine "serait plus compréhensible à Tanger, au début du détroit, et non après s'être avancé vers le Sud et être obligé de revenir en arrière..." objection valable seulement si l'on n'admet pas l'intérêt des Phéniciens pour la côte africaine elle-même et qui l'est moins encore si l'on considère les difficultés d'accès de la côte du détroit, sans abri naturel et balayé par les vents. 100 - Selon le Livre des Rois (en particulier X, 22) Salomon, roi d'Israel, et Hiram, roi de Tyr, auraient, tous les trois ans, fonné des convois de navires dits Tarshish et ramenant or, argent et diverses marchandises précieuses. Selon MAZZARINO, Fra Oriente e Occidente, pp. 116-117, R. DION, loc. cit., pp. 27-44, A. GARCIA Y BELLIDO ete... Cette Tarshish (ou Tarsis) de la Bible serait Tartessos, théorie vivement combattue d'ailleurs: Selon V. TÂCKHOLM, Tarsis, Tartessos und die Sl1ulen des Herakles, dans Opuscula RomtJna V, 1965, pp. 143-200, il convient de distinguer la.Tarshish du Livre des Rois (Xè siècle) manifestement riveraine de la mer Rouge, et la Tarshish de la Genèse ou d'Ezéchiel (XXVII, 2) qui, au VIème siècle peut, quant à elle, être placée en Andalousie. Selon W F. ALBRIGHT, New Light on the Early History of Phoenician Colonization, BASOR. 83, 1941, p. 21, Tarshish signifierait "mine", "fonderie"" et serait ainsi, en quelque sorte, un nom générique qu'on retrouverait ensuite comme nom ropre en différents lieux connus d'abord pour leurs richesses minières. P. CINTAS, op. cit., pp. 275-276, et annexe IV adopte également cette opinion. En tout état de cause on reste fort critique quant à l'équation Tarshish/I'artessos : J.M. BLASQUEZ. Tartessos... éd. 1975 situe en Inde la Tarshish biblique, ce que récuse G. BUNNENS dans son compte-rendu de Latomus, XXXV, 1976. pp. 935-937. Après examen des témoignages littéraires ce dernier estime que "le problème de la localisation de Tarshish reste posé" (p. 936). La
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même réserve était très largement partagée lors du récent colloque romain (14-16 mars 1985) consacré aux Momenti precoloniali nel Medite"anéo Antico, à paraître. HÉRODOlE, IV, 8, on notera la forme rflB&1.p01. au pluriel; cf. A. GARCIA Y BELLlDO, Iocosae Gades, p. 12 et P. CINTAS op. cit., p.256. SALLUSTE, Fragments, II,32. Histoire Naturelle, VII, 56. FESTUS A vIÉNUs, Ora Maritima, 266-270. DIODORE, V, 20. VELLEIUS PATERCULUS, l, 2,3 et 4, place la fondation de Gadès 80 ans après la guerre de Troie et la met en rapport avec le retour des Héraclides. STRABON, l, 3, 2 (rappelons qu'en même temps, les Phéniciens auraient, d'après lui, fondé des villes sur la cÔte libyenne). POMPONIUS MÉLA, III, 6. évoque en réalité le temple "d'Hercule égyptien" qui fut, dit-il, "bâti par les Tyriens" et dont l'origine "remonte à la guerre de Troie". Plusieurs études ont fait une large place à ces textes, en particulier, St. GSELL, op. cit., l, p. 359 sq. ; A. GARCIA Y BELLIDO, Historia de Espana, l, 1952: A. SCHULlEN, Fontes Hispaniae Antiquae Barcelone, 1955; P. BOSCH-GIMPERA, loc. cit., pp. 248-258. Pour les synthèses les plus récentes on se reportera infra aux notes des pages 109-110. Cf. E.O. FORRER, Karthago wurde erst 673 - 663 v. Christ gegrUndet, Festchrift Frantz Dornseiff, Leipzig, pp. 85-93 et, après lui, E. FREZOULS, Une nouvelle hypothèse sur la fondation de Carthage, BCH;1955, l, p. 153 sq., cf. aussi la riposte de R. CARPENTER, Phoenicians in the West, AJA, 62, 1958, pp. 35-53 et le livre vivement polémique de P. CINTAS plusieurs fois cité. Cette chronologie basse donnezait pour Utique et Gadès, une date voisine de 950, assez proche, remarquons-le, de celle qu'on attribue généralement aujourd'hui aux débuts de la "thalassocratie" phénicienne. n reste qu'à Carthage les premiers vestiges archéologiques datés appartiennent au VIDème siècle. POMPONIUS MÉLA, III, 6. A. GARCIA Y BELLlDO, Hercules Gaditanus, Madrid, 1964, fig. 1 et 2 p. 76, reproduites ici = fig. 2. Cette distance correspond d'ailleurs à celle qu'on peut déduire de l'indication rapportée par STRABON (III, 5, 3) selon laquelle la ville était à environ 12 milles du sanctuaire d'Héraclès; le sanctuaire serait bien ainsi "à l'endroit précis où l'Ile semble toucher le continent", seule l'orientation donnée par Strabon paraît quelque peu troublante ; cf. A. GARCIA Y BELLIDO,Iocosae Gadès, pp. 14-15 ; cf. aussi P.
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CINTAS, op. cit., p. 259 note 55 et en dernier lieu: J.M. BLAZQUEZ dans Imagen y Mito. ESludios sobre religions medilerraneas e ibericos, Madrid, 1977. PSEUDO-SCYLAX, 94 F 111. V. BÉRARD, Calypso el la mer de l'Atlantide, Paris, 1929, p. 279. J.R. SUAREZ DE SALAZAR, Grandezas y anliqU/!dades de la Isla de Cadiz, 1610. On pouvait encore voir, li son époque, les ruines d'un aqueduc et d'un amphithéAlre. Cf. essentiellement les compte-rendus deP. QUINTERO y ATAURI, Excavationes en Cadiz dans JSEA. Les résultats sont repris par A. GARCIA Y BELUDO, Fenicios y Carlagineses en Occitknle, 1942, p. 253 sq. P. CINTAS, op. cil., p. 262. Cf. E. LIPINSKI, Vestiges phéniciens d'Andalousie, Orienlalia Lovaniensa Periodica, 15, 1984, pp. 81-132. P. BOSCH~GIMPERA, Fragen des phoenizichen KOlonisation in Spanien, Klio, 1928, p. 345 sq., Cf. aussi R. CARPENTER qui, dans ses Phoenicians in the West, (AJA, 62, 1958, pp. 35-53) rabaisse jusqu'au VIIème siècle l'essor de la colonisation phénicienne. P. BOSCH-GIMPERA, Nouvelle Clio. loc. cit., p. 273. W. F. ALBRIGHI', New light on the early History of the Phoenician colonization, BASOR, 83, 1941 pp. 14-22. P. BOSCH-GIMPERA, loc. Cil., p. 273 li 275 et note 1 p. 273 pour la liste des thalassocraties "d'Eusèbe--Diodore". Cf. supra note 110. J.M. BLAZQUEZ, Tarlessos y'los origines de la colonizaciOnfenicia en Occidenle, 2è ed. Salamanque, 1975. pp. 310 li 398. A. GARCIA Y BELLIDO (Hispania Graeca. op. cil., pp. 6-7) les date de 1400 li 1200, mais, alors que pour P. CINTAS, il ne fait aucun doute que ces premiers contacts sont phéniciens A. GARCIA Y BELLIDO est plus réservé. Cf. encore la brève mise au point qu'il donnait li la revue Archéologia pour son numéro spécial, Les Phéniciens, XX, 1968, pp. 81-85. M. PELLICER, Excavaciones en la necropolis punica "Laurila" dei Cerro de San Crislobal (Almuiiecar. Granoda), Madrid, 1965. M. PELLICER, H.G. NIEMEYER, H. SCHUBART, Eine altepunische Kolonie an der MÜDdung des Rio Velez, M, 1964. pp. 476-493. A Toscanos dans les strates les plus anciennes de l'habitat phénicien dès la fin du VIIIème siècle, la céramique indigène est inférieure li 3 %: Cf. A. GARCIA Y BELLIDO, H. SCHUBART, H.G. NIEMEYER,L'espansionefenicia nel Medilerraneo, Rome 1971 et G. LOPEZ MONTEAGUOO, Panorama actual de la colonizaci6n Semita
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en la Peninsula Iberica, RSF, S, 1977, pp. 185-204. Cf. encore M.E. AUBET SEMMLER, Aspectos de la colonizaci6n fenicia en Andalucia durante el siglo VIII AC., ACFP l, III, Rome, 1983 pp. 815-824 et Los Fenicios en Espatla : estado de la cuesti6n y perspectivas, Los Fenici6s, l, 1986, pp. 9-38. G. BUNNENS dans son compte-rendu de l'ouvrage de J.M. BLAZQUEZ, loc. cit., p. 936. Cf. surtout du même auteur : L'expansion phénicienne en Méditerranée, Bruxelles-Rome, 1979 ; et les synthèses de S. MOSCATI (en particulier 1 Fenici e Cartagine Turin, 1972, Problematica della civiltilfenicia, Rome 1974; Il mondo dei Fenici, 2ème éd, Rome, 1979). et de J.M. BLAZQUEZ, Historia de EspaiuJ antigua, l, Protohistoria, Madrid, 1980. A. ALMAGRO GORBEA, L'esempio della penisola iberica, dans Forme di contatto et processi di transformazione nelle societa antiche. Pise/Rome, 1983, pp. 429-461. Cette statuette, découverte en 1956 au large de Sciacca, sur la cOte sud de la Sicile représente un dieu dans l'attitude de la marche et brandissant une arme de la main droite, identifié soit avec Melqart, soit avec Reshef, et très proche des bronzes datés à Ras Shamra du XIVème siècle. Cf. S. CHIAPPISI, Il Melqart di Sciacca e la questione fenicia in Sicilia, Rome, 1961 ; D. HARDEN, op. cit., p. 62 et Pl. 93, A.M. BISI, Fenici 0 Micenei in Sicilia nella sec6nda metà dei Il millenio A.C. ? (in margine al cosidetto Malqart di Sciacca), Atti e memorie dei 1 Congresso internazionale di micenologia, III, Rome 1968, pp. 1156-1168. On se reportera sur ce point à notre "seconde partie" p. 283 et notes 287 et 288 de la seconde partie. Cf. DUNBABIN, op. cit., p. 327 ; E. FRÉZOULS, loc. cit., p. 172 et R. CARPENTER, op. cit., p. 43. Contra G. VALLET, Rhégion et Zancle, op. cit., p. 85 note 5. Plus récemment voir la contribution de S. Ph. BONDI dans Storia della Sicilia, l, Naples-Palerme, 1979 ; Penetrazione fenicio punica e storia della civiltà punica in Sicilia ; V. roSA, La necropoli arcaica e adjacenze. Relazione preliminare degli scavi eseguiti a Mozia negli anni 1972, 1973, 1974, Mozia IX, Rome 1978 ; B.SJ. ISSERLIN, The North Gate Excavations: Motya. A Phoenician and Carthaginian City in Sicily, l, Leiden, 1974. Enfin, V. roSA donne, dans les DHA, 9,1983, une synthèse rapide et claire des témoignages de la présence phénicienne et punique en Sicile: il Motyé, au moins depuis la fin du VIIIème siècle; il Solonte, seule la cité du IVème siècle a été reconnue, mais une nécropole archaïque récemment découverte pourrait témoigner de la Solonte plus ancienne de Thucydide; à Palerme, c'est encore une nécropole où le matériel phénico-punique cÔtoie la céramique grecque d'importation qui constitue l'essentiel de notre connaissance archéologique de la cité.
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Lilybée, plus tardive, n'est fondée qu'après la desb'UCtion de Motyé au début du IVème siècle de noire ère. Quant à Eryx, 2 phases se distinguent nettement : la première, élyme, du VllIème siècle ; la seconde, punique, de la seconde moitié du Vlème siècle à la fin du IVème siècle. (La Sicilia fenicio -punica, pp. 237-286). R. CARPENTER, loc. cil., p. 47 sq. date cette inscription du VIIlème siècle, mais pour W.P. ALBRIGHT, loc. Cil., (1941) elle remonte à la fin du IXème siècle (avec une fourchette allant de 925 à 825). Cf. aussi A. DUPONT-SOMMER, CRAl, 1948, pp. 12-22 et R. DUSSAUD, Syria, 1949, pp. 154 et 390. Cette inscription est encore très souvent commentée, on peut trouver une bibliographie dans RDAC. 1974, pp. 83 sq. et 1979, p. 237 et note 3. Voir surtout O. MASSON et M. SZNYCER, Recherches sur les Phéniciens d Chypre, 1972, p. 14 et M.G. GUZZO AMADASI, Le Iscrizioni Fenicie e Puniche delle colonie in Occidenle, Rome, 1967, pp. 83-88 ; S. MOSCATI, Le iscrizioni fenicio-puniche, dans Le iscrizioni pre-laline in Ilalia, Rome, 1979. Cf. SIum Sardi, 21,1968 (G. SOTGIU, pp. 720 sq.) ; 22, 1971-72 (J. FERRON, pp. 269 sq.) ; et Ricerche puniche ad Anlas, Rome, 1969. S. MOSCATI, Fenici e Carlaginesi in SardegM, Milan, 1967; F. BARECCA, La Sardegna fenicia e punica, Sassari, 1974 et, L'archeologia fenicio-punica in Sardegna. Un decennio di aUività, ACFP 1, Il, Rome 1983, pp. 291-310 ; G. LIlLIU, Rapporti b'8 la civiltà nuraghica e la civiltà fenicio-punica in Sardegna, SE, 18, 1944, pp. 323-370. E. AQUARO, Il santuario fenicio di Tharros, RPARA, 49, pp. 32-33. Cf. 1. HEURGON, op. cil., pp. 135-136 et la bibliographie, p. 30 et plus récemment, S. Ph. BONDI, 1 Fenici in Occidente, Colloque de Cortona, op. Cil., pp. 379-407 qui donne une bibliographie très complète des recherches archéologiques pour Malte, la Sardaigne et la Sicile. S. MOSCATI, Sicilia e Malta, nell' età fenicio-punica, Kolalos, XXII-XXIII, 1976-77, pp. 151-161 ; A. CIASCA, Malta dans L'espansione fenicia nel Medilerraneo, Rome 1971 ; A. CIASCA, Il tempio fenicio di Tas Silg una proposta di ricostruzione, Kolalos, XXII-XXIII, 1976-1977. Cf. encore M.P. ROSSIGNANI, Ceramici e trovementi vari, Missione archeologica ilaliaM a Malla. Rapporlo preliminare della campagna 1968, Rome, 1969. La fondation d'Ibiza est généralement datée de 654 (Diodore de Sicile, V, 16 : 160 ans après la fondation de Carthage). Cf. Ph. S. BONDI, loc. cil., (Cortona, 1981) p. 33. Pour les Phéniciens dans les Iles Baléares, on se reportera aux ouvrages généraux déjà cités et à M. J. ALMAGRO, Guia de la necropolis y Museo monografico dei Puig des Molins (Ibiza), Madrid,
186 1969: cf. encore J.M. BLAZQUEZ, Escarabeos de Ibiza (Baléares) dans, Hommages à Fernand Benoit, l, Paris, 1972, pp. 327-344. 143 - Momenti precoloniali nel Mediterraneo antico. Questioni di Metollo. Aree d'iMagine. Evidenze a confronto, Rome, Mars 1985, à paraître. 144 - Cf. La communication à ce colloque de A.M. BISI : Modalità e aspetti degli scambi rra Oriente ed Occidente. Ibid, et celle de S. Ph. BONDI, Problemi della precolonizzazione fenica nel Mediterraneo centro-occidentale, ibid. On rejoint ici les conclusions des mycénologues : on se reportera à notre seconde partie pp. 283-285 et notes 286, 289, 290. 145 - L'expansion phénicienne perd en effet l'aspect monolithique qu'on lui a trop souvent pr!té qu'il s'agisse du point de départ (avec l'existence de plusieurs cités organisatrices) : des modalités (initiative d'Etat ou intiative privée) : ou encore de ses buts. Cf. la communication de G. BUNNENS, ibid. 146 - M!mes constatations pour l'expansion dans la méditerranée orientale, cf. infra, p. 150 et note 341 pour Chypre. 147 - F. MAZZA, La città della Fenicia e la questione della precolonizzazione. ibid, à paraître. 148 - V. roSA, La colonizzazione fenicia e le culture anelleniche di Sicilia, ibid, à paraître 149 - G. BUNNENS. Les sources historiques sur la précolonisation et la colonisation phénicienne en Occident, ibid, à paraître. 150 - C'est pourquoi les propositions de P. BOSCH-GIMPERA ne paraissent pas tout à fait convaincantes qui dissocient par trop Sardaigne et Andalousie (cf. supra ). 151 - On se reportera sur ce point à notre Epilogue. L'Etrurie possède du cuivre, du plomb, du fer, mais manque de l'argent et de l'étain extrême-occidentaux. 152 - Cf. S.Ph. BONDI, loc. cit., (Cortona 1981). Des objets grecs se trouvent dans la nécropole archaïque de Motyé et, dès la fm du Vllème siècle, des Grecs vivent probablement à Palerme. Cf. aussi V. roSA, loc. cit., (DHA 1983) et la bibliographie détaillée de ces deux auteurs. 153 - Cette idée a été exprimée, aussi bien par S. MOSCATI que par G. BUNNENS. loc. cit., à paraître. 154 - DIODORE DE SICll..E, ,35,4. La cupidité de ces marchands était telle, ajoute-t-i1, que leur navire étant déjà chargé ils coupèrent le plomb de leurs ancres pour y substituer de l'argenL 155 - DIODORE DE SICILE, V, 35, 5 et encore V. 20, 1 à 4. Il est vrai que dans un autre passage il attribue aux Carthaginois la découverte de l'argent d'Espagne. 156 - DIODORE DE SICll..E, V, 20. 2. 157 - On se reportera essentiellement aux ouvrages de M. TARRADELL : Nota acerca de la prima epoca de los Fenicios en Marruecos, Tamuda,
187 l, 1958, pp. 71-88 : Lixus, Tetouan, 1959 et Historia ~ Mam"cos, Marruecos punico, 1960 Chapitre VI, pp. 131-180 : cf. aussi, P. CINTAS : Contribution tll'/tude de l'expansion carthaginoise au Maroc. Publications de I1nstitut ~s Hautes Etudes Marocaines, 56, 1954 : M. EUZENNAT, Rapport sur l'archéologie marocainQ en 1957 et 1958, B.C.T.H, 1959-1960, pp. 45-59, M. PONSICH, Fouilles puniques et romaines à Lixus, Hesplris-Tamuda VU, 1966, pp. 17-22 et Lixus, cité légendaire entre dans l'histoire, Archlologia, mai-juin
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1965, pp. 23-27: cf. encore les chroniques archéologiques du BAM, IV, 1960 ; VI, 1966 et Vll, 1967 : ou les "Contributions tl l'atlas archéologique du Maroc" dans cette même revue, notamment M. PONSICH, La région de Lixus, BAM, VI, 1966, pp. 377-421 et A. LUQUET, Le Maroc punique BAM, IX, 1973-1975, pp. 237-304. Cf. enfm, en dernier lieu, M. PONSICH, wus. Le quartier ~s temples, Etudes et travaux d'archéologie marocaine, IX, Rabat 1981 (CR. de R. REBUFFAT" A propos du quartier des temples de Uxus, RA, 1985, l, p. 123-128). M. PûNSICH, op. cit., (1981), p.l. Le site reconnu par Charles TlSsot a fait l'objet de fouilles anciennes (H. LA MARTINIERE, Recherches sur l'emplacement de la ville de Lixus, BAC. 1891, pp. 134-148). Une première campagne, avec des moyens limités, permit à M. TARRADELL d'établir, entre 1951 et 1955, une première stratigraphie du site et, plus tard, des fouilles plus régulières et plus étendues ont permis entre 1957 et 1967 de mieux connaitre l'organisation du site. M. PONSICH, d'abord chargé de la reprise du chantier dans la partie basse (quartier des installations de traitement du poisson et de fabrication du garum) alors que M. TARRADELL poursuivait les fouilles de l'acropole, devait, lui aussi collaborer à ces fouilles, puis les poursuivre seul. Et c'est "pour ne pas laisser tomber dans l'oubli une recherche IrOp longtemps mal connue" (op. cit. p. 7 note 10) qu'il en publia en 1981 une étude préliminaire. M. TARRADELL, Ma,"uecos Punico, op. cit., pp. 144-159. L'auteur résume, dans cette synthèse, l'essentiel de ses travaux et communications (cf. note 157). M. TARRADELL, Lixus, op. cit., p. 30. Cette céramique est maintenant mieux connue grâce aux fouilles de Mogador où elle se trouve en abondance dans la couche IV, datée par A. JODIN des Vllème et Vlème siècles (BAM, ll, 1957, p. 37). M. TARRADELL, Marruecos punico, op. cit., p. 156. Nous reviendrons ultérieurement sur la chronologie des édifices de l'acropole. Voir fig. 4. M. PONSICH, op. cit., (1981), p. 65. M. PONSICH, op. cit., (1981), p. 65, panche XXIV et fig. 7. A. JODIN, Mogador. op. cit., p. 141.
188 167 - E. GJERSTAD Swedish Cyprus Expedition, IV, 1948. Cf. M. PONSICH, op. cit. 1981 p. 66. 168 - M. PELLlCER, Excavaciones en la necropolis punica Laurita dei Cerco de San Cristobal, Excavaciones arqueologicas en Espana, XVII, 1963. 169 - A. JODIN, Mogador, p. 109. 170 - P. CINTAS, Ciramique punique, III, Tunis, 1950. Cf. M. PONSICH, op. cit., pp. 69-70. 171 - M. PONSICH, op. cit., p. 105. La construction du temple Havait, dans un premier temps été rapportée au llième siècle (BAM, VI, 1966, p.540). 172 - C. et G. Ch. PICARD, Vie et mort de Carthage, Paris, pp. 96-97, Voir notre annexe. 173 - M. PONSICH, Nicropoles pMniciennes de la rigion de Tanger, Etudes et Travaux d'Archéologie Marocaines, III, Rabat, 1967, et Recherches arcMologiques d Tanger et dans sa rigion, Paris, 1970. 174 - M PONSICH, op. cit., (1970), p. 165. 175 - M PONSICH, op. cit., (1967), p. 16. 176 - Cf. A. JODIN, Note préliminaire sur l'établissement pré-romain de Mogador, (campagnes 1956-1957), BAM, Il, 1957, pp. 9-40 et Mogador, comptoir phénicien du Maroc atlantique, Etudes et Travaux d'Archéologie Marocaine, n, Tanger, 1966. 177 - Cf. par exemple, M. PONSICH, op. cit., p. 24 pour le matériel des nécropoles de la région de Tanger: ''L'étude du matériel nous montre... que ces influences vinrent beaucoup plus directement de la Bétique proche voisine de la région de Tanger, que de la Phénicie elle-même". 178 - F. VILLARD, La céramique grecque au Maroc, BAM, IV, 1960, pp. 1-26. L'auteur remarque la continuité des importations grecques en dépit de leur petit nombre, el, dans le rÔle d'intermédiaire, exclut les Carthaginois (aucun des types de vases grecs représentés au Maroc ne se retrouve à Carthage où la physionomie des importations est très différente). Comme pour la céramique à enduit rouge, il pense donc que c'est "la vieille colonie phénicienne de Gadès", qui a été l'inspiratrice de ce commerce, à une époque où les Grecs fréquentaient aussi le pays de Tartessos. 179 - STRABON, II, 3, 4; EUDOXE est également connu par CORNÉLIUS, qui, à en croire POMPONIUS MÉLA, III, 90, et PLINE L'ANCIEN, III, 169, affIrmait que "de son temps, un certain Eudoxe, fuyant le roi Ptolémée Lathyros, sortit du golfe d'Arabie et fIt voile jusqu'à Gadès". La date des événements est donnée par la chronologie des Lagides : le second Evergète, Ptolémée Physcon, règne de 146 à 117 avant J.C., sa femme Cléopâtre lui succède, puis son fils Lathyros. Cf. G. AUJAC, Strabon, Giographie, l, 2, 1969, notes complémentaires à la page 61 (p. 145).
189 180 - DIODORE, V, 20. C'est en particulier le cas de P. BOSCH-GIMPERA, loc. cit., p. 274-275, qui pense que ce ne peut être qu'après avoir été en rapport avec la Sardaigne que les Phéniciens "découvrirent qu'une partie des métaux d'Occident, notamment l'argent, et le plomb venaient d'une source plus lointaine et se lancèrent à sa recherche". C'est cette recherche qui aurait abouti "à la fondation de la première colonie phénicienne de l'Espagne, la base de Gadir-Cadix", et qui devrait être datée "tout au plus de la fm du IXème siècle". Cf. supra pp. 105-112. 181 - Cf. par exemple, en Italie, la fondation par les Chalcidiens du comptoir de Pithécusses avant celle de leurs colonies du détroit, ou la reconnaissance, par les Ioniens, du pays de Tartessos, avant la fondation de leurs établissements méditezranéens. Cf. encore l'exemple de Mogador qui prouve que, pour les Phéniciens également, pareil processus n'est pas à exclure. 182 - PLINE, Histoire Naturelle, XIX, 63. 183 - POMPONIUS MÉLA, III, 6. Sur le rôle des sanctuaires dans l'expansion phénicienne, voir G. BUNNENS, Aspects religieux de l'expansion phénicienne, Studia Phoenicia, IV, Religio phoenicia, Namur, 1986, pp. 119-125. 184 - Cf. pour le sanctuaire de Kition (Qart-hadasht 7) in/ra, pp. 147-150, mais aussi les inscriptions qui attestent le culte de la triade tyrienne. Astarté, Melqart, Eshmoun (CfS, 1,11 ; CfS, l, 86; CfS, l, 23; CfS l, .10). Cf. encore la base inscrite du Louvre (AO 4826) trouvée à Nicosie et provenant, sans doute, d'Idalion : l'inscription phénicienne mentionne statues et portiques consacrés à Melqart, l'Héraclès tyrien. Elle est datée du début du IVème siècle. Pour d'autres témoignages de la présence de Melqart à Chypre, Cf. R. DUSSAUD, Melqart, Syria, XXV, 1946-48, pp. 205-230. 185 - Cf. supra note 196 du Prologue. 186 - Une dédicace de Tharros se rapporte en effet à un sanctuaire de Melqart (cf. Ph. BERGER, CRAf, 1901, p. 578, et M. LIDZBARSKI, Ephem.jar Semit. Epigraphia, II, p. 62). On peut aussi mentionner la légende qui s'attache à la colonisation de la Sardaigne (Pausanias, X, 17, 2) et le rasoir carthaginois, qui, figurant, d'un côté, Héraclès-Melqart, de l'autre Sardos terrassant un ennemi, parait bien se rapporter la même légende (CRAf, 1905, pp. 325-327 ; R. DUSSAUD, loc. cit., p. 214, fig. 3). 187- Cf. le chapitre précédent 188 - CfS, l, 122, ou fG, XIV 600 (Hème siècle avant 1.-e.) Sur Malte, voir supra note 141. Le sanctuaire de Tas-Silg, dans lequel CICÉRON reconnaissait un temple à lunon (Contre Verres, II, IV, 103 ; cf. encore VALERE MAXIME, l, 1, 2) a livré, outre plusieurs inscriptions à Astarté une dédicace à Milkashtart (M.G. AMADASI
190 GUZZO, op. cit., pp. 92-94) qu'on rapprochera, bien sûr, des cippes bilingues à Melqart-Héraclès. Cf. encore l'inscription de Délos (1519, 1. 14-16) par laquelle les marins tyriens réclament un téménos pour leur "Héraclès" qu'ils qualifient à la fois d'archégète de Tyr et de bienfaiteur de l'humanité (le syncrétisme est ici réalisé non seulement au niveau de l'image, mais au niveau des fonctions divines). 189 - Sur Melqart voir essentiellement K.L. PREISENDANZ, in, RE, suppl. III, col. 293 ; V. BERARD, De l'origine des cultes arcadiens, pp. 253-267 ; R. DUSSAUD, Melqart, Syria, XXV, 1946-48, pp. 205-230 ; H. SEYRIG, Les grands dieux de Tyr à l'époque grecque et romaine, Syria, XL, 1963, pp. 19-28 et Héraclès-Nergal, Syria, 1944-45, sur Melqart pp. 72-75 ; E. WILL, Au sanctuaire d'Héraclès à Tyr, Berytus, X, l, 1950-51, pp. 1-12 ; DU MESNIL DU BUISSON, Origine et évolution du panthéon de Tyr, RHR, 164, 1963, pp. 133-163. Cf. également, infra, le quatrième chapitre de cette première partie et la note 199. 190 - Cf. infra, p. 169 et note 432. 191 - Le dieu figure dans ce traité sous la forme Mi-il-qar-ti, forme suivie par Ia-su-mu-nu (Eshmoun). Cf. R. DUSSAUD, loc. cit., 2, Les plus
anciennes mentions de Melqart. 192 - HÉRODOTE, II,44. 193 - FHG, IV, 446, 1 (d'après FLAVIUS JOSEPHE, Contre Apion, 1, 118-9, et Antiquités Judal'ques, VIII, 5, 3) "... il dédia la colonne d'or qui est dans le temple de zeus; puis, s'étant mis en quête de bois de construction, il fit couper sur le mont qu'on nomme Liban des cèdres pour les toits des temples, démolit les anciens temples et en bâtit de nouveaux, ceux d'Héraclès et d'Astarté; le premier il célébra le réveil d'Héraclès au mois de Péritios" (Contre Apion, 1, 118-119). On trouvera une importante discussion du témoignage de Flavius Josèphe dans l'ouvrage de P. CINTAS, op. cit., pp. 122-152. 194 - R. DUSSAUD, loc. cit., pp. 205-206. 195 - R. DUSSAUD, loc. cit., p. 206. C'est pourquoi, d'après lui, les anciennes monnaies de Tyr le représenteraient "chevauchant un hippocampe ailé dont il saisit les Iênes dans la main droite, tandis qu'il tient l'arc dans la gauche". Il ajoute dans la note 13 de la même page, que cet arc "signale déjà l'identification du dieu avec Héraclès". Ces monnaies apparaissent dès le Vème siècle (E. BABELON, Traité des monnaies grecques et romaines, 1901, II,2, p. 615-627, Pl. CXXII), mais l'identification avec Melqart n'est pas absolument certaine. Ajoutons qu'à Chypre, à Larnaka tis Lapithou existe un important culte de Melqart associé à Poseidon (Cf. O. MASSON, Cultes à Chypre dans Eléments orientaux dans la religion grecque ancienne, Paris, 1960,p. 137.
191 196 - C. et G. Ch. PICARD, Hercule Melqart, Hommages à Jean Bayet, Latomus, LXX, 1964, pp. 569-578. 197 - E. LIPINSKI, La f!te de l'ensevelissement et de la résurrection de Melqart, Actes de la XV/Ume Recontre AssyriologÜ/ue Internationale, Bruxelles, 1969, Ham-sur-Heure, 1970. . 198 - Outre les travaux de E. LIPINSKI on citera surtout P. XELLA, Le polythéisme phénicien, Studia Phoenicia, IV, Religio phoenicia, Namur, 1986, pp. 29-39 ; B. SERVAIS-SOYER, La "triade" phénicienne aux époques hellénistique et romaine, ibid. pp. 347-360 ; S. RIBICHINI, Questions de mythologie phénicienne d'après Philon de Byblos, ibid, pp. 41-46. 199 - C. BONNET, Melqart. cultes et mythes de l'Héracl~s tyrien en Méditerranée. Cette thèse soutenue à Liège en 1987 et à paraître à la fin de cette même année. reflète bien (Cf. la préface pp. 1 à 6 de l'exemplaire dactylographié) les difficultés et le renouveau des études phénico-puniques. Grâce à elle on disposera désormais d'un recensement exhaustif et critique des testimonia relatifs à Melqart dans le bassin méditerranéen et d'une abondance bibliographie. Je remercie l'auteur de m'avoir confié un exemplaire dactylographié de cet ouvrage auquel je peux ainsi - au moment de donner mon propre texte à l'impression - renvoyer le lecteur à maintes reprises. Je me réjouis de constater de multiples rencontres dans nos recherches d'objectif pourtant si différent et. pour l'essentiel - les raisons du syncrétisme entre "son" dieu et "mon" héros - une remarquable convergence. 200 - Cf. le volume des Studia Phoenicia, IV. Religio Phenicia, Namur. 1986. en particulier les articles de P. XELLA, Le polythéisme phénicien, pp. 29-39 et de B. SERVAIS-SOYEZ. La "triade" phénicienne aux époques hellénistique et romaine. pp. 347-360; Cf. encore C. BONNET, op. cit., p. 64. 201 - V. BERARD. op. cit., pp. 253-267. 202 - H. SEYRIG, op. cit., Syria, 1963. p. 25. 203 - EUDOXE DE CNIDE, d'après ATHENEE. IX. 392 d (Cf. également CICERON. De natura deorum, III, 16.42). Une version du mythe rapportée par Eudoxe de Cnide et conservée par Zénobius "nomme en toutes lettres l'Héraclès tyrien. c'est-à-dire Melqart". (H. SEYRIG.loc. cit.• pp. 19-20 et note Il). Le même auteur rappelle que, d'après Philon de Byblos, en revanche. (frg. II,27 Jacoby). le ~.re de Melqart s'appelait Dêmarous. Sur cette double généalogie de Melqart, cf. C. BONNET. op. cit., pp. 13-14. 204 - Cf. H. SEYRIG. loc. cit., p. 20 et note 15 pour les témoignages du culte d'Astarté à Tyr. Cf. aussi supra note 193. Les nouveaux temples bâtis par Hiram sont ceux d'Héraclès et d'Astarté. 205 - Cf. R. DUSSAUD, Héraclès et Astronoé à Tyr. RHR. LXIII, 1911, pp. 331-339, et Syria. XXV, 1948, p. 225. Cette inscription d'époque
192
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impériale confinne la légende rapportée par DAMASCmS (apud PHOTIUS, BibliotMque, codex 242, 302) et rappelant, pour Béryte, celle d'Adonis et Astarté à Byblos. Cf. H. SEYRIG,loc. cit., p. 24. Ce bas relief est étudié également par E. WllL, loc. cit., pp. 1-12 et R. DUSSAUD, Syria, XXIX, 1952, p. 382 sq. E. Wll.L,loc. cit., pp. 1-8. Nous aurons à revenir sur ce sanctuaire. Celle interprétation toutefois, n'est pas sans présenter quelque difficulté. H. SEYRIG (loc. cit., 25 et note 34) recense les témoignages qui pourraient se rapporter à cet Héraclès tyrien, nourrisson d'une biche, mais reconnaît que ses rapports avec la biche, le cerf ou le chevreau sont encore enveloppés d'une complète obscurité". Peut-être faudrait-il, à la liste de ces témoignages, ajouter le type de représentation connu à Amrith (nO 225, cf. notre étude iconographique), qui trouverait ainsi un début d'explication. R. DUSSAUD (loc. cit., p. 384 note 1) se demande cependant s'il n'y a pas là contamination avec la légende d'Héraclès ms d'Alcmène et plus récemment C. BONNET (loc. cit. p. 64-65) suivant en cela B. SERVAIS-SOYEZ, préfère reconnaître dans le relief la naissance de Téléphe, ms d'Héraclès et d'Augé dont on sait qu'il fut effectivement nourri par une biche. Mais n'y a-t-il pas quelque contradiction, alors, à rappeler le rôle de l'aigle dans la fondation de Tyr (p.64),l'importance des cervidés dans la religion anatolienne et à établir d'éventuels parallèles avec les attributs d'un Malakbêl Syrien (p. 65); autant d'arguments qui militent en faveur d'une localistion tyrienne de la scène sans que toutefois s'impose l'idée d'une représentation de la famille divine tyrienne. Cf. M. DUNAND et R. DURU, Oumm el'Amed. une ville de l'époque helMnistique aux échelles de Tyr, Paris, 1962. Cf. M. DUNAND et R. DURU, op. cit., p. 181 sq. Ce temple, pour l'essentiel d'époque hellénistique, avait cependant été précédé (et c'est l'exception sur ce site où aucune construction antérieure au Vème siècle n'a pu être entrevue) par un établissement que des fragments de céramique datent probablement du VlIème ou de la fin du VIIIème siècle. Etablissement un peu mieux représenté plus tard, au Vème s., par des murs et de la céramique attique. La qualité des murs et de la céramique conduit les archéologues à écarter l'idée d'une simple installation domestique et à penser "aux vestiges d'un premier sanctuaire" (p. 20). Cf. M. DURAND et R. DURU, op. cit., nO 2 (CIS, l, 8) n03 (CIS, l, 9) nO 13 et nO 14. Cf. M. DURAND et R. DURU, op. cit., nO 4. Cf. M. DURAND et R. DURU, op. cit., nO 1 (CIS, l, 7) n07 ; nO 8. Cf. M. DURAND et R. DURU, op. cit., p. 195.
193 216 - M. DURAND et R. DURU, op. cit, p. 159, M. 600 pl. XXXV. Statue de type hellénistique, rapprochée par M. Durand "de la fonnule iconographique célèbre, connue dès le VIème s. peut-être, en tout cas dès le Vème s. avant J. -C., en Phénicie arvadite (temple de Marathus-Amrith)". 217 - Cf. M. DURAND et R. DURU, op. cit., p. 126 et note 44. 218 - Cf. H. SEYRIG, loc. cit., p. 26 et note 37. 219 - Cf. H. SEYRIG, loc. cit., pp. 22-23 et R. DUSSAUD, loc. cit.,
(RHR, 1911). 220 - Cf. Astarté et Adonis à Byblos ;' ou le récit rapporté par DAMASCruS pour Astronoé. Cf. supra, note 205. 221 - Cf. P. LÉVEQUE, Les cultes de la fécondité/fertilité dans la Grèce des cités, dans, Archaelogy andfertility Cult in the Ancient Medite"anean (Malte, sepl1985), éd. A. BONANNO, Amsterdam, 1986. 222 - P. XELLA,loc. cit., p. 34. 223 - B. SERVAIS-SOYEZ, loc. cit., p. 360. 224 - W.V. BAUDISSIN, Adonis und ESmIUI, p. 25. Cité par H. SEYRIG, loc. cit, (Héraclès-Nergal), p. 72 note 3. 225 - Cf. ci-dessus, note 193 ; cf. surtout, notre quatrième partie (chapitre 113). 226 - EUDOXE DE CNIDE, d'après ATHENEE, IX, 47, 392. Héraclès, au cours d'un voyage en Libye, aurait été tué par Typhon, puis ressuscité par Iolaos. Celui-ci lui aurait simplement fait respirer une caille, oiseau dont Hénlclès avait été très friand pendant sa vie. 227 - H. SEYRIG, loc. cit., p. 72 et note 4. 228 - On se reportenl sur ce point à notre quatrième partie, pp. 506-511. 229 - Sur les difficultés de sa localisation on lira C. BONNET (op. cit., pp. 71-74) que de rares indices conduisent à envisager, "à titre d'hypothèse" une situation au centre de l'île. Le temple aurait alors été recouvert par la cathédrale, au IVème siècle (p. 74). 230 - ACHILLE TAnuS, Leucippé et Clitophon, II, 14. La traduction est empruntée à P. GRIMAL, Romans grecs et Latins, Paris 1958, pp. 901-902. 231 - NONNOS, Dionysiaques, 40, 422, sq.. 232 - E. Wll..L,loc. cit., p. 4, note 1 et fig. de la même page. 233 - HERODOTE, II,44 : "Je me rendis aussi à Tyr, en Phénicie, où j'entendais dire qu'il y avait un sanctuaire vénéré à Héraclès. Je vis ce sanctuaire, richement garni d'un grand nombre d'offrandes ; entre autres, il renfennait deux stèles, l'une d'or épuré, l'autre de pierre d'émeraude brillant pendant les nuits d'un grand éclat...". 234 - PLINE Histoire Naturelle, XXXVII, 75. 235 - E. WILL pense que le tenne de "roches ambrosiennes" devait, au départ, s'appliquer à la plate-forme rocheuse qui avait vu se développer Tyr : "Quand on voulait représenter l'ensemble des roches
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ambrosiennes le plus simple était de figurer les stèles avec l'olivier. Il est probable, au surplus, que dans l'usage courant le terme d' • aJ.L6poalal n~'tpal s'est appliqué aussi bien aux stèles qu'au rocher qui les portait". E. WILL, loc. Cil., p. 6. Même si, comme POMPONIUS MÉLA, III, 6, ou PIULOSTRATE, Vie d'Apollonios de Tyane, V, 5, les sources parlent d'un "Hercule Egyptien" (on sait que l'épithète est couramment donnée. tout ce qui vient de Phénicie). Cf. aussi DIODORE, V. 20 ; STRABON, III, 5, 5 ; ARRIEN Anabase, II, 16,4 ; APPIEN; VI (Guerres d'Espagne), 1,2; JUSTIN, XLIV, 5,2. STRABON, III, 5, 3 ; POMPONIUS MÉLA, III, 6. Sur le sanctuaire d'Héraclès-Melqart, • Gadès, cf. J.B. SUAREZ DE SALAZAR, op. cil., livre III Del celebrado lemplo, Hercule Gaditano, p. 177 sq. : A. GARCIA Y BELLIDO, Hercules Gadilanus, 1964, qui résume les travaux antérieurs et D. VAN BERCHEM, l'expansion phénicienne en Méditerranée, Syria, XLIV, 1967, pp. 73-109. Sur la situation du sanctuaire cf. supra, pp. 105-109 et fig. 2. DIODORE, V, 20, 2. POMPONIUS MÉLA, III, 6. PHILOSTRATE, Vie d'Apollonios de Tyane, V, 5. STRABON, III, 5, 5 et III, 5, 6 : "Au surplus, l'inscription alléguée contredit la démonstration puisqu'elle évoque non pas un édifice sacré, mais un relevé de comptes ; les colonnes d'Hercule doivent nécessairement perpétuer le souvenir des grands travaux accomplis par ce dieu plutôt que la dépense des Phéniciens", (III, 5, 6). POLYBE et POSÉlDONIOS sont cités par STRABON, III, 5,7. SILIUS ITALICUS, Punica, III, 29 : selon SILIUS ITALICUS toujours, c'est. l'entrée du sanctuaire qu'auraient été gravés les travaux d'Hercule (Punica,llI, 32-44). Le sanctuaire de Tyr n'était pas le seul. être ainsi orné de "stèles" ou de colonnes" ; on rappellera aussi les fameuses colonnes de bronze du temple de Jérusalem, celles qui existaient • l'entrée du temple d'Astarté • Sidon, celles qui entourent le grand autel de Zeus • Baalbeck. Cf. aussi les témoignages de STRABON, XVI, 1,27, et de LUCIEN, De la déesse syrienne, 16, sur les deux "très grands phallol"' érigés à l'entrée du temple de la déesse Atargatis dans la ville de haute Syrie, Hiérapolis; cf. enfin les témoignages numismatiques (cités et représentés par A. GARCIA Y BELLIDO, op. cil., p. 117, fig. 25 et 27). Sur Pygmalion, roi de Tyr, parfois confondu avec Pumar dieu chypriote, cf. P. CINTAS, op. cil., p. 81 note 306 (bibliographie et mise au point), cf. aussi E. GrnRSTAD, The Phoenician colonisation and expansion in Cyprus, RDAC, 1979, pp. 230-250, et les ouvrages
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de V. KARAGEORGIDS, en particulier, Cyprus, Genève 1968, ou Cyprusfrom the stone age to the Romans, Londres, 1982. Cf. supra. Cf. aussi SnJUS ITALICUS, Punica, llI, 30-31. Sll.ros ITALICUS, Punica, m, 21-28. On a évoqué ce costume à propos de la statue retrouvée à Motyé et datant de la première· moitié du Vème siècle (Cf. V. TUSA, La statua di Mozia, P.P., 213, 1983, pp. 445-456, fig. 1 à 6, qui, à son propos, pense plutOt à une figure accompagnant l'aurige vainqueur). Sll.ros ITALICUS, Punica, m, 22. Cf. D. VAN BERCHEM,loc. cit., qui tire les mêmes conclusions de pratiques rituelles analogues connues dans les cultes de Thasos et de l'Ara Maxima. PAUSANIAS, X, 4, 6; cf. L. R. FARNELL, Greek hero cuits and ideas of immortality, Oxford, 1921, V, p. 95 sq. En ce qui concerne Tyr, CLÉMENT (cité par M. DAUNEY, op. cit., n. 1 p. 194) affirme qu'Héraclès a été brOlé, mais ne dit rien du rite périodique qu'aurait pu représenter cette crémation; à Gadès, POMPONIUS MELA, llI, 6, prétend de même que le sanctuaire d'Héraclès possédait les cendres d'HO'Cuie t Cf. réunissant les témoignages, L.R. FARNELL, op. cit., et K.O. MOLLER Sandon und Sardanapal,in RhM, 3, 1929, pp. 22-42. Cf. E. LAROCHE, au colloque d'histoire des religions, Strasbourg, 1971 : Un syncrétisme gréco-anatolien : Sandas-Herakles, dans Les Sycrétismes dans les religions grecque et romaine, Paris, 1973, pp. 103-114. Cf. Y. BÉQUIGNON, La vallée du Sperchéios des origines au W~me siüle, BEFAR, Paris, 1937. La légende de la mort sur le bOcher de l'Oeta serait dans ce cas l'aition du rite. On se reportera à notre quatrième partie, chapitre II. Pour la description du sanctuaire, cf. A. GARCIA Y BELLIDO, op. cit., qui recueille tous les témoignages archéologiques et numismatiques; cf. en particulier, fig. 3 à 7 et 20 à 22. Cf. ici, fig. 2. Voir la bibliographie donnée, supra note 157. M. PONSICH, op. cit., p. 129. M. PONSICH, op. cit., p. 134. M. PONSICH, op. cit., p. 97. Voir fig. 6. M. PONSICH, op. cit., flg. 37 p. 130. Cf. ici fig. 6. M. PONSICH, op. cit., p. 97. L'abside mesure intérieurement 19x 40m; l'épaisseur du mur est de 1,65m et certains blocs ont un volume supérieur à 2m3 . Cf. fig. 30 page 98 et ici fig. 6 et 7. M. PONSICH, op. cil., planches XXXII et XXXllI. Voir ici fig. 7. M. PONSICH, op. cit., p. 100. En 1966, la chronique d'archéologie marocaine (BAM, VI, 1966)
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faisait état, pour le temple H, d'une construction du IIIème siècle (p. 540). M. PONSICH, op. cit., p. 132. R. REBUFFAT, loc. cit., p. 126. Voir ici la reproduction de cette planche XXXV fig. 7. M. PONSICH, op. cit., p. 131. Cf. M. nSSOT, op. cit., p. 82; 1. CARCOPINO, op. cit., p. 17 ; cf. encore P. CINTAS, op. cit., p. 248 note 11 qui estime que c'est sur les pentes d'une colline côtière parallèle à la mer (Er Remel) qu'il faut chercher "les vestiges des navigations les plus reculées qui atteignirent Lixus". M. PONSICH, op. cit., pp. 55 à 86. D'après M. PONSICH, op. cit., cf. fig. 39 p. 135. Cf. BAM, V, 1964, pp. 367-376 et M. PONSICH, op. cit., p. 70. M. PONSICH, op. cit., p. 65. M. PONSICH, op. cit., p. 93. M. PONSICH, op. cit., p. 94. Cf. R. REBUFFAT, loc. cit., p. 124. Sur la base des connaissances récentes (MESQUIRIZ DE CATALAN, Terra Sigillata Hispanica, p. 14 et tableau 121) la présence de céramique hispanique de fonne D. 29 ne pennet guère de remonter avant 40 (de notre ère). M. PONSICH, op. cit., p. 1 et encore p. 129. Cf. M. DUNAND et R. DURU, op. cit., chap. IV : le temple est pour l'essentiel constitué d'une cour rectangulaire avec naos vers le centre. Pour l'étude de ces statues on se reportera à notre annexe iconographique: Héraclès-Melqart à Arnrith, à paraitre - Cf. ici fig. 21. P. BORDREUIL, Le dieu Echmoun dans la région d'Arnrit, Studia Phoenicia, III, Phoenicia and its neighbours, Louvain, 1985, pp. 221-230. E. PUECH, Les inscriptions phéniciennes d'Amrit et les dieux guérisseurs du sanctuaire, Syria, LXIII, 1986, pp. 327-342. Elle a été retrouvée lors de la fouille du canal d'évacuation des eaux du Ma'abed et parait avoir constitué la face antérieure d'un bassin (cf. P. Bordreuil, loc. cit., pp. 222-223 ; E. PUECH, loc. cit., p. 33). Cf. la restitution proposée par P. BORDREUIL (loc. cit., pp. 222-223) ; E. PUECH (p. 331) propose, quant à lui, d'y retrouver le nom de Reshef. E. PUECH, loc. cit., p. 333. E. RENAN, Mission en Phinicie. Paris, 1864. Cf. encore PERROT et CHIPIEZ, Histoire de l'art dans l'Antiquité. III, p. 120 sq. Cf. surtout M. DUNAND. Les sculptures de lafavissa du temple d'Amrit, BMB, VIII, 1946-1948, pp. 80-107 ; M. DUNAND, N. SALIBY, Rapport préliminaire sur les fouilles d'Arnrith, A. Arch. Syriennes,
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VI, 1956 et, plus récemment: M. DUNAND, N. SALmV, Le temple d'Amrith dans la pérée d'Arodus, Paris, 1985. P. BORDREUll.., loc. cit., p. 230. E. PUECH, loc. cit., p. 338 qui d'ailleurs ajoute à Eshmoun le dieu Reshef (cf. supra note 283) et, pour faire bonne mesure, Shedrofé, dieu juvénile, dieu guérisseur lui aussi, dont la dédicace avait été retrouvée sur une stèle en 1881. Les fonctions proteelI'ices d'Eshmoun qui très vite se spécialiseront en fonctions guérisseuses sont peut-être liées à l'huile qui pourrait être à l'origine de son nom. Cf. E. LIPINSKI, Eshmun Healer, AJON, 33, 1973, pp. 161-183. P. BORDREUll.., /oc. cit., p. 229. M. G. GUZZO-AMADASI - V . KARAGEORGlnS, Fouilles de Kition III, Inscriptions pMniciennes, Nicosie, 1977, index pp. 212-215, cf. M. VON, Cultes phéniciens à Chypre: l'interprétation chypriote, Studia Phoenicia IV, op. cit., p. 145. E. PUECH,loc. cit., pp. 336-338. Sur l'association de Melqart et des dieux guérisseurs (Shadrapha à Leptis Magna par exemple), sur les fonctions guérisseuses peut-être de Melqart, on se reportera à A. CAQUOT, Les RephaYm ougaritiques, Syria, XXXVII, 1960, pp. 75-93. ARRIEN, Anabase, II, 13. IGLS VII, nO 4001 (25 av. J.-C.) : cf. R. SAVIGNAC, Une visite à l'ilede Rouad, R. Bi, XIII, 1918, pp. 576-580;L. ROBERT, Etudes anatoliennes, Paris, 1937, p. 79 n 8; J.P. REV-COQUAIS, Arados et sa pérée, Paris, 1974, n 25. Catalogue of the Gree! Coins in the British Museum, (Phoenicia), p. XVII-XX. J. BABELON, Catalogue des monnaies grecques de la BibliotMque Nationale, Les Perses Achéménides, p. 132, n° 921-923. Cf. les fragments de deux naof trouvés par Renan au lieu dit AYn-el-Hayat ; E. RENAN, Mission en Phénicie, l, III, (campagne d'Amrith). Cf. E. RENAN, op. cit., p. 61 sq. et après lui, PERROT et CHIPIEZ Histoire de l'Art dans l'Antiquité, III, p. 120 sq. Plus récemment cf. M. DUNAND, Les sculptures de lafavissa du temple d'Amrit, BMB. VIII, 1946-1948, pp. 80-107. M. DUNAND, N. SALmV, Rapport préliminaire sur les fouilles d'Amrith, A. Arch. Syr., VI, 1956 et dernièrement, Le temple d'Amrith dans la pérée d'Arodus, Paris, 1985. 48 m x 55 m d'après E. Renan, op. cit., p. 63 ; 60 m de côté d'après M. Dunand et M. Saliby. La face Nord était fermée par un mur d'enceinte qui semble avoir été percé de larges portes. Bloc de 5,50 m de côté sur un peu plus de 3 m de haut
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of the Cesnola Collection of Cypriote Antiquities in the Metropolitan Museum ofArt, New-York, vol. I-rn, Boston-New-York, 1885-1894 ; J.L. MYRES, Handbook of the Cesnola Collection of Antiquities from Cyprus, New-York, 1919, et Catalogue ofCyprus Museum du même auteur. Sur les statues chypriotes du Louvre, cf. PERROT et CHIPIEZ, op. cit., Ill, pp. 570-578 et fig. 389, 390, 391 ; A. DE RIDDER, La collection de Clercq, V, 1908, pp. 40-47 ; A. CAUBET, Antiquités chypriotes, Revue du Louvre, 1968, nO 4-5, pp. 332-334. Sur les statues d'Arnrith, cf. E. RENAN, op. cit., pp. 850-851, (lettre de M. Gaillardot du 18 novembre 1873) ; CRAJ, 1926, p. 57 sq. et surtout M. DUNAND, Les sculptures de la favissa du temple d'Amrith, BMB, VII, pp. 99-107, et vrn, 81-107. 311 - Pour un bilan commode on se reportera à la publication de la Fondation A.G. LEVENTIS, Archaeology in Cyprus, 1960-1985, Nicosie, 1985. 312 - On retiendra les réserves de P. BRIANT quant à cette citation, lors de la soutenance de thèse. 313 - Plus exactement, Chypre possédant des mines de cuivre, le nom de l'île "d'étymologie inconnue" a donné naissance au nom du métal xunpaç (cf. P. CHANTRAINE, Dictionnaire étymologique de la
199 langue grecque, Paris, 1968). 314 - G. OOSSIN, Les archives économiques du palais de Mari, Syria. XX, 1939. p. Il. Ces archives datent de la seconde période de splendeur de Mari, au début du second millénaire. 315 - C'est à partir de 1964 que les recherches effectuées à Tell Mardikh (à 60 km au Sud d'Alep) par la Mission de l'Université de Rome ont établi la succession des installations sur le site - avec deux périodes particulièrement florissantes: Mardikh II B (~2000) et Mardikh III A et B (2000-1600) - et l'identification de la ville (en 1968). La fouille du Palais Royal G (Mardikh II BI 2400-2300(2250) et la découverte de près de 15000 textes. surtout, ont bouleversé notre connaissance de l'Orient ancien. 316 - Cf. G. PETTINATO. The Royal Archives of Ebla, Biblical . Archaeologist. Mai 1976, pp. 44-54 et J.E. OUGAND. A propos de IŒAŒIl {~ essai de mise à jour rapide de quelques uns des points traités par l'auteur en son Chypre et Cana'an. colloque Salamine de Chypre (Lyon. 1978), Paris 1980. pp. 85-109. 317 - J. E. OUGAND. loc. cit., p. 92. Le suffIXe -iya est lUI suffIXe hittite se généralisant au Bronze récent. 318 - Second International Archaeological Symposium: "The relations between Cyprus and Cr~te ca 2000 - 500 b.c. • Nicosie. avril 1978. Cf. R.S. MERILLES. A Summary of the results. RDAC. 1978. pp. 216·224. 319 - Cf. R.S. MERILLES, loc. cit.• p. 217. Cf. encore le bilan des recherches archéologiques. effectué par le même auteur dans Archeology in Cyprus. op. cit.; pp. 11-19 (The Stone Age and Barly and Middle Bronze Ages) et J.O. MULHY, ibid., pp. 20-46 (The Late Bronze Age in Cyprus). Cf. surtout C. BAURAIN, Chypre et la Medite"anée orientale à l'âge du Bronze Récent. Synt~se historique.• Athènes 1984 (Etudes Chypriotes VI). 320 - R. S. MERILLES, loc. cit., (1978) p. 218. 321 - Acts of the International Archeological Symposium The Mycenaeans in the Eastern Mediterranean. Nicosie, 1973. C'est l'opinion de H. W. CATLING (Cypriot Bronzework in the Mycenaean World, 1964. pp. 35-54) qui passe désormais pour la position "orthodoxe". Cf. J.O. MUHLY,loc. cit.• p. 28 et note 56. 322 - Encore que le bucrâne. quant à lui. appartienne à la tradition cultuelle chypriote depuis le Bronze ancien, cf. I. JONAS, L'architecture religieuse au Chypriote Récent (Kition et Enkomi) dans Temples et Sanctuaires. TMO, Lyon, 1984. 323 - A Kommos, un site du sud de la Crète (Hesperia, 51, 1982, pp. 164-195) et à Tirynthe (M, 1981-2, pp. 149-194). 324 - Cf. la discussion autour des paiements de cuivre relevés dans les Annales de Touthmosis III (p. DIKAJOS, op. cit., II 1971, p. 505 et
200 J.D. MUlll..V, op. cit., p. 32). 325 - Voir R. S. MERILLES, loc. cit., p. 218. 326 - V. HANKEV, Mycenaean Trade with the South-Eastern Mediterranean, MUSJ, 46, 1970 pp. 11-30. Cf. encore le symposium de Larnaca Ouin 1981) Early Metallurgy in Cyprus 4000-500 B.C. Nicosie 1982. 327 - Pour Ambelikou, Cf. R. S. MERILLES dans Early Metallugy... op. cit., p. 374. Pour Alambra cf. J.E. COLEMAN, Cornell Excavations at Alambra, 1980, dans RDAC, 1981 pp. 81-98 surtout p. 85 et du même auteur : Investigations at Alambra, 1974-1984, dans Archaeology in Cyprus op. cit., pp. 125-141. Cf. encore J. D. MUlll..V, op. cit., pp. 31-32. 328 - Cf. T. STECH, Urban Metallurgy in Late Bronze Age Cyprus, dans Early Metallurgy...op. cit., pp. 105-116 et P. DIKAIOS, Enkomi, Excavations 1948-1958, l, III, Mayence, 1969 et 1974. 329 - Cf. V. KARAGEORGlllS, View from the Bronze Age, Mycenaean and Phoenician Discoveries at Kition ,New-Vork, 1976 ; cf. aussi la "Chronique des fouilles et des découvertes archéologiques à Chypre" (du même auteur) dans leBCH à partir de 1959. 330 - Des nécropoles comme celles d'Ayos Prodomos dans la région de Kition ou celles du Nord de la ville à Kition même sont datées des environs de 1800 avant notre ère : (V. KARAGEORGlllS, op. cit.). 331 - Voir le plan de la ville, fig. 15 Nous ne pensons pas devoir insister longuement sur l'histoire de la cité d'ailleurs largement parallèle à celle d'Enkomi, à ceci près que, sur ce dernier site, la fondation de la ville est plus ancienne: vers 1900 (selon C. SCHAEFFER) ou 1700 (selon P. DIKAIOS) -. A la fin du XlIlème siècle, la ville paraît abandonnée pour une dizaine d'années sans que soient attestées de destructions violentes et, dans ''l'Area II'', le site des temples jumeaux 2 et 3, avec ses jardins, conserve son caractère sacré, bien que d'importantes transformations l'affectent (correspondant peut-être à l'arrivée des Achéens ?). Au début du XIlème siècle des destructions sont mises en rapport avec "l'invasion" des Peuples de la mer, mais, comme à Enkomi toujours, la reconstruction est rapide. C'est au cours du Xlème siècle (un peu plus tard à Kition qu'à Enkomi) que prend fin cette occupation du Bronze Récent (on pense à un tremblement de terre) et comme à Enkomi encore, où le site est progressivement abandonné pour une ville plus proche de la mer: Salamine - la ville géométrique de Kition se retrouve à quelque distance (Bamboula), et précède directement l'arrivée des Phéniciens (V. KARAGEORGlllS, op. cit.). 332 - Cette statuette a été retrouvée dans les fouilles du "sanctuaire du dieu au lingot" fouillé à Enkomi (Quartier 5, Est) de 1961 à 1965 par J.C. Courtois, cf. J.C. COURTOIS, Le sanctuaire du dieu au lingot d'Enkomi-Alasia, Alasia, Paris, 1971, pp. 151-362.
201 333 - Ces lingots qu'on retrouve très loin dans le monde méditernméen... en Sardaigne en particulier 1 334 - V. KARAGEORGHIS, op. cit . 335 - M. YON, Mission Archéologique française de Kilian-Bamboula, 1976-1984, dans ArchIJeology in Cyprru, op. cit., pp. 219-226; l'éminence est. en fait. une ternISse artificielle, élevée "au plus lOt" li l'époque byzanline pour supporter une tour ou un pelit fortin". (p. 221). Cf. aussi A. CAUBET, Les sanctuaires de Kilian li l'époque de la dynaslie phénicienne, Studia Phoenicia, IV, Religio Phoenicia, Namur, 1986, pp. 153-158. Précisons qûe nous ne souscrivons pas li l'hypothèse qui, dans cet article, fait de Reshef le maître du sanctuaire (p. 157). 336 - E. GJERSTAD, The Swedish Cyprru Expedition, m, pp. 74-75. 337 - Monnaie frappée sous l'empereur Macrin (217-218 après J.C.) li Byblos, reproduites par E. RENAN, Mission en PhJnicie, op. cil., p. 117 et de nombreuses fois depuis. 338 - Les très belles monnaies d'or de Pumiathon, par exemple, ce dernier roi de Kilian qui, après avoir étendu son pouvoir sur ldalion et Tamassos fut vaincu et tué par Ptolémée 1er (Au droit Héraclès-Melqart; au revers, un lion dévorant un cerf: année 32()'319). 339 - Un premier programme de travaux fut effecblé de 1976 li 1981. (Cf. les chroniques du BCH, lOI, 1977 pp. 761-763; 102, 1978, pp. 916-920; 103, 1979, pp. 704-706 ; 105, 1981, pp. 993-996 ; 106,1982, pp. 722-727). Un second programme a repris en 1984 (cf. la chronique du BCH. 109, 1985, pp. 939-941 ; cf. M. Yon, Fouilles françaises li Kilion-Bamboula (Chypre), 1976-1982, CRAJ, 1984, pp. 8()'99). 340 - Fouilles de Kition-Bamboula, BCH, 1978,2, pp. 918-919. 341 - On admet désormais que les Phéniciens sont installés li Chypre dès le IXème siècle: cf. l'inscription funéraire du Musée de Nicosie li Chypre (nO 397) datée de la première moilié du IXème siècle (O. MASSON et M. SZNYCER, op. cit.• pp. 13-20) et. pour Kilion, la céramique découverte sur le site est maintenant datée du IXème siècle (V. KARAGEORGHIS, op. cit., Les Phéniciens li Kilion). Sur l'histoire de la ville voir, en dernier lieu, M. Yon, Le royaume de Kilion (époque archaIque), Studia Phoenicia, V, Phoenicia and the East mediterranean in the first millenium B.C.• Louvain, 1987, pp. 357-374. Une étude de la période classique paraîtra dans Studia Phoenicia, IX. 342 - Chronique des fouilles li Chypre en 1980, BCH, 105, 1981, 2, pp. 993-995, singulièrement p. 993. 343 - Cf. A. CAUBET, Le sancblaire chypro-archaIque de Kilion-Bamboula, dans Temples et Sanctuaires, T.M.O., Lyon, 1984, pp. 107-118.
202 344 - On songe au bassin calcaire dans l'abside du sanctuaire F à Lixos. Cf. supra, fig. 4 (2) ; fig. 8, fig. 9 (1). 345 - M. YON, loc. cit., (Archaelogy in Cyprus, op. cit., p. 223). 346 - Chronique des fouilles à Chypre en 1980, BCH, 105, 1981,2,995. Cf. M. YON, loc. cit., (Archaeology in Cyprus, op. cit.), pp. 224. Pour plus de détails sur cette organisation: J.F.SALLES, Les égouts de la ville classique. Kition-Bamboula II, Paris, 1983. 347 - Cf. supra, chapitre IV 1. 348 - Pour les sites d'Ayia lrini, Ayios lakovos, et ldalion voir S.C.E. op. cit., l, pp. 355-370 ; II pp. 460-628 et 642-824. 349 - J. DU PLAT TAYLOR... Myrtou-Pigadhes. a Late Bronze Age Sanctuary in Cyprus, Oxford, 1957. 350 - P. DIKAIOS, The excavations at Vounous-Bellapais in Cyprus, 1931-1932, Archeologia, 88, 1940, pp. 1-174 et du même auteur, Les cultes préhistoriques dans l'Ile de Chypre, Syria, XIII, 1932, pp. 345-354. 351 - Cf. I. IONAS, loc. cit., p. 99. 352 - Cf. Fouilles de Kition II, Nicosie 1976, fig. 2 (plan du site II de Kition) et pp. 55-77 ; cf. encore les chroniques du BCH depuis 1959. 353 - Cf. J.C. COURTOIS, Alasia 1 (op. cit.), fig. 4. 354 - Cet autel (258), constitué par un bloc calcaire parallépipédique d'au moins 1,85 m et évidé, à la partie supérieure, sur l'une de ses petites faces, évoque, par exemple, ceux de Hazor (BCH, 102, 1978, 2, p. 918). 355 - Sur la double inscription de Kition (CIS, l, 86, A et B), voir O. MASSON et M. SZNYCER, op. cit., pp. 21-68. Sur l'interprétation de M. YON, cf. le maître de l'eau à Kition, Archéologie au Levant, Recueil R. Saidah, COM, Lyon 1982, pp. 251-263. Voir encore, du même auteur, Cultes phéniciens à Chypre: L'interprétation chypriote, Studia Phoenicia IV, op. cit., pp. 127-152. 356 - Cf. BCH, 109, 1985,2, p. 941 fig. 104. 357 - Cf. BCH, 105, 1981,2, p. 993 fig. 55. Cf. A. CAUBET et M. PIC, Un culte hathorique à Kition-Bamboula, Archéologie au Levant, Recueil R. Saidah, Lyon, 1982, pp. 237-249. 358 - A. CAUBET et M. PIC, loc. cit., p. 242 fig. 4. 359 - Une seule, en fait, selon A. CAUBET,loc. cit., (1984) p. 109-Ref. K 80 - 1630. Peut-être (mais la référence manque) celle de la figure 104 p. 941, BCH, 109, 1985,2. 360 - A. CAUBET. loc. cit., (1984), p. 118. 361 - Cf. notre chapitre III de celle première partie. Cette association se retrouve en Occident, nous l'avons vu, à Gadès, à Malte, à Pyrgi, peut-être...et jusqu'en Grande Bretagne puisqu'à l'époque romaine, à Corstopitum (Corbridge) non loin du mur d'Hadrien deux autels jumeaux porlent une double dédicace grecque: l'une à Héraclès de Tyr,
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l'autre à Astarté (CIL, VU, p. 97 = IG, XIV, 2253-2254, inscription citée par C. BONNET, op. cit., p. 237). Cf. Kition m, pp. 149-160; D 21. Cf. Kition m, pp. 167-168 ; D 34. aussi V. KARAGEORGlDS, op. cit., fig. 92. . Cf. supra, chapitre m 2. Ajoutons que selon C. BONNET (op. cit., pp. 50-51) un rituel d'hydrophorie pourrait, à Tyr, se rattacher au culte de Melqart. POLYBE, XXXIV, 9, 5. Pour cette information, Polybe dépend vraisemblablement de SILANOS (l'historiographe d'Hannibal) cité aussi par ARTÉMIDORE (F. Gr. Hist., 175 F9). Tous deux sont jugés "profanes en la matière" par Strabon qui estime ne pas devoir rapporter leurs explications (STRABON, III, 5, 7). POSÉIDONIOS, FRG frg. 95 = F. Gr. Hist., 87F85. (cf. STRABON, m, 5,7). STRABON, m, 5, 9 Cf. A. CAUBET, /oc. cit., (1984) p. 115. Ce fragment de jas d'ancre "l'un des plus anciens exemples de ce type que l'on puisse dater" se trouve dans le remplissage entre le sol de la troisième phase archaYque (550-500) et la phase suivante. Cf. les articles de H. FOST (qui prépare un catalogue des ancres de Kition) : The Stone Anchors of Byblos, Mélanges de l'Université St Joseph, LXV, 26 (1969) pp. 425-442 : The Stone Anchors of Ugarit, Ugaritica, VI, 1969, pp. 235-245 et Gilgamesh and the "things of stone", RDAC, 1984, pp. 96-100. Cf supra, la description du sanctuaire, chapitre 4.1. Sur le problème de l'Héraclès thasien, cf. essentiellement Ch. Picard, Un rituel archaïque du culte de l'Héraclès thasien, BCH, XLVII, 1923, pp. 241-274 ; M. LAUNEY, Le verger d'Héraclès à Thasos, BCH" LXI, 1937, pp. 385-400 et surtout du même auteur, Le scw:tuaire et le culte d'HéraJcMs à Thasos, Paris, 1944; les comptes-rendus de A.D. Nock, AJA, 1948, pp. 229-301 et de Ch. PICARD, JS, 1949, pp. 111-113, et l'ouvrage essentiel de J. POUILLOUX, Recherches sur l'histoire et les cultes de Thasos, de lafondation de la cité à 196 av. J. -C., Paris, 1954. Plus récemment, après les études de D. VAN BERCHEM (Ioc. cit.), et de B. BERGQUIST, HéraJcMs on Thasos, Uppsala, 1973, voir la mise au point de J. POUILLOUX, L'Héraclès thasien, REA, LXXVI, 1974,3-4, pp. 305-316. HÉRODOTE, II,44. Cf. aussi PAUSANIAS V, 25, 12. D. Van BERCHEM, souscrivait difficilement à l'interprétation de M. LAUNEY, (p. 93-94), B. BERGQUIST, Herac/es on Thasos, Uppsala, 1973, ne doute pas qu'il s'agisse d'un puits (p. 49). et c'est également l'opinion de G. ROUX, loc. cit., Thasiaca, p. 210. On se reportera à notre description des temples, chapitre III 3.
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SILIUS ITALICUS, PlUlica, nI, 29. PAUSANIAS, X, 4, 6. POMPONIUS MÉLA, m, 6. Sur l'égers~ de Melqart, voir O. EISSFELDT, RE, XX, 362 et 375. et E. LIPINSKI, La f!te de l'ensevelissement et de la résurrection de Melqart, XV/Ume rencontre d'Assyriologie, 1970, pp. 30-58. Cf. notre quatrième partie, chapitre Il 3. D. VAN BERCHEM, loc. cit., p. 102. C'est pour les distinguer de ces Sôteria que les Héracléia helléniques (mai-juin) auraient reçu l'épithète de Tà I.I.t:Y&Àa Cf. encore G. ROUX, loc. cit., p. 191. Cf. M. LAUNEY, op. cit., pp. 36 et 117. Pour B. BERGQUIST, en effet, l'édifice polygonal ne serait pas un temple. Constatant que l'édifice à oikoi à cinq pièces accolées qui se substitue à lui est, sans aucun doute (et comme d'ailleurs on en avait déjà émis l'hypothèse), une pièce où se célébraient des banquets, elle propose d'identifier l'édifice polygonal avec un mégaron qui, déjà, aurait eu même fonction. Si l'on pense que l'Héracléion est le sanctuaire d'un Héraclès-dieu (et phénicien) comme le font D. VAN BERCHEM et B. BERGQUIST on songera évidemment à l'édifice qui, à Chypre, ferme, à l'époque classique, la cour du sanctuaire de Melqart. J. POUILLOUX, quant à lui, accepte l'interprétation donnée par B. BERGQUIST du mégaron (loc. cit., REA, p. 313), mais maintient que "s'il n'y avait, à l'Héracléion, qu'une seule forme de culte, c'était celle de l'Héraclès Héros" (p. 316 note 5). et il propose de lire dans cette transformation architecturale malheureusement difficile à dater le reflet d'une démocratisation des institutions militaires (p. 313). HÉRODOTE, VI, 46-47. "Ces mines phéniciennes se trouvent à Thasos entre les localités appelées Ainyra et Koinyra, en face de Samothrace" disait Hérodote. Or, en aollt 1979 des exploitations entre les baies de Potamia (problablement l'antique Ainyra) et de Koinyra (cf. BCH, 88, 1964, p. 280) ont permis de repérer des entrées de mines antiques et, dans l'une d'entre elles, sur les hauteurs de Klisidhi, au dessus du village abandonné de Paliochoria, de déceler trois niveaux d'exploitation. L'analyse donne une teneur en or qui sans être exceptionnelle (5ppm), rend le minerai exploitable; d'autre part les mines de l'Acropole de Limenas ont parfois de l'or en quantité appréciable (20,6 ppm pour un échantillon). Enfin on a sans doute exploité également dans l'Antiquité des mines de cuivre et de galène argentifère près des mines modernes de Codou et Marlou. Cf. KOZELI et A. MULLER, Chronique des fouilles à Thasos, BCH, 104, 1980, pp. 716-717 ; BCH, 105, 1981, pp. 960-961 et BCH, 106,1982, pp. 674-675 (avec J. DES COURTILS). Cf. F. SALVIAT et P. BERNARD, BCH, 86, 1962, pp. 578-611. J. POUILLOUX, loc. cit., p. 309.
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383 - "A Héraclès thasien, il n'est permis (d'offrir) chèvre ni porc ; interdiction aux femmes; pas d'offrande de la neuvième part ; point de portions découpées polU' présents; on ne regarde pas Oe sacrifice)". Cf. Ch. PICARD, Un rituel archarque du culte de l'Héraclès thasien, trouvé à Thasos, BCH, 47, 1923, pp. 241-274. H. SEYRIG, BCH, 1927, pp. 369-373; D. VAN BERCHEM, loc. Cil., pp. 88-109. 384 - ]. POUIllOUX, loc. Cil., continue, en effet. de penser qu'à Thasos, comme à Sicyone, on honore les deux Hél'aclès, le dieu et le héros : "D. Van Berchem et B. Bergquist, écrit-il, ont échoué à montter le contraire faute d'avoir considéré la IOtalité de la documentation thasienne" (p. 316). S'il reconnait avoir méconnu l'héritage phénicien, il réaffume la présence du héros grec "gardien et militaire" honoré dans la région du rempart et l'Hél'acléion, "alors que l'Hél'aclès Thasios, diCf,l qu'Hél'odote adjoint au Phénicien Melqart, appartient à la région de l'Agora" (p. 315). Pour G. ROUX,. (Ioc. Cil.), les deux cultes, celui de l'Hél'aclès-dieu et celui du héros, sont rendus dans l'H/rad/ion. 385 - HÉRODOTE, n, 44 "Les résultats de mes recherches font c1airement ressortir qu'Hél'aclès est un dieu ancien, et j'estime très sage la conduite de ceux d'entte les Grecs qui ont dédié chez eux des sanctuaires à deux Hél'aclès, offrant à l'un qu'ils appellent Olympien des sacrifaces comme à un immortel, tandis qu'à l'autre, ils rendent des honneurs funèbres comme à un héros". Il est vrai que, bien que faite à propos de l'Héraclès "phénicien" de Thasos,la remarque d'Hérodote ne fait pas explicitement référence à l'tle. Sur le double culte à Sicyone Cf. PAUSANIAS, II, 10, 1. 386 - PAUSANIAS, V, 25, 12. Dans le même texte Pausanias atteste de l'importance d'une "colonisation" phénicienne à Thasos, puisqu'il fait des Thasiens des "Phéniciens par leur origine" et plus précisément des Tyriens. Il es~ à notre avi&, abusif, de voir là "le phénomène banal de l'inlerprelalio" comme le fait D. Van Berchem,loc. cil.• p. 94. 387 - Rappelons simplement ici que le rituel relatif à Héraclès thasien IG, xn, suppl. 414 date, très vraisemblablement, du Vème siècle; le bail relatif au verger d'Héraclès (IG, XII, suppl. 353) de l'extrême fin du IVème siècle ou du début du mème siècle. 388 - C'est une remarque qu'avait déjà faite D. Van Berchem: "Si donc on tient à l'origine phénicienne de ce culte, on doit admettte qu'en ce qui concerne le sacerdoce, les Grecs ont altéré gravement l'institution primitive" (Ioc. cil., p. 105). 389 - Rappelons que, tant pour D. VAN BERCHEM que pour B. BERGQUIST, il est le sanctuaire du seul Héraclès thasien, d'origine phénicienne; que, pour ]. POUll..LOUX, il est, soit le lieu d'un culte double (et puisque le bOlhros de la cour triangulaire parait disqualifié, il évoque les bolhroi repérés par B. BERGQUIST, dans le rocher près du grand autel)(cf. note 1 p. 314), soit le sanctuaire du fils
206 d'Amphitryon (p. 315). 390 - Cf. G. DAUX, CRAI, 1954, pp. 470 sq. et G. ROUX, BCH, 79, 1955, pp. 353 sq. (et suppl V, Thasiaca, pp. 191-211). 391 - Hypothèse qu'envisage même D. VAN BERCHEM, qui affirme cependant ne pas connaître jusqu'à ce jour de sanctuaire qui se prête mieux aux cérémonies impliquées par les deux rites que l'Héracléion découvert par M. LAUNEY (p. 92). G. ROUX. (Ioc. cit., Thasiaca, p. 191) est, pour sa part, persuadé qu'il n'y a qu'un seul grand Héracléion pour le culte du héros et du dieu. 392 - Si l'édifice polygonal est bien un hestiatorion. où se trouve le naos qui précéda le temple périptère? La réponse à cette question paraît désormais donnée par les dernières fouilles thasiennes: le temple archarque a très vraisemblablement précédé, au même emplacement, le périptère ionique du Nord (Cf. J. DES COURTll..S,BCH. CX,1986, pp. 802-806 et fig. 16.) Date proposée: VIIème siècle CBCH, CIX, pp. 882-884). 393 - On pourrait encore citer les deux cippes qui ornaient le sanctuaire de Malte, hélas complétement détruit (Cf. PERROT-CHIPPŒZ, Histoire de l'art dans l'Antiquit~, III, Paris, 1885, p. 306 et fig. 28 CIS, l, 122, IG, XIV, 600). 394 - Dans notre deuxième partie. 395 - Cf. supra chapitre IIII. Pour B. SERVAIS-SOYFZ cependant (Ioc. cit p. 359) c'est un Melqart époux d'Astarté qu'il faut reconnaître dans le Milk'Ashlart d'Oumm el'Ahmed. 396 - CIS, l, 89. Cette inscription date de 388. Autres dédicaces (CIS), l, 90, 94 - Cf. O. MASSON (Cultes à Chypre dans Les ~I~ments orientaux de la religion grecque ancienne, Paris, 1960, pp. 137-138). 397 - R. DUSSAUD, Melqart, Syria. XXV, 1946-1948, pp. 205-230. 398 - J. TEIXlOOR, L'interprétation phénicienne d'Héraclès et d'Apollon, RHR,200, 1983, pp. 243-255. 399 - Cf. P. XELLA, loc. cit., p. 34. Sur le problème de la triade on se reportera supra, au chapitre 3.2. 400 - Cf. supra notes 315 et 316. 401 - Hypothèse proposée par J.E. DUGAND, loc. cit. (dans Salamine de Chypre, p. 95). 402 - G. PETIINATO, The Royal Archives of Tell Mardikh Ebla, loc. cit., p. 47; cf. J. E. DUGAND, loc. cit., note 53 p. 90. 403 - G. PETIINATO, Testi cuneiformi dei 3 millenio in paleo-cananeo rinvenuti nella campagna 1974 a Tell-Mardikh - Ebla -, Orientali, XLIV. 3, 1975 pp. 361-374 et spécialement pp. 370-371. Cf. J.E. DUGAND, loc. cit., note 115 p. 95. 404 - Pour J.E. DUGAND, loc. cit., note 114 p. 95, on "confondait quelque peu" Melqart et Ba'a1 Hammon (ses arguments peuvent paraître ténus, puisqu'ils reposent essentiellement sur le grand nombre de noms
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théophores consacrés au premier, alors que l'anthroponymie punique réserve peu d'audience au second) et, ce faisant, il attribue à Malik-Melqart les différents tophets de Carthage, d'Hadrumète en Tunisie ; de Motyé et Sélinonte en Sicile; de Sulcis, Monte Siraï et Tharros en Sardaigne (p. 95). Mélicerte pourrait alors ~Ire "un emprunt (probablement mycénien) -au Melqart tyrien", identifié qu'il est à Palaimon. En effet, LYCOPHRON (Aluandra, 229) situe à Ténédos, un naAalfLov ~pECPOXT6vo" = tueur· de petits enfants qui, apparemment, exigeait les mêmes immolations d'enfants en bas-Age de l'aristocratie que Ba'ai Hammon" (p. 94). C'est d'ailleurs en ce sens - et nous nous réjouissons de cette convergence - que se développent acbJellement les études sur Melqart : à la lumière des textes ougaritiques qui font état des rois morts comme des figures héroïques divinisées (RéphaIm), on voit en lui l'hypostase du souverain phénicien idéalisé. Cf. J. TEIXIOOR, L'interprétation phénicienne d'Héraclès et d'Apollon, RHR, 200,1983, pp. 243-255 ; E. LIPINSKI, loc. cil., (1970) p. 51, C. BONNET, Le dieu Melqart en Phénicie et dans le Bassin méditerranéen, Siudia Photnicia, III Louvain 1983, pp. 195-207; P. XELLA,loc. Cil., ibid, IV pp. 37-38; S. RIBICHINI, P. XELLA, MiIk'astart, Melk(m) e la tradizione siro palestinese sui Refaim, Rivisla di Siudi Ftnici, 7, 1979, pp. 147-158. Kilion, pl. XXV et BCH, 1976, fig. 76 et79, pp. 881-882. Cf. supra la description du sanctuaire. SILIUS ITALICUS, Punica, m, 30-31. PHILOSTRATE, Vit d'Apollonios de Tyane, V, 5. Philostrate décrit trois autels, deux d'entre eux sont de bronze et ne portent aucune représentation, le troisième, de marbre, représentait les travaux d'Héraclès et s'était probablement ajouté aux deux premiers après l'assimilation avec le héros grec. Il faut alors signaler - si l'on admet l'hypothèse - qu'elle souffre des exceptions: Melqart est expressément identifié sur la stèle du IXème siècle dédiée par Bar-Hadad et conservée au musée d'Alep. (C. BONNET loc. Cil., p. 80) rappelle d'ailleurs que "L'iconographie phénicienne n'est nullement avare de représentations divines anthropomorphisées" et qu'on aurait tort de "faire porter sur la religion phénicieenne "une répugnance" qui concerne spécifiquement la religion yahviste". E. GJERSTAD, A Cypro-Greek Royal Marriage in the 8th Century B.C., Salamine de Chypre, Histoire et Archéologie, (Colloque de Lyon 1978), CNRS, Paris, 1980, pp. 141-146. Dans cette tombe des s/cyphoi et cratères attiques, des s/cyphoi et plats euboïco-cycladiques fabriqués vers 775-750. Cf. V. KARAGEORGffiS, De l'adaptation et de la transformation de la mythologie grecque à Chypre durant les périodes archaïque et classique, Mythologie gréco-romaine, Mythologies périphériques.
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EtUiks d'iconographie. (colloque CNRS. Mai 1979). Paris. 1980. pp. 77-87. singulièrement p. 80. Cf. infra. fig. 33. Cf. V. KARAGEORGlDS.loc. cit.• p. 81 et planche III (2ème moitié du VIème siècle). V. TATION-BROWN. A terracotta "Geryon" in the British Museum RDAC. 1979. p. 281·288. pl. XXXII. Cf. V. KARAGEORGHIS. Cyprus from the stone Age to the Romans. Londres. 1982. fig. 94 ou fig. 2 planche VI et adtkndum. p. 86 de l'article du même auteur. loc. cit., (Colloque du CNRS. nO 593). Voir notre figure 20 (l et 2) d'après R. HAMPE et E. SIMON. Un millénaire d'art grec. 1600-600. Fribourg. 1980. fig. 92 et 93. Peut-être faut-il évoquer également ici les représentations du combat du héros contre le lion qu'on trouve aussi bien à Chypre (manche d'ivoire d'un miroir datant de la fin du XIIIème siècle. trouvé dans une tombe de Paléographos (tombe 8) et conservé au Musée de Nicosie, Cf. V. KARAGEORGHIS op. cit.•Cyprus from the Stone Age.... fig. 85) qu'en Grèce. à Mycènes. par exemple ("curseur" de la tombe III du cercle funéraire A de Mycènes - 16ème siècle - cf. R. HAMPE et E. SIMON, op. cit., fig. 269). Cf. STÉPHANE DE BYZANCE, S.v. 9aaQt' ; P. CHANTRAINE, Dictionnaire Etymologique tk la langue grecque. 1. pp. 32-33. S.v. ar&> ; cf. J.E. DUGAND.loc. cit.• qui voit dans le nom d'Ainura cité par Hérodote une traduction de deux mots cananéens signifiant "l'île de lumière". ''l'tle lumineuse" (note 129 p. 95-96). J. TEIXlOOR. loc. cit.• RHR. propose d'ailleurs Thasos comme cadre du syncrétisme entre Héraclès et Melqart et attribue aux Phéniciens l'initiative du rapprochement (p. 247). Cf. F. LO SClDAVO, Copper Metallurgy in Sardinia during the Late Bronze Age: New Prospects on its Aegean Connections. dans Early metallurgy in Cyprus, 4000 - 500 B.C.• Nicosie. 1982. pp. 271-279. A l'extrême fin du VIIIème siècle (707). Auparavant la colonie était administrée par un gouverneur dépendant de Tyr. Cf. E. GJERSTAD. loc. cit.• (RDAC, 1979. pp. 249-250). Au Vème siècle Kition. est encore mentionné comme le nom d'un royaume phénicien à Chypre. Azbaal. successeur de Baalmelek 1er et roi de Kition, est aussi. au Vème siècle. roi d'Idalion... Ainsi s'explique mieux. peut-être. la présence de nombreuses représentations d'Héraclès-Melqart dans la région. B. LAROCHE, Un syncrétisme gréco·anatolien : Sandas-Héraclès. dans Les Syncrétismes dans les religions grecque et romaine. Paris. 1973. pp. 103-114 (citation p. 104). CIS. l, 144. Pour l'inscription de Nora on se reportera chapitre II 2 et note 136.
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424 - Cf. M. MARAZZI, Egeo 0 Occidente allafine dei 11 0 millenio A.C., Roma. 1976. Cf. encore V. roSA, La Sicilia fenico-punica.loc. cit.• (DHA), pp. 240-241 et ici même, seconde partie, chapitre m. 425 - Cf. notre étude iconographique, à paraître (ici fig. 21). Signalons qu'au Vème siècle le royaume de Kition frappe monnaie au type de Melqart, sous les traits d'un Héraclès barbu, portant la dépouille du lion et brandissant la massue, mais l'arc est aussi figuré (cf. J. BABELON, Les Perses achiminides, p. 95 sq. et pl. CXXVI sq. et R. DUSSAUD, loc. cit., (Melqart à Chypre). 426 - PISANDRE DE RHODES (Scholie à APOLLONIOS, l, 1195, et SUlDAS, S.v. ndaav8poç) et pour STÉSICHORE D'HIMERE " ~ .(ATHENEE, XII, 512; STRABON, XV, 1,9; ERATOSTHENE, Catastérismes, 12). Il est bien difficile, à notre avis, de trouver dans l'iconographie une trace certaine de l'antériorité de la représentation grecque (on se reportera à notre étude iconographique). 427 - Cf. R. DUSSAUD, loc. cit., p. 218. Sur les monnaies tyriennes représentant Melqart, on peut désonnais se reporter à la thèse de C. BONNET, op. cit., pp. 66-70 de l'exemplaire dactylographié. 428 - R. DUSSAUD, loc. cit., p. 218. Encore peut-on se demander s'il s'agit bien de Melqart (cf. C. BONNET, op. cit., p. 66). 429 - Cf. notre étude iconographique pl. XXVII, XXVIII, XXIX. Tous ces Héraclès de l'époque archarque sont représentés barbus et peut~ aussi le plus ancien d'entre eux (pl. XXVI. fin VIIème ou début Vlème avant J.-C.). 430 - Cf. la tête du musée du Louvre (AM 2784) d'inspiration plus purement grecque, il est vrai. Mais à Chypre encore, le colosse d'Amathonte est barbu. Sur les types d'Héraclès à Chypre cf. J.L. Myres, op. cil., pp. 170-177. 431 - M. DUNAND, op. cil., p. 96 et notes 1,2,3 et 4 ; cf. notre étude iconographique PI. XXIII et son commentaire. 432 - Cf. M. DUNAND, BMB, III, 1939, p. 65 sq. et PI. XIV. Pour la bibliographie, très importante, se reporter à H. DONNER et W. ROLLIG, Kanaanarsche und Aramarschen 111Schrisften, II, 1964, nO 201. Notons d'ailleurs que sur cette stèle Melqart n'apparait pas comme un dieu au lion. Notre photo, prise au musée d'Alep, ne supportait pas, hélas, la reproduction. 433 - HÉRODOTE, II, 44. C'est donc un peu tard que R. Dion daterait la "promotion d'Hercule". (R. DION, La promotion d'Hercule, Antiquités nationales et internationales, Mars-Juin, 1962, pp. 22-26) et après lui encore, DU MESNIL du BUISSON, Origine et évolution du panthéon de Tyr, RHR, 1963, pp. 133-163. 434 - Cf. les rituels au dieu Sandas cités par E. LAROCHE, loc. cit., pp. 109-110. 435 - Cf. une notice d'AGATHIAS, II, 24 00. Niebuhr, 117, 18 sq. et un
210 passage de NONNOS, Dionysiaques, XXXIV, 192. Cf. E. LAROCHE, loe. cit., p. 112. Sur Sandas voir aussi S. SALVATORI, Il dio Santa-Sandon. Uno squardo ai testi P.P.• XXX, 1975, pp. 401-409. 436 - Cf. H. SEYRIG, Héraclès-Nergal. Syria, XXIV, 1944-1945, pp. 62-80 singulièrement p. 71. 437 - Qu'on se souvienne du héros "brutal" ou encore "misérable et violent" de l'Iliade (V, 392, et 403-404). 438 - Cf. la description que font les Hespérides aux Argonautes du scélérat (xUVTŒ'Tot') qui vint dérober les pommes d'or; "un homme redoutable entre tous par son insolence et sa stature ; ses yeux flambaient sous son front terrible, le sauvage...".
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ANNEXE A LA PREMIERE PARTIE: LE PERIPLE D'HANNON
L'expédition du Carthaginois Hannon "le long des· parties de la Libye situées ürttp T~ 'Hpad.t!o"," ~).~ comme celle de son compatriote Himilcon vers les rivages nordiques aurait eu pour but de fonder, au-delà des colonnes d'Héraclès, "de nouvelles villes de Libyphéniciens" sur la côte atlantique. Elle est connue par une traduction grecque du rappon qu'en aurait fait Hannon lui-même à son retour et qu'il aurait consacré dans le temple de Cronos à Carthage. Malgré cette garantie, semble-t-il, de l'authenticité du document, Pline, déjà, émettait des doutes sur sa véracité (V,8) et la controverse n'est pas apaisée aujourd'hui. Depuis les études de St. GSELL, op. cit., l, p. 472 sq. et de R. ROGER, Le Maroc chez les auteurs anciens, Paris, 1924 (avec une traduction du texte), sont parues la thèse de M.A. STOUFFS soutenue à l'Université de Louvain en 1947 : Le périple d'Hannon et celle de J. DESANGES, grâce à qui on dispose facilement désormais, et du texte (établi par W. ALY dans Hermes, LXII, 1927, pp. 321-324) et de la traduction française de la version de Heidelberg (op. cit., pp. 392-397) ; l'auteur donne également le texte et la traduction des témoignages anciens, qui de Palaiphatos à Athénée se rapponent à ce périple ou aident à l'interpréter (pp. 397-403). La bibliographie est très étendue sur ce sujet : les mises au point les plus importantes sont celles de G. MARCY, Notes linguistiques autour du périple d'Hannon, Hespéris, XX, 1935, pp. 21-72; R. MAUNY, Autour d'un texte bien controversé: Le périple de Polybe (146 av. J. -C.), Hespéris, XXXVI, 1949, pp. 47-67 (comparaison des périples d'Hannon, Scylax et Polybe) ; R. ROUSSEAUX, Hannon au Maroc, Revue africaine, XCIII, 1949, pp. 162-232 ; G. GERMAIN, Qu'est-ce que le périple d'Hannon? document, amplification littéraire ou faux intégral ? Hespéris, XLIV, 1957, pp. 205-248. Pour G. Germain on ne saurait en aucun cas prendre ce document pour un journal de voyage, même si son auteur, qui démarque les récits de ses devanciers helléniques, et en particulier Hérodote, a pu utiliser aussi des échos, reçus, par exemple, à Carthage. Le débat a été réouvert, naguère, dans la revue Archéologia, : R. MAUNY, Le périple d'Hannon, un faux célèbre concernant les navigations antiques, XXXVII, 1970, pp. 77-80, partage le doute de G. Germain et, plus catégorique,
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conclut, "Cessons de prendre ce faux ou cette amplification littéraire pour un document authentique et délivrons en à jamais les discussions sérieuses", ce à quoi G. Ch. PICARD, Archéologia, XL, 1971, pp. 54, répond - sans d'ailleurs convaincre son interlocuteur - "Le périple d'Hannon n'est pas un faux". L'auteur, s'il accorde à G. Germain que le périple est l'amalgame d'éléments hétérogènes, reconnaît en lui "deux documents puniques différents, traduits en grec par deux interprètes distincts" : "la première partie, constituée par les six premiers paragraphes, est le récit de la fondation des colonies sur la côte atlantique du Maroc... la seconde... le récit d'une reconnaissance des côtes de l'Afrique tropicale et équatoriale", expédition qui a pu être commandée, soit par Hannon, soit par un autre amiral carthaginois. La véracité de ces relations lui paraît confIrmée par l'article de S. SEGERT, Phoenician background of Hanno's periplus, Mélanges de l'Université St Joseph de Beyrouth, XLV, 1969, pp. 502-518 qui fortifIe la tradition selon laquelle le texte grec est bien la traduction d'un original, ou d'originaux phéniciens. J. DESANGES demeure, quant à lui, fort prudent: "Sans doute, reste-t-il permis de croire, écrit-il, au véritablevoyage du véritable Hannon, rapporté à l'époque mal définie (fin VIIè, Vlè siècle, précise-t-il, en note) où Carthage était au sommet de sa puissance...", mais, ajoute-t-il, "on ne peut, au périple, arracher son revêtement grec, sans en estomper les détours jusqu'à l'inanité" (p. 85). Il insiste surtout sur l'absence d'unité de la tradition : il a pu exister, dit-il, plusieurs sources dès l'origine punique; des éléments divers y sont incorporés "si bien que nous ne pouvons discerner s'il s'agit d'un mélange originel ou d'une contamination occasicnnelle" (p.72). R. REBUFFAT, enfIn (D'un portulan grec du XVlème siècle au périple d'Hannon, Karthago, XVII, 1976, pp. 139-151 et, tout récemment Recherches sur le bassin du Sebou, II, Le périple d'Hannon, BAM, XVI, 1985-1986, pp. 257-284) exprime clairement ce qu'on peut tenir pour essentiel: la version de Heidelberg dérive d'un document original d'origine punique que par simplifIcation il appelle le Rapport d'Hannon, en continuant à désigner par Périple d'Hanncn, le texte de Heidelberg (1985-1986, p. 257). Au problème de l'authenticité du périple, s'ajoute, pour nous, celui de l'identifIcation des "Lixites" cités par Hannon. Pour bon nombre de commentateurs, pour St. Gsell en particulier, Dessau (R.E., XIII, col. 930) et G. Marcy, le Lixos
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serait l'Oued Draa et les Lixites des nomades, vivant dans la basse vallée du fleuve... Pour d'autres, au contraire (J. Carcopino, G. Germain et G. Ch. Picard en particulier), il s'agirait bien du fleuve Loukkos au Nord du Maroc et des habitants de sa basse vallée. G. Ch. Picard en tire une conclusion qui paraît logique: "Au temps d'Hannon, les Lixites étaient encore nomades, mais amis des Phéniciens qui avaient fondé chez eux, plusieurs siècles auparavant, un grand temple de Melqart" (loe. cit., p. 57). n n'est pas certain que même en ce qui concerne l'établissement de Lixos - par-opposition au sanctuaire plus ancien - on soit obligé d'adopter une date aussi basse: la reconnaissance d'Hannon est, en tout état de cause, plus ancienne: VIIème siècle pour J. Desanges, Vlème siècle pour R. Rebuffat. G. Ch. Picard propose d'ailleurs de situer Le périple d'Hannon, après l'évacuation de Mogador par les Phéniciens (v. 5(0) et avant la fondation de Lixos (Vie et mon de Carthage, Paris, 1970, pp. 96-97) qu'il place au IVème siècle. A ce problème de l'identification des Lixites J. Carcopino imagine une solution ingénieuse: "Si Hannon revenait sur la terre, écrit-il, il se frotterait sans doute les mains de voir comme l'érudition la mieux armée a trébuché dans ses panneaux, et consenti, par égard pour lui et ses fausses confidences, à transférer à l'Extrême-Sud du Maroc un fleuve dont le nom n'a pour ainsi dire pas changé dans l'antiquité, l'Oued Loukkos, qui coule 1000 kilomètres plus au Nord, et les habitants de cette vieille ville phénicienne de Lixos dont les ruines sont à Tchemlich, près de Larache, les plus célèbres du Maroc espagnol" (op. cit., p. 85). Ainsi les nomades évoqués par Hannon seraient "les Numides bergers et sujets des Phéniciens de Lixos" et Hannon "aussi bien pour ne point partager sa gloire que pour cacher ses arrière-pensées" (op. cit., p. 89) aurait tenté de donner le change sur la côte libyenne, déjà pénétrée, à haute époque, par les Phéniciens. Cette théorie, pour séduisante qu'elle soit (elle pennet en effet à l'auteur de trouver une solution à bon nombre de contradictions auxquelles se heurte toute tentative d'explication du périple) n'a que le défaut de reposer sur toute une série de présomptions et malheureusement aussi sur celle qu'elle voudrait démontrer: la présence ancienne - reconnaissons le désonnais fort vraisemblable - des Phéniciens à Lixos. Il reste que, si l'hypothèse, "longue" d'un périple conduisant Hannon dans les profondeurs de l'Afrique tropicale ou même équatoriale conserve quelques défenseurs (cf. J. RAMIN, Le périple d'Hannon; Apports de la littérature et hypothèses, Latomus, 1976, pp. 791-804 et Le périple
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d'Hannon, BAR, SuppLementary séries 3, 1976), on admet généralement que les six premiers paragraphes de la version de Heidelberg concernent bien la côte marocaine jusqu'à Lixos, l'île de Cerné étant, dans ce cas de figure, la Dzira Sidi Youssef située dans l'embouchure de l'Oued Sebou: le Chrètes d'Hannon (Cf. R. REBUFFAT, Loc. cit., 1985-1986). Cette interprétation, corroborée par les différents textes anciens qui nous informent de cette côte, nous autorise à voir dans le "rapport d'Hannon" (pour reprendre la distinction établie par R. Rebuffat) le témoignage authentique d'une reconnaissance punique, et dans les Lixites, les indigènes du pays du Loukkos.
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La conquête des boeufs de Géryon, la quête des pommes d'or des Hespérides, par un héros qui bientôt épousera, sinon la princesse, du moins la déesse et, ce faisant, recevra, mieux qu'un royaume : l'immortalité bienheureuse... autant d'éléments susceptibles de justifier la théorie de Jan de Vries pour qui s'impose la solidarité de structure entre mythe, saga et conte (1)... autant de raisons qui paraissent également légitimer un traitement du mythe grec analogue à celui qu'appliqua, il y a près d'un demi-siècle, Vladimir Propp au conte folldorique russe (2). On pourrait ainsi isoler ces "fonctions" du héros, considérées depuis lors comme unités constitutives du récit et retrouver, dans l'un et l'autre des deux épisodes qui nous intéressent, le voyage vers un au-delà merveilleux, la quête de "l'objet" (pommes d'or ou troupeaux) non moins merveilleux, la lutte contre le monstre qui, si elle n'intervient que de façon supplétive dans la légende des Hespérides, forme le coeur de celle de Géryon. On pourrait, plus logiquement encore, choisir la réinterprétation théorique que, dans le prolongement des suggestions de Claude Lévi-Strauss, donne A.J. Greimas de la formule canonique de Propp ; reconnaître dans les travaux d'Héraclès le redoublement significatif de la séquence "épreuve" et construire ces "schémas actantiels" qui peuvent faire oublier aux littéraires les frustations qu'apparemment entraîne le maniement d'une matière longtemps irréductible à la logique mathématique (3). Mais, s'il n'est pas sans intérêt de souligner que le mythe d'Héraclès, tout fortement intégré qu'il soit encore au monde du divin, peut s'insérer pourtant dans le cadre de ces grands modèles classificatoires construits à partir du conte populaire, si la "mise en
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fonnule" loin d'être pur sacrifice à une mode du moment peut aider nous le verrons - à l'étude des transfonnations du mythe, il reste que ce qui confère au récit son originalité - et par là son intérêt pour l'historien -, ce n'est pas l'universalité des thèmes, mais bien plutôt la représentation précise que s'en sont donnée les Grecs. Vladimir Propp, dès 1946, avait, développant l'hypothèse "ritualiste" de Paul Saintyves (4), vu dans les contes populaires le souvenir d'anciens rites initiatiques (5). Si le conte "reprend" ainsi, et "prolonge l'initiation au niveau de l'imaginaire" (6), le mythe est, quant à lui, plus proche encore de ce qui, peut-être, lui a donné naissance. De ces "épreuves" d'Héraclès aux confins du monde habité qu'a retenu la cité grecque? Nous avons cherché à retrouver si, dans le culte rendu à Héraclès (et par quoi il se distingue, essentiellement, du héros du conte populaire), quelque chose subsistait de la fonction primitive... Nous avons cherché aussi -et, poursuivant notre démarche récurrente, c'est par là que nous commencerons - à comprendre ce qu'était devenu, pour les Grecs, ce voyage vers l'Ouest, voyage dont Apollodore conserve probablement la fonne archaïque lorsqu'il montre le héros forçant Hélios à lui prêter son dépas, cette coupe d'or dans laquelle il traverse, chaque nuit, l'océan,... voyage progressivement chargé de toutes les connaissances, de toutes les expériences, de tous les désirs aussi de ceux qui, au cours des temps, se sont raconté cette histoire (7).
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Fig. 22: Héraclès dans la coupe du Soleil
Coupe de la manière de Douris, provenant de Vulci (Musée du Vatican; ARV2, 449). D'après J. BOARDMAN, Athenian Red FigureVases, The Archaic Period, Londres, 1975, nO 300.
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HÉRACLESARCHÉGETE HÉRACLES ET LA COLONISATION (1) : FIXATION ET ENRICHISSEMENT DU MYTHE
"Ainsi ontfairles dieux " Ainsi font les hommes" Tatttîrlya Brdhmana, 1,5,9, (8) "Toujours imaginer sera plus grand que vivre." Gaston Bachelard
Pour A. Schulten, nous l'avons vu, la l~gende d'H~raclès s'enrichit de trois nouveaux exploits quand les Phoc~ns arrivent à Tartessos (9), et pour P. Laviosa Zambotti, la lutte du h~s contre Géryon traduirait, précisément, les rapports primitivement hostiles entre ces mêmes Phoc~ns et les indigènes de ce véritable El Dorado que fut, pour l'Antiquité, le sud de la p~ninsule ibérique (l0)... C'est cette même dépendance du mythe par rapport à l'histoire de la Grèce que supposent également A. Garcia y Bellido et H. Rolland, lorsque, préférant l'hypothèse rhodienne, ils rapportent parallèlement la création des travaux occidentaux d'Héraclès aux colonisateurs archai'ques (11). Nous l'avons dit, déjà, nous ne croyons pas que le voyage d'Héraclès vers l'Occident soit né de la colonisation d'~poque historique, que sa lutte contre Géryon, sa quête de l'or des Hespérides, soient le reflet des expériences des Grecs qui, comme lui, ont un jour quitté leur pays. Hésiode, en effet, sait que c'est "au-delà de l'illustre Océan" qu'il faut chercher le jardin aux pommes d'or, "au delà de l'illustre Océan" également qu'Héraclès s'est, dans leur parc brumeux, emparé des boeufs de Géryon... Or le poète béotien, soucieux pourtant de conjurer la "faim amère", ne dit rien de ceux qui, dès son époque pourtant, partaient chercher ailleurs les terres qui, chez eux, leur manquaient ; il est plus ~tranger encore au monde de ces
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commerçants lancés très tôt à la recherche des métaux qui faisaient défaut à la Grèce. Que le mythe, en revanche, ait été utilisé par ces mêmes colons, que le héros soit devenu pour eux - et dans la mesure même où il était censé avoir, avant eux, parcouru ces régions éloignées -le paradigme de leur aventure occidentale, qu'ils aient à leur tour fixé, précisé, enrichi, donné plus de sens - ou, nous le verrons, un autre sens - à la geste héracléenne, nul ne s'en étonnera : on connaît le succès du culte d'Héraclès dans les fondations grecques! Notre but n'est pas de refaire ici un inventaire déjà réalisé pour la Grande-Grèce et la Sicile (12), pas plus de reprendre, après Jean Bayet (13), les multiples légendes qui conservent le souvenir du héros en ces mêmes lieux. Nous aimerions, quant à nous, tenter d'éclairer cette double transformation qu'imposèrent au mythe d'Héraclès les colons d'Occident: son enrichissement d'abord, le renouvellement de sa signification, ensuite, autour d'un héros devenu le dispensateur de la culture. Qu'Hésiode situe l'épisode de Géryon au-delà du fleuve Océan ne signifie pas, bien sûr, qu'il en donne une localisation précise... Qu'il imagine ces boeufs "à la démarche torse" et leur monstreux gardien "dans Erythie qu'entoure les flots" (14) n'autorise pas véritablement à supposer que le poète béotien retrouve là le souvenir ancien, conservé dans la mémoire collective, d'une île autrefois connue de ces Egéens dont on sait parfaitement qu'ils hantèrent, dès l'âge du Bronze moyen, la Méditerranée occidentale (15). Probablement, en effet, ne sait-il de ces prairies "brumeuses" que leur localisation dans l'île rouge, l'île du couchant, près des rivages d'Océan. Et ce pourrait bien être Stésichore qui, dans sa Géryonide, apporte la première mention à proprement parler géographique, d'une terre du littoral ibérique, située face à l'embouchure du fleuve Tartessos, le Guadalquivir (16). Cette version - si l'on excepte quelques traditions divergentes (17) - devait fixer définitivement le mythe et, au début du Vème siècle, Phérécyde de Léros pouvait affirmer que l'Erythie d'Hésiode n'était autre que Gadeira (Gadès) (18) ; "d'autres auteurs" précisant -selon Strabon - qu'il s'agissait d'un îlot distant d'un stade environ de la ville et dont l'herbe possédait la propriété enviable d'engraisser les troupeaux avec une surprenante rapidité (19). Au Vème siècle, il ne fait ainsi aucun doute que Géryon "avait sa demeure dans l'île que les Grecs appellent Erythie, île située tout contre Gadeira, en dehors des colonnes d'Héraclès, près des rives de l'Océan" (20). Que la situation géographique de l'île de Géryon nous soit
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ainsi transmise, pour la première fois par un Grec d'Occident (Himère est une fondation secondaire des Chalcidiens) et ce dès les premiers siècles de la colonisation (21), n'a rien de surprenant. Stésichore a entendu, peut-être, raconter les exploits du Samîen Colaios qui, selon Hérodote, gagna Tartes~s, alors inconnue des Grecs et,. après avoir franchi les colonnes d'Héraclès rentra dans sa cité "avec les plus grands bc5néfices qu'aient réalisés jusqu'ici aucun des Grecs sur qui nous avons des renseignements exacts" (22)... Sans doute aussi a-t-il eu quelque écho des navigations phocéennes vers l'Extrême-Occident et du "bon roi Arganthonios" si disposé à aider les Grecs (23). N'a-t-il pas enfin profité des récits des Phéniciens, dont la zone d'influence jouxte, précisément, la colonie grecque d'Himère? (24). Ainsi, quelle que soit l'origine de leurs connaissances - et l'on s'accorde à penser qu'à cette haute époque le détroit pouvait n'être pas aussi fermé aux Grecs qu'aux temps de Pindare (25) - n paraît fortement vraisemblable que les colons d'Occident soient responsables de la précision géographique du mythe. On peut supposer aussi -et l'existence même d'un poème, celui de Stésichore, tout entier consacré au seul exploit contre Géryon suffit à étayer l'hypothèse - que ces mêmes colons sont, parallèlement, à l'origine des enrichissements apportés au thème du voyage d'Héraclès vers l'Ouest. Celui-ci est, avant tout, chez Hésiode, la quête d'un héros "aux limites même du monde"... "aux frontières de la nuit" (26). Le poète béotien ne dit rien de plus, mais, dès l'archaïsme, le mythe paraît s'être calqué sur le trajet du soleil, puisque c'est à Hélios que le fils d'Alcmène emprunte la coupe d'or qui "lorsqu'il est couché, le transporte pendant la nuit avec ses chevaux, à travers l'Océan, à l'endroit où il se lève" (27)... tradition bien établie, puisqu'on la retrouvera, plus ou moins transformée, jusque dans les versions tardives des mythographes. Athénée dans les Deipnosophistes a conservé le souvenir précis de ceux qui, dans leurs récits, firent allusion à cette particularité du mythe : Stésichore, pour qui le soleil traversait l'océan dans cette coupe et fut imité par Héraclès lorsque ce dernier dut ramener les boeufs de Géryon (28), Pisandre qui, dans le deuxième livre de son Héracléia (29), précisait que ce Bina" appartenait certes au Soleil, mais qu'il fut confié au héros par Océanos lui-même (30), Panyasis pour qui, au contraire, Héraclès reçut de Nérée la coupe dans laquelle il devait gagner Erythie (31), Phérécyde, enfin, qui donnait la version la plus complète de l'épisode dans le troisième livre de ses histoires et
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mentionnait les tentatives d'Océanos pour faire chavirer le héros en haute mer et les flèches qu'Héraclès dut feindre de décocher contre lui pour rétablir le calme (32). Dépas assez grand pour transporter le soleil et ses chevaux, ou bien encore Héraclès et tout son troupeau 1... Si Panyasis ne traduisait pas -toujours selon Athénée- le terme par CP1l1)." (33), on serait en droit de se demander s'il s'agit bien d'une coupe ! L'auteur de la Titanomachie mentionne, pour sa part, un chaudron de cuivre, plus proche que le dépas de la "cuve" dans laquelle voyage le héros des légendes indo-européennes du cycle de l'ambroisie collectées par Georges Dumézil (34), plus proche, peut-être aussi, de l'une des rares représentations qui nous aient été conservées de cet esquif pour le moins original : celle que Douris - ou quelque peintre proche de lui - a figurée sur une coupe attique à figures rouges, très vraisembablement au début du Vème siècle (35). Apollodore - quant à lui - retrouve ce dépas...dépas qu'il dit donné par Hélios dans des circonstances curieuses : le soleil l'incommodant, Héraclès bande son arc contre le dieu, celui-ci, admirant son courage, lui donne la coupe d'or (36) avec laquelle il gagnera Erythie, avec laquelle également il reviendra - lui et tous ses boeufs - à Tartessos. La précision mérite qu'on s'y arrête: c'est à passer l'Océan qu'a servi la coupe d'or du soleil. Ni Phérécyde -qui mentionne simplement la traversée vers l'île de Géryon -ni les auteurs cités par Athénée ne disent rien de plus.Ils restent, constatons-le, près d'Hésiode pour qui Héraclès tua Géryon ntp"v X).UTOU • Ox&avoi'o (37). La navigation du héros ne concerne pas la Méditerranée, elle lui permet de franchir le détroit de Gibraltar jusqu'aux côtes océaniques de l'Ibérie. C'est bien d'ailleurs pour naviguer en ces zones dangereuses qu'un esquif aussi merveilleux peut paraître indispensable, au delà de ces colonnes que le héros a lui-même fixées, là où "il n'est pas aisé de pousser plus avant"... "là où commence la mer inaccessible" (38). Il y a donc quelque arbitraire, pensons-nous, à opposer trop fortement un état ancien de la légende dans lequel le voyage vers l'ouest se résumerait à une traversée maritime dans la coupe du soleil et une légende plus récente où le voyage merveilleux serait remplacé par les longues pérégrinations du héros le long des côtes africaines, ibériques, gauloises et italiques... Nul ne peut affirmer que toutes les épopées perdues n'en disaient rien, nul ne peut prétendre que la Géryonide, par exemple, ne promenait pas le héros dans des régions devenues familières aux Grecs d'Occident.
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Est-ce un hasard si les premi~res rencontres du voyage paraissent naître progressivement 7 Si Eschyle, par exemple, est le premier à mentionner le passage d'Héracl~s chez les Ligyens, (il faut entendre, bien sûr, les Ligures) avec cette légende étiologique qui fait de la Crau l'oeuvre de Zeus, le œsultat de la pluie de pierres par laquelle il aida son fùs bien-aimé à triompher de ses ennemis? (39). Si Hellanicos de Mytil~ne est le premier à attester formellement du passage d'Héracl~s par l'Italie et la Grande-Grèce lorsqu'il ramenait les boeufs de Géryon vers Argos, à raconter l'aventure du jeune veau s'échappant du troupeau et rejoignant la Sicile à la nage, à jouer aussi des rapprochements étymologiques (OÔ{TOU).OC' serait le nom donné au veau par les Tyrrhéniens) pour expliquer le nom donné à l'Italie (autrefois le seul Bruttium) 7 (40) En fait, quelques élément~ de la légende occidentale d'Héracl~s paraissent, à certains indices, bien connus depuis longtemps. Lorsque Pindare, dans la XII~me Olympique cél~bre Ergotélès d'Himère, il mentionne - après Ibycos de Rhégion d'ailleurs (41) - ces eaux chaudes que "font jaillir les nymphes" dans la cité du vainqueur (42). Il sait aussi qu'en Libye le héros vint "provoquer Antée à la lutte, pour l'empêcher de couronner le temple de Poséidon du crâne des étrangers" (43)... il connaît donc, et Pisandre de Rhodes avant lui, ce th~me du Barbare xénophobe, châtié par Héraclès que Diodore, plus tard, développera à plaisir. Mieux encore, on sait, grâce à Pausanias, que, dans sa Géryonide, Stésichore parlait de Pallantion, en Italie (44) Pallantion, le futur site de Rome où était établi Evandre, roi des Arcadiens (45) - et, s'il faut attendre l'histoire annalistique romaine pour que soit attestée la légende de l'Hercule romain - les fouilles récentes de S. Omobono prouvent que c'est d~s le VI~me si~le qu'un culte lui fut rendu au Nord du Forwn Boariwn (46). De cette geste occidentale d'Héraclès dont l'élaboration, peut-être, fut moins tardive qu'on ne le pense habituellement, nous aimerions analyser un épisode qui donne à voir l'enrichissement du mythe par les colons occidentaux : la lutte de l'Aleide et d'Eryx, ce roi indig~ne qui avait mis l'un des boeufs du héros dans ses propres troupeaux. Nous le ferons en comparant deux témoignages souvent rapprochés et à juste titre, dans la mesure où ils prétendent recueillir l'héritage mythologique des générations précédentes, deux témoignages qui, nous le verrons, sont assez différents pour permettre de mieux cerner ce problème de l'évolution, de la transformation de la saga d'Héracl~s.
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PREMIER CHAPITRE: RETOUR AUXSOURCES: DIODORE ET APOLLODORE
Qu'une comparaison des témoignages de Diodore et d'Apollodore soit légitime, nul n'en doutera. Précisons simplement qu'à la Bibliothèque correspond une partie seulement de l'oeuvre de Diodore: les livres 4, 5 et 6 que, dans la première partie de sa Bibliothèque historique, l'auteur sicilien consacre aux "Antiquités des Grecs". Dans ces limites - qui sont celles de la mythologie! - les deux ouvrages ont d'ailleurs été, depuis longtemps mis en parallèle. Dès "1887, par exemple, E. Bethe, dans une étude consacrée à Diodore, relevait de nombreuses analogies entre les deux auteurs (47). Le choix des mêmes grands mythes (ceux d'Héraclès, des Argonautes, de Thésée paraissent dans les deux cas privilégiés), les correspondances étroites de certains épisodes, lui avaient même paru prouver que les deux oeuvres s'inspiraient d'un même manuel mythologique. On a, de nos jours, abandonné cette idée d'une source commune, mais les rapprochements établis n'en demeurent pas moins pertinents. Pour nous en tenir à l'exemple héracléen, les deux auteurs consacrent au héros une très longue notice (48), et dans les deux oeuvres la structure d'ensemble du récit est la même : - Une première partie est (certes logiquement) consacrée à l'enfance et à l'adolescence du fils adoptif d'Amphitryon. - Mais le récit des travaux, qui vient ensuite, se termine par l'apothéose d'Héraclès et paraît donc, à lui seul, constituer la geste du héros. - Or, ce récit est, chez Diodore comme chez Apollodore, suivi des innombrables aventures qui jalonnent une vie, terminée on le sait, par l'envoi de la tunique empoisonnée et la mort du fils d'Alcmène sur le bûcher de l'Oeta. C'est donc comme une seconde existence d'Héraclès qui est exposée dans cette troisième partie de l'un et l'autre textes. Cette division artificielle - mais qui a le mérite de concilier les traditions multiples - témoigne sans aucun doute d'un effort de classification, d'ordonnancement qui ne peut être l'oeuvre d'un poète, mais bien plutôt celle d'un mythographe, ou de mythographes - c'est plus vraisemblable - antérieurs, en tout état
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de cause, à Diodore comme au pseudo-Apollodore. Il semble même que cette structure puisse remonter à l'un des premiers mythographes, Phérécyde de Léros, plus souvent dit d'Athènes puisque c'est dans cette ville qu'il finit par s'installer. Phérécyde avait, au début du Vème siècle, écrit des Généalogies, un ouvrage en dix livres qui accordait une grande place à Héraclès. On sait qu'au livre II appartiennent les fragments conservés se rapportant aux "travaux"; au livre III, en revanche, ceux qui retracent les autres aventures du héros. Il se pourrait donc, que, pour ce qui est de la structure générale du récit, Diodore et Apollodore soient tributaires de cette source commune. Ils en sont sans doute très proches, également, dans la troisième partie de la vie d'Héraclès, car c'est là que leurs textes offrent les plus grandes ressemblances: l'épisode du meurtre d'Iphitos, par exemple, et l'esclavage chez Omphale qui en est la conséquence sont, nous y reviendrons (49), présentés de façon fort voisine. Or on sait qu'ils avaient été contés par Phérécyde (50) et on pourrait avancer bien d'autres correspondances (51). En revanche, il apparaît que lorsqu'ils rapportent les "travaux" - dont on ne peut mettre en doute qu'il forment le coeur de la légende héracléenne - les deux auteurs s'éloignent, considérablement; leurs sources paraissent beaucoup plus variées que ne le pensait E. Bethe et l'utilisation qu'ils en fontc'est peut-être là surtout que se situe le problème - fort différente. C'est donc à mieux connaître tout à la fois les sources et le projet d'ensemble des deux auteurs qu'il nous a paru nécessaire de nous attacher.
1-1 Notre intention n'est nullement de refaire ici une Quellenforschung en question depuis la fin du XIXème siècle (52), mais de cerner de plus près, à propos de Diodore et d'Apollodore, le problème de l'utilisation de sources qui, parce qu'elles apparaissent toutes deux comme relativement tardives, parce qu'elles utilisent une tradition non seulement longuement établie, mais déjà recueillie, fixée et dans une certaine mesure normalisée par les Alexandrins, pourraient passer pour relativement interchangeable. Diodore de Sicile est, pour sa part, facile à situer. Né vers 90 à Agyrion, en Sicile il vivait, comme l'affmne une notice de Suidas "sous Auguste et auparavant" (53). Lui-même, se donne d'ailleurs, comme contemporain de Jules César. Sa Bibliothèque Historique, à laquelle il dit avoir travaillé près de trente ans (54),
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a dû paraître peu ap~ le milieu du premier si~le avant notre m. Le problème posé par la Bibliothtque, est malheureusement plus complexe: Apollodore d'Athènes, à qui elle fut longtemps attribuée vivait au second si~le avant J.-C. n était l'auteur de traités variés, mais surtout de deux ouvrages qui probablement expliquent qu'on l'ait crédité aussi de celui qui nous intéresse : une chronique rimée des événements de la guerre de Troie à son époque (xpov\xa) et une histoire des dieux (ncpl 8Ewv) en vingt-quatre livres (55). La Biblioth~que, qui cite des sources largement postérieures (Castor de -Rhodes, par exemple, contemporain - lui aussi - de Jules César), ne peut, bien sûr, pas être son oeuvre: Carl Robert, en 1873, l'a prouvé et, depuis la dissertation qu'il lui a consacrée, c'est son opinion qui prévaut: l'ouvrage serait une compilation de seconde main qu'il faudrait dater des premiers si~les de l'Empire, du second si~le de notre ère, admet-on généralement A cette époque, en effet, le déclin de la culture grecque aurait suscité le besoin d'un manuel qui rassemblât toutes les données de la mythologie et en particulier les généalogies divines et héroïques, un manuel que pût consulter sans trop d'efforts un public en mal "d'érudition exPéditive" (56). C'est sa commodité, plus que ses qualités propres qui expliquerait que l'ouvrage nous ait été conservé: il fut très vite, en effet, largement utilisé par les scholiastes qui, parfois, en reprennent des passages entiers (57). Nous avons dit, déjà, la nécessité, pour utiliser les sources sans faire violence à l'Histoire, de replacer ces dernims dans leur contexte chronologique. Dans ces deux siècles qui - selon l'opinion courante - sépareraient Diodore et Apollodore trouverons-nous l'explication du décalage qui, nous venons de le voir, individualise leurs deux témoignages? Nous n'en croyons rien, pour deux raisons essentielles: l'une, sur laquelle nous reviendrons, tient au caractère fmalement arbitraire - il nous paraît tel, en tous cas - de la date traditionnellement assignée à la Biblioth~que, l'autre - plus fondée encore - tire son existence dans cette nécessité que nous affumions de replacer ce qui, dans une oeuvre, concerne l'objet précis de notre étude au sein d'un ensemble dont on ne saurait l'extraire sans en fausser le sens. Nous ne pourrons donc valablement comparer nos deux sources qu'en ayant pleine conscience du "projet" qui sous-tend l'une et l'autre (58).
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1-2 Dans une certaine mesure les intentions de Diodore et celles de l'auteur de la Bibliothèque, sont les mêmes: réunir en un seul ouvrage quantité de connaissances qu'on devait, avant eux, aller chercher dans des ouvrages variés. Photius, ce patriarche de Constantinople qui, au IXe siècle, eut entre les mains une copie de la Bibliothèque, nous a laissé, sur ce point un commentaire fort précieux: l'ouvrage, dit-il, est essentiellement un résumé et il est, de ce fait, très utile à qui veut connaître les choses de l'Antiquité, il est un moyen "d'avoir en mémoire les vieux récits" (59). Après avoir précisé le sujet de l'ouvrage: "les Antiquités des Grecs et ce qu'ils croyaient quant aux dieux et aux héros", il en précise les limites : la guerre de Troie et les errances des guerriers à leur retour, en particulier celles d'Ulysse avec qui finissait ce récit sur l'Antiquité (On sait que l'ouvrage, tel qu'il nous est parvenu, se termine brutalement à l'histoire de Thésée, le reste n'étant conservé que par un épitomé). Photius, surtout, reproduit une épigramme qui figurait, dit-il, au début de la Bibliothèque, et qui a effectivement de fortes chances d'être authentique: adresse au lecteur, elle définit l'ouvrage comme capable de lui assurer sa connaissance du passé. Plus besoin, avec la Biblioth~que, de lire Homère, l'élégie, la tragédie, la poésie mélienne... autant de genres littéraires, autant de sources directes que l'auteur prétend - parce qu'il les a lui-même assimilées et rassemblées? - remplacer. C'est, dirons-nous, une véritable définition de l'oeuvre mythographique qui nous est donnée là (60). Or on peut trouver chez Diodore, dans son premier livre en particulier, l'exposé d'intentions tout à fait semblables: il veut réunir dans une encyclopédie la masse des faits qu'on avait, avant lui, beaucoup de mal à recenser. C'est, dit-il, dans le but d'être utile au lecteur qu'il a entrepris son ouvrage, et "parce qu'il n'est pas facile de se procurer les livres nécessaires", ceux du grand nombre d'auteurs qu'il faudrait parcourir, toutes ces versions si diverses, si difficiles à comprendre et à assimiler (61). C'est donc, comme Apollodore, une somme que Diodore entend présenter à ses lecteurs et cette somme dépasse, estime-t-il, toute tentative de même nature entreprise avant lui. Très peu de ses prédécesseurs, en effet, ont osé affronter l'histoire universelle; ceux qui s'y sont essayés ont, ou bien négligé la chronologie, ou bien passé sous silence les faits et gestes des Barbares; d'autres ont écarté le récit des temps mythiques; aucun encore n'a dépassé l'époque des rois
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macédoniens (62). Lui, au contraire, traite de tous les siècles et de tous les aspects de la connaissance. Ses six premiers livres retracent "les événements fabuleux antérieurs à la guerre de Troie" (trois sont consacrés aux "Antiquités" des Barbares, les trois autres.à celles des Grecs); puis, dans .les onze livres suivants il expose l'histoire générale depuis la Guerre de Troie et jusqu'à la mort d'Alexandre; les vingt-trois derniers livres, enfin, présentent l'histoire la plus contemporaine et ce jusqu'au début de la guerre, menée contre les Celtes par Jules César (63), jusqu'à son époque, donc. Synthèses des connaissances, telles veulent être ces deux oeuvres, et ceci au service d'un public très large : "les jeunes gens et vieillards, les simples particuliers comme les chefs" dit Diodore (64) qui, plus souvent encore, parle de "l'humanité", des "hommes en général", voire du "genre humain" (65). Apollodore, s'il est moins explicite, ne paraît pas non plus s'adresser à un cercle restreint. Photius, par exemple, l'oppose à Conon dont il vient de résumer les Narrations qui, dit-il, "ne sont pas à la portée de tous" et l'hypothèse de M. van der Valk ne paraît qu'à demi convaincante qui suppose qu'Apollodore a rédigé sa Biblioth~que à l'intention des enfants et pour l'école (66). Comme C. Robert, mais en appuyant sa démonstration sur d'autres passages de l'ouvrage (67) M. Van der Valk, en effet, cherche à prouver que c'est une version expurgée de la mythologie qu'Apollodore voudrait présenter... sans toutefois y parvenir absolument, reconnaît-il d'ailleurs. Et c'est probablement parce que sa démonstration ne le convainc qu'imparfaitement qu'il doit conclure que la mythologie est un domaine dans lequel il est bien difficile de préserver la décence ! (68) Remarquons simplement, pour notre part, que l'Héraclès d'Apollodore reste plus proche du héros brutal et vigoureux d'Homère que du parangon de vertu qu'il était devenu à la fm de l'hellénisme et que la Bibliot~que ne s'inspire guère - nous y reviendrons - de certaines sources qui "moralisaient" Héraclès, alors même que son auteur les a, nous le savons, utilisées (69).
1-3 Mais, s'il n'y a, pensons-nous, aucune raison véritable de dire qu'Apollodore, aussi bien que Diodore se soient adressés à un public particulier, si tous deux ont écrit pour mettre à la disposition de leurs lecteurs des connaissances jusque là fort dispersées, le but recherché paraît, pour l'auteur de la Bibliot~que, s'arrêter là. L'intention d'ailleurs n'est présente que
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dans l'épigramme qui accompagne l'ouvrage. Celui-ci se singularise en effet par l'effacement du narrateur qui n'intervient que très rarement sous la fonne du je ou du nous (qui associe le lecteur) et 15 verbes seulement, pour l'ensemble du texte marquent cette intervention (70). Pour Diodore, au contraire - beaucoup plus présent dans son oeuvre - la tradition légendaire n'est traitée que comme introduction à l'histoire. Les récits mythologiques et généalogiques qui, chez Apollodore se suffisent et constituent, l'objet même du discours sont, en effet, dans la Bibliothtque Historique, intégrés à un vaste projet (71), projet qui n'est pas sans influence sur les formes mêmes de l'oeuvre, projet qui, surtout, donne un sens au mythe. En ce qui concerne les formes mêmes du discours, on ne peut manquer d'être frappé par l'effort que fait Diodore pour lui donner un cadre chronologique, mieux, pour tenter, dans la présentation de son histoire universelle, d'accorder entre eux les différents systèmes chronologiques en usage à son époque chez les Grecs comme chez les Romains. Dès l'abord il se place sous l'autorité d'Apollodore d'Athènes pour compter quatre-vingts ans de la prise de Troie au retour des Héraclides (72), puis il calcule, d'après les règnes des rois de Lacédémone, les trois cent vingt-huit ans qui, selon lui, conduisent à la première Olympiade (73)... etc... Ce souci qui pousse l'auteur sicilien à utiliser - au mépris parfois de la cohérence interne, lorsque ses sources se contredisent - les jalons chronologiques les plus variés n'est pas absent de la partie proprement mythologique de l'oeuvre, même si Diodore reconnaît, à ce sujet, qu'il ne peut fixer aucun ordre précis aux événements antérieurs à la guerre de Troie faute de sources dignes de foi (74). n n'en cherche pas moins à laisser à son lecteur un fIl conducteur qui lui pennette de mettre en rapport les grandes gestes hérorques qu'il retrace. Ce même souci chronologique est sensible encore au niveau de ses sources. Bien sûr, comme Apollodore, il cite les poètes, mais la grande poésie épique et généalogique semble pour lui se limiter à Homère et à Hésiode, parfois cités ensemble comme la source de tout discours mythique (75), Hésiode plus rarement évoqué seul (76), Homère beaucoup plus fréquemment (77). Point n'est besoin, d'ailleurs, de dire son nom, il suffit de le donner comme "le plus ancien peut-être et le plus vénéré des poètes" (78), "le plus célèbre des poètes de toute la Grèce" (79) ou plus simplement encore - ce qui en dit long sur son importance aux yeux de Diodore - "le poète" (80). Pour qui aurait quelque inquiétude quant à l'identification, une citation de
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la Nekyia dans un cas, de l'Iliade dans l'autre (VII, 321) ne laissent aucun doute. C'est bien Homère qui, pour Diodore (et nous verrons qu'il n'en est pas tout à fait de m!me pour Apollodore) représente, à lui tout seul, la pœsie ~pique, et pourrait-on dire sans trop d'exagération, la pœsie dans son ensemble. En effet, si Alcman est mentionn~ (81), s'il est - très rarement - fait allusion "aux Tragiques" - essentiellement Carcinios (82) et Euripide (83) - et si ceux-ci lui paraissent se signaler par la fiction dont ils ornent le mythe (84), il se ref'he beaucoup plus souvent "aux mythographes", voire "aux plus anciens mythographes" qu'il cite peu volontiers d'ailleurs (85). L'un d'entre eux cependant mérite une mention spéciale ; c'es~, très vraisemblablement, la plus récente de ses sources : "Denys, qui a écrit l'histoire des Argonaute~, de Dionysos et de toutes les choses les plus mémorables de l'Antiqui~" (86). Mais les grandes références de Diodore sont autres et ce même dans ses six premiers livres auxquels, nous le ré~tons, nous limitons notre étude: ce sont ces grands voyageurs qui parcoururent le monde grec et s'aventurèrent chez les Barbares et qui, tels Hécatée (87) ou Hérodote (88), frrent naître le genre historique; ce sont encore ceux qui, tels "Clitarque et quelques autres... suivirent Alexandre en Asie" (89). Ce sont des compilateurs enfin, comme Artémidore d'Ephèse (90) ; ou bien encore ce sont des "savants" comme Démocrite (91) Anaxagore (92) ou Oenopide de Chios (93). Ce sont, enfin, plus simplement des historiens. Encore faut-il remarquer que, négligeant Thucydide et Xénophon, Diodore paraît leur preférer Ephore "qu'il tente de suivre autant que possible", avoue-t-il (94), ou encore les contemporains de ce dernier: Callisthène et Théopompe (95). Sur des points particuliers il aime faire appel à des spécialistes : il se réfère, par exemple, à "l'autorité des plus célèbres historiens de la Crète" (96)...peut-être Dosiade et Sosicrate, cités un peu plus loin (97), ou encore Laosthenidas, qui pour nous n'est guère qu'un nom (98)... Il cite Zénon, "l'historien de Rhodes" (99), plus souvent encore Agatharchide de Cnide (100) pour tout ce qui concerne l'Egypte et l'Ethiopie; Ctésias de Cnide, surtout, lorsqu'il rapporte l'histoire des Assyriens (101). Enfin, s'il s'inspire encore, pour l'Orient", de ceux qui suivirent Alexandre en Asie" (102), il fait crédit, lorsqu'il traite des problèmes de l'Occident, à Philistos et plus encore à Timée de Tauroménion (103). Il n'y a rien de très remarquable, évidemment, dans le fait que Diodore, parlant d'Histoire, parle aussi des historiens ; ce
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qui peut-être l'est plus, c'est la présence de ces mêmes historiens dans les développements mythologiques de Diodore : ainsi dans la longue notice consacrée à Héraclès, s'il évoque à plusieurs reprises "les mythographes", seul de tous les poètes Homère est cité (104), alors que le témoignage de Timée est requis par deux fois (105). L'une des occurrences en particulier est révélatrice, qui place l'historien dans son rôle de caution apportée au dire contestable - des mythologues (106). Face à ces exigences - bien sûr relatives ! - on ne peut manquer d'être frappé par l'indifférence totale d'Apollodore quant à la chronologie. La Bibliothtque, en effet, déroule ses généalogies non seulement sans souci de les replacer dans l'ordre des temps, mais encore sans tenter de les situer les unes par rapport aux autres. Elles ordonnent, certes, le schéma général de l'ouvrage, mais ce souci de classement - dont la rigueur d'ailleurs n'est pas parfaite, le livre III en témoigne! - ne débouche jamais sur une préoccupation "historique" : "Après avoir fait le récit de la postérité de Deucalion, je vais passer à celle d'Inachos" (107)... ainsi débute le livre II et le lecteur qui aimerait établir quelques concordances entre les grandes familles de la mythologie des Grecs est, il faut le dire, bien peu aidé ! Indifférence à la chronologie... indifférence à l'histoire d'une façon plus générale! On s'en aperçoit, lorsqu'Apollodore cite les auteurs ou les oeuvres qui lui servent de références. Pour lui la mythologie est, avant tout, l'affaire des poètes et des mythographes (108). Les historiens - ceux que nous connaissons en tout état de cause! - ne sont jamais cités. Seuls sont nommés d'obscurs érudits locaux: le Thessalien Philocratès, par exemple, à propos de la généalogie de Patrocle (109) ou le mystérieux Mélésagoras (ou Amélésagoras) appelé à témoigner au sujet de ceux qu'Asklépios, un jour, ramena à la vie (110). Cette absence des historiens, dans la Bibliothtque, a été jugée tellement surprenante qu'on a pu imaginer - pensant à Hellanicos - que, s'il n'était pas cité, c'était par une sorte de coquetterie d'auteur soucieux de dissimuler une source qu'il suivrait trop fidèlement (111)... supposition, il faut le dire, bien peu compatible avec le caractère de l'oeuvre d'Apollodore! Celui-ci, en effet, se soucie peu de l'histoire et ce n'est pas en historien qu'il rapporte les traditions des Grecs. Celles-ci sont multiples? Qu'à cela ne tienne, il ne convient pas de choisir, mais d'en livrer le plus grand nombre. Sa préoccupation majeure n'est pas de donner la version la plus achevée - ou la plus rationnelle -, mais bien plutôt la plus ancienne: le prouvent, au premier chef ses sources avouées, le prouve aussi l'utilisation qu'il fait de
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tel ou tel auteur, de telle ou telle oeuvre. C'est ainsi qu'en tout premier lieu il évoque les grands cycles épiques: l'Iliade et l'Odyssée, bien sûr; mais Homère n'est cité que 5 fois (112), ce qui peut surprendre, surtout si l'on songe que, dans l'oeuvre de Diodore, il paraît, à lui to~t seul, résumer l'épopée. Chez Apollodore, figurent au contraire à ses côtés nombre de poètes appartenant à la liste des aèdes et des rhapsodes: Eumélos de Corinthe que les chronographes situent - peut-être à tort - au VIIlème siècle; Pisandre de Camiros qui composa son Héracléia à Rhodes, au VIIème siècle; Asios qui, à la même époque sans doute, vivait à Samos (113) ; Cercops de Milet, enfm, cité à propos de la légende d'Io et d'Argos Panoptès, en référence donc à l'Aeginios qu'on lui attribue généralement (114). Apollodore mentionne encore dans sa Bibliothèque, mais de façon anonyme, la Thébaïde, l'un des plus anciens cycles qu'ait connus la Grèce et l'Alcméonide, plus tardif, mais rattaché aux légendes thébaines (115), les Nostoi, attribués par Proclus à Hagias de Trézène et généralement datés du VIlème siècle, les Naupactiques enfin... La poésie généalogique est, elle aussi, très sollicitée: c'est d'ailleurs Hésiode qui arrive en tête des citations (14). Acousilaos, avec dix occurrences, est, lui aussi, souvent cité, en particulier lorsqu'avec la famille d1nachos, Apollodore traite des ancêtres des rois argiens, mais avec Acousilaos - qui écrit en prose - nous avons déjà, en fait, l'un des plus anciens mythographes de la Grèce (116). Pour en terminer avec la poésie, les auteurs lyriques sont plus rarement mentionnés avec Stésichore (2 occurrences) Pindare (1) et Télésilla (1) plus connue comme héroïne d'Argos que comme poétesse (117). Quant aux "Orphiques" ils sont cités sans précision d'auteurs. Il est vrai qu'à l'époque d'Apollodore déjà, le recueil qui rassemblait leurs oeuvres pouvait apparaître comme complexe! La tragédie fournit de même assez peu de références : quatre d'entre elles concernent nommément Euripide, qui de surcroît, se cache par deux fois sous le terme général de "tragiques" et paraît ainsi particulièrement apprécié par Apollodore (118). La poésie hellénistique, enfin, est très peu sollicitée et, si l'on excepte une référence aux Argonautiques d'Apollonios de Rhodes, on s'étonne de trouver, plutôt que les grands noms de l'époque, des auteurs moins connus de nous comme Asclépiades, sans doute l'un des premiers représentants de l'élégie et de l'épigramme alexandrines, puisque Théocrite le reconnaissait
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comme un maître (119) ou Démarate, auteur d'un Roman des Argonautes dont, à vrai dire, on sait fort peu de choses (120). Beaucoup plus qu'aux poètes - exception faite, nous l'avons vu des grands cycles épiques et des généalogies mythiques - ce sont - fort logiquement d'ailleurs - les mythographes qu'Apollodore reconnaît le plus volontiers. C'est particulièrement vrai pour les plus anciens d'entre eux: nous avons évoqué, déjà, le cas d'Acousilaos ; Phérécyde de Léros ou d'Athènes - apparaît plus souvent encore dans le texte de la Biblioth~que (121) ; Hérodore et Panyasis sont moins souvent évoqués (respectivement deux et trois fois) (122). Quant à Denys et Mytilène, surnommé ''Bras de cuir" qui, grâce à la Bibliothèque d'Alexandrie, avait, avant Diodore et Apollodore composé une véritable encyclopédie mythologique, ou à Castor de Rhodes, le chronographe, ils ne sont cités qu'une seule fois (123).
237 TABLEAU Il
AlJTEURS ET 0ElNRES CITES PARAPOLLOOOAE
Références
Auteurs ou oeuvres HÉSroE
Bouclier d'Héraclès (qui, on le sait, n'est pas d'Hésiode)
PHÉRÉCYDE
*
1,74 l, 123
• 1,8,4 • 1,9,21
Il, Il, Il, Il, Il,
• • • • •
2, 5 (2) 26 31 38
l,l, 1, 1 Il, 1, 3 (2) Il, 2, 2 Il, 3, 1 Il, 4, 2
III, 45 III, 71 III, 96 III, 100 III, 109 III 183 1,25 1,32 1,76 l, 118
• • • • •
Il, 6 Il, 62 Il, 148
• Il, 1, 3 • Il, 4, 8 * = Il, 7, 5 *
III, III, III, III, III, III,
• • • '"'
3 24 25 70 100 158
Nombre des Occurrences
III, III, III, III, III,
5, 6 6, 7 8, 1 8, 2 9, 2 .111 14 4 .1,4,3. .1,5,2 .1,8,5 • l, 9,19
III, III, III, III, = III, '"' III,
1, 1 4, 1 4, 2 6, 7 8, 2 12, 8
14
13
238 TABLEAU Il (suite) ACnJSllPDS
H:ltJERE
EU~LOS
PANYASIS
EURIPIDE
Il, Il, Il, Il, Il,
2 5 6 26 94
• Il, 1, 1 • Il, 1, 3 • Il, 1, 3 = Il, 2, 2 .. Il, 5, 7 .. III, 4, 4 .. III, 8, 1 • III, 11, 1 = III, 12, 7 =11115 2 = 1,3,5 z Il, 2, 1 = Il, 3,1
III, 30 III, 96 III, 133 III, 156 III 199 l, 19 Il, 25 Il, 31 III, III III, III, III,
3 = III, 1, 1 45 =11156 100 = III, 8, 2 102 = III, 9, 1 133 = III, 11, 1
1,32
.. l, 5, 2
III, 121 III, 183
= III, 10, 3 • III, 14, 4
Il, 11 111,75 III, 94 III, 109
= Il, 1, 4 = III, 6, 8 = III, 7, 7 = III, 9, 2
*
1a
5
3
3
4
Il, 3 Il, 23 Il, 25
= =
Il, 1, 3 Il, 1, 5 Il, 2, 1
3
ASCLÉPIADES
Il, 6 III, 7
= Il, 1, 3 = III, 1, 2
2
ŒRXFS
Il, 6 Il, 23
= Il,
= Il, 1, 3 1, 5
2
= l, 9, 19 = III, 5, 6
2
Les Tragiques
H~
l, 118 III, 45
=
239 TABLEAU Il (suite) STÉSICHORE
III, 117 • III, 10, 3
L'auteur de
III 121 1,76
=111 10 3 .1,8,5
2 1
• l, 9, 21
1 -
L'ALCMÉONIDE
APOLLONIOS de FHXES
1,123
(Les ARGONAUTIOUES) III, 100
'"' III, 8, 2
1
(TRAITE DES ERREURS CHRONOLOGOUES)
Il,5
= Il, 1, 3
1
DÉMARATE
l, 118
'"' 1, 9, 19
1
DENYS
l, 118
• l, 9,19
1
MÉLÉSAGORAS
III, 121
'"' III, 10, 3
1
Les Orphiques
III, 121
= III, 10, 3
1
NAUPACT/QUES
III, 121
• III, 10, 3
1
PHILOCRATES
III, 176
= III, 13, 8
1
PINDARE
Il, 38
'"' Il, 4, 2
1
PISANDRE
1,75
.1,8,5
1
TÉLÉSILLA
III, 47
= III, 5, 6
1
L'auteur des flDSTOI
Il,23
= Il, 1, 5
1
1.74
=1 8
1
ASOS
CASTœ
L'auteur des
L'auteur de la
THÉBAIDE
TOTAL
4
78
240
Cette simple énumération des sources avouées par Apollodore laisse entendre que, contrairement à Diodore qui s'inspire volontiers des auteurs - et en particulier des historiens - relativement proches de lui dans le temp's, l'auteur de la BibliotMque entend se référer aux versions les plus anciennes du mythe. On se reportera au tableau III pour constater cette prépondérance remarquable des auteurs ou des oeuvres de l'archaïsme dans les discours rapportés: sur un total de 78 citations, S8 appartiennent à cette période (124).
T.A,BLEt-U III :L'HERIT.Ll.GE MYTHOGRAPHIQUE CHEZ .Ll.POLLODORE DISCOURS R.Ll,PPORTES :CITATIONSD'OEUVRES OU D't-UTEURS
- - L'époque archeïque se prolonge ~u début du Vème siècle ~
L'époque ercheïque se clôt evec le fin du Vlème siècle mmwmW11t:mW1Wlilllm 5 citetions
époque 58 archaïque 43
époque classique
12 époque 7 27 alE'xandrine 7
+
MélésagOl"as
= 78
241
Cependant, si Apollodore se donne manifestement comme l'héritier des plus anciennes sources mythographiques, si pres de la moitié des citations se concentrent sur trois noms significatifs, ceux d'Hésiode (14) de Phérécyde (13) d'Acousilaos (10), rien, dans le discours, n'indique explicitement qu'ils soient investis d'une autorité particulière: lorsqu'Apollodore, en effet, les confronte à d'autres auteurs, aucun ordre préférentiel ne pennet d'affmner qu'ils soient privilégiés ou emportent la décision. Accumulation, juxtaposition de variantes, ces informations ainsi sorties de l'anonymat de la Bibliothèque paraissent être le simple écho d'une tradition mythique multiple qu'Apollodore aide simplement à garder en mémoire et ne cherche en aucun cas à transformer en version officielle. Peut-être faut-il prendre garde.. cependant, que, replacées dans leur contexte, de telles confrontations apparaissent soudain~ment bien futiles, ou, en tout état de cause, de bien peu de poids dans le récit : affaires de chiffres parfois (nombre des enfants de Niobé, nombre de vaisseaux emmenés à Troie par Héraclès), affaire de noms surtout, (noms d'épouses, de parents ou d'enfants dans les généalogies... noms de meurtriers ou de victimes). Très rarement, les divergences portent sur l'ensemble d'un épisode et, à cet égard, les interrogations d'Apollodore sur la participation d'Héraclès à l'expédition des Argonautes semblent bien faire exception. D'une façon générale, lorsqu'Apollodore invite ainsi ses devanciers à se prononcer, lorsqu'il oppose leurs affmnations, ce n'est jamais pour modifier le sens du mythe... Et il semble bien que ce témoin qui - à s'en tenir aux apparences du discours - non seulement se satisfait de la pluralité des traditions, mais, en refusant de choisir, creuse une forme de distance entre son sujet mythique et lui-même, sache en fait préserver, sur l'essentiel, la cohérence d'un mythe dont le sens général n'est pas, quant à lui, soumis à la discussion. Mieux même, si le choix des auteurs qu'il avoue pour ses sources est en lui-même révélateur par le souci qui paraît le sien de retrouver les témoins les plus anciens du mythe, l'utilisation qu'il fait de ces mêmes sources le montre en mythographe assez éloigné de cette position de narrateur indifférent: la mise en parallèle de la Biblioth~que et des fragments conservés d'Hérodore est, à ce titre, du plus haut intérêt. Le mythographe d'Héraclée est, nous l'avons vu, cité deux fois par Apollodore : lorsqu'est évoquée la participation d'Héraclès à l'expédition des Argonautes (125), dans le premier livre, et, dans le troisième à propos des enfants de Niobé (126). Il est bien évident toutefois que l'étude des discours rapportés ne peut, en aucun cas recouvrir
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l'étude des sources, et que, dans ce cas précis, là ne se limitent pas les emprunts d'Apollodore. Il semble en particulier - pour nous en tenir à l'exemple d'Héraclès - qu'Hérodore, auteur d'un ouvrage sur Héraclès (127), ait inspiré le récit de la jeunesse du fils d'Amphitryon, élevé auprès des troupeaux de son père (128) ; il semble aussi qu'il ait lui-même beaucoup insisté sur le rôle qu'à Olympie tient Héraclès, comme fondateur du culte (129)... ce que, bien sûr, rien n'indique dans la Bibliothèque . Inversement, qu'a retenu Apollodore du héros d'Hérodore? Rien, en tout cas, de ce qui faisait l'originalité de cette conception fortement teintée de philosophie (pythagoricienne, en particulier) (130), fortement marquée par les préoccupations astronomiques (131) qui, chez son devancier donnaient aux "travaux" un symbolisme particulier. Manifestement Apollodore a opéré, non pas seulement au niveau des auteurs et des oeuvres qu'il pouvait avoir à sa disposition, mais au sein même des ouvrages qu'il consultait, une sélection de l'information qui lui était proposée: manifestement les interprétations "nouvelles" l'intéressent peu (nulle trace chez lui, par exemple, d'évhémérisme) et, si Apollodore se veut l'héritier des plus anciennes sources mythographiques, il semble bien encore qu'il se fasse le propagateur de la conception la plus archaïque, la plus traditionnelle qui soit de la mythologie. C'est ce point - fondamental - qui nous paraît l'opposer à Diodore... Ce dernier, certes, se fait un mérite d'inclure dans son histoire universelle le récit des temps légendaires, mais n'en est pas moins conscient de la difficulté d'une entreprise à laquelle se sont refusés bon nombre d'historiens avant lui. Combien, en effet, comme Ephore de Cumes, ont reculé devant ces écueils qu'énumère complaisamment l'historien sicilien: l'éloignement dans le temps qui rend le souvenir bien aléatoire, la variété et la multiplicité des dieux, héros et hommes célèbres dont il faut retrouver l'origine et, plus encore peut-être, - l'obstacle, dit-il, le plus grand et le plus déconcertant - les fréquents désaccords existant entre ceux qui ont raconté les actions et les mythes des temps primitifs (132). Il va plus loin dans la réflexion, ou, en tout cas, témoigne plus précisément de son embarras, au moment où, avant d'aborder le récit des hauts faits d'Héraclès, il éprouve le besoin de le faire précéder d'une véritable mise en garde liminaire. Nous nous permettons de traduire ici la majeure partie d'un texte, très révélateur, pensons-nous, de l'attitude d'un Grec cultivé face aux traditions de son peuple (133). Revenant sur les difficultés qui
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guettent celui qui veut rapporter les anciens mythes, Diodore estime qu'elles sont plus grandes encore lorsqu'il s'agit d'Héraclès qui, par ses exploits, a surpassé tous les hommes de son temps: "Comme l'dge reculé et le caract~re étrang~ de ces récits rendent, pour beaucoup, les mythes difficiles à éroire, les auteurs sont obligés, ou bien de passer sous silence les plus remarquables de ses hauts faits - et d'amoindrir ainsi la gloire du dieu - ou bien, n'en omettant aucun, de rendre le récit peu crédible. Car certains lecteurs, injustement, exigent la mime exactitude dans le récit des vieilles légendes et dans celui des événements de notre temps, et ceux des travaux dont ils doutent, à cause de leur grandeur mime, ils les jaugent à l'aune de leur propre vie, de sorte qu'ils évaluent la force d'Héracl~s sur le mod~le de la faiblesse des hommes de leur époque" (134). C'est ainsi le caractère exceptionnel, surhumain, des travaux d'Héraclès qui fait naître le doute, mais, pour Diodore, il ne convient pas d'appliquer au mythe "cette recherche sourcilleuse de la vérité" (135). "... En effet, au thédtre, nous savons bien que n'ont existé ni les centaures à la double nature, ni Géryon au triple corps et poUNant nous les accueillons favorablement, et en les applaudissant, nous accroissons encore la gloire des dieux. Il serait surprenant, en vérité, qu'alors qu'Héracl~s, lorsqu'il était encore parmi les hommes, a par ses épreuves, apporté la culture à un monde inhabitable, ceux-ci, oublieux des bienfaits qu'ils en ont tous reçus, dénoncent les éloges que lui ont valus ses exploits .. (il serait surprenant aussi) que nos ancitres, d'un commun accord lui aient, pour prix de sa valeur exceptionnelle, accordé l'immortalité, et que nous, nous ne conservions pas avec soin la vénération transmise par nos ancitres"... (136). Une chose, donc, est la critique du mythe, autre chose est le respect dû aux dieux (et aux ancêtres) et ce nécessaire respect fait passer au second plan la recherche même de la vérité... "Adroite candeur", estime P. Veyne, qui dans ce texte devine "la coexistence non pacifique de deux programmes de vérité, dont l'un était critique et le second respectueux" (137). Ces "deux programmes", pour nous, trouvent leur unité dans le sens même que Diodore entend donner à son ouvrage ! En effet, s'il entreprend, malgré ces difficultés dont il se dit parfaitement conscient, le récit exhaustif des actions d'Héraclès
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"selon le témoignage des plus anciens poètes et mythologues" (138), s'il apporte tout son soin à retrouver les vieilles légendes, c'est pour préserver, dit-il, le souvenir des hauts faits accomplis par les héros et les demi-dieux (qu'il distingue soigneusement), par les hommes aussi, lorsque, par leurs bienfaits à l'égard de l'humanité, ils méritent d'être honorés par des sacrifices et des offrandes, comme les dieux. La leçon du mythe est ainsi la même que la leçon de l'histoire - nous y reviendrons - elle fait partie de ce "trésor commun" que l'historien se doit de transmettre afin d'être un guide pour les hommes d'aujourd'hui (139). Dans cette optique - qu'on peut certes trouver douteuse, mais qui est celle de tout son ouvrage - on comprend mieux que la recherche d'une vérité trop rigoureuse ne soit pas nécessaire à qui rapporte les mythes; il lui arrive même, lorsque ceux-ci, précisément, ne se moulent pas parfaitement dans le modèle qui est le sien, de les qualifier "de fables parfaitement incroyables et absurdes" (140). On comprend aussi que les variantes ne l'importunent pas outre mesure et qu'il laisse souvent à son lecteur le soin de choisir comme il l'entend la version qui lui convient le mieux (141). Pour Diodore - qui en homme de son temps a pris ses distances avec les vieilles traditions - la vérité du mythe est ailleurs: la fable est à interpréter (142). On croit savoir, d'ailleurs, sur quelles théories reposait cette interprétation: il s'en expliquait, semble-t-il, dans son sixième livre, en grande partie perdu, et approuvait - selon le témoignage d'Eusèbe de Césarée - la doctrine d'Evhémère le Messénien opposé à "Homère, Hésiode, Orphée et d'autres encore" qui avaient imaginé, sur les divinités, des mythes où domine le merveilleux. Diodore faisait sienne, en particulier, la distinction entre des dieux "éternels et immuables" tels le soleil, la lune ete... et les autres dieux dont il disait, comme Evhémère, qu'ils sont nés sur la terre et que, "pour leurs bienfaits envers les hommes, ils ont obtenu une gloire immortelle". A ce titre, bien sûr on comprend "qu'Héraclès, Dionysos, Aristée et tous les autres qui leur ont ressemblé", l'aient tout particulièrement intéressé (143). Il est possible, d'ailleurs que, dans cette voie, Diodore n'ait fait que suivre Timée de Tauroménion dont on sait qu'il fut, avec Ephore, l'une de ses sources favorites (144). A en croire Polybe, en effet, l'histoire de Timée est "remplie de songes, de prodiges, de récits incroyables, en un mot de superstitions grossières et de contes de bonnes femmes" (145). Or, le même historien sicilien on le sait, donnait des mythes une interprétation rationnelle. C'est, en tout état de cause, ce que tente de faire Diodore : Si le mythe prétend que Dionysos est né de la cuisse de Zeus,
24S c'est parce que la contrée qui l'a vu naître s'appelait Méras et que méros, en grec, signifie la cuisse ... De même les fameuses pommes d'or des Hespérides pourraient bien n'être (par la vertu d'un jeu de mot analogue sur le double sens de JLiiAa) que de vulgaires troupeaux de brebis l (146). Autre procédé: si on a pu raconter qu'Atlas avait chargé Héraclès du fardeau du monde, c'est qu'en réalité il lui avait enseigné des connaissances astronomiques (147)... Ainsi disparaît encore le monstre triple d'Hésiode (et d'Apollodore () : Héraclès, en fait, s'est battu en combat régulier contre les trois ms de Chrysaor, un roi d'Ibérie ainsi nommé à cause de ses richesses (148). D'une façon plus générale, d'ailleurs, c'est à la tête d'une puissante armée que le héros parcourut le monde "pour faire du bien aux hommes" et c~ sont les poètes qui, habitués "à raconter des merveilles", ont prétendu qu'Héraclès avait exécuté .seul et sans armes ses travaux tant célébrés (149). Rationalisation ou mystification '1 Ce qui nous importe ici c'est que le mythe, dépouillé "du melVeilleux à l'ancienne", peut désormais passer pour de l'histoire (150). Et nous retrouvons là, la différence fondamentale entre Apollodore qui simplement expose, raconte (ou résume) le mythe, se satisfait - et même recherche - les versions les plus archaïques, refuse toute interprétation nouvelle et Diodore pour qui le mythe doit se plier au projet historique qui l'habite, ce qui ne peut aller sans quelque "rhabillage" scientifique ou pseudo-scientifique. Dira-t-on qu'il y a, entre leurs deux discours toute la différence que mettaient les Grecs entre le mQthos et le logos '1 Ce qui est sûr, c'est que Diodore veut convaincre. L'histoire pour lui a une raison d'être: "prétresse de toute vérité... métropole de toute philosophie ", elle doit ''former les moeurs en vue du beau et du bien" (151). Le modèle proposé, est, bien sûr, celui des héros du passé, qui, comme Héraclès justement (ont) "supporté, pendant tout le temps passé parmi les hommes des épreuves et des dangers considérables et continuels de sorte que, pour (leurs) bienfaits en faveur du genre humain, (ils) obtinrent l'immortalité" (152)... TI est aussi "celui des hommes de valeur qui se voient accorder les honneurs héroïques ou divins... et dont l'histoire immortalise les nobles actions" (153). "La vie d'un homme n'est qu'un moment de l'éternité, l'homme passe et le temps reste" (154). Et c'est à faire revivre les actes de ceux qui surent employer leur vie à de belles actions que se consacrera Diodore, de sorte que celles-ci, "resteront éternellement dans la mémoire, proclamées par la bouche divine de l'histoire" (155).
246 Enonc~ dès l'introduction du premier livre, ce thème se retrouve, comme un leit-motiv tout au long de l'oeuvre. Et toujours Héraclès est la référence obligée... En contre-point d'ailleurs (à moins de penser qu'Héraclès n'est qu'un prétexte !) un de ces "hommes de valeur" que la renommée arrachera à la mort: "Carus C~sar divinisé par ses exploits"... C'est lui qui, reprenant l'oeuvre d'Héraclès, réussit à réduire Alésia, fondée par le héros, mais demeurée libre et imprenable jusqu'à ce qu'il la soumette, avec le reste de la Celtique, à la puissance des Romains (156)... C'est lui encore qui, alors que "ni Dionysos, ni Héraclès, ni aucun souverain" n'avait jamais porté la guerre dans "l'île Britannique", réussit à subjuguer l'île, dompta les Bretons et les força à payer tribut" (157). - fcitou Kalaapoc- TOÜ Btà Ta ~EOot' T(A)V n~fXI)v OEOÜ npOCJa'Yopt: ot'. - fcitot' Kaïaap il Btà T?Jç n~Et~ btovOJLaaOt:k Ek~ Deux fonnules jumelles qui ponent César au rang des dieux, qui mettent le mythe au niveau de l'histoire. Notre problème n'est pas ici de savoir ce que l'histoire peut perdre dans l'aventure. En revanche, il nous importe de reconnaître ce qu'y gagne le mythe (158) : un surcroît de sens - voire un nouveau sens - et, puisque la "vérité" n'est plus en lui, nous l'avons vu, mais dans la leçon dont on le fait porteur, nous savons désonnais en quel sens nous pouvons interroger le témoignage de Diodore : non pas pour retrouver, dans les pages consacrées à Héraclès, le souvenir du mythe primitif - ou du moins archarque - celui que précisément s'attache à restituer Apollodore -, mais bien plutôt pour y lire les traces des dérivations imposées par l'histoire... Si le détour a pu paraître long, il était, je pense, nécessaire.
u9m
Avant de retrouver Héraclès et ses fabuleux troupeaux sur les routes siciliennes, tel que le donnent à voir Diodore et Apollodore, il faut dire quelques mots encore d'une différencegéographique celle-ci - qui contribue à individualiser le récit que chacun d'eux fait de ce retour. Nous avons souligné, déjà, la place que, chez Diodore, occupe le dixième exploit d'Héraclès (159). Il est manifeste que ce qui intéresse l'historien sicilien, ce sont les aventures occidentales du héros et, s'il passe rapidement sur les travaux proprement grecs, il donne aux deux dernières conquêtes terrestres, à celles des boeufs d'Erythie sunout, de tels développements qu'elles se transfonnent en véritable périple de la
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Méditerranée occidentale, qu'elles prennent en charge, faut-il ajouter également, toute la symbolique des "travaux"...
Apollodore, pour sa part est loin d'accorder une telle importance à cet exploit, mais curieusement, chez lui aussi, un épisode retient particulièrement l'attention: la recherche du baudrier d'Hippolyte, la reine des Amazones (160). Sans développer un récit qui ne nous intéresse que par la position "symétrique" qu'il paraît occuper dans les préoccupations de l'auteur, il faut bien remarquer que les aventures d'Héraclès à Paros, puis en Mysie, puis sur les bords du Thennodon où vivent les Amazones, à Troie où le héros délivre Hésione du monstre marin (161), à Thasos, à Thoroné enfin, dessinent elles aussi un véritable périple, une sorte de geste de la Méditerranée orientale. n faut bien remarquer encore que, chez Apollodore, c'est dans l'Amazonomachie qu'Héraclès est donné comme héros voyageur et - mais dans une moindre mesure, car le héros d'Apollodore, proche encore de celui d'Homère reste assez brutal-civilisateur. Cette prédominance de la Méditerranée orientale dans la Bibliothèque n'affecte pas seulement la légende héracléenne. Elle apparaît non moins clairement dans la fréquence avec laquelle sont évoqués, dans l'oeuvre d'Apollodore, les pays non grecs. Seuls pays occidentaux mentionnés: la Sicile, l'Etrurie, la Sardaigne (avec respectivement 3, 2 et 1 occurrences), alors que l'Egypte est citée 10 fois, la Libye 8 fois, etc... (162). L'Espagne, quant à elle, apparaît dans la mention de Gadès (II, 106) et Tartessos (II, 107 et II, 109), à propos des aventures occidentales d'Héraclès, précisément. Sur ce point encore l'étude des discours rapportés - donc de l'inspiration avouée - paraît d'une remarquable cohérence avec l'ensemble du discours mythique : Lorsqu'il parle de l'Inde ou de l'Ethiopie, Diodore utilise, évidemment le témoignage de ceux que l'Antiquité considérait, comme des spécialistes de ces régions: pour l'Inde, Mégasthènes qui fut au service de Séleucos Nicator et inspira aussi Strabon (163), pour l'Ethiopie, Agatharchide de Cnide (164) etc... Loin de moi, donc, l'idée de dire que Diodore se refuse à utiliser les sources purement grecques ou gréco-orientales, son admiration pour Ephore prouve le contraire de même que le rôle considérable que tiennent, dans son oeuvre , ceux qui accompagnèrent Alexandre dans ses campagnes, ou ceux qui, par la suite, furent les chroniqueurs de ses succès
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(165). Il n'en est pas moins vrai que, dès qu'il touche à la Méditerranée occidentale, son inspiration principale paraît bien lui venir, pour l'essentiel, de Timée de Tauroménion,. qu'il préfère, de loin, à Philistos ou à Antiochos de Syracuse, et ce, nous avons pu le constater, même lorsqu'il traite de sujets mythologiques. Encore une fois Apollodore apparaît bien différent. La représentation cartographique situant - autant que faire se peut! - les auteurs ou oeuvres mentionnés dans la Bibliothèque est, sur ce point éloquente (166) : un seul occidental apparaît : Stésichore d'Himère (2 citations), encore n'est-il pas nommé au sujet de mythes occidentaux (167); tous les autres appartiennent à la Grèce propre, égéenne ou asiatique. Pour la période hellénistique on remarque l'importance de Rhodes (Apollonios et Castor), l'importance aussi d'Alexandrie où ont vécu, à un moment ou à un autre, non seulement Démarate (dit d'Alexandrie), mais aussi Apollonios qui y fut bibliothécaire, Denys de Mytilène et probablement Castor de Rhodes. S'il est vrai - mais nous nous permettons d'en douter (168)qu'Apollodore appartient au second siècle de notre ère, cette forte emprise d'Alexandrie, de sa Bibliothèque, conservatoire de la culture grecque, ne laisse pas d'être étonnante. De tous les auteurs cités par Apollodore, seul Castor de Rhodes (contemporain de Cicéron et de Jules César) semble avoir été attiré dans l'orbite de Rome (il aurait même été surnommé "Philoromaios"). Encore une fois, le monde d'Apollodore est bien différent de celui de Diodore qui dit avoir trouvé, grâce à sa bonne connaissance de la langue latine, grâce aux rapports fréquents qu'ont les Romains avec la Sicile, l'essentiel de sa documentation à Rome (169). On comprendra aisément, de surcroît, qu'il soit plus prolixe qu'Apollodore lorsqu'il rapporte les aventures occidentales d'Héraclès.
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Fig. 23
Auteurs et oeuvres nommés dans la Bibliothèque. tentative de cartographie
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DEUXIEME CHAPITRE: HÉRACLES ET ÉRYX:
LE RÉCIT
Dans la légende constituée, la rencontre, en Sicile, d'Héraclès et d'Eryx est l'un de ces "accidents" - liés à la possession des boeufs de Géryon - qui jalonnent le retour du héros depuis la lointaine Erythie jusqu'à Mycènes où il rapporte à Eurysthée le bétail fabuleux. n convient donc, dans un premier temps, de situer le récit dans ce contexte du voyage vers l'Ouest que· représente le dixième des travaux d'Héraclès tant pour Apollodore que pour Diodore de Sicile.
2·1 Le voyage vers l'Ouest Pour Apollodore, la quête des boeufs de Géryon (170) n'est qu'un exploit parmi les autres, à ceci près qu'il aurait dû être le dernier, si Eurysthée, disqualifiant deux d'entre eux, n'avait pas imposé de surcroît la recherche des pommes des Hespérides et la descente aux Enfers pour en ramener Cerbère. Erythie, but lointain de l'expédition, est située, comme il se doit, en Extrême-Occident, près d'Océari : 'ChcEavou nlTJC7{ov JCE\lLtVTJ et, comme l'avait fait déjà Phérécyde, Apollodore identifie l'île de Géryon avec l'ancien comptoir phénicien de Gadeira (171). Les protagonistes du drame sont sommairement décrits. Géryon, le tricéphale d'Hésiode (172), est devenu - Stésichore, déjà, l'avait ainsi décrit - un monstre triple: ses trois corps, réunis seulement au niveau du ventre (yaO'T~p), se séparent à nouveau à partir du flanc et des cuisses (173). Ses boeufs sont de couleur pourpre et Eurytion les garde, avec l'aide d'Orthos, le chien à deux têtes qui, comme chez Hésiode, est né d'Echidna et de Typhon (174). Pour les rejoindre Héraclès traverse l'Europe... à moins qu'il ne faille voir dans ce pays encore "sauvage" - c'est du moins ce que propose F. Clavier (175) - l'île de Crète ! Convenons que, si du point de vue stratégique, le point de départ peut sembler meilleur, il ne s'impose pas par sa logique (la Crète serait-elle plus "sauvage" que "l'Europe" ?) et que la correction peut paraître inspirée surtout par le souci de faire
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coïncider - mais le faut-il vraiment? - le récit d'Apollodore et celui de Diodore. Après l'Europe sont cités tr~s rapidement la Libye, Tartessos (et les deux colonnes plantées par H&acl~s, en mémoire de son voyage, aux limites de l'Afrique et de l'Europe) et c'est, nous l'avons vu déjà, dans la coupe du Soleil que le héros traverse l'Océan pour gagner Erythie, dans cette même coupe qu'une fois sa mission accomplie, il regagne Tartessos avec le troupeau que Géryon n'a pu retenir. Le retour d'Héracl~s est aussi rapide que son voyage aller. Il traverse "le pays d'Abdère", en Ibérie selon toute vraisemblance, (176), tue Ialébion et Dercynos, fils de Poséidon à son passage en Ligurie (177), se rend en Tyrrhénie, et déjà il est à Rhégion. C'est alors que l'escapade d'un de ses taureaux conduit le héros à Eryx, seul épisode sicilien du retour. A peine la bête est-elle récupérœ qu'elle est conduite, avec les autres, "vers la mer ionienne". Après de nouvelles difficultés en Thrace où Héra a dispersé son troupeau et où le héros a maille à partir avec le Strymon - une anecdote qui ne paraît être là que pour expliquer comment le fleuve, autrefois navigable, est devenu impraticable - Héraclès ramène celles des bêtes qu'il a réussi à rassembler à Eurysthée. Elles seront sacrifiées à Héra. Les autres resteront en Thrace et y retrouveront l'état sauvage. . Un périple circumméditerranéen, donc, aux étapes on ne peut plus rapides: les seuls épisodes un peu développés sont l'épisode de la coupe d'Hélios, où, comme chez Homère, Héraclès affronte les dieux (178) et l'intermède sicilien où le héros combat un roi indigène, fils de Poséidon. Dans le même sens est mentionnée encore la lutte contre les géants ligures (donnés eux aussi comme fils de Poséidon) et contre la nature hostile du pays thrace (le Strymon). Pour Diodore (179), c'est aussi sur les côtés de l'Ibérie, baignées par l'Océan, que paissent les vaches de Géryon. Mais l'ennemi s'est transformé: non plus un monstre triple, mais trois guerriers "commandant trois armées séparées" (180). Ils sont fils du roi d'Ibérie Chrysaor "ainsi nommé à cause de ses richesses" (181). C'est donc à la tête d'une armée que les affrontera Héraclès, qu'il soumettra l'Ibérie et emmènera "ces fameux troupeaux de vaches"... Il n'y a plus place dans cette histoire pour la descendance monstrueuse de Phorkys, Hésiode est bien loin, de même que tous ceux qui, comme Stésichore, mentionnaient le geste agressif du héros contre les dieux, Hélios ou Océanos, et sa traversée magique dans le dépas du Soleil.
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En revanche, le voyage s'est prodigieusement enrichi ; c'est bien simple, Diodore, sur les pages qu'il consacre au récit des travaux d'Héraclès en réserve la moitié à la seule expédition contre Géryon. Le héros part de l'île de Crète, où il rasssemble son armée (et purge l'ne de ses bêtes féroces : ours, loups et serpents), il relâche ensuite en Libye et, de la même façon, "transforme la région en une terre fertile et Prospère" ; c'est là encore qu'il provoque en combat Antée "qui faisait mourir tous les étrangers qu'il avait vaincus", là enfin qu'il punit de mort bien d'autres despotes (182). Le héros se rend ensuite en Egypte et tue le roi Busiris, qui, comme Antée, "massacrait tous les étrangers arrivés dans le pays" (183). Retraversant de part et d'autre la Libye, il fond~ Hécatompyle et, arrivé auprès de l'Océan qui baigne Gadès, il élève deux colonnes sur les bords.de l'un et l'autre continents" (184). Ces colonnes sont certes, pour Héraclès, le souvenir immortel de son exPédition, mais elles font aussi partie de son oeuvre d'ordonnancement du monde: ou bien elles marquent le passage étroit laissé par le héros entre deux continents avant lui trop distants; ou bien au contraire elles témoignent du percement du détroit par Héraclès. Diodore ne choisit pas entre ces deux version de la tradition - chacun, dit-il une fois de plus, "est libre d'adopter l'une ou l'autre de ces deux opinions" (185); il rappelle simplement qu'en Grèce, déjà, Héraclès avait, de la même façon, aménagé la nature. Les fils de Chrysaor tués en combat singulier et l'Ibérie soumise et "donnée aux plus vertueux des indigènes" (186), Héraclès poursuit sa politique de conquête, parcourt la Celtique, "abolit les coutumes sauvages, et entre autres celle de tuer les étrangers", fonde Alésia, châtie les brigands des montagnes et assure la sécurité des passages alpins (187) ; son arrivée en Ligurie est, pour Diodore, l'occasion de décrire la rudesse de la nature et des moeurs indigènes et, si Héraclès ne fait que passer au "pays des Tyrrhéniens", il s'arrête longtemps sur les bords du Tibre, et, accueilli par les indigènes du Mont Palatin, fonde pour eux les cultes de l'Ara Maxima (188). La campagne de Cumes est le théâtre de plusieurs épisodes de ce retour mouvementé : certains mythologues dont l'autorité a, dit Diodore, été suivie par l'historien Timée, situent là, dans les champs Phlégréens, une Gigantomachie, occasion pour Héraclès, de pacifier, une fois de plus, le pays qu'il traverse (189). D'autre part, de grands travaux, autour du lac Averne, conservent encore le souvenir du héros. Enfm, après quelques aventures mineure -,
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Fig. 24
La conquête des boeufs de Géryon chez Apollodore et Diodore de Sicile essai de représentation cartographique
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un taureau s'ech.pp8
~......~v.......__c_o....nt~~t~~v,~
1 : Le récit d'Apollodore, II, 106-112
= II, 5, 10.
Itinéraire (largement hypothétique) d'Héraclès. Les termes géographiques soulignés sur la carte figurent dans le texte d'Apollodore. Pour la localisation d'Abdère, nous suivons les indications de STRABON (III, 4, 3) plus conformes à la logique du texte d'Apollodore que la mention, peut-être trop vague simplement, de STEPHANE DE BYZANCE, S.v. 'A6B~pa qui la situe "près de Gadès".
Colonnes
Ub~VHér.aClèS ~
--
.. parti de
a tUé. Antée-p
dë....eloppè l'agriculture en ~. tue BuslrlS en ~ tonde ~dansle~tl
2: Le récit de Diodore, IV, 17, 1 à 25, 1.
voir figure 25
Itinéraire (largement hypothétique) d'Héraclès. Les termes géographiques soulignés sur la carte figurent dans le texte de Diodore.
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mais bien étranges - au pays des Poseidoniates, puis aux confins de Rhégion et de Locres, Héraclès décide de passer en Sicile avec· ses troupeaux. La traversée n'est donc en rien accidentelle pour Diodore et c'est un véritable tour de l'île qu'entreprend le héros; tour de l'île après lequel il repasse en Italie o~, seul, mérite d'être rapporté le meurtre de Lacinios qui voulait lui voler ses vaches, et celui, involontaire, de Crotone, épisodes fondateurs pour l'auteur sicilien, et des cultes d'Héra lacinienne et de la future cité coloniale grecque. Le retour en Grèce n'intéresse pas Diodore ; son héros fait - toujours à pied - le tour de la mer Adriatique, entre en Grèce par l'Epire, d'où il regagne le Péloponnèse. n n'est pas question des divagations du troupeau en Thrace et rien n'est dit des quelques vaches avec lesquelles, probabkmen~lehérosaregagnélaGr~e!
Nous reviendrons, bien sûr, sur le sens on ne peut plus clair qu'accorde Diodore à ce véritable périple de la Méditerranée occidentale, nous nous contenterons de retenir ici l'inflation d'un récit qui, sobre et allusif chez Apollodore, voit, chez Diodore, une multiplication des épisodes opposant le héros aussi bien à une nature qu'il doit discipliner qu'à des êtres dont Apollodore soulignait la double filiation à la fois autochtone et divine et qui, pour Diodore, ne sont plus que des Barbares. C'est cette même inflation, cette même charge idéologique dont témoignent les aventures siciliennes d'Héraclès. Nous croyons nécessaire d'en donner ici une traduction.
2-2 Le récit Récit d'Apollodore II, 110-111 = II, 5, 10. "... Ayant traversé le pays d'Abdtre, il (Héraclts) parvint en Ligurie où lalébion et Dercynos, fils de Poséidon, tenttrent de dérober ses boeufs, mais il les tua et reprit son chemin vers la Tyrrhénie. A Rhégion, un taureau s'échappa du troupeau, rapidement plongea dans la mer et traversa à la nage jusqu'en Sicile. Aprts avoir parcouru la région voisine - région qui depuis a été appelée Italie (car les Tyrrhéniens nommaient le taureau: italos) - il aborda dans la plaine d'Eryx qui régnait alors sur les Elymes. Eryx, le fils de Poséidon, mêla le taureau à ses propres troupeaux. Or Héraclts, ayant laissé la garde de ses bêtes à Héphaïstos, se Mtait d'aller à la recherche de ce taureau. Il
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le trouva parmi les troupeaux d'Eryx et, comme celui-ci refusait de le lui rendre s'il ne triomphait de lui dans un combat, Hérac~s le terrassa par troisfois (à la lutte), le tua et prenant le taureau il le ramena avec les autres et se dirigea avec l'ensemble du troupeau vers la mer Ionienne". Récit de Diodore de Sicile, IV, 22,6 à 23,4.
"... Lorsqu'Héraclès arriva au détroit - là où la mer est la plus étroite - il fit passer son bétail en Sicile. Quant à lui, il saisit la corne d'un taureau et traversa à la nage le passage dont la largeur à cet endroit, est, au dire de Timée, de treize stades. Puis, désirantfaire le tour de l'fIe entière, il marcha du cap Pélore à Eryx. Alors qu'il longeait le littoral, les mythologues disent que les nymphes ontfait jaillir pour lui des sources chaudes, afin qu'il pat se reposer des fatigues de son voyage. Deux d'entre elles, appelées respectivement Himère et Egeste, tiennent leur nom de l'endroit où se trouvent ces bains. Comme Héraclès s'approchait des domaines d'Eryx, celui-ci - fils d'Aphrodite et de Boutas, un roi du pays- le provoqua au combat. L'émulation entrafna les rivaux à proposer comme enjeu de leur lutte, Eryx, son royaume et Héraclès, ses boeufs. Dans un premier temps, Eryx s'indigna, car le bétail lui paraissait d'une valeur bien inférieure à celle de son royaume, mais lorsqu'Héraclès, répondant à ses arguments, lui fit valoir que, s'il perdait ses vaches il serait, du m2me coup, privé de l'immortalité, Eryx accepta les conditions du marché. Il combattit, fut vaincu et renonça à ses territoires : Héraclès, cependant, rendit la région aux indigènes et convint avec eux qu'ils pourraient en recueillir les fruits jusqu'à ce que quelqu'un de sa descendance apparaisse parmi eux et leur en demande la restitution. Ce qui arriva, effectivement, bien des générations après, lorsque Dorieus, le Lacédémonien, arriva en Sicile, et récupérant le pays, fonda la ville d'Héraclée. Comme la cité se développait rapidement, les Carthaginois - qui la jalousaient et craignaient en même temps qu'elle ne devint, un jour, plus forte que Carthage, et ne menaçllt la souveraineté des Phéniciens - marchèrent contre elle avec des forces considérables, la prirent d'assaut et la rasèrent jusqu'au sol".
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Mais ce sont là, dit Diodore, des problèmes sur lesquels il conviendra de revenir au moment voulu... lorsqu'il traitera, bien sûr, non plus des traditions légendaires, mais de l'histoire de la Sicile. Sans traduire la suite du voyage d'Héraclès au pays de Diodore, il faut cependant faire état des aventures ttès importantes qui marquent son passage dans la région Sud-Est de l'ile de Déméter. Dans la région de Syracuse, il apprend le récit de l'enlèvement de Coré-Perséphone - la- version sicilienne sans aucun doute - et, près de la source Cyané, fonde les cultes que rendront désormais les Syracusains aux deux déesses; dans l'arrière pays il se heurte aux Sicanes, les tue en grand nombre et, parmi les morts, se trouvent des chefs auxquels on rend, à l'époque de Diodore encore, les bonneurs héroïques; dans la campagne de Léontinoi il laisse des souvenirs éternels de son passage, mais c'est la petite ville d'Agyrion, lieu de naissance de Diodore, qui apparaît comme une étape décisive dans le voyage et la carrière - du héros : là encore, il fonde des cultes : celui d'un héros, Géryon, dans une enceinte encore vénérée des indigènes à l'époque romaine, celui de son neveu et compagnon lolaos, auquel, à l'époque de Diodore, on offre toujours de magnifiques sacrifices. C'est à Agyrion, toujours, qu'Héraclès reçoit lui-même pour la première fois, les honneurs réservés habituellement aux Olympiens. Nous ne dirons rien ici, du double culte, à la fois héroïque et divin, reçu par le fils d'Alcmène, nous aurons, par ailleurs, l'occasion de revenir longuement sur ces sacrifices, si souvent fondés par l'Alcide (190), et sur ces fêtes, qui, à Agyrion, perpétuent manifestement d'anciens rites initiatiques (191) ; nous retiendrons simplement le développement considérable que prennent, chez Diodore, ces épisodes - certes présents, mais avec une rare discrétion, chez Apollodore - qui opposent le héros à une nature hostile et à des héros indigènes. L'auteur sicilien, manifestement, exploite le thème, enfle sa signification, en multiplie les manifestations et, de surcroît, fait intervenir dans le récit - ce que ne fait jamais Apollodore - le paysage, les cultes, les traditions des fondations grecques coloniales. Le décalage est tel qu'on ne peut, à mon sens, se contenter de l'expliquer comme on le fait généralement, par la rapidité avec laquelle Apollodore, pour exposer ce dixième exploit d'Héraclès, résumerait ses sources. Il se comprend mieux, déjà, si on l'insère, comme nous l'avons fait précédemment, dans le projet général qui sous-tend et explique à la fois les deux oeuvres. Il nous a également paru
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nécessaire de tenter une approche aussi objective que possible des différences, afin d'apprécier, enfin, à sa juste mesure, le processus de transformation du mythe.
2-3 Pour une objectivation du récit Notre objectif étant de comparer, aussi méticuleusement que possible, les versions les plus significatives des travaux occidentaux d'Héraclès, nous aimerions risquer ici leur inscription dans le cadre des modèles actantiels établis par A.J. Greimas à partir des formules de V. Propp (192). Il nous semble, en effet, que cet effort classificatoire nous permettra une plus grande rigueur dans l'appréciation du rôle respectif des acteurs et des fonctions qu'ils remplissent et nous donnera de plus grandes chances de réussite, lorsque nous tenterons d'évaluer le sens des transformations. Précisons d'entrée de jeu qu'il nous paraît non moins indispensable de rester lisible, qu'en conséquence nous n'irons pas jusqu'à la mise en formule proprement dite, qui simplement remplace par des lettres (majuscules s'il s'agit d'actants et de prédicats, minuscules pour les autres articulations hypotaxiques qu'on peut être amené à introduire) les termes -eux-mêmes directement compréhensiblesdu schéma. Celui-ci, rappelons-le, répond au besoin de construire un langage descriptif simple (qui, par conséquent, permette, justement, la comparaison de modèles). TI fIXe le nombre des actants à 4 : Sujet Objet Destinateur Destinataire auxquels s'ajoutent 2 circonstants Adjuvant Opposant (193). Ces deux actants un peu particuliers (et parfois absents) recouvrent deux sortes de fonctions assez distinctes: les unes "qui consistent à apporter de l'aide en agissant dans le sens du désir ou en facilitant la communication" (l'adjuvant), les autres "qui, au contraire, consistent à créer des obstacles en s'opposant soit à la réalisation du désir soit à la communication de l'objet" (l'opposant) (194). Deux exemples sufftront à éclairer ces brefs éléments de définition: ainsi dans l'énoncé
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"Eve donne une pomme à Adam" · Eve est à la fois actant-sujet et actant-destinateur · La pomme est l'actant-objet · Adam est l'actant-destinataire les quatre actants sont ici syncrétisés sous la forme de' trois acteurs (195). Dans le récit, plus proche des nôtres, qu'est la quête du Graal, les autres actants, au contraire, sont articulés ainsi (196) : Sujet
héros
Objet
Saint Graal
DestinateUr
Dieu
Destinataire
humanité
=
(le signe traduit la colTélation ou l'équivalence)
A.J. Greimas est ainsi amené à définir un modèle actantiel mythique qui, dit-il, "semble posséder, en raison de sa simplicité, et pour l'analyse des manifestations mythiques seulement, une certaine valeur opérationnelle" (197). C'est ce schéma que nous ' transcrivons ici: Destinateur - - - ) objet - - - ) destinataire
t Adjuvant - - - ) sujet ( - - - opposant S'il est évident que, dans les récits qui nous intéressent, Héraclès est l'actant-sujet, il est non moins évident que l'actant-objet est, dans un cas, les merveilleux troupeaux d'Erythie (qui pour la nécessaire objectivation du texte deviendront simplement "les troupeaux", ou "les boeufs"), dans l'autre, les pommes d'or des Hespérides; si l'on peut, dans tous les cas, considérer que le destinateur est Eurysthée, puisque c'est lui qui ordonne, lui qui choisit les "travaux" (198), on pourra voir évoluer dans le temps le (ou les) adjuvants, le (ou les) opposants, on pourra aussi voir le locuteur (ou le scripteur) dire, ou taire, oublier peut-être même le destinataire... autant de
260
variantes significatives pour nous, et c'est à les mettre en valeur que nous jugerons surtout de la vertu opératoire de la méthode de A.J. Greimas. Essayons, d'abord, pour mémoire, d'inscrire, dans le cadre ainsi défini nos premiers témoignages: ceux d'Homère et d'Hésiode. Témoignages partiels en ce sens que ni l'un ni l'autre, ne peuvent apparaître comme des récits. Dans la Théogonie d'Hésiode, seules des incises, à propos de tel ou tel monstre mentionné dans les généalogies, rappellent qu'ils furent occis par Héraclès et jamais il n'est question de retracer dans l'ordre et de façon cohérente les faits et gestes d'un héros. Enfm, si la lutte contre Géryon apparaît à plusieurs reprises, les pommes d'or des Hespérides, nous l'avons vu, ne sont jamais mises en rapport avec Héraclès et leur conquSte n'apparaît donc pas comme l'une des épreuves imposées au héros. Le statut des textes concernant Héraclès dans les poèmes homériques est assez proche - parce que tout aussi allusif - le plus complet est, ici, dans la bouche d'Athéna, l'occasion d'un reproche à l'égard de Zeus son père qui apparemment oublie les services qu'elle lui a rendus. Des "travaux" ou épreuves du héros, constamment assisté par la déesse, un seul - nous l'avons vu aussi - est mentionné: la capture de Cerbère, le chien du cruel Hadès. Dans l'un et l'autre cas, le locuteur n'a donc pas pour but de raconter un épisode, une séquence du mythe et le sujet n'est, pour leur récit, que l'acteur secondaire d'un ensemble qui ne le concerne pas vraiment.
La conquête des boeufs de Géryon chez Hésiode (199) destinatew : non mentionné - - ) ~ :
les boeufs de - - )
Géryon Î Adjuvant: - - ) non mentionné
~:
Héraclès
(--
destinatajre : non mentionné (cependant mention du lieu: Tirynthe) opposants : Géryon Orthos Eurytion
On remarquera le silence - peut-etre fortuit, peut-etre dû au statut particulier du texte - quant au destinateur et au destinataire. La mention du lieu peut évidemment faire penser à son roi Eurysthée, mais il n'y a, à cette interprétation, aucune nécessité.
261
L'épithète de "sainte Tirynthe" pourrait s'appliquer aussi bien à un sanctuaire et donc à Héra. En ce qui concerne les circonstants, l'un d'entre eux est absent (l'adjuvant), les opposants, au contraire, sont multipliés et font apparaître une double triplicité : - celle de Géryon, d'abord, le monstre aux trois têtes - celle des défenseurs du troupeau ensuite : - Géryon le propriétaire - Le chien de garde Orthos - Le bouvier Eurytion. On remarque les très fortes indications spatiales de ce texte d'Hésiode: nous l'avons vu c'est uniquement par son lieu de résidence que le destinataire peut être appréhendé : mais surtou~ le lieu de l'épreuve, l"'ailleurs" du mythe nous paraît fortement connoté: - Au-delà de l'illustre Océan - Après avoir franchi le cours d'Océan - Dans Erythie qu'entourent les flots - Dans leur parc brumeux connotations on ne peut plus révélatrices dans l'imaginaire des Grecs et qui nous confirment dans notre conviction d'une localisation dès le départ occidentale et océanique de la quête des boeufs de Géryon. Ce n'est pas vraiment une comparaison que nous tenterons d'établir avec le texte d'Homère (200). Celui-ci, en effet, ne mentionne ni la conquête du troupeau, ni la lutte contre Géryon, mais il donne, pour l'ensemble des "Travaux", un canevas qui n'est pas sans intérêt. Destinateur Eurysthée
)
~
---) destinataire
indéterminé et pluriel "les travaux"...dont Cerbère
non mentionné
t adjuvants ) Athéna (dans tous les cas) + Hennès (pour Cerbère)
~
Héraclès
(---
Owosants
non mentionnés (Hadès. le Styx)
Deux des actants n'ont pas changé: le sujet et le destinateur. et. si l'objet est ici aussi pluriel qu'indétenniné. rien
262
n'est dit du destinataire. Homère, pour la première fois mentionne l'aide divine à Héraclès: celle d'Athéna dont on ne saurait oublier qu'elle est l'envoyée de Zeus son père. Enfin, on pourrait être tenté à la lecture d'Homère et d'Hésiode de construire, pour l'ensemble des travaux d'Héraclès, un schéma globalisant et qui conviendrait au témoignage des deux auteurs (201).
Destinateur - - -) les dieux
~ Hébé
Adjuvants Zeus
-
---)
Destinataire Héraclès
<
o.p,posants
i
)
Héraclès
Héra
L'actant-sujet: le héros ici comme dans bien des contes est en même temps l'actant-destinataire, puisqu'il reçoit l'objet de sa quête, récompense de ses épreuves et qu'il épouse Hébé qui, avec la Jeunesse éternelle, lui confère la commensalité chez les Immortels. Si nous passons maintenant aux récits plus élaborés des mythographes, il faut songer que le schéma simple qui résume une situation donnée (ou encore une séquence du mythe) est, dans le cas de la légende d'Héraclès, soumis à répétition. Les douze "travaux" ,nous le savons bien, n'épuisent pas le nombre des épreuves auxquelles fut soumis le héros. Mieux encore, la même séquence "épreuve" (pour nous la conquête des boeufs de Géryon ou la quête des pommes d'or) comporte en elle-même des redondances. A.J. Greimas distingue d'ailleurs, dans la même séquence, trois épreuves successives : - l'épreuve "qualifiante" - l'épreuve "principale" - l'épreuve "glorifiante". Si les noms - fonctionnels· affectés à ces trois temps sont, pour nous trop étroitement liés au conte folklorique, il nous paraît, en revanche, opératoire de reprendre, pour l'analyse du récit des mythographes, les trois étapes ainsi définies. La première
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consisterait ainsi - en ce qui concerne la dizième épreuve - à atteindre Erythie où sont gardés les boeufs de Géryon, objet de la quête du héros ; la deuxième serait plus précisément la conquête des troupeaux; la troisième, enfm, marquée par le retour dans le Péloponnèse, aurait pour but de ramener à Tirynthe le bé~l ainsi enlevé. Le mythe des pommes d'or pourrait, lui aussi -' chez Apollodore du moins - se décomposer de la même façon: après la recherche du merveilleux jardin, Héraclès se fait en effet remettre les pommes d'or et, dans un troisième temps, s'en va rendre aux dieux eux-mêmes les fruits de l'immortalité. Nous avons donc, pour les deux travaux occidentaux d'Héraclès construit de tel schémas aetantiels à partir des textes de Diodore et d'Apollodore. Leur lecture et la comparaison des tableaux ainsi obtenus (IV à VIII) a certainement pour intérêt premier - et quelque peu inattendu pour nous - la mise en évidence d'éléments apparemment hétérogènes. Il nous a paru, en effet, rigoureusement impossible d'intégrer dans ces récits ainsi "schématisés" un épisode qui pourtant revêt chez les deux mythographes une importance certaine : la mise en place de ces bornes qui, pour le fils d'Alcmène, marquent la fin de ses aventures, de ces fameuses colonnes d'Héraclès. A cela on peut trouver une explication : si pour les Grecs qui en ont fait le récit ces colonnes avaient leur place dans le mythe d'un Héraclès voyageur, civilisateur, si, au niveau de la réinterprétation - disons coloniale - du mythe, elles n'ont rien d'inattendu, il semble bien qu'il n'en soit pas de même dans le schéma primitif où rien n'impose ou même n'explique leur présence. Sauf à les interpréter comme le simple corollaire d'une réinterprétation "historique" du mythe, il faut donc voir en elles et, nous le savons, de nombreux textes nous autorisent à le faire (202) - un emprunt à une sphère extérieure au mythe grec, à celui-ci du moins... Ainsi, pensons-nous, se révèle, au plan des structures mêmes du récit, la collusion entre l'Héraclès des Hellènes et le tyrien Melqart dont les temples, tant en Orient qu'en Occident étaient flanqués de ces fameuses colonnes. Mais les schémas actantiels construits d'après Apollodore et Diodore, s'ils ont dans l'ensemble même structure, parlent surtout par les différences qu'ils font apparaître: différences entre deux épisodes de la légende d'une part, entre deux récits mythiques d'autre part. L'épreuve des Hespérides, surtout, témoigne d'importantes divergences entre les deux auteurs. Chez Apollodore - dont on rappellera qu'il passe pour reprendre ici ce que dans son dixième livre avait écrit Phérécyde de l'aventure (203) - le récit de
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l'exploit a la structure attendue et nous n'y reviendrons que pour mentionner deux particularités (204) : 1. - l'importance des adjuvants "en chaîne" dans les première et deuxième étapes, adjuvants qui - et nous sommes là très proche des contes folkloriques - soit indiquent à Héraclès le chemin du merveilleux jardin où furent plantées les pommes offertes à Héra lors de ses noces avec Zeus, soit suscitent, au profit du héros, l'aide - plus ou moins sincère d'ailleurs! d'Atlas pour l'épreuve principale. 2. En ce qui concerne les opposants, ils sont, pour les plus importants d'entre eux (les deux "africains" Antée et Busiris), ceux qu'affronte le héros, chez Diodore, lors de la première étape de la dixième épreuve: le voyage vers Erythie. Si le fait témoigne d'une certaine confusion entre les deux épisodes "achevés" de la légende, il faut noter cependant que Diodore connaît manifestement la tradition suivie par Apollodore, puisqu'il commence son deuxième récit de la quête des fruits d'or en rappelant la lutte d'Héraclès contre Antée, Busiris et Emathion, roi des Ethiopiens (205). Car Diodore, curieusement, donne successivement deux récits de l'exploit chez les Hespérides (206). Dans les deux cas l'objet de la quête est interprété de façon "rationnelle" (207), et si, dans un premier temps (tableau V), le lecteur peut encore choisir entre les pommes d'or et les brebis, il n'est plus question, dans la deuxième version (tableau VI) que de troupeaux; dans les deux cas le destinataire divin est ignoré - qu'Héraclès remette tout simplement les pommes d'or (ou les brebis) à Eurysthée, ou que Diodore oublie de signaler ce que deviennent celles-ci, une fois conquises par le héros. Dans la seconde version enfin, l'auteur sicilien introduit une variante qui, pour être différente de celle d'Apollodore, n'en a pas moins la même fonction dans l'enchaînement du récit, expliquer le rôle d'Atlas comme adjuvant dans l'épreuve principale: Héraclès, ici, arrache en effet les Hespéridesdonnées comme filles d'Atlas - aux pirates qui, soudoyés par Busiris, les avaient enlevées et, ce faisant, s'octroie la reconnaissance de leur père. L'épisode, on le voit, a, de surcroît, l'intérêt de rappeler l'hostilité de Busiris, développée ailleurs dans le récit de Diodore: il témoigne enfin, comme la quête du jardin merveilleux chez Apollodore, d'une parenté thématique avec le conte folklorique qui mérite d'être signalée. Et c'est sans doute l'enseignement que nous retiendrons, surtout, de l'étude de ces trois tableaux consacrés au mythe des pommes d'or... Schémas incomplets - chez Diodore en
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particulier -, parfois tœs proches du coote, parfois d'apparence tellement arbitraire qu'on pourrait" eue ten~ d'en d61uire que
l'lD81yse apporte peu ll'~ dumydl~ (ou bitn encore qu'elle a ~~ mal appliquœ !). La ~'aveelti'sch6nas aetaDtiels ~tablis pour la dixi~me q,œuVc IÎOUSparairprouver au contraire
que, si l'exploit chez les HeSP6ides mA1lque iiihshk coh6'ence, c'est parce qu'il a~get dans une l~gende lIa tradition d'autant plus mal ~tablie qu'elle ne repose pas sur l'autori~ d'un pas~ ~s ancien (208), des th~mes folkloriques (plus r~ents g~n~alement que les th~mes proprement mythiques) et un symbolisme ~jl ~volu6t celui de l'immortalit~ conquise par la recherche de l'objet merveilleux. La structure du œcit C011'Obore ainsi l'~tudebistorique"qu'OD peut tenter du d6veloppement d'UI) mythe atte~ beaucoup plus tardivement, tant dans la littmalUre que dans l'art grec (209).
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LES POMMES D'OR DES HESPERIDES ~
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268
C'est avec une cohérence beaucoup plus forte que - dans les schémas actantiels établis d'après Diodore et Apollodore - se dessine l'aventure d'Héraclès vers l'fie rouge d'Erythie. Le récit des deux auteurs a. ici. même structure. et. si ce parallélisme confIrme. à nos yeux. le bien fondé de la méthode. c'est. plus encore. par leurs différences que "parlent" les schémas et qu'ils s'avèrent éclairants pour l'analyse du mythe (210). Chez Apollodore la quête des boeufs de Géryon. se déroule. comme nous l'avons vu. en trois temps. Le destinateur. Eurysthée est connu. le destinataire ne l'est pas moins. puisqu'il s'agit de la grande déesse d'Argos. Héra. à qui les boeufs seront sacrifIés; le schéma de l'épreuve centrale évoque de fort près celui que les allusions d'Hésiode permettent de reconstituer (211); les opposants sont les mêmes: Orthos. le chien. Eurytion le berger. le triple Géryon. enfin. qui. sur sa personne. redouble la "triplicité" de l'opposant. On notera. en ce qui concerne les étapes encadrant cette épreuve principale la symétrie apparaissant entre 1: - un adjuvant: Hélios. qui offre son dépas - pas d'opposants réels et II: - pas d'adjuvant - mais les opposants pour lesquels on peut remarquer la prégnance de l'élément "eau" : les géants ligures. comme Eryx sont, en effet. f1ls de Poséidon. le Strymon est un fleuve. Seul le taon envoyé par Héra introduit quelque trouble dans cette ordonnance où s'opposent ainsi les éléments naturels (peut-être faut-il rappeler que chez Phérécyde les dieux de la mer étaient également fortement présents. puisqu'Océanos jouait un rôle non négligeable dans l'expédition d'Héraclès) (212); l'épreuve s'inscrit ainsi dans un cadre à la fois naturel et divin. Confrontation du héros avec les dieux. certes. et le héros d'Apollodore reste en cela très proche de celui d'Homère qui blessait de ses flèches aussi bien Hadès qu'Héra (213) (ici il tend son arc contre le Soleil qui l'incommodait) (214)...Confrontation du héros avec les éléments naturels sans doute aussi. C'est bien un Héraclès "primitif' que retrouve Apollodore. On en sera plus convaincu encore après avoir examiné le schéma actantiel construit d'après Diodore. (Tableau VIII). Le sujet. Héraclès. poursuit la quête d'un même objet: "les fameuses vaches". celles-ci. peut-être. n'étant qu'un symbole. puisqu'en réalité - dit Diodore - le héros convoite les richesses de Chrysaor. Le schéma accentue cet "oubli" de l'objet même de la quête dans la mesure où. si le destinateur reste Eurysthée. le destinataire n'est même plus mentionné et Héraclès conduit ses
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troupeaux "vers le Péloponnèse", sans que Diodore s'occupe aucunement de leur destin. Frappe encore l'atrophie de l'épreuve principale - le coeur même du mythe -. Si la triplicité subsiste, elle n'est plus que celle des fils de Chrysaor ; chien et berger ont disparu, comme d'ailleurs le monstre lui-même. Frappe enfm, en revanche, l'hypertrophie des étapes 1 et III (le "voyage") et leur caractère interchangeable. Peut-on d'ailleurs parler d'adjuvants, quand il n'est plus question que des forces armées du héros? Quant aux opposants: bêtes féroces, Barbares et despotes xénophobes, brigands... ils ont, nous le verrons, même fonction. Le lien avec la nature s'est défait; Héraclès est entré dans l'Histoire et nous aurons à revenir sur cette réinterprétation du mythe qui accompagne ainsi la multiplication des incidents du "voyage". Il nous paraît cependant - et nous y reviendrons - que, parmi les épisodes qui ponctuent le retour d'Héraclès, certains sortent quelque peu du topos : si les géants des Champs Phlégréens, en Campanie, réintroduisent le mythe dans une épopée qui s'en éloignait fortement, en Sicile, Héraclès a maille à partir avec des opposants moins stéréotypés peut-être que les brigands ou les despotes auxquels il est généralement affronté : les Sicanes, dans l'arrière pays de Syracuse, et, surtout, à l'Ouest de l'île, Eryx, roi des Elymes, dont nous remarquons d'ailleurs qu'il figure aussi comme opposant dans le schéma actantiel établi d'après le texte d'Apollodore. C'est pourquoi, pensons-nous, il mérite toute notre attention. Au terme de cette étude des structures du récit, conduite, pour les deux épreuves occidentales d'Héraclès qui nous intéressent, sur le modèle des schémas actantiels de A.J. Greimas, nous aurons pu ainsi retrouver, sous une autre fonne, l'opposition entre nos deux sources principales: Apollodore, pour qui perdurent les schèmes anciens et qui, dans la mesure où il préserve la tradition, "embaume" quelque peu le mythe, et Diodore qui, au contraire, le perd, mais pour mieux l'utiliser dans son projet d'histoire globale, pour mieux le faire vivre, donc, en en refaisant le lieu où s'interpénètrent le passé lointain et l'histoire du temps présent. Nous aurons vu aussi se dessiner, par delà la multiplication des incidents qui ponctuent le voyage d'Héraclès, l'enchevêtrement des structures survivantes (perceptibles beaucoup plus nettement chez Apollodore) et de structures "de remplacement" plus nouvellement élaborées... Ainsi coexistent des plans d'isotopie différents: des éléments de signification
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renvoient à un héros primitif confronté à des dieux (Hélios lui-même, la descendance de Poséidon) qui ne recouvrent que partiellement des éléments naturels; d'autres - et cela chez Diodore surtout - appartiennent à une réinterprétation qu'avant de l'apprécier dans le détail nous appellerons "coloniale".
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Fig. 2S Héraclès en Italie et en Sicile avec les boeufs de Géryon ==~';;;OOklII
indication ne figur an 1 p 8S dans Diodore
• *
localisation des principaux épisodes de la légende d'Héraclée
ville ou village portant le nom d'Héraclée
NOTA BENE
On pourra s'étonner de ne pas trouver ici une tentative de cartographie de la quête des pommes d'or des Hespérides. Les raisons en sont simples: Diodore, lorsqu'il en fait le récit, donne trop peu d'indications géographiques pour qu'une représentation ait quelque intérêt ("Héraclès navigua donc de nouveau vers la Libye"). Quant à Apollodore, s'il connaît la localisation libyenne du jardin merveilleux, il lui préfère la localisation hyperboréenne. On s'en convaincra aisément, la conquête des pommes d'or, moins facilement que la lutte contre Géryon (ou, du moinS le retour du héros avec les boeufs) échappe au domaine de l'imaginaire. Il nous paraît quelque peu puéril, dans ces conditions d'en proposer une représentation géographique.
273
TROISIEME CHAPITRE: HÉRACLES EN SICILE: LE MYTHE ET SES DÉRIVATIONS
"n est le vigoureux compagnon des premiers colons dans le Syra.cusain où il combat et soumet les chefs indigènes, mais où la violence est immédiatement suivie d'urie oeuvre pacificatrice et bienfaisante; il parcourt les territoires soumis... on le retrouve aux confins même de la zone grecque, sur l'acropole de Sélinonte et dans le sanctuaire / frontière de Poggioreale... n pénètre enfin en territoire barbare jusqu'à Erix, il introduit le culte d'Aphrodite, s'identifie au dieu phénicien Melkart et se trouve installé dans la plus forte des positions puniques... " Telle est l'image que dans son Introduction à l'étude du culte d'Héraclès en Sicile (215), Roland Martin donne des aventures du héros... Une image, précisons-le, quelque peu infidèle au récit des auteurs anciens: celui de Diodore pour qui Héraclès, loin de pénétrer "enfin en territoire barbare" après son passage dans les fondations siciliennes, se rend directement du Cap Pélore vers le territoire des Elymes ; celui d'Apollodore plus encore, puisque le retour du héros ne comporte pour lui qu'un seul épisode sicilien : le combat contre Eryx. Malgré cette absence du fait colonial dans la Bibliothèque, malgré ce parcours à rebours chez Diodore, c'est bien en "compagnon" des colons grecs que de récentes études italiennes voient Héraclès (216) tant en Sicile qu'en Italie du Sud. Nadia Valenza Mele offre peut-être l'exemple le plus ~onvaincant de cette lecture "coloniale" du mythe héracléen en Occident (217). Redécouvrant une olpè dédicacée de la seconde moitié du VIIème siècle - le plus vieux témoignage connu, sans doute, du culte rendu au héros grec dans ces lointaines contrées (218) - l'auteur reprend l'étude des plus anciennes traditions concernant la présence d'Héraclès en milieu cuméen et, de façon plus générale, eubéen. De ses aventures dans la région, elle écarte - et certainement à juste titre - la consécration de la dépouille du sanglier d'Erymanthe dans le temple d'Apollon, version tardive, estime -t-elle, "certainement pas d'époque grecque, encore moins d'époque archaïque" (219). Il est vrai que la tradition unanime - y compris, en Italie, celle qui s'affiche aux métopes du petit temple du Silaris - montre le héros rapportant à Eurysthée, caché dans
274 un grand pithos, le sanglier encore vivant et qu'en conséquence, nous sommes fondés à ne voir, dans cet épisode, que la preuve de l'extraordinaire longévité du mythe, de sa plasticité, aussi, et des possibilités infinies qu'il offrait à qui avait intérêt à l'enrichir. Avec l'auteur nous retiendrons donc essentiellement deux épisodes : la Gigantomachie et la construction de la route côtière entre la mer et la région du lac Lucrin. Or, des deux traditions retenues, l'auteur démontre de façon très convaincante qu'elles sont en rapport avec le monde euboïco-thessalien : la localisation de la Gigantomachie en Chalcidique (Phlègres) et en Campanie (Champs phlégréens) ne peut guère, en effet, s'expliquer que par la commune vision d'une colonisation eubéenne apportant l'ordre et la civilisation en des lieux d'abord dominés par le désordre et la violence des géants mythiques... médiation eubéenne qu'on retrouverait dans l'acception très particulière du terme "argilles" (habitations souterraines - galeries de mines) à la fois dans la région de Cumes (en rapport avec la Via Heraclea) et dans la sphère thraco-macédonienne, elle aussi intéressée par la colonisation chalcidienne. Dans les deux cas les références littéraires ne s'expliquent véritablement que dans le contexte d'une haute époque coloniale où Cumes domine toute la région côtière de Misène à Parthénopé : la construction de la voie - dont on attribuera la paternité à Héraclès - répond alors à la fois à des nécessités stratégiques et aux besoins de l'exploitation des solfatares et des mines de Leucogées. Il est difficile de ne pas suivre l'auteur sur ce point et de ne pas voir avec elle, dans le récit de Diodore, le reflet de ces traditions nées de la colonisation d'époque historique et destinées à lui donner, en quelque sorte, ses lettres de noblesse (220) ou plus précisément encore - et cela semble bien être le cas ici - à justifier certaines de ses entreprises. D'autres exemples d'une intervention "coloniale" dans le mythe héracléen existent bien sûr... Ainsi la version apportée par Diodore du combat contre Eryx porte la marque de la tentative du lacédémonien Dorieus pour fonder un établissement dans la région du Cap Drépane. Ne venait-il pas en ces lieux récupérer l'héritage d'Héraclès? N'était-il pas le descendant du héros? (221) tentative aussi malheureuse d'ailleurs que celle de Pentathlos - un autre Héraclide ! - deux générations plus tôt (222). La tradition prouve ainsi, à l'évidence, le lien établi par les colons entre la légende occidentale du héros grec et leurs propres entreprises. Qu'elle ait servi de prétexte à l'expédition de Dorieus
275 ou de justification a posteriori, la légende était donc connue à la fin du Vlème siècle. Mais faut-il en conclure qu'elle a été fabriquée de toute pièce par et pour les colons ? n nous paraît essentiel, avant d'en juger, de reprendre le texte de Diodore. Les aventures siciliennes du héros sont localisées en deux zones ~ radicalement opposées - de "'l'fIe du triangle". deux zones isolées - on ne peut s'empêcher de le remarquer - par la région d'Agrigente et son arrière pays indigène où les contacts avec le monde égéen se réclament de Dédale et de Minos. hôtes du roi sicane Cocalos ! La géographie héracléenne quant à elle se concentre dans l'angle Nord-Ouest où le héros est affronté au roi indigène local, mais où sa route est adoucie par les Nymphes qui font, pour son repos, jaillir des sources d'eau chaudes. On retrouve Héraclès dans l'angle Sud-Est où il s'oppose pareillement aux chefs sicanes et à leurs nombreuses troupes, mais où il est reconnu comme un dieu par les habitants d'Agyrion et où lui-même fonde les cultes du "héros" Géryon et de son compagnon lolaos (à Agyrion toujours). de Déméter et Coré dans la cité (polis) qui plus tard deviendrait Syracuse.
Syracuse. Arrêtons-nous un instant à cet épisode (223) : c'est à la source Cyanè qu'ayant appris la tradition locale de l'enlèvement de Perséphone. Héraclès sacrifie aux Deux Déesses un de ses plus beaux taureaux, établissan~ ainsi - "pour les indigènes" - le rituel des fêtes qui, depuis lors. devaient être chaque année célébrées en l'honneur de Déméter et Coré (224). Pour Diodore. il ne fait aucun doute que l'acte fondateur précède la colonisation d'époque historique (225)... qu'il la précède et qu'il la prépare. de façon toute pacifique ici. Claire situation de "precedenza", fait remarquer, àjuste titre. Maurizio Giangiulio (226) qui tire argument. de surcroît, de la position extra-muros de la source Cyané pour retrouver, dans le culte qu'y reçoivent les deux déesses. celui d'un "sanctuaire sub-urbain typique" (227). n suggère, en conséquence - dans la tradition de Georges Vallet au Colloque de Tarente de 1967 - d'y voir, à la fois la marque de l'empreinte matérielle et morale de la polis sur son territoire et le lieu géométrique de rencontres dépassant le cadre de la cité et s'adressant aux autres Grecs et surtout peut-être aux indigènes (228). C'est donc bien une création coloniale qu'il lit dans cet épisode syracusain. le reflet même du mythe du héros "culturel" et "intégrateur" qu'est pour lui l'Héraclès sicilien (229).
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Les preuves archéologiques d'un culte rendu au fils d'Alcmène dans la cité dorienne ne manquent pas, d'ailleurs, qu'il s'agisse de cette inscription votive sur un ·slcyphos de fabrication locale daté du milieu du cinquième siècle (230) ou des témoignages monétaires (231). La littérature, quant à elle, fait écho à cette protection qu'attendaient d'Héraclès les Syracusains. Timée, par exemple, évoquant l'exp&tition athénienne contre leur cité, trouve à l'aide apportée par le héros des raisons mythologiques: ne devrait-il pas être naturellement hostile aux habitants de Ségeste - responsables de l'intervention - celui qui, autrefois, avait lutté contre leurs ancêtres les Troyens (232) '1 Certes... Mais, si nous avons commencé notre parcours sicilien par cette étape syracusaine qui, plus clairement que les autres, paraît mettre en scène un Héraclès colonial, cela n'implique pas que l'interprétation adoptée, en dernier lieu, par Maurizio Giangiulio reçoive notre adhésion sans réserve. Nous aimerions, en effet, souligner quelques difficultés : 1 - Peut-être faut-il, en premier lieu, rappeler que, si l'existence, en Sicile comme en Grande-Grèce, de nombreux sanctuaires situés extra-muros, a été unanimementinterprétée comme un caractère original de la religion des colons, elle s'est vu proposer des explications autres que celle que développait, nous l'avons vu, Georges Vallet lors d'un colloque - peut-être n'est-ce pas indifférent? - consacré à l'étude de la cité coloniale et de son territoire. Giovani Pugliese Carratelli, par exemple (233), s'interrogeait sur une possible survivance, en ces lieux consacrés par la cité, de souvenirs d'une lointaine empreinte achéenne ou de cultes indigènes qu'aurait récupérés à son profit la fondation coloniale. li est vrai que, si jusque là l'archéologie confmne parfois la continuité entre les cultes indigènes et ceux des Grecs, c'est plutôt à titre d'exception que de règle générale (234). Quant à la présence achéenne à l'emplacement des grands sanctuaires sub-urbains, elle reste, pour sa part, largement hypothétique. L'argument, en conséquence, peut difficilement être retenu contre la théorie de Maurizio Giangiulio et c'est de "l'intérieur" et dans sa logique propre qu'il faut l'appréhender. 2· En ce sens, s'il est important - peut-être! - que soit bien attesté, à Syracuse, le culte d'Héraclès, il est plus important encore que soit confinnée l'existence, dès les origines de la colonie, de celui de Déméter et Coré que le héros est censé avoir fondé. Or, sur ce point, l'auteur se contente d'affinner que
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l'association d'Héraclès et des Deux Déesses, loin d'être une innovation coloniale, faisait partie organique "du patrimoine cultuel des premiers colons de Syracuse" (235). Loin de nous la pensée, bien sûr, de contester cette association, en Grèce même. du héros et de Déméter ... il n'est que de lire Pausanias. en effet. pour se convaincre qu'il s'agit bien là d'une réalité profonde. ancienne (236) et qui. probablement. parce que très vivante encore au moment où partirent les colons, fait effectivement partie intégrante d'un héritage religieux qu'ils conservèrent plus fidèlement peut-être que les Grecs de la Métropole. S'il est vrai, d'autre part. que, d'après Diodore, Coré s'était vu attribuer l'intérieur de l'île (alors qu'Ortygie revenait à Artémis) (237). on ne saurait en tirer argument pour attribuer à Héraclès une fondation a posteriori du culte de la jeune fille à Syracuse. Bien longtemps avant Diodore. en effet. Pindare. célébrant. dans les Néméennes, la victoire de Chromios d'Etna. louait l'île toute entière dont le maître de l'Olympe. Zeus, avait fait présent à Perséphone. Et c'est encore la Sicile tout entière qu'il disait promise. par sa fécondité. "au premier rang sur toute la terre" (238). tradition reprise. d'ailleurs, jusqu'à Cicéron, pour qui encore l'île "tout entière" est consacrée à Cérès et à Libéra ; l'orateur latin rapporte, en outre. que les Siciliens pensent que ces déesses sont nées chez eux. que. chez eux encore. les céréales ont été découvertes pour la première fois. et qu'enfin l'enlèvement de Libéra a eu lieu dans les bois d'Enna (239). Il n'y a rien là qui individualise Syracuse. Un autre texte de Pindare. en revanche. mentionne précisément les cultes des Deux Déesses dans la cité: dans la Sixième Olympique. en effet, le poète béotien chante Hiéron le "prince au sceptre pur et aux sages desseins" qui "honore Déméter aux pieds empourprés et célèbre la fête de sa fille aux blancs coursiers" (240). et des scholies précisent que la famille du tyran possédait en effet un sacerdoce héréditaire de Déméter et Coré et qu'elle le tenait de Télinès (241). Le fait est confmné par des sources postérieures et Hérodote. pour sa part. donne quelques précisions sur la façon dont. à la faveur de discordes civiles. le Déinoménide Télinès avait conquis la dignité d'hiérophante (242). Tradition un peu inquiétante (pour la théorie "coloniale") dans la mesure où cette prêtrise, exercée d'abord à Géla. la cité d'origine des Déinoménides. pourrait bien faire figure. à Syracuse. d'une "importation" étroitement liée à la tyrannie. donc relativement tardive et surtout indépendante des traditions concernant l'établissement de la cité.
278 Ce que nous savons d'ailleurs, grâce à Diodore surtout, des fêtes célébrées en l'honneur de Déméter, évoque fortement les Thesmophories athéniennes, à ceci près qu'elles paraissent avoir été plus longues: dix jours, parce que Déméter avait, après sa disparition, recherché sa fille pendant dix jours; toutes les débauches de langage étaient permises, puisqu'elles évoquaient les propos obscènes de Baûbo, qui seule avait réussi à dérider la déesse, et le caractère "licencieux" des fêtes était encore disait-on - accru par la forme des gâteaux appelés fLUUoi qu'on offrait à Déméter (243). Mais, si les Démétria paraissent, à Syracuse, très dépendantes d'une évolution d'ensemble de la religion grecque, les fêtes célébrées en l'honneur de Coré, sa fille, présentent, semble-t-il, une plus grande originalité: non pas tant par leur thème (elles célébraient, l'hymen de Perséphone et de son infernal époux, comme les Théogamia d'Agrigente) (244) que par les cérémonies mystérieuses - et souterraines - qui se déroulaient auprès de la fontaine Cyané, née, dans la tradition syracusaine, de la terre entr'ouverte par Hadès, lorsqu'il prit avec Coré le chemin des Enfers. C'est là encore que, pour honorer la déesse. les particuliers. si l'on en croit Diodore. apportaient de modestes offrandes et que l'Etat, pour sa part. faisait submerger des taureaux. comme l'avait enseigné Héraclès lors de son passage en Sicile avec les boeufs de Géryon (245). 3 • Et ce sera notre troisième et dernière remarque quant à l'épisode syracusain du retour d'Héraclès. Faut-il tant insister sur les cultes de la cité? sur l'association "nonnale" d'Héraclès et de Déméter, alors que ce qui est mis en rapport avec le héros. c'est essentiellement un rituel. et il faut bien l'avouer un rituel fort peu habituel chez les Grecs: le sacrifice total de l'animal sans aucun partage entre les dieux et la communauté des hommes. ce qui certes est banal dans le cas de l'offrande aux divinités chthoniennes. mais ce qui l'est moins. par immersion de la victime... une pratique qui, pour être ancienne - elle est attestée dès le Paléolithique reconnaît M. Giangiulio - peut difficilement être rapportée sans problème à l'héritage cultuel des premiers colons syracusains (247). C'est bien en fondateur de culte qu'à Syracuse se manifeste l'Héraclès de la légende; mais nous dirons plus précisément que dans l'épisode s'articulent une série de rapports : - impliquant le héros dans la sphère du sacrifice. - l'unissant aux divinités chthoniennes. en tant que divinités de l'abondance (les Coreia sont une fête de la moisson), mais plus
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encore en tant que divinités infernales (les Panégyries de Coré célèbrent ses épousailles avec Hadès), - ceci dans un contexte qui place le héros en contact étroit avec les forces de la nature : une de ces entrées des Enfers avec lesquelles sa propre légende (la quête de Cerbère ete...) le met si so~vent en rapport; une de ces sources jaillies spontanément de par la" seule volonté divine.
Agyrion. C'est encore essentiellement en fondateur de cultes qu'apparaît Héraclès dans l'arrière pays de Léontinoi, cité de fondation non plus dorienne, mais chalcidienne. Là, comme à Syracuse où l'on racontait que les Deux Déesses avaient pour la première fois fait don du blé aux hommes, on rivalisait avec la tradition athénienne, mais à propos d'Héraclès. C'est dans la région, en effet, et plus précisément à Agyrion, que le héros avait - disait-on - reçu pour la première fois les honneurs divins (248). (Diodore, on le sait, rapporte ailleurs cette innovation aux habitants de Marathon) (249). Un lac, là encore, conservait le souvenir du voyageur, mais Héraclès lui-même l'avait crée pour témoigner sa reconnaissance à ceux qui l'avaient reconnu comme un dieu (250) ; les rochers eux-mêmes portaient l'empreinte des boeufs de Géryon (251), mais, plus encore que le paysage, les cultes avaient été marqués par Héraclès, fondateur en ce lieu d'un téménos consacré au "héros Géryon" et d'un sanctuaire à lolaos, son compagnon d'armes, tous deux encore vénérés à l'époque où écrivait Diodore. Que celui-ci, enfant d'Agyrion, ait quelque peu flatté, dans son ouvrage, le patriotisme local et embelli les signes de la présence héracléenne, qu'il ait capté des traditions venues de Grèce propre au profit de ses compatriotes et leur ait attribué, par exemple, le mérite d'avoir fait d'Héraclès un dieu... cela est plus que probable! (252) Il reste que les deux cultes en l'honneur, l'un de Géryon, l'autre de lolaos, n'ont pu être inventés par Diodore et que leur rapport avec Héraclès est incontestable. Sans doute même est-ce leur présence en ce lieu qui a rendu possible pareille inflation de la légende héracléenne. - Là encore, le héros se trouve à l'origine d'un rituel: le sacrifice de leur chevelure que font à lolaos les habitants d'Agyrion... vestige assez clair encore - pour nous, sinon pour Diodore - de pratiques initiatiques sur lesquelles nous reviendrons longuement en raison de leur adéquation avec le
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thème mythique de la lutte contre Géryon (253). Cette offrande au compagnon d'Héraclès s'accompagne de concours gymniques annuels (lutte et courses hippiques) tenus aux confins de la ville, près d'une porte nommée héracléenne et la cité tout entière est associée, pour honorer Héraclès, dans des sacrifices, des danses et des festins. Là encore nous aurons l'occasion de proposer une explication à cette association du dieu et du héros dans le cadre de telles cérémonies et dans un contexte dont on peut retrouver la trace en Grèce même (254). Il reste que, si le mythe traduit non moins clairement les rapports entretenus par un héros que Sophocle disait avoir été "constamment au service d'autrui" (255) et la condition servile, que si les cultes mêmes du héros en font parfois le garant de la libération des esclaves ou de l'intégration des étrangers dans la cité (256), il n'est pas d'exemple en Grèce où de pareilles festivités en l'honneur d'Héraclès soient, comme à Agyrion, ouvertes aux esclaves, pour un temps confondus avec les maîtres. - Quant au culte de Géryon, lui aussi implanté dans la n6).tt' TWV •AyuptVa{wv par Héraclès, il est, comme le précédent, à la fois lié au coeur du mythe grec que nous étudions, mais en même temps quelque peu aberrant dans son optique même: en effet de quel "héros" Géryon s'agit-il? . ... De l'adversaire triple d'Héraclès, de l'ennemi qu'il doit vaincre pour lui enlever son fabuleux bétail et le rapporter à Eurysthée? Il y a certes, dans la légende d'Héraclès des exemples de cultes par lui fondés en l'honneur de ses victimes ; pour rester dans le contexte de ce voyage occidental du héros, on pourrait citer Crotôn, gendre de ce Lacinios qui chercha à dérober les boeufs de Géryon et qui fut tué par mégarde alors qu'il voulait, précisément, empêcher le vol (257). On pourrait encore mentionner Locros dont il était l'hôte et qui, de la même façon, périt dans la lutte entre son beau-père Latinos et Héraclès qui une fois de plus défendait son troupeau (258). Dans les deux cas, les victimes furent honorées par leur meurtrier (et de plus devinrent l'éponyme d'une ville célèbre), mais dans ces deux légendes, dont l'une dérive sans aucun doute de l'autre, la mort est accidentelle; dans les deux cas les héros, qu'il s'agisse de Crotôn ou de Locros, n'ont qu'une raison d'être: expliquer le nom et la fondation d'une cité coloniale (259). Dans les deux cas nous avons, sans aucun doute, l'exemple de ces aitia, qui, nous l'avons vu, continuèrent si longtemps d'enrichir le mythe grec. ... Le "héros" Géryon pose quant à lui bien d'autres problèmes. Nous passerons rapidement sur un sujet déjà maintes fois traité (260) et ne rappellerons là que les éléments essentiels :
281 - à Padoue (capitale des Vénètes) existait un oracle de Géryon, oracle lui aussi mis en rapport avec le héros grec, puisque la source Aponus auprès de laquelle on le situe s'ouvrait dans une terre labourée par Héraclès (261)... Ici, comme à Agyrion, s'exprimait l'alliance (et non pas l'hostilité) d'Héraclès et de Géryon. - Géryon est connu en Italie centrale et tout particulièrement en Etrurie sous le nom de Ceron. Représenté sous l'image d'un guerrier triple, il assiste Hadès sur une fresque funéraire de Corneto (262). - Enfin, une des versions de la légende romaine d'Hercule remplace le héros grec par un bouvier nommé Garanus, rapproché de la forme rapu~ qui se lit sur un vase chalcidien (263), ou Recaranus qui en serait la fonne primitive (264). Dans cette convergence de témoignage~, apparaît manifestement la survivance, au delà du Géryon du mythe grec, d'un héros ou d'un dieu indigène, dieu triple déjà et, peut-être, dieu "bouvier", dieu chthonien dans tous les cas, même si l'origine du nom n'est pas aussi évidente que ne l'affmnait Jean Bayet (yii 'Oc.» (265), et si l'on peut, tout aussi logiquement, comme l'a fait dernièrement Jean-Pierre Vernant, faire dériver son nom du verbe geruo et entendre en Géryon "celui qui fait résonner sa voix" (266). L'accent serait ici porté plutôt sur l'aspect infernal... qui sans doute existait aussi dans le dieu pré-hellénique (267), l'exemple de Ceron est là pour le prouver. Faut-il pour autant voir dans les cultes d'Agyrion des "rites et coutumes de caractère essentiellement local et populaire" et qui, en conséquence, ne sauraient avoir été "importés de la lointaine Géla ou d'une autre colonie grecque dans cette petite ville perdue au milieu des montagnes" (268) ? Faut-il au contraire y retrouver la marque des colons grecs, comme le voulait déjà E. Ciaceri (269) ? Faut-il, comme le demande encore Maurizio Giangiulio, comprendre les fêtes décrites par Diodore comme ces "fêtes de paysans" dont parle si bien Louis Gernet, avec leurs jeux, leurs pratiques de banquets communautaires, leur ouverture, non seulement aux jeunes dont elles consacrent l'admission dans la communauté, mais encore aux marginaux de la cité : les esclaves et les étrangers ? (270) Et faut-il, en conséquence, voir dans ces rituels intégrateurs proposés par des colons grecs un moyen d'attirer les Sicules en voie d'hellénisation ? Voir dans ces banquets un lieu de rencontre particulièrement adapté à la situation et ceci avant même la "colonisation" d'Agyrion à l'époque de Timoléon (271), une colonisation qui devait faire de la localité une cité grecque à part
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entière et implanter de façon décisive les souvenirs et lès cultes héracléens (272) ? Sans anticiper sur une problématique qui vaut pour l'ensemble du périple sicilien d'Héraclès, nous voudrions seulement, à propos d'Agyrion, poser quelques jalons: 1. Que les cultes, que les fêtes d'Agyrion tels que nous les rapporte Diodore évoquent des pratiques, des fêtes, des cultes grecs, nous l'avons dit et nous y reviendrons longuement. Qu'il soit impossible, en conséquence, de les comprendre comme purement indigènes nous paraît incontestable. 2. Que le rapport des cultes et des mythes, que l'intervention d'Héraclès soient - dans ce même récit de Diodore - à mettre en relation avec une pratique colonisatrice, et sous-tende une politique d'accueil, d'alliance et d'intégration (qui fut celle des Chalcidiens, on ne l'oubliera pas !) (273) nous paraît tout aussi manifeste. 3. Mais n'y a-t-il pas quelque contradiction à insister après L. Gemet - sur le caractère pré-politique de telles manifestations et à voir en elles, en même temps, l'émanation de la colonisation dont on sait bien à quel point elle est liée à l'émergence de la cité? (274) N'est-ce pas interpréter cette puissance intégratrice dans un sens bien statique? N'est-ce pas méconnaître ce qu'une fondation établie en terre étrangère pouvait elle-même chercher à se concilier, recevoir. Bref n'y-a-t-il pas eu adaptation, récupération plutôt que création du mythe? Cet exemple des cultes d'Agyrion nous paraît constituer la preuve même de la complexité de la tradition héracléenne en Sicile, une tradition qui, au-delà de l'interprétation qu'en fIrent les colons d'époque historique, mêlait déjà, comme le remarquait naguère L. Bemabo-Brea, les légendes de la préhistoire mythique de la Grèce et celles que les populations indigènes de la Sicile conselVaient de leurs origines et de leur propre passé (275).
Les chefs sicanes. Ces populations apparaissent d'ailleurs de façon beaucoup plus concrète dans l'épisode qui oppose Héraclès aux Sicanes, dans l'arrière pays de Syracuse... confrontation violente dans ce cas, puisque c'est d'un "célèbre combat" qu'il s'agit, dans lequel les indigènes (TWV tyxwpiwv I:ucav(;)v) avaient engagé "des troupes considérables" (JLEy6Aa1t' 8uv6JLECJ1V aVTlTa(aJL&Vwv). Dans l'affrontement périrent un grand nombre d'ennemis, parmi lesquels - et Diodore rapporte là le dire des mythologues - des
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chefs qui, à son époque, recevaient encore des honneurs héroïques: Leucaspis, Pediacratès, Bouphonas, Gluchatas, Butaeas et Crutidas (276). Faut-il une fois de plus rappeler que ces Iucavo{ - et non pas les Iucd.o{ qui peuplaient, à l'époque de la colonisation grecque cette région de la Sicile - renvoient au passé anCien de l'île? Que Thucydide (277), bien avant Diodore (278) ou Denys d'Halicarnasse (279), en fait des populations antérieures à la migration sicule et qu'en dépit de divergences sans conséquences ici, (280) la tradition est, sur ce point, unanime ? Que cette migration sicule, datée par Thucydide du XIème siècle avant notre ère (près de trois siècles avant la venue des Grecs) est plus ancienne encore pour certains historiens, puisqu'elle aurait eu lieu avant la Guerre de Troie - trois générations pour Hellanicos (281), quatre-vingts ans pour Philistos (282) - en tout état de cause près de deux siècles avant la date proposée par l'historien athénien (283). Le problème essentiel reste, évidemment, celui de la mise en rapport de cette tradition littéraire, des enseignements de la linguistique (284), et, sur le terrain, des découvertes archéologiques. De ce débat, encore très ouvert, nous ne donnerons ici que les éléments indispensables à la connaissance de ces "indigènes" que la légende oppose à Héraclès. Nous tiendrons donc pour acquises: 1. l'existence incontestable, lorsque s'installent les Grecs en Sicile, de deux faciès culturels nettement différenciés (différence que la présence grecque semble avoir eu pour conséquence d'atténuer notablement): l'un correspondant à la Sicile centro-méridionale (culture de S. Angelo Muxaro) et dont on peut estimer que sont porteurs les Sicanes, l'autre, se manifestant dans la Sicile orientale (culture de Pantalica Sud et de Molino della Badia) peuplée, si l'on en croit les auteurs grecs, par les Sicules (285). 2. l'influence non moins incontestable d'apports extérieurs dans la lente formation de ces cultures sur le sol sicilien. Là encore nous nous limiterons à l'essentiel : les contacts avec le monde égéen, qui commencent timidement au XVIIème siècle, culminent aux XVI-XIVe siècles, se raréfient, puis s'interrompent avec le milieu du XIIIème siècle (286); les influences phéniciennes, plus tardives et décisives, semble-t-il, dans le développement des cultures de l'âge du Fer (287), plus particulièrement dans la civilisation de Cassibile (288). Nous signalerons encore l'importance prise par la production chypriote dans les échanges tardifs avec le monde achéen (et ce tant dans les Pouilles que
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La céramique mycénienne en Italie et en Sicile
Fig. 26
d'après M. MARAZZI, S. ruSA, Die mykenische Penetration im Westlichen Mittelmeerraum, Klio, 61, 1979,2,pp.314-315.
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dans l'Est sicilien) (289): on peut, en effet, être tenté de voir dans ce carrefour qu'a représenté la grande fie orientale, un possible trait d'union entre les échanges achéens et les échanges phéniciens (290). 3. Nous retiendrons enfin les réticences des archéologues, dans l'état actuel de leur connaissance des faciès culturels de la Sicile orientale, à faire des Sicules (qui, comme les Ausones et les Morgètes proviennent de l'Italie centrale et méridionale) les porteurs d'une civilisation sub-apenninique en tous points semblable à celle des "Ausoniens" des fies Lipari et de Milazzo. C'est en effet d'une remarquable continuité avec l'âge du Bronze que témoigne, au contraire, la civilisation de Pantalica et, si les Sicules en sont bien les porteurs, il faut admettre qu'ils ont beaucoup emprunté, ici, aux indigènes qui les avaient précédés eri ces lieux... un phénomène analogu~, remarque L. BernabO Bréa à celui de la Graeca capta (291). La même "nécessité" archéologique conduit encore à préférer, dans ce cas, la date haute, proposée par Hellanicos ou Philistos pour la migration sicule; "hypothèse plus réaliste", "hypothèse de travail", conviennent les archéologues (292) et il importe que nous adoptions ici la même prudence et plus de réserve encore. Diodore nous apporte-t-il quelque lumière en transmettant le nom des six chefs sicanes qu'aurait occis Héraclès dans le raid qu'il effectua depuis la côte (et dans la région qui devait plus tard être Syracuse) vers la "Mésogée"? Ceux-ci ont, depuis longtemps intéressé l'historiographie sicilienne (293), mais les études les plus récentes et les plus complètes sont celles que leur ont consacrées E. Sioqvist et M. Giangiulio (294). Leurs conclusions - radicalement opposées - invitent à reprendre le problème.
Leucaspis, un nom grec, désigne le premier de ces héros sicanes "au bouclier blanc", un guerrier donc et ce de façon tout à fait cohérente avec le mythe du combat contre Héraclès. Plus qu'un nom propre, d'ailleurs, le terme est, souligne E. Siôqvist, une appellation descriptive, l'une de celle qui, fort logiquement sont attribuées à des étrangers "qui peuvent seulement être décrits" (295)... Rétorquer - ce qu'on est tenté de faire - qu'en Grèce même beaucoup de noms propres sont ainsi "parlants" ne réfute pas entièrement l'argument, dans la mesure où ce que disent ces noms est généralement d'un autre ordre et suppose une connaissance du personnage et de ses qualités ou, du moins, un espoir de ce qu'il sera, une anticipation sur son destin: nommer
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Héraclès (glorieux par ou pour Héra), implique, par exemple, un autre rapport au héros que la banale mention - toute extérieure - d'un bouclier blanc et la reconnaissance d'une fonction guerrière non moins banale (295 bis). C'est d'ailleurs un guerrier que représente une drachme syracusaine de l'extrême fin du Vème ou du début du IVème siècle portant l'inscription ( AE ) YKAIn (II ) (296), un témoignage qui conforte la mention de Diodore et laisse à penser qu'à cette époque au moins, Leucaspis était, à Syracuse, considéré comme un héros, qu'en tout état de cause, il faisait partie de l'horizon cultuel des colons grecs.
Pediacratès porte, lui aussi, un nom grec et, lui aussi, un nom parlant, un nom fonctionnel: il est "le chef de la plaine", traduction plus claire encore, si l'on retrouve la formule employée par Xénagoras et conservée par Macrobe : Pediocratès (297). Le texte des Saturnales est d'ailleurs du plus haut intérêt, qui met en relation le héros sicane et le culte des Paliques : "La terre n'ayant rien produit, cite-t-il, les Siciliens firent un sacrifice à un héros, Pédiocratès, sur l'ordre que leur en avait donné l'oracle des Paliques; et, après le retour de la fertilité, ils chargèrent de présents l'autel des Paliques" (298). Sur le culte des Paliques, nous possédons, évidemment, la description de Diodore. Du sanctuaire, voisin du lac Naftia (et distant d'environ quarante-cinq kilomètres de Catane), il a retenu, surtout, le caractère terrifiant de ces deux cratères, "qui lancent, d'une immence profondeur d'énormes étincelles" et évoquent "des chaudières posées sur un grand feu, et pleines d'eau bouillante"... Une eau qui répand une forte odeur de soufre, alors même que l'abîme d'où elle s'échappe fait entendre "un bruit effroyable..." Il s'y attache, ajoute-t-il, "quelque chose de surnaturel et de divin..." Et c'est la raison pour laquelle, sans doute, le temple est si vénéré qu'on y prononce "les serments les plus sacrés". Diodore remarque encore qu'il est devenu "un asile inviolable, surtout pour les malheureux esclaves qui sont tombés au pouvoir de maîtres impitoyables" (299). Macrobe "qui a lu les livres grecs" (300) et apparemment en cite de longs passages, a, lui aussi, connaissance de ces cratères "dont on n'a jamais touché le fond, et d'où l'eau sourd constamment en bouillonnant" ; comme à Diodore la pratique des serments lui paraît révéler et la vénération qu'on a pour les Paliques et leur puissance divine, mais, d'après lui, les parjures sont beaucoup plus durement punis: ils perdent, non pas la vue, mais la vie, et ils la perdent dans le lac... (301). Ils meurent
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"devant les dieux", écrivait, quant à lui, Polémon (302). Ce dernier ajoute à sa description des cratères - très semblable à celles que nous venons de voir - que ceux-ci étaient si profonds que des boeufs y étant tombés, ont à tout jamais disparu (303)... Enfin, remarque pour nous capitale, il précise que les Paliques sont considérés comme des dieux autochtones (304). . Ils sont d'ailleurs donnés par la tradition comme fils d'Adranos, "seigneur de l'Etna", dieu guerrier, dieu des Enfers, maître des entrailles tumultueuses de la terre et prennent place, fort logiquement, parmi les cultes nés des phénomènes volcaniques (305). Leur caractère indigène est confirmé par le choix de Doucetios, lorsque, dans sa révolte contre les Grecs, il fonde, au voisinage de leur sanctuaire, la ville de Palikè. Il. est, bien sûr, du plus haut intérêt de voir ainsi Pediocratès entrer dans la sphère de ces cultes indigènes dans lesquels nous aurons reconnu au passage des correspondances éloquentes, tant avec les cultes d'Agyrion (même si on ne saurait confondre ce lieu d'asile qu'est le sanctuaire des Paliques et les fêtes en l'honneur d'Héraclès et de Iolaos où pour un temps seulement cohabitent maîtres et esclaves) que peut-être aussi avec les pratiques d'immersion dans le lac Cyané. L'érudition de Macrobe nous réserve d'autres surprises encore: il tient de Callias, en effet, qu'à Eryx se trouvaient les Del/oi, "deux cratères regardés par les Siciliens comme les frères des Paliques". Là encore les bulles éclatant à la surface ressemblaient "à des eaux bouillonnantes" (306). Confusion avec la région de l'Etna ou homonymie significative ? (307) En tout état de cause, le seul rapport ainsi établi entre les lieux où plane la légende héracléenne ne manque pas de mériter qu'on la relève! Il faut enfin, pour donner toute sa dimension à cet adversaire - qu'on pourrait imaginer purement fictif d'Héraclès signaler que nous possédons des preuves matérielles qu'un culte lui fut rendu : il s'agit d'un petit autel, retrouvé à Syracuse et portant comme dédicace le nom, sans doute au datif, du héros sicilien (308). Voilà qui rend hautement probable la mention de sacrifices faits en son honneur, sur ordre des Paliques 1... Plusieurs fois déjà, ona rapproché cette dédicace de celles qui figurent sur des céramiques de Géla, vouées à Pédios, du héros local, règnant probablement sur la plaine géloenne (309). Les autres "chefs" cités par Diodore ont, il faut l'avouer, beaucoup moins de réalité, en ce sens que rien ne vient attester qu'ils furent, comme le dit l'auteur sicilien, l'objet d'un culte. Pourtant, le nom de deux d'entre eux au moins retient toute notre
288 attention: celui de Bouphonas et celui de Butaias... Du premier, qu'on traduira par "le tueur de boeufs", E. Siôqvist dit encore qu'il est un nom descriptif, mais il faut le reconnaître, plus inattendu dans ce combat des chefs 1 Un nom qui, en revanche, n"tonne aub, Il on le met en rapport avec le 161, de fondateur de cultes qui est celui d'Héraclès lors de son retour d'Erythie; le Bouphonos, on le sait, est celui qui, lors des Bouphonies - cette fête déjà mal comprise par les Athéniens du Vème siècle (310) - porte le coup de grâce au boeuf du sacrifice et s'enfuit, tandis qu'on juge la hache avec laquelle il officiait. Nous reviendrons, bien sûr, sur cette nouvelle irruption du sacrifice dans la légende héracléenne. Et si nous avons de Bouphonas rapproché Butaias, c'est, là encore, en raison d'une affinité profonde avec l'un des thèmes essentiels de cette légende. Tous les commentateurs considèrent le terme comme lié étymologiquement à Boutas ou Boutès le berger, le bouvier (311). Exploitant son interprétationn "descriptive", E. Siôqvist écrit que le nom pourrait parfaitement convenir "to an eponymous chieftain of an anonymous barbarian horde" (p. 121). Certes! Nous préférons, quant à nous, insister, une fois de plus, sur la cohérence interne du mythe, car c'est bien en bouvier qu'apparaît aussi Héraclès tout au long de ce retour... bouvier et sacrificateur à la fois et nous aurons, bien sûr, à élucider les curieux rapports du héros avec ces troupeaux qu'on l'envoya quérir si loin en Occident, avec les bouviers auxquels plusieurs fois ils est affronté. Contentons nous, ici, de remarquer les liens qui se tissent, une fois de plus, avec la légende d'Eryx : ne s'appelait-il pas Boutas (ou Boutès) le père de ce roi, voleur de troupeaux, qu'Héraclès dut combattre pour récupérer son bien ? (312). Restent G/uchatas et Crutidas . Maurizio Giangiulio les abandonne "au patrimoine culturel indigène" (313), et il faut, pourquoi ne pas l'avouer, beaucoup d'imagination pour les interpréter "à la grecque" (314). Rapproché de yA&üx~ (= jus de raisin), le premier pourrait être "celui qui presse le raisin" ; rapproché de yput&\V le second serait une onomatopée, "celui qui grogne, qui mannonne", bref, qui parle un langage inintelligible. Quel beau nom, en effet, pour un Barbare ! et l'on comprend que l'interprétation séduise E. Siôqvist, qui, cependant, reconnaît bien volontiers le caractère hautement hypothétique de ces deux dernières "traductions" (315). C'est, en définitive, un remarquable puzzle que nous offre Diodore et on prend envie de jouer avec ces noms, de les associer, de les juxtaposer. Or,
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malgré leur caractère délibérément "fonctionnel" (ce dénominateur commun me frappe plus, personnellement, que l'aspect descriptif relevé surtout par E. Siôqvist), on n'a jamais, à ma connaissance, tenté de les exploiter dans le sens de la trifonctionnalité indo-européenne. Pourtant ne reconnaît-on pas aisément la fonction de souveraineté, la fonction guerrière, et la troisième fonction, celle qu'expriment au mieux les producteurs... ? Mieux même, puisque nous disposons de six noms, ne peut-on retrouver en eux le dédoublement caractéristique de chacune de ces fonctions: l'administration à la fois régulière (Pédiacratès) et religieuse (Bouphonas) du monde; le jeu de la force guerrière dans sa manifestation organisée, réglementée (Leucaspis, l'homme au bouclier) et désordonnée, insoumise (si Crutidas est bien celui qui proteste, qui grogne). Les acti"ités productrices, enfin, dans leurs deux aspects essentiels, seraient, dans cette optique, représentées par le pasteur et l'agriculteur (mais là encore redisons que si, avec Butaias, le berger est assez sûrement attesté, le viticulteur reste, quant à lui, hypothétique). n n'empêche, cette irruption, que nous envisageons, des structures indo-européennes ne manque pas de cohérence, nous la retrouverons, à un autre niveau, dans l'interprétation de la lutte contre Géryon (316), non pas comme fondant le mythe, bien sûr, mais comme l'utilisant à d'autres fins. C'est ainsi d'un véritable microcosme que triompherait Héraclès, c'est une société tout entière qu'il réduirait à sa merci. Oui, mais quelle société ? Pour certains, qui donnent à l'épisode valeur historique, les chefs qui, si l'on veut bien suivre notre hypothèse, l'exprimeraient ainsi tout entière sont, ce que d'ailleurs en dit Diodore, des Sicanes. Et c'est alors, fort logiquement, un Héraclès achéen qui en dispose. C'est la théorie exprimée en particulier par E. Manni qui parle de héros pré-sicules (317). C'est aussi la conclusion à laquelle tend toute la démonstration de E. SiOqvist, qui fait remarquer, de surcroît, que la forme hellénisée des noms conservés par Diodore est beaucoup plus facile à reconnaître comme transcription du mycénien que comme forme purement classique (318), et qui demande à l'archéologieet tout particulièrement à l'ouvrage de Lord Taylor - de corroborer cette tradition. L'importance des trouvailles de céramique mycénienne dans l'angle Sud-Est de la Sicile garantissant, en effet, l'existence de rapports entre le monde achéen et cette région, ceux-ci lui paraissent former "le terreau
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lointain sur lequel se développera la légende du bref séjour d'Héraclès en un lieu qui sera plus tard Syracuse". Mieux: le raid d'Héraclès contre les chefs sicanes lui semble lui-même prouvé par les signes rares, mais tangibles, d'une pénétration mycénienne vers l'intérieur (319). Le mythe, tel que le rapporte Diodore, serait ainsi la cristallisation de l'Histoire, le souvenir, encore précis, de ces contacts du second millénaire dont l'archéologie prouve, à l'évidence, qu'ils furent une réalité. On peut au contraire - et c'est ce que j'ai fait moi-même insister sur la cohérence interne du mythe, rechercher dans l'épisode moins le reflet d'événements passés qu'un faisceau de relations qui se tissent autour d'un héros devenu le personnage essentiel d'une autre histoire. Cette apparente autonomie donnée au mythe peut d'ailleurs conduire à l'enraciner, non moins profondément - et dirons-nous, non moins dangereusementdans l'histoire. Pour Maurizio Giangiulio qui a, lui aussi, travaillé en ce sens, le récit de Diodore est ainsi construit à partir du thème mythique de la victoire d'Héraclès sur des antagonistes "dai tratti ora brigantesco-pastorali, ora guerreschi", (320) une construction née, comme tant d'autres, d'un contexte colonial qu'il pense pouvoir préciser: celui, topographique, de l'aire de diffusion du culte des Paliques; celui, historique, de la résistance de Doucétios à la présence grecque... une résistance qui présuppose une occupation: celle des Deinoménides (321). C'est donc dans le cadre de la propagande des tyrans de Syracuse qu'il propose de comprendre la séquence de la lutte d'Héraclès contre les chefs indigènes, comme un mythe "préfigurant et légitimant la domination territoriale, politique et culturelle" de l'impérialisme syracusain. C'est dans une note que l'auteur se débarrasse de la mention gênante des Sicanes: On aurait tort de s'en tenir à la lettre, il faut donner à ce terme, écrit-il, "son sens profond" et comprendre que c'est pour donner plus de poids à l'intervention du héros grec que l'historiographie syracusaine l'a ainsi mise en rapport avec le moment le plus ancien du peuplement de l'île, avec les autochtones qu'étaient les Sicanes dans la vision ethnographique des Grecs (322). Soit... l'argument peut cependant paraître d'autant moins convaincant qu'on insiste beaucoup, au contraire, sur le caractère "sicule" du culte des Paliques ! (323). En fait, il y a là - pour l'une et l'autre thèse d'ailleurs - un élément de contradiction. Nul doute que le sanctuaire des Paliques ait joué un rôle fédérateur pour les Sicules contemporains des colons grecs
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installés sur leurs côtes; nul doute que ce rôle ne se soit accru, lorsque cette présence étrangère s'est faite plus gênante, lorsque l'hellénisation a gagné le coeur de la Sicile, lorsque la tyrannie géloenne puis syracusaine a développé sa politique de conquête territoriale (324). Le caractère éminemment "local" et "géographique" des phénomènes qui leur ont donné naissance laisse à penser, toutefois, que ces cultes n'appartiennent pas en propre aux Sicules, que ceux-ci en ont au contraire hérité à leur arrivée dans l'île. Polémon n'écrivait-il pas que les dieux Paliques étaient autochtones? (325). L'archéologie n'enseigne-t-elle pas que les faciès culturels de cette Sicile du Sud-Est témoignent d'une remarquable continuité avec les civilisations de l'âge du Bronze? Il nous paraît, en définitive, aussi peu raisonnable de nier ce qui, dans le mythe, peut renvoyer aux temps "hérofques" que d'en faire un pur reflet de ces contacts, dont on sait qu'ils existèrent, entre les Achéens et les Sicanes... Peu raisonnable et inutile, d'ailleurs, car la démonstration de Maurizio Giangiulio n'en est pas affaiblie, qui prouve à l'évidence que le mythe a fonctionné comme mythe de propagande pour les Déinoménides: nous renvoyons sur ce point à l'étude parfaitement convaincante qu'il fait de la politique (au sens le plus large du terme) des tyrans de Syracuse et de l'appui apporté en ce sens tant par Eschyle, dans sa tragédie perdue, que par Pindare dans les épinicies qu'il consacra aux tyrans siciliens (326)... Ce dernier surtout nous intéresse, pour qui Héraclès est, bien évidemment, le modèle que se doivent de suivre tant les Deinoménides que leurs alliés (327). Il rèste que c'est une version du mythe que nous avons là ; une de ses multiples facettes, ou, si l'on préfère, un moment de la légende héracléenne. Et, si l'épisode du combat contre Eryx par lequel nous terminerons cette étude du parcours sicilien du héros grec, nous paraît particulièrement intéressant, c'est peut-être parce que, mieux que tout autre, il permet de mettre en évidence ces phénomènes de "bricolage" et de "réinterprétation" qui affectent le mythe; parce que, si le mythe, avec ses prolongements légendaires, parait tenir lieu d'archives, il ne peut dans ce cas, dissimuler la part d'idéologie qu'il comporte; cette "fonction justificatrice dont savent fort bien jouer les gardiens de la tradition, les détenteurs et bénéficiaires de l'autorité" (328). Il suffIra pour s'en convaincre de comparer les deux récits parallèles que nous possédons de cet épisode: celui d'Apollodore et celui de Diodore (329), auxquels nous revenons après un détour qui nous aura permis, espérons-le, de les mieux
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Eryx. Il convient, je crois, d'insister fortement sur la symétrie frappante qu'offrent ces épisodes siciliens dans le récit de Diodore. - Symétrie géographique d'abord, dans la mesure où, de cette ile aux trois caps, ne paraissent exister que les deux pôles opposés: le Sud-Est syracusain, étendu en pays chalcidien (vers Agyrion l'arrière-pays de Léontinoi) d'une part ; le Nord-Ouest autour d'Eryx avec, là encore, une extension en pays chalcidien (autour d'Himère) - Symétrie quant aux thèmes développés ensuite, puisque, dans les deux cas, le héros apparaît : 1. - lié aux forces profondes de la nature, aux entrailles de la terre (phénomènes volcaniques avec les Paliques et peut-être les Delloi, sources chaudes d'Himère et de Ségeste) (330); 2. - lié aux cultes locaux: cultes d'Agyrion et cultes des Paliques d'une part et, d'autre part, culte des Nymphes (fort vraisemblablement) et, surtout, culte d'Aphrodite Erycine. En effet, si, dans le récit qu'il donne du retour d'Héraclès, Diodore ne dit rien du sanctuaire voué à la Grande Déesse, mère d'Eryx, il le décrit très longuement par la suite. Pour l'auteur sicilien, le temple est une fondation d'Eryx, comme, d'ailleurs la ville qui porte son nom et c'est Eryx qui le premier - lui, roi indigène, fils d'un roi indigène - le comble de multiples offrandes (331), comme plus tard devait le faire Enée - cet autre ms d'Aphroditelorsque, fuyant Troie prise par les Achéens, il jetterait l'ancre dans l'île (332). Ainsi ce temple fondé "au commencement des temps" n'a jamais cessé d'être un objet de vénération, vénération des Sicanes (une fois de plus) pendant des générations, vénération des Carthaginois, vénération des Romains, enfin, qui dans les honneurs rendus à la dées~e surpassèrent tous les peuples qui les avaient précédés (333), avec raison, ajoute Diodore, puisqu'ils devaient à Aphrodite et leurs origines et le succès de leurs entreprises ! On pourrait se demander si la seule épielèse locale d'Erycine légitime qu'à cette affaire de famille on mêle Héraclès, si Pausanias, dans sa Description de la Grèce (334), n'avait vu en Arcadie, dans la ville de Psophis, le sanctuaire d'une Aphrodite nommée Erycine qu'il rapproche évidemment de celui
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d'Eryx "vénéré depuis les plus anciens temps et presque aussi riche que celui de Paphos" (335). Or ce sanctuaire avait été fondé par Promachos et Echephron, les ms de Psophis, éponyme de la ville et "selon l'opinion la plus vraisemblable (elle-même) fille d'Eryx, roi de Sicanie". Le père de ces deux jumeaux était, bien entendu, Héraclès (336). Enfm, à ce culte d'Aphrodite Erycine, peut-être faut-il ajouter le culte d'Eryx lui-même. Celui-ci en effet, fils de Poseidon pour Apollodore (337) - et cela, conformément au schéma, classique chez lui, de l'adversaire du héros -, fils d'Aphrodite et de Boutès]>Our Diodore (338), est parfois reconnu comme un dieu lui-même. Dans l'Enéide, lors des jeux organisés par Enée en l'honneur de son père Anchise, Aceste gourmande ainsi Entelle qui ne propose pas assez vite, à son gré, de combattre contre Darès: "Qu'avons-nous fait de notre dieu, de cet Eryx que tu proclames vainement ton maître ? Où sont cette renommée répandue par toute la Sicile et ses trophées qui pendent sous ton toit" (339). Qu'il s'agisse bien de l'adversaire d'Héraclès ne fait aucun doute puisque les trophées en question sont les deux cestes "d'un poids monstrueux" avec lesquels combattait Eryx, avec lesquels, en particulier, "il tint contre le Grand Alcide" (340). Et lorsqu'Entelle, finalement vainqueur de Darès sacrifie l'enjeu même de la lutte, c'est à Eryx, qu'il offre la victime: un boeuf, une fois de plus (341). Quant à Enée, lorsqu'il décide enfin de gagner les rivages italiens promis par les dieux, avant de quitter la ville qu'il vient de fonder et le temple "voisin des étoiles" que, sur le sommet du Mont Eryx, il a construit pour la Vénus de l'Ida, il immole trois jeunes taureaux à Eryx (342), qui, s'il se voit dépossédé de son rôle de fondateur, apparaît manifestement, chez Virgile, comme la divinité du lieu. Trois taureaux... Le chiffre est-il donné au hasard? ou participe-t-il d'une même tradition qui, dans le texte de la Bibliothèque, conduit Apollodore à mentionner la triple lutte d'Eryx et d'Héraclès: par trois fois en effet le héros grec terrasse le roi des Elymes avant de le tuer et de lui reprendre le taureau qu'il avait mis dans ses troupeaux... Cette triplicité qui est aussi celle de Géryon, celle de Cerbère ou d'Hécate, en un mot celle des êtres infernaux, fait d'Eryx, non pas seulement un indigène auquel dut s'affronter Héraclès, mais un adversaire assez proche du pasteur d'Erythie encore, un personnage mythique (et rappelons-le, un dieu, chez Virgile) dont la prégnance symbolique reste très forte. Ceci en parfait accord avec le sens même du mythe: l'enjeu du combat pour Héraclès est clair: s'il ne ramène pas les boeufs, c'est l'immortalité qu'il perdra. La victoire sur Eryx représente donc
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bien une victoire sur la mort. 4.- La lutte d'Héraclès avec Eryx n'en met pas moins le héros grec en rapport avec les indigènes du Nord-Ouest de la Sicile. Eryx est en effet leur roi et si Diodore. dans son récit. ne mentionne que les Sicanes. Apollodore. pour sa part. en fait le roi des Elymes (343). Pour Thucydide. ces derniers sont avec les Sicanes et les Sicules - et après les Cyclopes et les Lestrygons qu'il vaut mieux abandonner aux poètes! - les premiers habitants de l'île. les "Barbares" que trouvèrent les Grecs à leur arrivée en Sicile. Ils sont. précise-t-il. d'origine troyenne. ont fui Ilion prise par les Achéens. se sont installés au voisinage des Sicanes et ont fondé. avec eux. les villes d'Egeste et d'Eryx (344). Cette tradition de l'origine troyenne des populations occidentales de l'île. bien établie dans l'Antiquité. est affirmée. aussi bien par le Pseudo-Scylax qui. lui aussi. donne ces "Troyens" parmi les populations barbares de Sicile C'EÀUjJ.Ol. Iucavoi. Iuc&Àoi. ~o{vnc&". TpW&c- ) (345) en les distinguant toutefois des Elymes. Elle l'est encore par Plutarque qui. nous avons eu l'occasion de le voir. mentionne l'origine troyenne des habitants de Ségeste (346). par Pausanias également. pour qui les "Phrygiens". forment. avec les Sicanes et les Sicules la population antérieure à l'arrivée des Grecs (347). Cette idée - fort couramment admise dans l'Antiquité - de l'origine troyenne des Elymes repose. il faut le dire. sur bon nombre de légendes de fondations donnant aux villes élymes des éponymes troyens. Ainsi Apollodore fait du troyen Egeste le fondateur de Ségeste (348). Ainsi. surtout. Lycophron développe longuement. dans son Alexandra. le récit des origines de la cité: aux sources de son histoire. le projet d'offrir en sacrifice au monstre marin qui ravageait la Troade. Hésioné. fille de Laomédon (349). Le conseil en avait été donné par Phénodamas et c'est pour se venger que Laomédon avait expédié les trois filles de ce dernier en Sicile où elles devaient être dévorées par les fauves. Echappant miraculeusement à la mort. elles fondent sur le mont Eryx un sanctuaire à Aphrodite zérinthienne qui les avait sauvées et l'une d'elles Egesté unie au fleuve Crimisos - qui avait pris la forme d'un chien - donne naissance à Egestes. fondateur des trois villes élymes : Egeste (ou Segeste). Eryx et Entella... C'est lui aussi qui aurait conduit. à cet endroit de la Sicile. Elymos. fils bâtard d'Anchise (350). La Grande Déesse d'Eryx était ainsi devenue orientale...• mais Enée - dont la venue dans le Latium est pourtant mentionnée
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dans l'Alexandra (351), n'était pas encore mis en rapport avec l'épisode. C'est aussi une version plus tardive de cette légende troyenne qui nous est rapportée, avec quelques variantes, par Denys d'Halicarnasse, et par Virgile. Le premier qui men~onne le départ d'Egestos et d'Elymos après la chute de Troie, connaît les origines, mi-troyennes - mi s~ciliennes d'Egestos et fait aborder Enée chez ces Troyens de Sicile au cours des longues pérégrinations qui devaient le conduire sur les côtes italiennes (352). Mais c'est, bien sûr, Virgile qui donne le récit le plus complet de cette interprétation romaine de la légende: lui aussi connaît l'origine troyenne d'Aceste et lui donne pour père le dieu - fleuve sicilien Crimisos (353), mais il développe surtout l'épopée d'Enée qui quitte Troie en flamme, s'embarque avec un grand nombre de ses compatriotes, pour fonder une nouvelle Troie et pendant de longues années "poursuit à travers l'Océan, une Italie qui recule devant (lui)" (354). Il rapporte comment, après que fut achevé "le septième été depuis la chute de Troie", les femmes troyennes lasses de parcourir le monde tentent d'incendier la flotte et incitent Enée (conseillé en ce sens par ses compagnons et par l'ombre de son vieux père Anchise) à laisser, auprès du roi Aceste, les plus âgés de ses compatriotes. Nous avons dit, déjà, comment, pour Virgile, la fondation d'Eryx et du temple d'Aphrodite était liée à cet épisode (355). Nous ne traiterons pas ici de cette version romaine et peut-être tardive de la légende .(356). Jean Bérard remarque que son développement doit sans doute beaucoup aux liens qui unirent les Elymes et les Romains, lorsque ces derniers eurent introduit, en 215 avant notre ère, le culte de Vénus Erycine au Capitole (357). Il reste que, si l'on en croit Denys d'Halicarnasse, Hellanicos, dès le Vème siècle, mentionnait l'origine troyenne d'Aegestos et des Elymes et la venue d'Enée dans le Latium (358); peut-être même de telles traditions furent-elles connues dès l'époque archaïque (359) ? Cependant il faut bien remarquer que, si Thucydide en conclut à l'origine troyenne des Elymes, il n'en est pas de même d'Hellanicos pour qui ces derniers sont des peuples chassés d'Italie par les Oenôtres... la première de ces migrations qui devaient ensuite amener en Sicile les Ausones et leur roi Siculos (360)... Afftrmation qui peut surprendre, tant il semble que les Elymes fassent ftgure d'autochtones! Pour Lorenzo Braccesi, cette question de l'origine des Elymes souffre de la confusion entretenue entre ces épopées individuelles qui amenèrent les Troyens sur les côtes occidentales
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(sans pour autant impliquer de vastes mouvements de populations) et ces traditions qui concernent des peuples entiers auxquels on prete ainsi une origine troyenne (361). Sans doute est-il de bonne méthode de rappeler que, si les premières sont susceptibles d'avoir alimenté, voire autorisé, la naissance des secondes, on ne saurait, sans imprudence les confondre. L'exemple d'Hellanicos le prouve, qui transmet les unes, sans pour autant admettre les autres! En l'occurrence, ni les arguments arch60logiques, ni les arguments linguistiques ne paraissent décisifs pour appuyer la thèse de l'origine orientale des Elymes (362), et les suggestions de l'auteur sont assez convaincantes, qui en accorde le ~t à la propagande entourant la politique occidentale d'Athènes au Vème siècle. N'est-il pas frappant, en effet, que soient ainsi reconnus comme descendants des Troyens tant les Venètes (on connaît l'intérêt économique de la cité pour le Nord de l'Adriatique !) (363) que les Chônes (autour de Sirls) et les Elymes ! Segeste, le plus ferme soutien, en Sicile, de cette politique occidentale d'Athènes ne prenait pas rang parmi les cités grecques, certes... du moins n'était-elle plus une ville barbare, les Troyens jouissant de cette position ambigu! que définit si bien G. Karl Galinski, lorsqu'il les dit "neither totally identical with the Greeks, nor totally different from them" (364). Nous ne prétendons pas résoudre ce problème qui manifestement demeure, pour les historiens comme pour les archéologues italiens, une vexa ta quaestio . Contentons-nous de retenir : - que, dans cette région Nord-Ouest de la Sicile autour d'Eryx (comme à Padoue autour de Géryon), la légende d'Héraclès voisine avec la légende troyenne (365). Que celle-ci ait été utilisée par la suite pour conférer une origine orientale aux Elymes (comme aux Vénètes) ne nous concernerait guère, si le fait ne permettait, une fois de plus, de souligner les extraordinaires potentialités du mythe... Que cette origine orientale soit rien moins qu'hypothétique, en tout cas, n'enlève aucun inérêt à la rencontre en ces mêmes lieux de ces épopées individuelles : légende troyenne, légende héracléenne. Rome, de la même manière, les réunira.. - En ce qui concerne les Elymes, les conclusions des archéologues tendent, nous semble-t-il, à prouver avec force leur parenté étroite avec les Sicanes: à Ségeste, en particulier, la culture élyme repose sur un substrat nettement identifiable comme sicane (366). C'est donc assez tardivement que se différencieraient les deux groupes ethniques et, sans adopter les
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vues radicales de ceux qui apprécient la distinction Elymes/Sicanes comme un phénomène d'ordre essentiellement politique (les EIYmes étant des Sicanes unifiés sous contrôle punique), on peut à bon droit penser que des influences orientales, phéniciennes, puis carthaginoises sont en partie responsables de l'originalité des Elymes et, peut-être même, de cet aspect quelque peu exotique qui accrédita l'idée de leur origine troyenne (367). Si, pour Apollodore, la lutte contre Eryx, roi des Elymes, constitue l'essentiel du mythe "sicilien" d'Héraclès, il n'en est pas de même, visiblement, pour Diodore, pour qui il n'est qu'un prélude; prélude à une tentative de conquête de cet Ouest Sicilien par Dorieus. Eryx, en effet, a joué son royaume; il a perdu et ~ dû renoncer à ses territoires. Héraclès, s'il rend le pays aux indigènes et leur en accorde la jouissance, annonce toutefois qu'un de ses descendants leur en demandera la restitution (368). La lecture de l'épisode, tel qu'il est rapporté par Diodore, est claire. Il s'agit, soit de légitimer a posteriori l'expédition de Dorieus (ce qui pourrait paraître curieux dans la mesure où elle échoue rapidement, mais il se trouve que le texte de Diodore tend, justement, à masquer cet échec), soit de la motiver et c'est probablement à cette fin que, dans un premier temps, a été utilisé l'épisode du combat contre Eryx: excellent thème de propagande destiné à accompagner, à soutenir et justifier à la fois, la tentative du Lacédémonien. Les aventures de Dorieus sont, en effet, parfaitement historiques et attestées par Hérodote dès le Vème siècle (369). Celui-ci rapporte comment Dorieus, évincé de la royauté à Sparte, ne peut souffrir de vivre sous le sceptre de Cléomène et, sans consulter l'oracle de Delphes, "sans satisfaire à aucun des usages", réunit quelques hommes et s'embarque pour la Libye. n en est chassé trois ans plus tard par les Libyens et les Carthaginois et c'est un Béotien ("un homme d'Eléon") (370) qui lui donne le conseil, tiré des oracles de Laios, de coloniser "la terre d'Héraclès qui était en Sicile" (371). Hérodote explique qu'en effet "tout le pays d'Eryx appartenait aux Héraclides, Héraclès en ayant fait lui-même l'acquisition"(aùToü 'Hpad,Éot' xT"O'a~vou). La Pythie, consultée, donne une réponse favorable et, après l'épisode contesté de sa participation à la lutte de Crotone contre Sybaris (372) - mais qui expliquerait l'échec de sa tentative, dans la mesure où auraient été ainsi dépassées les prédictions de l'oracle - Dorieus et ses compagnons font voile vers la Sicile où ils sont écrasés par les Phéniciens et les gens de Ségeste (373). Pausanias, qui, lui aussi, explique la tentative de
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Dorieus par le fait que depuis la lutte d'Héraclès contre'Eryx le pays appartenait au héros grec, tire la "morale" de l'événement :"les dieux ne furent pas aussi favorables à Dorieus qu'ils l'avaient été à Héraclès, car ce héros tua Eryx et Dorieus fut taillé en pièces avec son année par les Egestéens" (374). Pausanias, on le voit, fait des seuls indigènes les vainqueurs de Dorieus ; pour Diodore, au contraire, ce sont les Carthaginois qui s'opposent à la présence grecque, non pas, comme chez Hérodote, dès l'arrivée de la flotte, mais lorsque la ville fondée par Dorieus, Héraclée, leur paraît trop menaçante. La version de Diodore a ainsi transformé en succès ce qui, pour Hérodote encore, était un échec (375) : les indigènes ne se sont pas opposés à la récupération de l'héritage d'Héraclès et c'est au contraire la fortune rapide de la cité grecque qui explique l'intervention de ses voisins jaloux. Dorieus, pour lui, avait trop bien réussi dans son entreprise ! Les ambitions lacédémoniennes ne nous intéressent pas en tant que telles et l'entreprise de Dorieus a fait l'objet déjà de bien des études (376). Ce qui, pour nous, est en revanche essentiel, c'est l'insertion de l'épisode dans le cadre des rapports Grecs/indigènes en Sicile même. En ce domaine le dynamisme de Sélinonte vers son arrière pays frappe tous les observateurs : un dynamisme politique avec les expéditions successives de Pentathlos et de Dorieus ; un dynamisme économique et culturel apparemment mieux accueilli. Qu'il s'agisse des fouilles conduites par V. Tusa dans le sanctuaire de Mango découvert en 1952 au pied du Mt Barbaro (377), ou du dépôt de céramique de Grotta Vanella, toutes les observations prouvent que, dès la fondation de Sélinonte, Ségeste a eu des contacts très rapides et très féconds avec le monde grec (378). Or le rôle d'Héraclès n'est sans doute pas négligeable dans cette dynamique de l'expansion : la fameuse inscription de Poggioreale, dédicace en dialecte dorien et alphabet selinontin, datée par M.T. Piraino-Manni des dernières années du VIIème ou, plus vraisemblablement, des premières années du Vlème siècle, n'est peut-être pas, comme l'avait avancé Juliette de la Genière, le signe de l'adoption par les Elymes du dieu Héraclès (379), elle témoigne en tout cas de l'implantation des cultes et de l'alphabet sélinontin dans la haute vallée du Belice, et ce dès avant l'expédition de Pentathlos (580)... Que Pentathlos, que Dorieus, après lui, se disent descendants d'Héraclès n'étonne plus. Le héros de Sélinonte est bien l'Héraclès dorien, le conquérant dont, à bon droit. se réclament ses héritiers. Faut-il, pour autant, comme le fait L. Pareti, (380) voir
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dans cette séquence nord-occidentale du mythe héracléen un motif inventé pour la circonstance? Plus que les autres épisodes siciliens la rencontre d'Héraclès et d'Eryx nous semble permettre une réponse claire. Le texte de Diodore est loin, nous l'avons vu, du texte d'Apollodore, pour qui seule compte la renco~tre du héros et d'un roi indigène, voleur de troupeaux... Plus clairement qu'ailleurs s'y manifeste l'utilisation du mythe à des fins historiques précises; plus nettement qu'ailleurs s'y exprime la forte empreinte de la colonisation: une empreinte qui, d'ailleurs, là comme dans la partie orientale de la Sicile, paraît composite : dans les deux cas nous avons vu intervenir les terres de fondation chalcidienne : Himère avec ses sources chaudes, l'arrière pays de Léontinoi avec ses cultes indigènes ; dans les deux cas nous est donnée l'image pacifique d'un héros reprenant à son compte et marquant du sceau grec des cultes locaux (381). En revanche, dans les deux. cas aussi, avec Syracuse et les conquêtes territoriales des Deinoménides, avec Sélinonte et sa volonté d'expansion vers l'intérieur, le héros nous a paru servir les intérêts d'une colonisation d'une manière autre, plus brutale, plus conquérante et il est tentant de retrouver, dans le mythe, la différence qu'établissait naguère G. Vallet entre une colonisation de type chalcidien et une colonisation de type dorien dont les buts aussi bien que les méthodes s'individualisaient fortement (382)... Il est tentant, en conséquence, de rechercher dans la genèse de ce qui allait devenir la version "coloniale" ou "sicilienne" du mythe d'Héraclès deux étapes: la première, avec Stésichore, un chalcidien d'Himère, implantant solidement le mythe en terre sicilienne, la seconde l'utilisant en fonction de circonstances historiques (et de besoins) plus précis. Mais au-delà de cette empreinte coloniale il faut rappeler que, de la Sicile, Héraclès avait connu d'abord Solonte et Motyé, éponymes de deux cités non pas grecques, mais phéniciennes, que l'Aphrodite d'Eryx à laquelle est liée sa légende est, certes une de ces grandes déesses méditerranéennes, mais qu'elle fut adoptée par les Phéniciens et reconnue comme leur Astarté avant de l'être comme une déesse grecque par les colons siciliens... Le mythe d'Héraclès paraît donc bien avoir, avec la Sicile, d'autres attaches que celles que lui ont données les colons grecs. Une de nos premières sources, Hécatée de Milet, la mer, en effet, en rapport avec Solonte et Motyé. La première de ces cités aurait pour éponyme l'un de ces rois malfaisants punis par Héraclès pour leurs moeurs inhospitalières. Quant à Motyé, elle conserverait le souvenir de la femme qui dénonça au héros grec le voleur de ses troupeaux (383)... deux thèmes, on le remarquera,
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qu'illustre avec constance le retour d'Héraclès! Peut-être ne faut-il lire dans ces indices qu'une simple variante? que la volonté, une fois de plus affIrmée de la part des Grecs de "s'approprier" par le truchement du mythe non seulement le pays indigène, mais encore les établissements étrangers en Sicile? La localisation à Eryx du seul épisode sicilien du retour que préserve Apollodore nous paraît au contraire témoigner d'un lien qui, comme le culte de la Grande Déesse honorée en ce lieu, remonte "au commencement des temps" (384)... La tradition, on l'a vu, donne un assez fIdèle reflet des avatars de la déesse d'Eryx : divinité indigène pour ne pas dire autochtone (385) dont les attaches avec la tradition arcadienne rapportées par Pausanias, ce conservateur d'archaïsmes (386), pourraient fort bien révéler quelque rapport avec le monde égéen (387), cette Aphrodite est très vite donnée comme orientale... une origine que les caractères de son culte avec ses hiérodules et ses colombes sacrées ne pouvaient démentir. Déesse zérinthienne (388), déesse de l'Ida (389), ce n'est que dans un deuxième temps, avons-nous vu, qu'elle est mise en rapport avec les errances d'Enée. Mais celle en qui les Grecs avaient cru reconnaître leur Aphrodite était depuis longtemps déjà pour les Phéniciens Astarté... Astarté dont nous savons les rapports qu'elle entretient avec Héraclès-Melqart (390)... Astarté auprès de qui se fixe l'épisode principal (le seul peut-être à l'origine ?) de la légende sicilienne du héros grec. Cette légende, les colons grecs ne l'ont donc pas inventée. Héritiers, sans doute, du souvenir lointain de ce "découvreur" qu'avait été Héraclès aux temps héroïques, héritiers, dans un passé plus proche, de ces orientaux qui, avant eux, croisèrent aux abords de l'île, ils surent admirablement exploiter la tradition, enrichir et préciser un mythe dont ils avaient saisi les potentialités intégratrices et dominatrices... Et c'est sur un autre plan qu'il nous faut maintenant reprendre l'étude de ces "dérivations" apportées par les colons au mythe occidental d'Héraclès: au delà de la multiplication des épisodes due aux circonstances ou aux revendications de telle ou telle cité, c'est désormais à cette réinterprétation totale du mythe que nous nous intéresserons.
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HÉRACLES CIVILISATEUR HÉRACLES ET LA COLONISATION
<m :
RESÉMANTISATION DU MYTHE
L'un des paradoxes d'Héraclès - et non le moindre - oppose un héros qu'on a pu dire "culturel" ou "civilisateur" (391) au rustre - le même pourtant? - dont la vigueur exceptionnelle s'exerce surtout pour la satisfaction de ses besoins les plus matériels. De ce héros brutal et si peu soucieux lui-même d'apparaître "civilisé", la tradition a laissé une image bien établie: celle du goinfre dont le fracas des mâchoires fait, lorsqu'il mange, mourir de peur son entourage (392); celle du buveur impénitent, largement exploitée par la comédie antique (393) ; celle du surmâle aussi, capable en une nuit, de rendre mères les cinquante filles de Thespis (394). Cette image, il n'est pas facile de s'en débarrasser en en faisant le fruit de l'exagération et de la licence comiques, puisque la tragédie elle-même peut la reprendre : dans l'Alceste d'Euripide, par exemple, c'est la couronne sur la tête et la coupe à la main qu'Héraclès apparaît sur scène et ses chants d'ivrogne couvrent en partie les lamentations funèbres dans la maison de son hôte (395). Enfin, de façon assez cohérente, l'imagerie céramique et la littérature insistent sur les difficultés d'Héraclès avec les Muses, sinon avec la culture: lorsqu'on tente de l'instruire, c'est un livre de cuisine qu'il choisit dans la bibliothèque de son maître (396) et une coupe du musée de Munich - entre autres - le montre assommant Linos, son maître de musique (397). Pourtant il ne viendrait à personne l'idée de nier que, chez les mythographes de l'époque hellénistique et romaine, Héraclès est, pour ne citer que Diodore, celui qui, par ses travaux a "répandu la civilisation sur la terre" (398), celui qui, et nous aurons l'occasion d'y revenir, vint, après les dieux, parfaire l'organisation d'un monde qu'ils avaient quelque peu bâclée. Un exemple remarquable se trouve encore chez Macrobe qui attribue à Héraclès la transfonnation des Saturnales. D'un rite barbare où l'on offrait des sacrifices humains il fit une fête civilisée en proposant des offrandes de substitution et en expliquant qu'on avait mal compris les exigences des Olympiens (399). On pourrait
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comme G. Murray, être tenté de voir dans l'Héraclès d'Epicharme - et de tant d'autres! - la figure primitive du héros, le héros d'une population "in a low stade of culture" (400). Etudier la fonction culturelle ou civilisatrice d'Héraclès pourrait alors se résumer à suivre, dans l'histoire, les progrès d'une société vers la culture, progrès dont se charge un héros très vite pouvu d'une valeur paradigmatique pour ceux qui l'ont, si j'ose dire, progressivement mis au point. Mais, si l'entreprise est fondée, elle paraît, à tout le moins insuffisante. Nous l'avons dit, déjà, le discours mythique n'est pas le nécessaire reflet de la réalité et le rapport qu'il entretient avec elle n'est pas toujours de l'ordre de la représentation. Deux particularités, d'ailleurs, méritent de retenir l'attention: - d'abord la coexistence continue de ces deux "images" du héros, une coexistence qui s'expliquerait mal si ce dernier, simplement, avait "évolué" ou "progressé" au même rythme que la société qui l'a vu naître ; - la force d'une opposition, plus fondamentale, peut-être, qu'on ne le souligne habituellement: Héraclès n'est pas seulement la joyeuse brute dont nous avons parlé, il est, à certains égards, la bête. Sa forte pilosité provoque l'hilarité des Cercopes ; son repas est celui d'un fauve: ses canines grincent, ses narines sifflent, ses oreilles s'agitent (je complète la citation d'Epicharme) (401) ; les viandes que Pholos lui propose rôties, il préfère les manger crues (402) et il est capable de dévorer tout entier (et cru 1) un boeuf qu'il vient de dételer (403). Il est aussi le héros à la massue, cette arme d'avant la civilisation (404) ; il est enfin l'homme à la léonté et cette peau qu'il porte, "crue et non tannée", dit Apollonios de Rhodes (405), fait de lui, presque à l'image du Centaure - l'homme-cheval -, un homme fauve, un homme sauvage, presque un monstre semblable à ceux dont Eurysthée lui demandera de purger la terre. Or, cette opposition frappante entre un héros brutal - et disons le mot "naturel" - et ses travaux qui d'emblée le situent du côté de la civilisation, de la culture, trouve, me semble-t-il, un éclairage intéressant dans les rapports qu'entretient le mythe héracléen et la colonisation et nul n'est mieux placé que Diodore pour nous en proposer les clefs. C'est donc dans le long excursus que l'historien sicilien consacre au héros que nous allons reprendre cette étude de la "fonction culturelle" d'Héraclès, une fonction qui devait donner au mythe un nouveau sens, riche de développements futurs.
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PREMIER CHAPITRE DE LA VIE SAUVAGE A LA VIE CIVILISÉE: HÉRACLES ET LA DEFINITION D'UNE CULTURE
Héraclès a, dit Diodore, "obtenu .l'immortalité par ses pénibles travaux entrepris au profit du genre humain" (406). Ces travaux qui apportèrent la civilisation, Diodore hésite d'ailleurs à les attribuer au fils d'Alcmène dans la mesure où, dit-il, "la plupart des pays étaient déjà civilisés, et se distinguaient par l'agriculture, le nombre des villes et de leurs habitants". Il suggère, en conséquence, de les replacer "dans des temps bien plus reculés", lorsqu'existaient encore un grand nombre d'animaux sauvages. Héraclès alors "nettoya la terre de ces animaux, livra le sol aux cultivateurs et obtint les honneurs divins" (407). Mais, si Diodore s'avoue gêné par cette multiple personnalité d'Héraclès et les problèmes qu'elle ne manque pas de poser à l'insertion du héros dans la suite des temps mythologiques (408), il paraît l'avoir oubliée, lorsque, dans le livre IV, il se propose "de rapporter par ordre les actions d'Héraclès conformément au témoignage des plus anciens poètes et mythographes". C'est bien ici le fils d'Alcmène qui répand sur terre les "bienfaits de la civilisation" (409). Diodore entame alors le long récit des aventures d'Héraclès, véritable biographie, qui nous conduit de sa naissance, retardée au profit d'Eurysthée, non pas seulement à sa mort sur l'Oeta, mais encore à son apothéose et à son adoption par Héra, qui, de surcroît, lui donne pour épouse sa fille Hébé. Bien entendu, une place importante est faite au dodécathlos canonique, à l'époque parfaitement constitué (410), mais l'organisation qui en est donnée est remarquable, surtout si on la compare à celle, à la fois plus classique et plus logique, du deuxième livre de la Bibliothèque d'Apollodore (411). Curieusement, en effet, Diodore rompt l'exposé des travaux: très brièvement il rappelle, plus qu'il ne rapporte, le meurtre du lion de Némée et de l'hydre de Leme, la capture du sanglier d'Erymanthe et de la biche aux come·s d'or, la poursuite des oiseaux du lac Stymphale et le nettoyage des étables d'Augias. Le seul épisode quelque peu développé est la centauromachie chez Pholos qui n'est pas, comme chez
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Apollodore, un parergon de la poursuite du sanglier, mais un exploit à part entière (412). A cette série péloponnésienne (413), Diodore ajoute la prise du taureau de Crète et "boucle" ainsi la liste des travaux proprement grecs d'Héraclès. Le héros s'y trouve affronté à une nature sauvage et inhospitalière et à des créatures monstrueuses, mais Diodore, qui a coutume de résumer dans cette lutte contre les monstres l'essentiel de la mission civilisatrice d'Héraclès, se montre ici particulièrement discret (414). Il faut se souvenir qu'Hésiode faisait du lion de Némée le "fléau des humains" qu'il décime (415) et que la biche était, de même, pour Euripide, "un fléau pour les paysans" (416). Quant au sanglier d'Erymanthe, "il ravageait toute la Psophide" selon Apollodore (417), et l'hydre "ruinait les champs et les troupeaux" (418). Des oiseaux du lac Stymphale, cependant, Diodore dit qu'ils dévastaient les récoltes des contrées voisines (419), alors que Pausanias les affirme av6pocpayo\ (420). Quelle que soit la signification originelle de chacune de ces séquences dans la vie du héros - et dans l'imaginaire des Grecs -, il est clair que, dès l'époque archaïque, cette domination qu'exerce Héraclès sur la nature dans ce qu'elle a de redoutable (les monstres) ou simplement d'utile à l'homme (le fleuve Pénée détourné pour nettoyer les écuries d'Augias) est bien la marque de la civilisation. La lutte contre les Centaures a encore le même sens: ces "monstres de la montagne" (421), comme les nommait Homère, "ces êtres insolents, sans loi, orgueilleux de leur force" (422) sont, chez Diodore, armés dans leur combat contre Héraclès de haches, de grosses pierres, de pins déracinés et représentent, à l'évidence, la force brutale, la démesure d'êtres rebelles à toute civilisation (423). Si l'on quitte le domaine des athla, dans cette partie "grecque" de sa vie, Héraclès a encore l'occasion de tuer le coupable d'un viol (424), de défaire, puis de faire périr Erginos qui imposait une autorité tyrannique à Thèbes, sa patrie d'adoption (425). Ainsi est posée sa fonction de redresseur de torts; il est devenu "le plus juste des meurtriers", comme l'avait dit, déjà, Pisandre de Rhodes (426). Diodore choisit alors d'interrompre ici l'énoncé des travaux canoniques pour raconter l'institution par Héraclès des Jeux Olympiques en l'honneur de Zeus et sa participation aux deux grands épisodes fondateurs: la lutte des dieux contre les Géants et la délivrance de Prométhée "puni pour avoir fait du bien aux hommes" (427). Ainsi non seulement il a sauvé les hommes des
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dangers d'une nature encore mal dominée (428), mais une dimension religieuse (celle du fondateur de cultes), et même cosmique, s'est ajoutée, naturellement dira-t-on, à sa mission civilisatrice. Après avoir ainsi sacrifié à la tradition et consigné brièvement, discrètement, un très vieil héritage dont il ne retient guère que ce qui lui paraît être l'enseignement essentiel - pour son propos en tout cas -, Diodore se consacre à l'exposé des aventures lointaines du héros. Reprenant cette extension pleine de sens que donnaient les Grecs à l'activité d'Héraclès, il rend une nouvelle vie au mythe, lui donne une nouvelle dimension, en en refaisant le lieu où s'interpénètrent étroitement le passé et l'actualité de l'histoire. C'est, en effet, vers le Nord que se dirige d'abord Héraclès pour dompter les sauvages cavales de Diomède qui se nourrissaient de la chair des étrangers; vers l'Est il s'oppose aux Amazones qui défient tellement les normes de la société grecque; ses derniers travaux le conduisent vers le Sud et vers cet extrême Ouest où, "au-delà de l'illustre Océan", il trouve à la fois les boeufs de Géryon et les pommes des Hespérides. Cette civilisation qu'Héraclès avait aidée à naître (dans des conditions que Diodore ne semble pas désireux de trop élucider) il va maintenant l'exporter tous azimuts, si j'ose dire, et l'on ne s'étonne pas trop que Diodore le Sicilien s'attarde tout particulièrement sur ce véritable périple de la Méditerranée occidentale que constitue l'expédition vers Erythie, l'île rouge, l'île de Géryon (429).
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DEUXIEME CHAPITRE HÉRACLES AUX MARGES DU MONDE: CULTURE ET BARBARIE
Dans cette deuxième partie de la geste héracléenne, le héros devient vraiment, pour Diodore, le champion de la lutte contre la barbarie. Le thème ancien du passage à la civilisation par la lutte contre les bêtes sauvages et par le don de l'agriculture survit fortement: en Crète, où il séjourne avant son départ pour l'Occident (et curieusement pas lorsqu'il vient y chercher le taureau aimé de Pasiphaé), il "purge l'île des bêtes féroces" ; il purifie de même la Libye d'un grand nombre d'animaux sauvages dont elle était remplie; il Y fait cultiver des contrées désertes "qui se couvrent bientôt d'arbres fruitiers, de vignes, d'autres plantations" - en un mot, dit Diodore, il en fait "une terre fertile et prospère". Il fait encore, avec l'aide des dieux il est vrai, disparaître une multitude de cigales qui l'incommodaient aux confins de Rhégion et de Locres (430). Dans ces transformations d'une nature hostile en une nature aménagée pour le plus grand profit de l'homme, Héraclès entreprend de grands travaux. Diodore rappelle ici qu'en Grèce il avait déjà dompté l'Achéloos et fertilisé ainsi la région de Calydon (431), qu'il avait, dans la vallée du Tempé, creusé un canal permettant aux eaux du Pénée de s'écouler vers la mer et créé ainsi la plaine de Thessalie (432)... Au cours de son voyage occidental il fait de même naître des lacs (433), ou les aménage (434) et il n'est pas jusqu'à la mer qui ne bénéficie de ses travaux, puisqu'après avoir, aux deux extrémités de la Libye et de l'Europe, érigé les deux colonnes qui laisseront "un souvenir immortel de son expédition", il retouche le passage entre la Méditerranée et l'Océan (435). Cet Héraclès voyageur découvre, ouvre, ou, là encore, améliore des passages, des routes: traversant les Alpes il rend la route "accessible à une armée" (436), il en construit une le long des côtes, dans la région du lac Averne (437). Le fait vaut peut-être qu'on s'y attarde, car il est un dieu qui lui aussi sillonne et ouvre des chemins (438) : Hermès, qui, dans une situation semblable, conduit les troupeaux d'Apollon à l'écart des routes habituelles, dans une contrée sauvage, ouvre des passages. Mais, comme le dit L. Kahn-Lyotard, "Hermès passe" et le pays se referme derrière lui, redevient sauvage. A la différence du dieu, le héros n'est pas un brouilleur de pistes, il
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ouvre et garde ces voies à l'usage des hommes. C'est aussi pour pennettre un meilleur exercice de la vie civilisée qu'Héraclès "rend les villes florissantes" (439) et surtout fait naître des cités là où elles n'existent pas : dans le seul récit de l'expédition contre Géryon, il créé Hécatompyle en Libye (440) ; dans la Celtique il fonde Alésia (441) et la naissance de Crotone est directement liée aux incidents qui marquent son passage dans la région (442). Cet Héraclès xTiaT"" intervient d'ailleurs, on l'avait déjà remarqué, dans les traditions relatives à l'origine de très nombreuses cités (443). L'objectif de ces créations est clairement exprimé par Diodore : partout où il passe, le héros extermine "les scélérats ou les despotes insolents" ; en Libye, il tue Antée "qui provoquait tous les étrangers à la lutte" ; en Egypte, il châtie, en l'immolant à Zeus, Busiris "qui massacrait tous les étrangers arrivés dans le pays" ; il exécute d'un coup de bêche Sylée qui, au pays d'Omphale, "enlevait les voyageurs étrangers et les obligeait à travailler ses vignes" ; toujours au service d'Omphale, il élimine les brigands - parmi lesquels les Cercopes - qui infestaient la contrée (444). Son oeuvre, en Gaule, est, de ce point de vue, exemplaire: "il abolit les coutumes sauvages, et, entre autres, celle de tuer tous les étrangers" (445) ; il assure de même la sécurité des passages des Alpes en châtiant les brigands "qui avaient coutume de piller et massacrer les troupes qui les traversaient" (446). Il y a plus, le mythe de Géryon lui-même se transforme et Diodore l'interprète de façon évhémériste : Héraclès n'est plus le héros qui combat seul un monstre tricéphale; il est le chef de guerre qui lève une armée et équipe une flotte puissante pour vaincre les trois ms de Chrysaor, ainsi nommé à cause de ses richesses (447). Médiateur entre les Grecs et les Barbares, Héraclès ne l'est pas moins entre les Grecs - ou les Barbares - et les dieux. S'il était, en Grèce, fondateur du culte panhellénique le plus connu, lui sont rapportés, dans le monde grec, de très nombreux rites: ceux, bien sûr, qui l'honoreront dans le futur, en Ibérie, par exemple, le sacrifice annuel d'un taureau (448) ; à Rome, les rites de l'Ara Maxima et la dîme (449) ; à Agyrion, les honneurs divins auxquels il consent comme indices de son immortalité future (450). Mais, revenant avec les boeufs de Géryon, Héraclès, nous l'avons vu, enseigne aussi aux habitants de la future Syracuse comment sacrifier aux deux déesses; à Agyrion, il fonde un culte au héros Géryon, en un lieu qui, remarque Diodore, est à son
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époque encore vénéré des indigènes (451). et il institue en l'honneur de son neveu et compagnon d'annes. Iolaos. des cérémonies annuelles. très liées à l'initiation des adolescents et à leur passage dans la classe adulte (452). En Sicile encore. le héros est mis en rapport avec les cultes des sources. des sources chaudes en particulier (453). et en Italie le temple d'Héra Lacinienne rappelle ce Lacinios qui voulait lui dérober ses vaches et qu'il assomma près de Crotone (454). Les préoccupations de Diodore sont claires. Héraclès. voyageur. explorateur. fondateur de 'villes et de cultes. est l' T'JY&f1WV (455) par excellence. il ouvre la voie et assure la sécurité de ceux qui. après lui. viendront explorer et prendre possession des lieux. Il est l'oikiste et le projet de Diodore s'éclaire d'un autre épisode de cette geste occidentale d'Héraclès: la colonisation de l~ Sardaigne. non pas sous sa direction. il est vrai. mais sous la conduite des Thespiades et de son neveu Iolaos (456). Le récit en est exemplaire: Iolaos soumet les insulaires dans un combat. s'adjuge le plus bel endroit de l'île. défriche cette contrée qui devient vite célèbre pour sa fertilité. la fortifie et y exécute de très grands ouvrages. "de grands et beaux gymnases. des tribunaux. en un mot tout ce qui peut faire prospérer une colonie". Dans son cinquième livre Diodore résume ainsi l'entreprise: "Iolaos... vint occuper le pays. y bâtit des villes considérables et après avoir partagé le sol entre ses compagnons il leur donna le nom d'Ioléens" (457). Héraclès apparaît ainsi. chez Diodore. comme le héros civilisateur par excellence. Il est toujours celui qu'il était autrefois: il purifie (458). il pacifie (459). mais son action opère dans un autre cadre. celui de l'oicouménè ; il a fixé pour les Grecs les bornes du monde connu. les bornes du monde à conquérir; il défend contre le danger (460).... mais ce danger est celui que représente la nature encore brute des pays barbares. les moeurs encore sauvages des Barbares eux-mêmes (le Barbare inhospitalier et xénophobe est chez lui une véritable obsession) et. s'il est toujours "le bienfaiteur et l'ami des hommes" (461). c'est essentiellement au profit de ceux de son peuple: des Grecs. dont il justifie les entreprises coloniales (et la lecture historique peut parfois être très directe. comme dans le cas du royaume d'Eryx promis à Dorieus) (462); des Grecs donc, mais encore des Romains à qui il peut être utile également d'avoir un aussi illustre prédécesseur. Alors que l'Héraclès d'Apollodore ne fait qu'effleurer la Gaule et ne rencontre que des Ligures. celui de Diodore fonde Alésia. dans les profondeurs de la Celtique. "ville libre et imprenable depuis le passage du héros jusqu'à ce que
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César réussisse à la soumettre" (463). César, qui, comme son "modèle" mythique, mérite ainsi d'être "divinisé pour ses exploits"! (464). L'exemple est intéressant, car il propose un curieux renversement: après la création de la cité, explique en effet Diodore, un grand nombre d'indigènes viennent s'y établir et "noient", en quelque sorte, l'élément grec, à tel point que toute la population adopte les moeurs des Barbares (465). Echec à la théorie de la fonction civilisatrice d'Héraclès en Occident? Prise de conscience d'une résistance à l'acculturation? Ni l'un ni l'autre sans doute, mais prise en compte d'une double nécessité: légitimer les droits de la civilisation sur Alésia, mais en même temps justifier la conquête par César d'un pays redevenu barbare. L'histoire semble bien, chez Diodore, détourner le mythe (466). Et c'est au mythe, pourtant, qu'il faut maintenant revenir, pour situer plus précisément dans l'histoire la fonction culturelle du héros, fonction qui, chez Diodore, apparaît, pratiquement, comme la seule raison d'être de sa légende. Le récit qu'il présente de la vie d'Héraclès, en effet, donne l'exemple même d'une tradition mythique "manipulée". Elle l'est par Diodore, qui l'infléchit en fonction de l'événement (Héraclès s'enfonce dans les terres de la Celtique, parce que la pénétration romaine est plus profonde que la présence grecque limitée aux marges de la Gaule). Elle l'a été, déjà, par bien d'autres, qui, en fonction des traditions locales ou de revendication précises, ont ajouté de nouvelles séquences au mythe du voyage vers l'ouest qu'il était si tentant d'enrichir. Le récit étiologique des droits qu'aurait eus Dorieus sur le royaume d'Eryx n'est qu'un exemple, nous venons de le voir, de cet enrichissement spectaculaire de la geste d'Héraclès, par les Grecs d'Occident (467). Ce qui nous retiendra ici, c'est plutôt ce processus de "bricolage" du mythe, parfois facile à saisir et à localiser, parfois beaucoup plus obscur, dans la mesure où il se perd dans la nuit des temps... "Bricolage" qui, en tout état de cause, laisse le mythe resémantisé et, dans le cas d'Héraclès, finit par faire du héros l'archégète des colonisateurs.
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TROISIEME CHAPITRE LA CITÉ "MODELE ABSENT" DANS LE PROCES D'ACCULTURAnON
Devenu mythe de la colonisation, le mythe d'Héraclès est encore un mythe de la géographie des GrecS: le héros, mettant un terme à ses navigations "là où commence la mer inaccessible", place deux colonnes, au delà desquelles "il n'est pas aisé de pousser plus avant" (468). Il marque, par là-même, les bornes occidentales de l'oicouménè, comme les errances de Dionysos en marquaient les bornes orientales. Diodore, d'ailleurs, se plaît à comparer au fils d'Alcmène, cet autre bâtard de Zeus qui, comme lui, parcourut toute la terre, répandit partout où il passait "les bienfaits de la civilisation" et pour cette raison même reçut, lui aussi, l'immortalité (469). C'est donc bien une frontière qu'a posée Héraclès, une frontière à l'espace revendiqué pour la civilisation; et cet espace il le parcourt, le marquant de l'empreinte grecque. Il ne fait aucun doute qu'en Occident les aventures d'Héraclès sont devenues une manière de légitimation, de justification de la colonisation et Maurizio Giangiulio avait tout à fait raison à Cortona de parler de "mito di precedenza" (470). Ce qu'Héraclès avait fait, les Grecs s'autorisaient ainsi à le refaire "pour le plus grand profit du genre humain", comme le disait Diodore (471). Cette problématique d'Héraclès apportant la culture aux Barbares se renforce - ou se complique - du rôle qu'on lui attribue dans l'origine même des peuples barbares, de ceux qui en tout cas compteront le plus pour les Grecs. Traversant la Celtique, il a, de la fille d'un des rois du pays, un fils nommé Galatès qui donnera son nom à son peuple (472). En Italie, il laissera de même deux fils à Lavinia fille d'Evandre et Faunus épousera la jeune fille hyperboréenne enceinte de ses oeuvres (473). Ainsi, son exceptionnelle vigueur sert, elle aussi, le projet colonisateur: modèle ou reproduction de la légende de fondation (on pense bien sûr à Protis et à Gyptis à Marseille), elle attire, de plus, dans l'orbe de la Grèce certaines populations barbares - certaines famille barbares, faut-il immédiatement corriger -, puisque ces légendes des origines sont dans tous les cas légendes du pouvoir (474). A l'Est, les Grecs ne procédèrent pas autrement:
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Hérodote, entre quatre versions différentes, choisit celle que racontaient les Grecs du Pont pour expliquer l'origine des Scythes et, curieusement, c'est encore une. référence à l'expédition vers Erythie, l'île de Géryon, située très correctement "tout contre Gadeira, en dehors des colonnes d'Héraclès, près des rives de l'Océan" (475). Poussant devant lui les boeufs de Géryon, Héraclès arrive sur la terre, alors déserte, qu'habiteront plus tard les Scythes et, pourchassant les cavales qu'on lui a volées pendant son sommeil· un rapt de plus dans cette histoire qui les multiplie! - il rencontre dans l'Hylaia, la région boisée, sauvage, la mixoparthénos - encore une créature entre la bête et l'humanité! - à qui, entre autres fils, il donne Scythès, non seulement éponyme des Scythes mais encore détenteur du pouvoir royal (476). Mythe des origines, mythe du pouvoir... Cette captation de l'histoire indigène au profit des Grecs, cette captation des cultes parfois (ceux d'Agyrion, par exemple, en Sicile) procèdent du même hellénocentrisme qui les fait considérer la culture de l'autre comme non-culture, comme barbarie (477). B. Gentili voit fort justement dans le mythe d'Héraclès un symbole de l'acculturation des Barbares, plus précisément en Héraclès le modèle paradigmatique de la guelTe conduite par les Grecs contre les Barbares (478), modèle qu'il pense déjà trouver dans la poésie lyrique de l'époque archaïque chez Stésichore, chez Pisandre de Rhodes et chez Pindare, modèle qui est encore celui d'Isocrate, lorsque, dans le Panathénaïque (479), il associe, comme la plus juste et la plus nécessaire, la guerre contre les Barbares à celle que les hommes ont livrée pour se libérer des bêtes sauvages. Cette guerre menée contre les Barbares, cette violence qui leur est faite dans le processus d'acculturation, est bien celle du "plus juste des meurtriers", elle est celle que justifie Pindare dans un fragment célèbre et très discuté: le vol des boeufs de Géryon lui paraît l'exemple même de ce v6jJ.o," qui, chez les Immortels comme chez les mortels, "mène le monde de son bras souverain et justifie l'extrême violence" (480). B. Gentili remarque avec raison que la longue querelle des critiques est bien vaine, qui se demandent si l'on peut concilier la loi de la civilisation avec la force de la violence. Pour lui, et c'est une opinion que je partage tout à fait, Pindare a voulu mettre l'accent sur la nécessité de cette violence pour introduire un ordre "juste et voulu par les dieux", et c'est - et il a une fois de plus raison - la problématique même de l'action acculturante. On peut, je crois, poursuivre l'analyse. Cet ordre, cette
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nonne qu'établit Héraclès, c'est, bien entendu, celui ou celle de la cité. Malgré sa prudence et son pragmatisme, O.S. Kirk reconnaît que, s'il est un mythe qui supporte l'analyse structurale et justifie l'opposition fondamentale entre nature et culture, c'est bien le mythe d'Héraclès (481). Si nous reprenons, en effet, notre lecture de Diodore nous n'avons pas de mal à opposer: - une nature "sauvage" fennée à l'homme
à
_. une nature "ouverte" pour le plus grand bien de celui-ci
- une nature "sauvage" infestée de fauves
à
- une nature "purifiée'i donnée à l'agriculture
- une nature "sauvage" inorganisée
à
- une nature organisée en fonction de la vie en société, de la Cité.
Bref, c'est l'ayp16Ttlç' éliminée au profit de la vie civilisée de la n6Àlç'. Une fois de plus a fonctionné le "modèle absent" de la cité. Mais, si cet Héraclès reste le héros civilisateur, cette qualité, en Occident, s'accompagne d'un corollaire évident: il est l'ennemi de la barbarie, et bien souvent l'ennemi des Barbares eux-mêmes. Le mythe d'Héraclès, revu par les Grecs de la colonisation, étend, en quelque sorte aux limites du monde connu, l'opposition si souvent soulignée (482) (mais sans doute si fortement perçue) entre la chôra et l'eschatié; l'eschatié, cet espace indécis des zones frontalières, ces marges que l'agriculture et les manifestations de la vie civique n'ont pas gagnées, ces solitudes étrangères et hostiles de l'agros. L'eschatié, dans cette perspective, s'étend à tout ce qui n'est pas le monde gréco-romain. A partir de là, le jeu des oppositions peut se poursuivre à l'infini. Héraclès ne "purifie" plus seulement, il "pacifie" (483); au dynaste sans foi ni loi qu'il élimine il substitue le règne de la justice et de la loi... Extension qui, notons-le, est réalisée dès la fin de l'archaïsme, puisque, dans la IVème Isthmique de Pindare, Héraclès "provoque Antée à la lutte
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pour l'empêcher de couronner le temple de Poséidon du crâne des étrangers" (484).. Il est difficile de ne pas remarquer, une fois de plus, la distance qui, à cet égard encore, sépare Héraclès d'Hermès, dieu de l'ag ros par excellence. Alors que ce dernier parcourt l'eschatié et certes "passe" de l'espace civique à ces marges incertaines, protège même ceux qui s'y aventurent, le héros, lui, tente de réduire l'opposition, de gagner l'eschatié aux activités humaines. Mais cette opposition, Héraclès - ou les Grecs! - l'ont-ils toujours connue? Nous rappellerons ici, la critique de Laura Makarius, pour qui le dualisme qui articule toutes les théories de Lévi-Strauss est radicalement étranger à la pensée primitive (485). Je l'ai dit plus haut, il est bien difficile de ne pas se ranger à son avis pour ce qui est de la Grèce primitive. En revanche l'Héraclès "civilisateur" et "bienfaiteur" de l'humanité proposé par Diodore supporte et exprime au maximum cette dichotomie, et ce, j'espère l'avoir démontré, parce qu'il pone la marque indélébile de la cité. Dérivation pour nous fondamentale. C'est le mythe ainsi profondément remanié, resémantisé dans le cadre des structures nouvelles de la polis que les Grecs ont emporté avec eux vers les rivages occidentaux, l'exposant par là-même à de nouvelles transformations. Sans doute même la colonisation a-t-elle, en tant que telle, aidé à ce processus de structuration. On commence en effet à mieux percevoir le rôle novateur de ceux qui partirent fonder ailleurs - et souvent ex nihilo - de nouveaux foyers de vie communautaires. Débarrassés - dans une certaine mesure seulement, il est vrai - du poids des traditions séculaires, ils contribuèrent fortement, leurs expériences d'urbanisme le prouvent (486), tout autant que leurs lois (487), à afftnner et à définir ce qui allait devenir le cadre même de la vie des Grecs : la cité. C'est dire le rôle capital de l'aventure coloniale dans le développement du mythe héracléen, mais c'est aussi en définir les limites: le voyage vers l'Occident n'est pas une création des colons, qu'ils soient Phocéens, Rhodiens ou même Chalcidiens, et, malgré l'existence de quelques variantes qui ont pu faire penser à une progression vers l'Ouest de la geste héroïque, il faut résister à la tentation de voir en elle le reflet direct - ou même "inversé", ou "compensé" - de celle des colons. Le rapport du mythe à l'histoire est, on vient de le constater une fois de plus, à la fois moins direct et plus profond peut-être. C'est bien au-delà d'Océan que, dès que l'imaginent les Grecs, se situe le jardin aux pommes d'or, et c'est encore au-delà
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d'Océan qu'ils rêvent des pâturages brumeux de Géryon... Zones frontières certes - la colonisation en fait celles de l'oicouménè, celles du monde civilisé - mais frontières mythiques avant tout, celles où l'on passe de la vie à la mort, celles où une fois de plus, notons-le, Héraclès rencontre Hennès, le dieu psychopompe. . Au-delà des dérivations qui sont le fruit de l'histoire, l'écume des temps, c'est l"'aspect sempitemel" du mythe que nous retrouvons ou, comme dirait Lévi-Strauss, ses "parties cristallines", témoins non plus seulement des désirs et des expériences d'une société donnée, mais des inquiétudes d'un peuple, voire de l'humanité toute entière: Héraclès vaincra donc Géryon, le monstre tricéphale, symbole des forces de la mort; il s'emparera des pommes d'or, gages d'abondance et d'immortalité... Ce thème n'étonne guère en Occident, où précisément le caractère chthonien, voire funéraire, du héros est très fortement marqué. Il nous paraît inutile de revenir ici sur un aspect longuement développé par Jean Bayet (488). Nous rappellerons simplement ses rapports avec les sources chaudes, déjà connus d'Ibycos de Rhégion, et les liens privilégiés qui l'unissent aux grandes divinités chthoniennes: Héra en Grande-Grèce, Déméter et Coré en Sicile... Autant d'affinités qui dépassent, me semble-t-il, les circonstances historiques de leur rencontre sur le terrain de la colonisation. A ce point de notre étude cependant, une question reste posée: celle de la localisation en Occident du thème d'Héraclès vainqueur de la mort, ou - autre façon de poser le problème - celle du choix d'Héraclè::s pour prendre en charge de tels espoirs. La seule vertu mythique de cet extrême-ouest dans l'imaginaire des Grecs suffit-elle à l'expliquer? ou s'y mêle-t-il le souvenir lointain d'un héros qui, une fois déjà, aurait été l'archégète de son peuple, vers ces régions extrêmes qui, comme le dira encore Hérodote, "possèdent à elle seules les choses que nous estimons les plus belles et qui sont les plus rares" (489).
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Lorsqu'Hérodote "raconte" la Scythie, il ne mentionne qu'une seule merveille en ce pays, l'empreinte sur un roc d'un pied de deux coudées de long (490). Pour lui, bien sûr, c'est l'empreinte d'Héraclès. Il rappelle par là l'ubiquité du héros voyageur, mais traduit aussi une réalité que, dans sa thèse, F. Hartog souligne avec beaucoup de bonheur: Héraclès est l'un de ces personnages - le premier ajouterions-nous volontiers! dont les Grecs possèdent "tout un stock", "prêts à répondre à toutes les situations, présents comme opérateurs d'intelligibilité, servant à classer et à mettre en ordre les phénomènes" (491)... De grands mots pour une bien petite réalité? Nous n'en croyons rien. Si l'anecdote est banale, elle n'en donne pas moins Héraclès comme instrument de mesure, comme "outil logique" de la pensée grecque. Elle nous paraît surtout exprimer, en peu de mots, cette charge de sens que la cité et l'aventure coloniale ont conférée à un héros qui, désormais et de manière presque systématique, aide les Grecs à se penser eux-mêmes, à se définir par rapport à l'Autre". C'est pourquoi nous aimerions, de cette seconde partie, retenir trois conclusions essentielles : 1. En ce qui concerne les sources Nous n'avons pas, ici, à en faire une analyse formelle et nous ne nous acharnerons pas à fixer à tout prix une date à la Bibliothèque du Pseudo-Apollodore. Nous redirons simplement que celle qui, depuis E. Bethe, est généralement acceptée (le second siècle de notre ère) nous paraît ne convenir que très formellement au contexte qui a pu donner naissance à ce texte. L'oeuvre, peut, en effet, être rattachée de manière tout aussi légitime à l'effort de classement et de conselvation de l'époque hellénistique (492), et, quelle que soit la date à laquelle vécut son auteur, c'est cette volonté de préserver, de "garder en mémoire" que nous retiendrons. C'est elle, en effet, que nous avons retrouvée dans le récit d'Apollodore, elle qui, dans la tradition de nos premières sources et par une série d'intermédiaires que nous avons tenté de repérer, nous donne le meilleur reflet de ce qui pourrait constituer, ou rappeler les invariants du mythe. Le héros vllinqueur de la mort
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occupe, comme chez Homère, une pOSItIon difficile et conflictuelle, entre les hommes et les dieux. Il est aussi ce que, déjà, croyait Hésiode: un tueur de monstres, et, en tant que tel, il marque un progrès dans l'organisation du monde. C'est ce thème qui, très vite, nous l'avons vu, deviendra dominant; c'est lui qui, inscrit dans les schémas conceptuels de la cité, et plus encore de la cité coloniale, conduira à faire d'Héraclès ce paradigme de l'acculturation du Barbare. Diodore de Sicile nous a paru exploiter toutes les variables, tous les ancrages historiques, toutes les illustrations possibles de ce thème et c'est chez lui que, fort logiquement pensons-nous, nous avons pu retrouver les traces de l'histoire du mythe.
2. En ce qui concerne la méthode Dans le développement du voyage occidental d'Héraclès nous avons mis en évidence le rôle décisif de la colonisation d'époque historique. Héraclès apparaît incontestablement dans ces terres lointaines comme l'archégète . Mais faut-il, pour autant, en faire le seul compagnon des colons grecs en Italie et en Sicile? Comprendre le mythe de ses aventures occidentales avec pour seule grille de lecture la colonisation d'époque historique? Ou peut-on, de surcroît, risquer de voir, dans la présence héracléenne en ces lieux, le souvenir d'une première découverte de ce richefar-west par les Achéens? Sur ce point, nous accordons qu'il est imprudent de conclure à l'appartenance du mythe aux temps mycéniens parce qu'on réussit à faire coïncider deux ordres de réalités: - la présence héracléenne dans la légende et les cultes en un lieu donné; - la découverte en ce même lieu de céramiques mycéniennes qui attestent des contacts qui, effectivement, existèrent avec le monde égéen. Mais nous dirons qu'à l'inverse, il n'est pas de meilleure méthode de lire dans la légende la forte empreinte de la colonisation et d'en conclure que cette dt::mière est le lieu géographique et historique, la raison d'être aussi, de la création du mythe. C'est alors, pensons-nous, pécher, non plus par imprudence, mais - et n'est-ce pas plus grave encore? - par méconnaissance profonde du mythe qu'on suppose ainsi à tout jamais fixé, auquel on refuse toute possibilité d'évolution, d'adaptation, d'interprétations nouvelles. C'est à la fois l'ancrer trop fixement à l'histoire et l'en faire sortir, emuite, à tout jamais. En réalité, au delà du détail ou plutôt, dirons-nous, de la
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mise en forme des épisodes du retour pour lesquels - et nous avons eu plusieurs fois l'occasion de le souligner - la référence précise à la colonisation d'époque historique s'avère indispensable, nous pouvons, au-delà des thèmes développés en système par les Grecs d'Occident, retrouver quelques expériences: celles de la découverte, de la conquête, des contacts - voire de l'hostilité - avec les indigènes... expériences qui conviennent, certes, remarquablement à l'archégète des colons, mais pourraient également être rapportées à l'archégète il est vrai plus hypothétique, mais combien "logique" - des Achéens (493). Héraclès n'est-il pas l'un de ces "découvreurs lointains" dont parle Pierre Lévêque dans sa récente étude du panthéon mycénien (494) ?, l'un de ces héros susceptibles d'avoir accompagné et probablement encouragé l'expansion de son peuple ? ... Hypothèse d'autant moins gratuite qu'on connaît les liens qui unissent - plus qu'ils ne les opposent - Héraclès à Héra, la Grande Déesse d'Argos, maîtresse de ce coin Nord-Est du Péloponnèse dont Louis Godart démontre, de façon si convaincante, le puissant dynamisme à l'époque achéenne (495). Hypothèse plus séduisante encore, si l'on veut bien prendre en compte les hauts lieux de la géographie héracléenne: Chypre en tout premier lieu, d'où nous parviennent à la fois de très archaïques représentations des "travaux" du héros grec et les plus anciens témoignages iconographiques de son assimilation avec le dieu tyrien Melqart, Chypre dont nous avons souligné le rôle dans les échanges avec la Sicile à l'époque du Mycénien récent. .. Chypre donc, mais aussi Thasos où les influences phéniciennes sont si nettes dans le culte d'Héraclès, Gadès et Lixos, théâtres des deux derniers exploits terrestres du héros et sanctuaires réputés de Melqart...(496). Chypre et ses mines de cuivre; Thasos, proche des gisements métallifères de Thrace, Tartessos et ses fleuves qui roulent l'argent... et il faudrait encore citer ces carrefours commerciaux que furent Malte, la Sardaigne et, pour finir, le Forum Boarium de la Rome primitive! Ainsi s'érigent en système cohérent une série de réalités qu'il faut se garder d'oublier, si l'on veut apprécier justement la présence héracléenne en Occident. Le syncn~tisme qui finit par réunir Melqart, archégète - et cela est certain - des Phéniciens de Tyr, et Héraclès, le héros grec, donne ainsi quelque pertinence à l'hypothèse qui tendrait à faire de ce dernier, sinon l'archégète, du moins le symbole de l'expansion achéenne. Les Phéniciens apparaîtraient alors comme le chaînon qui manquait, le nécessaire relais entre le héros achéen et celui qui devait devenir pour les
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colons grecs, puis pour leurs héritiers romains, le paradigme de l'action accuIturante accompagnant leurs entreprises colonisatrices ou conquérantes.
3. Perspectives Le mythe d'Héraclès est alors devenu, pour les Grecs, un véritable mythe d'identité (497), et c'est désormais en ce sens que, pour mieux le comprendre, nous souhaiterions l'interroger... Une interrogation qui portera d'abord sur l'aspect fortement initiatique de ces épreuves occidentales d'Héraclès, de ce voyage vers l'Au-delà qu'elles supposent et dont la cité paraît avoir gardé, encore, le souvenir. Puis, parce que nous pensons, avec Jacques Dournes, que "le mythe n'est ni dans une version, ni dans une autre, ni dans toutes ensemble ou à la suite, mais bien plutôt en amont" (498), parce qu'en outre, pas plus que Marcel Detienne, nous ne croyons à la possibilité de rejoindre ce "mythe introuvable" (499), nous tenterons, plus modestement, de mieux comprendre ces images à partir desquelles s'est progressivement dessinée la légende d'Héraclès et qui constituent "comme une possibilité de kaléidoscope qu'on n'aurait pas encore fait tourner" (500).
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J. de VRIES, Betrachtungen zum MtJrchen. besonders in seinem VerhtJltnis zu Heldensage und Mythos. Helsinki, 1954. V.I. PROPP, Morphologie du conte, trad. Seuil, Paris, 1970 (2). L'importance accordée aux "fonctions" nous parait heureusement s'appliquer à l'analyse du mythe héroYque dans la mesure où, dans ces fonctions qu'il assume, se trouve précisément la raison d'être du héros. A.J. GREIMAS, Simantique structurale, Paris, 1966. Alors que pour V. PROPP, les éléments invariables du conte sont les fonctions (soigneusement distinguées des actions), A.J. GREIMAS souligne les relations logiques qu'à l'intérieur de classes sémantiquement articulées entretiennent les fonctions. La siquence appelée "épreuve" correspond ainsi à "un schéma syntagmatique de cinq fonctions" (p. 196). La théorie des modèles actantiels est élaborée à partir du modèle linguistique, de celui du conte populaire russe tel que l'a analysé V. Propp, de l'inventaire par G. SOURIAU des situations dramatiques (p. 172-191). Cl. BRÉMOND regroupe également en siquences, les "atomes narratifs" que sont les fonctions: cf. La logique des possibles narratifs, dans L'analyse structurale du rüit, Communications, 8, (1966-1981), pp. 66-82. Dans ce même numéro, voir aussi les articles de R. BARTIll~S, Introduction à l'analyse structurale des récits (pp. 7-33) et AJ. GREIMAS, Eléments pour une théorie de l'interprétation du récit mythique (pp. 34-65). Voir encore C. BRÉMONO, Logique du ricit, Paris, 1973, et, pour d'autres analyses plus récentes, la recension de C. GENINASCA, Eléments d'une sémiotique du conte populaire, dans Simiotique, l'Ecole de Paris, Paris, 1982. pp. 65-84. P. SAINTYVES, Les Contes de Perrault et les rüits parallèles, Paris, 1923. V.1. PROPP, Istoritcheskie Korni Volshenboi. Skaski. (Les racines historiques des contes merveilleux), Léningrad, 1946. Cité par M. ELIADE, Aspects du mythe, coll. Idées NRF, 1962, p. 235. M. ELIADE, ibid., p. 243. A cet égard, il parait évident que l'épisode de la conquête des boeufs de Géryon est plus significatif que celui de la quête des fruits d'or. Les Hespérides sont, nous l'avons vu (cf. supra, p. Il) mises plus tardivement en rapport avec Héraclès et, surtout, plus diversement situées par les mythographes: Apollodore, par exemple, les loc::alise chez les Hyperboréens (II, V, II = II, 113) suivant en cela Phérécyde, auquel il emprunte la plus grande partie de cet épisode des travaux d'Héraclès (scholie à Apollonios, IV, 1396). Peut-être faut-il admettre, en ce qui concerne la localisation occidentale, une certaine confusion avec le lieu même du dixième exploit d'Héraclès: l'Erythie de Géryon n'a-t-elle pas chez HÉSIODE (Théogonie,
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287-294), pour éponyme l'une des Hespérides? Sur cette localisation ibérique du jardin des Hespérides cf. RE, Suppl. III, col 1061. Rappelons que si l'on en croît PAUSANIAS (V, 18,4) la quête des Hespérides et l'épisode d'Atlas, faux ami d'Héraclès, étaient déjà connus au Vlème siècle puisqu'ils figuraient sur le coffre offert par Cypsélos, futur tyran de Corinthe, à Héra dans son temple d'Olympie. L'authenticité de l'ouvrage, autant que son antiquité, lui paraissaient attestées par les inscriptions, fort difficiles à lire et écrites en boustrophédon. Sur les autres représentations du même épisode voir supra notes 34 et 35 du Prologue. On se reportera aussi sur ce point à notre quatrième partie. Cité par M. ELIADE, Le mythe de l'éternel retour, coll. Idées, NRF, 1969, p.34. A. SCHULTEN, Tartessos. Contribucion a la historia mas antigua de Occidente, Madrid, 1924 et Die Griechen in Spanien, RhM, LXXXV, 1936, p.302. P. LAVIOSA-ZAMBOTII, Il Mediterraneo, l'Europa, l'Italia durante la preistoria, Encyclopedia classica,llI, X, II,1964, pp. 97-384. Cf. supra p. 50 notes 180 et 181. E. CIACERI, Culti e Miti nella storia dell'antica Sicilia, Catane 1911 ; G. GIANELLI, Culti e miti della Magna Grecia, Florence, 1924. J. BAYET, Les origines de l'Hercule romain, Paris, 1926. Cf. encore J. BERARD, La colonisation grecque de l'Italie méridionale et de la Sicile, Paris, 1957. HÉSIODE, Théogonie, 287-294. Pour cette présence des Egéens en Méditerranée occidentale et ce dès avant 1600, voir l'exemple des îles Lipari et la publication des fouilles de l'acropole par L. BERNABO-BREA, M. CAVALIER, Meligunis - Lipara, IV, Palerme, 1980. Pour une vue plus globale cf. W. TAYLOUR, Mycenaean Pottery in Italy and adjacent Arcas, Cambridge, 1958 et la synthèse récente de L. VAGNETTI, 1 Micenei in Occidente - Dati aquisti e prospettive future, dans Modes de contacts et processus de transformation dans les sociétés anciennes, (Colloque de Cortona - 1981) Pise-Rome, 1983. STÉSICHORE, frg. 4 DIEHL (= Frg. 7 PAGE). Cf. encore STRABON III, 2, Il. HÉCATÉE DE MILET (d'après ARRIEN,Anabase, II,16,5; F. Gr. Rist, 26) faisait de Géryon un des trois frères régnant. sur la plaine d'Erythie qu'il situait dans la région adriatique. Cf. O. MUSSa, Hekataios von Milet und der Mythos von Geryones, RhM, CXIV, 1971, pp. 83-85. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3 F 18 b. Cf. STRABON III, 5, 4 et ATHENÉE, XI, 470, c etd. STRABON III, 5,4. Ces auteurs sont ÉPHORE (F. Gr. RiSI., 70 F 129) et PHILISTIDES F. Gr. Hist., Il F 3 Sur cette île cf. supra pp. 96-97. HÉRODOTE, IV, 8.
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STESICHORE aurait vécu de la 37ème à la 56ème Olympiade, c'est-à-dire de 640 à 550. On préfère parfois les dates-très voisines- de 630 à 555. HÉRODOTE, IV, 152. Cette aventure du Samien Colaios est située soit dans la première moitié du VIlème siècle, vers 660, (par SCHULTEN, MAZZARINO, GARCIA y BELLIDO : op. cit.), soit, plus généralement, vers 630. HÉRODOTE, l, 163. Le règne si long d'Arganthonios (63~20 à 550-540) pourrait symboliser la période pendant laquelle Tartessos fut visitée par les . Phocéens. Il peut paraître intéressant de souligner ici que, dans leurs expéditions occidentales, les Phocéens bénéficièrent de l'aide constante de Chalcis (pour qui ils avaient pris parti dans la guerre lélantine) et utilisèrent ses avant-postes en Occident. Himère, patrie de Stésichore est, faut-il le rappeler, une fondation secondaire de ces mêmes Chalcidiens. On se reportera sur ce point à notre première partie 2.2. PINDARE, Nimiennes, III, 21-22 (cf. infra p. 224 et note 38 ). La céramique grecque de Mogador (céramique ionienne et amphores attiques de type SOS, datées de la deuxième moitié du VIle siècle et du début du VIe siècle) témoignerait au contraire de cette période pendant laquelle le détroit de Gibraltar était ouvert aux Grecs de l'Est et aux Chalcidiens de Sicile (on a retrouvé les mêmes séries à Mylai) dont les établissements paraissent avoir formé le relais principal sur la route de Tartessos. Cf. F. VILLARD, BAM, IV, 1960, pp. 1-26. HÉSIODE, Théogonie, 518; 275. PHÉRÉCYDE, d'après ATHENEE, XI, 470, c.d. ATHÉNÉE, XI, 781 d et 649 e PISANDRE DE RHODES, frg. 5 K. ATHÉNÉE, XI, 469 d. ATHÉNÉE (XI, 649 d) précise qu'il s'agit du premier livre de l'Reracleia de PANYASIS (frg. 7 K.). On rapprochera cette intervention de Nérée du rôle qu'il joue aussi dans la quête des Hespérides (pHÉRÉCYDE, F. Gr. Rist. 3 F 16 a). ATHÉNÉE, XI, 781 d et 649 e ; MACROBE (Saturnales, V, 21, 19) rappelle encore que "le voyage d'Hercule sur mer, au moyen d'une coupe, vers Erythie, île espagnole, est mentionné par Panyasis, illustre écrivain grec, et que Phérécyde appuie cette affirmation de son autorité". Il ajoute, d'ailleurs, que tout cela lui paraît "plus voisin de la légende que de l'histoire" . Un vase en forme de coupe, mais sans pied ni anses. G. DUMÉZIL, Le festin d'immortalité. étude de mythologie comparée, Paris, 1924. Cf. J. BOARDMAN, Athenian redfigure vases. the archaic period, Thames and Hudson, 1975. Voir. fig. 22. Douris peignait dans le premier quart du Vè siècle. APOLLODORE, II, 5, 10. Cette attitude agressive d'Héraclès est, chez
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Phérécyde. réservée au personnage d'Océanos. On peut se demander si ce doublet est. chez Apollodore. voulu ou témoigne d'une simple confusion. HÉSIODE. Théogonie, 294. Sur la conception de l'Océan chez les anciens. voir notre première partie. PINDARE. Néméennes. III. 21-23. Frg. 32 b METrE (= 199 NAUCK) tiré du Prométhée délivré d'Eschyle et conservé par STRABON (IV. 1. 7) qui la tient probablement de POSÉIDONIOS, comme en témoigne le commentaire qui suit directement la citation. Cf. encore POMPONIUS MÉLA. II. 5 ; DENYS D'HALICARNASSE (1,41) et HYGIN, Poet. Astron., II, 6. Voir sur ce point F. SBORDONE, Il ciclo italico di Eracle, Athenaeum, 19, 1941. l, pp. 72-96, singulièrement pp. 76-79. HELLANICOS DE MYTILENE, F. Gr. Hist .. 111 (DENYS D'HALICARNASSE, Ant. Rom., 1,35). En latin vitulus. Denys oppose cette étymologie à celle que propose Antiochos de Syracuse et qu'il juge plus vraisemblable: c'est du roi ltalos que l'Italie tirerait son nom. IBYCOS DE RHÉGION, frg. 46 B. Cf. PAGE, Poetae melici Graeci. Oxford, 1967, 19 nO 300 (scholie à ARISTOPHANE, Nuées, 1051). PINDARE Olympiques, XII, 27. D'après DIODORE, V, 3.4 (cf. infra). C'est pour délasser Héraclès lorsqu'il parcourait la Sicile qu'Athéna avait demandé aux Nymphes de faire jaillir ces sources chaudes. PINDARE, Isthmiques, IV, 87-93. PAUSANIAS. VIII, 3, 2. TITE LIVE. l, 7 ; DENYS D'HALICARNASSE, l, 39-40, VIRGILE. Enéide, VIII, 193 sq.. OVIDE, Fastes, l, 580-581. Voir infra notre épilogue. E. BETHE, Quaestiones Mythographae Diodorme, Dissertation, GôLLingen, 1887. DIODORE, au livre IV, les chapitres 10 à 39 ; pour APOLLODORE, au livre II, les chapitres 54 à 160. Dans notre quatrième partie. PHÉRÉCYDE d'après le scholiaste d'HOMERE, Odyssée, XXI, 23. L'importance donnée, par exemple, par l'un et l'autre de ces auteurs à la discussion sur le nombre des vaisseaux emmené:, contre Troie par Héraclès a de quoi surprendre: Diodore IV. 32, 2, et Apollodore II. 6, 4. Chez les historiens allemands surtout. Cf, pour APOLLODORE, C. ROBERT, De Apollodori Bibliotheca. Dissertation, Berlin, 1873. A. SODER, Quellenuntersuchung zum 1 Buch der Apollodorschen Bibliothek, Würzburg, 1939; mais aussi, plus récemment. M. VAN DER VALK, On Apollodori Bibliotheca. REG, 71, 1958, pp. 100-168. Pour DIODORE. cf. surtout E. BETHE, Quaestiones Mythographae Dioooreae. Dissertation, Gôttingen, 1887. Nous ne citerons pas ici les étude:. plus réc~litc:; qui concernent essentiellement certains des livres proprement "historiques" de Diodore. Pour une comparaison des sources des deux auteurs, cf. WENDEL.
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RE, XVI, 1367, sv. Mythographie. Sv. Diodore. DIODORE DE SICILE, l, 4, 1. C'est probablement à ces ouvrages que se réfère Diodore, lorsqu'il dit s'en tenir, pour la chronologie, à Apollodore d'Athènes. Pour F. HOEFER, le traducteur français de Diodore (paris, 1865) (2), il ne fait aucun doute, encore, qu'il ne s'agisse de la Bibliothèque . M. CROISET, Histoire de la littérature grecque. V, Paris, p. 690. M. VAN DER VALK,loc. cit., p. 104-105. Entreprise nécessaire, même s'il est vrai que, comme le dit P. BARBERIS, "on ne saurait plus admettre que la signification de l'oeuvre puisse être donnée par les intentions de l'auteur ni par la manière dont elle a été reçue par son premier public" (Eléments pour une lecture marxiste du fait littéraire: lisibilités successives et signification, Littérature et idéologies, colloque de Cluny, II (1970) pp. 16 à 23. PHOTIUS, Bibliothèque, 142 b. L'ouvrage ainsi appelé s'intitulait, en fait, "Enregistrement et énumération des titres lus par nous". Il fut composé vers 840. Cf. W.T. TREDGOLD, The nature of Bibliotheca of Photius, Washington, 1980. Cf. la traduction des Belles Lettres, 186. Sur les mythographes, voir M. DETIENNE, Mythe et écriture: les mythographes, sv. mythe, Dictionnaire des Mythologies, op. cit., pp. 141-143. DIODORE DE SICILE, l, 3, 8. DIIODORE DE SICILE, l, 3, 2 et 3. DIODORE DE SICILE, l, 4, 6 et 7. DIODORE DE SICILE, l, l, 5. DIODORE DE SICILE, l, 2, 2 par exemple. M. VAN DER VALK,loc. cit., pp. 101-104. APOLLODORE, II, 91 ; l, 69; III, 194 etc... M. VAN DER VALK, loc. cit., p. 104. C'est le cas, par exemple, d'HÉRODORE, voir infra p. 242. Voir les conclusions de l'étude, menée sous la direction de M.M. MACTOUX pour l'ATP "'Polythéïsmes" du CNRS, sur la construction textuelle de la Bibliothèque (à paraître). DIODORE DE SICILE, 1,4,6 et 7. Cf. supra. pp. 230 sq.. DIODORE DE SICILE, l, 5, 1. Diodore, probablement, fait ici référence aux XPOVUCQ .Cf. p. 229. DIODORE DE SICILE, l, 5, 1. DIODORE DE SICILE, l, 5, 1. Cf. par exemple DIODORE DE SICILE, IV, 7, 2: à propos des muses sont cités, "Homère, Hésiode et quelques autres..." Dans le livre VI encore, "Homère, Hésiode, Orphée et d'autres encore" sont opposés à Evhémère (d'après Eusèbe, Préparation évangélique. II, 59-61). DIODORE DE SICILE, IV, 85,5; V, 66, 6.
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DIODORE DE SICILE, III, 2, 3; III, 56, 2; IV, 32, 2; IV, 39, 3; IV, 49, 7; IV, 85, 6; V, 2, 4; V, 28, 4. DIODORE DE SICILE, III, 2, 3. DIODORE DE SICILE, III, 56, 2. cf. encore V, 2, 4. DIODORE DE SICILE, IV, 39,3 et V, 28,4. DIODORE de SICILE, IV, 7, 1. DIODORE DE SICILE, V, 5, 1. Il ne s'agit sans doute pas du poète athénien, mais bien plutôt de Carcinios d'Agrigente. DIODORE de SICILE, l, 38, 4 ; l, 39, 1. DIODORE de SICILE, IV, 56, 1. Faut-il ranger panni eux ÉPlMÉNIDE "le théologue" (V, 80,4) ? DIODORE de SICILE, III, 52, 3. Il s'agit de DENYS de Mytilène, dit SKYTOBRACHION auteur d'un Cye/e. véritable encyclopédie mythologique composée grâce à la Bibliothèque d'Alexandrie (cf. infra note 123 ). DIODORE de SICILE, l, 46, 8 ; II, 47, 1. DIODORE de SICILE, l, 37, Il ; 1. 38, 8; II, 15, 2; II, 32, 3 ; II, 32,
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DIODORE de SICILE, II, 7, 3. DIODORE de SICILE, III, Il, 2 cite le huitième des onze livres qu'il consacra, vers 100 av. J.-c., aux peuples voisins de la Méditerranée. 91DIODORE de SICILE, l, 39, 1. 92DIODORE de SICILE, l, 38, 4 et l, 39, 1. 93Astronome et mathématicien du Vème siècle (DIODORE DE SICILE, l, 41, 1). 94DIODORE de SICILE, V, 1,4. Cf. encore l, 39, 7; IV, 1,3. 95DIODORE de SICILE, IV, 1,3. 96DIODORE de SICILE, V, 64, 2. 97DODORE de SICILE, V, 80, 4. Dosiade et Sosicrate sont également cités comme historiens de la Crète par Pline et Athénée. 98DIODORE de SICILE, V, 80, 4. 99DIODORE de SICILE, V, 56, 7. 100- DIODORE de SICILE, 1,41,4. Diodore se réfère à son Histoire de l'Asie. composée au IInd siècle. Cf. encore III, Il,2; III, 18,4; III, 48, 4. 101- DIODORE de SICILE, II, 2, 2; II, 7, 3 ; II, 7, 4 ; II, 15, 2; II, 20, 3; II,21,8; II,32,4. Ctésias de Cnide avait écrit des "Persica " en 23 livres profitant sans doute de son séjour à la cour du roi Artaxerxès Memnon au début du IVème siècle. Les six premiers, auxquels emprunte beaucoup Diodore, étaient consacrés à l'histoire des Assyriens et des Mèdes. 102- DIODORE de SICILE, Il, 7, 3. 103- Sur leurs mérites comparés voir DIODORE, V, 6, 1 ; pour Timée IV, 21, 7; IV, 22, 6;IV, 56, 3. 104- DIODORE de SICILE IV, 32, 2. 105- DIODORE de SICILE IV, 21, 7, et IV, 22, 6.
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DIODORE de SICILE IV, 21, 7. "Voilà ce que racontent sur la défaite des géants à Phlègres plusieurs mythologues dont l'autorité a été suivie par Timée l'historien". APOLLODORE, II, l, 1. Ce pourrait être l'indice d'une attitude plus rationnelle, opérant mieux le départ entre le mythe et l'histoire. Pour le détail des sources, Cf. infra le tableau II). APOLLODORE, III, 13,8 III, 176. APOLLODORE, III, X, 3 = III, 121. MÉLÉSAGORAS (ou AMÉLÉSAGORAS) cité par APOLLODORE à propos de Glaucos a été transfonné par HEYNE (et à sa suite par CLAVIER) en MÉLÉSAGORAS. Cette affInnation de PRELLER a d'ailleurs été combattue par C. ROBERT, op. cit., pp. 88-91. Voir sur ce point M. VAN DER VALK, loc. cit., pp. 134-135. Pour les références et les occurrences on se reportera dans tous les cas aux tableaux II et m. Pour E. BETHE, RE, II, 1606, ASIOS aurait vécu au Vllème siècle, pour d'autres, au Vlème siècle seulement (cf. A. NOTOPOULOS, The homeric hymns as oral poetry ; a study of the post-homeric oral tradition, AJPh, LXXXIII,4, 1962, pp. 337-368). Certains en font le contemporain et le rival d'Hésiode (G. MURRAY, A dictionary of greek and roman biography and mythology, l, Londres, 1880); d'autres le situent plutôt au Vlème siècle. Au Vlème siècle probablement. ACOUSILAOS est généralement situé dans la deuxième moitié du Vlème siècle. SUIDAS prétend qu'il écrivit ses généalogies d'après des tablettes de bronze que son père (Cabras ou Scabras) aurait trouvées dans sa propre maison, mais pour CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Stromates, VI, 629, ses Généalogies étaient en partie une "traduction" en prose de celles d'Hésiode. TELESILLA, contemporaine de Pindare, est une poétesse d'Argos, plus connue, grâce à Plutarque (CROISET, II, 361), pour son courage dans la guerre qui opposa sa cité à Sparte que pour son oeuvre lyrique. Cf. APOLLODORE, II, l, 5 et II, 2, 1. La troisième mention des "Tragiques" concerne Sophocle (II, l, 3). Cf. CROISET, op. cit., V, pp. 166-169. Son Roman des Argonautes aurait été utilisé par DENYS DE SKYTOBRACHION, et, si le fragment 3 appartient bien à DÉMARATE, celui-ci serait plus récent qu'APOLLONIOS de RHODES. Cf. SCHWARTZ, RE IV, 2706 (7) ; JACOBY la, 42, p. 520. 13 fois, presque aussi souvent qu'Hésiode. PHÉRÉCYDE de LEROS (c'est ainsi que le nomme SUIDAS) a passé la plus grande partie de sa vie à Athènes où il vivait au début du Vème siècle, et a laissé un ouvrage mythologique (désigné sous des titres différents) en dix livres, qui paraît
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assez proche de ce qu'allait être plus tard la Biblioth~que attribuée à Apollodore: des généalogies et de courts romans mythologiques. Nous reviendrons sur ces deux mythographes connus pour leur intérêt pour Héraclès: PANYASIS, fils de Polyarchos d'Halicarnasse (oncle ou cousin d'Hérodote 1) adversaire du tyran Lygdamis qui le fit metue à mort, avait composé une Héracléia en quatorze livres et neuf mille vers qui pretendait rivaliser avec celle de Pisandre. On lui attribue l'introduction de légendes nouvelles dans la geste héracléenne et le développement des exploits lointains du héros. HÉRODORE D'HÉRACLÉE était aussi, toujours au Vème siècle, l'auteur d'un xaQ "Hpax>.ia À6y~ en dix-sept volumes. DENYS SKYTOBRACHION, auteur d'un Cycle au 1er siècle, consulté également par DIODORE de SICILE, s'était en particulier beaucoup intéressé tant à Dionysos qu'à Héraclès. Quant à CASTOR DE RHODES, contemporain de Jules César, le plus récent des auteurs consultés par APOLLODORE (qui nomme son Traité des erreurs chronologiques ), il est aussi le seul à graviter dans une ambiance romaine, s'il faut en croire, du moins, le surnom qu'il reçut de Philoromaios. Cela dans l'hypothèse où l'on veut bien voir en PINDARE, TÉLÉSILLA, en PHÉRÉCYDE également. les témoins attardés de l'archaYsme - ce qui nous paraît tout à fait légitime -. L'hypothèse inverse est d'ailleurs également représentée sur le tableau III. Précisons encore que nous avons situé les "Orphiques" à l'époque où, au Vlème siècle, ONOMACRlTE rassemblait - et écrivait! - les plus anciens poèmes du recueil orphique, ce qui est peut-être, reconnaissons-le, introduire quelque élément d'incertitude dans la mesure où la collection n'a cessé de s'enrichir au cours des siècles, inconvénient de faible portée, nous semble-t-it, dans la mesure où il ne concerne qu'une occurrence, où, d'autre part, Apollodore est antérieur au renouveau de cette littérature qui, jusqu'au IVème siècle après notre ère, contribuera à l'achèvement de cet ensemble hétéroclite. Nous sommes plus à l'aise, en revanche, pour attribuer les "Tragiques" à la seule époque classique. La mise en rapport de la citation (dans la Bibliothèque) et des sources prouve en effet que le terme générique cache FTG 2 p. 188) et uniquement SOPHOCLE (l fois: II, l, 3 EURIPIDE (2 fois: II, l, 5 = FfG2 p. 502 et II, 2, 1 =FfG2 p. 567). Quant à MÉLÉSAGORAS, présenté par la tradition comme l'un des plus anciens historiens grecs (Vème siècle), originaire de Chalcédoine, il a quelque chance d'être un mystificateur hellénistique et nous avons, de ce fait, renoncé à le faire figurer dans ce tableau (cf. MÜLLER, FH.G. II,22; W. KROLL, RE, sv. Mélésagoras, Col. 494). APOLLODORE, l, 118 =l, 9, 19. APOLLODORE, III, 45 =III, 5, 6. Cf. supra note 122. APOLLODORE, II, 64 : II,4,9 voir F.Gr. Hi.rt., 31 F 17 et 19. APOLLODORE, II, 141 = II, 7, 2 voir F. Gr. Hist., 31 F 32.
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F. Gr. Hist., 31 F 13 et 14. Chez Hérodore, par exemple, le lion de Némée est tombé d'une autte terre (F4 et F21). DIODORE de SICILE, l, 3, 3 et surtout IV, l,là 4. DIOOORE de SICILE, IV, 8, 1 à 5. DIOOORE de SICll..E, IV, 8,2. DIOOORE de SICILE, IV, 8, 3. DIOOORE de SICll..E, IV, 8,4 et 5. P. VEYNE, Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes?, Paris, 1983, p. 59. DIOOORE de SICILE, IV, 8, 5. DIOOORE de SICILE, l, l,là 5. DIOOORE de SICILE, V, 23, 1 (il s'agit des origines de l'électron telles que les explique le mythe de Phaeton). Cf. encore l, 88, 5 (sur la fable "accréditée chez les Grecs" et relative à Busiris massacrant les étrangers, alors qu'il n'y a pas eu en Egypte de roi nommé Busiris)... ete. DIOOORE DE SICILE, IV, 44,6; IV, 18,5; IV, 47, 6... La position de DIODORE est ici assez proche de celle qu'exprimera PAUSANIAS au second siècle de notteère. Celui-ci, qui confesse en effet avoir, au début de son travail, trouvé "ridicules et pitoyables" les fables grecques qu'il avait à rapporter a, ce faisant, compris "que les sages de la Grèce nous ont caché d'importantes vérités sous des énigmes" (pAUSANIAS, VIII, 8, 3). . DIOOORE DE SICILE, VI, 1,3 d'après EUSEBE, Priparation étlangilique, II, 59B et 61A. Cf. encore le chronographe MALATAS (DINOORF, Bonn, 1831, p. 54) pour qui Diodore s'exprime de la même façon, et qui ajoute "l'ignorance seule conduisit les hommes à agir ainsi". DIODORE de SICILE, (V, l, 3 et 4) oppose dans ce passage Ephore à Timée et, s'il semble préférer le premier pour le plan de son ouvrage, pour l'économie du détail et le style (V, 1,4), s'il estime les critiques de Timée trop longues et parfois déplacées, il loue sa grande érudition et son souci de la chronologie (V, 1,3). POLYBE, XII, 24, 5. DIODORE de SICILE, II, 26, 2 et 3 et IV, 27, 1. (Et si ces troupeaux sont dits "dorés" c'est tout simplement en raison de leur beauté, comme dans l'expression "Aphrodite d'Or"). DIOOORE de SICILE, IV, 27, 5. DIODORE de SICILE, IV, 17, 2. C'est ainsi une version proche de la version romaine (dans la lutte des Horaces et des Curiaces) que donne Diodore du schéma trifonctionnel indo-européen. Voir sur ce point notre troisième partie. DIOOORE de SICILE, IV, 53,7. Cf. P. VEYNE, op. cit., p. 57. P. Veyne n'a pas tort sans doute qui, plus qu'aux sophistes, attribue au développement des enquêtes historiques cette "nécessaire" évolution du mythe. Il ne dit rien toutefois des raisons pour
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lesquelles Apollodore (qu'il ne sollicite guère t) échappe à cette évolution. DIODORE de SICIT..E, l, 2, 2. DIODORE de SICIT..E, 1,2,4. Cf. encore IV, 53, 6 et 7. DIODORE de SICIT..E, l, 2, 4. Nous abandonnons un temps notre traduction pour celle de Hoefer (t. l, Paris, 1865, p. 3), certes elliptique, mais percutante. DIODORE de SICIT..E, l, 2, 3. DIODORE de SICIT..E, IV, 19,2. DIODORE de SICILE, V, 21, 2. Pour l'historien s'entend! On peut tout aûssi bien penser qu'à force de dérivations il se perd. cf., sur ce point, notre avant propos méthodologique. Cf. supra : tableau I. APOLLODORE, II, 98-105 =II, 5, 9. APOLLODORE II,103 =II, 5, 9 alors que, chez DIODORE (IV, 32,1-5), cet épisode troyen est exposé non pas dans le cadre des travaux, mais comme une aventure de la seconde partie de sa vie. Un index hiérarchique des pays non grecs cités par Apollodore a été établi par I. Ducotey à partir des données informatisées du LASLA de Liège qui a enregistré le texte d'Apollodore pour l'ATP "Polythéisme" du CNRS (au Centre de Recherches de BESANÇON: analyse du discours mythologique chez Apollodore). Cf. C.H. OLDFATHER, Diodorus of Sicily, éd. Loeb II, 1961 (1ère éd. 1935). On peut établir que le livre II 35-42 dérive de Mégasthènes grâce à la similitude du récit avec les Indica d'Arrien et la description du pays par Strabon. Or tous deux disent s'être inspirés de Mégasthènes (p. VIII). Photius a conservé l'ouvrage de ce géographe "Sur la mer rouge" qui a inspiré les récits de Diodore sur les Ethiopiens dans le livre III. Pour l'étude des sources de DIODORE, en ce qui concerne l'histoire voir P. GOUKOVSKY (t. 17 et 18), Cl. VIAL (t. 15), M. CASEVITZ (t. 12) éditeurs de DIODORE dans la collection des Belles Lettres (1976 et 1978 ; 1977; 1972) et leur bibliographie; cf, encore, C. BOTIIN, Les sources de Diodore de Sicile, Revue belge de Philologie et d'Histoire, VII, 1928, pp. 1307-1327 et surtout R. DREWS, Diodorus and his sources, AJPh, 83, 4, 1962, pp. 383-392 qui refuse la problématique généralement envisagée: sources concernant tel ou tel livre de Diodore (cf plus haut), c'est-à-dire toujours considérées de façon partielle et isolée, pour poser le problème, plus général de la manipulation de ses sources par Diodore et de ses objectifs. Cf. encore, P. PÉDECH, Historiells compagnons d'Alexandre, Paris, 1984. On se reportera à la carte (fig. 23). Il s'agit de précisions concernant dans un cas, ceux qui ont été rendus à la vie par Asclépios (III, 121) et dans l'autre (III, 117) de l'époux de Gorphone, fille de Persée. La référence à Castor, l'un des derniers alexandrins, oblige évidemment à
330 penser que la Bibliothèque ne peut être antérieure au 1er siècle avant notre ère. C. ROBERT (op. cit. pp. 42-44) jugeait la langue d'Apollodore caractéristique du grec tardif, d'où la date proposée (et suivie par WAGNER). M. VAN DER VALK (loc. cit., pp. 165-167) conteste cette argumentation, retrouve bien des constructions datées du Und siècle par C. ROBERT chez des auteurs hellénistiques et même plus anciens. n fait remarquer encore qu'à l'époque où écrivait C. ROBERT régnait une condamnation assez générale de toutes les formes qui n'étaient pas purement attiques. Il ne lui parait pas. impossible que la Bibliothèque puisse dater du 1er siècle avant J.-C., mais incline toutefois à choisir le 1er siècle de notre ère. Si l'on ajoute qu'on n'a pas attendu le Und siècle de l'Empire pour réunir, pour les amateurs d'une érudition quelque peu expéditive, l'ensemble des récits qu'avaient imaginés les Grecs sur leurs dieux, leurs héros ou leurs grandes familles, mais que dès l'époque hellénistique avait commencé un tel travail de recension (le Cycle de Denys de Mytilène qu'ont connu aussi bien Diodore qu'Apollodore en est un bon exemple); si l'on constate la forte prégnance des milieux alexandrins et (ce qui n'est pas le cas chez cet occidental qu'est Diodore) l'absence étonnante de Rome, on est conduit, à l'exemple de M. VAN DER VALK, à remettre en question la datation de C. ROBERT jusqu'à ce qu'une étude linguistique approfondie vienne apporter - de quelque façon que ce soit - une réelle certitude. Certains détails de l'oeuvre, d'ailleurs, pourraient conforter ces doutes; l'un d'eux, par exemple, m'a été signalé par E. SMADJA: dans son énumération des enfants d'Héraclès, Apollodore mentionne 'I~T\~ ms de Ktp9T\~ (II, 7, 8 II, 161), des noms "qu'il est difficile de ne pas rapprocher de Juba. d'une part, de Cirta de l'autre". Cette tradition qui fait état de l'une des capitales de la Numidie serait ainsi plus ancienne (en circulation, déjà, pendant le règne de Juba 1er) que celle que rapporte Plutarque (Sertorius, IX) et dont on sait qu'elle fut accréditée par Juba II. On connait le souci constant de ce souverain de rattacher sa lignée à une descendance héracléenne et de se présenter lui-même comme un nouvel Hercule. Si Apollodore avait écrit au II siècle, ne peut-on supposer que c'est cette deuxième version, plus connue - et quasi-officielle - qu'il aurait reproduite? Sur la dynastie numido-mauritanienne et Hercule on se reportera à la thèse en cours d'E. SMADJA DIODORE DE SICILE, l, 4, 3 et 4. APOLLODORE II,106 à 113 (=11, 5,10). APOLLODORE II, 106 (= II,5, 10); PHERECYDE, F. Gr. Hist. 3F 18b (chez Strabon m, 5, 4). HÉSIODE, TMogonie, 287. APOLLODORE, II, 106 (= Il, 5, 10). Nous donnons la forme " "Op90~ ", choisie par R. WAGNER, (00. Teubner, op. cit.) et conforme à la version d'Hésiode et non pas ""'0p9p~M
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comme dans l'édition française de F. CLAVIER (op. cit.) La généalogie de Géryon fils de Chrysaor et de Callirhoè, elle-même fille d'Océan, est la même chez Hésiode (Théogonie, 304 sq.) Orthos est fils d'Echidna "à l'âme violente" et de Typhon "l'insolent" comme d'ailleurs Cerbère et l'hydre de Lerne. Le lion de Némée, né d'Orthos, est de même descendance. F. CLAVIER, op. cit., note 41 p. 277. Nous reviendrons sur ces bêtes ou ces peuples sauvages rencontrés par Héraclès lors de son voyage vers l'Ouest. Cf. STÉPHANE DE BYZANCE, s.v., Abdera; et STRABON, III, 4,3: dans sa description du littoral ibérique à partir des colonnes d'Héraclès Abdera vient entre Malaca (Maenacé) et la nouvelle Carthage. ' AÀ&&lwv serait à mettre en rapport, selon WILAMOWITZ (Kleine Schriften, v. 2 pp. 150 sq.) avec les Alpes ; quant à âépxuvot" M. V AN DER VALK suppose qu'il pourrait être une transcription erronée du terme HEPKYNOr utilisé en alphabet ionien par Phérécyde et correspondre aux Monts Hercyniens dont ce dernier aurait ainsi donné une localisation erronée (loc. cit., pp. 124-125). Phérécyde, qu'Apollodore pourrait avoir suivi, écrivait, selon ATHÉNÉE, XI, 470 cd que c'était contre Océanos et non contre Hélios qu'Héraclès avait tendu son arc: Phérécyde, dans le troisième livre de ses llistoires. parle d'Océan et poursuit: "Héraclès tendait son arc contre lui avec l'intention de lui tirer dessus mais le Soleil lui ordonna de s'arrêter, ce qu'il fit, par crainte de ses menaces. Pour l'en récompenser Hélios lui donna la coupe d'or qui, lorsqu'il est couché, le transporte avec ses chevaux, par delà l'Océan, aux pays d'Orient où le soleil se lève. Héraclès s'embarqua donc dans cette coupe pour Erythie et, lorsqu'il fut en haute mer, l'Océan pour l'éprouver apparut et secoua la coupe. Héraclès était sur le point de lui tirer dessus lorsqu'Océanos eut peur et lui demanda d'arrêter". Toujours d'après ATHÉNÉE on sait que STÉSICHORE (ATHÉNÉE, XI, 781, d et 469 e), PISANDRE (ATHÉNÉE, XI, 469 d) et PANYASIS (ATHÉNÉE, XI, 469 d-e) mentionnaient aussi cette coupe. DIODORE DE SICILE, IV, 17 à 25. DIODORE DE SICILE, IV, 18,2 et déjà IV, 17,2. DIODORE DE SICILE, IV ,17,2. DIODORE DE SICILE, IV, 17,3 ; IV, 17,4; IV, 17,3; IV, 17,5. DIODORE DE SICILE, IV, 18, 1 l'explication est devenue systématique, nous y reviendrons. DIODORE DE SICILE, IV, 18, 1 ; IV, 18,2. DIODORE DE SICILE, IV, 18, 5. DIODORE DE SICILE, IV, 19, 1. DIODORE DE SICILE, IV, 19, 1 ; IV, 19,4. DIODORE DE SICILE, IV, 21,1-4. DIODORE DE SICILE, IV, 21,5 à 7.
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Dans notre qualrième partie.
Dans notre troisième partie.
192- Cf. supra, l'introduction de cette deuxième partie et la note 3. 193194-
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AJ. GREIMAS, op. cit., (Sémantique structUl'ale), pp. 155-156. A.J. GREIMAS, ibid., pp. 178-179. Ces deux fonctions pourraient bien n'être pour Greimas que des projections de la volonté d'agir et des résistances imaginaires du sujet lui-même, jugées bénéfiques ou maléfiques par rapport à son désir (p. 180). L'exemple est emprunté à AJ. GREIMAS, op. cit., p. 130. AJ. GREIMAS, op. cit., p. 178. AJ. GREIMAS, op. cit., p. 180. On ne saurait toutefois oublier qu'Eurysthée, présent dans toutes les versions du mythe - d'où l'intérêt de cette catégorie du destinateur - est souvent présenté comme lui-même instrument de la vengeance divine (Héra) ou plus simplement de la volonté divine (que transmet l'oracle de Delphes). Ces variantes prouvent en même temps la nécessité de dépasser ce schéma actantiel. HÉSIODE, Théogonie, 287-294. cf. encore 979·983. HOMERE,lliade, VIII, 360-369; Odyssée, XI, 602-604. HÉSIODE, Théogonie, 950-955; HOMERE, Odyssée, XI, 602-604. On se reportera à notre première partie. PHÉRÉCYDE, 3 F. 16 et 17 (cf. JACOBY, Corn. 1,394 sq.). Cf. tableau N. DIODORE de SICILE, IV, 27, 3. DIODORE, IV, 26, 2-4, et DIODORE, IV, 27, 1-5. Voir tableaux V et
VI. 207208-
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Cf. supra, p. 242-246. On rappellera simplement ici les hésitations de la tradition quant à la localisation (occidentale ou hyperboréenne) du pays aux pommes d'or. Cf. supra, p. Il et infra dans le troisième chapitre de notre quatrième partie. Cf. tableaux VII et VIII. Cf. supra p.26O. PHÉRÉCYDE, d'après ATHÉNÉE, XI, 470, cod. Rappelons que c'est Poséidon, encore, qui avait déchaîné sur les côtes de la Troade le monstre marin contre lequel dut lutter Héraclès, HOMERE, Iliade, XX, 144 sq. et APOLLODORE II, 5,9. HOMERE, Iliade, V, 392-394 (Héra) et 395-398 (Hadès). APOLLODORE, II, 5, 10. R. MARTIN, in Recherches sur les cultes grecs et l'Occident. l, Naples, 1979, pp. 11-17. Cf. M. GIANGIULIO, Greci e non greci in Sicilia alla luce dei culti e delle leggende di Eracle, Modes de contacts et processus de transformation dans les sociétés anciennes, colloque de Cortona, Pise-Rome, 1983 : "Uno
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dei motivi di maggiore interesse storico che sia dato di cogliere nell'ambito dei terni fatti oggetto dell'attuale riflessione appare senza dubbio l'individuazione di alcuni rapporti intercorrenti tra Eracle ed il mondo della colonizzazione", pp. 785-786. N. VALENZA-MELE, Eracle euboico a Cuma, la gigantomachia e la via heraclea, Recherches sur les cultes grecs et l'Occident, 1. op. cil., pp. 19-51. Sur ce vase, un Mégarien a gravé une dédicace à Héraclès, ceci en pays cuméen puisque l'objet provient des fouilles du site par STEVENS, probablement, avance N. Valenza-Mele, du sanctuaire d'Héra. Dans la Gigantomachie campanienne, c'est effectivement Héra et non pas Athéna qui accompagne Héraclès. L'auteur, comme J. BOARDMAN, ERA, 1972, l, pp. 57-72 et JHS, XLV, 1975, pp. 1 sq., estime que ce sont les Pisistratides qui ont développé cette deuxième association, et elle relève, pour sa part, les rapports d'amitié qu'entretient le héros, en Occident, avec Héra. Contrairement à F. VIAN (La G:ue"e des Géants, Paris, 1952) elle se refuse à voir dans cette association le moment où se trouve scellée la réconciliation de la déesse et d'Héraclès; elle y reconnaît plutôt une alliance ancienne, caractéristique, écrit-elle, du héros euboïco-thessalien. C'est à ce point seulement que nous nous séparerons de N. Valenza-Mele: Héraclès dont elle se plaît à souligner les rapports anciens avec Héra ne nous paraît pas, quant à nous, si "différent du héros argien" ! N. VALENZA MELE, loc. cit., p. 50. Que ces deux épisodes principaux de l'histoire d'Héraclès en Campanie se rattachent à des phénomènes naturels ne suffit pas, contrairement à ce qu'estime J. BÉRARD (op. cit., pp. 407-408), il prouver l'indépendance de la légende par rapport à la colonisation. Cette particularité explique au contraire son "caractère local" qui - en d'autres cas effectivement - pourrait être troublant. DIODORE de SICILE, IV, 23, 3. Cf. aussi HÉRODOTE, V, 42-48 et VII, 158 ; PAUSANIAS, III, 16, 4 et 5. DIODORE de SICILE, V, 9, 1 à 4. Sur les rapports des expéditions de Pentathlos et de Dorieus, cf. L. PAREITI, Studi sicelioti ed italioti, Florence, 1914 pp. 1-27. La tentative de Pentatltlos est datée par Diodore de la cinquantième olympiade c'est-à-dire de 580-576 avant J .-C., date qui correspond mieux à la chronologie des îles Lipari que celle que donne Eusèbe (50 ans plus tôt). DIODORE de SICILE, IV, 23,4. DIODORE de SICILE, V, 4, 2. "Tèn nun oûsan tôn Surakousion polin". M. GIANGIULIO, lac. cit., p. 813 par référence à l'ouvrage de M. HUNTER WILSON, Myths of Precedence, Myth in Modern Africa, Lusaka, 1969, pp. 1-7. M. GIANGIULIO, lac. cil., p. 814. G. VALLET, La Cité et son territoire dans les colonies grecques
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d'Occident, Alti dei V/lo Convegno di Siudi sulla Magna Grecia, Tarente et Naples, 1968. pp. 67-142. Cf. aussi l'intervention de R. MARTIN, qui, dans le même ouvrage (pp. 216-220), insiste sur le rOle commercial qu'ont pu jouer de tels sanctuaires, grâce à la sécurité relative qu'offrait aux deux parties ce territoire sacré. M GIANGIULIO, loc. cil., p. 815. S. CALDERONE, L. AGNELLO, Fondo di skyphos con dedica ad Heracles (Siracusa), dans Epigraphia, X, 1948, pp. 143-145. M. GIANGIULIO. admet qu'il s'agit là d'un lerminus anle quem. Pour la bibliographie voir M. GIANGIULIO, loc. cil., p. 812. TIMÉE, F. Gr. Hist., III B, 566 F 102 b. Cf. aussi PLUTARQUE (qui rapporte son témoignage) Nicias, 1,2 sq., et 25,1. G. PUGLIESE CARRATELLI, Culti e dottrine religiose in Magna Grecia, PP, 1965, XX, pp. 4-27 et surtout Santuari extramurani in Magna Grecia, PP, 1962, XVII, pp. 241-246. Pour rester dans le domaine des cultes rendus à Déméter et Coré, on sait par exemple que le thesmophorion d'Agrigente (à Santa Anna) succède à un sanctuaire indigène, mais qu'à Géla, en revanche, celui de Bitalemi, consacré à Déméter Thesmophoros est légèrement postérieur à la fondation de la colonie. Cf. en particulier, P. ORLANDINI, Lo scavo deI thesmophorion di Bitalemi, Kokalos, 1966, pp. 8 sq. ; et Diffusione deI culto di Demeter e Kore in Sicilia, Kokalos, 1968-1969, XIV-XV, pp. 334-338. En Grande-Grèce cette continuité existe - lorsqu'elle a pu être prouvée - au bénéfice d'Héra. Cf. G. GIANELLI, op. Cil., p. 144-276 pour le sanctuaire d'Héra Lacinia, près de Crotone (un sanctuaire particulièrement intéressé par la légende héracléenne). Sur le problème, plus général, de la continuité entre les cultes "mycéniens" et ceux de l'époque historique, voir F. GRAF, Culti e credenze religiose della Magna Grecia, Alti dei 21 Convegno di sludi sulla Magna Grecia (Tarente, 1981), Naples, 1983, pp. 157-185, singulièrement p. 159. Voir aussi, dans la discussion, les remarques méthodologiques de M. TORELLI, pp. 207-209. M. GIANGIULIO, loc. cil., p. 814. Il réserve en effet pour plus tard (lorsqu'il parlera de la lutte d'Héraclès contre les héros sicanes) le développement attendu sur la politique religieuS(~ des Déinoménides. PAUSANIAS, IX, 19, 5: à Mycalessos un Héraclès, jugé comme étant l'un des Dactyles de l'Ida se faisait le portier du temple de Déméter. Cf. encore PAUSANIAS, IX, 27, 8 (pour Erébie); VIII, 31, 3 (pour les confins de Mégalopolis et de Messène); VIII, 35, 2 (représentation d'Héraclès dans le temple de celle que les Arcadiens appellent "la Maîtresse"); III, 20, 5 (Héraclès soigné dans le temple de Déméter à Thérapné) et n, 35,4-11. DIODORE de SICILE, V, 3, 4 à 6 et V, 4,1. PINDARE, Néméennes, 1,13-16.
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CICÉRON, Contre Verrès, IV, 58, 106 sq. Sur ce point cf. aussi DIODORE, V, 4, 2 et IV, 23, 4. OVIDE, Métamorphoses, V, 341 sq.; Fastes, IV, 417-454. PINDARE, Olympiques, VI, 158-162. La Sixième Olympique est datée de 468. Scholies à la Vlème Olympique, 156 d; 158 a et c; 160 d. Sur cette prêtrise des Deinoménides voir R. VAN COMPERNOLLE, Les Deinoménides et le culte de Déméter et Koré à Gela, Hommages à W. DÉONNA, Latomus, XXVIII, 1957, pp. 474, 479. HÉRODOTE, VII, 153. Cf, encore, confrrmant les scholies à Pindare, DIDYME d'ALEXANDRIE (00. SCHMIDT, 219); PHILISTOS (F. Gr. Hist., III, B 556 F 49) et TIMEE (F. Gr. Hist., III B, 566 F 96). DIODORE de SICILE, V, 4,7. Cf. encore ATHENEE, XIV, 647 a. Cf. HÉSYCHIUS, sv. K6ptta. DIODORE de SICILE, V, 4, 2. M. GIANGillLIO, loc. cit., p. 813 et note 82. Sur ce rite, voir L. GERNET, Anthropologie de la Grèce antique, Paris, 1968, pp. 112 et encore 117. DIODORE, IV, 24, 1. DIODORE, IV, 39, 1. (Cf. aussi PAUSANIAS, 1, 15, 3 et 1, 32, 4. Pour une tradition delphique, cf. ARRIEN, Anabase, IV, Il, 7). DIODORE de SICILE, IV, 24, 2. DIODORE de SICILE, IV, 24,3. Particulièrement révélatrice est la mention d'Héraclès entrant dans la campagne de Léontinoi et "admirant la beauté du pays" (IV, 24, 1). Dans notre troisième partie. On se reportera à la troisième partie de notre étude: Héraclès dans la cité, l'intégration des jeunes gens. SOPHOCLE, Trachiniennes, 35. On songe particulièrement à la légende de fondation du culte d'Héraclès à Erythrées (pAUSANIAS, VII, 5, 5 à 8) censée expliquer que seules les femmes thraces (qu'elles soient libres ou esclaves) ont le droit de pénétrer dans le sanctuaire; on songe également à l'aition cultuel de Cos (PLUTARQUE, Questions grecques, 58) où s'entrecroisent de la même façon le thème initiatique et celui de l'exclusion - voire de la servitude dans la cité. On trouvera l'étude de ces questions dans le premier chapitre de notre IVème partie: Héraclès latris et doulos , sur quelques aspects du travail dans le mythe héroïque. En ce qui concerne les rapports entre le culte d'Héraclès et l'affranchissement des esclaves, cf. A. CALDERINI, La manomissione e la condizione dei liberti in Grecia, Milan, 1908. DIODORE DE SICILE, IV, 24, 7 ; cf aussi SERVIUS, Commentaire à l'Enéide, III, 552. CONON, Narrations, 3. CONON, contemporain de DIODORE, est celui-là même dont PHOTIUS disait, l'opposant à APOLLODORE, que son
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oeuvre "n'était pas à la portée de tous". Sur ces légendes et leur datation voir J. BAYET, Les origines de l'Hercule romain, Paris, 1926, pp. 156-164. WEICKER, RE, s.v., Géryon, col. 1289; J. BAYET, op. cit., (origines...) pp. 145-149; E. CIACERI, L'antico cuIto di Gerione nel territorio di Padova e in Sicilia, ASSO. XVI-XVII, 1919-1920, pp. 70-83. On consultera encore: E. LEPORE, Ricerche sull'antico Epiro, Napoli, 1962; L. LAZZARO, Fons Aponi (Abano e Montegretto nell'antichità), Abano Terme, 1981; A. MOMIGLIANO, Some observations on the "Origo gentis Romanae " 1958; et plus récemment les travaux de L. BRACCESI, Grecità adriatica, Bologne, 1971 (ler chapitre) ; La leggenda di Antenore, de Troia a Padova, Padoue, 1984. Cf. encore dans Storia della Sicilia, I-IX, Palermo, 1 979, l, pp. 53-86 les pages 64-67 consacrées à ce problème. SUÉTONE, Tibère, 14. CLAUDIEN, VI, 25. Sur la légende d'Héraclès en Vénétie cf. déjà PHÉRÉCYDE d'après une scholie à APOLLONIOS DE RHODES, IV, 1396. (F. Gr. Hist., 3 F 16). Peinture de la Grotta deI Orco datée d'environ 350 av. J.-C. On trouvera d'autres exemples dans J. BAYET, op. cit., note 2 p. 147. KRETSCHMER, Gr. Vaseninschrift, 47, (De Ridder 202). Cf. J. BAYET, op. cil., p. 146. Sur ce point on se reportera à notre Epilogue. J. BAYET, Origines, op. cit., p. 147. J.P. VERNANT, La mort dans les yeux. Paris, 1985, p. 50. "Celui qui fait résonner sa voix "ou même qui mugit. Cf. également J . BAYET, Hercule funéraire, loc, cit., p. 75. Pour les peuples d'Italie s'entend! J. BÉRARD, Colonisation, op. cit., p. 414. Les rapprochements opérés avec le sanctuaire des Paliques pour faire d'Agyrion un lieu de culte indigène (note 3 page 414) sont d'ailleurs quelque peu contestables: le chien n'est pas ici formellement attesté dans le culte; quant à l'intervention des esclaves elle est fort différente: alors que le sanctuaire d'Radranon était un lieu d'asile, les fêtes d'Agyrion ne traduisent que le renversement très temporaire d'un ordre qu'elles contribuent à maintenir. S.E. CIACERI, op. cit., pp. 285-289. L. GERNET, Frairies antiques, REG, XLI, 1928, pp. 313-359. M. GIANGIULIO, p. 844. Cf. R.J.A. TALBERT, Timoleon and the revival of Greek Sicily, 344-317 B.C., Cambridge, 1974. Le témoignage des monnaies est, à ce titre, fort intéressant. Cf. M. GIANGIULIO loc, cit., p. 835 et note 150 (bibliographie). G.VALLET, La colonisation chalcidienne et l'hellénisation de la Sicile orientale,Kokalos, VIII, 1962, pp. 30-51. Notons que J. BAYET voyait déjà dans l'Héraclès d'Agyrion un Héraclès chalcidien, op. cit., pAO, note 3.
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P. LÉVEQUE, P. CLAYAL, La signification géographique de la première colonisation grecque, Revue de géographie de Lyon. tome 45, 1970, pp. 179-200. L. BERNAB6 BREA, Leggenda e archeologia nella protostoria siciliana, Kokalos, X-XI, 1964-1965, pp. 1·34, Singulièrement p. 2. L'affmnation a chez l'auteur valeur générale et son article est essentiellement une étude ethnologique et archéologique des peuples avec lesquels les Grecs entreront en contact et de leur culture. DIODORE de SICILE, IV, 23, 5. THUCYDIDE, VI, 2, 1·5. DIODORE DE SICILE, V, 6,1-3. DENYS D'HALICARNASSE, l, 22, 1 à 5. THUCYDIDE (cf. note 277) rapporte deux traditions quant à l'origine des Sicanes: ils seraient soit autochtones (c'est aussi la tradition recueillie par TIMÉE, F. Gr. Hist.• 566 F 38) soit,.d'origine ibérique (comme le diront encore PHILISTOS, F. Gr. Hist., 556 F 45 ou ÉPHORE F. Gr. Hist.• 70 F 136). Sur ces divergences voir DIODORE DE SICILE, V, 6, 1-3. et STRABON, VI, 2, 4. Quant aux raisons données pour expliquer le repli des Sicanes, elles sont, soit l'arrivée conquérante des Sicules: "victorieux des Sicanes par les armes", écrit Thucydide (VI, 5), ils "les rejetèrent vers les parties méridionales et occidentales de l'île et fIrent prendre à celle-ci, au lieu de Sicanie, le nom de Sikélie". Diodore quant à lui donne à ce repli une autre explication: une éruption de l'Etna et c'est une contrée déjà abandonnée "depuis très longtemps" par les Sicanes qu'auraient ainsi occupée les Sicules (DIODORE DE SICILE, V, 6, 3). HELLANICOS, F. Gr. Hist., 4 F 79 b (Cf. DENYS D'HALICARNASSE, 1,22,3). PHILISTOS, F. Gr. Hist., III, 556 F 46 (Cf DENYS D'HALICARNASSE, l, 22, 4). Il faut citer ici la curieuse tentative de L. BRACCESI (Storia della Sieilia, loe. cit.), pour résoudre le problème posé par cette discordance chronologique, ceci au prix d'une théorie qu'on peut juger pour le moins étonnante de l'origine des Sicanes. Comme R. VAN COMPERNOLLE (Ségeste et l'hellénisme, Phoibos. V, 1950-1951, pp. 183-228), il pense que si Hellanicos "ne parle pas des Sicanes c'est tout simplement parce qu'il faut identifIer à ces derniers les Elymes dont il raconte la migration" (L.B. p. 57; R.V.C. p. 216). Sicanes et Sicules auraient ainsi la même origine, la péninsule italienne; la date de 1270, donnée par Hellanicos, représenterait alors la migration des Sicanes; la date rapportée par Thucydide serait celle de la migration sicule (I...B. pp. 57-58). Privilégiant (pour quelle raison ?) le témoignage d'Hellanicos, alors que la tradition bien établie fait des Sicanes des "Méditerranéens" (qu'ils soient autochtones, ou plus ou moins marqués d'influences ibériques), cette théorie, pour résoudre un problème qu'on peut juger, toutes proportions gardées, "minime" de nos
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sources, plonge et l'historien des religions et l'archéologue dans des contradictions, à notre avis, autrement plus gênantes 1 Cf. surtout M. PALLOTINO, Le origini storichi dei populi italici, Xè congrès des Sciences historiques, Rome 1955, pp. 3-60. Cf. la synthèse très claire donnée par L. BRACCESI (Sicilia Antica, op. cit.), avec les réserves exprimées dans la note 283. Cf., surtout, L. BERNAB6 BREA, La Sicilia prima dei Greci, MiIano 1958 et, dans Kokalos, 1964-1965, loc. cit., pp. 1-34, singulièrement pp. 10-1l. Après l'ouvrage de Lord William TAYLOUR, Mycenaean Pottery in Italy and adjacent areas, Cambridge, 1958, on se reportera surtout aux synthèses de M. MARAZZI et S. roSA, Die Mykenische Penetration in Westlichen Mittelmeerraum, Klio, 61, 1979, 2, pp. 309-351 et de L. VAGNETTI, 1 Micenei in ltalia: la documentazione archeologica, PP, 25, 1970, pp. 359-380 et 1 Micenei in Occidente, dati acquisiti e prospettive future au Colloque de Cortona, op. cit., pp. 165-181. Cf. encore le volume des Atti dei XXII Convegno di Slodi sulla Magna Grecia, Magna Grecia e mondo miceneo, Nuovi documenti. Tarente, 1982. L'introduction du fer en Sicile et dans la Péninsule italienne aux Xe-IXe s. pourrait être rapportée aux Phéniciens, L. BERNAB0-BREA, loc. cit., pp. 22-23. L. BERNAB6-BREA, loc. cit., p. 12-33. L. VAGNETTI, loc. cit., P.P., p. 375 et pour la métallurgie (Cortona) pp. 177-178 et fig. 4. L. BERNAB6 BREA, loc. cit ., p. 29 (sur le Mycénien III C et la civilisation de Pantalica 1) et L. VAGNETTI, P.P., loc. cit., p. 379 et note 91 de la même page. Ces constatations (cf. aussi la note précédente) nous paraissent du plus haut intérêt pour notre problème, on se reportera sur ce point au IVème chapitre de notre première partie. L. BERNAB6.BREA, /oc. cit., p. 30. L. BERNAB6.BREA, loc. cit., p. 28 et p. 32. On notera que G. VALLET (Rh/gion et Zancle, Paris, 1958, pp. 90-104) suppose, pour expliquer ce décalage, que les "Ausoniens" de Lipari et de la région du détroit, venus par mer, ont conservé tous les aspects caractéristiques d'une civilisation de type italique alors que les Sicules - dont le passage par l'Italie méridionale est d'ailleurs indiqué par la tradition littéraire - pourraient avoir adopté, en Calabre, les rites funéraires d'origine pré-indo-européenne (l'inhumation) et conservé, en Sicile, les traits fondamentaux de la civilisation indigène, ne gardant guère de leurs origines indo-européennes, que leur langue. E. CIACERI, Culti e miti... , op. cit., pp. 37-45 et 87-92; E. MANNI, Minosse ed Eracle nella Sicilia dell'età dei bronzo, Kokalos, VIII, 1962, pp. 6-29; L. BRACCESI, loc. cit., pp. 64-65; L. PEARSON, Myth and Archeology in ltaly and Sicily, YCLS. XXIV, 1975, pp. 171-195. E. SlôQVIST, Heracles in Sicily, ORom, IV, 1962, pp. 1l7-123. M. GIANGIULIO, loc. cit., (Cortona), singulièrement pp. 815-833.
339 On peut cependant remarquer que l'épithète est connue d'Homère (/liade, XXII,294). 295 bis - PROCLUS dans les Scholies au Cratyle (47,88) ne dit-il pas que les noms attribués aux enfants par leur père "ont pour but de commémorer quelque chose ou quelqu'un ou bien d'exprimer un espoir ou qudque chose de semhlable"? . 296- On se reportera sur ce point à E. SIÔQVIST, loc, cit., p. 120 et à M. GIANGIULIO, loc, cit., pp. 816-817 et à leur bibliographie. 297- MACROBE, Saturnales, V, 19,30. et V, 19,22 (dans ce dernier passage, si Macrobe rapporte la même anecdote, le héros n'est pas nommé). 298- MACROBE cite un passage du troisième livre de l'Histoire sur les lieux de prophétie de Xénagoras ou Anaxagoras (SaturlUlles, V, 19,30). 299- DIODORE de SICILE, II, 89. 300- MACROBE, Saturnales, V, 19,31. 301- MACROBE, Saturnales, V, 19, 19-21. 302- POLÉMON, contemporain des empereurs Trajan et Hadrien, avait écrit un ouvrage Sur les fleuves merveilleux de la Sicile, longuement cité par MACROBE (Saturnales, V, 19,26 à 29): frg 83 FGH, III. p. 140. 303- MACROBE, Saturnales, V, 19,27. 304- MACROBE, Saturnales, V,19,26. 305- Dans une tragédie perdue et intitulée Etna, Eschyle parlait d'ailleurs des Paliques, MACROBE, Saturnales, V, 19,24. 306- CALLIAS vivait au IVème siècle avant notre ère. C'est le 7ème livre de son Histoire de Sicile qui est cité par MACROBE, Saturnales, V, 19,25. Sur ces delloi on peut se reporter à I. LEVY, Dieux Siciliens, RA. XXXIV, 1899, 1, pp. 256-281. 307- On a parfois nié l'existence des Delloi , mais, si Macrobe les rapproche, c'est pour mieux les opposer et Callias, dont il rapporte le texte, les situe par rapport à Géla (à quatre-vingt-dix stades). 308- L. ROBERT, Bulletin Epigraphique, REG, 65-66, 1952-1953 nO 283 pp. 211-212. L'inscription avait été ainsi reconstituée par son éditeur 295-
nEBlaxpa [Blv ]TJ. 309- IG, XIV, 595 et 596; L. ROBERT, loc, cit., 1'.212; E. SlôQVIST, loc, cit., p. 120 et avant eux E. CIACERI, op. cil., pp. 37-45 et B. PACE, Arte e civilta nella Sicilia antica, III, 1946, pp. 527-529 qui supposent que Leucaspis et Pediacralès pourraient être localisés respectivement sur les territoires de Syracuse et de Géla. 310- ARISTOPHANE (Les Nuées, 984-985) parle de ces vieilleries qui sentent les Bouphonies. 311- Cf. en dernier lieu E. SlôQVIST, loc, cit., p. 121. On trouve d'ailleurs, chez HESYCHIUS, le pluriel ~ouTal donné comme équivalent à 312-
~OUX6À01. Dans la version conservée par DIODORE, IV, 23, 2. APOLLODORE, II, 5,10= II 110 et 111.
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M. GIANGIULIO, loc. cit., p. 822. E. CIACERI, par exemple, suggère de corriger le texte pour transformer n.uxaTaç en AxaTaç (op. cit., p.43). E. SIOQVIST, loc. cit., p. 121. Voir, dans notre troisième partie, l'étude des aspects initiatiques du mythe. E. MANNI, Sicilia Pagana, op. cit., p. 34 et Minosse ed Eraele... loc. cit., p. 28 ; dans La Sicile à la veille de la colonisation grecque, REA LXXI, 1969, pp. 5-22, il propose même une chronologie "de ces exploits attribués à des personnages qui flottent entre l'histoire et le mythe" et situe Héraclès "avant le XIIè siècle". E. SIOQVIST, /oc. cit., p. 121. E. SIOQVIST, loc. cit., p. 123. M. GIANGIULIO, loc. cit., p. 822. M. GIANGIULIO, loc. cir., pp. 823-833: "La liberazione insomma presuppone il dominio, la riconquista presuppone l'occupazione : Ducezio presuppone i Dinomenidi" (p. 824). M. GIANGIULIO, loc. cit., note 142, p. 832. M. GIANGIULIO, loc. cit., p. 823 sq.. D. ADAMESTEANU, L'ellenizzazione delL'l Sicilia ed il momento di Ducezio, Kokalos, VIII, 1962, pp. 177; P. PELAGATII, Palik.è (Mineo-Catania). Santuario dei Palici, BA, 51, 1966, pp. 106-107. Cf. aussi G. MADDOLI, Il VI e il V secolo a-c., Storia della Sicilia, op. cit., l, pp. 1-102. MACROBE, Saturnales, V, 19,26. Cf. supra, p. 287 et note 304. Cf. M. GIANGIULIO, loc. cit., pp. 824 sq. Cf. encore Q. CATAUDELLA, Tragedie di Eschilo nella Siracusa di Gerone, Kokalos, X-XI, 1964-1965, pp. 371-398 et pour PINDARE: E. KIRSTEN, Ein politisches Programm in Pindars erstem pytischen Gedicht, R hM, 90, 1941, pp. 58-71 et G. A. PRIVlTERA, Eraele nella prima Nemea, GIF, XXIV, 1972, pp. 28-51. Dans la Première Néméenne, en particulier, c'est au-delà de tel ou tel exploit, le destin héroïque tout entier d'Héraclès qui symbolise la gloire de Chromios d'Aitna, qui, comme Gélon et ses frères, avait commencé sa carrière au service d'Hippocratès, le tyran de Gela. De même, la "félicité inaltérable" du héros après ses noces avec Hébé évoque très certainement le bonheur non moins mérité de Chromios auprès de la soeur de Gélon qu'il avait reçue pour épouse. Cf. G. BALANDIER, Mythes politiques de colonisation et de décolonisation, dans Sens et Puissance, Paris (PUF, Quadrige) p. 81 (2ed) p.203. Cf. supra, les traductions qui en ont été données, pp. 255-256. DIODORE de SICILE, IV, 23, 1 et V, 3, 4. Sur ce lien avec les phénomènes volcaniques on consultera J.H. SCHOO (Hercules labors, Fact or fiction, Chicago, 1966) pour qui Géryon, lui aussi, est un volcan, le pic
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Ténériffe. DIODORE de SICILE, IV, 83, 1. DIODORE de SICILE, IV, 83, 4. Une autre tradition retenue par HYGIN (Fables, 260) et par VIRGILE (Enéide, V, 755-761) donne au contraire Enée pour fondateur et de la ville, et du temple d'Aphrodite Erycine. STRABON, XIII, 1,53 remarque que ceux qui font ainsi aborder Enée en Sicile, puis le font aller dans le Latium sont en désaccord avec Homère pour qui il reste à Troie et succède à son père (Iliade, XX, 306). DIODORE de SICILE, IV, 83,5. PAUSANIAS, VIII, 24, 6 et 7 et encore VIII, 24, 2. PAUSANIAS, VIII, 24, 6. Cf. encore C. MElLLER, P. LILLE, Inv. 71 et P. LILLE inv. 126, CRIPEL, VI, 1981, pp. 243-252 : le nom de Psophis pourrait être reconstitué dans les fragments d'un poème hexamétrique dont le sujet est la légende d'Héraclès et le contexte en référence avec l'épisode de Géryon. PAUSANIAS, VIII, 24, 2. Ces attaches de la légende avec la tradition arcadienne sont encore mentionnées par CHARAX, d'après STEPHANE de BYZANCE, FHG. III, p. 638, frg. 7 = F. Gr. HiSI., 103 F 58. ST. BY2. sv. Ka"l1K6ç:. APOLLODORE, II, 5,10. DIODORE de SICILE, IV, 23, 2 et IV, 83, 1. Cette généalogie d'Eryx est également celle que retient HYGIN, Fables 260 ; VIRGILE quant à lui, s'il retient d'Eryx, qu'il est fils d'Aphrodite et plusieurs fois parle "du pays fraternel d'Eryx " (Enéide, V, 23 - 24 et 630), ne mentionne Boutès que dans un contexte grec (V, 371-374). Apollodore lui aussi faisait de Boutès, non pas un indigène, mais un Grec: un Argonaute, qui à son retour se jetait dans la mer channé par les Sirènes. Il retenait cependant une tradition qui le mettait en rapport et avec les côtes siciliennes et avec Aphrodite. C'est en effet la déesse qui le sauvait et l'emportait à Lilybée (APOLLODORE, 1, 9, 16 et 1, 9, 25) curieuse localisation, d'ailleurs, puisque Lilybée (au contraire de Motyé et Panorme où sont installés des Phéniciens dès avant l'arrivée des Grecs) est fondée beaucoup plus tardivement, après la destruction de Motyé. VIRGILE, Enéide, V, 391-393. VIRGILE, Enéide, V, 400-403; V, 410-414. VIRGILE, Enéide, V, 483-484. VIRGILE, Enéide, V, 759-760; V, 772. APOLLODORE, II, 5, 10 = II,111. THUCYDIDE, VI, 2, 3. PSEUDO-SCYLAX, XIII. PLUTARQUE, Nicias, 1, 3. Voir supra note 232. PAUSANIAS, V, 25, 5. APOLLODORE, d'après STRABON, VI, 254 (= F. Gr. Hisl, 244 F 167 ou F B.G.. 1, 173), mais, alors que Thucydide faisait, à ces Troyens se joindre
342 des Phocidiens, ce sont, chez Apollodore, des compagnons de Philoctète qui viennent, avec eux, s'établir en Sicile. 349- C'est Héraclès, qui, on s'en souvient, avait débarrassé la Troade de ce monstre. 350- LYCOPHRON, Alexandra, 951-977. Voir, par exemple, les commentaires de E. CIACERI, La Alessandra di Licofrone, Catane. 1901. p. 107 sq. (pour le texte) et 277 sq. (pour les commentaires) et J. BERARD, op. cit., pp. 353-354. L'aide des scholies, en effet, est indispensable pour comprendre le, passage. 351- LYCOPHRON, Alexandra, 1226-1280. 352- DENYS D'HALICARNASSE, Antiquités Romaines, l, 47, 2; l, 52,1-4. 353- VIRGILE, Enéide, 1,550 (Troianoque a sanguine clarus Acestes) et V, 354355356-
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38-39 (Troia Criniso conceptumflumine mater quem genuit). VIRGILE, EMïde, V, 628-629. VIRGILE, Ibid, 746-761. On se reportera aux études de J. CARCOPINO, Virgile et les origines d'Ostie, Paris, 1919; de J. PERRET, Les origines de la légende troyenne de Rome, Paris, 1942 et contra, le compte rendu que donne J. BÉRARD de cet ouvrage dans, Journal des Savants, 1943, pp. 116 sq. On consultera également J. GAGE, Bases de migrations "dardaniennes" et escales "troyennes" dans la mer ionienne, REL, LV, 1977, 84-112; G. MOYAERS, Enée et Lavinium à la lumière des découvertes archéologiques récentes, RB Ph, LV, 1977, pp. 21-50 et le catalogue de l'exposition de Rome (1981) Enea nel Lazio. archeologia e mito, De façon plus générale on pourra se reporter, pour l'histoire du Latium et de la Rome archaIque, à la bibliographie que nous donnons dans notre "Epilogue". J. BÉRARD, op. cit., p. 355. Cf. plus récemment, I. BITTO, Venus Erycina e Mens. Un momento della propaganda politica romana durante la seconda guerra puniea, Archivio Stor. Messinese, XXVIII, 1979, pp. 121-133. DENYS D'HALICARNASSE, Antiquités romaines, l, 47, 2 (pour Aegestos et Elymos) et l, 48 (pour le départ après la prise de Troie). Cependant, comme chez Lycophron, les deux épisodes paraissent encore
indépendants. 359-
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Il semble qU'HÉCATÉE ait connu l'éponyme troyen de Capoue (d'après STÉPHANE de BYZANCE, F. Gr. Hist., 1 F 61 = FHG. l, frg. 27) et on a dit, sans raison suffisante semble-t-il, que STÉSICHORE aurait déjà fait aborder en Italie des fugitifs troyens. (Bibliographie dans J. BÉRARD, op. cit., p. 352 et note 3 de la même page). HELLANICOS, F. Gr. Hist., 4, F 79 b d'après DENYS D'HALICARNASSE, l, 22, 3. Cf. supra p. 285. L. BRACCESI, loc. cit., (Sicilia antica ), p. 71. Cf., J. BOVIO MARCONI, El problema de los Elimos a la luz de los descubrimientos recentes, Ampurias, XII, 1950, pp. 79-90 et surtout dans
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Atti e memoriae dei 1 Congresso Internazionale di Miceneologia, Roma, 1968,3, les articles de A.M. BISI, Fenici 0 Micenei in Sicilia nella seconda metà dei Il millenio a.c., pp. 1156-1168 et de V. TUSA, La quaestione degli Elimi alla luce degli ultimi rinvenimenti archeologici, pp. 1197-1210. Pour cet auteur, en particulier, les influences anatoliennes sub- mycéniennes ne sufflsent pas pour corroborer la thèse de Thucydide (p. 1209). Quant aux graffiti sur les céramiques du dépôt de Grotta Vanella, inscrits dans une langue ignorée, mais qu'on peut attribuer aux Elymes de Ségeste, leur découverte a relancé le problème de l'origine des Elymes, certains rapprochant leur langue de celle des Sicules (une hypothèse qui confmnerait les dires d'Hellanicos), d'autres au contraire proposant une interprétation asianique (qui s'accorderait avec la tradition d'une origine troyenne). Contre cette hypothèse présentée par R. AMBROSINI au Second Congrès International d'Erodes sur la Sicile Antique (palerme 1968), M. LEJEUNE exprime de sérieuses réserves. Cf. Kokalos, XIV', XV, 1968-1969. Voir encore dans ce même volume l'article de V. TUSA (pp. 462-467) et celui de M. LEJEUNE dans Studi e saggi linguistici, XI, 1971, pp. 223-227. Cf. G. VALLET, Athènes et l'Adriatique, MEFRA, 1950, pp. 33-52. G.K. GALINSKY, Aeneas. Sicily and Rome. Princeton, 1969, p. 96. On attribue à Anténor la fondation de Padoue, première ville "troyenne" en Italie. Cf. VIRGILE, Enéide, l, 245-249 : "Il a fondé la viUe de Padoue, il a établi ses Troyens, donné un nom à son peuple, suspendu les armes de Troie..." Cf. encore SUÉTONE, TiMre, 14 et CLAUDIEN, VI, 25. Surtout (et déjà !) PHÉRÉCYDE, d'après une scholie à APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, IV, 1396 (F. Gr. Hist.• 3 F 16). Sur ces problèmes, voir désormais la synthèse récente de L. BRACCESI, La Leggenda di Antenore. op. cit. Cf. V. TUSA, loc. cit., et L. BRACCESI, loc. cit., p. 75. Signalons que l'appartenance à l'époque mycénienne des tessons présentés par V. TUSA au 1er congrès International de Mycénologie a été contestée. Cf. E. MANNI, loc. cit., (REA), p. 13. Disons cependant que ces influences orientales sont encore diversement appréciées (apports ethniques ou simples contacts commercieux et culturels) et qu'on ne s'accorde pas toujours sur les peuples qui en furent les vecteurs. Pour le problème de la présence phénicienne sur les CÔtes siciliennes on se reportera à notre première partie. DIODORE de SICILE, IV, 23, 3. HÉRODOTE, V, 42-48. HÉRODOTE, V, 43. HÉRODOTE, V, 43, les manuscrits donnent • HpadElvl'l TnV tv rU(E).111 •
Aucune Héraclée de Sicile n'existant alors, le texte a été corrigé. Cf. Hérodote, éd. Les Belles Lettres, L V, 1961 p. 94 note 3. 372- HÉRODOTE, V, 44-45. Les Sybarites tiennent pour la participation de
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Dorieus et de ses compagnons à l'expédition qui détruisit leur ville. Les Crotoniates nient, pour leur part, avoir reçu l'aide d'aucun étranger. HÉRODOlE, V, 46. PAUSANIAS, III, 16,5. La version conservée par PAUSANIAS reste celle de l'échec. Diodore quant à lui fait écho à une tradition sicilienne probablement "arrangée" par le patriotisme local. Cf. V. CONSTANZI, La Spedizione di Dorieo in Sicilia, Riv. Phil. Class.• XXXIX, 1911, pp. 353-360; L. PARETI, Dorieo, Pentatlo ed Eracle nella Sicilia occidentale, dans Studi Siciliani ed italioti, Florence, 1914 pp. 1 sq., A. SCHENK GRAF VON STAUFFENBERG, Dorieus, dans Historia, IX, 1960, pp. 181 sq.. V. ruSA, Il Santuario arcaico di Segesta, dans Atti dei VII Congresso Internazionale di Archeologia classica, Rome, 1961, pp. 31-40. Les fouilles de Grotta Vanella (1977) ont même fait apparaître aux côtés d'une céramique non grecque des fragments de vases grecs tous antérieurs aux premières décennies du Vlème siècle, certains même légèrement plus anciens que ceux des couches profondes des sondages de l'acropole de Sélinonte. Cf. J. DE LA GENIERE, Ségeste et l'hellénisme, MEFRA, 90, 1978, l, pp. 33-49. (appendice) Cf. encore l'article du même nom de R. VAN COMPERNOLLE, dans Phoibos, 5, 1950-1951, pp. 183-228 et J. DE LA GENIBRE, Réflexions sur Sélinonte et l'Ouest Sicilien, CRAI, 1977, pp. 251-264. Cf. J. DE LA GENIERE, Entre Grecs et non Grecs en Italie du Sud et Sicile, Modes de contacts ... op. cit., pp. 257-272. Contra, M.T. PIRAINO-MANNI, Colloque de Bressanone. op. cit., pp. 167-168. La mention a d'ailleurs disparu dans la publication des actes du colloque de Cortona. Pour la bibliographie concernant cette inscription on se reportera à la note 124 de notre "Prologue". L. PARETI, loc. cit., pp. 22-23. On pourra objecter qu'une tradition conservée par LYCOPHRON, Alexandra. 662 (et scholie ad. loc.) opposait, dans la campagne de Léontinoi, Héraclès aux Lestrygons (premiers habitants "mythiques" de la Sicile selon Thucydide) qui voulaient lui ravir son troupeau. Cf. J. BÉRARD, op. cit., note 4 p. 413. G. VALLET. La colonisation chalcidienne el l'hellénisation de la Sicile orientale, Kokalos, VIII, 1962, pp. 30-51. Précisons que, dans cette opposition, nous retenons, non pas l'opposition ethnique Chalcidiens/Doriens, mais celle d'une volonté coloniale aux mobiles différents (commerciaux/agraires), entraînant, pour cette raison, des rapports différents entre Grecs et indigènes. Disons encore que cette distinction nous paraît valoir pour l'implantation coloniale, plus que pour une pratique qui, à l'époque des tyrans, par exemple, s'est sans doute uniformisée. HÉCATÉE DE MILET d'après STÉPHANE DE BYZANCE, (FHG 1 frg
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=F. Gr. Hist. 1 F 76 et 77). Cf. L. LACROIX, Monnaies et civilisation en Occident grec, Bruxelles, 1965, p. 76. DIODORE de SICILE, IV, 83, 3. DIODORE de SICILE, IV, 83, 1 et IV. 83, 3. PAUSANIAS, VIII. 24. 2 et 6-7. Le caractère de ces Grandes Mères méditerranéennes dispensatrices de la vie sur terre et dans l'au-delà devait d'ailleurs être assez proche. Cf. P. LÉVEQUE, Contribution à une théorie historique de la production de la pensée religieuse dans les sociétés du Paléolithique et du Néolithique. DHA, 7, 1984. pp. 53-92. Cf. encore J. 'FlLlON, La déesse mère créto-mycénienne. Cahiers des Etudes Anciennes. VIII. Québec. 1978. LYCOPHRON,Alexandra, 951-977. Cf. en particulier, VIRGILE. Enéide, 760. On se reportera. sur ce point, au quatrième chapitre de notre première partie. Pour s'en tenir à une bibliographie récente. L. LACROIX, en 1974. soulignait l'aspect civilisateur d'Héraclès (Héraclès. héros voyageur et civilisateur. Bulletin de l'Académie royale de Belgique, fév. 1974) et. au colloque d'Urbino. en 1973. G.S. KIRK et B. GENTIL! parlaient explicitement de "culture-hero" (II mito greco, Aui dei Convegno internazionale. p. 291) et de "eroe culturale" (ibid.• p. 304). Cf. encore C. JOURDAIN - ANNEQUIN. Héraclès héros culturel. Colloque de Bressanone. op. cit.• (1981) pp. 9-29. ÉPICHARME. frg. 21 Kaibel (ATHENEE. X. 411a-b). Voir les références. citées par exemple par L. LACROIX. op. cit.• p. 35. Cf. par exemple DIODORE, IV. 29. 3. Pour APOLLODORE toutefois (II, 4, 10) Héraclès demeure cinquante jours chez Thespis qu'il nomme d'ailleurs Thestius. EURIPIDE. Alceste, 747-772. ATHÉNÉE. IV, 164 b. Inventaire 2646 et BEAZLEY, ARV 2 p. 437, 128. Cf. aussi APOLLODORE. Biblioth~que II, 4, 9. Sur ce problème, voir Ch. DUGAS, Héraclès mousicos, REG. LVII, 1944. p. 61 sq. (Recueil Charles Dugas. Paris, 1960, p. 117). DIODORE DE SICILE. IV. 8,5. MACROBE. Saturnales. 1,31. Cf. G. MURRAY, Greek Studies. Oxford, 1946, p. 109. ÉPICHARME. Cf. plus haut note 392. APOLLODORE. II,5,4. APOLLODORE. II. 7, 7. DIODORE DE SICILE, 1. 24, 3. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques. IV. 1438. DIODORE DE SICILE, 1,2.4. DIODORE DE SICILE. l, 24, 7. Comme autre preuve de l'existence de cet Héraclès plus ancien que Diodore affirme être égyptien. est invoquée l'aide 47 et 48
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apportée par le héros aux dieux dans la guerre contre les Géants dont l'existence "remonte à l'origine même des hommes" et la massue et la peau du lion, "car, les armes n'étant pas encore inventées, les hommes n'avaient que des bâtons pour se défendre et des peaux d'animaux pour armure". On se reportem sur ce point à la page 303 et à L'l note 407. DIODORE DE SICILE, IV, 8, 5. Pour F. BROMMER, Herakles, die %Wolf Taten des Helden in antiker Kunst und Literatur, Münster-KOln, 1953, le cycle des douze travaux n'apparait guère qu'à l'époque hellénistique. Il semblerait pourtant que des représentations comme celles d'Olympie aient pu aider à la constitution du dodécathlos dès l'époque classique. Pour DIODORE (IV, 10, 7) comme pour APOLLODORE (II, 4, 12) c'est l'oracle de Delphes qui ordonne au héros d'accomplir les douze tmvaux qui lui vaudront l'immortalité. APOLLODORE, II, 5, 1 à 12. On peut en effet, pour ne donner qu'un exemple sur lequel nous aurons à revenir (dans notre troisième partie) trouver étonnant que, chez Diodore, les dieux fassent don de ses armes à Hémclès, alors qu'il a déjà accompli sept des douze tmvaux imposés. Peut-être PINDARE connaissait-il les "douze" travaux, comme le prouverait un fragment récemment découvert (P. OXY nO 2450). Cf. G. PAVESE, The new Heracles of Pindar, HSCP, 72, 1967, pp. 81-4 et 86-7. Voir U.T. MATTHEWS, op. cit., note 3 p. 22. On sait la faveur dont parait jouir la Centauromachie dans l'Occident grec. Il n'est qu'à voir la place qu'elle prend dans le décor du thesauros du SHaris où les six métopes de la façade Est "racontent" cet épisode. La lutte contre Nessos fait encore l'objet de plusieurs métopes. DIODORE DE SICILE (IV, 13, 1) ne localise pas la capture de la biche cérynite. Pour Apollodore cependant le mythe est situé en Arcadie et il cite Oenoé, le Ladon et le mont Artémision (II, 5, 3). Seul - à ma connaissance - le scholiaste de Pindare (Olympiques, III, 2, 3) prétend qu'Héraclès la poursuivit jusqu'au pays des Hype.rboréens. Cf. plus haut p. 303. Diodore a prétendu que la Grèce, à l'époque du fils d'Alcmène, était déjà hautement civilisée. HÉSIODE, Théogonie, 328-330. Il est encore chez Sophocle "le fléau des bouviers", Trachiniennes, 1092. EURIPIDE, Héraclès, 377. APOLWDORE, II,5,4. APOLWDORE, II, 5, 2. DIODORE DE SICILE, IV, 13,2. PAUSANIAS, VIII, 22, 4. Pour lui d'ailleurs, comme pour Apollodore (II, 5,6), Héraclès ne se contente pas de chasser les oiseaux, mais les tue de ses flèches. HOMBRE, I/iade, l, 468. SOPHOCLE, Trachiniennes. 1095-1096.
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Malgré l'existence du Centaure Chiron, différent des autres par sa naissance (d'un dieu et d'une mortelle et non pas de la démesure d'Ixion convoitant Héra), la Centauromachie a généralement le sens d'une victoire de la civilisation sur la barbarie, la force brutale et la démesure. Cf. E. JANSSENS, Le Pélion, le Centaure et la sagesse archaïque, dans Hommages à Claire Préaux, Bruxelles, 1975, pp. 325-337. DIODORE DE SICILE, IV, 13, 7. DIODORE DE SICILE, IV, 10, 3 à 6. PIS ANDRE DE RHODES, frg. 10 (KINKEL): ~UCa\6TaTO," Bè cpovÉwv Cf. sur ce thème B. GENTILI, Eracle "omicida giustissimo", Pisandro, Stesicoro e Pindaro, op. cit., p. 299-305. DIODORE DE SICILE, IV, 15,2. DIODORE DE SICILE, V, 76. 1. Idée déjà exprimée à l'époque archaïque, dans le Bouclier, 27-29. C'est en effet pour "créer pour les dieux autant que pour les hommes un défenseur contre le danger" que Zeus s'unit à Alcmène. Sur ce point on rappellera que Diodore, manifestement, s'inspire d'une source occidentale, la Géryonide de Stésichore sans doute, et qu'Apollodore est en revanche plus influencé par des sources purement grecques. On sait qu'il doit beaucoup à Phérécyde voir supra, le 1er chapitre de la lIème partie. DIODORE DE SICILE, IV, 17,3; IV, 17,4; IV, 17,5. DIODORE DE SICILE, IV, 35, 3. DIODORE DE SICILE, IV, 18,6. On peut remarquer d'ailleurs qu'Héraclès est depuis longtemps lié aux modifications du paysage ou aux explications qu'on donne de certains paysages géographiques. Eschyle déjà fait prédire au héros par Prométhée sa lutte contre les Ligures et l'aide que lui apportera Zeus en faisant "neiger" une nuée de cailloux sur la plaine de la Crau (STRABON, IV. 1,7 = H.J. MEITE, XXXH, 326 a. Cf. aussi DENYS D'HALICARNASSE, Antiquités Romaines, 1,41, 3 (METTE 326 b) et HYGIN, Astrologie, II,6 = METTE, 326 c). Dans le même sens, nous l'avons vu, Apollodore explique que, si le Strymon n'est plus navigable, c'est parce qu'Héraclès, au retour de l'expédition contre Géryon, avait puni le fleuve - qui lui avait donné quelque sujet de plainte - en comblant son lit de cailloux (II, 112 = II, 5, 10). DIODORE DE SICILE, IV, 24, 3 : en Sicile, à Agyrion, pour remercier les habitants qui l'avaient honoré "avec les mêmes tètes et les mêmes sacrifices qu'on offre aux dieux de l'Olympe". DIODORE DE SICILE, IV, 24,3, il s'agit du lac Aveme près de Cumes. Cf. N. MELE, Eracle euboico a Cuma, la gigantomachia e la via Heraclea, in Recherches sur les cultes grecs en Occident, Cahiers du Centre J. Bérard, Naples, 1979, pp. 19-59. DIODORE DE SICILE, IV, 19,3, rapporte d'ailleurs deux opinions: ou bien Héraclès a percé l'isthme qui rattachait l'Europe et l'Afrique, ou bien au contraire il a rapproché l'extrémité des deux continents, autrefois lIès
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distants l'un de l'autre. DIODORE DE SICll..E, IV, 19,3. DIODORE DE SICll..E, IV, 22, 2. Cf. N. MELE,loc. cit., pp. 41-48. Cf. le scholiaste à l'Odyssée, XVI, 471. Voir sur ce sujet L. KAHN -LYOTARD, Hermès passe, Paris, 1978. Cf. aussi, du même auteur: Le récit d'un passage et ses points nodaux, Il mito greco, pp. 107-117, Ou Hermès,la frontière et l'identité ambigu~, Ktéma, 4, 1979, pp. 201-211. DIODORE DE SICll..E, IV, 17,5. DIODORE DE SICll..E, IV, 18, 1. DIODORE DE SICll..E, IV, 19,2. DIODORE DE SICILE, IV, 24, 7. Héraclès est d'ailleurs à Crotone, invoqué comme oikiste : L. LACROIX, Monnaies et colonisation dans l'Occident grec, Bruxelles, 1965. D'autres fondations sont rapportées à Héraclès dans ces régions occidentales: Sagonte en Espagne (Sll..IUS ITALICUS, l, 273 sq.): Bauli (SILIUS ITALICUS, XII, 156; SERVIUS in Virgile, Enéide, VI, 107 et VII, 662; SYMMAQUE, Lettres, l, 1,5) et Herculanum en Italie (DENYS D'HALICARNASSE, l, 44) ; Solonte et Motyé en Sicile (Cf. aussi L. LACROIX, op. cit., p. 76). Voir L. LACROIX, Héraclès, héros voyageur et civilisateur, loc. cit., pp. 37-39. DIODORE DE SICILE, IV, 17, 5; IV, 27, 3; IV, 27, 3; IV, 31, 7; IV, 31, 7. DIODORE DE SICll..E, IV, '9, 1. Cette fonction d'Héraclès est déjà connue dans la littérature archaïque pour le territoire même de la Grèce. Dans le Bouclier, (479-480) Héraclès tue Cycnos qui dépouillait les pélerins se rendant à Delphes. Cf. P. GUll..LON, Le bouclier d'Héraclès et l'histoire de la Grèce Centrale dans la période de la première guerre sacrée, Aix en Provence, 1963. Sur la date du Bouclier, cf. J. DUCAT, BCH, 97, 1973, p. 64. DIODORE DE SICILE, IV, 19,4. DIODORE DE SICILE, IV, 17, 1 et 2. D'après ARRIEN (Anabase, II,16, 5), Hécatée de Milet faisait déjà de Géryon l'un des trois frères régnant sur la plaine d'Erythie, qu'il situe d'ailleurs dans la région adriatique. Sur ce sujet, voir O. MUSSO, Hekataios von Milet und cler Mythos von Geryones, RhM, CXIV, 1971, pp. 83-85. DIODORE DE SICILE, IV, 18, 3. Il s'agit du plus beau taureau, né des vaches laissées par le héros lors de son passage. DIODORE DE SICILE, IV, 21, 1 à 5. Nous reviendrons sur cet épisode dans notre Epilogue. DIODORE DE SICILE, IV, 24, 1. Cf. supra: chapitre précédent. DIODORE DE SICll..E, IV, 24, 3. DIODORE DE SICILE, IV, 24,4 à 7. Cf. notre troisième partie. DIODORE DE SICILE, V, 3, 4. Dans la région d'Himère, les Nymphes
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pour plaire à Athéna firent "à l'arrivée d'Héraclès, jaillir des sources d'eau chaude". Cf. aussi IV, 23, 1. DIODORE DE SICll...E, IV, 14,7. Héraclès est d'ailleurs invoqué comme tel: XÉNOPHON, Anabase, IV, 8, 25 et VI, 2, 15. Cf. GRUPPE dans Pauly Wissowa, RE, suppl. III, col. IOQ2 et 1015. DIODORE DE SICILE, IV, 29, 30 et V, 15, 1 à 6. DIODORE DE SICll...E, V, 15, 2. Le terme, déjà employé chez SOPHOCLE (Trachiniennes, 1002, 1061) et chez EURIPIDE (Héraclès, 225), l'est encore très souvent chez DIODORE (1, 24, 5 et 7 ; II, 392; IV, 17, 3). Cf. PINDARE, Isthmiques, IV, 57 et EURIPIDE, Héraclès, 20, 851. Cf. encore DIODORE, 1, 24, 6. Cf. plus haut, dans le Bouclier, 27-29. Cf. EURIPIDE, Héraclès, 1252. DIODORE DE SICILE, IV, 23, 2-3. Cf. le précédent chapitre. DIODORE DE SICILE, IV, 19,2. DIODORE DE SICILE, V, 21, 2; cf. encore une formule semblable en V, 25, 4 ; IV, 19, 2; 1, 4, 7. DIODORE DE SICll...E, IV, 19, 2. La même inversion se produit pour la Sardaigne où les descendants des Thespiades adoptent les moeurs barbares, vivent dans les gorges des montagnes, se creusent des maisons souterraines et résistent à toute entreprise de conquête, qu'elle soit carthaginoise ou romaine (DIODORE, IV, 30,4 à 6). A. MOMIGLIANO (Sagesses barbares, Paris 1979) a bien monlJ'é comment POLYBE et POSÉIDONIOS, en traitant Rome comme un m~mbre à part entière de la communauté civilisée que formait le monde grec, préparaient la voie aux auteurs qui, comme le fait Diodore ici, non seulement acceptent la domination romaine, mais prennent fait et cause pour ses entreprises. DENYS D'HALICARNASSE (Antiquités Romaines, 1, 34 à 44), s'il n'est pas le premier à donner de la fonction civilisatrice d'Héraclès une interprétation militaire, fera, plus nettement encore que Diodore, servir la geste d'Héraclès en Occident aux desseins poliliques sous-jacents dans son oeuvre. P.M. MARTIN (Héraclès en Italie d'après Denys d'Halicarnasse, Athenaeum, L, 1972, pp. 252-275) démontre comment, par "le choix de travaux hétérodoxes" et par "une série de coups de pouce assez discrets", il cherche à prouver l'origine hellénique des Romains et à diffuser la propagande augustéenne en direction du monde grec. Voir notre chapitre précédent. Il faudrait rappeler ici qu'au-delà des réinterprétations que nous avons jugées fondamentales, l'histoire n'a cessé d'utiliser le mythe; l'exemple des Pisistratides à Athènes (et avant eux des Alcméonides) ajléjà été évoqué, on pourrait citer encore par exemple, l'étude que fait S. DUSANIC (Athens, Crete and the Aegean after 366-365 B.C., Talanta, XII-XIII, 1980-1981, pp. 7-29) des vist.es impérialistes d'Athènes à
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l'égard de la Crète, d'après un fragment d'ÉPHIPPUS, conservé par ATHÉNÉE, (VIII, 346 sq.) et daté des années 365-364 dans lequel Géryon représente vraisemblablement Timothée. PINDARE, Néméennes, l, 21. DIODORE DE SICILE, IV, 1 et 2. Nous rappellerons qu'au 1er siècle avant notre ère DENYS DE MYTILENE dit SKYTOBRACmON, consulté par Diodore et par Apollodore, était l'auteur d'un Cycle dans lequel tant Dionysos qu'Héraclès tenaient une gmnde place. M. GIANGIULIO, loc. cit., p. 813. DIODORE DE SICILE, V, 1,2. DlDORE DE SICILE, V, 24, 1 à 3. Voir notre Epilogue. Comme les produits importés (qu'il s'agisse de céramiques, de monnaies ou du vin...) ont joué d'abord le rôle de biens de prestige propres à accroître les différences sociales dans les sociétés indigènes avec lesquelles les Grecs se trouvaient en contact, il paraît certain que de tels mythes, au même titre que les autres aspects de cette culture dominante qu'était la culture grecque, ont servi les élites indigènes et les ont aidées à asseoir leur pouvoir. HÉRODOTE, IV, 8. Cf. HÉRODOTE, IV, 10, Il, "et c'est de ce Scythès, fils d'Héraclès que descendraient les rois qui se succèdent chez les Scythes". Sur cette légende, voir en dernier lieu F. HARTOG, Le miroir d'Hérodote, essai sur la représentation de l'autre, Paris, 1980, qui souligne la contradiction qu'il y a "à donner pour père à une population nomade, celui qui est, avant tout, un héros civilisateur", p. 44. Cf. C. LÉVI-STRAUSS, Race et histoire, Paris, 1961, p. 20. "On refuse d'admettre le fait même de la diversité culturelle, on préfère rejeter hors de la culture, dans la nature, tout ce qui ne se conforme pas à la nonne sous laquelle on vit". B. GENTILI, loc. cit., Il miro greco, p. 305. Analyse beaucoup plus lucide, à mon avis, que celle de G. KARLO qui souligne l'aspect "démocratique" d'Héraclès en lutte contre les monstres et les tyrans (Der Demokrat Hercules, Z. Ant., XVII, 1967, pp. 137-143). ISOCRATE, Panathénaique. 163. L'ensemble de ces références - de Stésichore à Isocrate - prouve que le thème n'est pas un pur topos attribuable au seul Diodore et que ce dernier est bien l'héritier d'une interprétation "coloniale" du mythe d'Héraclès développée dès l'époque archaïque et réactivée chaque fois que se faisait sentir le besoin de promouvoir l'hellénisme. Je garde le terme grec v 6~or; qui ne me paraît pas traduit de façon satisfaisante par "coutume" dans A. PUECH, Pindare IV, Isthmiques et fragments, Paris, 1923, frg. 49 : "la coutume, reine du monde, chez les Immortels comme chez les mortels, le mène de son bras souverain et justifie l'extrême violence. J'en juge par les exploits d'Héraclès; n'a-t-il
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pas, sans les avoir demandés ni payés, conduit jusqu'au portique cyclopéen dEurysthée les boeufs de Géryon" ? G.S. KIRK, The nature of greek myths, 1974 et, Methodological reflexions on the myths of Heraclès, in Il Mito greco, pp. 285-297. Cf. les travaux de J.P. Vernant, M. Detienne et P. Vidal-Naqqet; de ce dernier en particulier, Le chasseur noir et l'origine de l'éphébie in Annales E.S.C., 1968, pp. 947-964 et Philoctète de Sophocle et l'éphébie, in Mythe et tragédie en Grèce ancienne, Paris, 1972, pp. 169-180. Cf. supra, p. 313 sq . Le passage est parfois si facile de l'un à l'autre que, dans sa traduction de la Bibliothèque d'Apollodore, (II, 5, 10), E. Clavier ne sait pas s'il doit traduire èiYPla nOÀÀa par "peuples sauvages" ou "bêtes féroces". E. CLAVIER, Bibliothèque d'Apollodore. Paris, 1805, L. II, p. 277 note 4. PINDARE, Isthmiques, IV, 87-93. L. MAKARIUS, Ethnologie et structualisme, l'apothéose de Cinna, mythe de naissance du structuralisme, dans l'Homme et la société, 1971,4, pp. 191-210. On se reportera sur ce point à notre av:mt-propos méthodologique. Il est hors de question de donner ici une bibliographie exhaustive des travaux des archéologues français ou italiens en Occident, soviétiques sur les côtes de Crimée, qui tous démontrent cet aménagement de l'espace de la cité (chôra et astu à la fois). On se reportera au volume VII des Congrès de Tarente, consacré à la Cité et son territoire, op. cit., et pour le Pont-Euxin, à la synthèse de A.N. SCEGLOV, Severo-zapadnyi Krym v anticnuju epohu (La Crimée du Nord-Ouest dans l'A IItiquité), Léningrad, 1978. Compte rendu dans les DHA, 8,1982, pp. 143-144. zaleucos de Lacres, en Occident, passe pour être le premier des législateurs, Charondas de Catane est également l'un des plus anciens. "Il suffirait presque de ce voyage bien connu vers le pays des Bienheureux, pour déceler une véritable obstination à mêler Héraclès aux choses d'Outre-Tombe", écrit-il en particulier (p. 50) dans un long article consacré à Hercule Funéraire (MEFRA, t. XXXIX, fase. IV, V, 1921 et t. XL, 1923, fasc. 1-11, pp. 19-102). HÉRODOTE, III, 116. HÉRODOTE, IV, 82. F. HARTOG, Le miroir d'Hérodote, Paris 1880, p. 247. M. VAN DER VALK, loc. cit., p 168 note, en se gardant de tirer de ce fait des conclusions chronologiques précises, la parenté de pensée (dans leurs appréciations des poètes cycliques) entre Apollodore et l'école d'Aristarque. Rappelons que la Bibliothèque qui mentionne le Cycle de Denys ne peut être antérieure au 1er siècle avant notre ère (à moins, bien sûr, qu'on ne voie, dans cette référence, une interpolation!). Nous renvoyons, sur ce sujet à notre mise au point de la note 168 de cette deuxième partie. Un récent colloque romain (mars 1985), Momenti precoloniali ne! Mediterraneo antico, (à paraître), a bien montré ce dynamisme commercial
352 des Achéens. On se reportera au compte-rendu donné par P. LÉVEQUE de ce colloque: DRA, 11, 1985, pp. 157-165. 494- P. LÉVEQUE, La dynamique de l'expansion et le panthéon mycénien, Momenti... op. cit., à paraître. 495- L. GODART, montre bien, en effet, le rÔle capital du linéaire B comme moyen de structuration du pouvoir. Minoici e Micenei, precolonizzatori e precolonizzati, colloque de Rome, Momenti.... op. cit.• à paraître. 496- On se reportera sur ce point à notre première partie. 497- Au sens où l'entend E. CERF, Contes pour l'identité, méthodes pour l'analyse de textes produits en Alsace de 1800 à 1890, dans Le Conte. pourquoi? Comment? (Colloque, Paris, 1982), Paris, 1984. L'auteur définit ainsi l'identité: "un jeu de références fondées sur le territoire, l'histoire, la langue, la culture ou la religion". 498- J. DOURNES, Ethnoanalyse de la récitation traditionnelle. Etat d'une recherche sur un corpus indochinois, Le Conte. pourquoi. comment ? pp. 439-458, singulièrement p. 443. 499- On se reportera sur ce point à notre avant-propos méthodologique. 500- Toujours J. DOURNES, qui, à propos de ces images, parlait, quant à lui, de "proto-images" (dans une intervention après la communication de V. LABRIE, op. cit., p. 580).
TROISIÈME ;,'PARTIE r
1
1""
HÉRACLÈS DANS LA CITÉ: , L'INTEGRATION DES JEUNES GENS
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"Boire avec Héraclès"...
Un programme qui, contrairement à ce qu'on pourrait penser, ne concerne pas le seul Héraclès paillard des Comiques, ou bien encore l'Hercule bibax des Romains! La formule, en fait, loin d'être une plaisante façon, pour les Anciens, de sourire des dieux et de légitimer par les excès de ces derniers leurs propres débordements, paraît bien avoir été pm1ie intégrante d'un rite et avoir accompagné la libation qui consacrait l'entrée des jeunes gens dans la communauté des adultes. Boire avec Héraclès, c'est en effet ce que font les éphèbes, à Athènes, au moment même où, offrant leur chevelure à Artémis, ils signalent à la communauté que le temps de l'enfance est pour eux terminé... Cette survivance dans les pratiques sociales et religieuses mérite qu'on s'interroge. Georges Dumézil, n'a-t-il pas reconnu dans Géryon ce fameux monstre triple qu'il retrouve dans les traditions de tous les peuples indo-européens et dont il a suffisamment prouvé qu'il conservait le souvenir de très anciennes initiations militaires? (1). La quête des pommes d'or, en ce lieu merveilleux qu'est le jardin des Hespérides, n'est-elle pas, elle aussi, une de ces épreuves qualifiantes qui inscrivent le mythe dans un ensemble cohérent et désignent le héros pour un destin exceptionnel ? Et si nous souhaitons nous attarder un peu sur la coïncidence, ainsi relevée entre le récit mythique concernant Héraclès et la fonction qu'assume le héros à Athènes lors des Apatouries, c'est qu'une lecture attentive de Pausanias nous a prouvé que, loin d'être une exception, les pratiques athéniennes rappelaient, en fait, de nombreux usages locaux, beaucoup plus obscurs et sur lesquels le Périégète - qui précisément a souci
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d'exhumer, pour des lecteurs apparemment avides d'exotisme, les traditions locales les plus méconnues - nous donne une information vraiment précieuse. Information tardive, dira-t-on, si l'on songe que c'est la Grèce du Und siècle de notre ère que Pausanias décrit ainsi, que l'Athènes et plus encore la Sparte qu'il a connues ont été profondément remaniées par les Romains (2). C'est vrai, et nous aurons soin de ne pas l'oublier, mais il nous a semblé que, sur ce chapitre des cultes et des traditions pour lequel nous l'appelions à témoigner, Pausanias donnait le plus large écho aux versions les plus anciennes et que notre effort pour retrouver le passé le plus archaïque correspondait, justement, à l'une des préoccupations mêmes de l'auteur. TI nous a semblé aussi que le conservatisme qui - plus qu'en tout autre lieu de l'activité humaine - est de règle en ce domaine, nous autorisait à fonder sur le récit de ce voyageur tardif, mais consciencieux, une étude des souvenirs locaux qu'on gardait du héros Héraclès... Et, si nous avions encore quelque inquiétude, l'exemple de tant d'historiens de la religion grecque utilisant - sans même se poser de questions - le témoignage de Pausanias suffIrait à nous rassurer. C'est donc, à notre sens, de manière fort légitime, que nous tenterons, à partir de Pausanias, de montrer ici que le meurtre du tricéphale par Héraclès n'est en rien accidentel, mais qu'il est dans la ligne d'une carrière dans laquelle on peut, à chaque pas, s'attarder à retrouver les traces des épreuves reprises par tant de scénarios initiatiques (3), d'un personnage dont les "amitiés particulières" sont à peine moins connues que le goût vigoureux pour les femmes qui lui valut le nom de philogunès (4), d'un héros, enfin, que certaines pratiques locales invitent à considérer comme ayant pu, dans le passé des Grecs, assumer une fonction intégratrice qui va bien au-delà du simple rôle que lui conféreraient ses seules qualités athlétiques.
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PREMIER CHAPITRE: CULTES.... "Vous diriez une fie au milieu de la mer .. on y passe sur deux ponts .. à l'entrée de l'un il y a une statue d'Héraclès, et à l'entrée de l'autre,un portrait de Lycurgue..."
Cette île - ou cette presqu'île - mentionnée par Pausanias dans sa description de la Laconie (5), c'est celle du Platanistas, célèbre pour les combats dans lesquels s'opposaient - faisant du même coup l'expérience de leur solidarité - les futurs citoyens de Sparte. Quant à ces "usages particuliers" de la jeunesse lacédémonienne (6), s'ils peuvent surprendre un Grec du Ile siècle de notre ère, ils ont perdu, à nos yeux, une partie de leur mystère. Henri Jeanmaire, en effet, a fini par convaincre qu'il fallait en chercher la clef dans les sociétés traditionnelles où l'organisation en classes d'âge garde sa force première, c'est-à-dire sa vertu d'intégration sociale (7) ; et c'est lui, encore, qui a proposé du personnage de Lycurgue une explication très plausible; cet homme... ou ce dieu, pour faire écho aux hésitations de l'oracle de Delphes (8), responsable des lois spartiates, et, précise Pausanias, des "exercices et des combats des jeunes gens" (9) serait "l'homme-loup" ou, plus exactement, "celui qui célèbre les orgies du loup" : Lycoorgos, souvenir de ces confréries de lycanthropes qui -les cultes du mont Lycée en témoignent encore à l'époque historique - ont sans doute joué un rôle important dans la Grèce primitive. Que Lycurgue soit un personnage légendaire ou qu'il ait bel et bien existé, il reste, dans l'esprit des Grecs, celui qui organisa l'éducation des jeunes Spartiates et qui donc maintint ou récupéra les pratiques initiatiques qui en jalonnent la parcours. Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce qu'il "tienne" l'un des ponts du Platanistas, enjeu des luttes périodiques entre agelai à l'époque romaine encore. Mais Héraclès? Sa présence symétrique, lorsqu'elle est mentionnée, n'a pas été retenue (10) ... Sans doute est-elle "banalisée" par le patronage un peu
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convenu qu'exerce fréquemment le héros sur les gymnases et autres lieux d'exercice de la jeunesse. C'est, pour notre part, sur cette image d'Héraclès telle que nous la donnent à voir de multiples cultes locaux que nous aimerions, dans un premier temps, nous attarder quelque peu.
1-1 La Description de la Grèce par Pausanias atteste de la popularité du héros - ou du dieu - (11) ; elle témoigne aussi de bien curieuses constantes: la plus attendue est évidemment sa présence souvent attestée dans les lieux d'exercice fréquentés par la jeunesse. Nous ne nous étonnerions guère que le héros apparaisse ainsi à Thèbes et en Argolide - manifestement deux centres de grande importance pour la constitution de sa légende telle que la diffuseront les mythographes de l'époque hellénistique - (12) ; il peut sembler surprenant que son culte soit répandu dans tout le Péloponnèse et qu'il ne le soit pas moins dans les villes de l'Isthme de Corinthe et en Attique (13). S. Woodford, par exemple, remarquait naguère que celui qui passe pour être le héros des Doriens a, en Attique, beaucoup plus de sanctuaires que son homologue athénien Thésée (14) et c'est tellement vrai qu'Euripide, au Vème siècle, juge nécessaire d'en fournir une explication (15). L'historienne anglaise notait encore que les cultes d'Héraclès y paraissent beaucoup plus anciens et plus profondément enracinés (16) ; elle soulignait enfin les relations étroites qu'ils entretiennent avec les jeunes gens. Et il est vrai que les sanctuaires du Cynosargue, de l'Académie, de Mélité et de Tétracomos, au moins (17), se situent dans l'étroit voisinage d'un gymnase lorsqu'ils ne s'y trouvent pas directement rattachés. Nous savons, par exemple, que certaines épreuves gymniques des Panathénées se déroulaient dans l'Héracléion commun aux centres du Pirée, de Phalère de Xypété et de Thymoitide (18); qu'au gymnase d'Académie - qui probablement existait dès l'époque archaïqueHermès et Héraclès avaient tous deux leur autel (19) ; qu'à Mélité - où Héraclès recevait de bien curieuses offrandes (20) le culte était probablement rendu par les éphèbes fréquentant le gymnase attaché au sanctuaire (21). Mais les plus célèbres des téménè consacrés à Héraclès sont sans doute ceux de Marathon et du Cynosargue (22). Les H éracléia qui, selon Aristote, se célébraient tous les quatre ans (23), en plein été semble-t-il, sont vraisemblablement à mettre en
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rapport avec le sanctuaire de Marathon. Des jeux, en tout cas, y sont bien attestés dès le début du Vème siècle (24) et jouissent déjà d'une certaine notoriété, puisqu'Epharmôstos d'Oponte - pour qui Pindare écrit en 468 la IXème Olympique - avait auparavant, à Marathon, "combattu pour la conquête des coupes d'argent" (25). fi est notable, d'ailleurs, que Pindare se réfère, à ce propos, à une organisation des concours en classes d'âge, puisque son "client", à peine "ravi à la classe des imberbes", dut disputer le prix "à des hommes beaucoup plus âgés que lui" (26), et, s'il fallait la preuve que survivent, en Grèce, de telles structures, un catalogue des vainqueurs aux Héracleia (précisément!) de Chalcis le prouverait, qui énumère les gagnants par catégories d'âges dans l'ordre: les nai8&ç nal1nai8&ç, les nai8&ç, les lcpnGo1, les àyév&lOl, les av8p&ç. (27). Le sanctuaire du Cynosargue, dans le dème de Dioméia, à l'extérieur, mais à peu de distance des murs de la cité, ne paraît pas moins intéressant. Connu surtout pour ses "parasites" qui, comme d'ailleurs à Marathon, desservent le culte (28), mais sont ici notoirement des nothoi (demi ou nouveaux citoyens) (29), il était encore célèbre par la légende de ses origines et de son nom: la chienne blanche qui justifiait ce dernier ( xuvoç - 6pyijç ) aurait, emportant une partie des chairs de la victime, interrompu un sacrifice offert au dieu Héraclès par l'un de ses éromènes : Diomos (30). Pausanias ajoute qu'il a vu là des autels dédiés à Héraclès et à Hébé "fille de Zeus et, selon la tradition, épouse d'Héraclès", mais aussi à Alcmène et à Iolaos "qui supporta avec Héraclès la plus grande partie des travaux" (31). Nous arrêterons là cette description dont le but n'était en aucun cas de retrouver tous les témoignages d'un culte à Héraclès en Attique, encore moins d'en fournir une étude exhaustive (32). Il s'agissait simplement - et sur ce point l'énumération nous paraît probante - de mettre en relief le rapport étroit entretenu par le héros avec ces lieux où s'exerce la jeunesse, un rapport pour lequel, dans certains cas, le détail des cultes permet déjà d'entrevoir de possibles prolongements: - l'existence de concours dont l'organisation perpétue parfois la division en classes d'âge; - le rôle auprès d'Héraclès de ces jeunes gens dont il fut l'amant (l'éraste) : Iolaos, son neveu dans la mythologie et son compagnon fidèle, Diomos beaucoup plus obscur dont le caractère local ne fait aucune doute. - Quant aux relations entretenues par le héros avec les
360 dieux, nous retiendrons, outre le voisinage attendu d'Athéna, la présence plus fréquente encore d'Hermès et le rôle d'Hébé - la jeunesse elle-même - qui fut donnée comme épouse à Héraclès lors de son accession au rang des dieux... Ce lien privilégié du héros avec la jeunesse à l'exercice, nous le retrouvons dans toute la Grèce; il suffit de suivre les visites de Pausanias: en Béotie, à Thèbes, où le mythe fait venir Amphitryon obligé de quitter Tirynthe (33), le héros avait un temple, très ancien si l'on en juge par la statue d'Héraclès, une statue de bois "d'un goût fort archaïque" et que les Thébains tenaient pour être l'oeuvre de Dédale. Le gymnase et le stade jouxtaient le sanctuaire et tous deux portaient le nom d'Héraclès (IX, Il, 4-7). A Thèbes encore, près des portes Proitides, un lieu d'exercice portait le nom d'Iolaos et le monument héroïque (ou, d'après Pindare le tombeau) du jeune homme était en étroit rapport avec le stade (IX, 23, 1). Des jeux - les Héracléia - y étaient célébrés (34) et Thèbes n'était certes pas le seul centre de Béotie où l'on rendait un culte à Héraclès (35) ! A Sicyone, Héraclès était représenté dans le gymnase près du marché (II, 10, 1) et, si la statue de marbre sculptée par Scopas pouvait ici être une adjonction relativement récente, peut-être n'en était-il pas de même de celle qui ornait un autre gymnase - encore fréquenté par les jeunes gens au temps où le visitait Pausanias - et qui figurait Artémis et Héraclès à la fois, avec "cette forme carrée" qu'avaient autrefois les Hermès (II, 10, 7). Le temple d'Héraclès, où le dieu était représenté par un xoanon archaïque, était lui-même situé dans une enceinte réservée aux exercices, et de façon plus génénùe, semble-t-il, à la formation de la jeunesse. (Il était nommé nalBl(ii dit Pausanias, II, X, 1). En Arcadie, à Phénée, c'est le tombeau d'Iphiclès, frère du héros qui se trouve en rapport avec le stade (VIII, 14, 9) et à Mégalopolis, Héraclès et Hermès avaient un temple commun devant le stade, temple dont seul subsistait l'autel, lorsque Pausanias le visita (VIII, 32, 3). En Messénie, enfin, à Ithôme, parmi ces statues qu'on pouvait admirer dans la palestre (et qui passaient pour avoir été faites par des Egyptiens!) Pausanias signale celles d'Hermès, d'Héraclès et de Thésée "divinités qui, non seulement chez les Grecs, mais même dans plusieurs nations barbares, président aux exercices et sont particulièrement honorées dans les palestres" (IV, 32, 1). Remarque qui - au moins en ce qui concerne Héraclès et Hermès - se trouve confirmée par l'archéologie dans
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bon nombre de cités du monde grec (36). Quant au succès du thème de cet Héraclès agonistique, hors de ce même monde grec, des miroirs étrusques en attestent, et ce dès le IVème siècle. Sur l'un d'entre eux, par exemple, (37) sont représentés Herc!é, imberbe et nu, appuyé sur sa massue; Turms, l'Hennès étrusque avec sa chlamyde simplement agrafée, son pétase et un caducée (curieusement figuré) et à ses côtés, Vilae, c'est-à-dire Iolaos (fig. 27). Derrière Herclé, une fontaine pourrait, certes, évoquer le lien étroit qu'entretient Héraclès avec les sources (38), mais, plus vraisemblablement, a surtout ici valeur d'indication topographique et rappelle celles qui, à la palestre, servaient aux ablutions des athlètes. Le strigile que tient Vilae-Iolaos ne laisse aucun doute sur la signification de la scène et justifie qu'on puisse voir dans l'amphore couchée sur laquelle Herclé laisse reposer son pied (comme le fait parfois l'Héraclès grec sur la dépouille du lion de Némée) le prix de la victoire (39). "Illustration de la faveur de la palestre grecque, de ses jeux, de ses arbitres, de ses récompenses et de ses dieux... " telle est la conclusion que tire Denise Rebuffat de cette diffusion en Etrurie (et tout particulièrement dans la région latino-prénestine) du thème d'Héraclès victorieux dans les Jeux (40). Nous retiendrons, quant à nous, la persistance du lien qui unit à la palestre ou au stade Héraclès et Hennès "qui préside aux Jeux" et "qui a sa part aux victoires" (41), Hennès agonios ou enagonios si souvent en rapport avec les éphèbes. Nous retiendrons aussi la présence d'Iolaos (42), le jeune compagnon d'Héraclès qui peut à bon droit apparaître comme l'éphèbe-type, nous aurons l'occasion d'y revenir. Comment s'étonner, alors, qu'à Sparte Lycurgue partage avec Héraclès le soin de surveiller les joutes du Platanistas ? qu'à quelques pas du dromos, encore, où les jeunes gens s'exerçaient à la course, une vieille statue du héros ait été l'objet d'un culte très particulier (43) ? Comment ne pas rendre leur signification aux multiples souvenirs, traces d'une présence héracléenne qui, tant près de l'héroon de Lycurgue que près de l'hiéron d'Hélène marquent l'itinéraire suivi par Pausanias du Platanistas au sanctuaire de l'Artémis du Limnaion, un itinéraire sur lequel Henri Jeanmaire a relevé les multiples jalons de souvenirs initiatiques (44).
* * *
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Fig. 27:
Hercl~,
Vitae et Turms, Miroir ~truique
Cf. E. GERHARD, Etruslcische Spiegel, Berlin, 1843, 1, 127.
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1-2 Au Platanistas, les combats de la jeunesse spartiate ne sont pas à proprement parler des concours, mais des affrontements violents entre age/ai : on se bat à coups de poings, de pieds; on se mord, on s'arrache les yeux, "chaque troupe faisant tous ses efforts pour faire reculer l'autre, et.pour la pousser dans l'eau qui est derrière" (45)... A Marathon, en revanche se célèbrent de véritables jeux, qui, à l'époque de Pindare, ont déjà acquis, nous l'avons vu, un certain renom... Mais bien sûr ils sont peu de chose comparés aux jeux panhelléniques par excellence, ceux qu'on célèbre dans le sanctuaire de Zeus à Olympie. Or le souvenir d'Héraclès leur est étroitement lié, Pausanias en témoigne, qui a visité l'Elide et fidèlement recueilli les traditions concernant les concours. Le héros, en effet, s'il n'est pas le maître des Jeux, les contrôle de très près et préside, par exemple, aux exercices préparatoires - et obligatoires - des candidats qui affronteront les épreuves. Pausanias a vu ainsi à Elis (et c'est ce qui, dans la cité, lui a paru mériter le plus d'attention) un ancien gymnase où devaient s'exercer les athlètes quelque temps avant les concours. L'endroit portait, raconte-t-il, le nom de xyste, parce qu'Héraclès, (le fils d'Amphitryon) "le nettoyait tous les jours pour s'entraîner au travail" et "en arrachait les ronces et les épines" (VI, 23, 1). Mais c'est "l'autre Héraclès", le dactyle de l'Ida, qui avait là un autel où on l'invoquait sous le nom de napa(JTcITTlç;' (VI, 23, 3). Héraclès patronait encore, à Elis, un péribole de moindre importance - appelé Ma/tho à cause de la douceur de son sol -, ouvert aux éphèbes (et non pas aux enfants, comme le dit la vénérable traduction française de Gedoyn !) pendant toute la durée des Jeux Olympiques (46). Héraclès n'était pas moins présent dans l'A/tis, mais là, il faut le reconnaître, en très large compagnie: sur les nombreux autels du sanctuaire deux, en effet, honoraient le héros, le premier, une fois de plus sous le nom de parastatès, "celui qui assiste" (V, 14, 7) ; l'autre, près du trésor de Sicyone, était dédié "soit à Héraclès courète, comme le veulent certains, soit au fils d'Alcmène, comme d'autres le prétendent" (V, 14,9). Mais ce sont les traditions rassemblées par Pausanias sur la fondation des Jeux Olympiques qui conservent le plus vif souvenir d'Héraclès. Elles traduisent d'ailleurs le même embarras - largement partagé! - (47) quant à son identité: dactyle (plutôt que Dieu) ou héros'! Héraclès crétois, ou Héraclès thébain fils d'Amphitryon et d'Akmène ? Pausanias, parlant de la statue, dédiée par les Thasiens à Zeus, dira même
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que ces peuples, "originairement des Phéniciens" honoraient d'abord le dieu de Tyr, mais qu'après leur rencontre avec les Grecs ils connurent aussi le fils d'Amphitryon (V, 25, 12). TI est manifeste toutefois qu'il s'agit pour lui d'une particularité locale (48).
A Olympie le Périégète, en effet, a appris de quelques Eléens jugés "fort savants dans l'étude de l'Antiquité" qu'Héraclès, l'aîné des cinq dactyles - ou courètes - de l'Ida chargés "d'éduquer" le Zeus des enfances crétoises, pour avoir proposé à ses frères "de s'exercer à la course et de voir qui en remporterait le prix", méritait qu'on lui attribue la gloire d'avoir inventé les Jeux. C'est lui, encore, qui les aurait nommés olympiques, c'est lui enfin qui aurait, le premier, rapporté de chez les Hyperboréens l'olivier dont était faite la couronne du vainqueur... Quant à la périodicité des Jeux, l'histoire l'explique ainsi: c'est parce qu'ils étaient cinq dactyles que les fêtes ont lieu tous les cinq ans (49). C'est une tradition quelque peu différente que Pausanias rapporte au chapitre suivant. Un descendant d'Héraclès - le dactyle de l'Ida - venu lui aussi de Crète aurait célébré les jeux à Olympie, consacré un autel aux courètes, et particulièrement l'autel à Héraclès parastatès dont il a été question plus haut (50). Quant à Pélops, il "aurait fait représenter ces mêmes jeux en l'honneur de Zeus, avec plus de pompe et d'appareil qu'aucun de ses prédécesseurs" (51). Enfin après Pélias, Nélée et Augias, Héraclès, fils d'Amphitryon, fit célébrer les jeux. "Le premier qu'il couronna fut Iolaos (son écuyer, dira plus tard Pausanias), qui, pour remporter la course de chars avait emprunté les propres cavales d'Héraclès"... le héros aurait obtenu lui-même le prix de la lutte et du pancrace (52). Pausanias mentionne encore un rétablissement des Jeux Olympiques par Iphitos, sur les conseils de l'oracle de Delphes... le premier acte en fut apparemment un sacrifice à Héraclès (53). Ajoutons que, si le tertre consacré dans l'a/tis à Pélops l'a été par Héraclès, fils d'Amphytrion (54), l'autel de Zeus, fait de la cendre des victimes qu'on lui offrait, aurait été dédié, soit par l'Héraclès dactyle, soit, deux générations après environ, par des héros du pays (55). Mais c'est à nouveau le fils d'Alcmène qui, sacrifiant à Zeus, fit disparaître les mouches qui l'incommodaient en offrant une victime à Zeus Apomyios. Pour ce sacrifice, répété chaque année, on ne pouvait brûler d'autre bois que du peuplier blanc, arbre que le héros avait rapporté des rives de l'Achéron (56).
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L'histoire des Jeux Olympiques et celle d'Héraclès sont, on le voit, à l'évidence inextricablement liées, et l'une comme l'autre témoignent de l'extraordinaire aptitude des Grecs à assimiler, à intégrer, à ordonner les héritages multiples de leur passé religieux. Cet Héraclès dactyle - ou courète, comme le dit Pausanias non sans inexactitude (57) -, ce chef (ou aîné) des cinq dactyles de l'Ida, appartient, sans contestation possible, au fonds très primitif des cultes créto-mycéniens organisés autour d'une grande mère primitive et de son parèdre mâle: Rhéa et Zeus enfant qu'elle dérobe à la jalousie de Cronos, par exemple, dans la mythologie grecque. L'archéologie est venue confirmer, d'ailleurs, l'existence de ces éléments mycéniens relevés depuis fort longtemps dans les Jeux Olympiques par R. Vallois (58). Dans l'altis, les strates de l'Helladique moyen et de l 'Helladique récent sont bien attestées (59) et les documents épigraphiques du moment, les tablettes de Pylos, font apparaître, dès cette haute époque, l'ethnique "Olympiaioi" (60). On ne peut d'ailleurs s'empêcher de trouver très cohérent dans sa complexité même - le texte de Pausanias. C'est en effet à cet Héraclès "dactyle", à ce génie crétois, qu'il attribue la fondation de l'autel de cendres, dont la pratique est, c'est bien connu, de tradition pré-hellénique, à lui aussi qu'il accorde "l'invention" de la course à pied... Or les dactyles (comme les courètes) sont aussi des inventeurs, des initiateurs; il n'est que de lire, pour s'en convaincre, les pages que leur consacre Henri Jeanmaire (61). Que la course à pied soit une épreuve initiatique, cela est probablement admis par tous... agôn donc, mais aussi peut-être, avant de l'être (ou en tant que tel nous y reviendrons), liturgie agraire, charme de fertilité censé réveiller les énergies latentes de la nature. Et c'est bien en génies de la végétation qu'apparaissent les dactyles de Pausanias qui reposent sur une jonchée d'olivier et qui, en couronnant le vainqueur de ce feuillage toujours vert, font de lui un dieu de Mai, un génie de la végétation à son tour (62). Pausanias privilégie manifestement le passé le plus lointain, il privilégie aussi Héraclès, n'accordant qu'une place relativement seèondaire à Pélops, qui simplement, selon lui, célébra les fêtes avec une plus grande pompe. Or, c'est le mythe de Pélops qui forme l'aition de l'épreuve la plus célèbre des jeux: la course de chars; c'est lui aussi qui met les Jeux en rapport avec le mythe d'avènement, mythe royal où l'opposition des "seniors" et des "juniors" rappelle les pratiques anciennes de dépossession du
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vieux roi par un plus jeune, et, par là-même, les rites de renouvellement du pouvoir... initiation encore, mais initiation à la royauté, accessible aux seuls possesseurs de chars (63). Et s'il fallait absolument, comme cherche à le faire L. Orees, retrouver à Olympie trace de l'opposition entre une aristocratie et une plèbe créto-mycénienne, il serait plus légitime de la voir dans la finalité des deux épreuves principales que dans l'opposition hypothétique de couples divins qui ne le sont guère moins: Zeus~Pélops/Héra-Hippodamieet Héraclès idéen/Déméter ! (64). Pour Pindare - mais s'en étonnera-t-on? - c'est ce mythe de Pélops qui est le véritable mythe fondateur des Jeux Olympiques... C'est lui, en tout cas, qu'il développe tout au long de la Deuxième Olympique. Il doit cependant respecter la tradition: "Le souverain de Pise est Zeus", chante-t-il, et "c'est Héraelès qui a institué la fête olympique, prémices de sa victoire" (65)... Pour lui aussi, c'est Héraclès qui rapporta jadis "des sources ombreuses de l'Ister" "le vert feuillage de l'olivier" (66), mais, s'il fonde "la fête suprême" et trace "en l'honneur de son père sublime, le sanctuaire divin", c'est "auprès de l'antique sépulcre de Pélops" (67). Pindare, lui, a choisi. C'est bien au fils d'Amphitryon qu'il rapporte la création des Jeux... une tradition que Pausanias a su, lui aussi, recueillir, mais qui l'oblige à se prononcer, comme beaucoup d'autres, pour l'existence de deux Héraclès. Pausanias, enfin, sait bien que les Grecs font remonter les Jeux au VIIIème siècle et même à la date précise de 776... qu'à cela ne tienne: Iphitos, qui les réorganise sur les conseils de l'oracle de Delphes, commence par sacrifier à Héraclès. li se fait ainsi l'écho d'une idée fortement ancrée dans l'imaginaire des Grecs (68): penser aux Jeux Olympiques, c'est penser à Héraclès. Au-delà de l'organisation - ou de la réorganisation à l'échelle panhellénique - des concours d'Olympie qu'on peut effectivement dater, très logiquement, de cette période d'extraordinaire ouverture que vit la Grèce au VIIIème siècle, le sanctuaire - sinon les temples - préexistait, et les rites eux-mêmes, qui font si fortement référence au héros. Il convient de noter que, si l'une des épreuves, la course de chars, apparaît, autour de Pélops, fortement liée à une aristocratie militaire et à l'idéologie royale, le souvenir d'Héraclès - le dactyle de l'Ida qui paraît s'inscrire dans le passé plus lointain encore, est quant à lui, attaché à une épreuve plus ouverte, et très proche des liturgies agraires primitives. Deux époques donc, et la plus ancienne n'a pas été totalement oubliée malgré les efforts d'un Pindare, par exemple,
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pour ne plus voir dans le fondateur des Jeux que le fils d'Amphitryon et d'Alcmène... Deux types d'initiation aussi et c'est pourquoi nous nous garderons de suivre B. Sergent, lorsqu'il se gausse de l'explication proposée naguère, à l'origine des Jeux Olympiques. Dans un article - au succès jugé "étonnant" - H. Vallois accordait en effet une place fondamentale aux rituels agraires. Certes, la signification initiatique des épreuves n'était guère mise en valeur, mais B. Sergent est-il fondé à lui reprocher "une analyse très partielle de la documentation", lui qui n'évoque le problème que par le biais du seul mythe fondateur de Pélops? En réalité, Olympie semble bien offrir un des plus beaux exemples d'un premier syncrétisme créto-mycénien que les exigences idéologiques de la cité aristocratique ne sont pas parvenues à anéantir (69).
* * * 1-3 Les séquences initiatiques sont à Olympie, beaucoup plus complètes que l'étude des seuls rapports unissant Héraclès et les Jeux ne nous permettait de l'exposer. fi est bien certain que le mythe de Pélops, par exemple, ne peut être réduit au seul épisode fondateur de la course de chars (70)... D'un autre côté, la rencontre, en ce lieu, de notre héros et du thème initiatique pourrait appraître fortuite, si un certain nombre d'indices relevés toujours, pour l'instant - au niveau des pratiques cultuelles - ne venaient conforter notre position. Parmi ceux-ci, peut-être citerons-nous la position marginale de cultes qui ont tous en commun d'être considérés comme très anciens par Puusanias: cultes des confins bien souvent, qu'il s'agisse du contact de la cité et de sa chôra (à Sparte, par exemple, le temple d'Héraclès se trouvait "tout près des murs de la ville") (71)... qu'il s'agisse, et c'est très souvent le cas, des confins de la polis, ou du territoire. C'est ainsi qu'aux confms de Mégalopolis et de la :Messénie, en un lieu consacré à Hermès, et sous la protection de cette divinité que les Arcadiens appellent, par excellence, "la Maîtresse", une vieille statue d'Héraclès avait, au dire de Pausanias, été taillée dans le bois par Dédale (72). A la frontière de l'Elide et de l'Arcadie, au-delà du fleuve Erymanthe, le Périégète a vu un vieux temple du héros: près de l'édifice, à demi ruiné, un tombeau, celui d'un fameux bandit tué autrefois par Héraclès, disait-on, et, en
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tout cas, éponyme du Mont Saurus voisin (73). Et c'est encore dans une zone frontalière, entre le territoire des Achéens et celui des Eléens, près du fleuve Larissos, que le souvenir d'Héraclès était lié au tombeau de Sostratos, "un jeune homme du pays" qui, lors du passage de Pausanias, recevait encore tous les ans les honneurs dus à un héros. On pouvait d'ailleurs voir le cippe funéraire auquel était adossée une statue du fils d'Amphitryon. Et ce jeune homme nous introduit dans le cortège des éromènes d'Héraclès. Le héros l'avait aimé, en effet, disait-on, qui, après sa mort, lui avait fait élever un tombeau et "avait coupé ses cheveux sur sa sépulture" (74). Constatation u.n peu paradoxale: Héraclès, dont la mythologie rapporte avec complaisance les bonnes fortunes auprès des femmes, apparaît, dans le culte, lié de façon beaucoup plus fréquente aux jeunes gens et l'affmnation de l'Eroticos de Plutarque - qui prête au héros des amours homosexuelles si nombreuses qu'il est difficile d'en faire la liste - a peut être d'autres fondements que les échos d'une tradition tardive (75). Notre promenade avec Pausanias l'a prouvé, me semble-t-il, à plusieurs reprises: c'est Diomos, éromène d'Héraclès qui fonde - avons-nous vu - le culte du Cynosargue, où d'ailleurs, on sacrifie aussi à lolaos... A Thèbes, près de l'une des portes de la cité, le sanctuaire héroïque de ce dernier voisine, non seulement avec le gymnase qui porte son nom, mais encore avec le stade et l'hippodrome... A Sparte, des rites agonistiques qui restent pour nous très obscurs: les Elakatia, se célébraient en un sanctuaire dont l'éponyme avait été - affmne l'historien de la cité Sosibios, - l'éromène d'Héraclès (76)... Peut-être faut-il encore mentionner, à Sparte toujours, ce tombeau qui près du temple d'Héraclès, non loin du Dromos, rappelait le souvenir d'Oenos, ce jeune homme cruellement agressé par les fils d'Hippocoon et non moins cruellement vengé par son célèbre cousin (77). Parfois d'ailleurs, le héros lui-même est responsable de la mort du jeune homme qui, plus tard, sera honoré conjointement avec lui: c'est le cas pour Cyathos, l'échanson d'Oinéos à Phlionte, en un centre sans doute capital pour le culte d'Hébé qui possédait là un temple de tous temps vénéré, et conservait, pour elle-même, la fonction d'échanson autrefois dévolue en ces lieux à Ganymède J (78). De tels cultes trouvent un écho dans certaines traditions mythologiques, celle de la fondation d'Abdère, par exemple, que rapporte Apollodore. Une ville fondée par Héraclès, dit-il, auprès
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du tombeau du jeune Locrien dont il était amoureux et qui périt, dévoré par les cavales de Diomède qu'il lui avait confiées (79). Ils donnent peut-être un sens également à la représentation d'Eros, que, dans certains lieux d'exercice, Pausanias a vue aux côtés de celle d'Héraclès (VI, 23, 3 et VI, 23, 5). Il est à noter qu'Athénée, pour sa part, estime courante - et normale - la présence conjointe dans les gymnases publics d'Hermès, d'Héraclès et d'Eros (80). Mais ces cultes rapportés par Pausanias trouvent encore une confirmation archéologique dans les inscriptions de Théra. Là, non loin du temple d'Apollon Carneios, sur un site qui fut par la suite inclus dans le gymnase, une grotte était consacrée à Hermès et Héraclès une fois de plus associés. Des textes gravés, datant en partie du VIIème siècle, invoquent différentes divinités (en particulier Apollon, dont nous connaissons, à Sparte, le rôle joué, sous le même nom de Carneios, dans l'initiation de la jeunesse) ; ils célèbrent surtout les qualités de tel ou tel éromène loué par son éraste. Si certaines de ces inscriptions apportent la preuve de la consommation effective des relations pédérastiques, toutes, cela est clair, placent ces pratiques sous la protection divine (81). Les textes de Plutarque pour Sparte et, pour la Crète, ceux que Strabon emprunte à Ephore, avaient depuis longtemps permis de comprendre la valeur pédagogique et institutionnelle de l'homosexualité en pays dorien. A Sparte, lorsqu'ils atteignent l'âge de douze ans, les enfants "de bonne renommée" se voient recherchés par des amants plus âgés (82) ; en Crète, l'épisode pédérastique concerne - et cela peut-être nous éclaire sur le sens de cette renommée dont parle Plutarque - les garçons d'illustre ascendance, et il se traduit par un enlèvement et une retraite de deux mois (83). Dans les deux cas il est mtmifeste que le fait d'avoir été distingué par un adulte, de bénéficier de manière suivie et privilégiée de ses conseils et de son exemple fait partie intégrante d'un système d'éducation; il fait partie aussi de cette idéologie "du meilleur" qui est celle de l'arist()(..Tatie. On retrouverait, d'ailleurs, quelque chose d'assez semblable dans l'Athènes de Solon, s'il est vrai que, comme l'affmne Plutarque, le législateur "interdisait aux esclaves l'amour des garçons et la gymnastique, tout en leur pennettant de s'unir à des femmes... (en effet) l'amour qu'éprouve un esclave pour des garçons ne saurait être noble ni honnête, car cet amour est une union charnelle tout comme l'amour des femmes" (84). Valeur pédagogique et institutionnelle, valeur religieuse aussi; E. Bethe, déjà, l'avait souligné: cette pratique de
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l'homosexualité masculine, sanctionnée par des rites religieux, reçoit une véritable consécration. En Crète, toujours selon la tradition rapportée par Strabon, le retour dans la cité de l'éromène et de son éraste est marqué par un sacrifice (85); à Mégare, les adolescents célèbrent, par un concours de baisers, Dioclès, .héros paradigmatique de l'homosexualité masculine dont B. Sergent démontre de façon convaincante qu'il fut sans doute un double d'Héraclès, un personnage créé à son image et voué "à la gloire de Zeus", comme lui-même l'était "à la gloire d'Héra" (86). Cette sanction religieuse, Apollon, Héraclès et Hermès en sont garants à Théra, et, à Thèbes, c'est auprès du monument héroïque de Iolaos qu'érastes et éromènes échangent leurs serments de fidélité (87). Cette figure de Iolaos est bien, pour nous, la plus intéressante: compagnon du héros dans nombre de ses entreprises (y compris dans certains "travaux" péloponnésiens), il est, dit Pausanias, son écuyer, (88) et la tradition est déjà connue d'Euripide (89), qui, de surcroît, emploie pour situer le jeune homme par rapport à Héraclès le terme de parastatès (90) ... littéralement "celui qui assiste". C'est très exactement la fonction que lui assigne la mythologie, mais c'est aussi le terme même par lequel on désigne l'aimé en Crète. On pourrait encore, évidemment, être tenté de reprendre, dans le cadre de ces relations homosexuelles, l'épithète cultuelle de "parastatès " qui est celle d'Héraclès sur l'un au moins des autels d'Olympie (91) (il est encore appelé ainsi au gymnase d'Elis où Eros figure à ses côtés) (92)... Mais ce n'est pas ainsi, semble-t-il, que l'entendaient les Grecs, du moins ceux qui nous en ont parlé: Héraclès est en effet, dans tous les cas (ou presque) (93) l'éraste, le philétor pour reprendre la terminologie crétoise... A moins de ne lire dans cette apparente incohérence qu'une preuve supplémentaire de l'originalité de l'homosexualité en pays grec, qui voit les mêmes hommes être successivement éromènes puis érastes... C'est bien, en tout cas, dans son rôle d'adulte et de formateur d'une jeunesse vouée au métier des armes que la tradition devait fixer le héros. Ainsi commence à se dessiner, autour d'Héraclès, un schéma structurel qui le lie de façon précise à l'homosexualité masculine dans le cadre du gymnase, du stade ou de l'un et l'autre de ces lieux d'exercice de la jeunesse. Or il se trouve que, dans certains cas, le contexte cultuel peut encore être précisé: nous entendons bien sûr revenir sur les rites fondés par Héraclès à Agyrion, en Sicile, en l'honMur de Iolaos, mais nous voudrions d'abord évoquer d'autres traditions, qui ont bien
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peu retenu l'attention malgré leur intérêt
* * * 1·4 Dans une zone frontière du Péloponnèse, avons-nous vu, dans l'un de ces no man's lands peu marqués par l'empreinte de la vie civique et toujours plus ou moins disputés entre populations voisines (ici, les Achéens et les Eléens), le cippe funéraire de Sostratos voisinait avec la statue d'Héraclès qui avait été, disait-on, son éraste (94). Désespéré par la mort du jeune homme, le héros lui avait édifié un tombeau et, sur cette sépulture, avait coupé sa chevelure... Pourquoi cette tradition ? Simplement pour insister sur l'affliction d'Héraclès? ou pour expliquer une particularité du rituel ? (les habitants du pays en effet, sacrifiaient au jeune homme comme à un héros). Nous aimerions bien savoir si - comme à Agyrion précisémentl'offrande de la chevelure faisait partie des rites. Or cette pratique est de signification très claire et ses rapports avec l'adolescence sont évidents. Pour les jeunes filles, la consécration des cheveux à la veille du mariage est répandue dans toute la Grèce (95), pour les jeunes gens, le rite qui symbolise la sortie de l'enfance est attesté à Sparte (96), à Délos où ils vouent aux vierges hyperboréennes soit leurs cheveux, soit leur première barbe (97), à Athènes lors des Apatouries, et plus précisément au troisième jour de la fête, celui de couréôtis (98), etc. Et c'est bien un lien étroit avec ces cérémonies de passage que dénotent certains aspects du culte d'Héraclès. Lors des Apatouries, précisément, les garçons offrent, certes, leur chevelure à Artémis, divinité courotrophe par excellence, mais Héraclès, lui aussi, joue un rôle dans le sacrifice du Couréion, puisque, juste avant cette offrande, les futurs éphèbes lui portent l'oinistéria (99) - un grand récipient de vin et, qu'après une libation rituelle, ils boivent, eux aussi de manière rituelle. Que les Apatouries, la fête des Phratries, soient, comme le dit L. Gernet, "la forme moderne et banalisée des rites d'adolescence qui ont dû comporter, préhistoriquement, une véritable initiation" (100), c'est, ce qui, depuis, a été maintes fois souligné... que l'offrande de la chevelure soit l'un de ces rites d'initiation directement perpétués ne fait aucun doute, d'autant que le modèle mythique en est foumi par Thésée, fondateur des rites initiatiques athéniens (101). Quant à la libation, B. Sergent, à propos de la coupe (l'un des cadeaux qu'à la sortie de
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l'initiation offre l'amant crétois à son éromène) donne de nombreux exemples de la corrélation entre de telles libations (accompagnant la consommation rituelle du vin) et l'accès à l'âge adulte, ou, plus précisément, certains épisodes initiatiques (102). Rite de passage encore à Sparte, où non loin du Dromos, nous l'avons vu, une vieille statue d'Héraclès était le lieu d'un culte très particulier: c'est là, dit Pausanias, que sacrifient les éphèbes sur le point d'être intégrés à la classe des hommes: foTt eSt liyaÀlLa apxai'ov 'HpaJCÀéou" ij) 9uouo\v oi r<pa\pti'" oi eSt tiotv oi tx TWV t~&>v k liveSpa" apx6JL&vo\ cruVT&Àti'v... Et nous apprenons du même coup ce que sont les sphraireis, probablement des irènes de dernière année (Pausanias, manifestement assimile éphèbes et irènes) prêts à acquérir le statut d'adulte à part entière. Quelle que soit l'étymologie de ce tenne curieux (P. Chantraine y voit '~peut-être" un rapport avec la pratique de la boxe (104), mais on peut penser aussi bien à ce jeu de balle où quatorze sphaireis jouaient pour tous leurs compagnons) (105), ce que nous retiendrons, c'est que la sanction du passage à l'âge adulte impliquait, ici comme à Athènes, un sacrifice à Héraclès. Mais la description la plus complète de telles pratiques, c'est en Sicile que nous la trouvons autour d'Héraclès et de son compagnon lolaos : Diodore nous rapporte ces rites, qui connaît bien, pour en être originaire, la petite ville cl'Agyrion où ils se déroulent. Le mythe fondateur d'abord: Diodore raconte comment, lors de son retour avec les boeufs ravis à Géryon dans la lointaine Erythie, Héraclès fut, par les habitants d'Agyrion, vénéré "à l'égal des dieux olympiens par des fêtes et des sacrifices splendides"... premier culte auquel il consentit "averti qu'il était de son immortalité future" (106). Ainsi honoré par des sacrifices annuels il va - entre autres traces de son passage, encore visibles à l'époque de Diodore - consacrer deux téméné dans la cité, l'un "au héros Géryon", l'autre à son "neveu et compagnon d'armes" lolaos et fonder les cultes de l'un et de l'autre. De celui - fort surprenant dans sa symétrie - qui honorera Géryon, Diodore ne dit rien, hélas, sinon qu'il était toujours célèbre à son époque. Il est plus disert - mais il faut le reconnaître, assez confus - sur les rites qui rendent hommage à lolaos. Que nous apprend son récit ? 1. Un téménos et des sacrifices annuels ont donc été institués par Héraclès en faveur de lolaos (N, 24, 4).
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2. La cérémonie essentielle consiste dans l'offrande de la chevelure... une chevelure que, dès leur. naissance. les habitants (tous les habitants. précise Diodore) vouent à Iolaos et ne coupent qu'au moment où ils pourront. par de magnifiques sacrifices (probablement fort dispendieux) "se rendre le dieu favorable" (N. 24, 4). 3. Ces rites et sacrifices sont accomplis devant une porte de la cité nommée "héracléenne" et en présence "du dieu" qu'on semble autorisé. en conséquence. à identifier avec Héraclès (IV, 24. 6). (107). 4. Les fêtes annuelles, enfin, comprennent des concours gymniques et des courses de chevaux. des danses et des festins (IV, 24, 6). Diodore rapporte encore deux particularités pleines d'intéret : 5. S'il arrive que des enfants (paides ) ne consacrent pas les "offrandes accoutumées", ils perdent la parole et deviennent "semblables à des morts". Qu'ils fassent le voeu de sacrifier, qu'ils donnent (ou qu'on donne pour eux) un gage de cette obligation et ils recouvrent la santé (IV, 24, 5). (l08).
6. Lors de ces fêtes que tous (hommes libres et esclaves : tÀE:u9tpCa>v TE: xal 60uÀWv) célèbrent dans l'enthousiasme. les maîtres demandent à leurs serviteurs (ici c'est le terme oixtTal qu'utilise Diodore) - qui honorent aussi le dieu "en privé" - de "se réunir en thiases" (retenons le terme) "pour fêter ensemble le dieu par des banquets et des sacrifices" (109). L. Gernet, dans un article de l'Année Sociologique de 1949 avait déjà interprété "cette relation volontairement confuse" de Diodore "comme le témoignage d'un culte secret centré autour d'une initiation qui est une renaissance et qui s'accompagne obligatoirement d'un riche sacrifice offert par les initiés ou pour eux" (110). Mais s'il s'intéressait surtout à la traduction "en termes de droit" que donne Diodore "d'une situation toute autre que juridique", c'est l'aspect initiatique qui nous retiendra ici: un culte célébré aux portes de la cité, un culte comportant des agônes. supposant l'offrande de la chevelure (même si celle-ci
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n'apparaît plus, chez Diodore, comme liée à l'âge, mais bien plutôt à la capacité de fournir le sacrifice accompagnant la consécration), c'en est assez pour que nous retrouvions, de la manière la plus limpide qui soit, un rituel initia.tique. Que ce rituel ait comporté aussi une mort fictive des novices, c'est c~ que semble indiquer le curieux récit de Diodore et nous partageons sur ce point la conviction de L. Gernet et de B.Sergent (111). L'initiation est une mort à l'enfance, et, de cette mort, le rituel porte souvent l'empreinte symbolique, ce qui paraît bien être le cas ici. Il apparaît d'ailleurs, non moins clairement, que le rituel n'est plus compris et qu'on lui cherche d'autres explications... Le rituel initiatique d'Agyrion donne donc lieu à un double culte: celui d'un héros et celui d'un dieu et il n'est pas toujours facile de déterminer ce qui revient à l'un et à l'autre; les divergences d'appréciations le prouvent qui, telle la traduction française de Hoefer - d'ailleurs en bien des points fautive sur ce texte - attribue à Iolaos l'ensemble des rites alors que celle de C.H. Oldfather (112), apparemment suivie par B. Sergent, laisse au lecteur le soin d'identifier "le dieu" dont il est si souvent question dans le récit... Cet embarras reflète probablement celui-là même de Diodore et il ne fait qu'accroître le sentiment de l'union très forte d'Héraclès et de Iolaos, destinataires de ces rites: dieu et héros, liés dans la mythologie par des relations homosexuelles. Bel exemple à l'appui de la thèse défendue de façon fort convaincante par B. Sergent: l'homosexualité grecque est à penser dans le cadre de pratiques initiatiques anciennes: "lorsqu'un mythe est ancien ou qu'il y a de bonnes raisons de le penser tel, il connote toujours une initiation... Ce n'est qu'à la fin de l'époque classique et surtout aux temps hellénistiques, alors que se multiplient les récits mentionnant la pédérastie, qu'apparaissent des mythes en faisant usage hors du contexte initiatique" (p. 302). Ainsi, "bien loin d'être un "accident" sociologique ou psychologique limité dans le temps et l'espace, la pédérastie hellénique s'enracine dans le plus haut passé grec concevable, elle n'est pas une innovation monstrueuse, mais la simple généralisation d'une pratique institutionnelle commune à la fois aux Grecs et aux autres peuples indo-européens" (p. 306). Nous nous arrêterons là, dans l'exposé d'une thèse qui, peut-être, tend à systématiser l'idée d'un héritage indo-européen, dans la ligne de ceux qui pensent la pédérastie comme un "rite" indo-européen, fut-il énigmatique (lB)! Reste que le lien ainsi établi entre homosexualité masculine et initiation est on ne peut plus pertinent... Quant au rôle des Indo-Européens, il se pourrait que l'exemple d'Héraclès
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aide, précisément, à l'apprécier. Rien n'interdit de penser que l'indice d'un rapport homosexuel entre Héraclès et lolaos, bien qu'évoqué assez tardivement par Plutarque, soit ancien; il paraît clair, en outre, que le centre du culte de lolaos est par excellence Thèbes, mais peut-on dire, comme le fait Bernard Sergent, que l'origine des cultes d'Agyrion est thébaine ?... que ce culte "est spécifiquement béotien, en tout cas étranger aux Doriens péloponnésiens" ? (p. 180). Cela peut sembler pour le moins abusif. Si nous tentons de rassembler, en effet, les indications données par Pausanias, il nous paraît que le lien qui se dessine fortement entre Héraclès, les pratiques initiatiques - et dans certains cas (mais pas obligatoirement, il est vrai) - les pratiques homosexuelles est loin de se limiter à Thèbes... Peut-être n'est-il pas très ancien à Athènes (et encore ?) ; dans le Péloponnèse, en tout cas, nous le trouvons affIrmé à Sparte à plusieurs reprises, et, sous plusieurs formes, en Elide comme un élément capital (sans la référence homosexuelle) ; en plein coeur du pays enfIn. Cette étude, cependant, resterait incomplète, si nous ne disions quelques mots des rapports qui, chez Pausanias toujours, sont attestés entre Héraclès et Artémis, la divinité courotrophe par excellence, protectrice des jeunes gens, comme des jeunes fIlles d'ailleurs, aux moments délicats de leur existence, lors de ces "passages" qui, précisément, nous préoccupent ici. A Athènes, nous avons mentionné, déjà, l'association des deux divinités au troisième jour de la fête des Apatouries, lors du sacriflce du coureion: : offrande de cheveux à Artémis, libation à Héraclès (114). A Sparte, la statue d'Héraclès où sacrifIaient les sphaireis sur le point d'être intégrés à la communauté des adultes était certes voisine du dromos (115), elle était proche également, dans l'itinéraire de Pausanias, des temples d'Apollon Cameios et d'Artémis Hégémaque, "celle qui conduit au combat" (116)... C'est également près d'un sanctuaire à Artémis et, plus généralement, d'un lieu "qui tout entier lui était consacré" que le Périégète a vu une autre statue du héros et le trophée érigé pour célébrer sa victoire sur Hippocoon et ses fIls ( 117). Dans le Péloponnèse toujours, à Stymphale, une Artémis surnommée "Stymphalie" et encore représentée en son temple par une statue de bois, paraît, quant à elle, très liée aux premiers "travaux" du héros: les fameux oiseaux que, selon Pisandre de Camiros, il avait chassés grâce au bruit des cymbales, ornaient la voûte de l'édifIce, et, détail plus curieux, derrière le temple fIguraient des jeunes filles sculptées dans le marbre" avec des cuisses et des jambes d'oiseaux". Or Stymphale conservait, par
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ailleurs, quelque souvenir de ce qu'on pourrait appeler les "âges" de la femme: Héra, en effet, s'y était vu consacrer trois sanctuaires: le premier dédié à Héra enfant, le second à l'épouse de Zeus, le troisième à Héra "veuve" après qu'elle eût quitté son royal époux et se fut retirée en ce lieu (118). A Thèbes, centre plus célèbre encore de la légende héracléenne, c'est dans le temple d'Artémis Eucléia que deux jeunes vierges, qui avaient accepté de s'immoler pour la réussite de la guerre conduite par Héraclès contre Erginos et les Orchoméniens, avaient leur tombeau et continuaient d'être l'objet d'un culte héroïque; c'est d'ailleurs devant ce même temple qu'un lion de marbre avait été, après sa victoire, consacré par le fils d'Alcmène et d'Amphitryon (119). Ces deux exempl~s pourraient conduire à s'interroger sur le rôle possible d'Héraclès dans l'initiation des jeunes filles (120). Nous ne nous engagerons pas dans cette voie, qui, en tout état de cause, ne ferait que confirmer l'importance d'Héraclès comme protecteur de la jeunesse, et nous nous contenterons de lire, dans cette association, un simple indice des fonctions parallèles de ces deux maîtres des "passages". D'autres exemples, moins probants peut-être, des rapports de la déesse et de celui que les Grecs connurent à la fois comme un dieu et comme un héros, peuvent encore être glanés au fil de la lecture de Pausanias: c'est ainsi qu'en Arcadie, à Phénée, Héraclès passait pour avoir fait construire un temple, ruiné à l'époque romaine, mais sur l'autel duquel on sacrifiait toujours à Apollon et à Artémis (121)... A Trézène, c'était dans un temple consacré à Artémis, toujours, que des autels voués aux dieux infernaux dissimulaient l'ouverture par laquelle Héraclès avait ramené sur terre Cerbère, le chien des Enfers (122)... A Mégalopolis, dans le temple de la Despoina - la "Maîtresse" -, parmi les statues se dressant devant le temple ou sous le portique qui le jouxtait, figuraient à la fois une statue d'Artémis "conductrice" et un Héraclès disputant le trépied à Apollon (123)... Plus révélatrice, enfin, paraissent bien être les statues qui, à Sicyone, associaient, sculptées dans le même bloc de marbre, Artémis et Héraclès "avec cette forme carrée" qu'ont généralement les hermès (124). A ces témoignages recueillis dans la Périégèse de Pausanias, nous n'ajouterons qu'une confmnation archéologique, celle que nous offre le sanctuaire d'Artémis, à Thasos... Thasos, un des points nodaux du culte d'Héraclès, Thasos, où, on s'en souviendra, la cité conserve la pratique de donner aux "pupilles de la nation" l'armement de l'hoplite qu'ils vont devenir, et ce
377 lors des Héracléia (125). Dans le sanctuaire attesté dès la fondation de la colonie, c'est-à-dire dès les débuts du VIIème siècle, les offrandes représentent, certes, la déesse en Potnia ailée, puis selon le type de la "dame au polos", peut-être aussi en courotrophe, mais, parmi les autres figures divines "invitées" à partager ainsi les honneurs rendus à Artémis, Héraclès, s'en étonnera-t-on, a une importance toute particulière (126). Dès l'archaïsme se trouve ainsi attestée l'association du héros (ou du dieu ?) avec l'héritière de la grande "dame" primitive que des inscriptions appellent ici, comme dans la métropole Paros, et bien souvent en Grèce, du nom d'EiA&19u{11 ou de celui, moins répandu, de JUa)~ •••• Protectrice des femmes en couches, Artémis l'est aussi de la jeunesse, puisqu'il semble bien que ce soit cette "notion de jeune" sur laquelle insiste le terme de ni;)A~, poulain, dont elle tire son nom (127). Et pourquoi ne pas citer Platon, à l'appui de cette proposition de Nicole Weill? Ne qualifie-t-il pas de poulains, précisément, les jeunes guerriers qu'il se préoccupe de former? " Comme on mène les poulains dans le vent et le vacarme pour voir s'ils sont peureux, ne faut-il pas transporter nos guerriers, quand il sont jeunes, au milieu d'objets effrayants, puis les relancer dans les plaisirs et les éprouver avec plus de soins qu'on n'éprouve l'or par le feu" (128)... Avant de clore ce chapitre, une dernière remarque: l'argument a silentio est toujours difficile à utiliser, mais, contrairement à toute attente (ou très logiquement au contraire), on ne trouve en Argolide, berceau de la légende héracléenne, aucun exemple d'intervention du héros/ou du dieu, dans cette sphère ainsi définie des pratiques initiatiques. Il faut bien croire qu'à Argos. Héraclès est autre. trop fortement lié à Héra peut-être et avec un ensemble de "qualités" si précises qu'il n'est pas devenu, comme ailleurs - et même dans le Péloponnèse répétons-le - le maître. l'éducateur. le modèle. (129). Le mythe peut-être nous éclairera, mais il nous est apparu qu'avant d'en reprendre une lecture "orientée", il était nécessaire de bien comprendre le sens de l'initiation. c'est-à-dire de la retrouver, là où elle reste vivante. où elle conserve sa vertu d'intégration sociale. D'autres l'ont fait. parmi les plus grands. qui pourraient rendre vaine notre tentative... ce serait. à le croire. ignorer les progrès de la science ethnographique elle-même. progrès qui autorisent ce retour à des temps qui. pour les Grecs déjà. étaient considérés comme mythiques.
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DEUXIEME CHAPITRE: ... INITIATIONS "... Eh bien! moi, je m'en vais expliquer le scénario aux petits d'hommes, aux hommes en herbe, aux hommes faits, aux hommes parfaits et surtout aux hommes plus que parfaits..." La Paix, 50-33.
Plaisanterie, certes, que cette adresse du second serviteur de la Paix aux spectateurs athéniens, mais, si Aristophane espérait ainsi les faire rire, c'est qu'il partageait avec eux ce schéma mental qui n'est autre que celui des classes d'âge... Nous n'allons pas tenter ici de retrouver, après H. Jeanmaire, A. Brelich et bien d'autres, ce qui survit en Grèce des anciennes pratiques initiatiques, (130), mais bien plutôt chercher à comprendre, là où elles sont encore vécues comme telles, des raisons d'être qui pourraient éclairer notre recherche appliquée à Héraclès. Les rites initiatiques, lorsqu'ils sont encore en usage, représentent généralement, pour les populations qui les pratiquent, le cérémonial le plus élaboré, le plus apte peut-être aussi à souder entre eux les membres du groupe. Poursuivre "la modification radicale du statut religieux et social du sujet à initier", tel est leur but, selon Mircea Eliade (131), et l'adolescent initié, donc intégré, devient en effet membre de plein droit de la communauté politique, sociale, culturelle et religieuse que forme la société tribale. De ces rituels collectifs par lesquels s'effectue le passage de l'enfance ou de l'adolescence à l'âge adulte (132) Mircea Eliade distingue deux formes d'initiations individuelles: celles qui permettent d'entrer dans une société secrète (telles, en Afrique, les sociétés de chasse, ou sociétés de danse...) ou bien encore qui destinent certains individus à une expérience religieuse plus intense: celles du sorcier ou du chaman par exemple. On a depuis longtemps remarqué dans les rites d'initiation,
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partout où ils apparaissent, "des similitudes frappantes" (133) ou mieux "une sorte de solidarité structurale qui fait que, vues dans une certaine perspective, toutes les initiations se ressemblent" (134). Ainsi se dessine un scénario initiatique dont nous rappellerons brièvement les étapes, telles que A. van Gennep, dès le début du siècle, les avaient définies, telles que Mircea Eliade, à partir des observations plus nombreuses des anthropologues, put les décrire, telles qu'enfin les reprit Angelo Brelich, pour les appliquer, à titre d'essai, au monde grec (135). Nous consacrerons plus de temps, en revanche, à l'étude de ce qui, tant dans les situations initiatiques que dans les fonctions de l'institution, permet d'expliquer ces rites auxquels - nous l'avons vu dans une première partie - Héraclès se trouve fortement lié; de ce qui peut, aussi, nous aider dans la compréhension des mythes qui se sont cristallisés sur son "personnage" héroïque.
2-1 : Le scénario initiatique Au coeur de ce parcours initiatique, un moment très spécifique et une condition tout à fait spéciale: celle dans laquelle se trouvent, pour un temps plus ou moins long, les candidats à l'initiation: leur isolement, leur "situation de marge". "ll(s) flotte(nt) entre deux mondes" (136) ... Cette expression que A. van Gennep applique à ceux qui passent les frontières me paraît convenir aussi bien à l'adolescent qu'on vient d'enlever au monde de l'enfance pour qu'il gagne, bientôt, celui des adultes. C'est en effet autour et en fonction de cette mise entre parenthèses que s'organisent les rites: - rites de séparation par lesquels on arrache l'adolescent à son état ancien, à son milieu antérieur: celui des femmes et des enfants; - retraite initiatique (de quelques semaines à quelques mois) pendant laquelle son statut est comme "suspendu" ; - rites d'agrégation, enfin, lorsque l'initié qui a satisfait aux "épreuves" convenues est ramené au sein de la communauté où il occupera désormais sa place de membre à part entière dans le groupe des adultes. L'enfant est donc mort à l'enfance et c'est cette rupture décisive et irréversible que consacre l'initiation... Cette mort initiatique paraît assez généralement conçue comme une mort véritable. Les Sara étudiés par R. Jaulin disent aux novices:
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"Pendant l'initiation vous verrez la mort" (137) et la formule rapportée par D. Zahan n'est pas moins nette, qui fait dire au maître du rituel: "maître du Koré, je tue les enfants du Koré..." (138). Certaines tribus australiennes, d'ailleurs, miment directement la mort : chez les Wiradjuri, l'initié, dissimulé sous des couvertures ou des branchages, est traité comme un cadavre, brutalement saisi et emporté dans l'enclos sacré où les novices font retraite; parfois même le meurtre est simulé; assez souvent les femmes prennent le deuil. Il peut arriver que cette mort initiatique prenne la forme d'un voyage dans l'au-delà: ascension vers les régions célestes (les enfants qu'on jette en l'air) ou descente aux Enfers (lutte contre les monstre·s etc...) mais il est rare que les initiations tribales, collectives, "symbolisent" de cette façon le passage de l'initié par l'autre monde. En revanche, il est assez fréquent qu'on fasse renaître l'initié et cette seconde naissance imite parfois d'assez près la première, la naissance biologique: au Tchad, l'enclos sacré des Sara, à la forme ovoïde, symbolise le ventre maternel; chez les Kikuyu du Kenya, c'est un véritable accouchement qui est mimé: la mère geint, l'enfant vagit comme un nouveau né et on coupe le boyau de mouton qui le reliait à sa mère (notons qu'il s'agit là du premier degré de l'initiation) (139). Le parcours senoufo est particulièrement intéressant, qui fait renaître l'initié du ventre de Kahatiéléo, "la vieille mère du village" (avec Koulo Tyolo, "la vieille femme de l'univers", l'un des principes divins essentiels en pays sénoufo)... Cette "mère du village" l'exprime avec force: c'est d'une naissance particulière qu'il s'agit, non plus biologique, mais sociale: c'est à la communauté et non plus à la famille qu'est désormais intégré l'initié (140). Cette mort initiatique que l'on trouve, plus ou moins atténuée, plus ou moins déguisée au coeur des rites ne peut pas ne pas évoquer tous ces tombeaux d'adolescents qui jalonnent le parcours cultuel d'Héraclès... Héraclès qui lui-même mourut un jour, et ce faisant, se dépouilla de sa condition trop humaine pour accéder au nouveau statut d'immortel.
2-2: Signification et fonctions de l'initiation Rites de passage donc, car c'est bien ainsi qu'ils sont - me semble-t-il - les mieux nommés... rites conférant à l'initié des qualités nouvelles qui se marquent très souvent au
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sortir de l'initiation, par un nouveau nom (chez les Senoufo par exemple, mais encore dans bien d'autres tribus) (141), par un vêtement nouveau, ou une tenue beaucoup plus complète (souvent la panoplie du guerrier), voire par un ensemble de cadeaux signifiants et je ne reviendrai pas ici sur les do~s de l'amant crétois au parastatès. qu'il a enlevé et ramène en grande pompe dans la cité (142). Mais cette fonction de séparation / intégration qu'assument les rites, à quel niveau, sur quels plans et comment l'assument-t-ils ? A la lumière des observations laissées par les anthropologues, qui étudient ces rites "en action" en Afrique, en Amérique ou en Australie, mais en tenant compte aussi des explications proposées par les psychanalystes pour qui, bien sûr, compte surtout la problématique individuelle, celle qu'implique pour l'initié son àccession au nouveau statut d'adulte, il m'était apparu (143) qu'on pouvait lire l'initiation comme agissant sur le triple plan - de la reproduction d'une culture - de la reproduction d'une société - ces deux éléments passant par la transformation de l'individu tout entier.
Reproduction d'une culture ? C'est l'aspect pédagogique de l'initiation, si souvent souligné : aspect essentiel pour B. Malinowski qui insiste sur "l'enseignement systématique" qui est fait "du mythe sacré et de la tradition au jeune homme auquel sont dévoilés peu à peu les mystères de la tribu et présentés les objets sacrés" (144) ; aspect important déjà pour A. van Gennep et qui le reste pour des "modernes" comme D. Zahan et P. Clastres: pour le premier l'initiation "constitue avant tout un enseignement progressif'... (145) et le second voit dans les jeunes initiés les dépositaires de la "mémoire" et du "savoir" de la tribu (146). Cet aspect pédagogique c'est aussi, on le sent bien, l'aspect unificateur, normalisateur de l'initiation: sOltant du bois ou de l'enclos sacrés les initiés se ressemblent et ressemblent aux adultes de leur clan. C'est pourquoi, à cet aspect pédagogique, je joindrais volontiers l'aspect "marquage", "machine imprimante" des rites de passage: ces souffrances, ces blessures, ces mutilations infligées (de la circoncision ou la subincision à la dent arrachée et aux scarifications les plus bénignes) inscrivent, elles aussi, l'initié comme membre de la tribu et le veulent pour toujours identique à ses aînés. "Le corps", écrit J. Jamin, "est
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utilisé comme un parchemin où viennent s'inscrire les codes et valeurs culturelles, par une série d'épreuves, de tortures, de marques..." (147). La reproduction d'une culture, considérée comme le bien propre de la tribu toute entière, telle est bien, en effet, l'une des fonctions de l'initiation, mais peut-être n'est-elle pas essentielle, peut-être ne donne-t-elle pas la signification profonde du rituel: on profiterait des rites pour... C'est ainsi que les observations de certains anthropologues: celles de L. Perrois au Gabon (148), de J. Jamin chez les Sénoufo de Côte-d'Ivoire par exemple, les conduisent à "banaliser" l'expérience pédagogique de l'initiation: confrrmations de secrets déjà connus, révélations bien futiles, l'initiation serait plutôt pour J. Jamin "la mise en scène sociale" du passage de l'enfant ignorant à celui de l'homme qui a accès à la connaissance, bref, elle serait plus "un dispositif de reconnaissance que de connaissance" (149). Ces mêmes anthropologues sont, en revanche, conduits à donner plus d'importance à la fonction de reproduction sociale de l'initiation, fonction qui apparaît d'autant mieux qu'on étudie, désormais, ces rites de passage non plus seulement pour eux-mêmes, mais comme partie intégrante des processus sociaux, économiques et politiques qu'ils contribuent à conserver. Nous n'insisterons pas, ici, sur cet aspect du problème, mais il est bien certain que l'exemple du "poro " Sénoufo, étudié par J. Jamin, fait fortement apparaître la dimension socio-économique de l'institution, que la fonction de conservation sociale apparaît mieux encore si l'on tient compte des "degrés" possibles de l'initiation: c'est ce que mettent en relief aussi bien L. Krader, pour le "poro" des Kpelle du Libéria et de Guinée (150), que D. Paulme (151), et l'on peut légitimement se demander, avec J. Jamin, si Je savoir initiatique se distribue de façon homogène, s'il est facteur d'égalisation ou s'il reproduit (peut-être même aggrave) la distance entre les groupes, si parlant du biologique pour dire le social (les adultes pour dire les aînés) il ne tend pas à faire croire "que l'ordre social est un ordre naturel" (152). Masquant ainsi, sous le sceau du secret et du silence, des rapports de force et de pouvoir, l'initiation contribuerait alors fortement à les rendre moins contestables, parce que moins apparents. Dans cette optique il est bien certain qu'on comprend mieux la récupération ou la réactivation de tels rites, en Grèce, par des sociétés militaires.
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2-3 : Un changement de statut Mais c'est, pour notre objet, le troisième aspect de l'initiation qui nous retiendra surtout: le changement de statut d'un individu, son passage de l'enfant ou de l'adolescent qu'il était à l'adulte qu'il va devenir... passage qui implique un bouleversement social : le transfert dans le groupe des hommes d'enfants mâles qui, jusque là, vivaient dans la communauté des femmes; passage perçu encore comme faisant agir des forces surnaturelles et, par là-même, comme menaçant, dans une certaine mesure, les rapports qu'entretient le groupe avec le sacré.
. L'arrachement du garçon à son entourage maternel et féminin d'abord: certains anthropologues - R. Jaulin, par exemple, dans ses travaux sur les Sara du Tchad insistent beaucoup sur cet aspect de l'initiation... un aspect qui, pour S. Moscovici paraît même expliquer toute l'institution. C'est en effet chez l'auteur de la Société contre nature qu'on en trouve l'exposé le plus systématique. Pour lui, "initier un garçon revient à définir son sexe" ou encore "l'initiation change les pères en mères sociales" (153). Le rituel tendrait donc à éprouver l'antagonisme hommes/femmes, à extirper de l'enfant qu'il a été la part du féminin qu'enferme encore le futur initié; les épreuves physiques, les mortifications, leur dureté, leur cruauté parfois, s'expliqueraient ainsi (et il nous est quelque peu pénible de suivre l'auteur sur ce terrain !) : l'enfant doit faire preuve de son endurance, c'est-à-dire de sa virilité. Ainsi s'expliquerait encore la mise à l'écart à peu près générale des femmes pendant tout ou une partie des rites de passage. Ainsi s'expliquerait enfin que la période de l'initiation corresponde parfois à une véritable "guerre des sexes" : batailles fictives entre hommes ct femmes chez les Indiens Yagham du Chili; relations sexuelles interdites entre les parents chez les Wiko de l'Angola ... Certains peuples d'ailleurs marquent très fortement la rupture: chez les Wiko toujours, l'initié quitte la hutte de sa mère et une série de tabous très précis définissent désormais leurs rapports (154), chez les Wiradjuri d'Australie, lorsque les jeunes gens reviennent au village, leurs mères les chassent comme des étrangers. La séparation est plus ou moins marquée, elle existe toujours, elle est dans la nature même de l'institution. Elle en est, certes, un aspect fondamental; on le reconnaît
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d'autant plus facilement qu'on est plus influencé - c'est, semble-t-il, le cas de S. Moscovici - par les théories psychanalytiques. Pour les disciples de Freud, en effet, l'initiation, c'est le "contre Oedipe" et son but profond est "de renforcer la prohibition de l'inceste et d'obtenir la soumission des jeunes mâles aux anciens" (on retrouve ici l'aspect voilé des rapports de pouvoir que contribuerait fortement à maintenir la ritualisation "du passage"). Mais faut-il considérer, dans cette optique, la circoncision - l'une des blessures rituelles les plus pratiquées - comme "un substitut symbolique de la castration" ? (155). L'ennui, c'est que la circoncision est loin d'être partout et toujours le corollaire obligé de l'initiation et qu'on la pratique à des âges très variables, parfois très près de la naissance. Peut-être doit-on tenir compte des théories, plus floues certes (mais plus optimistes !), qui, comme celle de Bruno Bettelheim, reconnaissent dans les rites initiatiques une volonté, non pas de créer une angoisse sexuelle, mais de la contrôler, un désir de maîtriser l'énigme de notre sexualité duelle (non plus seulement l'envie féminine du pénis, mais, de la part des deux sexes, la nostalgie de n'être pas androgyne !) (156). Et c'est le sentiment de cette dualité - sentiment difficile à nier - que j'aimerais retenir des théories psychanalytiques dans la mesure où il me paraît expliquer de façon convaincante certains aspects de l'initiation... Lorsque Jung estime que l'inconscient a toujours "la teinte" de l'autre sexe, lorsqu'il constate dans celui de l'homme la présence d'une figure féminine complémentaire (qui joue un grand rôle dans sa vie onirique... et l'on sait à quel point le mythe et le rêve se ressemblent), lorsqu'à cette anima il oppose l'animus, figure correspondante dans l'inconscient de la femme, il reconnaît aussi l'importance pour l'homme d'intégrer ces contraires, s'il veut assumer la totalité de son psychisme. Ne serait-ce pas précisément une des raisons profondes de l'initiation? N'expliquerait-elle pas qu'en ce moment décisif où l'enfant va "choisir", ou en tout cas assumer le rôle sexuel que lui prescrit la société, la période du passage apparaisse comme particulièrement incertaine et même comme accentuant de façon temporaire (on retrouve d'autres exemples de cette inversion) à la fois la "coloration" féminine de l'individu mâle, et la nécessité d'extirper définitivement ce qui ne pourrait que pervertir la nature de l'adulte qu'il sera... ainsi prendraient tout leur sens les déguisements féminins qui, si fréquemment, apparaissent, tant dans la mythologie que dans les rites grecs: le jeune novice, proche des femmes avant l'initiation, joue, dans certains cas et dans une certaine mesure, le rôle des femmes dans l'initiation:
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c'est particulièrement net chez les Iatmul dont les rites sont décrits par G. Bateson (157) et c'est encore dans ce cadre que s'inscrivent les rites de circoncision (et parfois de subincision) des Nambuti d'Australie: l'opération est pratiquée par le futur beau-père de l'initié assisté de quelques-uns de ses o.ncles maternels. La cérémonie dont le nom signifie "adoption" lie fortement le novice et le circonciseur qui ont entre eux des rapports homosexuels (le jeune homme bien sûr joue le rôle de la femme). Après l'initiation, ce dernier accède au plein statut d'adulte et reçoit pour épouse la fille du circonciseur (158). Comme chez les Grecs, se dévoile ici le caractère particulier de l'homosexualité masculine, qui, loin d'apparaître comme une déviance par rapport à une hétérosexualité seule considérée comme "normale", se donne comme fortement complémentaire de cette dernière. Les pratiques pédérastiques semblent bien Bernard Sergent- me paraît avoir, sur ce point, fortement raison - trouver leurs racines dans les rites de passage qui consacrent cet accès à la maturité physique de l'adolescent qu'est aussi l'initiation: Iolaos, disciple d'Héraclès, son parastatès et son écuyer, est, certes, son éromène, mais il reçoit encore de lui sa première femme Mégara (159). Ces pratiques pédérastiques semblent encore avoir absorbé, en Grèce, l'aspect pédagogique de l'initiation, qu'il s'agisse de l'apprentissage du métier militaire (c'est dans ce cadre que s'inscrivent les relations de l'éraste et de l'éromène spartiate ou crétois et le "bataillon sacré" de Thèbes en fournirait l'exemple ultime) (160) ; qu'il s'agisse, plus généralement, de ces rapports de maître à disciple qui marquent si profondément la recherche de l'Eros dans les textes de Platon: c'est "le désir... qui aspire au meilleur" qu'il s'agit de développer (161), celui qui doit "guider toute la vie des hommes, de ceux à qui il appartiendra d'avoir une belle vie tout du moins" (162)... Le souvenir des temps anciens se fait même plus proche, lorsque, dans le Banquet, Pausanias n'autorise l'amour des garçons "qu'après que ceux-ci ont déjà commencé à faire preuve d'intelligence, c'est-à-dire au moment où la barbe leur pousse au menton" (163), et ce sont les termes mêmes dlllinitiation" et de "mystère" que Diotime utilise pour dire l'expérience amoureuse (164). . Nous sommes ainsi conviés à retrouver l'un des aspects de l'initiation sur lequel passent rapid(:ment bien des ethnologues: ce contact avec le monde sacré qu'impliquent les rites de passage.
387 C'est à A. van Gennep qu'il faut revenir pour en avoir une nette perception. lorsque. par exemple. il dédouble ainsi le scénario initiatique (165) : rites de séparation du milieu commun
1rites d'agrégation au milieu sacré 2 - marge rites de séparation du milieu sacré local
3rites de réintégration dans le milieu commun. C'est ce passage à travers le monde sacré qui à la fois explique et légitime la condition marginale de l'initié. Toute transition. tout passage d'un état à un autre est "indéfinissable" et par là même dangereux. M. Douglas le montre bien dans ses études sur la marginalité. qui voit dans ce danger non seulement celui qui menace l'individu passant ainsi d'un état à un autre.mais aussi celui qui émane de sa propre personne et contre lequel la société cherche à se prémunir en l'exorcisant par une série de rites et en isolant le novice (166). Ainsi se comprennent mieux tous les tabous qui séparent l'initié de la société. du monde profane; ainsi s'explique mieux aussi que. dans une certaine mesure. la société soit sans défense contre les entreprises des novices: "ils sont autorisés et même encouragés à tendre des guet-apens. à voler. à violer". écrit M. Douglas. Se comporter de façon anti-sociale est précisément l'expression de leur condition marginale (167). Le fait a été observé pour de nombreuses tribus (168). n se retrouve. probablement. atténué (et surtout marqué du caractère militaire que conserveront les restes évanescents de telles pratiques en Grèce) dans le rôle de l'Apatè - si contraire aux normes du combat hoplitique - dans ce mythe étiologique des Apatouries athéniennes (169)... n est mieux conservé encore. à Sparte. dans la vie dissimulée et les entreprises meurtrières du crypte (170). Or Héraclès. le marginal. est. lui aussi. un être d.mgereux : il tue. et pas toujours pour la bonne cause. pas toujours selon le code de l'honneur guerrier ... Il tue même ses enfants ... une obligation qui - osera-t-on le rapprochement? - est faite aux nouveaux initiés d'une société guerrière de Polynésie (171) ! Le double scénario. tel que le définit A. van Gennep. évoque encore. me semble-t-il. celui du sacrifice sanglant par lequel l'homme. pour entrer en communication avec le divin.
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interpose une victime animale entre lui et ce pouvoir, certes bénéfique, mais d'une telle efficacité que les forces que l'on cherche à s'approprier risquent de se déchaîner et de tout submerger... Dans une certaine mesure, l'initié ne jouerait-il pas, dans ce scénario, le rôle de la victime? et la "blessure symbolique" que lui confère l'initiation ne serait-elle pas la marque douloureuse de ce passage par le sacré? Lorsque les jeunes Libériens, par exemple, reviennent, initiés, dans la communauté des adultes, ils sont censés avoir été avalés, le temps de leur retraite, par "l'esprit crocodile" et les sacrifications qui les font désormais ressembler aux membres adultes de la tribu portent le nom de "dents de l'esprit"... On ne saurait, je crois, donner trop d'importance à ce passage par le sacré - et à la dimension symbolique qu'il confère à l'initiation - : l'historien peut le prouver, qui en retrouve la trace, alors même que sont oubliées et les raisons d'être et, bien souvent, la cohérence des rites primitifs. C'est lui probablement qui ouvre la possibilité d'aller plus loin, de connaître une expérience religieuse plus intense... Que sont donc les "initiations" au sens où l'entendaient les Grecs, que sont les mystères, sinon des rites, qui, faisant passer le néophyte du monde profane au monde sacré, le mettront désormais en communication directe et définitive avec ce dernier? C'est encore ce contact avec le sacré - souvent représenté comme la mort fictive de l'initié - qui, par le mystère même qu'il suppose et les développements insoupçonnés qu'il offre à l'imagination, allait permettre aux facultés mythopoiétiques d'un peuple d'investir sur ce thème leurs craintes et leurs désirs... et le mythe d'Héraclès, que nous allons maintenant interroger, en est, je crois, un exemple significatif.
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TROISIEME CHAPITRE: ... MYTHES "Et ce fut Hébé, fille du grand Zeus et d'Héra aux brodequins d'or, que le vaillant fils d'Alcmène aux fines chevilles, le puissant Héraclès, ayant achevé ses gémissants travaux, se donna pour chaste épouse dans l'Olympe neigeux. Héros bienheureux qui, sa grande tdche accomplie, habite chez les Immortels, soustrait au malheur et à la vieillesse pour les siècles à venir". Hésiode, Théogonie, 950-955
Dans ces "gémissants travaux" qui opposèrent Héraclès à tant de créatures monstrueuses allons-nous, suivant la pente de notre raisonnement, reconnaître des épreuves initiatiques? ou bien serons-nous, très légitimement, saisie par le doute et tentée d'opposer, plus volontiers que de rapprocher, ces exploits généralement solitaires - et des pratiques dont nous venons de voir qu'elles furent si fortement socialisées. Un exemple prouvera que ce n'est pas un problème de pure rhétorique: l'exploit cynégétique est partie intégrante de nombre de scénarios initiatiques; or Héraclès est un chasseur: il tue le lion de Némée, force la biche aux cornes d'or, capture le sanglier d'Erymanthe, etc... Ce dernier épisode vaut qu'on s'y arrête un instant. Il est, en effet, dans la mythologie, d'autres chasses au sanglier, la "grande aventure de Calydon" par exemple; il est, dans la cité, d'autres chasses encore, qui se partagent avec les précédentes la faveur des peintres de vases: ce sont les chasses montées mettant en scène, non plus un héros seul, non plus même Méléagre entouré de ses compagnons, mais des éphèbes anonymes et A. Schnapp a pu, naguère, opposer dans un "mouvement double et contradictoire... la scène de genre au mythe et le mythe à la scène de genre" et lire dans cette évolution de l'un à l'autre "l'expression en image des tensions qui traversent la cité" (172).
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Héraclès et les éphèbes chasseurs? Lorsqu'on les rapproche, c'est, semble-t-il, pour mieux les opposer. C'est ce problème que nous affronterons dans un premier temps, avant d'étudier à la fois de façon plus singulière (la lutte contre le tricéphale) et plus générale (la série des "travaux") cette "grande tâche" dont parle Hésiode et qui devait permettre au héros d'accéder à un nouveau statut: celui d'Immortel.
3-1 Héraclès qui, dans ses cultes, paraît lié de si près aux éphèbes et probablement, nous l'avons vu, aux vestiges d'antiques initiations, en est-il le héros paradigmatique? Autrement dit, passait-il pour avoir lui-même subi ces épreuves qui allaient faire de lui "l'initié" par excellence, l'exemple à suivre? Il nous paraît nécessaire de préciser, dès l'abord, que nous n'imaginons pas une minute que le mythe d'Héraclès chasseur ait pu naître de rites initiatiques. Le héros tueur de lions, protecteur des troupeaux, serviteur d'Héra s'individualise si fortement et paraît si vraisemblablement premier (173) que c'est plutôt à l'une de ces ré-interprétations si fréquentes dans l'histoire religieuse, à l'un de ces "bricolages" qui expliquent si souvent la polysémie des mythes que nous avons affaire ici. On a manifestement chargé de sens une figure, une image mythique préexistante, la transformant du même coup et la laissant resémantisée : car c'est bien comme un chasseur qu'apparaît dans la mythologie ordonnée d'un Diodore ou d'un Apollodore l'ancien maître des fauves. Du chasseur, en effet, il parcourt le territoire, non pas la chôra, la terre fertile et aménagée par l'homme, mais l'eschatié, cet espace indécis des zones frontalières, ces marges que l'agriculture n'a pas gagnées (on a pu, d'ailleurs, dans la première partie relever le caractère "marginal" de nombre de ses cultes)... Au chasseur, Héraclès emprunte encore une pratique que les Grecs volontiers opposaient à la conduite loyale de la guerre (174) : il utilise la ruse, le piège, l'embuscade. S'il capture la biche cérynite, c'est peut-être, dit Diodore, en la rattrappant à la course, peut-être aussi en la capturant pendant son sommeil ou même grâce aux filets... de toute façon, estime-t-il, c'est son astuce (àyxivola) plus que sa force qui permit au héros de réaliser cet exploit, "sans courir aucun danger" (175). Lorsque les peintres de vases n~présentent la biche saisie par les bois (l'une des trois variantes distinguées par F. Brommer pour cette représentation), c'est, semble-t-il, cette
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facilité qu'ils paraissent traduire (176). Passons au sanglier d'Erymanthe. Si Diodore donne peu de précisions et indique seulement qu'Héraclès préféra ne pas l'attraper trop vivement (177), Apollodore est plus explicite: c'est vers la neige épaisse qu'il le dirige jusqu'à ce que l'animal, fatigué, n'offre plus de résistance (178). Quant au combat contre le lion, s'il témoigne surtout de la force exceptionnelle d'Héraclès, c'est, pour Diodore comme pour Apollodore, en bouchant l'issue de la caverne dans laquelle il gîtait que le héros parvint à l'atteindre (179). Ni l'un ni l'autre ne reprennent cependant l'accusation - il est vrai malveillante - qu'au Vème siècle Euripide mettait dans la bouche de Lycos, l'adversaire du héros: "cette bête qu'il a prise au lacet et qu'il prétend avoir fait périr enlacée dans ses bras" (180). Chasseur rusé, Héraclès l'est donc bien, comme il est également le "guerrier nu" (c'est-à-dire à l'armement léger) que P. Vidal-Naquet assimile à l'éphèbe (181). Lorsqu'il doit se servir de ses armes, c'est, sauf exception (182), de la massue (encore celle-ci apparaît-elle plus souvent comme un attribut que comme une arme) et de l'arc qu'il fait usage, parfois même du filet et du lacet: la massue, cette arme d'avant la civilisation qui accentue le lien d'Héraclès avec la nature sauvage... l'arc qui, en Grèce, est, lui aussi, du côté de la sauvagerie (183), l'arc dans lequel on peut encore reconnaître l'arme du chasseur. Dans le Phi/oct~te de Sophocle, c'est l'arc, et très précisément celui d'Héraclès, qui permet au héros blessé et exilé de survivre grâce à la chasse, dans l'île de Lemnos, cette eschatié si justement analysée par P. Vidal-Naquet comme l'envers même du monde de la cité, elle-même représentée, à Troie, par ses citoyens en armes, les hoplites (184). C'est cet arc qui permet à Philoctète d'abattre "oiseau ailé et fauve des montagnes"... Cet arc dont l'absence fera de lui "un malheureux" susceptible d'aller "en mourant, fournir une pâture au gibier qui (le) nourrissait" (185). Or, c'est du trait de ses flèches que, dans la version d'Apollodore, Héraclès abat la biche cérynite (186). Variante, reprise, elle aussi, par l'imagerie athénienne (187). C'est également de son arc qu'il use pour tuer les oiseaux du lac Stymphale, effrayés, il est vrai, par les cymbales d'airain données par Athéna (188). La massue, l'arc et les flèches, les filets (contre la biche cérynite dans l'une des versions rapportées par Diodore), le lacet peut-être... voilà quelles sont - même s'il arrive qu'exceptionnellement les peintres représentent le héros attaquant le lion avec une épée (189) - les armes qui, dans le mythe d'Héraclès affronté aux fauves, viennent seconder la force et la
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rapidité proprement surhumaines du héros. Qu'elles aient fortement contribué à dessiner l'espace et les caractères de l'action d'Héraclès, la tragédie le prouve, qui fait exploiter par Lycos, soucieux de porter atteinte à la réputation d'un rival dangereux, cet aspect du mythe. Privilégiant l'utilisation des lacets et des flèches dans ces "combats contre les bêtes" auxquels il cherche à réduire la geste du héros, il en conclut que ce fameux courage "n'est qu'une apparence de bravoure" (190). Pour lui, et c'est sans doute une opinion très largement partagée à Athènes, "l'épreuve de la bravoure n'est pas le tir à l'arc"... et Héraclès qui "n'a jamais tenu un bouclier à son bras gauche ni affronté une lance", qui, "portant l'arc, l'arme la plus lâche... était toujours prêt à la fuite" (191) est bien dénoncé ici comme l'antithèse du guerrier loyal, comme l'anti-hoplite, le chasseur rusé (rappelons ici que Pierre Vidal-Naquet oppose à la chasse collective des hoplites la chasse rusée des éphèbes) (192), l'homme qui parcourt, en solitaire, "l'espace étranger et hostile de l'agros " (193), l'espace même d'Hermès, qui, nous l'avons vu, partage souvent avec Héraclès la ferveur des jeunes gens (194). Bref, comment ne pas voir dans ce héros "ensauvagé" un modèle potentiel pour dire la condition du candidat à l'initiation lors de "l'épreuve de brousse"? C'est la raison pour laquelle ne m'inquiète guère cette opposition entre l'exploit solitaire et la chasse collective qui serait celle des hommes de la cité. L'initiation des jeunes gens (qu'elle reste fortement présente dans les institutions comme pour les jeunes Spartiates· et tout particulièrement pour ceux qui sont soumis à l'épreuve de la cryptie - ou qu'elle ne transparaisse guère qu'au travers de rites résiduels et de mythes étiologiques, comme à Athènes -) est certes collective (elle est l'affaire de toute une classe d'âge) - mais l'épreuve laisse le novice solitaire... Plus solitaire encore celui qui subit une initiation plus poussée, celle qui, par exemple, habilite au pouvoir. Qui pourrait donc véritablement jurer que le syntagme homme/lion (ou homme/sanglier) ne renvoie qu'à l'exploit d'Héraclès et pas, dans le même temps, à la chasse (195) ? Quelques représentations, en tout cas, permettent d'en douter, qui les associent sur le même vase: c'est, par exemple, le cas de l'amphore du Louvre récemment commentée par C. Bérard (196). Héraclès figure sur le col, armé de sa massue et se porte à la rencontre du lion (l'arc et les flèches, dans le champ de la représentation, complètent l'identification du héros). Sur l'épaule deux épisodes opposent au lion, sur une face, un homme barbu brandissant un bâton (sous le regard de trois autres personnages),
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sur l'autre face, un éphèbe secouru par un compagnon. L'auteur a raison, me semble-t-il, de refuser l'identification à Héraclès des trois protagonistes. Peut-être peut-on aller plus loin et voir dans l'articulation de ces trois scènes un peu plus qu'un modèle de courage offert par l'exemple du héros aux hommes de la cité ? Un dernier problème: Héraclès chasseur est affronté à des animaux: cerfs, sangliers, qui sont ceux-là mêmes de l'expérience cynégétique des Grecs. Il dompte encore - d'une manière que la tradition n'explicite guère"' le taureau furieux de Crète et les cavales de Diomède. Mais même ces animaux qui peuvent sembler appartenir à la réalité des Grecs, sont déjà, en fait, du domaine de l'imaginaire: la biche a des cornes d'or; les cavales (et peut-être les oiseaux du Stymphale) (197) sont anthropophages; quant au lion, non seulement il est "d'une taille monstrueuse", (198), mais il est "invulnérable au fer, à l'airain, aux pierres" (199)... Est-il alors indispensable de se demander si les Grecs ont pu avoir l'expérience de la chasse au lion? Si l'on en croit Pausanias, il semble bien que tel soit le cas, au moins pour Polydamas dont il rapporte l'histoire (200)... histoire confIrmée d'ailleurs par la base glorifiant la victoire du Thessalien à Olympie (201)... mais est-ce véritablement capital - pour le problème qui nous occupe bien sûr - ? Il faut redire ici que, si l'épisode du lion de Némée est, dans toutes les versions du mythe, le premier des travaux d'Héraclès, c'est probablement, nous l'avons vu, parce qu'il traduit dans l'histoire du héros grec une image primordiale. Maître des lions, Héraclès l'est, en effet, comme l'était Bès le dieu égyptien présent à Chypre dès le Bronze récent, Gilgamesh dont la légende présente tant de points commW1S avec celle de son "homologue" grec, comme l'était Nergal, encore, auquel fut aussi assimilé le héros grec (202). Il est donc, pour le paradigme du chasseur qu'est devenu Héraclès, un élément emprunté, hérité, plus qu'une image issue de la réalité quotidienne (203). Il faut aussi remarquer que même le chasseur de la biche, du sanglier et du lion est déjà, par le caractère merveilleux des animaux auxquels il est affronté, un chasseur de monstres, et c'est sans difficulté aucune qu'on passe au combat contre l'hydre aux cent têtes ou contre le triple Géryon... luttes véritablement inégales, victoires impossibles auxquelles peut seul prétendre le héros... Le héros... ou le futur initié dans le monde surnaturel qui, un temps, est le sien. Le caractère symbolique prend décidément le pas sur l'expérience vécue, la représentation sur la figuration du réel. On connaît bien, désormais, la valeur initiatique de la "lutte
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contre le monstre" : triomphe d'Oedipe sur le Sphinx, de Thésée sur le Minotaure ete... Epreuve à laquelle maintes fois fut affronté Héraclès, qu'il s'agisse du monstre marin figuré au fronton de l'ancien temple d'Athéna sur l'Acropole d'Athènes (204), du dragon des Hespérides ou du triple Géryon qui, dans la bru~euse Erythie, gardait les boeufs .qu'Eurysthée demanda un jour à Héraclès de rapporter dans son royaume. Ce dernier exploit est, dans toutes les versions "complètes" des athloi, le dixième des travaux imposés au héros. fi est aussi, nous a-t-il semblé, la séquence la plus riche, la plus chargée d'histoire peut-être... Pour Diodore, en effet, le voyage vers l'île lointaine de Géryon est devenu, nous l'avons vu, une véritable saga, la geste occidentale d'un héros transformé par les Grecs de la colonisation en archégète mythique et en modèle paradigmatique de l'acculturation des Barbares. Géryon, lui aussi, a évolué et avec lui le caractère même de l'exploit: Héraclès n'est plus le héros qui combat seul un monstre tricéphale, il est le chef de guerre qui lève une armée et équipe une flotte puissante pour vaincre les trois fils de Chrysaor ainsi nommé à cause de ses richesses (205), interprétation évhémériste annoncée peut-être par Hécatée de Milet (206) et dont on retiendra - je crois qu'il est intéressant - le caractère militaire. Cette triplicité de Géryon (dont la conception a ainsi varié au cours des siècles), G. Dumézil l'a retrouvée dans d'autres figures des mythologies indo-européennes. "Elle se retrouve, écrit-il, dans les mythes et légendes qui semblent conserver le souvenir d'initiations militaires" (207). Elle y revêt, ajoute-t-il, "des précisions diverses généralement monstrueuses" (208) : c'est, par exemple, le démon tricéphale des légendes indo-iraniennes que tue le dieu védique Indra, patron des guerriers, ou que réduit à l'impuissance le guerrier avestique Thraëtona, démon qui confisque, notons-le, grâce à ses trois bouches toute nourriture et toute offrande au grand dam de la collectivité humaine et de la collectivité divine (209). Peut-être n'est-il pas déplacé de rappeler ici que les boeufs dérobés à Géryon seront sacrifiés, deviendront donc, ou sur la route du retour, ou au sanctuaire d'Héra argienne, ou plus tard encore - car ceux qui s'échappent fonderont les races bovines les plus réputées de la Grèce - à la fois offrandes pour les dieux, et nourriture pour les hommes ! Le monstre triple, c'est encore en Scandinavie Hrungnir, "le géant au coeur tricornu" qu'abat Thôrr, le "dieu champion" (210).
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C'est enfin celui auquel est affronté Cuchulain dans "le plus clair roman d'initiation guerrière que nous ait transmis le monde celtique", mais la triplicité est ici celle "de trois frères doués de propriétés surhumaines, mais non monstrueux, solidaires, mais non fondus que le héros tua successivement dans un duel à triple péripétie" (211)... Trois frères, comme les Curiaces à Rome et comme - ajouterons-nous. - les trois fils de Chrysaor dans la légende d'Héraclès telle qu'elle est rapportée par Diodore ! Aux témoignages littéraires rassemblés par G. Dumézil, nous n'ajouterons qu'une bien curieuse rencontre: celle d'Héraclès et du "Tricaranos", le monstre infernal des stèles dauniennes, rencontre qui survit peut-être dans le mythe de Cacus (212) et qui, en tout état de cause, pourrait bien expliquer le grand succès du héros grec auprès des peuples italiques. Que le combat contre l'adversaire triple ait bien été une épreuve initiatique pour les jeunes guerriers indo-européens, il paraît difficile d'en douter (213), mais comment le mythe a-t-il pu naître? G. Dumézil suppose que ce qui était difficile à divulguer en tant que pratiques secrètes, un auteur pouvait toujours le décrire "comme événements arrivés une fois, par hasard, dans la biographie d'un grand homme" (214)... ou, ajouterons-nous, en accordant une part nettement moindre au hasard, à un héros, un personnage mythique déjà connu et susceptible, par certaines fonctions qu'il exerçait, certains attributs qu'on lui prêtait, certaine image qu'on avait de lui, de capter ce nouvel héritage et de devenir ainsi une sorte de modèle pour la jeunesse à initier. C'est, semble-t-il, cette hypothèse qui rend le mieux compte de la "dérivation" du mythe en ce qui concerne Héraclès: le serviteur d'Héra, le maître des fauves est devenu le héros paradigmatique du jeune guerrier indo-européen... un héros de la seconde fonction... Poussons encore l'hypothèse: parce que, dans l'idéologie tripartie des Indo-Européens les trois fonctions sont hiérarchisées, parce que les guerriers sont soumis au pouvoir souverain, ne serait-il pas logique de considérer les rapports d'Héraclès à Eurysthée - qui représente la fonction royale - comme le nécessaire corollaire de cette transformation majeure? Il fallait alors expliquer cette soumission, Héraclès avait besoin d'une légende... légende déjà connue d'Hésiode (215) et d'Homère qui mentionne aussi bien l'hostilité et la ruse d'Héra que les rudes travaux imposés par Eurysthée (216). Homère connaît donc les "travaux" d'Héraclès, il sait aussi l'aide constante que lui apporta Athéna, mais de ces exploits un seul est retenu: le voyage aux Enfers pour en ramener "le chien du cruel Hadès" (217). Mieux, de cette victoire du héros sur la
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mort, sur Hadès, l'aède rapporte une autre tradition: "à Pylos, au milieu des morts" une flèche "du rude enfant d'Amphitryon" a frappé le dieu et l'a "livré à la souffrance" (218)... Enfin, si, dans l'Iliade, Héraclès, vaincu par "le cruel courroux d'Héré" (219), n'échappe pas lui-même à la mort, si, dans la Nekyia encore, Ulysse l'entrevoit au royaume des morts, Homère, peut-être, sait que le véritable Héraclès, lui, séjourne parmi "les Immortels dans la joie des festins" ... en compagnie d'Hébé "aux chevilles bien prises" (220). La victoire sur la mort, déjà donnée, semble-t-il, par le meurtre du tricéphale (221), est' là explicite. Elle marque avec une obstination curieuse les derniers travaux du héros, en donnant comme la signification profonde. En effet, et c'est le dernier point que nous voudrions souligner ici, indépendamment de telle ou telle séquence (222), la série même des "travaux", épreuves successives et dont nous aurons pu, je l'espère, noter la difficulté croissante et surtout la charge symbolique de plus en plus forte, témoigne en faveur de l'initiation, comme en témoigne encore le thème du voyage vers l'Ouest, vers les "portes du soir", qui sont le théâtre des deux derniers exploits "terrestres" d'Héraclès, vers ces seuils où se croisent Jour et Nuit, où le sommeil et la mort peuvent surprendre, une eschatié encore, un no man's land où, une fois de plus, se rejoignent le chemin d'Hermès et celui d'Héraclès (223). Nous sommes passés du profane au sacré, de la vie de tous les jours à la mort de l'initié, gage de sa renaissance à un statut nouveau... Autre lecture possible: nous avons franchi, peut-être, aussi différents degrés de l'initiation: le plus banal, le plus proche du quotidien et le plus accessible; l'initiation plus qualifiante du guerrier; celle enfin qui confère une expérience religieuse exceptionnelle. Héraclès a passé les bornes de l'humanité: ses efforts pour pénétrer dans "le domaine interdit", qu'il soit celui des Enfers ou celui du merveilleux jardin des Hespérides (224), cette quête du "pays transcendant", font de lui - et c'est bien ce que dit le mythe qui lie, par exemple, les pommes d'or et l'immortalité (225), ce que disent plus nettement encore les peintres de vases, lorsqu'ils représentent Héraclès remettant directement les fruits à l'assemblée des dieux (226) - le digne compagnon des Olympiens.
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3-2 Passer des "Travaux" à la vie d'Héraclès, c'est, dans une certaine mesure, passer du mythe à la légende. De tels exploits, en effet, même lorsqu'ils se sont enrichis, dédoublés et même lorsque le sens s'en est modifié, représentent encore assez fidèlement la raison d'être du héros: les difficultés de l'action humaine, confrontées à l'ordre du monde. Cristallisés autour d'un personnage devenu "modèle", les travaux s'intègrent dans une "biographie" qui, dans la mesure même où elle se veut cohérente, doit concilier des traditions d'origine diverse, expliquer, bref inventer... C'est à cette étape de l'évolution qu'à notre avis, s'appliquent les analyses de G. Dumézil, ces fils conducteurs qu'il retrouve dans la vie d'Héraclès, pour faire du héros, dans le cadre de la trifonctionnalité indo-européenne, le prototype du guerrier: héros de la seconde fonction, Héraclès le serait par ses trois mariages (227); il le serait aussi - et surtout - par ses trois "péchés", qu'il commet contre le code de l'honneur guerrier, trois épisodes "idéologiquement solidaires" et immédiatement suivis d'une "punition" qui chaque fois l'affecte dans l'ordre des trois fonctions également (228)... Quel que soit le bien-fondé de l'interprétation (229), elle ne peut rendre, notons-le, toute la richesse sémantique du mythe dont elle n'explique vraiment que l'une des dérivations: celle que les Indo-Européens lui ont fait subir, créant (ou récupérant... c'est un problème important) le modèle paradigmatique de l'initié pour en faire le prototype d'un héros exclusivement guerrier. Ce que j'ai voulu faire ici, - et il me semble que l'étude des cultes et des travaux d'Héraclès m'y autorisait - c'est relire, à la lumière de l'initiation, ce véritable roman qu'est devenue la vie du héros... l'idée, d'ailleurs, m'en a été donnée par un problème resté pour moi longtemps insoluble, celui de la place que tient, tant dans le récit de Diodore que dans celui d'Apollodore, l'épisode au cours duquel les dieux dotent Héraclès de ce qui devait être son équipement. Rien à voir, en effet, avec les dons des fées autour du berceau de la Belle au bois dormant, ou, plus proche d'Héraclès, avec les attributs qui feront de Pandore ce beau mal envoyé aux mortels. Il ne s'agit nullement, par ces dons, de promettre (ou de déterminer) une belle carrière. Celle-ci est très largement commencée. Chez Apollodore, après ses prouesses enfantines, le héros, gardant les troupeaux d'Amphytrion, a déjà tué un premier lion, celui du Cithéron (230) ; il a encore, pour défendre Thèbes, lutté victorieusement contre les Minyens (231) ; il a enfin, cinquante nuits durant, défloré et engrossé les cinquante filles de Thestios (232)... C'est
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alors qu'ayant appris d'Eurytos à tirer de l'arc, il reçut d'Hermès une épée, d'Apollon des flèches, d'Héphaïstos une cuirasse d'or, d'Athéna un péplos et qu'il se coupa lui-même une massue dans la forêt de Némée (233). Suivent directement le rappel de la folie envoyée par Héra, le meurtre (par le feu) de ses enfants nés de Mégara, l'exil et la consultation de l'oracle de Delphes et ennn la soumission à Eurysthée pour accomplir les douze travaux qui devront le rendre immortel. Devant le texte de Diodore l'étonnement est plus grand encore. Si l'on retrouve les prouesses d'Héraclès au berceau et sa lutte pour délivrer Thèbes du tribut imposé par les Minyens, l'exposé des athloi est littéralement coupé en deux: d'abord les travaux proprement peloponnésiens (auxquels s'ajoute la capture du taureau crétoi:;) (234)... Bien après, ceux qui font d'Héraclès un héros parcourant le monde (235). Entre les deux, deux épisodes - la fondation des Jeux Olympiques (236), la Gigantomachie (237) - qui mettent le héros et les dieux étroitement en rapport et c'est entre ces deux épisodes, "lorsqu'il se fut retiré de la guerre pour se délasser dans les fêtes, dans les assemblées et les jeux", dit Diodore, qu'il reçut les présents que lui firent les dieux "pour honorer sa bravoure", présents très voisins de ceux que donne Apollodore: le péplos qui vient aussi d'Athéna, la cuirasse d'Héphaistos (mais aussi la massue), l'épée d'Hermès... l'arc (et non plus les flèches) d'Apollon... Il s'y ajoute un cheval donné par Poséidon, et Déméter crée pour lui les Petits Mystères (238)... Tradition revue et corrigée certes (le don de Déméter est là pour le prouver), mais bien curieuse... A l'apparente incohérence de ce don trop tardif, on peut, me semble-t-il, proposer une explication: si c'est à ce moment seulement qu'Héraclès reçoit les armes du chasseur ou du guerrier qu'il sera pour la postérité (et nous pouvons noter en effet l'importance de l'armement hoplitique dans un ensemble qui mériterait, évidemment, une étude de détail) (239), n'est-ce pas un souvenir de l'initiation ? C'est en effet après avoir fait ses preuves que l'initié reçoit ses armes. Il en est ainsi pour les populations de Mélanésie ou de Polynésie étudiées par A. van Gennep et pour bien des ethnies africaines... On sait qu'il en était de même en Crète et à Thèbes où le don de l'équipement militaire se faisait lors de l'initiation et dans le cadre des relations homosexuelles que nous avons étudiées... Mieux, il est un lieu où le don des armes est directement mis en rapport avec Héraclès (mais en dehors de tout contexte pédérastique) : à. Thasos, en effet, la cité, par l'intermédiaire de ses polémarques. offre aux fils "des héros morts à la guerre" qui ont atteint leur. majoc~é "des
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cnémides, une cuirasse, un poignard, un casque, un bouclier, une lance dont la valeur ne sera pas inférieure à trois mines". Or c'est "aux Héracleia, lors du concours ", qu'est remise aux bénéficiaires cette panoplie guerrière (240). Peut-être même est-ce encore en gardant à l'esprit ces pratiques initiatiques qu'il faut interpréter le changement de nom d'Héraclès (241), un nom qui en quelque sorte le "consacre" et consacre aussi une gloire déjà en partie acquise pour ou par Héra (242). Ce passage, décidément captivant, du don des dieux retient encore par un détail : le don du péplos que lui accorde Athéna, la déesse qui, par excellence,le protège tout au long de sa carrière terrestre... un don que visiblement Diodore s'explique mal, car il s'efforce de le justifier par une opposition entre un dieu "qui ne travaille qu'aux arts de la guerre" Héphaïstos, et une déesse qui ne songe "qu'aux plaisirs de la vie pacifique" (243)... un don qui embarrasse tout autant les traducteurs français puisqu'ils répugnent à y voir un vêtement féminin, sans doute jugé peu compatible avec cet exemple de virilité qu'est Héraclès et qu'ils en font un manteau, ou plus vaguement encore un voile (244). En fait, Nicole Loraux a raison, incontestablement, d'y voir le vêtement des femmes et raison encore d'estimer que, s'il est vrai que le péplos est un peu l'attribut d'Athéna, c'est "un péplos et non le sien propre" que la déesse offre au héros et qu'il ne serait pas légitime, en conséquence, de se contenter de cette explication... (245) Enfin, lorsqu'elle confronte ce péplos d'Héraclès à d'autres traditions qui assignent au héros le port du vêtement féminin (l'épisode chez Omphale, par exemple, ou la tunique de mort que lui envoie Déjanire, que nous retenons volontiers, alors que nous réfutons les exemples afférant au culte d'Héraclès) (246), lorsqu'elle rapproche cet Héraclès féminisé par son vêtement de l'Héraclès soumis "au joug tyrannique du pouvoir féminin" (247) (l'expression est sans doute un peu abusive) et d'un Héraclès qui (dans les Trachiniennes de Sophocle par exemple) souffre et pleure comme une femme (248), elle a totalement raison de repérer là l'une des contradictions du héros et une preuve supplémentaire de son ambivalence fondamentale... Bref, lorsqu'elle affirme qu"'avec Héraclès nous tenons l'une des figures grecques de la féminité dans l'homme" (249), elle met l'accent, avec l'intuition qui lui est habituelle, sur cet aspect, certainement plus important qu'il n'y paraît, du mythe. Sur ce terrain, "aussi mouvant à l'infini que celui des échanges entre le masculin et le féminin" (250), je crois, comme elle, que la psychanalyse peut apporter beaucoup aux
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historiens. Mais à partir de là, peut-être faut-il faire état de divergences. Bien sûr, N. Loraux se défend d'analyser Héraclès lui-même, mais bien plutôt "l'imaginaire grec à l'oeuvre dans la constitution de la figure héroïque" (251) et l'enseignement du péplos d'Héraclès lui paraît être cette "révélation de la faiblesse tapie dans la force et occasion pour la force de circonscrire en soi la féminité" (p. 718). Vérité qu'on peut trouver, peut-être, trop universelle pour des images aussi précises... Ne peut-on l'inscrire historiquement, retrouver trace, dans la préhistoire de la Grèce, de ce péplos par trop gênant? Nicole Loraux l'a envisagé un moment, lorsqu'elle évoque le déguisement féminin d'Achille à Skyros ou la robe de Thésée adolescent et rappelle, à leur propos, cette loi d'inversion qui dramatise le passage à l'âge adulte... Si elle l'écarte, c'est précisément à cause de la place de l'événement dans le récit de Diodore... Or il n'est pas possible, je crois, d'isoler le péplos des autres présents divins, il fait partie d'un même ensemble et toute explication qui ne prend pas en compte également le don des armes s'avère insuffisante. En effet, comme le don des armes, le vêtement féminin s'inscrit parfaitement dans la logique de l'initiation: phénomène d'inversion, certes, mais au-delà sans doute, nous l'avons vu, symbole de cette ambiguïté sexuelle majeure dont les Grecs paraissent affecter la période de la puberté. Souvenir, peut-être, de cette relation primitive, la robe longue, restera d'ailleurs, dans l'esprit des Grecs, liée à l'initiation - celle qu'ils connaissent désormais: celle des Mystères. Dionysos, par exemple, la reçoit de Rhéa, lorsqu'en Phrygie elle lui enseigne la célébration des mystères (252) et, lorsque Cadmos, à la recherche d'Europe, arrive à Samothrace, lorsqu'il est initié et épouse Harmonie, parmi les présents des dieux - présents de noce et instruments des mystères à la fois - figure le péplos donné ici, comme à Héraclès, par Athéna (253). Changement de nom, don des armes, travesti sexuel... Continuant dans cette voie, c'est encore à l'allaitement du héros par Héra qu'il conviendrait de porter attention. Interprété dès l'Antiquité, et accepté par les historiens comme le symbole de l'adoption d'Héraclès par la déesse, ne prend-il pas tout son sens si on le considère - toujours dans le cadre du scénario initiatique - comme le symbole de la "renaissance" du héros, renaissance à un monde différent : celui des dieux auquel il accède grâce à cette Mère divine (254). Et, c'est à Thèbes, précisément, que Pausanias a pu voir "un endroit où l'on dit
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.. Fig. 28 : Hercl~ allait~ par Uni
, . Mii~ir étrusque (Museo civico de Bologne).
:X>'~~ès M. RENARD, Hercl6 allait6 par Junon, ,
;lJ/!'{Û?Jllges à Jean Bayet, Ùltomus, LXX, 19,64, ", , pp. 611-618, fig. 1.
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Fig. 29: Héraclès allaité par Héra
1. Lécythe aryballisque à figures rouges provenant d'Anzi (Apulie) (British Museum F. 10).
2. Dessin d'après M. RENARD, Hercule allaité par Junon, loe. cit., fig. 6.
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qu'Héra... donna elle-même à téter au petit Héraclès" (255)... celui probablement dont Diooore rapporte qu'à son époque encore on l'appelait "champ d'Héraclès", parce qu'Héra y avait, sur les conseils d'Athéna, allaité l'enfant exposé par sa mère (256). Tradition tardive, dira-t-on, et répandue surtout chez les Etrusques (fig. 28) (257)... Peut être ... On remarquera cependant que, si tel est le cas, elle correspond chez eux à un choix cohérent, puisque nous avons vu plus haut que, parmi les thèmes héracléens, ils ont sélectionné aussi celui qui lie étroitement Héraclès et les éphèbes, dans le cadre probable de la palestre. On remarquera encore que le "motif' appartient de plein droit à l'héritage grec, comme en témoignent quelques sources (rares il est vrai !) tant littéraires (258) qu'iconographiques. Sur un lécythe aryballisque apulien (fig. 29), daté de la première moitié du IVème siècle, Héra, en effet, allaite un jeune enfant qui, plus que l'Héraclès - souvent barbu - des miroirs étrusques, évoque le bébé auquel, selon Pausanias et Diooore, sa marâtre, sans le reconnaître, donna le sein, lui conférant ainsi l'immortalité (259). Comme le triomphe sur la mort, plusieurs fois redit dans le mythe, la conquête de l'immortalité apparaît, dans la vie même du héros, redoublée encore et encore. Chez Hésiooe, déjà, c'est Hébé, fille d'Héra, qui installe Héraclès dans la jeunesse éternelle; Hébé l'échanson des dieux, Hébé la jeunesse, l'adolescence, peut-être même - pour tout dire - une première façon de dire l'éphébie à Athènes (260). C'est enfin - et toujours à Athènes! - l'initiation du héros aux mystères d'Eleusis. Si Héraclès a réussi à triompher du chien aux trois têtes (encore un monstre triple), c'est parce qu'il avait vu "les orgies des mystes", affirme Euripide (261), tradition reprise ensuite tant par Diodore que par Apollooore (262)... Comme pour Hésiode, les travaux d'Héracli:s restent, pour les mythographes, le gage de son immortalité, mais, si le héros a vaincu Cerbère, s'il a triomphé de la mort, c'est parce qu'il a été initié à Eleusis. Des initiations tribales, nous sommes passés aux mystères.
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CONCLUSIONS
"Mort et initiation se ressemblent, aussi bien le mot que la chose..."
Plutarque l'affirme dans le De Anima et c'est bien, pensons-nous, ce triomphe sur la mort qui lie deux phénomènes aussi différents que l'initiation tribale et l'initiation au sens où l'entendaient les Grecs, celle des mystères. Une mort simul~, temporaire, dans le premier cas, la mort à l'enfance... La mort, dans le second cas, et l'angoisse que toujours elle a suscitée, la mort que dans toutes les cultures les hommes ont cherché à apprivoiser. Ainsi Héraclès, pour nous encore, aura été le moyen d'un passage. Parce qu'initié lui-même, parce qu'ayant "traversé" cet espace du sacré où plonge le novice dans ce temps de latence où il n'a plus ni nom, ni passé, ni parents, ni droits, ni devoirs d'aucune sorte, où, pour reprendre les termes de René Girard, "il est réduit à l'état de chose informe et innommable" (263), il était à même de triompher victorieusement aussi du "passage" décisif, de quitter définitivement le monde profane pour s'arrimer à celui des dieux: c'est, en effet, le rôle des mystères que de mettre le néophyte en communication directe et définitive avec le sacré (264). Cette ultime transformation supposait, bien sûr, une évolution religieuse profonde des Grecs: c'est toute la distance qui existe entre la blessure faite à Hadès ou la victoire sur le monstre et la conquête des pommes d'or gage d'immortalité... Et si c'est l'examen attentif de réalités cultuelles qui nous a invitée à reconsidérer ainsi un mythe trop connu, trop chargé de sens par des générations d'anciens - et de modernes -, c'est parce qu'au fond le rite "bouge" moins que le mythe. Et c'est précisément sur les "dérivations" du mythe que j'aimerais conclure: le fil conducteur d'un Héraclès héros paradigmatique de l'initiation permet, semble-t-il, d'appréhender l'une de ses transformations majeures - riche de développements potentiels - son inscription dans le cadre de la seconde fonction indo-européenne, et, s'il n'en épuise pas, loin de là toute la richesse sémantique, il permet d'inscrire dans l'histoire quelques-unes des ambiguïtés d'Héraclès, quelques-unes des particularités de la légende.
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Mais - et c'est, espérons-le, la preuve de sa validité - ce fil conducteur nous aura fait découvrir ce qui, au-delà des dérivations successives, toujours demeure, la pérennité du mythe : en l'occurrence les relations privilégiées du héros avec la mort. On nous reprochera peut-être "d'inventer une préhistoire au héros", de céder au péché majeur "de la recherche d'une genèse perdue"... TI nous semble pourtant que loin "d'évacuer toutes les tensions constitutives de la pensée des Grecs telle qu'à une époque historique on la voit fonctionner", une telle recherche ne peut que les éclairer (265). C'est aussi cela le polythéisme grec: le poids du passé et le jeu complexe des héritages.
NOTES DE LA TROISIEME PARTIE 123-
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G. DUMÉZIL, Horace et les Curiaces, Paris, 1952. Cf. sur ce point le séminaire de D. MUSTI, à Besançon, le 6 novembre 1985. . Ce n'est pas ici la carrière du guerrier telle que l'expose G. DUMÉZIL dans Heur et Malheur du guerrier, Paris 1969, que nous reprenons. Nous reviendrons plus tard sur cette vie d'Héraclès rythmée par les trois "péchés" du guerrier et les "punitions" qu'ils entraînent (cf. infra p. 397 ). ATHÉNÉE, Deipnosophistes, XIII, 556, e. (voir encore XIII, 556 f. et XII, 512 e·f). PAUSANIAS, III, 14,8. PAUSANIAS, III, 14,9. H. JEANMAIRE, Couroi et Courètes, Lille 1939. HÉRODOTE, . l, 65. PAUSANIAS, III, 14,8. C'est probablement PLATON qui, dans les Lois, nous donne le premier témoignage de ces luttes entre agelai que toutefois il ne nomme pas (632-633c). H. JEANMAIRE, par exemple, rapporte la description de l'îlot du Platanistas par Pausanias, mais ne dit rien de la présence d'Héraclès; il ne relève pas non plus la prégnance du souvenir du héros auprès du drornas et de l'hiéron de Lycurgue. Cf. infra p. 361. Nous n'aborderons pas ici le problème de la double nature - héros et dieu - d'Héraclès; notons cependant que pour PAUSANIAS (l, 15,3 et l, 32, 4) les habitants de Marathon prétendaient être les premiers à avoir considéré Héraclès comme un dieu. Pour Diodore, cependant, c'est en Sicile, à Agyrion que le héros consentit pour la première fois à recevoir les honneurs divins (IV, 24, 1); il est vrai qu'ailleurs (IV, 39, 1) il rend également justice aux droits des Athéniens, comme le faisait déjà Isocrate (V, 33). Nous avons déjà souligné (cf. notre prologue p. 62 et note 256) ces liens étroits qui unissent l'Héraclès des "Travaux" et l'Héra d'Argos et nous aurons l'occasion d'y revenir plus longuement dans notre quatrième partie. Quant à Thèbes où la légende constituée transporte le héros peu après sa naissance, elle paraît être le centre où s'élabore cette véritable biographie qui constitue le héros en "personnage". Il faut cependant rappeler ici que de la Périégèse de PAUSANIAS, seule est conservée la description de la province romaine d'Achaïe. S. WOODFORD, Cuits of Heracles in Attica, Studies presented to George MA. Hanfman, Mayence 1971, pp. 211·225, particulièrement p. 211. EURIPIDE, Héraclès, 1324-1333. Thésée demande à Héraclès de venir à Athènes: les téménè qui lui ont été donnés (à lui Thésée) par les Athéniens "porteront désormais (son) nom et (lui) appartiendront tant qu'(il)
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vivra". De même, d'après PLUTARQUE (Thésée, 35), le héros athénien aurait consacré à Héraclès tous ses téménè (sauf quatre) et changé leur nom de Théséia en celui d'Héracléia . On ajoutera que, près du sommet du Mont Hymette, un dépôt d'offrandes a été attribué à Héraclès dans un sanctuaire fouillé par l'American School of Classical Studies en 1939. Or certaines de ces offrandes datent du Xème siècle. Cf. R.S. YOUNG, Excavations on Mt Hymettos, 1939, AJA, 44, 1940, pp. 1-9; M.K. LANGDON, A Sanctuary of Zeus on Mt Hymettos, Hesperia, suppl. XVI, 1976, pp. 87-89 et 97-98. Cf. A~ SNODGRASS, Les Origines du culte des héros dans la Grèce antique, La mort, les morts dans les sociétés anciennes. Cambridge/Paris, 1982, pp. 107-119. Pour une recension de lieux de culte à Héraclès en Attique, voir S. WOODFORD, loc. cit., p. 215 sq.. qui, outre les sanctuaires précédemment cités, en étudie plus de dix autres. STÉPHANE DE BYZANCE, sv. Echelidae; POLLUX, IV, 100 ; HÉSYCHIUS, sv. Tetrakomos . Cf. W. JUDEICH, Topographie von Athen, Munich, 1931, p. 174. PAUSANIAS, 1,30,2. Cf. encore, W. JUDEICH, op. cit., p. 413 et C. PÉLÉKIDIS, Histoire de l'éphébie attique, Paris, 1962, pp. 261-262: le gymnase existait déjà à l'époque de Pisistrate. HÉSYCHIUS, S.v. Melon Herakles; ZENOBE, 5, 22. Cf. O. GRUPPE, Herakles, RE suppl. 3 (1918),926; H. DETTMER, De Hercule Attico, Bonn, 1869; A. FRICKENHAUS, Das Herakleion von Melite, Ath. Mitt XXXVI, 1911. Ces sanctuaires, célèbres grâce aux épisodes de la première guerre médique, étaient suffIsamment vastes pour que l'armée athénienne pOt y camper. Cf. HÉRODOTE, VI, 108 et 115 : "Les Athéniens avaient pris position dans une enceinte consacrée à Héraclès à Marathon, lorsqu'ils reçurent le renfort des Platéens" (108) et "Partis d'un téménos d'Héraclès, celui de Marathon, ils campèrent dans un autre Héracléion, celui du Cynosarge" (115) pour se porter à la défense de leur ville. ARISTOTE, Constitution d'Athènes, UV, 7. SEG, X, 2, musée épigraphique d'Athènes nO 13046. Cf. S. WOûDFORD, loc. cit., p. 217; cf. déjà E. VANDERPOûL, An Archarc Inscribed Stele from Marathon, Hesperia, II, 1942, p. 335 sq.. PINDARE, Olympiques, IX, 88 sq.. Le prix donné au vainqueur des concours de Marathon était en effet une phiale d'argent. Cf. encore PINDARE, Olympiques, XIII, 110 et Pythiques, VIII, 79. La belle traduction de A. PUECH (Les Bell<:s Lettres, 2ème éd. 1931) affaiblit peut-être l'aspect initiatique de ces jeux en traduisant agôn par combat et surtout en transcrivant par "contre des rivaux plus âgés" le génitif npE0'6UTtpwV qui suggère mieux l'appartenance à une classe d'âge. Cf. P. KAVVADIAS, '[cp. 'ApX., 1897, c. 195-200. Voir aussi HJ.
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MARROU, Les classes d'âge de la jeunesse spartiate, REA, XLVIII, 1946, pp. 216-230, surtout p. 226 et n. 3. L. ZIEHEN, RE, 1949, sv. Parasitoi 1377-1381 et H. DE'ITMER, op. cit., p. 25, cf. S. WOODFORD, loe. cit., p. 215 et notes 42 à 44. S'ils se retrouvent liés à d'autres cultes de l'Attique, ces "Parasites" semblent cependant dévolus plutôt au service d'Héraclès. Cf. ATHÉNÉE, VI, 234 à 235 f. ATHÉNÉE, VI, 234, et PLUTARQUE, Thémistocle, l, 2. Plutarque ajoute que cette particularité avait pour origine le fait qu'Héraclès était lui-même un bâtard parmi les dieux. Plutôt qu'à cette explication des pratiques cultuelles par le mythe qu'acceptent L. FARNELL (Greek Hero Cuits and Ideas of Immortality, Oxford, 1921, pp. 164-165) ou G. MURRAY (Five Stages of Greek Religion, New-York, 1955, p. 86), il paraît préférable de penser, comme l'ont fait H. DETTMER, ou O. GRUPPE, comme le fait encore S. WOODFORD (p. 216) à un~ concentration particulièrement forte des nothoi dans le dème de Diomeia. Sur ce dème et son importante population étrangère (le tribunal du Palladion pourrait s'y trouver), sur l'ancienneté même de cette particularité, voir M. ZAMBELLI, Il demo di Diomeia, le metageitnia e le origini dei Gefrrei, dei Mesogei e dei Salamini, Rivista di Filologia e di Istruzione classiea, 104, 1976, pp. 162-181. PAUSANIAS, l, 19, 3 Cf. encore PHOTIUS, SUIDAS, HESYCHIUS et STÉPHANE de BYZANCE, s.v. Kynosarges. PAUSANIAS, l, 19,3. Pour une telle étude on pourra se reporter à S. WOODFORD,loe. cit., et à ses importantes notices bibliographiques. PAUSANIAS, IX, li, 1. Cf. aussi EURIPIDE, Héraclès, 4-7 et 14-17. DIODORE, IV, 10,2; APOLLODORE, II,4,7-8. PINDARE, Olympiques, VII, 154·155; IX, 149; XIII, 152; Néméemes, IV, 19-24. Ces œtes pourraient être des jeux funéraires en l'honneur des fils d'Héraclès et de Mégara (Isthmiques, IV, 103-123). Sur leur origine voir encore ANTONINUS LIBERALIS, Métamorphoses, 29, 4. Le cénotaphe (pour Pausanias) ou le tombeau (pour Pindare) de lolaos était voisin et a pu se confondre avec la tombe d'Amphitryon. Cf. M.P. NILSSON, Grieehisehe Feste, op. cit., pp. 446-447 et plus récemment A. SCHACHTER, Cuits of Boiotia, l, Londres, 1981, pp. 30-31. Par Pindare et ses scholiastes, on sait que les Héracléia (qui portaient aussi le nom d'Iolaeia) étaient annuelles; le 1er jour avaient lieu les sacrifices, le 2è commençaient "les jeux où la force fait ses preuves" (Isthmiques, IV, 103-116) ; les vainqueurs étaient couronnés de myrte blanc (ibid, 117-118) et recevaient un trépied de bronze (Olympiques, VII, 152-155). Selon le scholiaste (Isthmiques IV, 14) pentathle et épreuves hippiques se jouaient au premier jour, les épreuves athlétiques le second. Sur quelques vainqueurs aux Héracléia voir les inscriptions (du IId s. av. J.C. au III o siècle de l'Empire) recensées par P. ROESCH, Les Hérakléia de Thèbes, ZPE, 17,
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1975, pp. 1-7. Pausanias mentionne, entre autres, les temples de Thisbé et de Tipha autour desquels avaient lieu des Héracléia annuelles dont il ne dit malheureusement rien (IX, 32,2-4). Citons par exemple Thasos (cf. J. POUll.LOUX, RechercMs sur l'histoire et les cultes tU Thasos, l, Paris, 1954, p. 369 et 377-378) ou Cyrène (M. LUNI, Documenti per la storia della istituzione ginnasiale e dell' attivita' at1etica in Cirenaica in rapporto a quelle della Grecia, Q, A, L, VIII, 1976, pp. 223-284). Héraclès est ici, avec Hermès, le dieu protecteur des éphèbes. A Arados (l'ile de Rouad) une inscription bilingue particulièrement intéressante (cf. supra p. 139 note 293) donne comme protecteurs du gymnase, en grec, Hermès Héraclès (les deux noms juxtaposés paraissent même ne désigner qu'une seule divinité), en phénicien Hennès et Melqart. Fig. 27. Cf. E. GERHARD, EtruskiscM Spiegel, Berlin 1843, 1, 127. Cf. encore D. EMMANUEL-REBUFFAT, Herclé agonistique en Etrurie, Latomus, XLIV, 3, 1985, pp. 473-488, pour la bibliographie se rapportant à cette série de miroirs. J. BAYET, Herc/é, Etude critique des principaux monuments relatifs à l'Hercule étrusque. Paris, 1926, pp. 163-169. J. Bayet, voit encore dans ces images un lien avec le mythe des Hespérides (p. 180). D. EMMANUEL-REBUFFAT, loc. cit., p. 475. D. EMMANUEL-REBUFFAT, loc. cit., p. 479. PINDARE, Olympiques, VI, 134-135. Représenté aussi sur des miroirs anépigraphes, tel celui du musée de Bologne, Corpus Speculorum Etruscorum, Bologne, 1, 12 ou E. GERHARD, op. cit. 131. Contre Gerhard qui re.connaissait Apollon, lolaos a été identifié par I. SCOTT-RYBERG (An archeological Record ofRome, 1940, p. 113) et A. STIBBE-TWIST, Heracles in Etrurien dans Thasos, Sieben Arch. Arbeiten, Amsterdam, 1978, p. 82-3 et pl. XV. Voir également G. SASSATELLI, Corpus Speculorum Etruscorum, Bologne, 2, Rome, 1981, pp. 31-32 et pl. 12 et A.J. PFIFFIG, Herakles in der Bilderwelt des etruskischen Spiegel, Graz, 1980. PAUSANIAS, III, 14,6. Cf. infra p.372. H. JEANMAIRE, op. cit., p. 512. Notons cependant que dans la description de Pausanias l'hiéron du héros ne voisine pas, comme il l'affIrme, avec l'héroon de Lycurgue, mais avec celui d'Hélène, personnage tout aussi chargé, d'ailleurs, de souvenirs initiatiques. PAUSANIAS, III, 14, 10. Un buste d'Héraclès se trouvait en effet dans un angle du gymnase (VI, 23, 5). Si HÉRODOTE (II, 44) avait pu conclure à l'existence de deux Héraclès, Diodore, lui, en compte trois, un Héraclès égyptien, le dactyle crétois, et le héros thébain (III, 74,4-5, et pour le dactyle crétois V, 64,6 et V, 76, 1 et 2). Il a même découvert un Héraclès indien (II, 39, 1 à 5) oublié lors de la
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récapitulation du livre III. (Cf. supra, III, 74, 5). Mais, comme Pausanias, il s'efforce surtout de distinguer du fils d'Alcmène un "Héraclès plus ancien", le seul à avoir pu, logiquement. purger la terre de ses bêtes sauvages... travaux qui ne se conçoivent guère, à son avis, à l'époque du héros thébain où "la plupart des pays étaient déjà civilis~s et se distinguaient par l'agriculture, le nombre des villes et de leurs habitants" (l, 24, 7). Cette personnalité complexe du héros/dieu - qui traduit admirablement la richesse des thèmes mythiques cristallisés sur son personnage - conduira d'ailleurs Cicéron à dénombrer six Héraclès (De natura deorum, III, 16,42) et Varron quarante-trois! (Servius dans Virgile, Enéide, VIII, 564). Sur ce problème de l'Héraclès thasien et des contacts entre le héros grec et le dieu de Tyr voir supra pp. 50-52 surtout notre première partie (quatrième chapitre). PAUSANIAS, V, 7, 6-9. Pour une discussion du sens à accorder au rythme pentéétérique des Jeux Olympiques, cf. P. LÉVEQUE, Continuités et innovations dans la religion grecque, PP, CXLVIII-CIL, 1973, pp. 23-50 et particulièrement p. 36 sq.. PAUSANIAS, V, 8, 1. PAUSANIAS, V, 8, 2. PAUSANIAS, V, 8, 3 et 4. Cf. encore VIII, 48, 1, pour le rétablissement des Jeux Olympiques par un Héraclès "thébain". PAUSANIAS, V, 4,6. PAUSANIAS, V, 13, 1 et 2. PAUSANIAS, V, 13,8. PAUSANIAS, V, 14, 1 et 2. Les dactyles, en effet, constituent plutôt le cortège de la Grande Mère primitive et les courètes, celui de son parèdre mâle. C'est pourquoi, sans doute, au fur et à mesure que croît l'importance de ce dernier, les courètes tendent à supplanter les dactyles. Ce sont, par exemple, les courètes qui, dans l'hymne de Palaiokastro constituent le cortège d'un Zeus "grand couros" lui-même (cf. H. JEANMAIRE, p. 427 sq.). Mais la fonction des dactyles et des courètes, comme d'ailleurs celle des corybantes et des cabires, a souvent été ressentie comme voisine... C'est ce qui s'exprime dans les Bacchantes d'Euripide (120-125). C'est ce qu'on retrouve dans l'excursus, souvent commenté, de Strabon, X, 8. On peut toutefois penser qu'il s'agit plutôt ici des dactyles, ne serait-ce qu'en raison de leur nombre: 5 (leur nom a été mis en rapport, en effet, avec les cinq doigts de la main). R. VALLOIS, Les origines des Jeux Olympiques, REA, 1926, XXVIII, pp. 305-322. et 1929, XXXI, pp. 113-133. Cf. H.V. HERRMANN, Zur altesten Geschichte von Olympia, MDAI, (A), 1962, pp. 3-34. L. STELLA, La civiltà micenea nei documenti contemporanei, Rome, 1965, p. 39 n. 94 et p. 241 n. 54. Sur tout cet aspect hérité des religions
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créto-mycéniennes, on se reponera sunout aux contributions de P. LÉVEQUE, en particulier: Formes et structures méditerranéennes dans la genèse de la religion grecque, dans Praelectiones Palavinae, Rome, 1972, p. 145 sq. ; an, déjà cité de PP. 1973, pp. 23-50; et plus précisément sur les Jeux: Des dieux et des jeux d'Olympie, REG. LXXXVII, 1974, pp. 341-344 et Approche ethno-historique des concours grecs, Klio, 64, 1982, l, pp. 5-20. H. JEANMAIRE, op. cit., p. 439 sq.. Point n'est besoin cependant de supposer au nom d'Héraclès l'étymologie hasardeuse proposée par L. DREES (Der Ursprllng der Olympischen Spiele. Stuttgart, 1962): "celui qui est puissant par la végétation de son année (héra)", ce qui, notons-le, ne rend pas très compréhensible la qualité de dieu solaire qu'il lui attribue plus arbitrairement encore (les douze travaux symbolisant les douze signes du zodiaque). Sur ce point, cf. P. LÉVEQUE, loc. cit., note 39, et, en dernier lieu, B. SERGENT, op. cil., p. 75 sq. Il faut cependant souligner que le sujet même de B. Sergent le conduit à n'étudier les Jeux Olympiques qu'à travers le mythe de Pélops, éromène de Poséidon. Si nous panageons son avis sur le sens initiatique fortement marqué du mythe de Pélops nous ne pensons pas qu'il puisse exprimer à lui seul le sens des Jeux Olympiques. L. DREES, op. cit. Contra: P. LÉVEQUE,loc. cit., REG. pp. 341-344. PINDARE, Olympiques, II,1-6. PINDARE, Olympiques, III, 10-15; III, 20-25; VI, 65-70. "Et il avait institué à la fois le jugement intègre des Grands Jeux et la fête quinquennale près de l'Alphée". PINDARE, Olympiques, X, 26-32 et 51-75. Cf. encore ce rappel de LYSIAS (Discours Olympique) dans le cadre de l'élan panhellénique des débuts du IVème siècle: "Héraclès a droit à notre souvenir parce que le premier, par amour pour les Grecs, il les rassembla à cette fête...... On se reportera, pour cet héritage minoen parvenu dans la religion hellénique par la médiation de Mycènes, à P. LÉVEQUE, Le Syncrétisme créto-mycénien, Colloque de Besançon (1973), Les syncrétismes dans les religions de l'Antiquité, Leiden, 1975, pp. 19-73. Sur le thème du dépècement et de la résurr<'.ction voir par exemple P. LÉVEQUE, loc. cit., (PP) p. 31 et tout récemment B. SERGENT, op. cit., p. 75-84. PAUSANIAS, III, 15, 3. Ces murs, bien sûr, sont ceux de la nouvelle Sparte, d'une Sparte qu'on pourrait dire "romaine" et on ne saurait déduire du récit de Pausanias des indications topographiques précises, valables pour la cité grecque. Nous ne retenons ici que la posilion excentrée du sanctuaire. PAUSANIAS, VIII, 35,2. PAUSANIAS, VI, 21, 3.
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PAUSANIAS, VII, 17,8. L'expression utilisée par Pausanias est curieuse, qui évoque le sacrifice sanglant et les poils, coupés sur la tête de la victime, et offerts comme prémices aux dieux (il lui avait offert "des cheveux de sa tête"). PLUTARQUE, Dialogue sur l'amour, (761 d). "Quant à Héraclès, ce serait un dur travail que d'énumérer toutes ses amours tant le nombre en est grand! Iolaos, par exemple, fut aimé de ce héros et c'est pourquoi, aujourd'hui, encore, il est honoré et vénéré par les amants qui échangent avec leurs aînés serments et gages de foi sur son tombeau..." Cf. encore CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Protreptique, II, 33, 4 et 5. Il faut bien sûr faire la part, comme le demande B. SERGENT (op. cit . p. 171), des "affabulations hellénistiques". Il reste que les notes de Pausanias qui lient de telles amours homosexuelles à de nombreux culles locaux pourraient inviter à penser, contrairement à l'auteur, que l'affirmation de Plutarque n'est pas seulement l'écho d'une tradition tardive. HÉSYCHIUS, s.v. Elakatia. . PAUSANIAS, III, 15,4 et 5, et aussi APOLLODORE, Il, 7, 2. PAUSANIAS, Il,13, 18. APOLLODORE, Il, 5, 8. ATHÉNÉE, XIII, 561, d. IGXII, 3, 526-601 et 1410-1493. Cf. E. BETHE, Die dorische Knabenliebe. Ihre Ethik und ihre Idee, Rh M, 62, 1907, pp. 438-475 et surtout p. 449 sq. ; H. JEANMAIRE, op. cit., pp. 455-458 ; A. BRELICH, Paides e Parthenoi, Roma, 1969, p. 183 sq. ; J. BREMMER, An enigmatic Indo-European Rite: Paederasty, Arethusa, 13,2, 1980, pp. 279-298 et surtout p. 283. PLUTARQUE, Lycurgue. 17, 1. STRABON, X, 4, 21 (ou ÉPHORE, F. Gr. Rist. 70 F, 149, 21). PLUTARQUE, Dialogue sur l'amour, 4 (=751b) Cf. déjà ESCHINE, Contre Timarque. 138-139. Cf. supra, note 83. B. SERGENT, op. cit., p. 201-206. PLUTARQUE, Dialogue sur l'amour, 17 (761 d-e) et ARISTOTE, frg. 97 (Rose). Voir encore W. KROLL, RE, IX, 1916, s.v. Iolaos. PAUSANIAS, V, 8,4. EURIPIDE,Les Héraclides, 216, emploie de terme de unaomO'Tnç. EURIPIDE, Les Héraclides, 88 et 125 (le terme est traduit par compagnon d'armes par L. MERIDlER, Les Belles Lettres. 1970). PAUSANIAS, VI, 23, 3. Cf. supra. PAUSANIAS, V 14, 7 et V, 8, 1. Cf. supra. Une tradition en fait cependant l'éromène d'Eurysthée. En effet ATHÉNÉE, XIII, 603 d. rapporte que le poète Diotimos, dans ses Hérakléia. affirmait qu'Héraclès avait patiemment effectué ses "Travaux" par amour pour Eurysthée.
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PAUSANIAS, VII, 17,8. Cf. supra, p. 368 et note 74. C. CALAME, us choeurs de jelUles filles en Grlce archarqwe, Rome, 1977, l, p. 198 et note 51. PLUTARQUE, Lycurgue, 16, 11. HÉRODOTE, IV, 33; CALLIMAQUE, Hymne d Délos, 278 sq.. HÉSYcmus, S.v. Couréotis. Cf. DEUBNER, AttiscM Feste, p. 232 sq.; H. JEANMAIRE, op. cit., p. 379 sq. ete... Une glose d'HÉSYCmuS mentionne l'offrande de vin faite l Hbaclà par les futurs éphèbes (oi fL~ÀÀOVTEC' 'ccp,,6cUc\v) ll'occasion de la tonte de leur barbe. Cf. également, AlHENEE, XI, 494, f. (Oinisteria). L. GERNET, Droit et prédroit en Grèce ancienne, dans Anthropologie de la Grèce antique, Paris, 1968, p. 189; Frairies antiques, ibid, p. 38 sq.. Cf. H. JEANMAIRE, appendice au chapitre IV, p. 377-379 et P. FAURE, Fonctions des cavernes crétoises, Paris, 1965, p. 160-173. B. SERGENT, op. cit., pp. 26-28. Pour la libation dans' les pays scandinaves il renvoie à L. CAHEN, La libation. Elude sur le vocabulaire religieux du vieux scandinave. Paris, 1921. PAUSANIAS, III, 14, 6. P. CHANTRAINE, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, sv. ocpai'pa p. 1074. DÉMÉTRIOS DE SCEPSIS dans ATHÉNÉE, IV, 141 e-f; cf. A. BRELICH, Paides e Parthenoi, Rome, 1969, p. 153 sq.. DIODORE, IV, 24,1. Notons cependant qu'il est difficile, pour l'ensemble du texte, d'être aussi catégorique que l'est B. Sergent (p. 180). Cette précision tendrait à prouver que, contrairement à ce qu'a pu laisser entendre Diodore ("tous les habitants"), le rite d'offtande de la chevelure ne concerne que la population masculine d'AgyriOll. DIODORE, IV, 24, 6. Il faut, je crois, signaler l'utilisation du mot thiase faite par Diodore, pour désigner les cortèges formés pour mter Héraclès. H. JEANMAIRE, dans son Dionysos, voit dans le terme un très vieux mot du fonds préhellénique qui, avant de s'appliquer exclusivement à Dionysos (et de désigner les fidèles associés dans les "orgies" du dieu), pouvait aussi s'appliquer à d'autres divinités (cf. les thiases de Poséidon à Egine). De toute façon, avant d'être contrôlés et même organisés par la cité, ces cortèges semblent plutôt indépendants des autorités (Dionysos est souvent qualifié d'Isodaitès, de Lysios, d'Eleuthérios, ne l'oublions pas). Trouver ce terme dans le contexte héracléen est, dans ce cas précis (les esclaves se mêlent aux maîtres), fort intéressant L. GERNET, Droit et Prédroit.. loc. cit., p. 188. Pour L. Gernet voir note précédente et pour B. SERGENT, cf. op. cit., p. 90. C'est d'ailleurs "la problématique mise en lumière dans les Huakinthia" de Sparte que l'auteur retrouve dans les fêtes d'Agyrion. DIODORE DE SICILE, Bibliothèque Historique, traduction Hoefer, Paris
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1865, p. 281. Diodorus of Sicily with an english translation by C.H. Oldfather, Loeb, 1961 pp. 179-180. J. BREMMER, An Enigmatic Indo-European Rite "Paederasty", loc. cit., pp. 279-298. Voir supra, p. 355. Cf. encore, pour Athènes, PAUSANIAS, 1,29,2: au gymnase d'Académie où Héraclès était l'objet d'un culte existaient aussi un temple d'Artémis, et un autre de Dionysos. Voir supra p. 372. PAUSANIAS, III, 14,6-7. PAUSANIAS, III, 10,6-7. PAUSANIAS, VIII, 22, 4 à 8 (pour le décor et les sculptures du temple: 7 et 8). PAUSANIAS, IX, 17, 1 et 2. Le mythe bien connu d'Augé (dès l'époque d'Hécatée) (pAUSANIAS, VIII, 4,9), que reduplique celui de Phialo (rapporté également par Pausanias dans son voyage de l'Arcadie VIII, 12,3 et 4), enceinte des oeuvres d'Héraclès et manifestement soumise à une épreuve d'ordalie (ou une épreuve initiatique), pourrait en être un autre indice. PAUSANIAS, VIII, 15,5. PAUSANIAS, II, 31, 1 et 2. Il est vrai que cette bouche des Enfers était revendiquée par d'autres cités de la Grèce et qu'on la reconnaissait encore, toujours selon PAUSANIAS, à Hermione (II, 35, 10), au cap Ténare (III, 25, 5 et 6) ou encore à Coronée, en Béotie (IX, 34, 5) dans le temple d'Héra PAUSANIAS, VIII, 37, 1. PAUSANIAS, II, 10, 7. Cf. infra pp. 398-399. Héraclès est représenté sur plusieurs plats de fabrication locale dont l'un permet d'affirmer qu'il fut accroché dans l'Artémision, N. WEILL, Images
d'Artémis à l'Artémision de Thasos, EI~WAOnIIA, Actes du Colloque sur les problèmes de l'image dans le monde méditerranéen classique. (Lourmarin 1982), Rome, 1985, pp. 137-147, surtout p. 141 et 145-147. Cf. encore, Céramique thasienne à figures noires, BCH, 83, 1959, pp. 430-454 (dès le Vlème siècle). 127- Cf. N. WEILL, op. cit., Cf. aussi F. SALVIAT et P. BERNARD, Décrets pour Epié fille de Dionysos, BCH, 83, 1959, pp. 362-397, surtout pp. 376-382. 128- PLATON,République, 413, dc, cité par J.P. VERNANT dans son étude sur Artémis Orthia : Une divinité des marges, Artémis Orthia, Recherches sur les cultes grecs et l'Occident, II, Cahiers du Centre Jean Bérard, IX, Naples, 1984. 129- Pourtant les Hécatombaia, fêtes en l'honneur d'Héra argienne, paraissent avoir eu cette fonction initiatique. Un agôn, en effet, leur était lié, dont le prix était un bouclier (pindare, Olympiques, VII, 83 ...) Pour d'autres
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témoignages et la bibliographie, on se reportera à l'étude que nous faisons de ces mtes dans notre IVème partie (Und chapitre: Images du sacrifice). Il reste que, lorsqu'elles nous sont connues (il est vrai assez tardivement: cf. P. AMANDRY, Sur les concours argiens, BeH, suppl. VI, 1980, pp. 211·253), le rôle d'Héraclès n'y est pas évidenL Cf. en dernier lieu, la commwlieation de D. MUST! au Colloque de ROME (Oct. 1985: Passagi di stato, processi rituali, ed t/ficacia sociale) : La teoria delle èlà e passagi di stato in Solone, à paraItre. Mircea ELIADE, Naissances mystiques, essai sur quelques types d'initiation, Paris, 1959, p. 10. Il s'agit là de rites d'initiation tribale que M. Eliade assimile à tort aux rites de puberté. A. V AN GENNEP (Les rites de passage, Paris, rééd. 1981, p. 94 sq.) insiste au contraire sur le caractère privé des seconds: la puberté, moment précis du cycle physiologique ayant valeur singulière pour chaque individu, coYncide rarement avec la "pubené sociale". B. MALINOWSKI, Magic. science and religion and ot1ler essays, III, 1948, p. 21. M. ELIADE, op. cit., p. 24. A. BRELICH, op. cit., p. 25 sq.. A. VAN GENNEP, op. cit., p. 24. R. JAULIN, La mort sara, l'ordre de la vie ou la pensée de la mort au Tchad, Paris, Rééd. 1981, p. 110. D. ZAHAN, Religion, spiritualité, et pensée africaine. Paris, 1970. J. JAMIN, Les lois du silence, essai sur la fonction sociale du secret. Paris, 1977, p. 92. J. JAMIN, op. cit., p. 104. Cf. dans A. VAN GENNEP, op. cit., p. 111 pour les Ojibwé; p. 120 pour la société guerrière des Areoi en Polynésie ete••• Cf. A. YOSIllDA, Survivances de la tripartition fonctionnelle en Grèce, RHR,66, 1964, pp. 21-38, et, Sur quelques coupes de la fable grecque, RHR., 67, 1965, pp. 31-41. Cf. encore J. BREMMER, loc. cil., et en dernier lieu B. SERGENT, op. cit., pp. 25-37. A Thèbes aussi, selon PLUTARQUE (De l'Amour, 17), il était d'usage "que l'amant donnât une armure complète à son mignon, quand celui-ci était enrÔlé dans les hommes faits". Il est donc du plus haut intérêt de constater qu'à Thasos (hors de tout contexte homosexuel) une inscription datée des environs de 350 av. J.-e. et réglant les devoirs de la cité à l'égard des enfants des "héros morts à la guerre" stipule que, lorsque les garçons auront aUCint la majorité, les polémarques leur donneront à chacun "des cnémides, une cuirasse, un poignard, un casque, un bouclier, une lance, dont la valeur ne sera pas inférieure à trois mines". Cette panoplie du guerrier sera remise "aux Héracléia lors du concours". (Cf. J. POUILLOUX, Nouveau choix d'inscriptions grecques, 1971, p. 106). Dans les deux communications faites à Besançon, au séminaire de P.
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LÉVEQUE, les 24/11 et 14/12 1983. B. MALINOWSKI, se reporter à la note 133. D. ZAHAN, op. cit., p. 91. P. CLASl'RES, La Société contre l'Etat, Paris, 1974, p. 157. J. JAMIN, op. cit., p. 91. L. PERROIS, La circoncision bakota (Gabon), , Paris, 1968, p. 70. J. JAMIN, op. cil., p. 106. L. KRADER, Formation of the state, New York, 1968, p. 39. Cité par J. JAMIN, p. 98. D. PAULME, Classes et associations d'âge en Afrique de l'Ouest, Paris, 1971. J. JAMIN, op. cit., p. 26: "le discours initiatique tend à naturaliser les rapports sociaux, à faire basculer l'ordre social dans l'ordre naturel - et cela au moment précis où ils s'articulent l'un à l'autre (puberté) - à justifier l'un par l'autre, à dissimuler enfm les fon~ments et les articulations de l'un par la couverture économique de l'autre". S. MOSCOVICI, La Société contre nature, Paris, 1972, p. 301. S. MOSCOVICI, ibid., pp. 297-299. S. FREUD, Morse et le monothéisme, traduction de 1948, p. 63. B. BETIELHEIM, Les blessures symboliques, essai d'interprétation des rites d'initiation, traduction Paris, 1971. (1ère édition 1954). p. 180. L'auteur, dans cet ouvrage, rompt dans une certaine mesure avec la tradition psychanalytique classique, mais aussi avec celle des anthropologues, en refusant de voir dans l'enfant le simple objet de l'initiation. Les rites, pense-t-il, viennent à la rencontre de désirs infantiles qu'il dit avoir observés dans les communautés d'enfants psychotiques qu'il étudiait G. BATESON, La cérémonie du naven, Paris, 1971. S. MOSCOVICI, op. cit., p. 258. Nous ne développerons pas ici les rapports qu'entretiennent lolaos et Héraclès dans la mythologie: B. Sergent leur consacre un chapitre de son ouvrage, op. cit., pp. 171-182 (un élève exemplaire: lolaos). Le compagnonnage guerrier fondé sur l'amitié homosexuelle semble avoir été particulièrement efficace à Thèbes, où, au début du IVème siècle, les couples jusqu'alors dispersés dans l'armée sont réunis dans le fameux "bataillon sacré" grâce auquel Epaminondas pourra vaincre Sparte. Cf. PLUTARQUE, Eroticos, 17 : "Dans ton pays... à Thèbes, n'est-il pas vrai que l'amant faisait cadeau d'un équipement militaire complet à son aimé, quand celui-ci atteignait l'âge de l'enrôlement... (en outre Pammenes y fit) "ranger les soldats dans les corps de troupes d'une façon toute nouvelle. Il reprochait à Homère de ne rien connaître à l'amour, parce que ce poète répartissait les Achéens "par tribus et par clans", quand il aurait dû placer l'aimé à côté de l'amant". Sur ce "bataillon sacré" voir encore ATHÉNÉE, XIII, 561, f. PLATON, Phèdre, 237 d.
417 162- PLAroN,LeBanquet, 178c. 163- PLATON, ibid., 181 d. 164- PLATON, ibid., 210 a. 165- A. VAN GENNEP, op. cit., p. 117. 166- M. DOUGLAS, De la Souillrue, Paris, 1971. A. GIRARD, dans La violence et le sacré, exprime aussi cet isolement des individus en instance de passage par la société qui les assimile aux victimes d'une ~pi~mie ou aux criminels et espère ainsi faire l'économie d'une nouvelle crise sacrificielle. 167- M. DOUGLAS, op. cit., p. 114. 168- A. VAN GENNEP, déjà, notait (op. cit., pp. 161-162) que "pendant le noviciat les jeunes gens peuvent voler et piller tout à leur aise, ou se nourrir et s'omer aux dépens de la communaut~" et donnait l'exemple des Vaï du Libéria et des membres du Duk-duk et de I1ngiet dans l'archipel Bismarck. 169- Pour l'analyse du mythe, cf. P. VIDAL-NAQUET, Le chasseur noir et l'origine de l'éphébie athénienne, dans Le Chasseur noir, Paris, 1981, pp. 151-174 (texte remanié d'une étude parue d'abord dans les Annales E.S.C 23, 1968, pp. 947-964). 170- Cf., après l'interprétation de la cryptie donnée par VIDAL-NAQUET dans l'article cité (note précédente), la critique qu'en a faite L. MAKARIUS (L'homme et la société, 1971,4, pp. 191-210) et nos propositions aux . séminaires de Besançon (nov. déc. 1983). 171- Il s'agit de la société guerrière des Areoi en Polynésie: outre les cérémonies religieuses qui consacrent le retour de l'initié dans la communauté des guerriers, celui-ci change de nom, vole ou emprunte le vêtement de la femme du chef et obligation lui est faite de tuer ses enfants. Cf. A. VAN GENNEP, op. cit., p. 120. 172- A. SCHNAPP, Images et programme: les figurations archatques de la chasse au sanglier, RA, 1979,2, pp. 195-218. Cf. encore P. SCHMITT et A. SCHNAPP, Les représentations de la chasse au sanglier et du banquet, RA, 1982, pp. 57-74. 173- Cf. supra pp. 61-62. Cf. surtout notre quatrième partie (Deuxième chapitre: Images du sacrifice). 174- Sur ce point, voir les travaux de P. VIDAL-NAQUET, repris dans le Chasseur noir. op. cit., et encore, Le Philoctète de Sophocle dans Mythe et tragédie en Grèce ancienne, Paris, 1972, pp. 159-184. 175- DIODORE, IV, 13, 1. 176- F. BROMMER, Vasenlisten zru griechischen lleldensage, Marburg 3e éd. 1973, p. 75 et Denkmiilerlisten zru griechischen Heldensage, l, Herakles. Marburg, 1971, p. 20. 177- DIODORE, IV, 12, 1. 178- APOLLODORE, II, 5, 4. 179- DIODORE, IV, 11,4 et APOLLODORE, II, 5,1. 180- EURIPIDE, Héraclès, 153-154.
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P. VIDAL-NAQUET, Le cru, l'enfant grec et le cuit, Le chasseur noir, op. cit., p. 193. Peut-être est-ce le cas de l'une des représentations figurées sur l'amphore de Madrid (10915; ABV 602 (25) décrite par C. BÉRARD au colloque de Rouen (Héros de tout poil, d'Héraclès imberbe à Tarzan barbu, Image et céramique grecque, Rouen, 1983, pp. 113-114). Héraclès, si tOutefois il s'agit bien du héros, attaque ici à l'épée le sanglier; et c'est encore avec une épée que, sur certains vases, il affronte le lion.de Némée (cf. BEAZLEY, AJA, 1934, p. 90 et F. BROMMER, Va sen listen, pp. 130-132). Cf. G. DUMÉZIL, Mythe et épopée, l, p. 63-65 ; J. LE GOFF et P. VIDAL-NAQUET, Lévi-Strauss en Brocéliande, dans C. Lévi-Strauss, Paris, 1979, pp. 273-275. P. VIDAL-NAQUET, Le Philoctète de Sophocle,loc. cit., pp. 168-170. SOPHOCLE, Philoctète, 955-957. APOLLODORE, II, 5, 3.. Cf. supra, note· 176. La troisième variante de cette représentation de la capture de la biche par Héraclès ne dit rien quant aux moyens utilisés: c'est la dispute de la biche entre Athéna et Apollon une fois l'exploit réalisé. PAUSANIAS a même pu voir à Olympie, dans le monument des Agrigentins, une statue représentant Héraclès tuant à coups de flèches le lion de Némée (V, 25). Cf. APOLLODORE, II, 5, 6; cf. aussi PAUSANIAS VIII, 22, 4. DIODORE, quant à lui, retient simplement la ruse, qu'il dit imaginée par Héraclès: "une sonnette d'airain qui par son bruit étrange et conùnuel" fit fuir les oiseaux (IV, 13,2). Cf. supra, note 182. EURIPIDE, Héraclès, 167-168. EURIPIDE, Héraclès, 169-174. P. VIDAL-NAQUET, L'origine de l'éphébie athénienne, op. cit., p. 169 sq. J.P. VERNANT, Hesùa-Hennès dans Mythe et Pensée chez les Grecs, éd. 1965, p. 135. Sur Hermès, dieu de l'agros, cf. note précédente. Sur les rencontres d'Héraclès et d'Hermès dans le culte, cf. supra, pp. 360 sq.. Sur leur rencontre dans le mythe, voir surtout notre quabième partie. Sans parler même des représentations ambigul5s (telle l'amphore à figures noires de Madrid: 10915 - ABV, 602, 25) qu'il ne nous appartient pas d'analyser ici. Sur ces problèmes du discours iconographique des Grecs voir, par exemple, F. LISSARRAGUE et A. SCHNAPP, Imagerie des Grecs et Grèce des Imagiers, dans Le Temps de la r(f7exion, 2, Paris, 1981, pp. 275-297; P. SCHMITT-PANTEL et F. THÉLAMON, Image et histoire, illustration ou document, Colloque de Rouen, op. cit., pp. 9-20, et, dans les actes du même colloque, l'introduction à la communication de Cl. BÉRARD, Héros de tout poil, d'Héraklès imberbe à Tarzan barbu, pp. 111-118. Du même auteur, Essais sémiotiques, Etudes de lettres,
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Lausanne. 1983.4. 196- ABV 220 (30). Cl. BÉRARD. Iconographie. iconologie. iconologique. Etudes de Lettres. op. cit.• pp. 5-37. 197- PAUSANIAS. Vli. 22.4. 198- DIODORE. IV. 11.3. 199- DIODORE. IV. 11. 3. pour Apollodore (II. 5. 1) il est simplement invulnérable. 200- PAUSANIAS. VI. 5.4-6: Polydamas aurait. à la fin du Vème siècle. tué "un lion de l'Olympe. un fauve grand et vigoureux. sans se servir d'aucune anne. li fut poussé à cet exploit audacieux par l'envie de rivaliser avec les travaux d'Héraclès..." 201- Cf. B. HELLY. Des lions dans l'Olympe. REA. 70.1968. pp. 271-285. 202- Cf. notre première partie. Nous avions la tentation de penser que Melqart l'était aussi (le lion n'est-il pas son attribut favori - lorsqu'il est. il est vrai. représenté en Héraclès - 1). C. BONNET. qui a consacré sa thèse à Melqart, (cf. note 199 de notre première partie) le dénie fermement 203- Nous reviendrons dans notre quatrième partie sur cette image primordiale d'Héraclès. très marquée par l'Orient, et plus volontiers associée aux animaux qu'en lutte contre ces mêmes animaux. Le type chypriote. nous l'avons vu. en conserve fortement le souvenir. de même que de nombreuses représentations de l'Herclé étrusque (cf. J. BAYET. Herclé. op. cit.• pp. 103-123). 204- C'est sans doute sous la première tyrannie de Pisistrate qu'a été sculpté et peint ce fronton: à l'aile gauche Héraclès combat le monstre marin Triton et l'aile droite représente. en réponse, un monstre au triple buste humain et aux corps serpentins enroulés - un monstre triple encore !. 205- DIODORE. IV. 17,1 et 2. 206- S'il faut en croire ARRIEN (Anabase. II. 16. 5). HÉCATÉE faisait de Géryon l'un des trois frères régnant sur la plaine d' Erythie. qu'il situait d'ailleurs dans la région adriatique (cf. O. MUSSO. Hekataios von Milet und der Mythos von Geryones. Rh M, CXIV. 1971. pp. 83-85). Cf notre deuxième partie pp. 222 et note 17. Cf. aussi le lième chapitre de notre IVème partie. 207- G. DUMÉZIL. Horace et les Curiaces. Paris 1942, p. 60 et déjà. du même auteur. Mythes et dieux des Germains. Paris. 1939. pp. 92-106. 208- Id.• p. 60. 209- Id., p. 52. 210- Id., p. 29 et p. 60. 211- Id. p. 60. 212- Cf. S. FERRI. Mostri inferi delle stele daunie. RAL. XXIV. 1969. pp. 133-135. Voir encore C. JOURDAIN-ANNEQUIN. DHA. 8. p. 254 : chez Properce (Elégies. IV. 9. 10). Cacus est un monstre à trois têtes. mais dans la plupart des versions l'élément triple est présent sous différentes formes. Chez Properce (IV. 9.15) la massue frappe trois fois; chez Ovide
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(1,575) elle est dite trinodis; chez Virgile (Enéide, VITI, 230 sq.), trois fois Héraclès parcourt l'Aventin, trois fois il s'évertue à forcer la retraite du fils de Vulcain, trois fois, tombant de fatigue, il doit s'asseoir. Nous négligerons cependant ici parce que peu crédibles les prolongements donnés à cette hypothèse par B. LINCOLN (The Indo-european Cattle raiding Myth, HR, XVI, 1976, pp. 42-61) pour qui la victoire sur le Tricéphale symbolise la victoire des Indo-Européens sur les autochtones. Le jeune initié dans son combat redeviendrait Trito, le héros, le premier guerrier et s'assimilerait "to the entire I.E. onslaught that overthrew aboriginal opponents in every corner". Nous pensons avoir réfuté cette théorie dans notre article des DHA, 8, p. 253 sq. Cf. supra, pp. 58 sq.. G. DUMÉZIL, op. cit., p. 29. HÉSIODE, Théogonie, 287-294. HOMBRE, Iliade, VIII, 362-369, et surtout XIX, 97-133. HOMBRE, Iliade, VIII, 366-369. Dan~ l'Odyssée. c'est encore du chien des Enfers qu'il est question dans un passage - il est vrai d'établissement difficile - de la Nekyia (XI, 620-626) ; Hermès, ici, partage avec Athéna le rôle de guide. HOMBRE, Iliade, V, 395-398 (notons le lieu du combat: Pylos, qui signifie aussi la porte) au milieu des morts. HOMBRE. Iliade. XVIII. 115-118. HOMBRE, Iliade, XI, 602-604 ; le passage il est vrai est douteux. Cf. aussi HÉSIODE, Théogonie, 287-294. Si Orthos peut paraitre comme un doublet du Cerbère des Enfers, O. Gruppe a vu dans Géryon lui-ml'rne un autre Hadès. D'Wle façon gooérale le monstre tricéphale est donné comme le symbole des puissances de la mort: cf. DHA.. 8, p. 251 et note 220 et surtout J.B. CROON, TM Herdsman of the Dead, Utrecht, 1952 qui voit dans Géryon le bouvier des morts. Il nous est difficile d'étudier ici de façon exhaustive les travaux d'Héraclès tels que les connait la forme canonique de la légende et encore moins l'ensemble de ses hauts faits. Nous aimerions, toutefois, signaler l'importance des centaures dans la "carrière" d'Héraclès ou tout simplement dans sa légende (l'épisode de Nessos) ; en effet, leur rôle dans les initiations et leur nature infernale primitive ont bien été mis en valeur par G. DUMÉZIL (Le probUme des centaures, Paris, 1929). Sur ces problèmes, voir supra p. 392 et surtout infra, notre quatrième partie (nIème chapitre: images de la mort et de l'immortalité). Sur ce "symbolisme initiatique des symplégades" : jardin des Hespérides, arbre de vie, seuil, fontaine miraculeuse, ete... voir M. ELIADE, Naissances mystiques, op. cit., pp. 132-136. Sur le symbolisme du ).E:\~&>v d'Erythie et du x;;naç où poussent les pommes d'or offertes à Héra lors de ses noces avec Zeus, voir surtout le très beau livre de A. MOTTE, Prairies et jardins de la Gr~ce antique. de la religion à la philosophie. Bruxelles, 1973 et l'article de G. SOURY, La vie dans
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l'au-delà Prairies et gouffres, REA., 46,1944, pp. 169-178. La quête des pommes d'or appartient toujours à l'ensemble des trois derniers travaux d'Héraclès (avec la lutte contre Géryon et la quête de Cerbà'e, le chien des Enfers) dont elle forme comme le doublet positif. Chez Diodore, (IV, 26, 4) c'est après avoir apporté les pommes à Eurysth6e "qu'ayant ainsi accompli ses travaux, il attendit pour récompense l'immortalité...". Quant à la valeur symbolique de l'épisode, il est difficile de la nier, comme le fait J.O. de G. HANSON (Museum Africum, l, 1972, pp. 1-3) sous prétexte que "l'idée de l'arbre de vie ne vient pas des Grecs, mais des Hébreux" (p. 1) et que les pommes sont généralement liées à la beauté et à l'amour plus qu'à la mort (p. 2). Contra cf. H.J. ROSE, Handboolc of Greelc mythology, London, 1958, p. 216 ; L.R. FARNELL, Greelc Hero Cuits, Oxford 1921, p. 171; G. DUMÉZIL, Le festin d'immortaliti, Paris, 1924, pp. 116-123. Dans certaines représentations de l'apothéose d'Héraclès, le bhos, en effet, rapporte lui-même les pommes devant l'assemblée des dieux, cf., par exemple, deux vases attiques du Vème siècle (FUR1W AENGLER, Rochers Lexicon. col. 2228). Cf. G. DUMÉZIL (Mariages indo-europiens, Paris, 1979, pp. 59-65), qui retrouve dans les mariages ou unions d'Héraclès le parallèle des mariages que l'Inde appelle brahma (Mégara) Asura (Déjanire) ralcsara (Iole) et éventuellement Gandharva (ses multiples aventures). . Cf. G. DUMÉZIL, Heur et malheur du guerrier. Paris 1969, ou Mythe et ipopie, II, Paris, 1971, pp. 117-124: 1). L'hésitation à accomplir les travaux imposés par Zeus, sanctionnée par la folie que lui envoie Héra (manquement à la première fonction) ; 2) la ruse contre Iphitos, infraction au code de l'honneur du guerrier, en réparation de laquelle il doit, pour retrouver la santé, se vendre comme esclave chr.z Omphale: 3) l'installation prévue de Iole dans son propre foyer, "péché" contre la troisième fonction, punie cette fois par la mort. Le schéma lui-même repose essentiellement sur le texte de Diodore. Chez Apollodore, par exemple, la folie envoyée par Héra n'est en rien la punition d'une désobéissance aux ordres de Zeus: les "travaux" n'ont pas encore été imposés à Héraclès. APOLLODORE, II,4, 9-10. APOLLODORE, II, 4, 11. APOLLODORE, II, 4, 10. APOLLODORE, II, 4, 11. DIODORE, IV, 11,3 à 13, 4. DIODORE, IV, 14,3 à 27, 4. DIODORE, IV, 14, 1 et 2. DIODORE, IV, 15, 1 et 2. DIODORE, IV, 14,3. Nous noterons simplement ici le décalage - probablement révélateur - entre
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une "panoplie" qui pourrait appartenir à l'hoplite et les armes qui furent celles de l'Héraclès des "travaux" : l'arc et la massue. A. VAN GENNEP, op. cit., p. 116 sq. et par exemple, pour les So de l'Ouganda, M. GODELIER, L'Homme, XVIII, 1978, pp. 155-188 et particulièrement pp. 178-179. Pour la Grèce, cf. supra p. 382 et surtout note 142; on se souviendra, à Thasos, encore, des rapports que 'paraissent entretenir Héraclès et une Artémis "pôlôs ", protectrice de la jeunesse. voir pp. 376 sq. et notes 126 et 127. APOLLODORE, Bibliothèque, II,4 (pour lui c'est à Delphes qu'il est pour la première fois appelé Héraclès après le meurtre de ses enfants sanctionné par l'exil). Pour DIODORE (IV, 10, 1) ce sont les Argiens qui le nommèrent ainsi. Cf. supra, p. 62 et note 256 du prologue. DIODORE, IV, 14, 3. Cf. E. CLAVIER, Apollodore. Bibliothèque, Paris 1805 (un manteau) p. 167; HOEFFER, Diodore de Sicile. Bibliothèque historique, Paris, 1865 (un voile) p. 281. N. LORAUX, Héraklès: le surmâle et le féminin, Revue française de Psychanalyse, 4, 1982, pp. 697-729, citation p. 711. P. 702 par exemple (la misogynie d'Héraclès prouvée par l'exclusion des femmes dans son culte) et surtout p. 713 (le vêtement long du prêtre d'Héraclès à Cos, de l'Hercule Victor à Rome et des prêtres qui célèbrent son culte). Dans ces particularités on ne peut pas, en effet, depuis la démonstration qu'en a faite D. VAN BERCHEM (Hercule Melqart à l'Ara Maxima, RPAA, XXXII, 1950-1960, pp. 61-68 et Syria, XLIV, 1967, pp. 73-109 et 307-338), ne pas voir. l'influence des cultes du dieu phénicien Melqart sur ceux du héros grec auquel il fut assimilé. Tout au plus pourrait-on admettre que certains aspects "féminins" d'Héraclès ont pu, sur ce point, favoriser la rencontre, mais il paraît y avoir tant d'autres raisons au syncrétisme ! (On se reportera à notre première partie). N. LORAUX, loc. cit., p. 703. SOPHOCLE, Trachiniennes, 1074: "Sous pnreil coup, je me découvre, malheureux, une simple femelle". Cf. N. LORAUX, loc. cit., et surtout: Le lit, la guerre, dans l'Homme, 1981, XXI, l, pp. 37-67 (sur Héraclès, p. 57-67). N. LORAUX, loc. cit., (1982), p. 706. N. LORAUX, loc. cit., (1981), p. 66. N. LORAUX, loc. cit., (1982), p. 699. APOLLODORE, III, 5, 1. DIODORE DE SICILE, V, 49, 1. (Déméter apporte le blé, Hermès la lyre, Electre, la mère d'Harmonie, apporte les cymbales et les tympanons des orgies avec lesquels on célèbre les mystères de la Grande Mère des dieux et Athéna, outre le péplos, offre les flûtes et "SOIl fameux collier". Peut-être faut-il signaler encore que, selon Diodore, toujours, Athéna passe pour avoir
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enseigné la fabrication des vêtements et les flûtes, parmi d'autres spécialités d'ailleurs qui expliquent l'épithète d'Erganè sous laquelle on la vénère. De telles "renaissances" sont ainsi biologiquement figurées dans les sociétés traditionnelles: qu'on se souvienne de l'exemple Senoufo. Cf supra p.38l sq... Plus précisément l'allaitement est un rite d'initiation (et d'ailleurs de résurrection) des Hindous brahmaniques, d'origine ind~européenne (A. van Gennep, op. cit., p. 149). PAUSANIAS, IX, 25, 2. . DIODORE DE SICILE, IV, 9,6 et 7. Il est vrai qu'à la lecture de Diodore, il pourrait apparaître que l'épisode se situe avant le départ à Thèbes d'Amphitryon et de sa famille. Ainsi qu'en témoignent plusieurs miroirs gravés (GERHARD, Etr. Sp. V, pl. 60 ; pl. 126 et suppl. pl. 59). Le premier surtout nous intéresse, qui intègre la scène de l'allaitement (Hecele et Uni sont entourés de plusieurs divinités et une inscription précise que "cette image montre comment Hecele ,en tant que ms d'Uni, but") dans une organisation générale qui présente les trois stades de la vie (Florence, Museo Archeologico Etrusco, inv. 72740; cf. J. BAYET, Herclé, op. cit. p. 150 et pl. IV; AJ. PFIFFIG, Herakles in der Bilderwelt der etruskischen Spiegel, 1980, 19 et en dernier lieu la thèse que A.F. LAURENS a consacrée à Hébé (à paraître) nO 141 et pp. 393-396 de l'exemplaire dactylographié. LYCOPHRON,Alexandra,39. Cf. supra notes 255 et 256. Ce vase (fig. 22) conservé au British Museum (inv. F. 107) est étudié par A.F. LAURENS (op. cit., n° 139) qui, aux côtés d'Héra, reconnaît Athéna, Iris et Hébé. Pour le développement du thème de l'allaitement en Etrurie et à Rome, voir G. MINERVINI, Il mito di Ercole che succhia il latte di Giunone, 1854. Cf. C. PÉLÉKIDIS, op. cit., chap. IV, particulièrement pp. 51-70. A Sparte l'Hébé semble bien avoir été l'année de candidature à l'irénat (H. JEANMAIRE, op. cit., p. 506). Il paraît en tout cas significatif que l'une des premières (peut-être même la première) représentation de l'apothéose d'Héraclès (hydrie 253 du cabinet des Médailles, Paris: ABV pp. 104-127) montre le quadrige du héros accueilli par Héra et Hébé. Athéna, quant à elle, s'apprête à couronner le héros, suivi de son fidèle compagnon Iolaos. (Cf. communication sur Hébé au séminaire de P. Uvêque faite à Besançon le 12/1/1984 par A. F. LAURENS). Quant au mariage d'Héraclès et d'Hébé, on le trouve déjà représenté sur un cratère de style orientalisant, provenant des fouilles de Samos et datant du VIIème siècle. (cf. A.F. LAURENS, op. cit., p. 505 et nO 180, inédit). EURIPIDE, Héraclès, 613. DIODORE, IV, 24, 1; APOLLODORE, II, 5, 12. Cf. encore LYCOPHRON (1328) qui donne à Héraclès le titre de "myste"; cf, aussi Scholie à Lycophron, 1328. P. LEVEQUE (Structures imaginaires et fonctionnement des mystères grecs, Studi storico religiosi, VI, 1-2, 1982,
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pp. 185-208 et particulièrement p. 203) note encore "qu'à cette tradition fait écho l'auteur sans doute tardif de l'Axiochos (371e) pour qui "l'ardeur de leur expédition dans l'Hadès (il s'agit d'Héraclès et de Dionysos), c'est la déesse d'Eleusis qui l'a exaltée en eux". Sur ce problème voir encore M. LLOYD-JONES, Heraldes at Eleusis, Maia, 1967, p. 206 sq. et, pour les représentations, H. MEUGER, Recherches SUT l'imagerie athénienne, p. 28, n. 65. Notons enfin que, pour DIODORE, les Petits Mystères d'Agrai ont été crées "pour honorer Héraclès" et pour qu'il puisse expier le meurtre des Centaures (IV, 14,3). R. GIRARD, La Violence et le Sacré, Paris, 1972, p. 391. C'est pourquoi, sans prendre position sur l'exemple précis d'Eleusis, la théorie - parfois contestée - de D. SABBATTUCCI qui voit dans les mystères le dépassement et la transformation d'initiations primitives me paraît, sur le plan théorique, très plausible (Essai sur le mysticisme grec, traduction, française, Paris, 1982, lère,éd. 1965). Nous nous référons encore à l'article de N. LORAUX, loc, cit., (1982) p. 272.
QUATRIÈME PARTIE HÉRITAGES
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"...L'angoisse de durer personnellement qui...pose l'individualité est liée à l'intégration de l'existence dans le monde des choses. Autrement dit, le travail et la peur de mourir sont solidaires, le premier implique la chose et vice-versa".
Georges Bataille, qui lie ainsi le travail et la peur de mourir (1), qui d'autre part associe le sacrifice au travail aussi bien qu'à la mort, donne un sens à l'enchaînement de ces "images" qu'au terme de notre étude nous chercherons à retrouver dans le mythe d'Héraclès, comme autant d'héritages des temps anciens, d'un "avant" de la Cité. S'il nous importe d'éclairer le sens qu'ont pu donner les Grecs aux "travaux" d'Héraclès, s'il nous apparaît que le sacrifice représente, dans le destin du héros, un élément d'importance; si, à chaque détour de son histoire, surgit l'image de la mort au point qu'elle offre le plan d'isotopie le plus signifiant du mythe, ce ne serait pas simplement comme autant d'éléments à partir desquels aurait pu se constituer une légende: celle du fils d'Alcmène, bâtard de Zeus... Ce pourrait être de surcroît, parce que ces "proto-images", qui pour Jean Dournes forment l'amont du mythe (2), procèdent aussi, dans leurs rapports entre elles, d'une certaine logique et, pourquoi pas, dessinent comme les contours de ce que pourrait être un Héraclès primitif.
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PREMIER CHAPITRE: IMAGES DU TRAVAIL Il pourra sembler paradoxal, que, dans le cadre d'une étude sur les exploits occidentaux d'Héraclès, nous nous interrogions et, qui plus est, assez longuement - sur les rapports qu'entretient - peut-être - le héros grec avec le travail. Rien de plus éloigné, en effet, de l'activité productrice que les derniers "travaux" d'Héraclès, ceux qui justement nous préoccupent; et le cycle péloponnésien, pourtant plus proche peut-être de ce qu'il est convenu d'appeler: le travail, pose lui-même, à ce titre, problème. Et pourtant.... Héraclès ne fut-il pas, comme le dit Sophocle, "toujours au service d'un autre" (3) ? ne subit-il pas la condition du Latris ? et même du douLos ? Et lorsqu'Homère rapporte ces "travaux d'Eurysthée" auxquels, pour son malheur, fut astreint le héros, il n'en cite qu'un: la capture du chien des Enfers, Cerbère... un exploit dont le sens est procheprécisément - de ceux que nous étudions. Héraclès et le travail ? Non, décidément, le rapprochement n'est pas arbitraire: lorsqu'au IVème siècle Avianus propose à ses lecteurs une version ancienne de notre "aide-toi, le ciel t'aidera", c'est au "protecteur de Tirynthe" que fait appel le paysan dont le chariot et les boeufs sont enfoncés dans un bourbier... C'est lui qui, du haut du ciel, lui enjoint de faire d'abord l'effort nécessaire et lui promet que les dieux viendront à son aide, mais seulement lorsqu'il aura épuisé "toutes les ressources de ses forces" (4). On peut certes souligner le rôle des Cyniques dans cette promotion d'un dieu secourable et lui-même garant d'une vie droite et d'un labeur acharné (5)... Ce serait oublier que Prodicos, avant eux, plaçait le héros "à la croisée des chemins" et déjà lui proposait le choix qui devait fortement contribuer à tirer le mythe vers la leçon de morale; ce serait oublier, surtout, qu'Avianus s'inspire, pour l'essentiel, d'Esope, et que, chez le fabuliste grec, c'est déjà la protection d'Héraclès que réclame le bouvier immobilisé (6). Notre interrogation est donc légitime, qui cherche à préciser les rapports qu'en Grèce même, le héros du ponos entretient avec une notion qui, avant même qu'elle ne se projette sur le plan mythique, était déjà une pesante réalité humaine.
428 1 • LE TRAVAIL: DES MOTS POUR LE DIRE
"Le travail semble être une catégorie toute simple. La représentation du travail dans cette universalité - comme travail en général - est, elle aussi, des plus anciennes. Cependant, conçu du point de vue économique sous cette fonne simple, le "travail" est une catégorie tout aussi moderne que les rapports qui engendrent cette abstraction simple". K. Marx, en 1857, utilisait cel' exemple du travail pour montrer "que même les catégories les plus abstraites... n'en sont pas moins le prcxluit de rapports historiques" (7) et l'historien de l'Antiquité peut encore, je crois, reprendre à son compte cette mise en garde. Elle traduit bien son embarras face à cette réalité d'apparence si familière et cependant si fuyante que, dans son domaine propre, constitue le travail. Réalité fuyante, parce que complexe: "il y a une histoire technique, économique, sociale, psychologique du travail", écrivait J.-P. Vernant (8), et il est bien vrai que sont mises en jeu, dans cette activité, les dimensions multiples de l'expérience humaine. Réalité fuyante, parce que lointaine, aussi: le travail, produit des conditions historiques, est difficile à "penser" autrement qu'avec nos propres concepts, qui sont, bien sûr, le produit de circonstances et de rapports sociaux fondamentalement différents. Ainsi, dans ce destin d'Héraclès que nous avons choisi pour thème, entre ces "gémissants travaux" qui, dans l'épopée et chez Hésiode encore, en font "le plus malheureux des hommes" et le choix glorieux du héros de Xénophon qui repousse la mollesse et le plaisir pour se vouer à une existence placée toute entière sous le signe du ponos, comment espérons-nous retrouver l'évolution d'une idée... je n'ose dire d'un mot (9), puisque, nous l'avons appris, "le grec ne connaît pas de tenne correspondant à celui du travail" (1O)? Pourquoi, de surcroît, tenter pareille étude à propos de ce héros, s'il est vrai que, comme on nous l'a dit et répété: "Héraclès n'est pas un travailleur" (11) ? Comment, enfin - gageure tout aussi risquée - aborder le problème par le biais de ce prisme défonnant qu'est le mythe? L'entreprise est périlleuse, nous le savons bien, et l'idée ne nous effleurera pas de rechercher dans Héraclès un quelconque paradigme du travail humain. C'est pourtant de l'expérience humaine qu'est fait le mythe, même s'il est loin d'en être un simple reflet (12) ; comme le travail, pourrait-on dire, il est un "fait social total" (13). Et puis, ce changement dans la conception
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d'un héros qui, après avoir des siècles durant peiné pour les autres, été Latris et même douJos, choisit de son plein gré la voie de l'effort, ne peut être simple fantaisie. Même à l'échelle grecque, le travail a une histoire et c'est cette histoire que nous tenterons de retrouver. Dans cet "entrelacement des temps" dont parle Althusser, le mythe semble appartenir au temps qui ne passe guère. Pourtant, comme tout ce qui tient à l'histoire sociale de l'homme, il évolue, lui aussi, et porte témoignage. C'est précisément ce témoignage que nous voudrions évoquer, et, puisqu'effectivement nous nous heurtons, dès l'abord, à cette absence troublante "d'un terme à la fois spécifique et général" (14) pour désigner le travail en Grèce, c'est à ce problème du vocabulaire que, dans un premier temps, nous nous affronterons.
1-1 Nous irons vite, d'ailleurs, en ce domaine déjà très largement défriché, tant sur le plan général par A. Aymard, et surtout par J.-P. Vernant (15) que sur ce terrain héracléen où, une fois encore, notre recherche rencontre celle de N. Loraux (16). Que le travail n'apparaisse pas, en Grèce, "comme une grande fonction sociale, comme type d'une activité humaine spécifique" (17) est incontestable... Que les différentes activités qui, à nos yeux, le constituent, paraissent éclater en "une pluralité de métiers différents" (18) et procéder de conduites multiples, voire opposées, ne l'est pas moins, et J.-P. Vernant, exploitant la différence établie par Marx dans La Contribution à La critique de l'Economie politique, entre le travail créateur de la valeur d'échange et le travail créateur de la valeur d'usage, a bien montré comment, en l'absence d'une circulation générale des produits, le travail - faute de prendre forme, lui aussi, d'un échange généralisé - ne peut être saisi dans son unité abstraite comme le fondement des rapports sociaux. De cette atomisation, le vocabulaire lui paraît être le fidèle reflet et il cherche en vain, entre des termes trop généraux qui, comme ponos, désignent toute activité requérant un effort pénible et d'autres qui, comme erga ou technè , paraissent restreindre à un domaine particulier le procès de production, le terme que nous pourrions, sans ambiguïté aucune, traduire en français par travail. Sans prétendre faire d'Héraclès le héros du travail, on peut être tenté, puisqu'il est, à son sujet, beaucoup question d'efforts, de "travaux", de rechercher, dans les tennes qui furent appliqués à ses exploits, le moyen de mieux cerner, peut-être, les représentions ambiguës de ce que fut, pour les Grecs, le travail, de mieux comprendre, surtout, ce que représentèrent pour eux ces
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"actions" qui sont la raison même d'exister du héros. Il est significatif, par exemple, que N. Loraux, dans une étude consacrée à ponos (Sur quelques difficultés de la peine comme nom du travail) (19) ait pu lire, dans l'utilisation de la notion de ponos, appliquée par Sophocle au mythe d'Héraclès, la preuve même de cette ambiguïté: "dans le Philoctète, ponos' est ce qui a valu au héros l'immortalité de la valeur (athanatos arétè); dans les Trachiniennes, ponos dit aussi bien les exploits que la servitude et le corps meurtri" (20). Nous ne reprendrons pas, ici, une analyse si bien conduite. Les Tragiques (et c'est vrai d'Euripide comme de Sophocle) ont volontiers choisi ponos pour exprimer les efforts aussi douloureux qu'hors du commun d'Héraclès (21)... Ponos que P. Chantraine traduit ainsi: "dur effort. peine. travail. lutte. souffrance physique" (22). autant de termes qui. d'ailleurs. disent avec bonheur ce que furent les exploits du héros.•. Ponos qui. très souvent. se trouve remplacé par mochthos. dans l'Héraclès d'Euripide. par exemple (23). avec un sens analogue. avec la même insistance portée sur la peine. sur la souffrance du héros. C'est en effet la nuance qui paraît alors marquer ponos comme tous les mots de la même famille dont le vocalisme est en 0 (le vocalisme e. introduisant plutôt le sens d'indigence. de pauvreté). Encore conviendrait-il de ne pas oublier que le verbe de référence. quant à lui. nÉv0J.Lat insiste plutôt sur l'idée de travail (24). et il semble bien qu'entre les deux sphères sémantiques. celle du travail et celle de la douleur, auxquelles - il n'est que.de lire la définition de Pierre Chantraine - on rattache indifféremment ponos. la seconde, à laquelle semblent l'associer certains emplois post-homériques, ne soit d'abord qu'occasionnelle. C'est ce qu'il est permis de conclure d'une pénétrante étude du Vocabulaire homérique de la douleur, à laquelle s'est livrée Francine Mawet (25) : la notion de "souffrance" qui transparaît dans quelques contextes, écrit-elle au terme de son analyse des mots de la famille de ponos , "peut être considérée comme un corollaire naturel de celle de "travail". Rien n'indique donc un rapport sémantique fonctionnel avec les expressions de la "douleur". Les seules relations pouvant exister résultent de la nature des choses et non d'un caractère linguistique"(26). Dans les poèmes homériques. si ponos est souvent utilisé (une centaine d'occurrences environ situées essentiellement dans l'Iliade ). c'est généralement dans un contexte guerrier, ce qui n'affaiblit en rien les conclusions ci-dessus, la notion de labeur étant, dans ce cas, "particulièrement évidente" et ponos apparaissant justement "comme une désignation propre du
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"combat", du "travail du guerrier" (27). Les autres emplois dans le cadre de vers formulaires en particulier - l'associent à la préparation des repas, et lorsqu'apparaît la connotation de "souffrance", c'est dans quelques syntagmes précis (n6vot' et blt6t' ) qui désignent plutôt la misère, le sort lamentable; ou n6vot' et JCTjBot' chaque fois employés dans un contexte guerrier, par exemple (28). OoviOILŒl de même - et ce dans des contextes plus variés: combats encore, tâches ménagères toujours, mais aussi activités manuelles comme le travail du forgeron, le gréement d'un navire, la fabrication d'une charrue (ceci chez Hésiode) (29)... - exprime essentiellement l'idée de travail, de labeur. Et comme pour pOlIOS, le seul indice d'une notion de souffrance qu'ait relevé Francine Mawet "associe le labeur humain aux misères de la destinée" (30). Quant à nivoILŒ1, il est plus limité encore au champ de la préparation des repas (11 sur 18 occurrences), aux travaux ménagers, et d'une façon plus générale cette fois, aux travaux, aux affaires des hommes (31). Or - et cela mérite d'être souligné pour prendre la mesure de la conception "homérique" d'Héraclès - lorsque les tennes de la famille de pO nos sont ainsi utilisés - dans un contexte masculin, c'est-à-dire, pour l'essentiel, guerrier - ils ne sont jamais appliqués au fils d'Alcmène. Pourtant c'est bien cette image du "labeur... associé aux misères de la destinée" que l'Iliade comme l'Odyssée, donnent du héros... Seul manque, justement, le contexte guerrier, et si les termes sont autres, c'est sans doute parce qu'ils connotent de façon plus précise encore nous y reviendrons - la servitude. Les "travaux" d'Héraclès désignés comme ponoi (ou mochthoi ) apparaissent, en tout état de cause, comme étroitement liés à l'époque classique (32). Encore faut-il, je crois, préciser que nos références proviennent essentiellement du théâtre grec, cela conformément à une tendance générale qui fait préférer ergon àponos par les historiens du Vème siècle! (33). C'est donc, assez précisément, à la conception tragique du héros que renvoient les références relevées par Nicole Loraux. Dans cette hésitation permanente entre la grandeur et la souffrance, entre la gloire et l'effort, dans cette tension qui tient à la nature héroïque elle-même, mais convient si bien au genre tragique, le ponos (ou mochthos ) est ce qui fait d'Héraclès un homme, ou du moins une image possible de l'homme, avant que l'excès même de ses souffrances ne l'ait conduit à l'immortalité. La comparaison avec Pindare est intéressante, qui, pour chanter la condition des humains "soumis à tant d'épreuves" (ici c'est ponos
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qui est utilisé: no).un6v(,)v avBpë;)v), choisit de retracer les "hauts faits" d'Héraclès (xopuqlaï", bptTŒV ~tyb).a\",), exalte, par conséquent, ce qui grandit le héros... un choix confonne, bien sûr, à la conception aristocratique qui est sienne (34). 1-2 Si l'utilisation de ponos a pu nous paraître comme étroitement liée à la conception tragique du héros, il est, en revanche, un tenne qui, par delà les siècles, désigne de façon si courante les travaux d'Héraclès qu'il finit par s'identifier presque complètement avec eux, c'est le substantif ath/os. Dans l'épopée, chez Hésiode et chez Pindare encore, il est donné sous sa fonne ancienne, non contracte: aeth/os;·à l'époque classique - chez les Tragiques par exemple - il continue d'être employé, mais sous sa ·fonne attique, contracte; à l'époque hellénistique et romaine, il finit, dans les mythologies de Diodore de Sicile ou d'Apollodore, par exemple, par dire, à lui tout seul, les "travaux" (35). Or, que signifie ath/os ? épreuve, certes, et en ce sens ponos et ath/os se rejoignent, mais avec, dans ce dernier cas, un sens nettement affinné de "lutte", "combat". Le glissement vers "jeux", "concours" semble avoir été facile, comme en témoigne l'équivalence fréquemment admise avec agôn ... (36). Une équivalence qui, toutefois, n'apparaît que rarement lorsqu'il s'agit des travaux d'Héraclès (37). Il serait, bien sûr, du plus haut intérêt - puisque c'est par ce tenne que, dans nos sources les plus anciennes, sont désignés les exploits d'Héraclès - d'en connaître l'étymologie. Elle n'est malheureusement pas établie, déplore P. Chantraine, pas plus que le sens originel n'est assuré (38). Ou bien, en effet, aeth/os a d'abord signifié "épreuve, concours" - ce que semble admettre l'auteur - ou bien l'on accepte, avec H. Trümpy, un sens originel qui serait proche de /abor, de la peine que l'on se donne... un sens qui - peut-être est-ce à mettre à l'actif de cette interprétation ? - offrirait des points de comparaison avec le sanscrit et le vieux slave (39). Il nous a paru intéressant, à ce titre, de reprendre les exemples homériques appliqués à Héraclès. Dans l'Iliade, de façon presque constante, les exploits du héros sont dits: EupuCJ9~ 51:9).0\ (40), ils sont donc donnés, avec insistance, comme travaux imposés et, si dans l'un des passages consacrés au fils d'Alcmène, l'accent est mis, justement, sur l'ordre donné (41), les autres caractérisent les épreuves: "d'ignominieux
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travaux" dans un cas (ergon aeikes) (42). des efforts qui laissent "à bout de souffle" dans l'autre (43). Même impression dans l'Odyssée. avec plus d'insistance encore pour dire "cette vie misérable" (xaxàc' 1L6pot"). ces misères sans bornes (bïCut" anf:lpécna). ces travaux pénibles (Xalenol aé8101) imposés par "le pire des humains" (44). Nous sommes bien loin. on le voit. de l'exploit athlétique! C'est l'effort. la peine. la souffrance qui s'imposent et l'accent. loin d'être porté sur la gloire du héros. l'est sur l'ignominie qui fut son lot. Le paradoxe est même. dans l'Odyssée. souligné par Héraclès lui-même. qui. à tant de misères. oppose son illustre généalogie: fils de Zeus. petit-fils de Cronos! (45). Reconnaissons-le. lorsqu'on abandonne un instant les aventures d'Héraclès. les choses sont loin d'être aussi claires. Si Ménélas. recevant Télémaque. parle. dans l'Odyssée. des "épreuves" que. pour lui. dut affronter Ulysse. c'est en un sens qui peut paraître fort voisin (46). Mais d'autres occurrences homériques d'athlos rendent? il faut bien le reconnaître. un son différent: de l"exploit manifestement guerrier. dans l'Iliade (47). à l'épreuve de l'arc qui. dans l'Odyssée. permettra au roi d'Ithaque de prouver sa qualité (48). Mais alors. peut-on dire que. lorsque le terme désigne autre chose que "des épreuves en forme de concours ou de jeux" les exemples s'en trouvent "soit dans l'Odyssée soit dans les parties récentes de l'Iliade" (49) ? L'ambiguïté du terme concerne. me semble-t-il.les deux oeuvres et il peut paraître raisonnable d'admettre. avec les auteurs du Lexikon desfrühgriechischen Epos • que la peine et la souffrance sont. dès les premières mentions que nous en connaissions. partie intégrante de la notion d'athlos (50). En ce qui concerne Héraclès. et c'est cela surtout qui nous préoccupe. il est évident que l'aspect agonistique est tout à fait second et que dans les poèmes homériques. les occurrences d'aethlos • à son sujet. servent essentiellement à dire sa vie pénible ou douloureuse... Elles font de lui "le malheureux" dont se souviendra longtemps la tradition grecque (51). Hésiode. par exemple. dit encore les "gémissants travaux" du héros: un héros pourtant robuste et vaillant (52) ; un héros qui. "sa grande tâche accomplie. habite chez les Immortels. soustrait au malheur et à la vieillesse pour les siècles à venir" (53). Pour la première fois s'exprime - et sur un autre plan désormais que celui de la généalogie - le paradoxe du héros: la misère d'une vie et la grandeur d'un destin. Dans ce court passage que de choses sont dites! Les exploits d'Héraclès sont. dans une même phrase. stonoentas aethlous. "gémissants
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travaux", et, une fois accomplis, mega ergon, "une grande tâche"... celle qui - mais peut-être est-ce trop solliciter le sens du texte? - lui donnera droit, par son mariage avec Hébé, à l'immortalité (54); celle qui, également, le soustrait défmitivement à la souffrance. Chez Pindare, en tout cas, aucun doute n'est plus pèrmis. Ce sont les durs labeurs du héros (kamatoi mega/oi ) qui lui donnent accès à la félicité sans fin et, si l'expression de "demeure des Bienheureux" peut, quant à elle, prêter à confusion, Héraclès vit, dit le poète, auprès de Zeus le Cronide, ce qui lève tous les doutes (55). L'idée d'une immortalité conquise est ici affmnée et elle apparaît comme une "récompense" ou plutôt, dirons-nous, comme une compensation (poinè, en effet, induit assez fréquemment l'idée d'une réparation), idée très compatible, me semble-t-il, avec la volonté manifeste qui est celle de Pindare de grandir le héros. Soumis à de tels travaux, aussi indignes de lui, c'est bien une compensation, une réparation que mérite Héraclès. Comment mieux concilier la tradition reçue qui fait de lui un "travailleur" et la conception aristocratique que développe Pindare? Quant à l'Hymne homérique, que nul ne se risque à dater, il donne le même raccourci de la "carrière" d'Héraclès; il chante la vaillance du fils de Zeus,"le plus grand - et de beaucoup - parmi les hommes de la terre", ses travaux hors de pair (~oxa lpya), ses souffrances surtout, "sur la terre et la mer immenses"... Il chante enfin l'immortalité aux côtés d'Hébé "aux belles chevilles" "sur l'Olympe neigeux" (56). Même schéma donc, mais différence capitale: alors que, chez Hésiode, l'immortalité est en puissance, et qu'elle se réalise, pour Pindare, dans l'effort de la tâche accomplie, l'hymne oppose nettement l'homme à ce destin d'immortel, qui, finalement devait être le sien; et cela, sans qu'apparaisse aucun lien de cause à effet entre les travaux et la commensalité avec les dieux. Faut-il alors refuser de voir, dans cette immortalité, l'ath/on, le "prix" de ses travaux (57) (au sens où, bien sûr, on parle du prix obtenu dans un concours, puisque dans ce terme s'exprime - sans ambiguïté cette fois - l'aspect agonistique de cette famille sémantique) ? Faut-il, au contraire, tenter d'en tirer des conclusions sur la date - relativement tardive - de l'hymne à Héraclès? Nous laisserons pour l'instant ce problème pour revenir au vocabulaire des travaux et étudier, après ponos et ath/os, le terme ergon assez fréquemment utilisé lui aussi pour qualifier la "grande tâche" du héros.
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1-3 Dans l'Hymne homérique en effet, les exploits d'Héraclès sont dits ~oxa lpya (58) et l'on peut être surpris de trouver, dans ce contexte, un terme dont on a souvent souligné la signification spécifique: travail, certes, mais appliqué à deux secteurs bien paniculiers de la vie économique, l'agriculture et l'activité bancaire, souligne-t-on généralement, à moins qu'on ne reconnaisse à lpyov (toujours au singulier dans ce cas ?) une valeur plus générale, mais bien définie encore "pour chaque chose ou chaque être, le produit de sa vertu propre, de son arétt" (59). On pourrait penser qu'une telle définition convient particulièrement bien à Héraclès: elle convient bien, par exemple, au texte d'Hésiode, à cette grande tâche (mega ergon ), qui, dans la Théogonie, ouvre l'immortalité au héros (60)... Au pluriel dans l'Hymne homérique, elle pose déjà plus de problèmes (même si l'on fait abstraction de la chronologie incertaine du texte). Mais c'est chez Homère que se trouve vraiment la difficulté, lorsque, dans l'Iliade, l'ergon d'Héraclès est qualifié d'ignominieux (61)... li est, dans ce cas, difficile de ne pas traduire par tâche, travail. C'est d'ailleurs, me semble-t-il, ce qui apparaît au terme de l'étude que consacre P. Chantraine. dans son Dictionnaire étymologique, à l'évolution sémantique d'lpyov, de ses antécédents mycéniens à ses dérivés et à ses composés (62). N'a-t-on pas mis quelque excès à chasser toute notion de travail du vocabulaire grec ? C'est à cette même interrogation que me conduit la mention du terme, beaucoup plus rarement utilisé et, semble-t-il, essentiellement poétique, par lequel, dans la Premitre Néméenne, Pindare désigne les travaux d'Héraclès; le nom kamatos (63). Kamatos, qui chez Homère désigne à la fois le travail et l'effort. mais aussi la peine et la fatigue (64) (plus tard il signifiera souvent souffrance, maladie), rappelle, bien sûr, le mycénien kama connu par les tablettes de Pylos. Ce terme, appliqué à un mode d'exploitation de la terre, reste assez mystérieux, mais il paraît à tout le moins manifeste que les détenteurs de telles tenures, les Kamaewe constituent des éléments particulièrement importants de la force de travail dans l'agriculture pylienne (65). Même si la continuité du terme mycénien et du verbe grec est difficile à prouver (66), c'est toujours, dans ce dernier, la même notion de travail, d'effort et par conséquent de peine qui s'exprime. C'est ainsi à une double interrogation que conduit cette étude du vocabulaire par lequel les Grecs désignaient les travaux
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d'Héraclès. 1) Pour les contemporains d'Homère, et disons-le, jusqu'à Pindare qui fit beaucoup pour transformer l'image du héros, qu'ont véritablement représenté les efforts douloureux - voire humiliants - d'Héraclès? A-t-on raison de tant affirmer que pour eux du moins - "Héraclès n'est pas un travailleur" ? (67) 2) Et s'il en est ainsi d'un héros dont l'action, de par sa nature même, échappe à la commune mesure, qu'en est-il de la règle générale? Le travail était-il en Grèce aussi difficile à "dire" qu'on l'a prétendu? Le mot ergon nous a paru, à cet égard, recouvrir un ensemble de notions à la fois plus variées et plus générales que celles dans lesquelles l'avait cantonné J.-P. Vernant et il nous plaît de constater que ces conclusions - fort partielles, étant donné l'objet même de notre étude - rejoignent celles d'études récentes consacrées à l'ensemble du problème. Ainsi, dans un article suscité par le livre d'Alfonso Mele, sur le commerce dans la Grèce archaïque, Benedetto Bravo tend, lui aussi, à réévaluer le concept de travail en Grèce, et cela, précisément autour du terme erg on, qui, dit-il, "unifie un ensemble d'activités fort disparates". C'est, écrit-il encore, "l'union de la notion d'acquisition de biens et celles de l'effort prolongé et pénible" qui fonde cette notion. Pour les Grecs, était donc ergon "toutponos (tout effort prolongé et pénible) visant à l'acquisition de chrémata (de biens matériels) de toutes sortes, soit pour l'agent lui-même, soit pour autrui (pour le maître et l'employeur)" (68). Peut-être est-ce aller un peu loin: la réalité archaïque paraît plus nuancée et plus riche, on s'en convaincra en lisant les études que, dans sa thèse, Raymond Descat consacre au groupe lexical d'ergon dans les poèmes homériques (69) et dans l'oeuvre d'Hésiode... (70) C'est tout un ensemble de relations sociales autour de l'oikos qu'exprime le code d'ergon (71) ... des relations que la lecture du Linéaire B a d'ailleurs permis de mieux comprendre en enrichissant la connaissance des formes verbales de même famille : l'activité productrice, le service public, l'obligation religieuse... (72). Ces liens que tissent entre eux les mots du groupe d'ergon ne nous étonnent guère et expliquent aisément la polysémie du tenne. Notions complexes certes, dans la mesure où conduite économique, conduite religieuse et sociale se sont longtemps confondues... Mais de cette complexité, on aurait tort de déduire qu'il n'est pas possible, en Grèce, de parler du travail. Le nom existait, qui, le cas échéant, pouvait aussi dire l'activité productrice.
437 1-4 L'autre pôle de notre recherche nous conduira vers l'Héraclès des mythographes, et, par commodi~, nous tenterons de lire ce vocabulaire du travail chez le seul Apollodore, ce qui nous permettra un examen plus exhaustif (73) sans pour cela - de nombreux recoupements avec l'oeuvre de Diodore, par exemple, nous l'ont prouvé - que nos conclusions en soient faus~es. L'importance accordée dans la BibliotMque à notre héros est en effet considérable: 113 occurrences, alors que Zeus - la seule divinité qui, par le nombre de citations, le dépasse, en totalise 156. Les autres dieux arrivent assez loin derrière (Poséidon avec 75, etc), les héros plus loin encore (21 occurrences pour Persée, 15 seulement pour Thésée à qui on pourrait être tenté de le comparer, 7 pour Oedipe... ete). Que cette forte présence soit due, en partie, à son rôle de puissant géniteur, cela n'étonnera guère dans un exposé mythologique dont la structure est très nettement généalogique. Mais Héraclès retient aussi pour ses hauts faits et Apollodore, au sein du livre n qui expose la progéniture d'Inachos, consacre un très long excursus aux exploits du héros, parmi lesquels ses fameux "travaux" (74). Nous avons cherché à interroger le texte dans son ensemble pour y retrouver le vocabulaire jusque là utilisé. pour dire le travail; les résultats sont clairs : plus aucune mention de ponos, pas trace non plus de mochthos qui, à l'époque classique, pennutait si souvent avec ponos . Aucune mention enfin d'ergon (ou erga ) : seul le verbe ergazomai apparaît une fois, dans l'épisode bien connu de la fabrication de la lyre par Hennès enfant (75). Plus d'hésitation dans ce contexte: les exploits d'Héraclès - parmi quelques autres d'ailleurs - ne sont plus qu'athloi (76). Sur vingt et une occurrences relevées par l'ordinateur, dix-neuf concernent effectivement le terme athlos et toutes se réfèrent à Héraclès; les deux autres sont en réalité l'accusatif neutre d'athlon (le prix du concours). Dans l'un des cas, c'est encore une référence à la légende héracléenne, puisque cet athlon, qui doit récompenser le vainqueur d'un concours de tir à l'arc, est la main d'Iole, briguée, on le sait, par le héros (77). La deuxième occurrence (où athlon intervient comme le nécessaire corollaire d'dgon ) concerne le frère de Ganymède, Dos, vainqueur à la lutte dans les jeux organisés par le roi de Phrygie (78). Si ces deux derniers emplois du neutre athlon nous replongent dans un contexte agonistique, le tenne athlos , quant à lui, n'est utilisé que pour dire les "travaux" d'Héraclès. Il est donc devenu le tenne topique pour nommer des épreuves
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désonnais canoniques (79). Il peut désigner (8 occurrences) un ensemble de travaux évoqués soit de façon imprécise (SO), soit par l'expression consacrée: "les douze travaux" (SI), voire les "dix travaux" (S2). Plus souvent encore (11 occurrences) ath/os est utilisé·par Apollodore pour introduire (et numéroter) chacun des exploits que doit accomplir Héraclès. La fonnule varie peu : A&dTtpov Bt 49Àov tnÉTa~&V par exemple (S2bis). Ainsi ath/os se voit toujours flanqué du même verbe mtTan
=ordonner. Les exploits accomplis par le héros restent de ce point de vue, ce qu'ils étaient déjà chez Homère: tâche imposée. Les verbes tntTtÀw ou auvTtÀw disent en retour qu'Héraclès exécute, accomplit, mène à bien l'ordre donné. Nicole Loraux, déjà, avait souligné cette association: "tout entre Eurysthée ·et le héros se joue en trois mots, ath/os indissociablement l'exploit et la tâche imposée, prostagma qui dit le commandement, te/ein et ses composés pour désigner l'accomplissement du travail" (S3), conclusions étendues "aux mythographes", mais qui - les tennes en témoignent - reposent essentiellement sur le texte de Diodore (S4). Or, s'il est vrai que dans l'exposé des "travaux" du héros, Diodore, comme Apollodore, use d'un schéma qui se répète toujours le même - une lecture moins "ciblée" de l'auteur sicilien réserve quelque surprise. Nous avons souligné, en son temps, l'intérêt que trouve Diodore à rapporter les hauts faits d'Héraclès dans la mesure où HIes conçoit comme l'exemple même de ce que la postérité peut retenir de la mythologie et de l'histoire ; comme la justification par excellence du but qu'il assigne à l'une comme à l'autre: "diriger les âmes bien nées vers de belles entreprises par la perspective d'une gloire immortelle" (S5). Et l'on s'aperçoit que, lorsque le mythographe ne raconte plus, mais disserte ainsi sur le mythe ou sur le destin d'Héraclès, son vocabulaire se transfonne (S6) : alors qu'il rappelle à de multiples reprises, dans ce passage, les actions, les efforts, les hauts faits d'Héraclès, le tenne attendu d'ath/os n'apparaît jamais. A côté d'un vocabulaire assez peu spécifique (praxeis ) (S7), on s'étonne de retrouver, pour dire les épreuves - et les souffrances - qu'a endurées le héros pour apporter aux hommes les bienfaits de la civilisation, le tenne de ponos (SS) et plus souvent encore (et de manière plus inattendue peut-être) celui d'ergon (4 occurrences) (S9). Que conclure de ce décalage entre le récit mythique et la réflexion du mythographe? Lorsque Diodore pense (et quelles
439 que soient les limites de cette pensée !). c'est le vocabulaire classique qu'il retrouve. moins figé. plus dramatique. N'a-t-il pas alors quelque chose à démontrer qui demande qu'on parle "vrai" ? Lorsqu'il raconte. en revanche. il parait sombrer dans l'indifférence - ou le conformisme - et. comme chez Apollodore. disparaissent les termes qui disent l'effort. les souffrances. mais aussi la grandeur du héros; la vie semble s'être retirée du récit. Et s'il fallait caractériser ce que sont. par rapport à la littérature de l'archaïsme ou à la tragédie. les récits des mythographes. nous en aurions. je crois. un bon exemple avec cette étude du vocabulaire du travail... Après l'Héraclès d'Homère. fils de dieu. certes. mais ployant sous le poids de sa tâche misérable et "pleurant vers le ciel" (90). après le héros des tragiques écartelé entre des malheurs si grands qu'ils lui font perdre figure humaine et son destin glorieux d'immortel. l'Héraclès d'Apollodore n'est guère plus qu'un nom. et. mécaniquement. il accomplit ce qu'on attend de .lui... Ce qu'on attend de lui... ou plutôt ce qu'on lui ordonne. Car c'est la seule constante d'Homère à Apollodore (91) - ath/os appliqué à Héraclès reste la tâche imposée et le héros. celui qui. pour autrui. se donne tant de peines.
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II • HÉRACLES AU TRAVAIL: DES MOTS AUX CHOSES.
"Ces HéracMs pétrisseurs et affamés d'antan, le premier, il les a proscrits et discrédités .. il a supprimé les esclaves [s'enfuyant, trompant, se faisant battre expr~sl qu'onfaisait sortir de la maison en gémissant sans cesse... écartant ces inepties, cette vulgarité, ces basses bouffonneries, il nous crée un grand art"... (92) Aristophane se vante, certes, dans la parabase de la Paix, car les esclaves sont loin d'être absents de son théâtre (93). Peu nous importe ici; ce que nous retiendrons, c'est l'utilisation du nom d'Héraclès pour dire l'esclave... TI convient peut-être de relativiser la portée de cette assimilation: ces "Héraclès pétrisseurs" évoquent d'abord, ,très certainement, pour les spectateurs athéniens, le héros que, dans Syleus le drame satyrique d'Euripide, ils avaient pu voir pétrir de gros pains. Certes... mais ce déplacement même est significatif: qu'il s'agisse de la Paix ou du Syleus , c'est Héraclès qui, de tous les dieux ou héros de la mythologie, fournit à la fantaisie comique le personnage le plus apte à tenir le rôle de l'esclave. C'est là, semble-t-il, la traduction - sur un autre registre - d'une tradition bien établie pour laquelle Héraclès est - ce sont les termes de Sophocle que nous reprenons - "toujours au service d'un autre" (94).
2-1 L'expression de "travaux d'Eurysthée" qu'utilise Homère est explicitée dans l'Odyssée: Héraclès endurait, dit-il, "des misères sans bornes, asservi sous le joug du pire des humains". Le verbe damnao, utilisé pour dire la servitude (dompter, soumettre par la contrainte), est, certes, d'un usage assez commun, puisqu'il peut s'appliquer tant à des animaux qu'à des peuples conquis et surtout à la jeune fIlle qui se marie ; il est cependant très fort et certaines formules homériques pourraient même laisser penser qu'en dérive le nom de l'esclave dmôs (95). C'est ainsi l'ensemble de la vie d'Héraclès, et, disons-le, plus précisément, de ses actes (la raison d'être du héros) ! qui se trouve déterminé, engagé dans un réseau de dépendance. On pourrait objecter qu'Euripide, dans son HéracMs, offre une exception notable: au dire d'Amphitryon, en effet, son ms aurait offert lui-même à Eurysthée de purger la terre de ses monstres pour favoriser le retour de son père à Argos (96). Tradition divergente? on nous permettra d'en douter. On sait quelles
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libertés le dernier des Tragiques peut prendre avec le mythe (l'exemple d'Hélène, épouse adultère ou parangon de vertu selon les aléas de la politique athénienne à l'égard de Sparte, est là pour le prouver). On voit aussi à quel point Euripide ne peut s'affranchir totalement de la tradition établie, puisqu'il juge bon de proposer des explications à la soumission d'Héraclès: le rôle possible d'Héra, ou tout simplement les arrêts de la destinée (97). Enfm, dans la suite de la pièce, les exploits du héros sont, comme dans l'Iliade, dits "travaux d'Eurysthée" (98) ou plus précisément encore présentés comme des ordres de ce dernier (99). Ainsi, l'ensemble des hauts faits d'Héraclès le place dans la dépendance de son royal cousin, une dépendance que la légende explique par l'accouchement retardé d'Alcmène, en butte à la jalousie d'Héra, et la naissance hâtée d'Eurysthée qui permet à ce dernier de confisquer à son profit la souveraineté sur Argos. Et lorsque Lucien de Samosate s'interroge sur l'indifférence de Jupiter à l'égard du monde des hommes, il note, avec, il est vrai, beaucoup d'ironie, que le roi des dieux se serait peu soucié de "l'hydre de Leme, des oiseaux du lac Stymphale, des chevaux de Thrace et de l'insolente ivrognerie des Centaures", si Eurysthée "cet homme du bon vieux temps, plein de prévoyance... n'eût envoyé ce gaillard, son esclave, son homme de peine, et taillé pour les travaux" (100). Au-delà de la dérision voulue, ce portrait frappe: cet Hercule "taillé pour les travaux" évoque un souvenir fort: l'argument d'une sorte de déterminisme de la nature par lequel, au moment où il était aussi nécessaire que menacé, les philosophes du IVème siècle à Athènes tentèrent de donner à l'esclavage sa justification théorique (101). Mais, si Lucien peut ainsi utiliser cette image d'un Héraclès esclave dans tous les actes de la vie, c'est que certains épisodes de la légende l'y autorisaient en effet: serviteur, homme de peine, Héraclès l'avait été, lorsqu'il s'était engagé à nettoyer, pour un salaire, les étables d'Augias... Esclave, il l'avait été aussi - et qui plus est, sous les ordres d'une femme! - lorsque, vendu à Omphale et revêtu d'une robe pourpre, "il filait la laine et se laissait donner des coups de pantoufle par la reine des Lydiens" (102). Latris et doulos, Héraclès, donc, le fut à plusieurs reprises, et, pour dire cette servitude, c'est assez généralement le verbe >.aTp&U et ses dérivés qu'on trouve associés au héros: latreuô signifie servir pour un salaire, ou servir d'une façon plus générale (103), puisqu'il arrive qu'il soit employé aussi bien pour des hommes libres que pour des esclaves. C'est précisément le
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cas avec Héraclès, puisque le terme peut à la fois qualifier les travaux réalisés pour Augias et la soumission à Omphale. Pindare lui-même évoque, par exemple, le "salaire de serviteur" que le héros dut arracher à Augias ().6Tp\oÇ ~\a96c'), (104) et Sophocle, quant à lui, mentionne à plusieurs reprises, dan~ les Trachiniennes, cette latreia du fils de Zeus "toujours au service de quelqu'un", latreia, à quoi semble parfois se résumer sa vie, puisque seule la mort d'Héraclès, dévoré par la tunique remise à Déjanire par Nessos, le délivrera de sa pénible servitude (105), latreia rappelée surtout à propos du service chez Omphale (106), latreia qui, chez Apollodore, peut aussi désigner la très générale dépendance du héros par rapport à Eurysthée (107). Autres termes pour dire cette servitude : le verbe 80u).tOw et ses dérivés que nous avons vu employés par Lucien à l'ensemble de la "carrière" du héros, mais qui s'applique surtout à la servitude chez Omphale (108). Le verbe 9\1T&Ow, couramment utilisé pour définir la situation d'Apollon et de Poséidon chez Laomédon ou encore d'Apollon chez Admète (109), est beaucoup plus rarement mis en rapport avec Héraclès, et, à notre connaissance, Aristote est le seul à avoir fait d'Héraclès un thète (110). TI faut dire, avant d'analyser avec plus de précision les occurrences de chacun de ces termes dans les textes relatifs aux exploits ou à la vie d'Héraclès, qu'il n'est pas le seul, dans le monde des dieux et des héros, à avoir connu la servitude. Servitude chez un dieu: c'est le cas - le seul d'ailleurs - de Cadmos qui sert, auprès d'Arès, une année entière (111)... Servitude chez un mortel, surtout. Clément d'Alexandrie, dans le Protreptique, énumère ces 9toi 60\1).0\ qui, avant "ceux qu'on appelait les hilotes chez les Lacédémoniens", portèrent "le joug de la servitude": Apollon à Phères chez Admète, Héraclès à Sardes chez Omphale, et, chez Laomédon, Poséidon et Apollon "qui relevèrent les remparts d'Ilion au profit du Phrygien" (112). Mais, dès le cinquième siècle, Panyasis - dont on connaît l'intérêt pour Héraclès - avait donné la liste de ces dieux-serviteurs (113). Aux côtés des plus connus - ceux dont Clément a conservé le souvenir - il mentionnait Déméter, parce qu'elle avait accepté d'élever le jeune Démophon, fils du roi d'Eleusis Kéléos, et ce "pour un salaire digne d'envie" (114); "l'illustre boiteux" Héphaïstos; Arès et "beaucoup d'autres dieux". On pourrait encore citer Dédale, contraint de travailler pour Minos (115) et Zeus lui-même, "journalier" chez les fils de Lycaon (116). Héraclès n'est donc pas une exception en ce sens que d'autres dieux (surtout) ou héros ont un jour, comme lui, accepté
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de perdre leur liberté, mais, dans une certaine mesure, il représente tout de même un cas particulier par la polarisation sur sa personne de la notion de service et ce sous ses aspects multiples: celui du mercenaire ou du thète ; celui de l'esclave enfm. n me paraît capital encore de noter que cette notion marque des "moments" sans doute différents du mythe. Elle est présente dans l'un de ces· travaux péloponnésiens qu'on peut à bon droit considérer comme "premiers" dans le mythe héracléen... Elle se retrouve dans le thème des travaux imposés par Eurysthée qui dénote déjà une. certaine organisation de la légende... Elle est reprise dans un épisode de cette véritable biographie romancée qu'on a fini par accorder à Héraclès, puisque c'est après avoir tué Iphitos qu'Hér~clès est vendu comme esclave chez Omphale.
2..2 Nous ne reviendrons pas ici sur cette soumission aux ordres d'Eurysthée, qui, lorsqu'elle est définie, porte, nous l'avons vu, le nom de latreia ou de douleia, mais qui peut être tout simplement indiquée par le verbe epitatto ou le nom prostagma à moins que ce ne soit, de façon plus elliptique encore, par l'expression "travaux d'Eurysthée" avec le seul génitif. Elle résume un peu - et c'est normal - tous les cas de figures offerts par le mythe d'Héraclès. Nous essaierons en revanche de mieux comprendre deux situations types: celle d'Héraclès latris chez Augias, celle d'Héraclès doulos chez Omphale. Dans les étables d'Augias, roi d'Elide, s'était depuis des années entassée une énorme quantité de fumier qu'Héraclès dut un jour nettoyer, sur ordre d'Eurysthée. Cinquième dans la liste du dodécathlos pour Apollodore (117), sixième pour Diodore (118), l'épisode n'a guère inspiré les artistes grecs: dans la littérature, .la première mention est celle de Pindare, qui, dans la Dixi~me Olympique (en 476 par conséquent), mentionne le "latriosmisthos " d'Héraclès (119)... Témoignage capital dans sa concision : Héraclès est latris et sa latreia est définie par le misthos qu'il reçoit pour effectuer sa tâche. De la même époque, date la métope du temple de Zeus à Olympie pour laquelle on a choisi de représenter l'effort conjugué du héros et de sa protectrice Athéna - le parallélisme des lances est, à cet égard, remarquable - enfonçant les portes de l'étable pour qu'y pénètrent les flots du Pénée (ou de l'Alphée), et l'on sait, par
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Pausanias, que l'épisode était encore gravé sur les portes de bronze du temple (120)... faveur toute locale, puisque l'Elide n'avait été le théâtre que de ce seul épisode des travaux héracléens. En effet, dans la longue liste des représentations céramiques que, pour chacun des exploits d'Héraclès, dresse F. Brommer, le paragraphe VI reste muet: aucun exemple connu (121). De même, sur plus de 10 000 vases attiques à figures noires et rouges traités, sur ordinateur, par l'Institut d'Archéologie de l'Université de Pise, et, plus précisément, sur 547 exemplaires concernant le héros, seul, dans la liste des "Travaux", manque le service chez Augias. Là encore aucune représentation n'a été enregistrée - contre 185 pour le lion de Némée; respectivement 20 et 24 pour Géryon et Cerbère, mais 5 seulement il est vrai pour les Hespérides, moins encore pour l'hydre (3) et les oiseaux du lac Stymphale (1) (122) -. Même si l'argument a silentio ne peut être tenu pour définitif, les conclusions sont nettes: l'épisode n'a pas inspiré les peintres, ou, autre façon de voir le problème - l'image étant message, au même titre que la parole - il n'était pas bon à voir - donc à représenter - pour un public athénien, et, d'une façon plus générale, pour une clientèle grecque ou étrangère (123). Le thème ne réapparaîtra guère avant l'époque romaine, sculpté sur les sarcophages dits "à frise continue" ou représenté sur des mosaïques qui semblent directement s'en inspirer tels le pavement de Saint-Paul-les Romans ou celui de Liria, en Espagne. Généralement très mutilées, ces scènes paraissent cependant assez différentes de celles qu'avaient traitées les Grecs, plus réalistes, en tout cas. A Olympie, en effet, pas de véritable représentation d'un travail jugé humiliant, mais l'uniondoublement noble - d'une lance divine et d'une lance héroïque; à Saint-Paul-les-Romans, à Liria, mais aussi sur un fragment d'emblema découvert dans la nécropole de 1"'Isola Sacra" d'Ostie, sont au contraire figurés un hoyau, un panier vraisemblablement destiné au transport du fumier, peut-être une vasque recueillant l'eau purifiante (?).. autant de signes qui évoquent le travail des hommes. li n'en est pas moins vrai que, plus fidèlement représenté, l'exploit n'en est pas jugé plus glorieux dans la littérature et reste, pour Sénèque par exemple, "un ignoble labeur" (124). Quant à Lucien, lorsqu'il imagine Zeus envoyant Hercule, accompagné de la Philosophie, pour "écraser ces monstres impurs et insolents" que sont les faux philosophes, il s'entend répondre que "mieux vaudrait nettoyer une seconde fois le fumier d'Augias" plutôt que se commettre
44S avec eux !(125). Mais revenons au mythe grec : les récits de Diodore de Sicile et d'Apollodore se complètent admirablement pour exprimer ce qui, dans l'épisode, pouvait gêner. Diodore insiste sur l'aspect humiliant de la tâche imposée par Eurysthée pour "outrager" le héros (66~ fv&X&v). Héraclès repousse (comme indigne) l'idée d'emporter le fumier sur ses épaules (lmoBOK1JLa(6) et c'est pour éviter la honte (a{a~uv,,) qui résulterait de cette humiliation (encore 1S6pf:6)t') qu il nettoie l'étable en y faisant passer le fleuve Alphée (ou Pénée). C'est ainsi, sans indignité (toujours iS6~), qu'il accomplit la tâche en un jour. Diodore admire enfin l'ingéniosité du fils de Zeus qui sut mener à bien, en évitant la honte (aiaxuVY), l'exécution d'un ordre injurieux (ÜrttpftcpavOt') sans rien supporter qui soit indigne (av~lOt') de l'immortalité (126). Nous avons tenu à suivre au plus près le texte grec - au risque de nuire à l'élégance du style! - pour mettre en évidence l'insistance qu'apporte Diodore à dire le caractère injurieux et indigne du héros, de cet "exploit" chez Augias. On croirait, à le lire, voir se dérouler le commentaire de ces "ignominieux travaux" dont parle Homère, sans toutefois les mentionner (127). Il ne fait aucun doute qu'on retrouve, chez l'auteur sicilien, l'écho lointain de cette tradition ancienne d'un Héraclès soumis à une tâche dégradante. Mais le discrédit qui s'attache à cet exploit ne s'explique pas seulement par la nature du travail à exécuter. Apollodore, quant à lui, n'en dit rien et s'intéresse, non pas à l'action elle-même, mais au rapport qu'elle établit entre les trois personnages: EurysthéeHéraclès - Augias. L'ordre, comme chez Diodore, est donné par Eurysthée, mais Héraclès n'en fait pas mention, lorsqu'il se présente devant Augias et lui propose d'enlever tout le fumier de ses étables en un jour, s'il veut bien lui donner la dixième partie de ses bestiaux. Laissons pour l'instant de côté l'aspect particulier de cette "dîme", c'est bien d'un misthos qu'il s'agit, misthos qui, convenu d'avance, instaure la relation de dépendance entre celui qui sert (qu'il soit latris, comme c'est ici le cas, ou tMte ) et celui qui, en récompense, donnera (ou ne donnera pas, l'exemple de Laomédon prouve que c'était un risque à courir) le salaire convenu. Que se passe-t-il dans le cas d'Héraclès? Augias, apprenant que le héros avait nettoyé ses étables par ordre d'Eurysthée, refuse le misthos et nie même qu'il en ait jamais promis un (un jugement lui donne tort, mais Héraclès est déjà expulsé de ses Etats). Quant à Eurysthée, il refuse de
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compter le curement des étables parmi les dix travaux, sous prétexte qu'il avait été accompli pour un salaire. C'est ainsi qu'Apollodore explique comment - alors que la Pythie avait demandé à Héraclès de servir Eurysthée pendant douze ans et de mener à bien les dix travaux commandés - le héros devra finalement réaliser deux exploits supplémentaires, son combat contre l'hydre de Lerne ayant, lui aussi, été "disqualifié" parce qu'il avait, pour le mener à bien, reçu l'aide de son neveu et compagnon Iolaos (128). C'est ainsi qu'il nous est permis, peut-être, de mieux percevoir les rapports complexes qui existent entre un "travailleur" et le bénéficiaire de ce travail. Héraclès, on le voit, ne peut être serviteur de deux maîtres, ou bien plutôt il ne peut être à la fois Latris (et percevoir pour le service offert une rétribution) et doulos (c'est-à-dire accomplir un travail à la fois contraint et gratuit). La Latreia au service d'Eurysthée s'apparente ainsi de très près à l'esclavage. On se souviendra que Latreuein s'emploie aussi bien pour les hommes libres que pour les esclaves. Or, c'est ce terme même qu'utilise Apollodore pour dire la soumission d'Héraclès à Eurysthée, soumission imposée par Delphes pour une durée de douze ans, et avec pour objectif la réalisation d'une série de travaux qui lui seraient imposés. Denys d'Halicarnasse ajoute même qu'Eurysthée aura à en préciser la nature ultérieurement (129). Lucien a donc quelque raison de considérer Héraclès, non seulement comme "l'homme de peine", mais encore comme l'esclave d'Eurysthée (130). Esclavage certes temporaire, et, en cela même, exceptionnel, esclavage imposé par les dieux, ce qui ajoute à la singularité de la situation. Les rapports d'Héraclès et d'Augias sont, en revanche, beaucoup plus clairs: cette Latreia est celle des hommes libres qui s'engagent pour une période de temps ou pour l'exécution d'un travail défini, et qui espèrent en obtenir un "salaire", un misthos. Ce misthos forme vraiment le mot-clef de tout le passage qu'Apollodore consacre à l'épisode d'Héraclès en Elide: sur 12 occurrences du terme dans toute la Bibliothèque, il en contient 4 à lui seul (131), organisées, nous y reviendrons, selon un schéma révélateur du contrat, de ce pacte tacite que suppose le misthos entre le travailleur et celui qui l'emploie, révélateur aussi, en dernier ressort, de son caractère aléatoire et de la puissance déterminante de la volonté ou des caprices de l'employeur. Les mêmes remarques peuvent être faites à propos de l'épisode qui oppose Héraclès à Laomédon (132). Ce dernier avait en effet, contre la promesse du héros qu'il sauverait Hésione, proposé de céder les chevaux reçus de Zeus en
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réparation de l'enlèvement de Ganymède... mais, après la suppression du monstre qui menaçait sa fille, il ne se crut pas tenu de donner au héros le misthos convenu; même schéma encore dans l'aventure - déjà rapportée - d'Apollon et de Poséidon chez le même Laomédon (133). En revanche, si nous poursuivons l'analyse des occurrences de misthos chez Apollodore, Héraclès - toujours lui - apparaît comme respectant le contrat et COmme acquittant le prix demandé par le centaure Nessos pour le passage du fleuve Evenos (134). Cette même construction de l'épisode d'Augias autour d'un misthos accepté (et même ici proposé), puis refusé, Pausanias la retrouve en modifiant toutefois les raisons du refus : dans ce cas précis, c'est l'absence de ponos (c'est par son ingéniosité, en effet, qu'Héraclès obtient le résultat souhaité, plus que par son travail) qui motive l'ingratitude d'Augias (135). Ce jeu complexe du travail (qu'il soit ath/os comme chez Apollodore, ou ponos comme chez Pausanias) et du misthos nous retiendra quelques instants (136): la peine, l'effort, paraissent indispensables, ils sont la condition même, la justification du misthos .... Celui-ci est donc donné non comme un salaire pour un travail accompli (après tout, les étables et le pays tout entier ont été nettoyés 1), mais comme la contrepartie d'un effort: c'est la peine que s'est donnée le travailleur Héraclès qui est récompensée... Un travail accompli sans ponos ne le mérite pas. On songe bien sûr à la définition que Platon, dans la . République, propose des misthôtoi . Après avoir énuméré les différents "métiers" nécessaires à la cité, il ajoute en effet" : il y a encore, je crois, d'autres gens à employer, gens peu dignes, par leur esprit, d'être admis dans la communauté, mais qui, par leur vigueur physique, sont propres aux gros travaux (ponoi ). Ils vendent l'emploi de leur force, et, comme ils appellent misthos le prix de leur peine, on leur donne, je crois, le nom de misthôtoi " (137). Texte remarquable qui, non seulement prouverait l'existence "d'un marché du travail" dans l'Athènes de Platon, et, .plus précisément de "prolétaires qui vendent contre un salaire leur force de travail" (138), mais qui invite à réfléchir aux termes du contrat: contre le misthos c'est leur force physique qu'engagent les travailleurs (o6>JLa,.~ {oxuç). Ils se rapprochent ainsi de l'esclave qu'on achète - certes définitivement, et c'est la grande différence - pour acquérir sa force de travail. Et le misthos instaure entre le travailleur et celui qui ainsi, pour un temps, "l'achète" une dépendance qui probablement explique l'immense mépris de Platon (139). Si nous retrouvons l'exemple précis d'Héraclès et le texte
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d'Apollodore, nous constaterons une curieuse symétrie (et c'est à la mettre en évidence que répond la présence du tableau) entre deux structures parallèles. - L'une autour de misthos : -misthos demandé (la dixième partie des troupeaux d'Augias) -misthos refusé par Augias qui ne "paiera" pas le héros -l'autre autour de l'exploit d'Héraclès, enjeu de cette récompense : - athlos imposé par Eurysthée - athlos refusé, c'est-à-dire non homologué par Eurysthée. Symétrie encore accrue par la relation qu'instaure le jeu des causalités entre ces deux structlJIes : c'est parce que le travail avait été imposé à Héraclès qu'Augias refuse le misthos ; c'est parce qu'un misthos était en jeu qu'Eurysthée refuse de compter le nettoyage des écuries d'Augias dans la liste des travaux d'Héraclès: ce double refus souligne la même contradiction: seul un homme libre peut recevoir le misthos et réciproquement, un esclave ne doit pas être payé... C'est probablement la raison pour laquelle le terme de thète ou le verbe thèteuô n'appartiennent guère au vocabulaire héracléen (140). Héraclès - celui, bien sûr, de la légende constituée - apparaît comme trop enserré dans un réseau de dépendance; soumis aux ordres d'Eurysthée, il ne peut être un thète chez Augias et recevoir un misthos (141). Incontestablement, ce sont les termes du groupe lexical de latreia qui expriment le mieux la condition du héros: peut-être est-ce dans les Trachiniennes de Sophocle que culmine cette impression (142), mais nous la retrouverons, encore vive, chez Apollodore: sur six occurrences dans toute sa Bibliothèque, quatre font référence à Héraclès (143). Le groupe de douleia, est, quant à lui, moins bien représenté et surtout plus orienté: sur cinq occurrences pour l'ensemble de l'ouvrage, deux seulement, concernent le héros et, dans les deux cas, elles précisent son statut chez Omphale (144).
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Tableau nO IX ATHLOS ET MISTHOS DANS L'ÉPISODE D'AUGIAS
EURYSTHÉE.
AUGIAS
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2-3 Esclave, Héraclès le fut en effet et, contrairement à ce qu'affrrme M.-M. Mactoux, l'aventure ne concerne pas seulement le héros grotesque des comiques (145). "Le fils d'Alcmène lui-même jadis (pt vendu, dit-on, et dut se résigner à vivre du pain de l'esclave" T1Tlval 6oulia" J.LatT1'" ~\Ov (146)... C'est Eschyle qui, le premier, l'atteste dans l'Agamemnon; Hérodote le rappelle, lorsqu'il fait descendre la dynastie lydienne des amours asiatiques du héros (147) et une version assez cohérente de l'épisode se dégage des récits de Diodore de Sicile (148) et d'Apollodore (149), pour une' fois assez voisins. L'origine lointaine de la servitude est la même: le refus d'Eurytos, roi d'Oechalie, de lui accorder la main de sa fille Iole et le meurtre d'Iphitos qui tentait de reconquérir les boeufs (chez Apollodore) ou les cavales (chez Diodore) dont le vol vengeait - pensait le jeune homme - ce refus outrageant. Atteint d'une maladie grave, Héraclès consulte alors l'oracle de Delphes (Apollodore place ici la lutte du héros et d'Apollon pour la possession du trépied) (150) et c'est ce dernier qui lui impose d'être "vendu comme esclave", afin de donner le prix de cette vente en réparation du meurtre d'Iphitos, à son père, pour Apollodore (151), à ses enfants pour Diodore (152). Apollodore précise que cette servitude doit durer trois années entières et, dans sa version, c'est Hermès qui est chargé de la vente; c'est au service d'Omphale qu'Héraclès capture les Cercopes, met fin aux sévices exercés sur les étrangers par Syleus et retrouve le corps d'Icare (153)... Pour Diodore, c'est avec ses amis qu'Héraclès se rend en Asie, et c'est l'un d'entre eux qui le vend, publiquement, comme l'avait voulu l'oracle. Omphale
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l'achète, mais, "admirant sa vertu et ayant appris qui il était", elle le libérera, l'épousera et aura de lui un fils, Lamos (154). Si l'on excepte cette fm heureuse - et bien dans le ton de cette carrière de séducteur et de procréateur que l'auteur sicilien prête à Héraclès - les deux versions divergent peu. Il peut être intéressant de noter que l'origine de l'épisode (le meurtre d'Iphitos venu récupérer ses cavales ou ses boeufs perdus) est déjà mentionnée dans l'Odyssée (155). Il s'agit, il est vrai, d'une interpolation (au moins contemporaine de la domination de Sparte sur la Messénie), mais cette interpolation - et ses scholies - étaient, en tout état de cause, connues de Phérécyde qui semble avoir donné une version de l'épisode fort complète, puisqu'il précisait même le prix de la vente: trois talents (156). Quant au thème des amours d'Héraclès et d'Omphale, s'il est esquissé chez Diodore, il reste très distinct - et même pourrait-on dire volontairement séparé - du thème de la servitude. C'est une fois libéré qu'Héraclès épouse Omphale et lui donne un fils; pendant sa servitude, il avait eu, au contraire, un enfant d'une esclave (157). C'est pourtant ce thème des amours du héros et de la reine lydienne qui connaîtra une faveur extraordinaire à l'époque romaine et "prendra en charge" la nécessaire servitude du fils de Zeus: "Omphale porta la beauté à un tel degré d'honneur...écrit Properce, que le pacificateur du monde, après en avoir dressé les colonnes, de sa robuste main fila la douce laine" (158). Sénèque, dans les deux tragédies qu'il consacre à Héraclès, mentionne l'épisode de façon à peu près semblable: "Hôte du Tmole, il chérit la femme lydienne et, esclave de son amour pour elle, il se tint auprès de sa légère quenouille en tordant le fil humide de sa puissante main. Il est même vrai qu'il dépouilla sa nuque de la peau du monstre, ceignit ses cheveux d'une mitre et resta debout (près d'elle) comme un serviteur, parfumant sa chevelure hirsute de myrrhe de Saba... " (159) et Apulée déplore, plus nettement encore, cette soumission à la reine de Lydie: "C'est d'une telle robe qu'Omphale revêtit jadis Héraclès, efféminant ainsi celui que l'amour déshonorait" (160)... L'épisode paraît bien être devenu un lieu commun de la mythologie ; il enjolive les déclarations d'amour des jeunes gens (161) ; des tableaux le représentent, nous avons vu Lucien commenter l'un d'entre eux (162) ; Ovide, dans l'une de ses Héroïdes , construit les plaintes de Déjanire autour du thème : l'amour l'a vaincu, lui que mille monstres, qu'Eurysthée et même Junon n'avaient pu vaincre (163), et, dans les Fastes, il invente la plaisante méprise de Faune qui, surprenant les amants dans leur sommeil, s'apprête à étreindre "la belle Méonienne" et, sous la tunique délicate, découvre les jambes "tout
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hérissées d'un poil rude" du "jeune héros de Tirynthe" (164). L'échange des vêtements est, dans tous les cas, interprété comme le signe même de l'asservissement du plus viril des hommes à la plus orientale des femmes, de l'inversion totale des rôles, par conséquent, et c'est cette inversion qui dicte les "travaux" d'Héraclès chez la reine de Lydie, des occupations de gynécée qui ne lui conviennent guère: "Ah! que de fois, tandis que tu tordais les fils sous tes rudes doigts, tes mains trop robustes ont brisé les fuseaux!" se plaint Déjanire (165). Quelle que soit l'interprétation donnée à cette inversion (166), elle émousse complètement l'idée d'un Héraclès, victime consentante d'une servitude temporaire, en expiation du meurtre d'Iphitos, une servitude dont aucune source grecque ne prétend qu'elle fut celle de l'amour. Toutes sont, sur ce point, très claires: Héraclès a été vendu, Eschyle le disait déjà (167) et Sophocle, dans les Trachiniennes insiste : Héraclès en Lydie n'était pas libre, mais avait été acheté: oux ntu9tpot' àU' tIlRo).1l9tit' et, à peine plus loin, c'est comme Eschyle le verbe RmpaaJ(j) qu'il utilise pour dire qu'Héraclès a été vendu, un verbe qui, formé sur la racine .per - comme l'a bien montré E. Benveniste - implique, avant même l'idée d'une transaction commerciale, celle de "faire passer, transférer" (168). L'exil et la vente trouvent ici une expression commune et, pour Héraclès, s'aggravent du fait que c'est à une Barbare que le héros sera livré. Situation on ne peut plus humiliante, commente Sophocle (xo()1'(j)t' tBnx91l 1'OU1'O 1'o(lvf:tBot' ).aSWv ) (169), et c'est pour venger cette "morsure" infligée à sa dignité que, redevenu libre, le héros ira porter la guerre et l'esclavage chez Eurytos, considéré comme responsable de son déshonneur (170) ... un déshonneur qui, très certainement, frappe d'autant plus l'Athénien du Vè siècle que s'inversent, dans les rapports de soumission ainsi établis entre Héraclès et Omphale, non seulement le traditionnel rapport homme/femme, mais encore le rapport GreclBarbare, plus historiquement déterminé (171). C'est d'ailleurs, - avons-nous vu, - le terme doulos. "mot témoin", en ce domaine, de l'époque classique, mot caractéristique de l'esclavage-marchandise (172), qui, généralement, est utilisé pour dire cette situation. Sophocle, cependant, qui plus souvent encore parle de latreia (173), attire l'attention sur le caractère particulier de cette servitude, une servitude dont on sait, dès les premiers témoignages, qu'elle fut temporaire: pour Sophocle, l'époux de Déjanire est resté un an auprès d'Omphale (174), pour Apollodore, ce sont trois années entières au service de la reine de Lydie que l'oracle a imposées à Héraclès (175). Quant au prix de
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la vente - trois talents, si l'on en croit Phérécyde (176) - il paraît énonne lorsqu'on le compare au prix d'achat moyen d'un esclave (177) - et ce d'autant plus qu'il ne s'agit pas d'une acquisition définitive. Il est bien évident que s'assurer les services d'un héros aussi glorieux et aussi "efficace" (il débarrassera le royaume de tous les brigands qui l'infestaient!) méritait un prix sans commune mesure avec celui de la main-d'oeuvre ordinaire! On le voit, rien ne serait plus dangereux que de transposer benoîtement l'épisode mythique dans le monde des réalités humaines. Il n'empêche... Le mythe a été utilisé - et à juste titre - par M.I. Finley, en particulier, pour dépeindre la condition de ces Grecs dont l'Onomastikon dit qu'elle était "entre l'esclavage et la liberté" (178). La confusion, dans ce mythe, du mot doulos, le plus courant en grec pour désigner le "chattel slave ", et du mot latris , "un mot curieux qui signifiait mercenaire et serviteur aussi bien qu'esclave" lui paraît prouver que "dans la Grèce primitive, comme dans d'autres sociétés, les notions de "service" et de "servitude" étaient en fait confondues" (179) et, par là-même, éclairer le problème de la servitude pour dettes. L'Orient offre précisément (180) de tels exemples de dépendances temporaires, qui normalement prennent fm après un laps de temps généralement défini à l'avance (181). Que de telles servitudes temporaires aient pu se transfonner en esclavage définitif, le code biblique le prouve, qui autorise un maître "à garder pour toujours son serviteur"... si ce dernier le désire il est vrai (182). Combien - qui contrairement à Héraclès n'étaient pas des héros - ont dû, sous la contrainte, manifester un tel désir ! Souvenir d'une époque où le concept de travail en tant que produit vendable dissocié de la personne du vendeur n'existait pas (183)... pratique qui perdure (ou se redécouvre) à des moments beaucoup moins lointains de notre histoire... On retrouve, par exemple, des formes de servitudes temporaires assez analogues en· Amérique, dans une période où l'esclavage, à proprement parler, n'existe pas: W.D. Jordan rapporte ainsi que des travailleurs sont engagés au service d'un maître pour payer leur passage d'Angleterre vers l'Amérique dans une sorte de "servage contractuel" qui peut durer trois ou cinq ans (ou parfois, pour un jeune homme, jusqu'à vingt et un ans). En fait, dit-il, "c'est le travail et non la personne qui se trouve engagé, mais l'un ne va pas sans l'autre alors...". Des lois, qui, au milieu du XVIIe siècle encore, s'appliquent à régir les obligations réciproques des deux parties, insistent sur l'interdiction faite au maître de dépasser le temps d'asservissement, et prouvent bien que, comme en
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Orient, ce devait être de sa part un penchant bien naturel! (184). L'aventure, certes mythique, d'Héraclès, n'était donc pas, sans doute, sans évoquer des situations anciennes. Vendu comme un esclave, le héros l'avait été et Diodore oublie le contrat pour faire de sa libération une sorte d'affanchissement dû à ses grandes qualités et à l'amour de la reine (c'est Diodore aussi qui, pour dire cette servitude, n'emploie plus que le mot doulos ); d'autres mieux que lui (Sophocle et Apollodore) ont conservé le souvenir d'une dépendance temporaire... Dans tous les cas, l'aventure est liée, non pas à une dette (ou à un emprunt), mais à l'expiation d'un meurtre... Il y a donc bien produit de la vente, estimation du travail (ou plus exactement de la potentialité de travail contenue dans l'homme lui-même), mais c'est dans un contexte non-économique qu'il s'exprime: celui de la réparation à la fois sociale - et plus précisément familiale (elle ira aux parents de la victime) - et religieuse (elle est dictée par Delphes) d'un crime. Le moment est venu pour nous de tenter de situer le rapport entre le mythe et la réalité des Grecs.
455 III·
HÉRACLES LATRIS RÉALITÉ SOCIALE
ET DOULOS
MYTHE
ET
"Une action forcée, socialement et psychologiquement" (185) : telle est la définition que donne du travail I. Meyerson..... Tels nous sont apparus également les "travaux" d'Héraclès. Cela suffira-t-il pour que nous fassions du fils d'Alcmène un héros travailleur? Ce n'est pas ainsi, nous le sentons bien, désormais, qu'il faut poser le problème. La première raison réside· dans le fait qu'Héraclès est multiple: il l'était pour les mythographes de l'Antiquité, il l'est redevenu - et c'est une excellente chose - pour les historiens contemporains (186). Il n'est pas un héros dont on pourrait analyser la conduite. Il est une somme: une somme d'actions qui paraissent s'être rencontrées autour d'un personnage légendaire, comme si le nom d'Héraclès avait cristallisé une série de récits d'origine et de nature diverses : mythes certes, mais aussi contes folkloriques, épisodes pseudo-historiques, récits étiologiques ou édifiants, ete. n faut ensuite prendre en compte la durée de cette élalx>ration et, par conséquent, les conditions prodigieusement différentes dans lesquelles s'est inscrit (au cours des temps) ce discours héroïque. Au moment du mythe, parfaitement signifiant et efficace, a succédé celui de l'épos dans lequel le récit tend à prendre la première place, puis le moment tragique, et parallèlement ceux de la philosophie, de l'histoire et de la morale. J. Svenbro, s'inspirant des recherches de M. Parry sur la tradition homérique et de W. Radloff sur les nomades kirghiz, a bien montré ce que pouvait changer la seule "écriture" des poèmes homériques, versions désormais "enregistrées" d'un certain chant d'Achille ou d'une Odyssée multiformes (187). Les poèmes, lus désormais par les rhapsodes, ne sont plus, comme l'étaient les chants des aèdes, directement soumis au "contrôle social" de leurs auditeurs. Mais ce que Radloff a vu faire par l'agyn kirghiz: intégrer des généalogies flatteuses pour les nobles, faire, au contraire, une critique mordante des riches devant les pauvres, essayer de s'adapter au public que constituait Radloff lui-même c'est-à-dire, traduire les valeurs et les aspirations du groupe, les désirs supposés de l'auditeur -, chacun de ceux qui, plus tard, reprendront, utiliseront ou simplement raconteront le mythe, dans une certaine mesure le referont. Leurs propres textes, s'ils sont écrits, resteront certes figés, mais la succession que nous en avons, nous permet de retrouver quelque chose de ce contexte
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dans lequel le discours mythique a été émis, de ces auditeurs qui l'ont reçu... Et déjà, sans l'avoir encore analysé, nous avons pu constater à quel point, au travers du mythe d'Héraclès, la perception du travail avait pu varier au cours des siècles. Enfin - dernière mise en garde liminaire - s'il est vrai que la figure du héros exprime, dans son essence même, les paramètres du social (188), il y aurait quelque naiveté à prétendre en retrouver les données telles qu'elles, ou même "mises en charade" (189) dans le mythe. C'est donc une démarche très prudente qui doit être la nôtre si nous voulons tenter d'apprécier comment, au cours de ces longs siècles de culture grecque, le mythe d'Héraclès a pu - dans une certaine mesure - traduire et peut-être aussi aider les hommes à penser leur rapport au travail. .
3-1 Une chose est sûre: pour les Grecs, Héraclès appartenait à la catégorie des dieux "agissants". Ce qui, dans le mythe, se traduisait par des "travaux" - plus ou moins faciles à inscrire dans l'expérience humaine, il est vrai - demeure comme une constante, au cours des siècles de culture hellénique. Dans un passage très intéressant de sa description de l'Arcadie, Pausanias se souvient d'avoir vu, à Mégalopolis, "des statues de forme carrée" de ces dieux qu'on nomme "Ergatai " ; Athéna Ergané, dont on connaît le rôle, à Athènes, par exemple, comme "patronne" des artisans, Apollon Agyeus, c'est-à-dire protecteur des rues, Hermès et Ilithye, parce qu'Homère, explique Pausanias, fait de l'un le serviteur (diakonos) de Zeus et le conducteur des âmes aux Enfers et dit de l'autre qu'elle s'occupe de l'accouchement des femmes. Parmi ces dieux, Héraclès, enfm, qui "exécuta des travaux nombreux et pénibles" (noÀÀouç' Tt xal XaAmoÙt'... li8Àout" ) (190). Cette notion de dieux "agissants" ou plus simplement travailleurs - puisqu'ergates, formé sur ergon, nous paraît (et c'était l'avis de W.H.S. Jones qui traduisait par "workers") (191) coloré de ce sens assez précis - est en elle-même intéressante. Les dieux (Héraclès est ici l'un d'entre eux) accompagnent l'homme de sa naissance (Ilithye) à sa mort (Hermès), dans ses relations avec les puissances souterraines (Hermès encore), dans sa vie quotidienne et son travail. Mais, alors que chacun d'eux apparaît comme fortement spécialisé (192), seul Héraclès - et Pausanias rapporte à Homère l'origine de cette tradition - mérite ce nom, parce qu'il est celui qui a accompli tant de travaux difficiles,
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pénibles. Il exprime donc bien la fonction dans ce qu'elle a de plus général. Ces travaux d'Héraclès, qui, même dans ce passage de Pausanias, portent le nom désormais canonique d'athloi, nous croyons pouvoir dire, après l'étude que nous avons faite du vocabulaire, qu'ils furent d'abord entendus - c'est du moins ce que nous a conservé la version "enregistrée" des poèmes homériques - comme douloureux et indignes du fils de Zeus qu'était devenu le héros. De même, c'est dans la servitude qu'il commence sa carrière. Il est l'homme de main d'Eurysthée, celui qui chasse et qui tue pour le roi, son cousin, auquel, dans la version déjà élaborée du mythe, Héra l'a soumis... Il est encore, dans les deux épisodes que nous avons envisagés, celui qui travaille pour le roi (Augias) ou la reine (Omphale). Soumission donc, et dans tous les cas, mais pas dans n'importe quel contexte... Il est à craindre que la reine Omphale ne nous apporte pas, en ce domaine, de nets éclaircissements. Le thème de la servitude est, dans cet épisode, fortement mêlé à celui des amours du héros et de la reine, un thème répandu surtout, nous l'avons vu, à l'époque hellénistique et romaine, mais qui, très vraisemblablement, recouvre une réalité plus ancienne, perceptible encore dans l'échange des vêtements dont on allait faire la preuve de l'abandon, par Héraclès, de sa virilité. Cet usage - nous l'avons montré ailleurs (193) - n'est pas isolé dans l'histoire et les cultes du héros. C'est un rite d'inversion fréquent dans les cérémonies initiatiques et tout particulièrement dans l'une des plus décisives: le mariage et des exemples historiques prouvent la persistance de cette pratique en Grèce. Une coutume de Cos est particulièrement intéressante: lors de ses noces, l'époux - si l'on en croit Plutarque - était vêtu comme une femme (194) et l'auteur des Questions grecques explique que les insulaires refont ainsi ce qu'avait fait Héraclès pour échapper aux Méropes lors de son arrivée dans l'île. Caché sous un vêtement féminin, il avait trouvé refuge chez la fille d'Alkiopos, l'avait par la suite épousée, revêtant à nouveau, pour la cérémonie, les habits brodés qui l'avaient sauvé. Or une inscription mutilée de Cos atteste d'un gamos d'Héraclès (195) et c'est peut-être encore par le souvenir de ce mariage "primitif' ou "fondateur" qu'on peut expliquer le vêtement particulier du prêtre d'Héraclès dans cette cité (196). Ainsi donc, dans le mythe et les cultes d'Héraclès, survivraient des traces, non pas seulement de ces nombreux mariages qui rythment son passage parmi les hommes et
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pourraient ainsi, lorsqu'ils ne s'intègrent pas dans le schéma indo-européen proposé par G. Dumézil, être réexaminés en ce sens (197), non pas même de ses noces - décisives celles-ci avec Hébé qui lui assurent la jeunesse éternelle et l'immortalité (198), mais bien plutôt d'un très ancien hiéros gamos . dont Héraclès serait le héros, parèdre d'une "reine" au sens' où l'entendent, par exemple, les tablettes mycéniennes, d'une de ces grandes déesses, pour tout dire, dont Omphale pourrait bien être l'héritière (199). Qu'un tel souvenir soit, en Grèce, plus répandu qu'on ne l'imagine, un bronze trouvé sur l'Acropole d'Athènes et daté du milieu du Vlème siècle le prouverait. Il s'agit d'une applique représentant quatre personnages dans lesquels A. de Ridder avait d'abord reconnu les protagonistes d'une scène d'apothéose: au centre Athéna lui paraissait entraîner Héraclès vers Zeus (absent de la composition). De part et d'autre, une joueuse de double flûte et Hermès auraient formé le cortège (200). Sensible aux critiques de L. Savignoni (201), l'auteur devait, quelques années plus tard, revenir sur son interprétation (202). Il maintenait, à juste titre, nous semble-t-il, l'identification du personnage central (Héraclès et non pas Dionysos comme le voulait le savant italien), mais reconnaissait que rien n'obligeait à faire de sa compagne une Athéna et que le sens même de la scène était à reconsidérer. En effet, le personnage féminin, loin d'entraîner le héros, se tient légèrement en arrière et le geste de leurs mains suggère d'autres rapports, plus intimes : c'est manifestement le lien entre deux époux qu'a voulu représenter le bronzier; scène de symplegma donc, beaucoup plus logiquement que d'apothéose. La joueuse de flûte prend alors toute sa place dans ce cortège nuptial... Peut-être d'ailleurs pourrait-on voir dans la présence symétrique d'Hermès, maître des "passages", un peu plus que la simple reconnaissance de ce rite d'initiation que constitue le mariage humain, mais, bien plutôt, l'indice que ce hiéros gamos introduit le héros dans la communauté des dieux... on serait alors tenté de reconnaître Hébé dans cette épouse d'Héraclès. A. de Ridder suggère, lui, le nom d'Omphale (203)... Il faudrait alors utiliser, pour appuyer sa thèse, un argument auquel il ne songe pas: si Héraclès porte la longue tunique ionienne, sa compagne est, au contraire, court vêtue !... particularité à laquelle le mythe d'Omphale donne effectivement un sens. De cette ambiguïté même, on est tenté de conclure que, dans la légende du héros, des rapports aussi différents en apparence que ceux qui unissent le héros à Hébé ou à Omphale pourraient bien être dérivés d'une même image primitive, celle d'un hiéros gamos
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d'Héraclès avec l'une de ces déesses toute puissantes et maîtresses de tout ce qui vit sur terre (204). Ce détour a pu paraître long, il était nécessaire pour convaincre que, dans le sujet qui nous occupe, la personnalité d'Omphale n'est pas d'un grand secours: elle ne nous dira rien de ces despotes auxquels fut soumis Héraclès. Nous l'avons vu d'ailleurs, Hérodote ne la nomme même pas, lorsqu'il rapporte à Héraclès la naissance de la dynastie lydienne (205). Peu nous importe, dans ces conditions, l'étymologie de son nom (206)... et même l'origine d'une légende que, depuis Wilamowitz, on ne considère plus comme orientale, mais bien plutôt comme purement grecque: maliaque ou thessalienne (207). Dans cette rencontre enlie Héraclès et la reine de Lydie, seule nous intéressera - mais sur un autre plan - la forme prise par la servitude du héros. Or, à ce titre, la légende de Cos offre la possibilité d'un rapprochement (208). Dans les deux cas, Héraclès voit son sort dépendre d'une étrangère: à Ços, la fille d'Alkiopos était, dit Plutarque, une Thrace (yuvai'JCa 9paTTav) (209)... Un terme qui, à Delphes, désigne les "mercenaires" ou "serviteurs" du temple, et à Erythrées, les prêtresses d'Héraclès qui, seules, avaient accès au temple du dieu, ceci, en raison du rôle que, dans le mythe fondateur, avaient joué les femmes thraces - libres ou esclaves -, mais, en tout état de cause, exclues de la communauté civique (210). Le mythe et le culte sont là, on le voit, étrangement mêlés et tous deux témoignent des liens entretenus par le héros avec ceux qui, dans la cité, étrangers ou esclaves, subissent la domination des seuls citoyens (211). Reste que, si nous souhaitons cerner de plus près le problème de la servitude d'Héraclès, mieux vaut nous référer à d'autres maîtres! Eurysthée, par exemple, figure dominante de la légende... Eurysthée, cousin du héros, auquel la jalousie d'Héra donne - contre toute attente - la prééminence: c'est lui qui règnera "sur tous les Argiens" (212), alors que le fils bien-aimé de Zeus sera contraint d'exécuter les "sordides travaux" que lui assignera son rival (213). Nous sommes là en terrain plus solide. Hérodote reconnaît en lui un personnage historique réel (214). Roi des Argiens (dans l'Iliade), roi de Tirynthe (où l'oracle envoie résider Héraclès), roi de Mycènes parfois - le dernier avant l'avènement d'Atrée pour Thucydide (215) - c'est toujours de ce quart nord-est du Péloponnèse qu'il s'agit, de cette Argolide dont le dynamisme apparaît si fon, à l'époque du Bronze récent, qu'on peut légitimement se demander si elle n'a pas réussi à imposer sa primauté sur la plus grande partie du Péloponnèse. Ce sont, en
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tout état de cause, les conclusions auxquelles aboutit B. Sergent, dans la remarquable étude qu'il consacre au document de Kom el Hétan (liste de toponymes égéens trouvée en 1964 sur un site égyptien du Nouvel Empire) (216). Ce sont aussi les conclusions que - partant de données tout à fait différentes, puisqu'il s'agit de l'unité du système de mesure dans le linéaire B - proposait L. Godan, lors d'un très récent colloque romain (217). L'Argolide, c'est aussi le domaine privilégié d'Héra, la déesse du pays "riche en boeufs", devenue, dans la légende, la persécutrice d'Héraclès et, en dernier ressort, la raison même de sa servitude. L'Argolide, c'est enfin le lieu des premiers "travaux" du héros. C'est en effet sur les marges de son territoire qu'Héraclès - comme s'il était chargé de le protéger contre l'envahissement d'une nature encore sauvage, ou mieux, de repousser toujours plus les limites de l'eschatié - eut maille à partir avec le lion de Némée, l'hydre de Lerne, les oiseaux du lac Stymphale. Plus loin, vers les montagnes de l'Ouest, eurent lieu les grandes "chasses" : chasse au sanglier d'Erymanthe, poursuite de la biche cérynite. Encore faut-il remarquer que, dans ce contexte où évoluent Héra, Héraclès et Eurysthée, le mythe des "Travaux" est déjà constitué, la légende a commencé son travail de regroupement, de classification, d'interprétation aussi, puisque la jalousie et la ruse d'Héra sont déjà données comme explication de la servitude du héros. Le "bricolage" du mythe - au sens où l'entend Claude Lévi-Strauss - a donc fait son oeuvre, mais, si les rapports d'Héraclès et d'Héra préexistent - et sont probablement fort différents de ceux qu'avoue la légende (218) -, si les "images" qui ont servi à construire ce nouveau récit se transmettent depuis lontemps dans la mémoire collective (219), le thème de la soumission paraît, quant à lui, fortement ancré dans ce contexte achéen. C'est à une constatation semblable que nous conduit l'étude du dernier des travaux péloponnésiens, celui que les Grecs n'aiment guère rappeler, nous l'avons vu, celui que sans doute ils jugeaient comme le plus incompatible avec la dignité du héros et plus encore du dieu: le nettoyage des écuries d'Augias. Ce dernier est roi d'Elide et, pour une fois, le mythe le montre avec quelque apparence du concret: il est essentiellement le grand propriétaire foncier, il est, comme Ulysse à Ithaque (la naïve comptabilité d'Eumée en témoigne encore dans l'Odyssée), l'homme riche en troupeaux... Et c'est comme une sorte de "valet",
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d'ouvrier agricole à gages qu'apparaît Héraclès, une fois de plus, l'homme à tout faire, l'homme de peine (220), qui débarrassera les écuries (ou les étables) de tant de fumier accumulé. Or cet épisode du service chez Augias, qui nous intéresse au plus haut point, offre, de surcroît, un immense avantage : dans l'onomastique des travaux d'Héraclès, Augias est le seul exemple d'un nom attesté dans les tablettes en linéaire B: celles précisément du royaume pylien auquel il semble qu'une partie de la Piséatide au moins ait été finalement annexée (221). La lecture en est certes controversée: le problème est celui du syllabogramme 85 pour lequel a été proposé - par H.D. Pretrusevski et P.H. Ilievski d'une part, par H.D. Ephron d'autre part (222) - la valeur -au. Si cette valeur est admise, apparaîtrait par trois fois dans les tablettes (PY An 19-2; PY Ta 711-1 ; PY Jo 438-23) un fonctionnaire dont le nom, 85-KE-WA pourrait se lire Auyr.(F)F aç = AUyr.aç = Augias Pour M. Lejeune, qui a repris le dossier du syllabogramme 85, l'hypothèse d'une valeur en -au a l'avantage de donner, pour tous les éléments du vocabulaire, "des lectures qui conviennent au contexte" et de fournir des anthroponymes "plausibles et, la plupart du temps, attestés historiquement" (223) ; elle lui paraît donc "l'emporter de loin sur les autres" (224). Faut-il, pour autant, comme le fait M.D. Petrusevski, identifier ce fonctionnaire pylien à l'Augias de la légende héracléenne ? La déduction peut paraître bien rapide! Quant à voir en lui le "Grand Balayeur" du royaume de Pylos (225), c'est, cette fois, jouer avec le mythe de façon quelque peu gratuite et supposer qu'il puisse être, dans ce cas, la simple transposition d'une situation précise, ce que rien véritablement n'autorise. Il nous suffira de constater - et ce seul indice nous paraît d'importance - que l'anthroponyme du roi mythique, ainsi attesté dans les archives du royaume pylien, inscrit à la fois géographiquement et dans le temps, aussi bien le travail que le service d'Héraclès. De cet Héraclès au service du palais et promis aux sales besognes, de ce héros si proche, à certains égards du valet de ferme, de cette brute à la main lourde (226), la biographie romancée d'Apollodore conserve quelque chose: le héros grandit auprès des troupeaux de boeufs qu'Amphitryon l'a chargé de garder, loin du palais et, lorsqu'il tue son premier lion - celui du Cithéron -, c'est pour défendre le bétail de son père et de son voisin Thestius (227). Les travaux péloponnésiens sont souvent présentés comme la nécessaire protection des champs et plus
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encore des troupeaux (228), et nombreux sont les épisodes qui, dans sa légende, l'associent - ou l'opposent - à des bouviers (229). C'est en Occident, peut-être, que cette particularité s'est conservée avec le plus de force et particulièrement au long de cette route qui l'avait vu ramener les troupeaux enlevés au monsn;ueux Géryon: un Héraclès bouvier est honoré en Campanie, sur le territoire de Rhégion, et près de Crotone, étroitement associé à Héra Lacinienne - dont il passe pour avoir fondé le culte -, il protège avec elle les troupeaux bovins (230). Même constante, si l'on quitte l'Italie grecque: à Rome, c'est au forum Boarium que s'installe le héros et la dîme qui lui est offerte garde assez longtemps, semble-t-il, un caractère pastoral (231). C'est encore sur le chemin des bergers, au long des Cal/es publicae, qu'on trouve le plus de ces petits bronzes qui témoignent du succès de son culte parmi les populations italiques d'Italie centrale (232). Héraclès et les troupeaux... le mythe les réunit dans la sphère du travail, même s'il offre aussi à cette intime union une autre clef (233), preuve de son ambiguïté profonde. Héraclès et le service d'un roi... le mythe en donnera bientôt la raison, comme s'il fallait expliquer ce fait, apparemment difficile à admettre, du travail des dieux. 3-2 Dans la légende constituée d'Héraclès, telle que la rapportent les mythographes hellénistiques, ces épisodes, qui montrent Héraclès travaillant pour· autrui, ont une explication: la volonté des dieux et plus précisément, la jalousie d'Héra. Pour Apollodore, c'est la déesse qui, après la victoire d'Héraclès sur les Minyens, provoque l'accès de folie dans lequel il tue les fils qu'il avait eus de Mégara et deux des enfants d'Iphiclès. Il "se condamne lui-même à l'exil" pour cette action; Thestius le purifie et, s'il va consulter l'oracle, c'est pour savoir "quel lieu il doit désormais habiter". La Pythie lui dit alors de se rendre à Tirynthe, de servir pendant douze ans Eurysthée et d'exécuter les travaux qui lui seront imposés et dont il obtiendra l'immortalité (234). Pour Diodore, plus fidèle à la tradition homérique, la jalousie d'Héra se manifeste dès avant la naissance du héros, par la ruse qui l'éloignera du pouvoir. Zeus, instruit du stratagème, et "songeant d'avance à la gloire d'Héraclès", accorde à Eurysthée le royaume qui aurait dû revenir à son fils, mais persuade Héra de mettre ce dernier au rang des dieux, lorsqu'il aura satisfait à son destin (et Diodore place ici l'allaitement du bébé par Héra, signe
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futur, bien qu'encore parfaitement involontaire, de l'adoption). La soumission au roi de Tirynthe ne devient effective - et Diodore rejoint ici Apollodore - qu'après la victoire d'Héraclès sur les Minyens et c'est jaloux de la puissance du héros qu'Eurysthée le fait appeler auprès de lui pour lui imposer sa volonté. Le refus d'Héraclès n'aura pas d'effet: Zeus le somme d'obéir, et, à Delphes, l'oracle lui apprend que "les dieux lui ordonnent les douze travaux et qu'après leur exécution, il recevra l'immortalité" (235). Au-delà des divergences de détail, les deux versions témoignent de la même interprétation du mythe: derrière les querelles entre familles régnantes (Amphitryon, le père mortel d'Héraclès, était roi de Mycènes et de Tirynthe; exilé à Thèbes, c'est son neveu Eurysthée, qui le remplace sur le trône de Tirynthe) se profilent, comme pour les conflits entre Grecs et Troyens dans les poèmes homériques, les querelles, les rivalités entre les dieux (ici la jalousie d'Héra à l'égard des bâtards de son époux trop volage)... Derrière la soumission d'Héraclès à son cousin, c'est le destin d'Héraclès qui s'affirme, et ce destin, Héraclès l'apprendra de la bouche de la Pythie: c'est l'oracle de Delphes qui, en définitive, règle la vie du héros. Notons cependant qu'au sujet de cette intervention, les deux versions divergent de façon très sensible. Alors que pour Diodore l'oracle d'Apollon confirme et, en quelque sorte, rend exécutoires les décisions de Zeus son père, pour Apollodore, il intervient à la suite d'un meurtre et pour régler les troubles causés par cette souillure; intervention "surajoutée", le texte le prouve, qui montre le héros - qui s'est exilé lui-même et purifié, déjà, auprès de Thestius - consulter la Pythie pour savoir où il allait désormais résider. Le scénario se répète, mieux réglé cette fois, à propos de l'esclavage chez Omphale. C'est, pour les deux auteurs, un meurtre~ celuid'Iphitos, qui rend nécessaire une nouvelle intervention de Delphes. Mais cette fois, la peine d'Héraclès sera monnayée : il sera vendu et le prix de la vente ira à la famille du meurtrier. Le rapprochement des deux versions de la servitude chez Eurysthée, la manière dont ces deux versions en quelque sorte coexistent dans le texte d'Apollodore, la comparaison des deux séquences mythiques: la latreia en Grèce même, la douleia chez une Barbare, nous paraissent mettre en évidence la lente élaboration d'un mythe, élaboration parallèle à celle - tout aussi lente - du droit dans la société. Istvan Hahn l'avait pressenti dans une rapide, mais pénétrante étude de la servitude des dieux; le
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mythe, disait-il, reprenant l'heureuse expression de L. Gernet, nous renvoie au "stade de pré-droit" (236), et plus précisément :"ll reflète les conditions (d'une) société tribale en décomposition, mais encore avant la stabilisation du système juridique des poleis" (237). C'est à une conclusion voisine que nous aura conduite cette étude de la servitude d'Héraclès, à ceci près que nous nous sentons fondée à déceler, dans cette même évolution, des étapes assez nettes. Au-delà des "images" primitives: celle d'un Héraclès tueur de fauves par exemple, ou parèdre d'une grande déesse, le thème de la soumission du héros nous a paru s'élaborer dans le cadre des royaumes achéens, plus ou moins indépendants, plus ou moins soumis déjà à l'autorité de l'Argolide (peut-être d'ailleurs faut-il tenir compte de ce facteur pour mieux apprécier le rapport entre le service d'Augias, le plus lointain des travaux péloponnésiens, et la série imposée par Eurysthée ?). Ceci dit, il est vrai que la légende, lorsqu'elle est constituée, porte la marque d'un âge différent: Eurysthée est certes roi de Mycènes, mais il est également un chef de clan au profit duquel a été évincé le lignage voisin. Amphitryon lui aussi se comporte en chef de famille qui, telle cyclope de l'Odyssée, dicte sa loi à ses enfants, expédie, par exemple, un fils par trop brutal aux confms de son domaine "auprès de ses troupeaux", après le meurtre de Linos (238), et c'est encore en chef de clan que se comporte Eurytos, lorsqu'il réclame "le prix du sang" pour le meurtre de son fils Iphitos. Une fois de plus, le mythe porte l'empreinte de la société qui le fait vivre, de cette solidarité familiale qui sert de norme à la société gentilice. Cette justice patriarcale, qu'elle soit décision autoritaire du chef réprimant les fautes des membres du genos, qu'elle soit règlement de comptes entre les groupes, c'est elle que nous voyons à l'oeuvre dans la thèse que G. Glotz a consacrée à la solidarité de la famille (239). C'est la même expulsion hors du génos que subit, dans le mythe, le héros meurtrier, avec les mêmes inéluctables conséquences, la nécessité de travailler pour vivre. "Qui a tué un homme dans sa patrie va en pays étranger", tel est, Glotz le montre bien, le premier adage du droit primitif (240)... Et il est vrai que, sa légende constituée, c'est dans l'exil qu'Héraclès vivra sa servitude (l'exil d'ailleurs avait déjà frappé son père mortel, puisqu'à la suite d'un meurtre, Amphitryon, roi de Mycènes et de Tirynthe, avait dû se réfugier à Thèbes !). Mais si, à l'origine, la compensation demandée en cas de meurtre est presque toujours la mort du meurtrier, si l'exil est le moyen de fuir cette vengeance inévitable, le mythe porte la marque
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d'un temps où, dans les "affaires de sang", la composition est devenue possible. La poi~ dont le but principal était, au dépan, de racheter la tête du criminel, n'apparaît plus guère, dans l'épisode qui oppose Héraclès au génos d'Iphitos, que comme une indemnité dévolue à la famille de la victime (241). Que cet épisode s'inscrive dans une société où les liens familiaux se relâchent, où commencent à s'instaurer entre les hommes de nouveaux rapports, l'intervention de Delphes - surajoutée dans le cycle des travaux chez Eurysthée, mieux intégrée dans le cas de la vente à Omphale - le prouve bien dans l'état le plus élaboré de la légende. Nous ne nous étonnerons pas de retrouver, dans ces débuts hésitants d'une justice qui commence à échapper à l'emprise familiale, le rôle d'Apollon, dieu justicier par excellence... Apollon qui exige que tout crime ait son châtiment et qui - parce qu'il s'en était lavé lui-même dans la vallée du Tempé après le meurtre de Python - est capable de purifier les mortels de leurs souillures. Ainsi, à l'aube du développement de la cité (qui chronologiquement correspond à la diffusion en Grèce de la religion apollinienne), l'intervention de Delphes dans la légende d'Héraclès (intervention que ne connaissent ni Homère, ni Hésiode !) donne au ponos d'Héraclès et à sa servitude, une explication plausible: l'un et l'autre, qui désonnais paraissent indignes du héros, ne peuvent être que la punition ou plus exactement la nécessaire compensation d'un crime. 3-3 En même temps s'atténue le caractère inéluctable de cette servitude. L'Héraclès trop humain des Tragiques, le héros "toujours au service d'un autre", l'esclave vendu à l'étranger (tels les agogimoi de Solon !) est aussi celui dont on connaît le destin exceptionnel: il sera dieu, un jour, et il sera dieu dans la mesure même où sa vie fut remplie d'épreuves... Hésitation encore chez Homère avec l'image de ces deux Héraclès que devait exploiter la verve satirique de Lucien (242), contradiction dans l'Hymne homérique ... il semble qu'avec Hésiode, les deux faces d'Héraclès se soient rejointes et que l'immortalité déjà apparaisse comme le "prix" du ponos et de la servitude. C'est chose faite avec Pindare, à l'aube de l'époque classique et désonnais, jusqu'à la fin de l'Antiquité, les mythographes le rediront avec force: chez Apollodore, c'est la Pythie qui promet l'immortalité au héros s'il accomplit les travaux
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prescrits par Eurysthée et, pour Diodore, si Zeus accepte le stratagème d'Héra qui devait soumettre son fils à Eurysthée, c'est précisément parce qu'il songe à la gloire future d'Héraclès; quant à l'auteur sicilien, il rapportera les hauts faits du héros, "chacune de ces actions dont l'immortalité fut le prix" (243). Revenons un instant à c~ misthos d'Héraclès qui n'est plus le "salaire" d'un travail, mais le prix, la récompense attribués au vainqueur d'une action difficile, au héros d'un exploit... Il rejoint là, comme le fait remarquer E. Benveniste, la signification que paraît avoir - presqu'exclusivement - le terme parallèle de Mizda dans les textes védiques et avestiques, une signification d'ordre spirituel: "la félicité, la récompense attribuée dans la vie future" (244)... Elle rejoint aussi - tel que E. Benveniste l'a mis en évidence - l'emploi parallèle du grec misthos dans les Evangiles. C'est la preuve, je crois, qu'on ne saurait résoudre le problème de l'évolution de misthos en disant qu'à partir d'un sens "plus ancien" (245) et voisin du sens indo-iranien, le tenne finirait par désigner un avantage de caractère économique... En Grèce, les deux possibilités sont déjà dans les textes homériques (246) ; elles se retrouvent, dans une certaine mesure, dans la cité démocratique où, s'il existe des misthôtoi qui sont bien des travailleurs, le misthos du citoyen ne saurait, lui, être confondu avec un salaire... L'exemple des Evangiles prouve que survivra très longtemps cette conception d'un misthos plus lié à la valeur de celui qui le reçoit qu'à son travail. Et si nous revenons à Héraclès, nous constaterons que coexisteront toujours, dans le mythe, les deux acceptions du terme: le misthos réclamé à Augias - qui est de nature économique, et très précisément s'inscrit dans le contexte d'une société pastorale - et le misthos accordé par les dieux, celui qui récompense le ponos d'Héraclès, un ponos fait de labeur et de souffrance. Ce que le mythe apporte d'intéressant, c'est que seul le deuxième est jugé digne d'un dieu: le prouvent à la fois - le mythe lui-même et cela très tôt, dès que la légende est constituée: cette dîme, demandée sur les troupeaux du roi d'Elis, Héraclès ne l'obtiendra jamais. On se reportera à notre tableau qui montre bien, je crois, l'incompatibilité de cette récompense matérielle et de l'immortelle félicité qui, grâce aux travaux imposés par Eurysthée, attend le héros; - la désaffection - déjà constatée - dans laquelle on tient, à l'époque classique, cet épisode où Héraclès faisait par trop figure de valet de ferme. Non, décidément, à cette époque, Héraclès n'est plus un travailleur.
467 Le mythe, on l'aura senti, est mûr pour une nouvelle évolution. C'est, semble-t-il, Prodicos, qui, pour la première fois, l'énonce clairement à la fm du Vème siècle (247). C'est de lui, en effet, que, dans les Mémorables, Xénophon dit tenir le célèbre apologue qui devait permettre au héros grec de se poser en rival du Christ. On connaît trop bien la fable pour qu'il soit nécessaire de l'exposer longuement. Seuls quelques termes nous retiendront. Le moment du choix, d'abord "à l'âge où les jeunes gens, devenus maîtres d'eux-mêmes, laissent voir s'ils entreront dans la vie par le chemin de la vertu ou par celui du vice" (248). Dans ce moment, nous reconnaissons, en effet, ce passage décisif de l'adolescence à l'âge adulte qui - nous l'avons montré ailleurs (249) .;. a laissé quelques souvenirs éloquents tant dans la légende que dans les cultes héracléens. Un des buts de l'initiation n'est-il pas, en effet, d'apprendre au futur membre de la communauté à devenir, comme le disent si bien les Bambara, "a yere tigi" : son propre propriétaire. L'expression de Xénophon (âUTOKpClTOptt" Ylyv6~t:V01) s'en approche de façon troublante, mais le choix d'Héraclès, tel qu'il le rapporte, donne en même temps le contexte radicalement nouveau de cette transformation: le jeune homme loin d'être un parmi les autres, n'est plus qu'individu, conscient de prendre en mains, lui-même, son destin. L'alternative n'est pas moins intéressante, qu'on ne saurait réduire à un problème de morale. La vertu - arétè - est bien autre chose en effet: c'est un véritable engagement de l'être où se retrouve l'essentiel des valeurs aristocratiques, qu'elles se rapportent aux mérites du corps, de la naissance, de la fortune. Kakia de même signifie plus que le vice, c'est la vie "basse" habituellement opposée, justement, à celle de l'homme de bien... Deux options radicalement différentes, donc, deux modes de vie qui se présentent au héros, sous l'apparence de deux jeunes femmes, l'une d'aspect noble et décent, l'autre fardée, coquette et provocante au contraire. Le sens de ce choix, surtout, nous paraît d'un grand intérêt. La femme légère (Eudémonia pour ses amis, Kakia pour ses ennemis) a choisi pour Héraclès la route la plus agréable et la plus facile (l;6{GT1l Tt: Kat paGT1l) (250) : celle qui lui permettra de jouir du travail d'autrui sans avoir à se donner du mal lui-même (nOVOUVTa Kat naÀalJlC&)poUVTa ~ ~~aTl Kat 'Tij ""'xii) (251). Sa rivale espère en revanche qu'il suivra ses conseils - son caractère, estime-t-elle, et son éducation l'y invitent - et qu'il sera le noble (âya96ç) artisan d'actions "belles et vénérables". Héraclès a choisi... L'innocence mythique a, cette fois,
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inéluctablement disparu. Le mythe, en effet, répond à toute question avant même qu'elle ne se pose, il empêche la question de se poser (252). Héraclès s'est, avec Prodicos, posé la question de son destin et sa réflexion consacre la fin du mythe... Mais cette réflexion est-elle véritablement nouvelle? L'idée même du choix, et plus encore la forme si précise de la double voie évoque de fort près le pythagorisme... Que le mythe, déjà, ait rencontré la philosophie ne fait guère de doute et il se pourrait bien que ce soit en Italie du Sud, où, M. Detienne le rappelle, le héros était en grand honneur, à Crotone, tout particulièrement, siège de l'école pythagoricienne... C'est d'ailleurs dans la bouche même du "maître" que la tradition plaçait la légende de la fondation de Crotone, dont l'éponyme avait été - un de plus - malencontreusement tué par le héros (253)... C'est là encore, peut-être, qu'avait pris forme la légende moralisatrice d'Héraclès "peinant", d'un héros de l'effort qui, sa tâche accomplie, avait obtenu de devenir dieu (254), et, sans insister sur cet aspect du problème auquel M. Detienne a consacré un article très éclairant, nous conclurons avec lui que l'Héraclès des Cyniques et par là celui des Stoïciens, bref l'Héraclès des savants et des philosophes, doit au visage que les Pythagoriciens du Vème siècle lui avaient modelé quelques-uns de ses traits essentiels, et en particulier celui du Juste souffrant qui, "au début de notre ère, le posera en rival du Christ" (255). "Celluy qui estoit la fontaine de science dont les Athéniens arrousoient leurs engins. Celluy qui tous vices avoit en despit et hayne. Celluy qui les monstres de mer faisoit trembler en leurs abismes, les monstres d'enfer dissipoit, les monstres terrestres confondoit, les tyrans corrigeoit, les orgueilleux humilioit, les humbles exaulçoit. Celluy qui ne faisoit trésor que de vertu... C'estoit la gloire des hommes". Tel est encore l'Hercule "courtois" de Raoul le Fèvre au XVè siècle (256) ! Mais cet Hercule confondant les monstres, corrigeant les tyrans, humiliant les orgueilleux et exauçant les humbles, n'est-il pas aussi celui que choisiront les Révolutionnaires comme l'un des symboles de leur victoire (257) ?
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Fig. 30 : Héraclès "révolutionnaire"
Logotype de la ville de Lyon: vignette de Commune affranchie. appellation donnée à Lyon par la Convention après la r6bellion et le si~ge de la ville - an II-. 70 x 105 mm - Photo R. CHAGNY.
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CONCLUSIONS
Alors que les scènes athéniennes retentissaient peut-être encore des pleurs et des cris du fils d'Alcmène que sans doute perpétuaient les tragédies de naguère, Héraclès, dans le même temps, devenait le héros du travail librement consenti, d'un ponos "enfin délivré" - comme l'écrit joliment Nicole Loraux - "de ses gémissements superflus". Oublié le héros d'Homère qui "pleurait vers le ciel" et se révoltait de devoir accomplir des tâches indignes de lui... Oublié le mercenaire au service d'Augias qui espérait tirer salaire de sa dégoûtante besogne. Héraclès est désormais celui qui, de son plein gré, a choisi de vivre la rude vie de l'effort et, lorsqu'on racontera sa vie - je pense aux tragédies de Sénèque c'est, au-delà des "histoires" qu'il faut bien transmettre, l'orgueil de ce choix qui s'exprimera: "Aucun de mes jours n'est resté oisif... ô quels monstres j'ai vaincus sans qu'aucun roi ne l'eût prescrit" (258) ! Oubliée donc la servitude d'Héraclès et, si l'on aime encore à rappeler qu'il fut l'esclave d'Omphale, ce ne peut plus être, bien sûr, que les chaînes de l'amour qui l'ont ainsi retenu. Ponos librement consenti, ponos délivré certes de ses "gémissements superflus", ponos aussi, il faut le dire, conçu de façon désormais bien abstraite: l'apologue de Prodicos en témoigne qui oppose - c'est du moins la leçon qu'on en a tirée - la mollesse à l'effort, le vice à la vertu. Le problème s'est déplacé sur le plan de la morale, et, si le travail des dieux est désormais si difficile à concevoir, c'est probablement parce qu'à Athènes (car nos sources sont dès lors fortement marquées par sa prépondérance) le travail des hommes était plus facile à percevoir et désormais fortement entaché d'un mépris qui, nous en sommes persuadée, ne s'est que progressivement installé au coeur de la cité. Il est temps désormais de redire ce que - par la médiation de cette double évolution - nous enseigne le mythe d'Héraclès.
1 - Le mythe témoigne, évidemment, d'un temps où le travail, loin d'être une "catégorie simple", était difficile à penser. Nous ne revenons sur ce point, développé dans notre première partie (259), que pour étendre à toutes les sociétés primitives ce qui ne devrait pas être perçu comme une sorte de marque indélébile
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des "structures mentales" des Grecs (260). Les travaux de R. Firth sur les Polynésiens (ils datent de 1939 !) font apparaître comme un fait général cette absence d'un mot unique pour désigner le travail de façon quelque peu abstraite, et il est pour nous d'une importance capitale de constater que, pour ces populations, les mêmes noms peuvent aussi bien désigner le travail, au sens où nous l'entendons aujourd'hui, que certains actes du rituel - la confusion s'exprimant de façon remarquable dans l'expression de "travail des dieux" ou plus simplement "travaux" pour dire le cycle saisonnier des cérémonies (261). Profondément intégré au rite (Les travaux et les jours le montrent assez pour la Grèce), le travail ne paraît pas avoir, en quelque sorte, d'autre fonction que lui: à la fois affirmer l'appartenance au groupe de celui qui le pratique, et, dans le même temps, contribuer à sa reproduction, au maintien d'une collectivité encore fortement arrimée à ses dieux. Ce serait évidemment une belle preuve d'ethnocentrisme que de chercher à isoler l'aspect économique (le travail, comme procès de production) d'un tel contexte. L'exemple mésopotamien permet à la fois d'aller plus loin, et de se rapprocher d'Héraclès: la notion de travaux (qui paraît exister plus volontiers que celle de travail) est très liée à celle de l'ordre donné (sipru, le mot le plus courant pour désigner le travail, est formé sur la racine du verbe saparum = envoyer). Celui qui travaille est, en quelque sorte, en service commandé, et le sens du travail humain serait, précisément, d'accomplir, pour satisfaire aux besoins des dieux, le travail de chaque jour, la "corvée" dont le sens originel se rapprocherait ainsi de "misère", "souffrance", (262). Il y aurait là, précise N. Nougayrol, une sorte de contrat passé entre les dieux et les hommes, ces derniers n'ayant droit à la vie que dans la mesure où ils entretiennent les dieux, où ils travaillent pour eux. Cette conception "pessimiste" d'un travail conçu "comme une peine, comme une chose désagréable", se retrouve dans la Bible qui en fait une conséquence du châtiment divin (263). A nouveau, nous nous sentons très pro~he d'Hésiode - le premier à parler, en Grèce, de travail-, de ses mythes qui l'instaurent comme la marque même de la condition humaine et de la possibilité qu'il offre d'un échange, d'un dialogue avec les dieux ("Travaille, Persès, et tu seras mille fois plus cher aux Immortels" !). Mais nous nous sentons également très proche d'Héraclès, de celui qui fut précisément "envoyé", qui "travailla" sur commande, pour parfaire l'ordre d'un monde quelque peu bâclé par les dieux. Dans cet habitué du ponos qui est à la fois labeur et souffrance - ou plus exactement
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souffrance parce que labeur - nous aurons reconnu le médiateur par excellence et nous aurons mieux compris je crois, pourquoi, à quel moment, et surtout en quel sens Héraclès est, on peut maintenant l'affmner, un héros travailleur.
2. Cette conception du travail, ainsi liée au maintien des rapports harmonieux entre les dieux et les hommes, au maintien donc du groupe dans son environnement et dans sa propre cohésion, est celle d'un temps où l'homme ne connaît qu"'une réalité globale... en laquelle s'associent étroitement nature et surnature" (264), celle du temps où le souverain apparaît comme le plus sûr garant de cette cohésion et de cette harmonie, ainsi que le révèlent tant de textes orientaux (265). Quiconque travaille pour lui, contribue au maintien de cet ordre et de cet équilibre, et c'est, me semble-t-il, dans ce contexte - en Grèce, précisons-le, celui des royaumes achéens - que s'explique le mieux la constante activité du héros, "toujours au service d'un autre", que se conçoit le mieux cette Latreia chez Eurysthée... une dépendance dont l'aspect fortement "général" évoque cette dépendance généralisée qu'est le travail des communautés agricoles, dans le cadre d'une économie palatiale (266). Mais l'Héraclès de la légende est très vite, et surtout - disons-le nettement - l'expression de la servitude personnelle. Un peu à l'image de ce qui, dans le mythe, s'est passé autour de cette idée pérenne qu'est aussi la victoire sur la mort, on assiste, une fois de plus, à la multiplication des épisodes et, avec la même exubérance, le mythe joue de toutes les possibilités du thème: dépendance créée par le misthos qu'on attend d'un maître en échange de son effort... servitude de celui qui ne s'appartient plus, qui a été vendu. Héraclès n'est plus seulement Latris ; il est aussi douLos, le terme qui à l'époque classique désigne l'esclave marchandise. Ainsi, de tous les degrés qui situent l'homme "entre l'esclavage et la liberté", le héros semble avoir parcouru le chemin... un chemin qui est aussi, n'en doutons pas, celui de la lente émergence, au sein des formes traditionnelles et multiples de dépendances, du concept juridique d'esclave. "Le travail par contrat libre, plus ou moins salarié, le travail par asservissement temporaire, l'asservissement même... ", telles sont les formes attestées, dans le Nouveau Monde, de cette évolution et là, comme dans les sociétés antiques, "c'est d'abord le travail et non la personne qui se trouve engagé, mais l'une ne va pas sans l'autre"
473 (267). Le "modèle" de l'esclavage anglo-américain éclaire bien, pensons-nous, la situation ancienne, une situation dont nous retrouvons, nous espérons l'avoir montré, des. "éclats" dans le mythe... souvenirs historiques conservés, utilisés dans une construction imaginaire; de tels "éclats" renvoient bien sûr à la réalité, à cette expérience humaine à partir de laquelle travaille le mythe, même s'il en est bien autre chose que son simple reflet.
3. Et c'est probablement parce qu'avec ce thème du travail nous rencontrons cette expérience matérielle des hommes que nous avons conscience qu'à l'avoir recherchée dans la légende d'Héraclès, nous sommes allée plus loin dans la compréhension du mythe, ou du moins, - restons modeste ! - dans la lecture de ces "bricolages" progressifs qui le font vivre avec la société qui le porte. Plus que jamais nous a semblé légitime notre exigence d'enraciner le mythe dans le temps. Mais il nous paraît aussi, à cet instant, nécessaire de dire les problèmes que nous posent certaines tentatives qui, en apparence, répondent au même besoin; celle de F. Bader, par exemple, qui, dans une Sémiologie des travaux d'HéracMs, entend reconstituer le "discours historique" du mythe (268). Elle distingue en effet trois groupes dans les exploits du héros ; dans le premier (du lion de Némée aux oiseaux du lac de Stymphale) Héraclès est, dit-elle, "le chasseur-guerrier (coupeur de têtes) de l'âge de Pierre" (269) ; dans le second (des écuries d'Augias aux Amazones) "le discours historique concerne l'accroissement de la production agricole et pastorale néolithique" ; le troisième enfin nous conduit (avec Géryon, les Hespérides et Cerbère) au seuil de l'âge du Bronze et le héros "part explorer le monde" alors que sont parfaitement acquis "l'élevage (des troupeaux gardés par un chien chez Géryon), et l'agriculture (symbolisée par les fruits du jardin des Hespérides)" (270). Nous ne discuterons ici ni de l'appartenance - souvent bien peu légitime - de tel ou tel des travaux d'Héraclès aux "groupes" ainsi définis, ni de l'aspect cruellement réducteur du "symbolisme" reconnu à chacun d'entre eux, mais seulement d'une méthode qui débitant le mythe en "rondelles historiques" le prive de cette autonomie nécessaire, de cette spécificité sans lesquelles se perd le discours mythique. Qu'aux racines du mythe se retrouvent des "images" préhistoriques, nous le pensons aussi, mais la construction mythique des "Travaux" ne nous paraît pas devoir être ainsi laminée. Ce qui nous a semblé intéressant, historiquement, c'est précisément l'évolution dans le temps de cet ensemble, l'étude de ses "dérivations" successives et le
474 perpétuel remodelage de ces thèmes que nous avons jugés dominants... Une fois de plus, l'étude des dérivations nous aura permis, peut-être, de mieux retrouver "l'aspect sempiternel" du mythe (271). De l'Héraclès serviteur des débuts à celui d'Avianus qui conseille l'effort au charretier embourbé, effort sans lequel il ne recevra pas l'aide des dieux, il. y a, bien sûr, toute la distanée du mythe à la sagesse populaire; le mythe s'est fait apologue mais n'est-ce pas, dans les deux cas, d'un même système de représentation commune qu'il s'agit, d'une représentation "qui justifie aux yeux des uns et des autres leur inégalité de statut" (272) et qui, "si elle n'a pas été inventée pour contraindre les dominés à consentir à leur domination... existe de telle manière qu'elle entaîne leur consentement" (273).
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DEUXIEME CHAPITRE IMAGES DU SACRIFICE
"Le sacrifice est l'antith~se de la production, faite en vue de l'avenir, c'est la consumation qui n'a d'intér2t que pour l'instant même. C'est en ce sens qu'il est don et abandon" (274).
On sait que l'un des huit drames satiriques écrits par Euripide racontait la mésaventure de Syleus, un riche vigneron, auquel Hermès réussit un jour - il l'avait déjà fait pour Omphale! - à vendre Héraclès comme esclave. Le héros, comme dans le mythe, se met aussitôt au travail qu'une fois de plus il se voyait imposer; mais la vigne qu'il devait biner est vite arrachée par ses bras trop puissants et, sur les ceps entassés et enflammés, Héraclès sacrifie à Zeus les plus beaux des boeufs qu'il aurait dû garder, festoie lui-même avec les meilleurs des vins de son maître et, quittant une demeure ruinée et d'ailleurs emportée par le courant d'un fleuve, qu'une fois encore il avait détourné, il emmène, de surcroît, la fille de la maison. Sur le mode comique, le Syleus d'Euripide oppose ainsi à l'activité productrice le mouvement dangereux et pécipité de la violence sacrificielle... Surinterprétation ? Il se pourrait que tel ne soit pas le cas; l'histoire d'Héraclès, précisément, tendrait à le prouver, par les rapports étranges qu'entretient le héros avec le sacrifice... D'ailleurs que raconte le mythe de Géryon ? Ces troupeaux, si beaux, qu'Héraclès doit aller quérir aux confins du monde habité, qu'il ramène à grand peine au long des routes méditerranéennes, qu'il a tant de mal à soustraire à de multiples convoitises, Apollodore ne dit-il pas qu'ils seront, finalement, sacrifiés à Héra ? (275).
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Fig. 31: Héraclès et Géryon
1. Pyxide proto-corinthienne (British Museum, 65-7-20-17) Cf. C. SMITH, JHS, 5, 1884, pp. 176-184. Représentation d'après L. TIBERI, Stesicoro e le raffigurazioni vascolari della Gerioneide, Arche%gia c!assica, XXXIX, 1, 1977, pp. 175-179, pl. XLIV.
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2.
Amphore à col de Vulci (Cabinet des Médailles, 202). Ici d'après E. GERHARD, Auserlesene griechische. Vasenbilder, Berlin,, 1840, pl. CVI.
478 1 - HÉRACLES BOUVIER, PROTECTEUR DES TROUPEAUX
Il Y a dans le mythe de Géryon - Walter Burkert l'a fortement souligné (276) - trois thèmes: celui du voyage vers l'OcCident, vers cette brumeuse Erythie où s'arrêtent les frontières du monde connu; celui du combat contre le tricéphale Géryon; il Ya aussi la capture du bétail et ce long retour qui fait d'Héraclès un bouvier, soucieux de l'intégrité de son troupeau... Rappel nécessaire, dans la mesure où la représentation donnée du mythe de Géryon se limite souvent, conformément au topos d'un Héraclès combattant, à la lutte contre le monstre triple. Or les troupeaux sont généralement très présents sur les premières images que donnèrent les peintres grecs de cet exploit occidental d'Héraclès: ils occupent, en particulier, toute la partie arrière d'une pyxide protocorinthienne du Phalère (conservée au British Museum) que T.J. Dunbabin date de 680-670 et qui paraît bien être - pour nous - la première représentation figurée des aventures du héros dans l'île de Géryon (fig. 31-1) (277). On les retrouve sur la très belle amphore à col du Cabi.net des Médailles (278), qui montre Héraclès, revêtu de la peau du lion et menaçant de son arc le triple monstre que le peintre a figuré ailé, comme dans le poème de Stésichore (279) et identifié sous le fonne chalcidienne de r ApUF OND: (280) ; Athéna, portant l'égide et brandissant sa lance assiste le héros; derrière elle, piétine le magnifique bétail d'Erythie (fig, 31.2). A Athènes sur une coupe conservée à Munich (281) - et signée conjointement parle pottier
Fig. 32 : Héraclès et Géryon Coupe de Vulci (conservée à Munich. 2620) signée par le potier Cachrylion et le peintre Euphronios Cf. Beazly ARV 2,16.
479 Cachrylion - Euphronios représente de meme, sur une face, le combat, et, de l'autre côté, le troupeau g~ par des èompagnons anonymes d'Héraclès en tenue d'hoplites avec leurs boucliers à épisèmes (fig. 32). En Laconie, c'est encore "Héracl~ emmenant les boeufs de Géryon que, selon Pausanias, Bathyclès avait choisi pour illustrer l'exploit du héros sur le trône d'Apollon à Amyclées (282). A Chypre enfm, pour en terminer avec une énummtion qui risquerait d'être fastidieuSe, le bas relief sculpté sm la base du colosse d'Athiénau, généralement daté de la seconde moitié du VIème siècle (283), insiste de même sur la capture du troupeau: A gauche de la représentation, Héraclès occupe toute la hauteur de la composition, alors que les scènes qui l'opposent à Orthos le chien - ici à trois têtes - de Géryon et à Eurytion se divisent en deux registres; le troupeau, en rangs serrés, défendu par son bouvier, occupe, à lui seul, tout le registre inférieur (fig. 33). Il
Fig. 33 : Bas relief de la collection Cesnola (haut. O.53m.) Provenance: Athiénau (Conservé à New York) Cf. PERROT et ClDPIEZ, op. Cil., p. S7S. (représenté ici d'après CECCALDI, PI. V.)
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Cependant, si le trésor des Athéniens dédié à Delphes après la bataille de Marathon, développe encore le thème des troupeaux sur trois des six métopes consacrées à la géryonomachie, le temple de Zeus, à Olympie, imposera bientôt sa représentation canonique en réservant l'espace sculpté d'une seule métope aux deux principaux protagonistes du drame : Héraclès et Géryon... L'époque classique, ainsi, commençait à oublier un aspect de la geste occidentale d'Héraclès, un aspect que le texte d'Apollodore - très proche, comme le dit Photius, dans sa Biblioth~que, des plus anciens récits des Grecs - pennet de reconnaître, un aspect que souligne encore, dans certains cas, le culte du héros ou du dieu.
1·1 C'est, en effet, cette "vulgate" du mythe héracléen qu'est le texte d'Apollodore qui nous permet, dans un premier temps, de retrouver la trace du bouvier qu'à certains égards fut Héraclès: le héros est, dès son jeune âge, obligé de quitter le palais (où, frappé par Linos, son maître de musique, il vient de le tuer d'un coup de lyre) et il est envoyé par Amphitryon "auprès de ses troupeaux de boeufs" (284). C'est là qu'il grandit, devient "d'une force et d'une grandeur extraordinaires" et c'est là, qu'à dix-huit ans, "étant encore avec les troupeaux", il tue son premier lion, celui du Mont Cithéron... un lion qui sortait de la montagne"pour ravager les troupeaux d'Amphitryon et ceux de Thestius" (285). Maître des fauves certes, protecteur des troupeaux - les deux fonctions en Grèce comme en Orient sont nonnalement liées - c'est ainsi que, dans le mythe, Héraclès fait ses débuts dans la vie. Protecteur des troupeaux, Héraclès l'est encore d'une autre manière, lorsque, luttant contre Erginos et les Minyens, il met fin au coûteux tribut que ces derniers avaient imposé aux Thébains (cent boeufs, chaque année, et ce pendant vingt ans !) et impose en revanche aux vaincus un tribut double de celui qu'ils avaient eux-mêmes exigé (286)... Protecteur des troupeaux, Héraclès l'est, enfin, lorsque, dans le Péloponnèse, il accomplit, sur l'ordre d'Eurysthée, ses premiers travaux: le lion de Némée était ainsi pour Sophocle "le fléau des bouviers" (287) ; l'hydre, nourrie dans les marais de Lerne, et cachée près des sources de la fontaine Amymonè, sortait, dit Apollodore, pour "ravager le pays et détruire les troupeaux" (288), et, pour Euripide, la biche était, pareillement, "un fléau pour les paysans" (289). Quant au sanglier, s'il avait son repaire sur le mont Erymanthe, il dévastait,
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dit Apollodore, "toute la Psophide" (290). On aurait tort de sous-estimer le danger que les grands fauves ont pu, dans le lointain passé de la Grèce~ faire peser sur le bétail ; on aurait tort, en conséquence, de méconnaître la crainte qu'en concevaient les éleveurs; dans les Argonautiques, Apollonios l'évoque encore, lorsque faisant retentir les grands cris de Jason, dans les solitudes libyennes, il compare ce dernier au lion "qui dans les bois rugit en quête de sa femelle et, d'une voix rauque, fait retentir au loin les vallons des montagnes, tandis que les boeufs, aux champs, frissonnent d'épouvante, ainsi que les bouviers qui mènent les boeufs" (291). Et c'est encore un service rendu aux paysans que lit Archias dans l'exploit du héros à Némée (292). C'est ainsi en homme fort, en défenseur des biens - c'est-à-dire essentiellement des troupeaux - des grands propriétaires que, tant à Thèbes qu'à Mycènes, apparaît d'abord Héraclès. En Elide, auprès d'Augias, c'est un autre visage du héros qui transparaît: celui du valet de ferme, du salarié, à qui l'on confie les plus sales besognes... TI reste que les troupeaux sont toujours omniprésents (293) : c'est parce que le roi d'Elide "avait de nombreux troupeaux de boeufs" qu'Héraclès lui propose "d'enlever tout le fumier de ses étables en un jour", cela contre "la dixième partie de son bétail" (294). Nous ne reviendrons pas sur cet aspect des "travaux" que nous avons déjà longuement développé (295) et redirons simplement que, si les Grecs ont répugné à représenter ou à raconter cet exploit qu'ils jugeaient indigne du fils de Zeus, seule paraît survivre cette complaisance avec laquelle on unit Héraclès à l'image des troupeaux. L'idylle XXV de Théocrite en est la preuve, qui fait arriver Héraclès dans le royaume d'Augias et qui - contrairement à ce qu'on attend - ne dit pas un mot du nettoyage des étables, n'évoque pas le misthos demandé par le héros et, pour tout dire, dissimule absolument l'objet de sa visite. Celle-ci n'est prétexte qu'à l'évocation du triomphe du fils d'Amphitryon sur le lion de Némée, dont le bruit est parvenu jusqu'aux oreilles de Phylée, le fils d'Augias (296) ; elle se prete surtout à une longue et poétique évocation des troupeaux du roi d'Elide, qu'en compagnie d'Héraclès, ce dernier passe en revue. Au coucher du soleil (lorsqu"'Hélios fit tourner ses coursiers vers l'Occident") rentrent vers leurs bergeries, leurs étables ou leurs parcs, les gras moutons et les myriades de boeufs du roi d'Elide. Les troupeaux succèdent aux troupeaux, "comme roulent dans le ciel les nuages gorgés de pluie" poussés par Notos ou Borée, ou "comme se
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pourchassent sans fin, sur la mer, soulevées par la violence du vent, une vague après l'autre" (297) Mais c'est, bien sûr, dans l'accomplissement du dixième de ses travaux qu'Héraclès nous est présenté comme le bouvier par excellence, chargé de conquérir les boeufs de Géryon "couleur de pourpre" (298). Il s'acq\litte de cette tâche par un triple meurtre: celui d'Orthros, le chien à deux têtes, celui du berger Eurytion, venu à son secours, celui du monstre enfin, averti du vol de ses troupeaux par Ménoitios, le bouvier d'Hadès (299). n faut alors qu'Héraclès ramène le bétail à Eurysthée, en bouvier consciencieux et soucieux de ne perdre aucune de ses bêtes : à s'en tenir au texte d'Apollodore, telle paraît bien être, en effet, sa seule préoccupation; ainsi s'expliquent, en tout état de cause, tous l~s épisodes du voyage: c'est parce qu'ils voulaient lui enlever ses boeufs, que, dans la Ligurie, Héraclès tue Ialébion et Dercynos, donnés comme fils de Poseidon (300) ; c'est parce qu'à Rhégion un taureau se détache du troupeau et traverse le détroit de Messine que le héros, à sa suite, passe en Sicile; c'est parce que ce même taureau a été mêlé, par Eryx, à ses propres troupeaux que, pour le récupérer, il affronte le roi des Elymes à la lutte et le terrasse (il n'est pas question, nous l'avons vu, chez Apollodore, de l'enjeu rapporté par Diodore et Eryx n'engage en rien son royaume !), et c'est, en définitive, avec beaucoup de difficultés, provoquées tant par Héra (qui utilise un taon pour disperser les bêtes dans les montagnes de Thrace) que par le Strymon, qu'il ramène à Eurysthée une partie seulement des boeufs que, de haute lutte, il avait conquis. Protecteur et gardien des troupeaux, certes, mais aussi "voleur" et pourvoyeur de bétail, tel paraît bien être Héraclès ; le dixième de ses travaux, dans la rouge Erythie, peut bien être lu, en effet, comme l'une de ces razzias, l'un de ces raids, par lesquels, dans une société pastorale, on tente de s'approprier la richesse essentielle, la base même de l'économie, celle qui règle aussi bien les rapports d'amitié que les échanges. Une fois de plus l'étude des sociétés traditionnelles vient éclairer des pratiques que, sans leur exemple, on comprendrait mal. Nombre de sociétés pastorales, en effet, légalisent de telles "opérations de transfert" que la langue juridique nomme abigéat : c'est le cas en Sardaigne où, de surcroît, le vol du bétail fait souvent le balente, "l'homme valeureux... capable d'assurer la survie de sa famille" (301) ; c'est le cas chez les Berbères ou l'asrarfi (le "receleur" dans les traités de droit coutumier rédigés par les Français) joue le rôle quasi officiel d'un
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intennédiaire pour que d'éventuelles négociations entre voleur et volé se déroulent dans "les règles du bien, de la courtoisie et des bonnes manières" (302). Là encore l'auteur du vol trouve dans son acte le moyen de prouver sa bravoure; dans la société guerrière touarègue traditionnelle le "rezzou" est même l'épreuve qualifiante par excellence, celle qui pennet au noble guerrier de prouver sa suprématie (et du même coup celle de sa classe). Dans les poèmes homériques n'est-ee pas encore en têtes de bétail qu'on mesure la richesse d'un roi? c'est en tout cas ainsi - la fruste comptabilité du porcher en témoi- gne - qu'Eumée évalue la prééminence d'Ulysse (303); et le gage de la victoire est bien souvent la mainmise sur le troupeau : l'expédition de Nestor en Elide se solde ainsi, dans l'Iliade, par un butin fabuleux; le héros, en effet, ramène à Pylos des boeufs, moutons, porcs et chèvres en quantité, cinquante troupeaux de chaque espèce, et cent-cinquante juments avec leurs poulains (304). La mythologie et la littérature des Grecs sont ainsi pleines de ces vols de bétail : "la grande richesse consistait alors à avoir une grande quantité de boeufs et de chevaux", constatera Diodore, qui justifie ainsi à la fois la convoitise de Nélée désireux de s'approprier les troupeaux du Thessalien Iphiclès et celle d'Eurysthée à l'égard des boeufs de Géryon (305). L'histoire d'Héraclès multiplie de tels épisodes, qu'il s'agisse de la guerre dans laquelle s'entre-tuent, pour les boeufs de leur père, les fils d'Electryon et les Taphiens qui tentaient d'enlever les troupeaux; qu'il s'agisse de ces mêmes troupeaux qui, ramenés par Amphitryon, lui valurent et le royaume et la fille du roi de Mycènes, mais aussi, plus tard, son exil (306); qu'il s'agisse, enfin, du vol de ces boeufs pour lequel le jeune Iphitos, fils d'Eurytos, vint auprès d'Héraclès et dont la mort involontaire provoqua la maladie du héros et la nécessité d'une réparation: son esclavage chez Omphale (307). Mais l'archétype de ces vols de troupeaux - plus proche sans doute de l'exploit d'Héraclès chez Géryon - semble bien être celui dont Hennès, "ce brigand", se rendit coupable, dans "les montagnes ombreuses de la Piérie" aux dépens de l'archer Apollon (308)... Peut-être ne suffit-il pas, alors, de remarquer, avec Bruce Lincoln (309), l'extraordinaire importance du bétail dans la vie économique des sociétés pastorales, et en particulier indo-européennes, de souligner la fréquence des razzias de troupeaux tant dans le Rg Veda que dans l'épopée irlandaise (310), de rapprocher de tels récits - et reconnaissons que le mythe de Géryon engage à le faire - du meurtre du tricéphale, autre figure capitale des panthéons indo-européens, pour les inscrire dans le cadre de la seconde fonction (311). Nous l'avons
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dit déjà: le combat contre Géryon est autre chose que la version grecque du prototype établi par Trito pour ses descendants indo-européens, les rapts de troupeaux autre chose qu'une idéalisation "de la fonction guerrière" ; le prouvent bien, nous semble-t-il, certains caractères du culte d'Héraclès, tout particulièrement dans cet Occident parcouru par le héros, lorsqu'il ramenait à Tirynthe ses boeufs à la démarche torse.
1-2 Nous passerons très vite sut cet aspect étudié depuis longtemps par Jean Bayet (312). En Italie méridionale, ce n'est pas en guerrier qu'apparaît Héraclès mais en protecteur de l'agriculture, en garant de l'abondance, et ses fonctions paraissent marquées d'une touche nettement apotropaïque : à Métaponte où il est associé à Déméter et Perséphone, il est destructeur de sauterelles; à Crotone, il chasse les mouches; entre Locres et Rhégion, il éloigne les cigales... insectes certes nuisibles, mais sans commune mesure avec ces monstres dont le héros avait débarrassé le Péloponnèse! On aurait tort, cependant, de ne voir là que quelques particularités locales; en Grèce, survivaient les traces ténues de pareilles fonctions: dans la région de l'Oeta Héraclès était nommé Kopvon{wv et Pausanias rapporte qu'à Olympie, Héraclès, sacrifiant à Zeus, sur l'autel fait des cendres des victimes que, suivant certaines traditions, il avait lui-même élevé, fut tellement incommodé par les mouches que sur le champ il immola une victime à Zeus Apomyios. A peine le sacrifice était-il achevé que l'on vit toutes les mouches s'envoler au delà de l'Alphée (313) ... Destructeur de sauterelles, chasseur de mouches, Héraclès l'était donc aussi en Grèce et l'intérêt de ce dernier exemple est de rapporter, sinon le sacrifice, du moins l'érection de l'autel de cendres, lieu de ce curieux usage, à cet Héraclès, dactyle de l'Ida, auquel Pausanias, dans le récit de sa visite d'Olympie, fait tant de place (314)... Mieux préservés encore en Occident qu'en Grèce propre paraissent d'ailleurs avoir été les rapports avec les grandes divinités dispensatrices de vie: Déméter et Coré-Perséphone en Sicile, nous l'avons vu, mais aussi à Métaponte; Artémis à Poseidonia; Héra surtout, à Crotone, où près du sanctuaire qu'il avait fondé il règnait avec elle, sur les troupeaux bovins. Et, si Tite Live mentionne encore les grasses prairies où toutes sortes de troupeaux "paissaient sans berger", les archéologues mettent au jour des ex-voto archaïques dont certains prouvent (un taureau du Géométrique final, par exemple) qu'au cap Lacinion, c'était
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bien une maîtresse des animaux que, dès cette époque, vénéraient les Grecs (315). On est loin, avec ces exemples, du héros de la seconde fonction!
1-3 Plus qu'ailleurs peut-être, c'est à Rome que le héros, devenu divin, apparaît comme le protecteur des troupeaux : cela est vrai du mythe fondateur de son culte, puisque la légende de Cacus se greffe sur le récit du retour du héros avec les boeufs arrachés à Géryon et qu'elle peut se concevoir comme l'un de ces nombreux vols dont Héraclès fut victime à son retour vers la Grèce (316) ; cela est vrai de la localisation de ses principaux cultes, près du Forum Boarium, en ce lieu de commerce actif, au croisement des deux routes qui assurèrent à Rome sa puissance : la voie d'eau - le Tibre - et la voie terrestre qui, par le Pont Sublicius et le Vélabre, reliait l'Etrurie maritime à l1talie centrale. Que ce carrefour fut très tôt fréquenté, de récentes fouilles romaines le prouvent (317) ; que le bétail ait joué un grand rôle dans ces échanges au moment où - plus tôt sans doute que ne le pensait J. Bayet - se développait le culte d'Hercule, le caractère du rituel observé à l'Ara Maxima semble en attester: la tradition romaine présente en effet la dîme primitive - instituée par le héros lui-même (318) - comme un rite pratiqué par des propriétaires de troupeaux, une offrande pastorale (319). Et le caractère du banquet sacrificiel, qui obligeait à la consommation totale de la victime (320), fait d'Héraclès, non seulement le protecteur des troupeaux, mais insiste sur la finalité de ses fonctions : pourvoir en viandes la communauté des hommes. Athénée, dans les Deipnosophistes, rapporte complaisamment l'opulence de ces banquets qui, à Rome, sont donnés dans l'enceinte sacrée d'Héraclès: le vin miellé y coule généreusement, mais surtout le frappe l'extravagante abondance des viandes: chairs bouillies ou rôties des victimes qu'on vient de sacrifier (321). Plus tard encore, lorsque cette dîme fut acquittée en monnaie, des textes historiques prouvent qu'elle se solda toujours par de grands festins. De tels banquets suivent ainsi, nous apprend Plutarque, les offrandes de Sylla ou de Crassus (322), celles de Lucullus, ou d'Octavius Herenus également si l'on en croit Diodore (323) et Macrobe (324). Mais plus encore que l'Hercule romain, nous l'avons dit, déjà, l'Hercule adopté par les populations italiques garde très fortement ses attaches populaires: en témoigne l'extraordinaire diffusion des petits bronzes qui, dès le VIème siècle, le
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représentent. J. Toutain, déjà, avait remarqué la forte empreinte de son culte dans les régions montagneuses de l'Italie centrale (325), et, nous l'avons dit, les découvertes - pour le territoire des Paeligni où elles ont été soigneusement recenséesdémontrent la présence du dieu dans les endroits fréquentés essentiellement par les bergers (326). Le caractère pastoral du culte est, ici, si marqué qu'il paraît à Franck van Wonterghem que, lorsqu'aux IITème et ITnd siècles, s'organise officiellement la transhumance, on pourrait, chez les Paeligni et leurs voisins, retracer, grâce aux trouvailles héracléennes, la carte des cal/es publicae reliant les pâturages d'été des montagnes aux pâturages d'hiver des Pouilles et de la Campanie. Pour J. Toutain la dîme aussi bien que le caractère pastoral d'Hercule seraient des emprunts aux anciens cultes italiques, latino-ombriens et, sous le nom d'Hercule, les Romains auraient honoré, non seulement le héros grec venu d'Italie méridionale, mais encore "quelque divinité italique dont le souvenir n'avait pas disparu à l'époque historique". Les premières versions du mythe de Cacus semblent bien lui donner raison: loin d'être un doublet de ces vols de troupeaux qui se répètent tout au long du retour d'Héraclès, elles donnent en effet à un héros local Récaranus la victoire sur le brigand Cacus. Dans l'Origo gentis Romanae - attribuée autrefois à Sextus Aurelius Victor et dans laquelle on voit aujourd'hui une oeuvre anonyme du IVème siècle de notre ère - sont rapportées deux versions de la légende dont l'une aurait pour auteur l'historien L. Cassius Hemina (dans le premier livre de ses Annales) et l'autre proviendrait des Libri pontificalium . Toutes deux auraient pris corps au Und siècle avant notre ère (327). D'après Cassius Hemina c'est un berger grec d'origine: Recaranus (si grand et si courageux qu'on l'avait appelé Hercule!) qui est victime du vol, alors qu'il avait reçu, avec son troupeau, l'hospitalité du roi Evandre. Cacus, un esclave de son hôte, dérobe ses boeufs et les dissimule dans une caverne dans laquelle il les a fait entrer à reculons... Hercule, trompé par le stratagème, ne retrouve pas son bien lui-même. C'est Evandre qui découvre le coupable, en fait abandon noxal à Recaranus en même temps qu'il lui restitue son troupeau. D'après Servius, cette version serait la plus sûre (peut-on traduire la plus sûrement romaine ?), celle qu'adoptent, en tout cas, "les philologues et les historiens" (328), celle que suit aussi Verrius Flaccus, qui toutefois, en nomme le héros Garanus (329). L'autre version, celle des Libri pontificalium (330), est plus complexe, plus "contaminée" peut-être par des éléments étrangers (et "présente en termes très différents les questions de
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droiL." (331), ce qui n'est pas, ici, notre préoccupation majeure mais peut fournir la preuve d'une origine différente). Si la trame de la légende est la même, la victime est ici Hercule, qui découvre lui-même son voleur et, le prenant en flagrant délit, le tue de sa main. C'est, bien sûr, de cette seconde version que s'inspireront les historiens et les poètes qui devaient, plus tard raconter l'histoire de Cacus et la mettre en rapport avec le développement du culte d'Hercule à Rome. Ce détour romain est pour nous plein d'intérêt; il atteste, semble-t-il, de l'existence chez les populations italiques du mythe du voleur de troupeaux tel qu'il est, nous l'avons vu, présent de la Grèce (et à de multiples reprises dans la légende d'Héraclès) à l'Inde védique; et, ici, comme en Grèce ou comme en Inde, il est en rapport avec le tricéphale indo-européen. Le Recaranus de la légende primitive, en effet, n'est autre, probablement, que le "tricaranos" des stèles dauniennes étudiées par S. Ferri (parmi ces stèles représentant des monstres infernaux se trouve d'ailleurs un Héraclès à trois cornes de l'époque archaïque) (332). C'est ainsi un vieux mythe italique, probablement d'origine indo-européenne, qu'aurait attiré à lui le héros grec, se confondant plus ou moins avec le génie local qui en avait été le héros. Soulignons cependant une difficulté: dans le mythe grec le tricéphale est l'adversaire, le maître des animaux, et Héraclès le voleur... A Rome, lorsque la légende grecque contamine la version primitive, c'est Héraclès qui, revenant avec les boeufs de Géryon, apparaît comme le maître des animaux; on "sauvera" la triplicité en la reportant sur le voleur: c'est Cacus qui, dans le récit canonique, deviendra le monstre triple; la structure du mythe s'est inversée. Encore faut-il bien préciser que, si Héraclès a pu ainsi bénéficier d'un héritage italique qui allait assurer son succès, c'est très vraisemblablement que de sérieuses affinités favorisaient l'association. Faut-il voir, en conséquence, comme l'a fait Jean Bayet, dans l'Héraclès d'Italie méridionale, chasseur d'insectes et protecteur des troupeaux, le seul prototype de l'Hercule de l'Ara Maxima? Nous ne le pensons pas (333): l'Héraclès grec, avons-nous vu, conserve parfois ces caractères que l'Occident, il est vrai, devait affirmer... L'Héraclès protecteur des troupeaux que retrouve Apollodore, le "n6TV1OÇ" M:6VTWV qui en Orient n'a aucun mal à rejoindre Nergal, Sandas ou Melqart (?) ces autres maîtres des fauves, pouvait à bon droit - nous y reviendrons recueillir cet héritage.
488 II. DE LA CUISINE.•. AU SACRIFICE
"Déméter nous fournit le pain, Dionysos le vin, Héraclès la viande... " Ainsi parle Ménippe, à la table des dieux (334)... Et c'est peut-être une façon de concevoir le rôle d'Héraclès protecteur des troupeaux et pourvoyeur de viande; peut-être une façon de dire également que, s'il passe pour un glouton, son gros appétit en fait surtout un mangeur de viandes: tCTf1WI!&VOÇ l'aï" xpÉaal, dit de lui Clément d'Alexandrie! (335).
2-1 La chose n'est pas nouvelle: s'il fait mourir de peur son entourage lorsqu'il mange, si ses mâchoires font un bruit d'enfer, si ses canines grincent (336)... c'est parce qu'à croire Epicharme son repas est celui d'un fauve, et la tradition n'a jamais cessé d'épiloguer sur son appétit insatiable. Athénée s'en fait un écho complaisant: "dans sa faim dévorante, il engloutit le rôti et les charbons avec", aurait écrit Ion, s'inspirant en cela de Pindare (337). C'est pourquoi parmi les oiseaux, on lui donna comme attribut la mouette, célèbre pour son gros appétit et son régime carnivore (338). Ses goûts iraient de préférence aux sangliers - sauvages! et aux taureaux - bien encornés - (339). Ces derniers surtout avaient la faveur du héros et l'expression paraît être devenue proverbiale, qui associe à Héraclès "ceux qui mangent le boeuf' (340). La mythologie est ainsi pleine d'anecdotes qui connotent Héraclès comme un "dévoreur" et font du boeuf sa victime favorite: chez Coronos, l'un des Argonautes, il avale ainsi un boeuf entier (341) et c'est également un boeuf entier qu'on rôtit pour lui dans les Grenouilles (342). On connaît mieux encore l'agôn singulier qui l'oppose à Léprée, ce petit-fils de Poseidon qui avait pris parti pour Augias, le roi d'Elide, dans son conflit avec le héros. Ayant tous deux égorgé un boeuf (pour Pausanias) ou un taureau (pour Athénée), ils luttèrent de vitesse pour le manger. Selon les uns Héraclès fut victorieux (343), selon les autres Léprée ne fut pas moins expéditif que son rival (344). Les deux versions se rejoignent dans une même conclusion: ayant osé défier le héros au combat, Léprée fut non seulement vaincu, mais encore tué par Héraclès. Plus significatives, encore, sont les anecdotes qui, dans le mythe, l'opposent à des bergers ou à des bouviers. L'une d'entre
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elles, évoquée dans les Questions Grecques de Plutarque (345), se trouve associée aux déboires qu'Héraclès connut avec les Méropes, lorsqu'au retour de la première expédition de Troie, il débarqua (ou, selon l'Iliade, fut jeté par la colère d'Héra) (346) sur les côtes de l'île de Cos. Apollodore retient simplement que les habitants, le prenant pour un pirate, l'éloignèrent à coups de pierres... en vain, car le héros prit leur île et tua leur roi (347). Plutarque, avec plus de détails, raconte comment Héraclès, ayant rencontré un troupeau, demanda à son berger, Antagoras, de lui céder un mouton. Plein de confiance en sa force, Antagoras accepta d'en faire l'enjeu de la lutte qu'il lui proposait. Héraclès s'exécuta, mais les Méropes accoururent au secours du berger; les Grecs vinrent aussi soutenir le héros; toutefois, comme ils étaient en très petit nombre, ils furent bientôt obligés de fuir et Héraclès ne dut son salut qu'à une femme thrace qui le cacha en lui faisant porter des habits féminins... Certes il pourrait être difficile d'établir là un lien quelconque avec le sacrifice, si le récit ne fonctionnait pas comme un aition, - nous n'y reviendrons pas (348) - pour expliquer les particularités du rituel d'Héraclès à Cos, s'il ne s'éclairait pas, de surcroît, d'autres anecdotes qui opposent Héraclès - cet incorrigible glouton - à d'autres (7) bouviers. Ainsi à Rhodes, dès ses premiers pas dans l'île, - il venait de débarquer à Thermydres, le port des Lindiens - il rencontra un bouvier, "détela l'un des deux taureaux qui traînaient son chariot, le sacrifia et s'en régala. Le bouvier, trop faible pour lui résister et retiré sur une hauteur, se mit à l'accabler de ses imprécations; c'est pourquoi, de nos jours encore - conclut Apollodore - les Rhodiens, lorsqu'ils sacrifient à Héraclès, le font avec des injures" (349). Encore une légende étiologique (curieusement placée, d'ailleurs, dans le récit d'Apollodore, puisque c'est pour passer de l'Egypte à l'Arabie qu'Héraclès fait escale à Rhodes !) et destinée, quant à elle, à expliquer une particularité du rituel d'Héraclès dans l'île: les imprécations qui accompagnent le sacrifice perpétré en son honneur. Or Philostrate nomme Théiodamas, ce berger rhodien généralement anonyme (350), Conon ajoute qu'Héraclès était, dans cette expédition accompagné de son jeune fils Hyllos (351)... autant de détails qui laissent à penser que cette aventure forme un véritable doublet avec celle que vécut Héraclès chez les Dryopes, non loin de l'Oeta dont on connaît l'importance dans la légende du fils d'Alcmène. Suivons, une fois de plus, Apollodore, qui la rapporte, dans des termes fort comparables à
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ceux dont il usait pour la version lindienne. C'est donc en traversant le pays des Dryopes que, selon l'auteur de la Bibliothèque, "Héraclès souffrant de la faim et rencontrant le bouvier Théiodamas se régala de l'un de ses taureaux après l'avoir sacrifié" (352). La légende est très souvent évoquée: Apollonios, dans les Argonautiques, fait d'Hylas, le compagnon cher à Héraclès, le fils du "divin Théiodamas qu'il avait tué sans pitié au pays des Dryopes dans une querelle au sujet d'un boeuf de labour" (353). Pour lui d'ailleurs, ce n'est pas poussé par la faim dévorante qu'Héraclès presse le laboureur de lui céder un de ses boeufs, mais bien plutôt parce qu'il cherchait "un funeste prétexte pour porter la guerre chez les Dryopes". Quant à son scholiaste, plus disert, il raconte comment, s'étant condamné à l'exil pour le meurtre du centaure Nessos, le héros grec traversa le pays des Dryopes avec toute sa famille, comment son fils Hyllos et Lichas son gouverneur ayant un besoin urgent de manger, il prit l'un des boeufs que Théiodamas venait de lui refuser et "l'ayant sacrifié, le mangea avec sa famille" ; il rapporte encore comment Théiodamas ameuta les Dryopes contre Héraclès "qui se trouva réduit à une si grande détresse que Déjanire elle-même fut obligée de prendre les armes et qu'elle fut blessée au sein"; il explique enfin qu'ayant défait et tué Théiodamas, il prit et éleva son fils Hylas et, "pour ôter aux Dryopes l'occasion de se livrer à leur brigandage habituel, il les força à s'établir dans les environs de Trachine et du Mont Oeta... espérant qu'ils deviendraient plus humains par la fréquentation de gens plus civilisés" (354). Rhodes ou le pays des Dryopes ? Dans le second cas, le récit explique la migration forcée des Dryopes et entre dans les canons de la légende d'un Héraclès "civilisateur". Dans le premier cas, il est - ce qui nous paraît capital - en rapport avec le rituel même du sacrifice... Contre la tradition qui voit, dans l'épisode lindien, le doublet "placé par quelque poète rhodien, peut-être Pisandre de Camiros... dans l'île de Rhodes" (355), nous serions, quant à nous, tentée de lui accorder toute l'attention qu'il nous paraît mériter. Déjà la version de Callimaque - le plus ancien, à notre connaissance, des auteurs qui rapportent l'épisode - rapprochait semble-t-il, dans les Aitia (des passages malheureusement fort corrompus, en témoignent), le rituel d'Apollon à Anaphé et celui d'Héraclès à Lindos - qui tous deux supposent des imprécations au moment du sacrifice (356) - et l'histoire de Théiodamas chez les Dryopes, dans sa forme traditionnelle (357) ; mais il semble bien qu'il ne soit pas, comme le souligne J.H. Croon (358), la
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bien qu'il ne soit pas, comme le souligne J.H. Croon (358), la source d'Apollodore, puisque celui-ci, le seul dans tout le corpus, donne à la légende une localisation: le port de Thennydres. Il paraît donc bien être l'héritier d'une tradition indépendante, peut-être locale, mais hélas difficile à situer dans le temps. Nous nous attarderons quelques instants à cette version lindienne pour mettre l'accent sur quelques particularités de l'épisode: 1. Non seulement Héraclès fait peu de cas du refus du bouvier, se saisit du boeuf, le sacrifie et fait bombance (et ce dans toutes les sources), mais il ne se soucie pas plus des malédictions qui le poursuivent; Conon précise même qu'il en rit et déclare "que jamais festin ne lui procura plus de plaisir que celui-ci, pris au milieu des malédictions" (359) ; on trouve chez Lactance la même affmnation (360). 2. Pour Philostrate, qui décrit un tableau - peut-être imaginaire d'ailleurs - Héraclès ne prête, de même, attention aux imprécations du laboureur - ici nommé Théiodamas, nous l'avons dit - que pour en sourire. Cet auteur donne, de surcroît, des précisions d'un grand intérêt: le feu, allumé pour cuire le boeuf l'a été semble-t-il avec les bouses de l'animal (361); Héraclès fait rôtir les chairs (pas question ici de bouilli !) et s'impatiente, il "tâte les chairs pour voir si elles s'attendrissent" (362), il reproche au feu sa lenteur (363)... il est tout tendu vers le boeuf (364)..., autant d'expressions qui disent la hâte du héros et son dédain des manières de table, aussi bien que des conventions du sacrifice. 3. Avec la description de Philostrate, le développement que consacre Lactance à l'originalité du sacrifice que les Lindiens offrent à Héraclès constitue notre source la plus complète (365). - Les injures et les malédictions (maledictum et execratio ) dont à cette occasion, on accable Héraclès lui paraissent une atteinte à l'euphémia (en grec dans le texte) qui, nonnalement règle le sacrifice. - Si le récit étiologique diffère peu (encore que, chez lui, Héraclès, qui avait proposé d'acheter un boeuf, "ne pouvant en obtenir un, s'empara des deux" et engloutit ainsi l'attelage au complet!) il est plus explicite: le laboureur, au travail, refuse de vendre l'un de ses boeufs, car son espoir de cultiver la terre repose sur eux deux (quod spes sua omnis colendae terrae duobus illis iuvencis niteretur ). - Le festin d'Héraclès n'est pas, chez Lactance, un festin solitaire; le héros l'apprête, en effet, pour ses compagnons (comites ).
492 lindien : on établit pour Héraclès-dieu (postquam Herculi divinos honores ob admirationem virtutis deferri placuit ) un autel nommé Bouzugon , et, en effet, on y sacrifiait deux boeufs sous le joug, comme ceux qu'il avait enlevés au laboureur. L'usage des injures dans le sacrifice était, bien entendu, prescrit. - Enfm, Lactance nous apprend que le premier prêtre fut le paysan dépossédé. "Haec iam non sacra sunt, sed sacrilegia "conclut-il et on ne s'en étonnera guère! Ainsi le glouton de la farce, l'amateur de viande est à Lindos Bou90{va~ et c'est là une épithète cultuelle (366)... Héraclès, le héros à la faim dévorante, nous plonge, en défmitive, au coeur de la pratique sacrificielle des Grecs.
2-2 Qu'il s'agisse des versions multiples du récit lindien, qu'il s'agisse de l'épisode opposant Héraclès aux Dryopes, le héros dans tous les cas tue un boeuf au travail, un boeuf attelé, un boeuf de labour est-il souvent précisé. fi arrive même qu'il en tue deux (chez Lactance), mais la différence, en fait, est plus faible qu'il n'y paraît, puisque, dans tous les cas, l'attelage défait est devenu inopérant, le travail impossible (ainsi n'était-il pas nécessaire, pour justifier le nom de Bouzugos que porte l'autel de l'Héraclès lindien d'imaginer le meurtre de deux boeufs !). Le texte de Lactance est, curieusement, très clair sur ce point (celui de la culture rendue impossible), puisque c'est précisément cet argument qu'oppose le laboureur à la demande formulée par Héraclès de lui acheter l'un de ses boeufs. Dans tous les cas, ou presque (367), ce qui pousse ainsi Héraclès à prendre le boeuf, à le sacrifier, c'est la faim dévorante, la sienne surtout, celle de ses proches parfois, et en particulier celle de son ms (pour Callimaque, pour Conon, pour le scholiaste d'Apollonios...) ; celle de ses compagnons, exceptionnellement, (Lactance). Sacrifier, c'est tuer pour manger, on le sait, et Héraclès à sa manière - une manière sur laquelle nous reviendrons - le démontre brutalement. Il est, en ce sens, intéressant que l'explication donnée ainsi par le mythe à ce qui semble bien être considéré comme un forfait (tuer, aussi, le boeuf de labour) rencontre deux tentatives parallèles. D'abord celle des Thébains, qui, si l'on en croit Pausanias, furent, eux aussi, contraints par la nécessité de sacrifier le boeuf laboureur: "dans l'ancien temps ils sacrifiaient (en effet) des taureaux à Apollon des Cendres (368).
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Un jour, la fête s'approchait, l'heure du sacrifice était imminente et ceux qui avaient été envoyés pour chercher le taureau n'étaient pas encore arrivés. Trouvant par hasard un chariot à leur portée, ils sacrifièrent au dieu l'un des deux boeufs et, depuis, ils ont en usage de sacrifier le boeuf de travail" (369). Si les Thébains justifient, quant à eux, cette pratique par la nécessité même et l'urgence du sacrifice, les Athéniens, pour leur part, éprouvaient le besoin de se disculper en accusant le boeuf; c'est ce qu'exprime le commentaire apporté au vers 132 des Phénomènes d'Aratos, qui, faisant des Athéniens les premiers à manger (à goûter = YEU<.» le boeuf laboureur, affirme à la fois qu'il était autrefois sacrilège (aO'E&n,,) de le faire et que, s'ils le firent, c'est parce qu'un jour, un boeuf, au cours du sacrifice, avait dévoré le gâteau sacré (370). L'impiété de l'homme s'explique ainsi par l'impiété de la bête. TI s'agit bien sûr des Bouphonies, de ce rituel du meurtre du boeuf laboureur, qui plus que les autres, mieux que les autres, traduit la mauvaise conscience des habitants de l'Attique, obligés, pour survivre, de sacrifier le compagnon de travail. Nous ne reprendrons pas l'analyse de cette fête, si souvent appelée, déjà, à témoigner: qu'il s'agisse de ceux qui, comme Karl Meuli et plus près de nous Walter Burken, voient en elle la même "comédie de l'innocence" que celle qui, dans les temps lointains de la Préhistoire, déterminait les cérémonies du chasseur obligé de tuer pour vivre (371), qu'il s'agisse de ceux qui, privilégiant la synchronie, intègrent cette fête si particulière dans le système des pratiques sacrificielles de la Cité (372). Avec les Bouphonies, toutefois, se pose une question: la mise à mort de l'animal est, certes, au centre du rituel, mais seule la version de Théophraste précise qu'il s'agit du boeuf laboureur (373), et Porphyre, qui l'utilise, lui donne valeur de leçon plus générale: il faut se garder "de tuer des animaux qui nous aident à assurer notre subsistance", certes, mais, il faut surtout se garder de "toucher aux animaux" (374). En fait, s'il a raconté cette histoire "d'un certain Diomos, ou Sopatros", c'est pour démontrer l'hypocrisie du sacrifice sanglant, quel qu'il soit: "en vérité nous les (les animaux) massacrons et les mettons en pièce sous la caution du culte divin... nous sacrifions, non pas ceux qui sont agréables au dieux, mais bien plutôt ceux qui le sont aux appétits des hommes" (375). Il faut, bien sûr, faire la part de l'ardeur polémique de Porphyre; il n'en reste pas moins que le récit de Théophraste concourt à donner la même impression: s'il explique l'apparition, comme victime sacrificielle, du boeuf de labour, ce
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n'est pas par rapport à un temps plus ancien, où, comme à Thèbes, seul le taureau aurait été offert aux dieux ; dans cette histoire, "l'avant" est très nettement celui du sacrifice non sanglant, de l'offrande céréalière, du gâteau que, précisément, le boeuf dévore, justifiant par là le sort qui désonnais lui sera fait. Et il est, à ce titre, intéressant de comparer le mythe étiologique des Bouphonies à celui qui, à Chypre, explique, non pas l'apparition du sacrifice sanglant, mais la consommation de la chair par la communauté des humains. Si l'on en croit Asklépiade de Chypre - encore une fois transmis par Porphyre (376) - c'est à Chypre, sous le règne de Pygmalion, que les hommes commencèrent à manger de la viande. Ecoutons le récit de ce qui apparaît comme simple accident dans le déroulement du sacrifice: "Un jour, quand la victime brûlait au milieu des flammes, un morceau de chair tomba de l'autel. Le prêtre le ramassa tout brûlant, et, sans y penser, il porta les doigts à la bouche; tout en surveillant la combustion, le prêtre eut envie de la graisse odorante qu'il venait de goûter, et, loin de s'en priver, il en fit lécher à son épouse". C'est ainsi, conclut Marcel Detienne - à qui nous empruntons sa traduction - que "l'humanité devient carnivore avec deux doigts tachés de graisse et léchés en toute innocence" (377). Pygmalion, en effet, eut beau punir de mort le prêtre et même son épouse, ses successeurs, pareillement tentés, pareillement punis, finirent par obllger le roi à admettre cette envie de viande et le nouvel usage qui s'introduisait ainsi à Chypre. "Version sensuelle de l'invention du sacrifice carné" (378) ? pas vraiment, puisque le sacrifice existe, et le prêtre aussi qui en surveille la bonne marche... C'est d'autre chose qu'il s'agit ici, de la commensalité entre les dieux et les hommes et du droit que s'arrogent ceux-ci de toucher à une nourriture qui ne leur est pas destinée... et cette odeur de graisse nous ramène à Héraclès, à son envie démesurée de viande, à son impatience devant le feu où rotissent les chairs du boeuf laboureur qu'il vient d'abattre (379). Oui, le héros a quelque chose à voir avec le sacrifice, et pas seulement comme victime manquée chez Busiris (380) ; notre propos cherchera à situer et à comprendre cette intervention d'Héraclès dans la sphère des pratiques sacrificielles grecques, et, en dernière analyse, d'en mesurer la portée dans ce que, d'un terme convenu, nous nommerons le "destin" du fils d'Alcmène.
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2-3 Aucun des mythes que nous avons appelés à témoigner, pour enserrer, dans un réseau logique, le comportement d'Héraclès face à la viande, face au sacrifice, ne se présente comme un mythe fondateur du rituel. Rien qui rappelle, en effet, le partage prométhéen par lequel passe, l'âge d'or révolu, la distinction homme/dieux, par lequel s'expliquent les nécessités mêmes de la condition humaine (381) : le sacrifice, seul moyen de rétablir l'échange avec les dieux; le travail, inévitable désormais pour la survie de l'individu ; le mariage procréateur, enfin, indispensable au maintien d'une espèce que Pandore a arrachée à l'autochtonie primitive. Les dieux, les hommes, les bêtes existent, séparés, dans chacun de ces récits, et c'est, pourrait-on dire, des échanges qui, entre eux s'établissent qu'il est, dans tous les cas, question. Or, lorsque, dans de tels récits, Héraclès est acteur, son intervention est marquée par de curieuses constantes, et opère toujours sur les deux mêmes registres: 1) il porte la main sur la bête et s'en empare. 2) il la dévore. Il vaut la peine, semble-t-il, de s'attarder un peu sur ces séquences. "Traînant de vive force le boeuf de labour et levant sa massue" (382), tel apparaît encore le fils de Zeus dans l'Anthologie de Planude et, nous l'avons vu, tous les auteurs qui opposent ainsi Héraclès au bouvier - qu'il soit dryope, qu'il soit lindien - insistent sur la rapidité de la décision, sur la brutalité de l'action; seul, cependant, Callimaque fait écho aux injures lancées par Théiodamas : "Toi l'homme le plus fort, pour rompre les boeufs par les cornes", telle était l'invective finale du laboureur (383). La mise à mort, d'ailleurs, est rarement décrite et l'auteur de l'épigramme conservée dans l'Anthologie planudienne s'en étonne (384). Reste que, dans tous les récits, l'acte de violence se polarise sur l'arrachement du boeuf au paysan qui l'utilise, au joug qui le réunit à son compagnon de travail... peut-être aussi au troupeau dans lequel il paissait librement. Antoninus Libéralis nous transmet, en effet, une histoire racontée à la fois par Nicandre, dans le troisième livre de ses Métamorphoses, et par Areus de Laconie dans le poème qu'il avait consacré à Cycnos (385). Le récit concerne précisément ce fils d'Apollon, si beau que nombreux furent ceux qui l'aimèrent,
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Phylios lui restait fidèle malgré ses exigences, malgré les épreuves de plus en plus rudes qui lui était imposées. Parmi ces épreuves (lutte contre un énorme lion, contre des vautours d'une taille prodigieuse) Phylios dut, un jour, "enlever, en le saisissant avec les mains, un taureau à son troupeau et le conduire à l'autel de Zeus" ; or, "ne sachant comment s'acquitter de cet ordre... il pria Héraclès de lui venir en aide" (387). Nous n'épiloguerons pas sur la valeur initiatique de cette triple épreuve, pas plus que sur les rapprochements qu'il est possible d'établir entre le couple Phylios/Cycnos et celui que, peut-être, forme Eurysthée avec Héraclès, dont on dit qu'il accomplit ses travaux par amour pour son éraste (388) ; nous n'essaierons même pas de comprendre l'épilogue d'une histoire, dont le texte, corrompu, laisse simplement entendre qu'elle finit par un échec et que le jeune homme, désespéré, "se précipita dans le lac nommé Conopé et disparut" (389). Ce qui nous retient, dans l'épisode, c'est qu'Héraclès y est pris pour modèle de celui qui arrache le boeuf à la vie (ici le troupeau) pour le conduire à l'autel; épreuve difficile, épreuve de force, mais nous ne pensons pas que, si, pour la mener à bien, on invoque Héraclès, le héros le doive seulement à sa force surhumaine et, s'il porte le nom de Taupocp6pot", ce n'est pas seulement pour avoir su dompter le taureau de Crète - un taureau qui aurait dû être sacrifié à Poséidon -, mais bien plutôt parce que - de manière paradigmatique - lui aussi, portait le taureau à l'autel (390). Le mythe nous conduit ainsi à un rite, relativement rare dans le sacrifice sanglant, qui consiste à porter la victime à l'autel, au lieu de la conduire au milieu d'une pompé, comme le veut, habituellement, la coutume. Ce rite, il faut le dire, n'est pas toujours lié à Héraclès; c'est pour Dionysos, par exemple, que Pausanias l'atteste chez les Arcadiens, où, en hiver, pour la fête du dieu, les Cynaithéens "frottés de graisse, enlèvent, dans un troupeau de boeufs, le taureau que le dieu leur suggère de prendre et le portent dans le temple" (391) ; le rite est également, sous une forme atténuée, attesté à Athènes lors des HéphaYstéia où les éphèbes "soulèvent le boeuf vers l'autel" (392), et ce sont encore les éphèbes qui, à Athènes toujours, font de même lors des Eleusinies (393). Dans un cas au moins, relevé par Théophraste, l'usage est mis en rapport avec Héraclès : "Invité à un sacrifice dans le temple d'Héraclès (le "tard-instruit") jette bas son manteau et soulève lui-même le boeuf pour lui faire tendre la gorge au couteau" (TOV ~oijv afp&o9al) (394)... Il en fait trop. une fois de plus, c'est en effet à un éphèbe que revenait cette épreuve!
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Une fois de plus nous retrouvons l'association d'Héraclès et des jeunes gens auxquels on demande de prouver qu'ils sont mûrs pour entrer de plein droit dans la cité; une fois de plus - et c'est ce qui pour l'heure nous intéresse - nous constatons l'irruption du héros dans la sphère du sacrifice... Comme lui. les éphèbes. à Athènes. "soulèvent le boeuf'. Usage résiduel? la pratique observée par Pausanias en Arcadie inviterait à le penser... Quelles que soient ses origines. cette pratique n'en introduit pas moins la violence au coeur du sacrifice qui. volontiers la cache (395). Et c'est la même précipitation brutale que nous pouvons lire dans la deuxième séquence de l'épisode - qu'il soit ou non lindien - : celle du repas qu'on ose à peine appeler sacrificiel. Pourtant Héraclès sacrifie les bêtes qu'il va manger. Encore faut-il remarquer que. si. dans la version lindienne de l'épisode. Apollodore emploie la forme verbale Quaaç (tUXt\TO Quaaç). (396) lorsqu'il oppose le héros au Dryope. c'est une formule proche mais plus ramassée encore qu'il utilise: TOV lnpov T(;)V Taup qu'emploient Conon et Théophraste ne sont guère plus rassurants: acpaC (trancher la gorge) est certes l'un des rites essentiels du sacrifice sanglant et suffit à évoquer l'ensemble du rituel (400), mais là. encore. il semble que l'idée religieuse puisse aisément passer au second plan et qu'après Homère, en tout cas, le verbe soit fréquemment utilisé en dehors du champ spécifique du sacrifice (401). C'est plus vrai
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encore du composé anoacpaCc..> qu'utilise Théophraste; quant à KaTaacpclCc..> qu'emploie Conon, il signifie simplement "faire périr en égorgeant" et, affirme Jean Casabona, "ne concerne pas le sacrifice" (402). Même incertitude, enfm, pour le latin macto (at ille in/eUx cum boves suos mactari videret... ) qu'on peut lire dans le texte de Lactance : sj son sens premier est religieux; s'il peut très bien exprimer le sacrifice fait aux dieux, il peut aussi, par extension, signifier simplement tuer, mettre à mort. Peut-être dira-t-on que cette analyse confmne simplement la solidarité profonde qui, en Grèce, unit le sacrifice et l'alimentation carnée; nous en sommes bien d'accord, mais, dans cet acte central du culte qui est aussi échange des hommes avec les dieux, le premier terme tend vraiment, dans ce cas, à disparaître: aucun emploi, par exemple, de anev6c..> "le seul verbe qui n'ait jamais concerné qu'une cérémonie religieuse" (403) ... Et pourtant, Héraclès n'était-il pas aussi un grand buveur? Ce qu'enseigne le vocabulaire, le récit l'exprime aussi - ou plutôt le cache - dans la mesure où rien n'apparaît de cette longue procédure rituelle qu'est la mise à mort et le traitement du corps de l'animal sacrifié (404), dans la mesure, surtout, où manquent ces opérations qui consacrent la victime: pas d'espace sacrificiel défini, pas de prémices, pas de libations... Du feu? C'est, me semble-t-il, une question difficile à résoudre. On peut, certes, admettre que la thusia suppose le traitement des viandes par le feu, mais, nous l'avons vu, le terme (qu'il s'agisse du verbe ou du substantif) ne se retrouve pas dans tous les textes, et, sur les images où sacrifie Héraclès (fig. 34-2), il est bien difficile de déceler du feu sur l'autel... On songe évidemment au festin chez Pholos, tel qu'il nous est rapporté par Apollodore: les viandes, que le centaure lui propose de rôtir, Héraclès préfère les manger crues (405) ; enfin de toutes les versions de l'épisode lindien, seule celle de Théophraste fait mention du feu, mais ce feu n'émane-t-il pas de la victime même ?... de ses bouses. Impossible de ne pas penser à cet "anti-sacrifice" qu'Hérodote, qui l'a observé chez les nomades scythes, définit précisément par ses manques, à ce boeuf qui (étranglé il est vrai et non égorgé) cuit sur ses propres os (406). Le vocabulaire, le récit, les images enfin... Sur une olpè attique à figures noires, conservée au Louvre et datée des débuts du Vème siècle (407), Héraclès est à l'autel. Rien n'est montré de ces instruments qui, habituellement, peuplent les représentations du sacrifice : pas de kanoun (panier qui, sous les graines, cache
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Fig. 34: HéraClès et le sacrifice
1. H&lcJœ conduisanlle taIRIU lU 1aCrif"1Ce. Amphore du peintre d'~, BosIOn, Musœ des Beaux Ans. (ABV, 2SS (6) ; ARV 2 4 (12). D'après 1. BOARDMAN, .4ll1elllall Red Figure Vares, l'Ile Archarc Period,.fig. 8.
2.
Htracl~s Hautel. Ol~ attique l figures noires (v. 490) Mus~e du Louvre, F 338 (.4 B
V
S3)
D'après HOf1I1IIes. Dieux el Hiros de la Grice, catalogue de l'exposition de Rouen (oct. 1982-janv. 1983) n° 103.
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la makhaira ) ; pas de kernips ou de louterion pour l'eau lustrale; pas de vase au sang (sphageion ) pas de trapeza, cette table où l'on partage le boeuf... Seule figure, dressée au dessus de l'autel, une énorme broche (obelos ) garnie jusqu'en haut de quartiers de viande, une broche qu'Héraclès tient à deux mains, beaucoup plus proche de l'autel (mais peut-on dire du feu ?) que ne le sont généralement ceux qui, dans le sacrifice "normal", se livrent à l'opération du rôtissage. Et le héros accroché ainsi à sa broche paraît craindre qu'on ne la lui enlève, paraît signifier et sans doute est-ce bien là, la raison de son attitude - que toute cette viande lui est réservée (408). C'est qu'il est, en effet, on ne peut plus probable qu'Héraclès mangera seul. Peut-être y a-t-il quelque excès à dénoncer l'absolue solitude du "glouton divin" (409), mais il est vrai que, même lorsque le récit mythique lui donne un compagnon, son fils Hyllos, il mange et donne à l'enfant (410) et c'est la même dissociation qu'introduit Lactance, lorsqu'il décrit Héraclès écoutant les insultes du paysan avec de grands éclats de rire, tout en préparant le festin pour ses comites, tout en engloutissant des boeufs qui ne lui appartiennent pas (411). Et puisque sacrifier, c'est manger en commun, il contrevient, une fois de plus à l'usage: pas de trapeza, pas de partage. Ainsi, non seulement Héraclès, court-circuite le rituel sacrificiel en passant, sans autre fonne de procès, de la bête à la viande, mais encore il en pervertit complètement la signification: il se joue (il se rit !) à la fois de cette médiation hommes/dieux qu'introduit le sacrifice et de la communication entre les hommes que, par la commensalité, il instaure. De plus, prenant et abattant la bête par surprise (comme les Scythes, encore !), il fait éclater la vérité du sacrifice, montre, avec la brutalité qui est sienne, qu'au coeur du rituel se trouvent "la violence et le meurtre" (412) et dévoile l'hypocrisie d'une pratique qui, pour reprendre les termes mêmes de Porphyre, "sous la caution du culte divin vise à satisfaire les appétits des hommes" (413). Marginal, a-social, Héraclès à Lindos ne respecte pas les normes de l'alimentation civilisée... des normes que permet d'apprécier, d'une autre manière, un épisode odysséen au centre duquel- Jean-Pierre Vernant l'a fortement montré - se trouve aussi le thème de la nourriture (414). C'est parce qu'ils étaient tenaillés par la faim, parce que mourir de faim leur paraissait la
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. plus odieuse des morts que, dans l'Ile du Soleil, les compagnons d'Ulysse poursuivirent les vaches d'Hélios, les immolèrent aux Immortels et "banquetèrent six jours durant" (415) ; sacrifice perverti et, là encore, "ensauvagé" (des feuilles de chêne au lieu de l'orge blanche dont il ne restait plus, de l'eau en place de vin dans les libations); sacrifice maudit: "les dépouilles marchaient; les chairs cuites et crues meuglaient autour des broches" (416) ; sacrifice aux conséquences funestes, puisqu'à tous ceux qui avaient consommé la viande interdite le dieu devait "rayer de leur vie la journée du retour" (417). Protestation impressionnante des victimes, protestation terrible des dieux devant ce sacrifice impossible.. Rien de tel avec Héraclès.. de quoi nous rappeler que les données, pour lui, sont inversées: ses victimes sont du côté des hommes, il est, déjà, pour sa part, du côté des dieux. Une image encore pour nous en convaincre: un fragment d'une amphore à col d'une collection privée de Berne (418). Elle date de 510, une époque où le thème d'Héraclès banquetant avec les dieux Olympiens connaît une grande faveur, mais sa représentation est originale - beaucoup plus encore que ne le dit Rolf Blatter qui la commente - dans la mesure où c'est non pas en buveur qu'est figuré Héraclès, mais en mangeur, en mangeur de viande. Allongé, comme au banquet, identifié par sa massue (419), il a, devant lui, une petite table (la trapeza qui manquait au sacrifice ?), sur cette table, un quartier de viande qu'il s'apprête à découper: de sa main droite en effet il tient la makhaira ... Festin, solitaire? C'est possible, encore que le caractère incomplet de la représentation invite à la prudence (420). Festin agréé, en tout cas, par les dieux. Athéna est là, en effet, assitant au repas (ou au partage), comme elle assistait Héraclès dans ses travaux. Elle ne mange pas... pas plus qu'Hermès dans l'Hymne homérique ne goûte aux viandes qu'il a partagées (421). Les dieux ne seraient plus des dieux, s'ils mangeaient comme les hommes. C'est bien, nous semble-t-il, mettre en évidence l'inquiétante ambiguïté d'Héraclès. Dans ce champ du sacrifice où se délimitent par excellence les bornes de la civilisation par la médiation des rapports qu'entretiennent bêtes 1 hommes 1 et dieux, Héraclès n'est nulle part... ou plutôt il est partout: presque une bête, pas tout à fait un dieu... difficilement un homme, en tout cas, l'épisode lindien en atteste (422).
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III.
DU SACRIFICATEUR... SACRIFICE?
A
LA
VICTIME
DU
Si nous tentons maintenant - et c'est une démarche un peu différente - de saisir le rôle du sacrifice dans le "destin" d'Héraclès, c'est d'abord au mythe de Géryon qu'il nous faut revenir... au mythe de Géryon et peut-être même à celui des Hespérides, si l'on veut bien voir dans ces fruits merveilleux qui, eux aussi, appartiennent aux dieux, qui, eux aussi, leur reviendront - l'autre type d'offrandes assurant la médiation Hommes/Dieux: l'offrande non sanglante, celle que n'anéantit pas le sacrifice... alors apparaîtrait ainsi une raison supplémentaire de retrouver, dans ces deux exploits, l'expression de structures, une fois de plus, complémentaires. li nous semble difficile, toutefois, de poursuivre très loin la comparaison: le dixième exploit est, de ce point de vue, beaucoup plus clair, beaucoup plus documenté (peut-être parce que plus anciennement inscrit dans la geste d'Héraclès !) et c'est à lui que nous limiterons notre étude.
3-1 Lutte contre le monstre triple - qu'il soit le symbole des forces infernales ou qu'avec le temps il désigne le souverain ibérique, barbare et cousu d'or - l'exploit contre Géryon est aussi, nous l'avons vu, l'épreuve de force qui permet au héros de s'approprier les merveilleux troupeaux engraissés dans la fertile Erythie. C'est enfin, si l'on s'interroge sur le destin du bétail ainsi conquis, la geste du bouvier qui ramène, jusqu'au sanctuaire d'Héra, les boeufs qui seront sacrifiés à la déesse. Sur ce point, encore, nos deux sources essentielles à la fois se rejoignent et s'opposent. Apollodore pour sa part est limpide: au terme de son voyage Héraclès amène enfin le bétail à Eurysthée; celui-ci le sacrifiera à Héra... Quelques uns des boeufs, cependant, n'arriveront pas jusqu'à Tirynthe, et ce parce qu'Héra elle-même en a décidé ainsi, envoyant un taon pour les disperser dans les montagnes de Thrace. Ils y resteront et deviendront sauvages (ayplal) ... sauvages c'est-à-dire libres de tout lien, libres du joug, libres de tout travail pour l'homme, comme bien souvent l'étaient les bêtes promises au sacrifice, comme l'étaient aussi les vaches du soleil dans leur prairies "jonchées d'asphodèles" de Piérie (423). Cette dispersion des troupeaux dans les régions Nord de la
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Grèce rejoint une tradition qui - plutôt liée à la localisation épirote des pâturages de Géryon - explique l'origine des Larinoi boes de Chaonie : ces boeufs indomptés perpétuent, en effet, le nom de Larinos, un berger épirote qui, (lui aussi !) avait dérobé le bétail d'Héraclès. Cette légende étiologique, connue par un fragment de Lycos de Rhégion (424), atteste donc - au moins à partir du IIIème siècle avant notre ère - du lien étroit qui, en Grèce, s'était tissé entre le mythe de Géryon et ces troupeaux sacrés dans lesquels puisent les sanctuaires au moment de leurs fêtes. Que les boeufs ravis par Héraclès soient destinés au sacrifice, on pourrait croire que Diodore, au contraire, l'a oublié, qui abandonne le héros et ce qui reste de son troupeau sur "la route du Péloponnèse". Mais si l'auteur sicilien ne dit rien de ce qu'il adviendra des boeufs de Géryon, c'est lui qui, pourtant, sur un autre plan, il est vrai - donne au thème du sacrifice tout son développement: tout au long du périple qu'accomplit le héros sur les rivages méditerranéens, en effet, les bêtes qu'il pousse devant lui serviront à fonder des cultes - y compris le sien propre - victimes désignées, semble-t-il, pour le sacrifice. C'est ainsi une nouvelle dimension que donne Diodore à cette fonction particulière d'Héraclès, une fonction qui s'intègre parfaitement, nous le savons, dans le schéma d'ensemble de la mission civilisatrice du héros qu'il juge essentielle dans le mythe. Dans le récit du dixième exploit, en effet, peut-être n'est-ce pas un hasard si Héraclès qui, sur son passage, purge le pays de ses fauves (en Crète, en Libye), donne des régions entières à l'agriculture (la Libye encore), fait naître des villes (Hécatompyle), tue les despotes (Antée et Busiris), ne fonde pas de culte avant d'avoir atteint "l'Océan qui baigne Gadès". Dès qu'il entre en possession "des fameuses vaches", en revanche, il en use en ce sens : en Ibérie, il donne une partie du troupeau à un roi qu'il distingue pour sa justice et sa piété; les bêtes seront consacrées à Héraclès (toujours ce bétail aphetos, lié au culte) et, chaque année, lui seront sacrifiés les plus beaux des taureaux nés de ces vaches sacrées (425). En Sicile - nous l'avons vu et nous n'y reviendrons pas - c'est aussi le plus beau de ses taureaux qu'à l'emplacement de la future Syracuse, il offre aux deux déesses et immole près de la source Cyanè (426), et même, si l'on en croit d'autres auteurs, dans la source elle-même (427), cela, bien sûr, pour que, chaque année, les habitants en fassent de même. On peut encore imaginer - sans que Diodore ne dise rien de précis à ce sujet - que les sacrifices voués par Héraclès au "héros Géryon" et à Iolaos - à l'endroit même où ses vaches
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avaient laissé l'empreinte de leurs pas ! - ont été perpétrés à partir des mêmes boeufs sacrés (428). C'est assez dire que le rouge bétail de Géryon - lui même offert à la divinité, ou ancêtre de ces races bovines réservées à l'usage des sanctuaires - avait pour vocation d'alimenter le sacrifice. Une fois de plus, le chemin d'Héraclès croise celui d'Hermès! Comment ne pas comparer, en effet, le bétail de Géryon dans ses grasses prairies océaniques aux "vaches immortelles des dieux bienheureux"- que, dans les prairies "respectées par la faux" (429) d'une lointaine Piérie, le rusé fils de Maia déroba, puis sacrifia... C'est bien une autre version du premier sacrifice sanglant que retrace l'épisode, puisque, pour mener à bien son entreprise, l'ingénieux Hermès, faisant pivoter une branche de laurier sur du bQis de faux grenadier, fit, "le premier, jaillir le feu et révéla les moyens d'en faire" (430)... Non pas le sacrifice consacrant la séparation hommes/dieux, comme l'était celui de Prométhée, mais la thusia telle que la pratiquent les hommes, pour plaire aux dieux. Apollodore, qui, lui aussi, conte ce sacrifice (431), paraît bien s'inspirer de l'Hymne homérique (Hermès, chez lui aussi, met les peaux des bêtes à sécher sur les rochers), mais, plus nettement que dans le texte archaïque (432), il oppose deux traitements des viandes: d'une part des chairs bouillies dont se nourrit Hermès, d'autre part des chairs mises dans le feu (brûlées... ou rôties) dont il ne dit rien, mais qui, manifestement, sont destinées aux dieux. C'est ce qu'explicite l'hymne homérique lorsqu'il évoque Hermès découpant les chairs sur une pierre plate et tirant au sort les douze parts, geras attribué, bien sûr, à chacun des Olympiens. De ces chairs, passées par le feu, les deux versions se rejoignent pour dire (ou laisser entendre) qu'Hermès ne les consommera point... Héraclès avait, nous l'avons vu plus haut, dévoré le boeuf de Theiodamas et le boeuf lindien, certes, mais les vaches de Géryon, pas plus qu'Hermès, cet autre ~oucp6vOÇ divin (433), les vaches du soleil, il n'en disputera le privilège aux Immortels.
3-2 Sacrificateur, Héraclès l'est, sans aucun doute, et le mythe de Géryon, probablement, nous donne la clef du problème (434), mais ses rapports au sacrifice peuvent s'inverser: chez Busiris, par exemple, il s'en faut de peu qu'il ne soit lui-même sacrifié. Si l'épisode n'intéresse guère Diodore, qui ne voit dans le
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conflit opposant le héros et le roi d'Egypte que le topos habituel du civilisateur châtiant le Barbare xénophobe (435), Apollodore est, sur ce sujet, beaucoup plus prolixe et conte comment, la famine (436) ayant sévi pendant neuf ans en Egypte, on sacrifiait chaque année, suivant les instructions d'un oracle, un étranger à Zeus. Héraclès faillit bien être cet étranger, mais, alors qu'il était conduit à l'autel, il réussit à rompre ses liens et à tuer Busiris, son fils et son hérault (437). Jean-Louis Durand et François Lissarrague ont, en 1982, présenté un parcours en images de l'épisode (438), des images qui, très souvent représentent la même séquence: la déroute des Barbares auprès de l'autel sur lequel ils pensaient sacrifier Héraclès. Nous ne referons pas cette description d'un sacrifice qui, nettement localisé par le type physique et le vêtement des Egyptiens, par certaines marques culturelles aussi (leur crâne partiellement ou entièrement rasé, leur sexe circoncis), est cependant un sacrifice "à la grecque" avec, autour de l'autel, tous les instruments nécessaires à son déroulement: la hache ou bien plutôt le maillet pour assommer la bête, la makhaira, la trapeza, les broches etc... (On se reportera aux dessins de François Lissarrague) (439). Les instruments, qui, dans ce cas précis, devaient servir au sacrifice humain et prennent en conséquence un aspect particulièrement inquiétant (tels la trapeza, lieu de partage des viandes, ou encore ce jeu de lames à découper, rarement représentées) sont, ou bien lâchés par les Egyptiens qui les apportaient auprès de l'autel (tel le kanoun qui tombe, découvrant la makhaira ), ou bien en sont éloignés par la fuite des Barbares en déroute... "Révélation de la violence meurtrière du sacrifice", disent fort justement les auteurs (440) et, à ce titre, on peut estimer que la violence du justicier ne fait qu'ajouter à cette violence institutionalisée... qu'elle concourt au même objectif: affirmer l'interdiction du sacrifice humain. La chair humaine n'est pas, dans un monde civilisé, bonne à présenter "à la table des hommes" (441)... Héraclès, déjà, avait provoqué Antée à la lutte pour l'empêcher "de couronner le temple de Poséidon du crâne des étrangers" (442) et c'est lui qui, pour Macrobe encore, transforme en ce sens les Saturnales: les dieux acceptent des rites de substitution; ils ne veulent pas - ou ne veulent plus - de sacrifices humains (443) et cela, c'est le plus violent, le plus meurtrier des héros (mais "le plus juste des meurtriers"!) (444) qui l'affirme. Si dans cet épisode de Busiris, fortement marqué, nous l'avons signalé, par la dérivation "coloniale" du mythe, Héraclès tient le rôle qui est le sien, celui du héros porteur de la
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civilisation, s'affirme aussi, par la violence dévoilée de l'institution, par la réponse elle-même violente qu'oppose le héros, ce qui tient à la pérennité du mythe: le lien ambigu qu'entretient Héraclès avec le sacrifice. Victime non consentante et ici épargnée du sacrifice, Héraclès sur l'Oeta nous achemine vers une réalité d'avenir: celle du dieu s'offrant lui-même au sacrifice.
3-3 "Mais de quel sang êtes-vous donc, vous, ingrats entre tous les Grecs, vous dont je me suis tué à purger, malheureux, les mers et les forêts et dont aucun, quand maintenant je souffre, ne sait user pour moi d'un feu ni d'un fer secourables". Le fer et le feu, instruments de la mort, une mort que "nul rayon de divinité" ne viendrait transfigurer pour Karl Reinhardt qui voit dans les Trachiniennes "presqu'une inversion stricte de la légende" (445) ; le fer et le feu ... le feu surtout, instrument du sacrifice, et symbole d'une mort divinisante pour Charles Ségal (446) qui, dans la même tragédie de Sophocle, lit la complémentarité (et l'homologie) du mariage et du sacrifice et, dans le bûcher de l'Oeta, le moyen de rétablir la médiation hommes/dieux. Même si, pour Sophocle, Karl Reinhardt avait raison (447), il est certain que, dans la mort par le feu d'Héraclès, les Grecs ont vu non seulement la fin de son existence terrestre, mais bien encore l'image même de son accession au rang des dieux. Diodore et Apollodore qui -offrent sur certains points un récit divergent (448) s'accordent sur l'essentiel: "dès que le bûcher s'enflamma, dit le premier, la foudre tomba du ciel et l'embrasa tout entier. Lorsque Iolaos et ses compagnons revinrent chercher les os, ils n'en retrouvèrent aucun; ils se persuadèrent ainsi qu'Héraclès avait été, conformément aux oracles, reçu parmi les dieux" (449). Apollodore est à la fois plus rapide et plus soucieux de ménager diverses traditions: on dit que, tandis que le bûcher brûlait, résume-t-il, (Héraclès) fut enveloppé d'une nuée et transporté au ciel au milieu de grands éclats de tonnerre. fi y reçut l'immortalité et s'y réconcilia avec Héra qui lui donna en mariage sa fille Hébé (450). Ce thème de la mort d'Héraclès au bûcher de l'Oeta dont la vulgate devait être donnée par les Trachiniennes de Sophocleet longuement reprise, à l'époque romaine, par l'Hercule sur l'Oeta de Sénèque - semble posthomérique et pourrait avoir fait son apparition avec la Petite lliade . On pouvait y lire, en effet, que "personne", au moment de la mort d'Héraclès, "n'ayant
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voulu mettre le feu au bûcher sur l'Oeta, ce fut Philoctète qui se chargea de ce soin" (451). Encore faut-il remarquer que ces quelques mots - qui pourraient s'appliquer à la mort d'un quelconque héros - ne disent rien de l'apothéose finale. Cette tradition de la mort d'Héraclès à l'Oeta repose cependant sur des bases solides, prouvées par la découverte, en 1918, d'un bûcher au lieu dit Marmara, à 1 800 m d'altitude, au Nord-Ouest du village de Pavliani et à trois quarts d'heure de marche de Trachis. Des sondages exécutés les années suivantes par MM. Pappadakis et Orlandos ont permis de distinguer sur le site: 1. Un bûcher, de forme grossièrement hexagonale limité par un mur de péribole d'environ 20 à 30 mètres de côté (la couche de cendres était épaisse de 1,40 à 1,80 m), bûcher au Nord duquel s'élevait un édifice rectangulaire: probablement un petit temple dorique in antis. 2. Une stoa s'étendait à 150 mètres au nord du bûcher, très longue (32,5 x 5m) et ouverte sur le côté. Elle était divisée en six compartiments dont la destination n'a pas été élucidée (452). 3. A l'extrémité Nord, un édifice, incomplètement fouillé, a été reconnu comme un Phi/octétéion (453). L'analyse des éléments d'architecture et les trouvailles faites lors des fouilles prouvent que les constructions, qui ont commencé à l'époque archaïque (le culte serait attesté à partir du début du VIIème siècle), se sont poursuivies jusqu'à l'époque romaine (on a retrouvé, par exemple, la base d'une statue équestre de Commode, ce qui n'étonne guère, quand on connaît le culte dont cet empereur honorait Héraclès) (454). Quant au bûcher, si le péribole et les foyers périphériques sont également d'époque romaine, le partie centrale est beaucoup plus ancienne, si l'on en juge par le lieu d'origine des trouvailles: tessons dont certains portent des dédicaces à Héraclès (455), figurines de terre cuite, statuettes d'Héraclès barbu ou non "en action violente" (456) et brandissant la massue (le geste prouve qu'elle passait derrière la tête du héros), alors que le bras gauche est tendu vers l'avant, selon un schéma connu de longue date en Orient, ajouterons-nous. Il n'est pas sans intérêt, bien sûr, que ces statuettes - dont l'une, au moins, n'est pas plus ancienne que le Vème siècle (457) - perpétuent ainsi l'attitude du dieu combattant et triomphant. Faut-il voir, dans cette façon de représenter Héraclès un indice de l'origine du culte qui lui est, de cette façon, rendu au bûcher de l'Oeta? Bien avant les fouilles du bûcher, on avait expliqué le mythe par des rapprochements avec l'Asie Mineure.
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Frazer, par exemple, évoquait, à propos d'Héraclès brûlé sur l'Oeta, le grand bûcher que les Ciliciens édifiaient à Tarse pour y célébrer la mort de Sandon... Quant à Victor Bérard, il utilisait le mythe et les cultes trachiniens pour défendre sa théorie des influences phéniciennes sur la religion grecque et de l'existence, en Grèce même, d'un Héraclès-Melqart. Au dieu phénicien les Grecs auraient emprunté "avec la légende... la coutume de brûler le dieu" (458)... les cérémonies de l'Oeta rappelleraient ainsi celles que nous avons évoquées, à propos de Gadès, et pour lesquelles nous avons fait appel au ·modèle tyrien : celui de l'egersis, qui, après la mort du dieu, consacre son "réveil" (459). Nous aimerions revenir quelque peu, ici, sur cette fête célébrée, nous l'avons vu, pour la première fois, par Hiram 1er, . contemporain de Salomon, au mois de Peiritios (460). Que le modèle phénicien ait fonctionné au profit d'Héraclès, des textes épigraphiques le prouvent, qui, à Philadelphie, par exemple, (actuellement Amman) mentionnent un "ressusciteur d'Héraclès" (461). Ce titre équivaut à celui de "ressusciteur de la divinité" (mqm'lm ) qu'on rencontre dans bon nombre d'inscriptions phéniciennes, en particulier, et c'est là sa plus ancienne attestation, à Chypre, dans une dédicace à Melqart datant du Nème siècle, et provenant de Lapethos (Larnaca). Ce "ressusciteur de la divinité" est ici le magistrat suprême de la ville, ce qui n'étonne guère dans la mesure où, "sur la vingtaine de "ressusciteurs" connus à Carthage, six étaient suffètes et huit portaient le titre de "Grand", nom d'une haute fonction civile et politique dont la portée exacte est encore incertaine" (462). Précision capitale, le titre phénicien est fréquemment suivi de l'expression "époux astartéen", dont le sens pourrait être donné par l'inscription bilingue de Pyrgi. Ce texte (du dernier quart du Vlème siècle) mentionne les épousailles d'Astarté "au jour de l'ensevelissement de la divinité" (463). Une divinité qui ne peut être que Melqart. Le roi, Thefarie Velianas, célèbre manifestement un hieros gamos avec la déesse et ce, probablement, au nom du dieu Melqart ressuscité par son intervention. Or, E. Lipinski reconstitue les épisodes principaux de cette fête du "Réveil" grâce aux scènes gravées sur un vase de marbre du IVème siècle trouvé dans les environs de Sidon: la première représente le dieu mourant sur le bûcher; la seconde, le sarcophage qui rappelle "l'ensevelissement de la divinité" mentionné à Pyrgi ; la troisième est une scène de deuil sur laquelle figurent, autour d'un autel, Astarté et un homme en longue tunique, très probablement le "ressusciteur"; enfin,
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quatrième et dernier tableau, le roi montre le dieu ressuscité apparaissant aux portes de son temple... Mort et resurrection devaient ainsi, pense l'auteur, se suivre assez rapidement (dans les tablettes de Pyrgi, d'ailleurs, le jour des funérailles est aussi celui des épousailles) et il suppose que "c'est en accomplissant le mariage sacré que l'époux astartéen devenait le ressusciteur de la divinité mâle dont on fêtait le lendemain la résurrection". Si nous laissons, pour l'instant, de côté, ce hieros gamos qui incontestablement présente des affinités avec les fêtes du Nouvel An babylonien (où le roi, sous le nom de Ama-Usumgalan-na - un titre du dieu Dumuzi - s'unit avec la déesse Inanna, désignée comme hiérodule), mais aussi évoque, autour d'Héraclès, les mêmes souvenirs d'unions primitives (464), et, si nous retenons le seul épisode du bûcher, le problème que posent les cultes de l'Oeta (465) est donc de savoir si le rite (et au delà le mythe) est un pur emprunt à l'Orient, ou bien s'il préexistait - auquel cas on pourrait alors penser qu'il constitue l'un des éléments susceptibles d'expliquer le syncrétisme avec le Melqart phénicien et le Sandas cilicien. Louis Gernet était, sur ce point, formel: "la légende d'Héraclès s'est parfaite, à une époque relativement tardive, de l'épisode final du bûcher de l'Oeta qui paraît avoir rapport avec le mythe de Sandon, mais Sandon est de Cilicie, et le thème mythique, en lui-même, est antérieur à cette influence orientale" (466). Yves Béquignon partage cette opinion, qui évoque les rites de crémation connus ailleurs en Grèce centrale: Daidala de Platées, fêtes d'Isis à Tithorée, élaphébolia de Hyampolis, en Phocide, fêtes d'Artémis Laphria à Patras (467)... autant de "fêtes en l'honneur de la végétation, ou, si l'on préfère, de rites agraires" (468). C'était, pense-t-il, de tels rites agraires qu'on célébrait sur l'Oeta, des rites qui, primitivement, se seraient adressés, non pas au fils d'Alcmène, mais à "une divinité tout autre, qui, rendue propice par les offrandes, devait favoriser les récoltes" (469). Enumérant alors les rapports entretenus par Héraclès avec les forces végétatives: le jardin merveilleux qu'il possédait à Trachis, précisément, ou bien encore, à Thasos, l'épithète de dieu-aux-pommes qui était sienne en Béotie; évoquant les sanctuaires - toujours béotiens - où Héraclès n'est pas le héros dorien, mais le dactyle idéen; arguant des rapports qu'il entretient (à Mycalessos, par exemple) avec Déméter, il conclut qu'à l'Oeta, la crémation des victimes, qui pouvait convenir aussi bien au rite agraire qu'à l'enagismos héroïque, a favorisé le passage du culte agraire au culte du héros (470). Comme
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Nilsson, il pense ainsi qu'Héraclès s'est approprié un rite agraire primitif (471), et que c'est à la suite de Déméter que, par la Béotie, il a gagné la région maliaque (le culte d'Héraclès près des sources chaudes des Thermopyles est bien connu) et de là, l'Oeta. Il faut toutefois poursuivre: à partir d'un certain moment (il est dommage qu'aucune stratigraphie n'ait pu être établie dans le bûcher de l'Oeta), le rite n'est plus seulement un sacrifice, il est aussi une commémoration, puisque des statuettes ont été retrouvées dans le bûcher. Il paraît donc difficile - compte tenu des rapprochements qu'on peut établir avec Gadès, avec l'autel-foyer de Chypre, compte tenu également de l'attitude des statuettes retrouvées - de refuser toute influence de l'Orient, toute contamination avec Sandas, ou bien avec Melqart, puisque le syncrétisme est, dans son cas, plus tôt et plus précisément attesté. Il est de même tentant, dans ces conditions, de penser que le développement du mythe étiologique (celui de l'immortalité d'Héraclès par le feu de l'Oeta) est né de cette contamination. Le problème, toutefois, est un peu plus complexe qu'il n'y paraît: - d'une part parce qu'en Grèce même une tradition de l'immortalité par le feu semble exister, indépendamment d'Héraclès: c'est par exemple celle que, dans l'Hymne homérique à Déméter, la déesse d'Eleusis voulait conférer à Démophon... tentative vaine d'ailleurs, puisque l'effroi de Métanire la voua à l'échec (472). - d'autre part parce qu'une série de témoignages convergents mettent Héraclès lui-même en rapport avec la crémation: 1) Si l'on en croit Conon, Héraclès à l'Oeta réussirait, en quelque sorte, une tentative avortée. Dans ses Narrations (473), il donne, en effet, à l'épisode de Syleus que nous avons évoqué au début de ce chapitre, un épilogue assez curieux: après le meurtre de Syleus, le héros aurait épousé sa fille, dont il était amoureux, mais il aurait été contraint de la quitter. Pendant son absence, elle tomba "malade d'amour et des regrets qu'elle éprouvait pour lui" et mourut. On allait brûler son corps, lorsqu'Héraclès revint. Malade d'amour et de chagrin, lui aussi, il voulut se jeter dans le bûcher et ceux qui assistaient à la cérémonie eurent grand mal à l'en empêcher. 2) On se souviendra aussi qu'Héraclès jeta un jour ses propres enfants dans le feu (474). Il se pourrait bien que la folie, envoyée par Héra (par laquelle le mythe explique l'épisode), ne soit (comme la haine de la déesse d'ailleurs !) qu'une légende expliquant a posteriori un geste qui n'était plus compris. 3) Une tradition, enfin, fait d'Héraclès l'inventeur de la
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crémation. Andron d'Halicarnasse rapporte, en effet, qu'Héraclès, à Troie, aurait été le premier à brûler un cadavre (celui d'Argeios), à la seule fin, d'ailleurs, de pouvoir l'emporter à son père... La crémation, rituel funéraire, avec ce que cela comporte pour le devenir de qui le subit: "être dévoré par le feu c'est, pour le cadavre, se trouver entièrement consumé, dans l'intégralité de sa forme corporelle, de façon à passer, en bloc et intact, dans le domaine de l'ailleurs"... (476). Ce "domaine de l'ailleurs" pour Héraclès devait être celui de la commensalité avec les dieux. Il est bien difficile de conclure: dans ces rapports, qu'affirme la tradition entre Héraclès et le bûcher, comment pourrions nous décider avec assurance de ce qui dérive des liens assurément établis, à la fin de l'archaïsme, avec les dieux morts par le feu et "ressuscités" de l'Orient? Comment pourrions-nous attester de ce qui a pu, au contraire, favoriser le rapprochement? Qu'Héraclès ait, dans des temps très anciens, bénéficié, ne serait-ee qu'en tant que parèdre, de ces sacrifices qu'on offrait aux divinités de la végétation nous paraît on ne peut plus logique; d'autant plus logique, dirons-nous, - et c'était là une des conclusions de notre première partie et de l'étude iconographique que nous avons entreprise pour mieux comprendre le syncrétisme - que c'est avec un Héraclès de cette nature que, sans aucun doute, Melqart a été assimilé: un Héraclès comme lui, parèdre d'une grande déesse. Et sans doute n'est-il pas sans intérêt de remarquer que les sacrifices semblables à ceux de l'Oeta ont lieu, en Grèce, pour l'essentiel soit au profit d'Héra, soit au profit d'Artémis, deux divinités qui, en ces lieux, sont parmi les plus anciennes auxquelles il ait été associé. Il ne fait aucun doute que le syncrétisme, à son tour, a aidé au développement de la légende d'Héraclès au bûcher... C'était une dimension de plus donnée au thème de la victoire sur la mort et de la conquête de l'immortalité... une immortalité désormais conquise grâce au passage par la mort, elle-même (477)... ceci dans le même temps, sans doute où l'initiation aux mystères d'Eleusis apparaissait comme la nécessaire condition du triomphe du héros sur Cerbère, le chien des Enfers (478). Une fois de plus un vieil héritage se chargeait d'un sens lourd d'avenir. Le temps viendrait où Ronsard pourrait écrire : Je veux brûler pour m'en voler aux cieux, Tout l'imparfait de ceste escorce humaine, M'éternisant, comme le fils d'Alcmène, Qui tout en feu s'assit entre les dieux (479).
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Fig. 3S : "Le Peuple mangeur de Rois".
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Gravure parue dans le journal Les Révolutions de Paris (projet pour une statue qui serait plac~ "sur les points les plus éminens" de nos frontières) Bibliothèque Nationale, Paris. D'après M. VOVELLE, La mentalité révolutionnaire. Paris, 1985, p. 104.
513 CONCLUSIONS
Sacrifice du dieu ? pas encore... le bûcher de l'Oeta nous a acheminés cependant, vers la mort du dieu... la mort qui, partout, hante le destin d'Héraclès et que nous retrouvons, fort logiquement, au terme de notre étude. Mais, avant d'envisager comment les travaux occidentaux d'Héraclès expriment - ou absorbent - cette idée perenne, nous voudrions cependant conclure sur l'éclairage qu'ils apportent quant aux rapports qu'entretient Héraclès avec le sacrifice. Manifestement, Héraclès, le mangeur de viandes, le glouton, a, dans ce domaine également, bien servi les Grecs : les anecdotes qui le montrent dévorant le boeuf de Théiodamas ou celui du laboureur !indien prouvent qu'il fut l'une des "excuses" avancées pour manger la viande du sacrifice, pour manger même celle du boeuf laboureur, le compagnon de l'homme, celui sans lequel aucune agriculture, donc aucune civilisation n'est possible. La violence même du héros et ses appétits surhumains justifiaient, en quelque sorte, le scandale ! Et le mangeur solitaire s'est fait, progressivement, le garant de la commensalité du sacrifice. Tout autant qu'Hermès il paraît mériter l'invective de l'Hymne homérique, "Tueur de vaches... compagnon des festins" (480); on peut en juger par ces banquets, liés aux sacrifices, faits en son honneur dans tout le monde grec: ceux de Rome, bien sûr, à l'Ara Maxima, sont particulièrement célèbres (481), ceux de Thasos et probablement aussi de Chypre sont, nous l'avons vu, attestés par l'architecture (482), ceux de l'Attique par l'existence des parasites (483) et, d'une façon plus générale, le type de l'Héraclès épitrapézios, à la tête ceinte d'une couronne de feuillage d'olivier, montre le héros participant à un festin, qui est déjà - peut-être - celui des dieux (484). Mais ce chemin qu'avec Héraclès nous avons parcouru dans l'espace du sacrifice et qui - d'autres en ont été, eux aussi, frappés! - permet de mieux cerner, de mieux en définir la pratique, nous aura montré, de surcroît, quel était, en définitive le rôle du héros: Héraclès victime, Héraclès sacrificateur, Héraclès divinité... les frontières du modèle classique de la thusia sont, en réalité, définitivement brouillées (485). Héraclès, dans le champ du sacrifice parcourt tout cet hinterland entre bêtes, hommes et dieux... fonction de médiation qui, par excellence, est celle du héros.
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Cette forte coïncidence nous confinne dans l'idée que le sacrifice est, au mythe d'Héraclès, un élément de toute première importance et si, comme nous le pensons, le mythe de Géryon pennet de l'expliquer, c'est à l'Héraion d'Argos qu'il faut en chercher la clef, autour de c~lle qui fut l'une des plus anciennes, l'une des plus puissantes divinités de la Grèce. Le sanctuaire - resté longtemps le point focal de l'Argolide - réoccupe un lieu habité depuis la lointaine préhistoire, puisqu'on a découvert, sur la même colline, un établissement néolithique (486). A une heure de marche de Mycènes, à deux heures d'Argos, il est bâti sur un contrefort du Mont Euboia et de sa terrasse - soutenue par un mur d'apparence cyclopéenne - il domine toute l'Argolide. Pausanias, qui a visité le temple (et vu les ruines de celui qui l'avait précédé, incendié par l'imprudence d'une prêtresse) (487), qui a admiré la statue chryséléphantine de la déesse, oeuvre de Polyclète (mais a vu aussi la très vieille image, faite de bois de poirier sauvage, qu'après la destruction de Tirynthe on avait ramené dans le sanctuaire), rapporte, au sujet d'Héra, une bien curieuse histoire: celle de ses trois nourrices, Acraia, Euboia et Prosymna, toutes trois filles du fleuve Astérion. Légende bien faite pour ancrer la divinité dans le paysage de l'Argolide, légende qui, de surcroît, recouvre, à l'évidence, les épithètes par lesquelles était invoquée la déesse argienne : Héra Acraia, déesse des sommets; Héra Euboia, maîtresse de la terre riche en boeufs; Héra Prosymna, déesse des Enfers (488)... C'est pour cette déesse, appelée encore Boopis potnia Héra (489) ou Zt:u(tBia, la déesse du joug (490), et plus précisément pour ses fêtes, les Hécatomboia, qu'Héraclès apporte le bétail de Géryon. Une procession - bien connue par l'exploit de Cléobis et Biton (491) dont la piété devait être immortalisée à Delphes -, conduisait la prêtresse d'Héra, dans un ancien char à boeufs jusqu'à son sanctuaire des sommets et la fête était suivie par un agôn plusieurs fois mentionné par Pindare (492) et dont le prix était un bouclier de bronze, après avoir été sans aucun doute un bouclier fait de la peau de l'animal sacrifié lui-même (493). "Fier comme celui qui a porté le bouclier à Argos" l'expression était devenue proverbiale (494) et il est fort probable que cet honneur était aussi une consécration... celui qui portait ainsi le bouclier quittait l'enfance, le temps pour lui était venu de porter les armes. Initiation, sacrifice... autour de l'Héra argienne, déesse de
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la plaine riche en boeufs (495). C'est bien en maîtresse des animaux qu'elle apparaît à Argos (496), c'est encore telle qu'elle apparaît chez les Vénètes (497), avec ses parcs d'animaux merveilleux et ses splendides cavales, telle enfin qu'était Héra Lacinienne (498). Héraclès bouvier, Héraclès tueur de boeufs, pourvoyeur du sacrifice, car c'est bien ainsi que nous l'a montré cette étude, Héraclès une fois de plus rencontrant Hermès: Hermès Argeiphontes, tueur d'Argos en un mythe qui pourrait refléter des sortes de Bouphonies argiennes (499)... Héraclès peut-être restera tel plus longtemps qu'il ne pourrait y paraître: c'est ainsi qu'on l'invoque encore, en tout cas, dans l'Anthologie palatine: "Salut, Alcide qui dévores les génisses, protège les étables et de ce petit troupeau fais naître des milliers de boeufs" (500).
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Nota bene. Nous avions terminé la rédaction de notre chapitre "Images du sacrifice" lorsqu'est paru le livre de Jean-Louis DURAND, Sacrifice et labour en Gr~ce ancienne, Paris/Rome, 1986. Nous regrettons de n'avoir pu utiliser cet ouvrage qui, pour l'essentiel consacré aux Bouphonies athéniennes, dans le prolongement d'études antérieures (voir notre bibliographie), comporte un chapitre particulièrement intéressant pour notre propos (chap. V, pp. 145-173 : "Sacrifier à Lindos"). Nous ne pouvons donc manquer'de signaler l'intérêt des documents iconographiques proposés: représentations d'Héraclès conduisant le boeuf ou le taureau au sacrifice (fig. 70 à 78), images du héros faisant rôtir les viandes sur l'autel (fig. 79 à 85). Il nous est agréable de souligner la convergence de cette démonstration par l'image avec nos propres recherches; elle confirme, en particulier la pertinence de ces deux "moments" privilégiés de l'intervention d'Héraclès dans le sacrifice qu'avait permis de dégager notre analyse. Disons encore que, si nous rejoignons Jean-Louis Durand pour retrouver dans l'attitude qui est celle d'Héraclès dans l'espace du sacrifice, la position même du héros - entre bêtes et dieux - (c'était la teneur de notre intervention au Colloque de Rouen en 1982; voir les Actes pp. 180-181), il nous est difficile, en revanche, de souscrire à l'interprétation qu'il établit, en particulier, entre Héraclès "héros de l'errance... en train de détruire, par la mort du boeuf, les rapports homme/animal nécessaires à l'agriculture" et la laboureur qui serait, quant à lui, "du côté du ponos, du travail pénible" (p. 154). C'est, me semble-t-il, mal connaître ce que la Cité a fait d'Héraclès: le héros du ponos, précisément, mais encore le héros "culturel", celui qui, partout où il passe, répand la civilisation, c'est-à-dire, avant tout, l'agriculture. Curieuse contradiction! une contradiction qu'on peut être tenté de résoudre - et nous aimerions, sur ce point, poursuivre le débat avec Jean-Louis Durand - en voyant dans l'Héraclès du sacrifice lindien, précisément, le héros "d'avant la Cité"... une contradiction dans laquelle on peut être tenté de lire les difficultés d'une interprétation "résolument synchronique" (M. Detienne, avant-propos, p. VIII) et, pour tout dire, l'image même des problèmes nés du refus de prendre en considération l'évolution sinon la genèse - des mythes.
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TROISIEME CHAPITRE IMAGES DE LA MORT ET DE L'IMMORTALITÉ
"La puissance qu'a la mort en général éclaire le sens du sacrifice, qui opère comme la mort, en ce qu'il restitue une valeur perdue par le moyen de l'abandon de cette valeur..." (SOI)
Héra d'Argos, déesse des sommets, maîtresse de la plaine riche en boeufs est aussi Héra Prosymna, souveraine des Enfers... C'est elle que sert Héraclès, lorsqu'il ramène jusqu'en Argolide les boeufs de Géryon; c'est pour elle - par elle dira bientôt la légende - qu'il souffre mille maux, qu'il devient le héros du ponos ... Ces pommes, qu'il ira cueillir dans le jardin des Hespérides, ce sont encore les pommes d'Héra: fruits d'or donnés à la déesse pour son mariage. Rapportées à l'assemblée des dieux, elles conféreront au héros l'immortalité bienheureuse. Là se trouve bien le sens profond du mythe: la victoire sur la mort, cette tentative désespérée pour anéantir l'infinie distance entre les hommes et ceux qui sont, par essence, des Immortels (S02). Marie Delcourt, dans la brève, mais éclairante notice qu'elle consacre à Héraclès a su dire comment, dans la légende du héros, le thème était traité "à plusieurs étages différents" : du conte populaire (celui des oiseaux du lac Stymphale" qui sont, comme les Sirènes des âmes en peine") à l'allégorie transparente ("l'enlèvement du chien Cerbère, et selon certaines versions, de Pluton lui-même") (S03), c'est bien la même victoire sur la mort qu'Euripide affirmera encore en montrant Héraclès "arrachant Alceste au trépas"... C'est elle toujours autour de laquelle "broderont" les peintres de vases qui représentent le héros luttant contre Géras ou dispersant les Kères de la vieillesse (S04). Avant de voir - rapidement, car bien des choses, déjà, ont été dites - comment, dans les épisodes qui nous intéressent, l'imaginaire des Grecs a "pensé" cette inéluctable réalité qu'est la
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mort, ce désir jamais réalisé de l'immortalité, je voudrais faire quelque place à la geste d'un héros, si proche parfois d'Héraclès qu'il semble bien que ce dernier lui doive beaucoup: Gilgamesh qui fut roi d'Uruk dans le lointain pays des Sumériens, Gilgamesh "le plus glorieux des hommes... le plus superbe des héros", (505), Gilgamesh qui "revêtit un jour la peau du lion" et "erra sur la steppe" (506), Gilgamesh qui "gémit amèrement comme gémit une femme" (507) après la mort de son ami Enkidu, parti "A la maison qui ne lâche plus quiconque y entre, Sur la route où il n'est nul retour, A la maison dont les habitants sont privés de lumière, Où la poussière est leur repas, la boue leur nourriture..." (508). Gilgamesh qui, pour sa part, tenta d'obtenir l'immortalité et, pour ce faire-, "vint rôder" près de Shamash, le Soleil, manifestement le dieu souverain du héros. Si les extraits cités plus haut appartiennent à la version assyrienne du poème, le texte que nous rapportons maintenant est celui d'une vieille version babylonienne (509). Shamash, bouleversé de voir Gilgamesh se diriger vers lui, lui dit : "Gilgamesh, où viens-tu rôder? La vie que tu poursuis, tu ne la trouveras pas. Gilgamesh, où vas-tu rôder? La vie que tu poursuis tu ne la trouveras pas. Quand les dieux créèrent l'homme, La mort ils mirent à côté de l'homme, La vie, ils la gardèrent dans leurs propres mains Pour toi Gilgamesh, que ton ventre soit plein, Divertis-toi le jour, la nuit. De chaque jour fais-toi tète et réjouissance Jour et nuit, danse et joue! Que tes vêtements soient éclatants de fraîcheur Et ta tête lavée; baigne toi dans l'eau. Prête attention au petit qui se cramponne à ta main Que ton épouse se délecte en ton giron ! Telle est la tâche de l'homme.
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Si nous avons jugé bon de rapporter ce texte, nous qui avons perdu les grandes épopées que l'archaïsme avait consacrées à Héraclès (510), ce n'est pas seulement parce que les exploits des deux héros se font écho, parce que Gilgamesh, avant le héros grec, a vaincu "le gardien de la forêt" , parce que lui aussi a tué "les lions dans les passes des montagnes" et "saisi le taureau descendu du ciel" (511)... Ce n'est pas seulement parce que leur quête est la même: "rejoindre l'assemblée des dieux à la recherche de la vie" (512) et qu'il est possible, peut-être, de retrouver dans les plus anciennes versions du mythe grec le rôle important que, dans l'épopée babylonienne, jouait le soleil (513)... C'est aussi - c'est surtout - parce que le mythe oriental, plus explicite (ou simplement mieux conservé) pourrait bien donner la clef du "paradoxe" ou de l'ambiguïté fondamentale d'Héraclès. Dans cette opposition entre le destin des dieux - cette vie qu'ils gardèrent pour eux seuls - et le destin des hommes - une mort qui, en quelque sorte, détermine leur vie, seulement occupée des plaisirs d'ici bas - ne peut-on s'autoriser à voir la source de cette tension permanente qui anime le "personnage" du héros? Humain, Héraclès l'est; trop humain, humain jusqu'à n'être qu'une bête. Des enfants? il en aura, lui, un nombre tel que les mythographes, lorsqu'ils en font la liste - pourtant longue! -, en oublient toujours quelques-uns (514) ; des femmes? Il en séduit partout où il passe, et jusqu'à cinquante en une seule nuit (515); des festins et des réjouissances? il en demande jusque dans la maison d'Admète où l'on s'apprête à enterrer Alceste; le ventre plein ? là parait bien être, en effet, sa préoccupation majeure, point n'est besoin d'y revenir... Mais lui que le destin de l'homme marque avec tant de force, tant d'insistance, lui qui éprouve la condition humaine dans ce qu'elle a de plus humiliant: l'esclavage, la maladie, la folie, il sera dieu un jour et bénéficiera de la longue vie des Immortels. Double transgression dont l'une semble bien être la nécessaire condition de l'autre.
520 1. LE MONSTRE TRIPLE, IMAGE DE LA MORT
"Voici maintenant le corps de l'indomptable Géryon tué près de ses boeufs,. ses tetes sanglantes jonchent la poussière, abattues à coup de massue. Son chien, meurtrier entre tous, a été terrassé à ses pieds, Orthros, gardien aussi redoutable que le triste Cerbère son frère. Non loin grt le bouvier Eurytion, baignant dans les flots de son sang..." Quintus de Smyrne, VI, 249-255.
Jean Bayet, étudiant une série de sarcophages romains au thème héracléen, a, il y a déjà bien longtemps, rassemblé une documentation étendue afin de prouver qu'Hercule/Héraclès avait toujours été "le protecteur des hommes obsédés par les espérances et les terreurs de l'au-delà" (516). Quelques années plus tard, il revenait à cet "Hercule, héros chthonien" (517), pour étudier les origines du dieu romain. C'est dire que ce terrain est déjà très largement parcouru. "Prédispositions infernales" d'Héraclès (518) : plantes héracléennes (olivier et peuplier blanc) ; rapports avec les eaux, qu'elles soient celles de sources ou de fleuves; richesse et fécondité d'origine infernale... les moindres indices servaient (parfois peut-être avec quelque excès) (519) la démonstration. Plus constamment probante était évidemment l'étude des relations entretenues par le héros avec les dieux de la mort (520), celle du symbolisme dionysiaque (521) ou bien encore l'analyse de ses luttes avec les "monstres infernaux".
1-1 Géryon, en effet, est d'abord l'un de ces monstres, issus des lignées primordiales et destinés à fournir à Héraclès ses
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principales victimes (les enfants d'Echidna, par exemple, seront presque tous décimés par le héros !). C'est pourquoi il nous paraît nécessaire de le replacer dans le contexte généalogique qui est le sien, de reyenir, une fois de plus, à la Théogonie d'Hésiode, à ce qu'elle nous enseigne de ces familles contre lesquelles s'acharnera le fils d'Alcmène. 1) La lignée de Nuit, en premier lieu. Cette nuit primordiale d'Hésiode, Nuit "la ténébreuse", Nuit "la pernicieuse", enfante "sans s'être unie d'amour à quiconque" : - Moros, la noire Kère et Thanatos... trois enfants pour une même réalité: la mort (522). - Hypnos, et avec lui la race des Songes. - puis, dans la même triade, après Sarcasme et Détresse, "la douloureuse", avant les Parques et les Kères, Nuit enfante "les Hespérides qui, au-delà de l'illustre Océan ont soin des belles pommes d'or et des arbres qui portent tel fruit" (523). - suivent, Némésis, Apaté, Philotès, Géras et Eris... Les Hespérides, nymphes à la voix claire, certes, mais filles de Nuit, nées, elles aussi, "d'une division sans amour" (524)... Héraclès en triomphera comme il triomphera de Thanatos, des Kères et de Géras "la vieillesse ruineuse". 2) La lignée de Pontos (= Flot) ensuite. Du "valeureux Phorcys" et de "Cetô aux belles tresses" qu'il enfanta, naquirent les Gorgones, qui elles aussi habitent "au delà de l'illustre Océan, à la frontière de Nuit, au pays des Hespérides sonores". De Phorcys et Cetô naquit aussi Méduse "à l'atroce destin" ... et c'est de Méduse que surgit, "lorsque Persée lui eut tranché la tête", le Grand Chrysaor, père de Géryon, aux trois têtes (525). A cette même lignée, liée à l'Océan de manière insistante (c'est de Poséidon que Méduse aurait conçu Pégase et Chrysaor et c'est uni à Callirhoé, la fille d'Océan que ce dernier engendre Géryon !) appartient aussi Echidna "à l'âme violente", Echidna dont le corps est pour moitié d'une jeune femme aux belles joues et aux yeux qui pétillent, pour moitié d'un énorme serpent, terrible autant que grand (526), Echidna qui évoque de très près la mixoparthénos à laquelle plus tard devait s'unir Héraclès dans le récit d'Hérodote (527), Echidna dont naissent
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avec Chimère, puis Phix, Orthos, le chien de Géryon; Cerbère, "qu'on n'ose à peine nommer", le chien d'Hadès, l'hydre de Lerne que fera grandir Héra "pour satisfaire son effroyable haine contre Héraclès le Fort", le lion, enfin, fléau des humain, qu'Héra - toujours elle - nourrir~ dans les vallons de Némée (528). . Et puis, dernier rejeton de Phorcys et Céto, "le terrible serpent " qui, caché sous la noire terre, au milieu de ses immenses anneaux (ou sur de vastes confms 1) (529) garde des (pommes) tout en or" (530). Telle est la famille de Géryon, tel est l'environnement des principaux adversaires d'Héraclès. Avant même de nous pencher sur la signification probable du monstre lui-même, il importe de souligner quelques constantes. - l'aspect très généralement inquiétant de ces êtres monstrueux ou de ces entités, nés ainsi de Nuit ou de Pontos. - le lien très fort qui les unit à Nuit, la Ténébreuse, la Redoutable (on remarquera à cet égard que les épithètes hésiodiques sont négatives, contrairement à celles d'Homère qui, avec Nuit, la Rapide (900ft) ou l'Ambrosienne (aJL6p6cl1a) introduisaient une dimension moins foncièrement pessimiste). Chez Hésiode, alors que tout ce qui naît du premier couple : Gaia et Ouranos représente la puissance positive et claire, Nuit conjuguerait avec cette puissance, la négativité (531) : "la Mort sous plusieurs noms, la violence destructrice de la vie, et le Non-vivre. Le Sommeil: une inconscience. Le Rêve: l'expérience de l'illusion. Sous le nom de Mômos: la dégradation de la valeur. Sous le nom de Geras: la soumission à la décrépitude. Les petits-enfants, fils d'Eris, fille de Nuit, représenteraient les effets: anarchie, misère, crime, toutes les formes du mal dans le monde" (532). -le lien, non moins fort, qui les unit à Océan (533), Océan, qui, pour reprendre l'éclairante analyse de Fdinkel, représenterait le mouvant et l'informe (534). Ces monstres "qui ne ressemblent en rien ni aux hommes mortels, ni aux dieux immortels" (535), ou qui, comme Nérée, l'aîné des enfants de Pontos, changent de fonne à volonté. A cette dimension abstraite de la descendance d'Océan et de Nuit, s'ajoute une dimension "géographique" qui les fait se rejoindre: dimension "géographique" donnée - pour la
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descendance de Nuit - par les Hespérides sises "au delà de l'illustre Océan", comme d'ailleurs ceux des enfants de Pontos que localise Hésiode, Les Gorgones habitent en effet "au pays des Hespérides sonores", "aux frontières de Nuit", au delà de l'illustre Océan", là où sont encore situés "les parcs brumeux" de Géryon etd'Orthos... Océan et Nuit: des frontières ... des extrémités... des eschatiai, nous avons eu, déjà, l'occasion de le dire (536). - Mais cette "géographie" que dessinent les enfants de Nuit et d'Océan n'est pas seulement plane, horizontale, et il serait insuffisant d'y retrouver seulement ces limites, déjà décelées sur les reconstitutions cartographiques par lesquelles on tente de retrouver, non pas tellement la représentation plus ou moins exacte que les Grecs, à un moment ou à un autre, savaient donner du monde dans lequel ils vivaient, mais bien plutôt l'image, à la fois plus ethnocentrique et plus spéculative qu'ils construisaient de l'espace qui les entourait (537). Plus qu'une géographie, une cosmogonie donc, avec, tout naturellement, la troisième dimension qu'introduisent certains de ces enfants de Nuit auxquels (nous n'oublions pas notre héros!) Héraclès sera affronté: Echidna, "au creux de sa grotte" (538) ou bien encore "le terrible serpent... caché sous la noire terre" (539) ... Dimension verticale, celle de la profondeur souterraine des forces chthoniennes et, pour que l'image soit complète - mais là n'est pas, pour l'instant, notre problème -, il faudrait restituer, toujours sur cet axe vertical, mais à l'opposé, du côté des cieux, Atlas, fils de Japet (540) (et pour un temps Héraclès) supportant la voûte céleste, ceci bien sûr en ce même lieu,"aux limites mêmes du monde, en face des Hespérides au chant sonore" (541). Si nous en restons, pour l'instant, aux adversaires d'Héraclès, ceux-ci nous apparaissent ainsi avec trois connotations fondamentales: chthonienne, nocturne, océanique ou plus généralement marine enfin, et nous insisterons quelque peu sur cette dernière, car elle est, peut-être, plus oubliée. Pourtant, n'expliquerait-elle pas certaines séquences du mythe, certains témoignages qui pourraient alors apparaître comme la partie émergée d'un iceberg pour l'essentiel englouti? (542). Ne permet-elle pas de comprendre, par exemple, l'insistance avec laquelle Apollodore, si proche "des plus anciens récits des Grecs" (543), fait des adversaires rencontrés par
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Héraclès, tout au long de l'expédition contre Géryon, des fils de Poséidon? N'éclaire-t-elle pas, de surcroît. cette fonction de protection des navigateurs qu'assigne Pindare au fils d'Alcmène lorsqu'il explique ainsi son apothéose :
"(C'est) lefils d'Alcmène qui (entre) dans l'Olympe, après avoir exploré toutes les régions de la terre, tous les abrmes de la mer aux vagues blanchissantes, aux bords escarpés et pacifié la route des navigateurs. Maintenant, près de Zeus porteur de l'égide, il réside et goQte lafélicité la plus belle, honoré par les Immortels comme un ami qui leur est cher, époux d'Hébé, martre d'un palais d'or et gendre d'Héra". (544)
Fig. 36: Héraclès et les monstres marins Coupe à figures noires de l'atelier du peintre de Xénoclès (vers 570-560) . Musée de Tarquinia. D'après P.E. ARIAS et M. HIRMER, Le vase grec, trad. Paris, 1962.
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"Illustre marcheur de la fable grecque", Héraclès certes le restera, Pindare nous rappelle qu'il fut aussi un marin intrépide... Dans quels temps lointains ? li se pourrait que, là encore, la rencontre du héros grec et du Melqart phénicien - resté pour sa part un dieu protecteur des navigateurs - à la fois s'explique mieux, et dans le même temps éclaire le passé de celui qui devait rester, pour les Grecs d'Outre-Mer, un archégète.
1-2 On comprend mieux, semble-t-il, enfin, ce que fut le plus célèbre de ces monstres, Géryon, au coeur du plus riche, peut-être, des exploits d'un héros. Géryon dans son île océanique, Géryon dans ses plaines brumeuses, aux portes de la Nuit... prairies nébuleuses, prairies données, peut-être, comme infernales par Hésiode (546). Apollodore, une fois de plus, nous éclaire, lorsqu'il rapporte le rapt des troupeaux par Héraclès: le héros a déjà assommé le chien Orthos (ou Orthros) et le bouvier Eurytion venu à son secours, lorsque Géryon est averti du vol par Ménoitios "qui gardait, près de là, les boeufs d'Hadès" (547). Les prairies de Géryon et celles d'Hadès sont donc voisines... ou sont les mêmes ! Quant à Ménoitios - toujours selon Apollodore - c'est son propre troupeau qu'il devra défendre contre Héraclès, et ce dans les Enfers, lorsque le héros viendra y chercher le chien Cerbère... en vain, car, si le fils d'Alcmène se contente de briser les côtes du bouvier, c'est un bien curieux sacrifice que sous la terre, il effectue, égorgeant l'un des boeufs d'Hadès "pour faire goûter du sang aux âmes" (548). Encore un doublet! Eurytion et Ménoitios n'ont-ils pas même fonction? Géryon et Hadès n'appartiennent-ils pas au même cortège infernal? Ceron, d'ailleurs, l'homologue étrusque de Géryon, n'assiste-t-il pas Hadès dans les Enfers? (549) Géryon ne serait-il pas le bouvier des Enfers? La réponse paraît évidente. Encore faut-il préciser le sens de l'expression, dire, en particulier, qu'elle n'est pas un démarcage du titre bien connu de lH. Croon: The Herdsman of the Dead, le bouvier des morts (550). Pour l'auteur néerlandais, en effet, le bouvier est lui-même le dieu des morts et son troupeau n'est autre que celui des âmes dans l'au-delà. On comprend mieux le raisonnement, lorsqu'on reconstitue la démarche de Mr. Croon. Dans un premier temps, il étudie les sources chaudes en Grèce, et
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constate qu'elles sont mises en rapport, avec certaines divinités: avec Héphaïstos, pour un petit nombre d'entre elles; avec Artémis, parfois; avec Asclépios (assez tardivement, lorsqu'elles arrivent à inspirer plus de confiance que d'effroi) ; avec Héraclès de façon plus générale et plus notable. Dès cette première étude (551) s'affinne la conviction que ces sources chaudes· sont "pensœs" comme étant des bouches des Enfers. Autour de ces entrées du monde souterrain, gravitent un certain nombre de légendes, celle du "berger des morts" en particulier, que devait reprendre J.H. Croon. L'étude exhaustive qu'il a menée de ces traditions et des cultes qui parfois s'y rattachent, nous évitera de redire ici tout ce qui s'est écrit des rapports ~ désonnais bien connus - d'Héraclès aux sources chaudes (552)... rapports qu'à plusieurs reprises, d'ailleurs, nous avons nous~memes rencontrés : en Sicile, lors du retour du héros avec les boeufs de Géryon ; à Rhodes, en contrepoint du sacrifice lindien ; aux Thermopyles, enfin, non loin du bûcher de l'Oeta. L'hypothèse de J.H. Croon ~ qui, sur ce point reprend les conclusions de O. Gruppe - consiste à faire des sources chaudes des lieux de culte à Géryon lui-même (celui-ci n'a-t-il pas un oracle aupres de la source Aponus à Padoue 7) (553), et, à partir de là, de considérer : 1) que la légende d'Héraclès s'implante là où était établi l'un de ces cultes à un dieu ou génie des sources : ce peut être, et c'est souvent Géryon... Ce peut être aussi Eryx, qui, à l'Extrême Ouest de la Sicile, possède lui aussi ses troupeaux, non loin des sources chaudes d'Himère. 2) que la localisation de cette légende varie ensuite avec les progrès géographiques (et coloniaux !) des Grecs. Nous ne reviendrons sur ce point, traité dans notre seconde partie, que pour dire que, si nous rejoignons tout à fait J.H. Croon, pour voir dans la localisation épirote une donnée non pas première, mais divergente (la tradition corinthienne, développée autour des sources chaudes de Chaonie), le processus envisagé pour la localisation occidentale (établie à Baies, le port de Cumes par les Chalcidiens, emportée vers Gadès par leurs partenaires commerciaux, les Phocéens) (554) nous parait moins évident, non seulement parce que l'existence de sources chaudes à Gadès est douteuse, l'auteur le reconnait (555) ; non seulement parce que - et cela nous l'ajoutons - l'emprise des Phocéens dans la
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région de Tartessos semble bien avoir été moins forte qu'on ne l'imaginait (556), mais peut-être aussi parce que le rôle des sources chaudes - s'il est considérable - me paraît devoir être diversement apprécié. Qu'elles aient fixé des cultes locaux, des épisodes de la légende, qu'elles aient ainsi fourni matière à enrichir, à développer le mythe me semble incontestable. Qu'elles l'aient déterminé à ce point est plus douteux. Nous venons de le voir la conception grecque est d'emblée, et dans son essence-même, occidentale et les conclusions de J.H. Croon, qui cherche les origines du mythe dans la région des Thermopyles et de l'Oeta, peuvent, en définitive, apparaître quelque peu surprenantes. Localisation certaine d'un culte à Héraclès (et d'un culte chthonien sans aucun doute) ; origine du mythe du rapt des boeufs de Géryon, nous n'en croyons rien, ne serait-ce que parce qu'elle ne rend pas compte de la dimension cosmogonique, si prégnante, comme nous venons de le voir, dans le mythe. 3) Il reste qu'après la démonstration de J.H. Croon, la preuve de la nature chthonienne, voire infernale de Géryon n'est plus à faire (557). Nous ne suivrons pas l'auteur cependant jusqu'au bout de son interprétation et ne verrons pas, dans les boeufs de Géryon, comme dans les boeufs d'Hadès, les âmes des morts (que viendrait sauver Héraclès! p. 168) (558). Comment pourrait-on comprendre, si tel était le cas, le sacrifice d'Héraclès aux Enfers t Notons d'ailleurs que J.H. Croon - qui pourtant appuie fortement sa démonstration sur la valeur parallèle des troupeaux de Géryon (gardés par Eurytion) et de ceux d'Hadès (gardés par Ménoitios) - ne mentionne pas ce détail! (559). Nous préférerons donc, comme J.H. Rose, parler de bétail chthonien (560) et voir dans l'attribution de ces merveilleux troupeaux aux divinités ou aux génies infernaux l'union intime des deux formes du chthonien : celle qui tient aux couches superficielles de la terre, dispensatrices d'abondance; celle qui a pour lieu la terre en ses profondeurs, et qui retient les morts... Convergente et beaucoup plus éclairante, encore, nous paraît être l'analyse de Clara Gallini (561) qui, dans ces animaux de l'au-delà, ces boeufs merveilleux d'Hadès ou de Géryon, ceux d'Hélios encore ou ceux qu'Apollon garda un jour chez Admète, ceux d'Augias, enfin, si bien décrits par l'Idylle XXV de Théocrite, reconnaît l'attribut même de certaines divinités, à la fois maîtresses de la nature et tout particulièrement des
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animaux - à l'image des grandes puissances primitives - et souveraines de l'au-delà. Cette connexion entre la maîtrise des animaux et le monde infernal est particulièrement nette dans les sociétés de chasseurs, chez les Esquimaux par exemple ou encore parmi les peuples de Sibérie (comme les Tongousses) étudiés par Eveline Lot-Falck (562), où l'on croît à l'existence - décisive pour les hommes - d'un maître ou d'une maîtresse des animaux de la chasse: Sedna, maîtresse des phoques, chez les Esquimaux; "maîtresse" de la Terre chez les Tongousses, à qui le chaman va demander (et au besoin voler) du gibier. C'est pourquoi aussi bien Clara Gallini (563) que Walter Burkert cherchent les antécédents du mythe de Géryon dans un milieu de chasseurs et Walter Burkert, plus précisément, rapproche la quête d'Héraclès d~s pratiques chamaniques : le chaman apparaissant comme "l'aide surnaturelle des hommes, celui qui a retiré les animaux des Enfers pour que les hommes aient la nourriture nécessaire" (564) ... le mythe lui-même précise-t-il se forgeant plus tard dans une société agricole et urbaine (565). Reconnaissons que - pour difficile à démontrer qu'elle soit - cette plongée dans la préhistoire de la Grèce éclaire remarquablement les fonctions d'Héraclès: grand pourvoyeur de viande consommable pour les hommes, grand pourvoyeur du sacrifice également! Et disons, pour terminer, que dans la Grèce historique elle-même, survit fortement cette connexion entre maîtrise des animaux et au-delà; elle survit, par exemple, dans la personnalité divine d'Artémis, et si, à l'époque classique, Héra fait figure de déesse souveraine, épouse de Zeus et protectrice du mariage, la réalité ancienne - si l'on en juge par les épiclèses de la déesse - devait être - à Argos à tout le moins - assez proche de celle-ci; elle le reste d'ailleurs plus nettement, avons-nous vu, dans l'Occident.
1-3 Images de l'abondance que les grasses pralnes d'Erythie, image de l'au-delà aussi que cette île rouge du soleil couchant, sur laquelle règne la figure infernale du monstre triple... Image de la mort, donc, et il est temps, maintenant de connaître le visage que lui donnaient les Grecs... La plus ancienne représentation figurée que nous possédions de Géryon,
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provient, nous l'avons vu, de Corinthe et Dunbabin la date de 680-670 (566). Alors qu'Héraclès se précipite au combat (schéma de la course agenouillée) avec son arc et ses flèches, c'est en hoplite qu'apparaît le triple guerrier, brandissant une (ou plusieurs?) lances au-dessus d'une triple tête et attaquant également à l'épée. (Fig. 31.1). Les trois corps sont masqués par les boucliers ronds juste à l'endroit où ils se réunissent et, en dessous de la taille, ils s'individualisent à nouveau, encore que seules quatre jambes soient parfaitement visibles. C'est le même schéma qu'on retrouve, au début du Vlème siècle, sur un brassard d'Olympie (notre frontispice) : guerrier triple (boucliers ronds, toujours, et casques à cimier), au rigoureux parallélisme, rompu seulement, dans la partie supérieure, par la chute de l'une des têtes vers l'arrière. C'est en effet un moment différent de la lutte qui a été choisi et c'est à l'épée que combat, presque au corps à corps, un héros désormais vêtu d'une peau de lion, dont la queue, par sa longueur, rappelle encore de fort près celle de Bès (567). Nous ne décrirons pas tous ces vases - très nombreux, surtout au Vlème siècle (568) - qui reprennent le thème avec des variantes souvent assez minimes: Héraclès, s'il est proche du monstre triple, abandonne son arc, mais le carquois en bandoulière demeure, qui prouve que l'archer n'est pas oublié; il attaque alors indifféremment à l'épée ou à la massue (569). F. Brommer remarquait que les armes paraissent interchangeables; c'est particulièrement net sur l'amphore de Bassegio (570) où Héraclès, s'il utilise la massue, porte l'épée au côté, et, dans son dos, l'arc et le carquois restent très visibles. Géryon, pour sa part, est toujours figuré en hoplite: casque à haut cimier, lances, cuirasses, cnémides et boucliers ronds qui ne diffèrent guère que par leur épisème : trépied parfois, (571) aigle souvent, (572) taureau de temps à autre, tel ce curieux protomé où seule une come apparaît - comme d'ailleurs sur les boeufs de l'amphore chalcidienne de la Bibliothèque Nationale (573) - ou bien encore Gorgone à la face terrifiante, hérissée de serpents... image de la mort, elle aussi, qui accroît ainsi la charge de sens dont est porteuse la représentation (574). Connexion étrange du monstre et du blason: images du pouvoir infernal et peut-être déjà de l'immortalité ? L'élément de différenciation tient surtout à l'attitude plus ou
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moins rigide du monstre, au parallélisme plus ou moins rigoureux des trois corps: très marqué encore sur l'élément de bouclier d'Olympie que nous avons étudié (575) ou sur l'amphore attique à figures noires du Louvre (576), il fait place à une plus grande variété d'attitudes, à plus de mouvement dans la composition, surtout facteurs de l'état d'avancement de la lutte: les torses blessés, créent, en effet, la rupture en fléchissant ou s'effondrant... A cet égard, la coupe à figures rouges d'Euphronios équilibre savamment, du corps déjà mort de l'un des Géryons, la composition circulaire du combat, l'arc et la massue d'Héraclès rencontrant ici, en haut de la composition, les deux lances du monstre (577). Autre élément de différenciation, le nombre plus ou moins grand des actants de ce drame: présence parfois du troupeau, objet de la lutte, nous n'y reviendrons pas (578) ; présence fréquente d'Eurytion, le berger, déjà blessé, au moment où Héraclès affronte le monstre (comme dans le récit d'Apollodore) et tombé entre les combattants; présence d'Orthos encore, qui, même sur les images inscrites, n'est jamais nommé et qui pourtant est toujours représenté sans vie, gisant aux pieds des combattants. C'est le cas, par exemple, sur la coupe d'Euphronios où, de sa blessure fichée d'une flèche, s'écoule du sang (579). Il arrive aussi que figurent les adjuvants respectifs des protagonistes. Athéna assiste assez fréquemment son protégé (580) et parfois - sur la coupe d'Euphronios encore - "une femme éplorée" se tient auprès de Géryon: présence symétrique de celle de la déesse. Faut-il comme M. Robertson attribuer à Stésichore cette introduction d'Athéna dans le mythe? Des fragments de la Géryonide, prouvent, en tout état de cause, que, dès cette époque, elle intervenait dans le récit (581). Peut-être permettent-ils aussi d'identifier celle qui pleure sur le sort de Géryon ? Callirhoé, la mère du monstre triple, était en effet nommée dans le poème (582) et Martin Robertson préfère cette interprétation à celle de Klein ou de Furtwangler qui reconnaissent plutôt, derrière le bouvier infernal, Erythéia, la nymphe du lieu. Certes aucun témoignage littéraire, n'atteste qu'elle ait assisté au combat, mais sa présence auprès de Géryon se justifie cependant: son nom est celui d'une Hespéride (583) et le scholiaste d'Apollonios de Rhodes affIrme, précisément, que l'Hespéride Erythéia était la nymphe de l'île de Géryon (584) ;
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Fig. 37 : Hé~aclès et Géryon :
Amphore d'Exékias. Conservée au Louvre (F 53) Cf. E. GERHARD, Auserlesene griechische Vasenbilder, op. cit., pl. 107.
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Fig. 38 : Héraclès et Géryon
Amphore de Bassegio, actuellement à Londres,
Cf. E. GERHARD, Auserlesene griechische Vase nbilder, op. cit., pl. 108 (CROON nO 8).
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pour Pausanias, elle est même la fIlle du tricéphale (585). Quelles que soient les variantes, sur toutes ces représentations Géryon est un monstre réunissant trois corps : Tpt:lç Bt àvBpt:ç rTlPuo"ç &ia{v 6ÀÀ~À01Ç npOatx6J.L&VOl (586). Telle est la description de Pausanias. Telle était déjà la conception d'Eschyle pour qui le monstre est simplement dit Tpla~l1aToç (587); telle est aussi la description, plus précise, d'Apollodore (588) : "Il avait trois corps qui n'en formaient qu'un seul,. ils se réunissaient vers le ventre et redevenaient triple à panir des flancs et des cuisses..." Or, lorsque dans la Géryonide Stésichore évoque l'adversaire d'Héraclès, lui aussi le décrit comme un hoplite avec bouclier (col. l, v. 12), casque à cimier (col. l, v. 16) et Cuirasse (col. II, v. 13) ; lui aussi lui donne un triple corps, puisque l'un des torses, blessé par une flèche (col. II, v. 10-11), s'écroule (v. 14-15) (589) et qu'il paraît bien lui attribuer six mains et six pieds (590). Stésichore cependant introduit une particularité qui, si l'on en juge par les représentations céramiques, devait rester "occidentale" : le monstre triple était ailé (591). On pourrait penser (et on dit parfois) que cette description littéraire est traduite sur deux vases chalcidiens à figures noires du milieu du Vlème siècle: l'amphore à col provenant de Vulci et conservée au Cabinet des Médailles, à Paris (Géryon y est identifié sous la forme GaruFones) (592) et l'amphore provenant de Caere et attribuée au même "peintre des inscriptions". La représentation est, sur cette dernière, plus réduite, et si, comme dans la première, Athéna assiste Héraclès et lui présente une coupe, ni Orthos, ni Eurytion ne figurent; Héraclès combat contre le seul Géryon (593). Le moment du combat est différent, deux têtes, deux torses se sont déjà écroulés, l'un en arrière, l'autre en avant (et vu de face ce qui est exceptionnel !), Héraclès abandonnant apparemment ses armes pour saisir à main nue le casque (par son cimier) du seul Géryon resté en vie; torses, membres et ailes (déployées et recourbées vers l'arrière) s'organisent pour former autour des boucliers une remarquable composition dont le mouvement circulaire n'est pas sans rappeler celle de la tricèle. Une surprise: sur l'une et l'autre de ces
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Fig. 39 : Héraclès et
Géryon
Amphore à figures noires de Caere Conservée au British Museum (WALTERS, n, B, 155) milieu du VIème siècle D'après E. GERHARD, Auserlesene griechische Vasenbilder, pl. 323.
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Fig. 40 : Guerrier tricéJ?hale
bronze étrusque (fm du VIème siècle ?) Conservé au Musée des Beaux Arts à Lyon (L.I)
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représentations ne figure qu'une paire de jambes; le monstre ailé Il'est triple que depuis la ceinture. Triplicité variable, donc, et qui nous ramène au tricéphale étrusque, à Cérun, qui, sur une paroi de la Tomba dell'Orco à Tarquinia, est représenté dans le monde infernal, avec cuirasse, lance et bouclier rond, face à Hadès (Eita) et Perséphone (Phersipnai) (594), ou encore à ce petit bronze archaïque du musée de Lyon (Fig. 40) figurant un guerrier, casqué et cuirassé, dont la triplicité est donnée par l'adjonction, sur les épaules, de deux têtes de part et d'autre d'une tête centrale, d'ailleurs mieux proportionnée au reste du corps (595). Figure triple dont nous avons déjà signalé l'omniprésence dans le monde italique, qu'il s'agisse des exemples étrusques mis au jour par les archéologues (596), des stèles. dauniennes (597), ou des monstres ou héros triples attestés dans les cultes (le Géryon d'Abano Terme) ou la légende (le Cacus tricéphale de Properce pour ne citer que lui) (598). Au delà de leur diversité, Anne Marie Adam, qui, à propos de deux figurines de bronze étrusques, s'est penchée sur ces tricéphales de l'Italie primitive (599) leur reconnaît un certain nombre de points communs: leur rapport avec l'eau, l'eau des marécages ou celle qui jaillit des entrailles de la terre et c'est, dit-elle "ce caractère primordial, cette origine catachtonienne qui semblent expliquer tout le reste, en particulier les fonctions d'Urkonig d'un territoire, les pouvoirs oraculaires et les relations avec le monde souterrain, la mort, peut-être aussi l'immortalité" (600). Mais, si elle reconnaît que cette "divinité" pré-romaine a pu se confondre avec le Géryon des Grecs, elle oppose précisément la triplicité étrusque (un monstre unique à triple tête) à celle du Géryon grec qui possède, quant à lui, trois corps distincts. Faut-il tellement insister sur cette opposition? La triplicité, paraît surtout avoir été traitée en Grèce avec plus de fantaisie (601), trois corps réunis seulement au niveau des hanches d'une manière qu'adroitement dissimulent les boucliers ronds? trois torses seulement? des ailes parfois 1... trois têtes toujours et c'est bien la seule constante dans cette anatomie du monstre: c'est tout ce qu'en avait dit Hésiode, d'ailleurs: le monstre comme celui des Etrusques ! - était et est resté un tricéphale. Au delà des variantes, c'est bien le triple visage de la mort qu'il a été
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donné à Héraclès de contempler et de détruire... Ce qu'enseignent les représentations qu'en ont données les imagiers de la Grèce est d'une autre importance: rarement représenté seul, Géryon n'existe plus guère que par la lutte contre Héraclès, une lutte dans laquelle il doit être vaincu. Dans toutes les scènes représentant le combat, à ma connaissance, le héros occupe la gauche de l'image, "soutenu" parfois par Athéna; Géryon tient, quant à lui, la droite de la représentation, tourné tout entier (qu'il s'agisse de son - de ses - corps, ou de ses armes), vers le héros. Or depuis que l'image est considérée comme un objet d'étude à part entière, on a réfléchi sur le mode de perception qu'on en a, sur l'itinéraire du regard... un itinéraire constant semble-t-il, "peut-être consécutif à une éducation dont la lecture de l'écriture serait en partie la cause" (602). L'oeil, s'il embrasse d'un seul coup le champ de l'image, s'attarde, et passe plus de temps à regarder la moitié gauche, le reste de la perception se fait ensuite dans le sens des aiguilles d'une montre. L'information, bien sûr, est d'autant plus percutante que "la structure de l'espace imagé correspondra avec l'angle et la position d'attaque spécifiques au regard du spectateur". Reprenons une dernière fois l'amphore chalcidienne de Caere (fig. 39) : c'est bien Héraclès qui attire le regard (Héraclès et Athéna qui, un peu en retrait, le double et l'assiste à la fois)... A droite le monstre s'effondre dans un splendide mouvement circulaire... Héraclès a vaincu la mort.
Fig. 41: Héraclès au Jardin des Hespérides ,
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d'après O. BENNDORF, Griechische und siki/ische Vasenbi/der, Berlin, 1869-1893, planche XXXXII, 1; cf. F. BROMMER, Hera/des und die Hesperiden aufVasenbi/dern, loc.cit., 1 a.
539 II.
LES POMMES D'OR GAGE D'IMMORTALITÉ
"... La scène voisine figure les fruits d'or des Hespérides qui brillent sur l'arbre inviolé. Enroulé autour du tronc, le terrible dragon vient d'etre terrassé et les Nymphes apeurées fuient en tout sens devant le fils hardi du grand Zeus..."
Quintus de Smyrne, VI, 256-259.
Sur le dessin que donne Otto Benndorf du décor d'un lécythe de la collection Navarra à Terranova (603), un homme, tenant à bout de bras un petit panier rond, ramasse une pomme tombée au pied d'un arbre couvert de feuilles et de fruits. La peau de lion dont il est vêtu, l'arc et le carquois qui ornent son dos, l'épée qu'il porte au côté et la massue déposée à terre ne laissent aucun doute sur son identité. Au reste, quelques "détails" suffisent à camper le décor: un énorme serpent s'enroule autour de l'arbre, et sur la gauche de la représentation, Hermès s'apprête à quitter la scène avec un geste un peu désinvolte de la main. A droite, un jeune hoplite dont le visage a disparu - probablement Iolaos - porte cuirasse, cnémides, épée au côté et deux lances. Courbé comme un quelconque paysan ramassant sa récolte et, de surcroît, l'air plus benêt que valeureux (604), nous avons bien là, cependant, Héraclès cueillant les pommes d'or des Hespérides et la présence d'Hermès ne permet pas de douter de l'enjeu d'un exploit qui, le dernier pour Diodore de Sicile, donne directement au héros l'accès à l'immortalité (605). Contrairement à la lutte contre Géryon, très tôt attestée dans la littérature et dans l'art, la quête des pommes d'or paraît entrée assez tardivement dans la légende d'Héraclès. fi faut attendre le cinquième siècle pour qu'avec les Tragiques (Sophocle et Euripide) d'une part, avec Panyasis et Phérécyde d'autre part, les textes mentionnent cet exploit. Même décalage dans les représentations céramiques, d'une façon générale nettement moins nombreuses -23 contre 60 pour Géryon compte F.
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Brommer (606) - elles n'apparaissent guère avant le dernier quart du VIème siècle et dans la production attique seulement : 5 vases à figures noires contre 47 pour Géryon (et. pour ce dernier. s'ajoutent 5 représentations extérieures à l'Attique. des Vllème et VIème siècles); elles connaissent en revanche un succès plus durable: 10 représentations attiques à figures rouges pour les VIème et Vème siècles (contre 8 pour Géryon) et. surtout. 8 encore au IVème siècle. alors que le combat contre le monstre triple n'est plus représenté (607). L'impression dominante est celle d'un succès surtout athénien et relativement tardif. mais peut-être faut-il corriger cette approche: Pausanias. en effet. a vu l'exploit représenté sur le coffre de Cypselos et s'il est possible que la légende de ce dernier soit tardive. l'objet lui-même semble bien être un ouvrage corinthien archaïque que H. Stuart Jones date des premières années du VIèl1)e siècle. Peut-être faut-il. pour conforter ce témoignage quelque peu hypothétique. évoquer la présentation d'une céramique béotienne inédite. exposée à Bonn à l'occasion du 5ème congrès d'Archéologie classique: Nérée y figurerait, montrant à Héraclès le chemin des Hespérides... Datée des années 600-590 (608). elle permettrait alors de "remonter" au début du VIème siècle les premiers témoignages de la légende dans l'iconographie, de cerner de plus près son introduction dans le cycle d'Héraclès et d'évoquer les auteurs des Héracléia archaïques, Pisandre de Rhodes, par exemple, à qui l'on attribue des "inventions" concernant la légende du fils d'Alcmène, ou bien plutôt Stésichore d'Himère, dont la Géryonide, dit-on parfois, était une véritable geste d'Héraclès (609) et qui avait plus de raisons peut-être d'enrichir le voyage vers l'Ouest du héros et d'ajouter à ses exploits la conquête des pommes d'or.
1·1 Les pommes que doit ainsi cueillir Héraclès sont, nous apprend Apollodore. un présent de Terre à Zeus pour son mariage avec Héra (et non pas. comme le dit de façon erronée - et bien étrange - la traduction française de E. Clavier, un présent d'Héra à Zeus) (610). On sait. par le scholiaste à Apollonios de Rhodes (611). qu'Apollodore avait, sur ce point, emprunté son récit à Phérécyde, lequel rapportait dans son dixième livre (le second qu'il consacrait au mariage d'Héra) comment la terre. en l'honneur du mariage de Zeus et d'Héra,
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avait donné ces pommes à la déesse ou plutôt, avait fait pousser pour elle les pommiers aux fruits d'or (612). Eratosthène rend compte de façon un peu différente du récit du .mythographe : lorsque Zeus épousa Héra, dit-il, les dieux apportèrent des cadeaux à la jeune mariée ; Terre, en particulier, offrit des pommes d'or qu'Héra admira tant qu'elle ordonna qu'on les plantât dans le jardin des dieux, près du Mont Atlas. Mais, les filles d'Atlas ayant la désagréable habitude de dérober ces fruits, Héra mit, pour les garder, un énorme serpent (613). Ce serpent, "dragon immortel et à cent têtes" selon Apollodore, était fils d'Echidna et de Typhon et "parlait avec toutes sortes de voix bigarrées" : lp(I)vaiç navTola\ç xal no\x{).a\ç (614) ; c'est Phérécyde que suit ici Apollodore (615); Panyasis, pour sa part, paraît surtout avoir insisté sur la vigilance absolue d'un gardien capable de ne jamais fermer les yeux. (616) Quant à la généalogie du monstre - indifféremment, le même texte d'Apollodore le prouve, nommé dragon (Bpâxv) ou serpent (&P\ç) - Hésiode en faisait le dernier-né de Phorcys et de Cétô (617), mais, pour le scholiaste d'Apollonios, il lui aurait donné Typhon pour père. Il faut reconnaître que, dans la Théogonie, la naissance du monstre est notée après l'énumération des enfants d'Echidna et que l'hésitation - ou la confusion - est possible. C'est ainsi, peut-être, à une tradition hésiodique que se réfère Apollodore, alors que Phérécyde, quant à lui, éloignant le mythe de ses sombres origines, donnait Zeus et Thémis comme géniteurs du gardien des pommes d'or. Autre tradition, suivie par Apollonios dans les Argonautiques, et qui pourrait correspondre à la localisation du monstre par Hésiode (618), le serpent est dit X96v\oÇ et le scholiaste explique que, comme le disait déjà Pisandre de Camiros, il était né de la terre (619). Apollodore ne nomme pas le monstre, Diodore le mentionne à peine, et Apollonios est le seul à avoir conservé son nom: Ladon... un nom qui, pour C. Robert, est d'origine arcadienne (620), à moins qu'il ne manifeste tout simplement la volonté d'Apollonios de s'adapter au milieu local: le fleuve d'Euhespérides est en effet le Lathon ou Lethon... (621). Nous ne reviendrons pas sur la signification du monstre dans le cadre de la Théogonie d'Hésiode (622) ; il faut dire, en revanche, qu'à cette époque, s'il est donné déjà comme gardien des pommes d'or, il n'est - pas plus que ces dernières - mis en
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rapport avec Héraclès; plusieurs versions d'ailleurs subsisteront toujours de cette quête t qui prouvent que le thème du jardin merveilleux fut plus tard rattaché au cycle du héros. "Les sentiments des mythographes sont partagés au sujet de ces pommes"t écrit Diodore "les uns disent qu'il y avait des po~es d'or dans quelque jardin t des Hespérides en Libye et qu'elles étaient continuellement gardées par un redoutable dragon..." (623) et Apollodore t de même t après avoir rapporté comment Prométhée conseilla à Héraclès de demander plutôt les fruits à Adast ajoute rapidement.." : d'autres disent... qu'il les cueillit lui-même dans le jardin des Hespérides t après avoir tué le serpent qui les gardait". - meurtre du dragon t gardien des pommes. - aide d'Adast qui va lui-même quérir les fruits merveilleux pendant qu'Héraclès soutient à sa place la voûte céleste. - il existe- une troisième version - plus tardive et n'apparaissant que sur les représentations figurées (624) - selon laquelle Héraclès obtient des Hespérides elles-mêmes qu'elles cueillent pour lui les pommes d'or. On a tendance à penser que t de ces variantes t le meurtre du dragon est premiert ne serait-ce que parce que celui-ci existe chez Hésiode t mais l'argument est d'autant moins irréfutable que t dans la Théogonie t le serpent estt justementt bien vivant t et Atlas estt presque autant que luit lié au jardin des Hespérides (625). D'autre partt Panyasis et Phérécyde donnent t à peu près à la même époque t la première et la seconde versions (626) et si les vases paraissent accorder quelque antériorité au meurtre du dragon t c'est cependant l'épisode d'Atlas que Pausanias a vu représenté sur le coffre de Cypsélos. (627). De même t si Euripide paraît choisir la violence lorsqu'il chante Héraclès donnant la mort "au serpent au dos fauve" qui défendait l'approche de "l'arbre aux rameaux d'or où pendaient les pommes que sa main devait cueillir" (628)t il n'en renonce pas t pour autant t à l'image d'Héraclès appuyant "ses bras levés contre le milieu de la voûte céleste" et parvenant à "soutenir les palais étoilés des dieux" (629). L'épisode est d'ailleurs curieusement dissocié (il faudra l'expliquer !) de la quête des pommes d'or dont il est séparé par la descente d'Héraclès "dans les profondeurs salées" (630). Le meurtre du dragon t en tout caSt ne sera jamais oublié.
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Si, dans le dernier quart du Vème siècle, le peintre du vase de Meidias représente Héraclès au repos recevant des mains mêmes de leurs gardiennes les fruits d'immortalité, une amphore à relief de la collection Sabouroff, à la même époque (631), le montre cueillant lui-même les pommes, tout en se défendant, de sa massue, contre le serpent enroulé autour du tronc. Et c'est Apollonios de Rhodes qui, dans les Argonautiques, donne du combat la vision la plus terrible; les Argonautes, en effet, arrivent sur les lieux du drame après la défaite du dragon et trouvent les Hespérides éplorées auprès de son cadavre : "maintenant, terrassé par Héraclès, il était étendu contre le tronc du pommier; seul le bout de sa queue remuait encore; mais, depuis la tête jusqu'à l'extrémité de sa noire échine, il gisait sans vie, et comme les flèches avaient imprégné son sang de l'amer venin de l'hydre de Lerne, les mouches se desséchaient sur ses plaies putrides" (632). fi est curieux de remarquer que les Hespérides qui, au début de la légende, chez Phérécyde, apparaissent comme prédatrices (633), qui, plus tard - et très généralement - sont considérées comme les gardiennes des pommes d'or, font, dans les Argonautiques, presque fonction de desservantes (noinvuov) d'un culte et c'est sur son sol sacré (h:pàv né6ov) "qu'elles officient en d'aimables psalmodies" (634). Fonction, précisons-le, sans rapport avec la mort du dragon, puisque le poète évoque là la sérénité du lieu, à la veille du drame. Mais peut-être n'est-ce là qu'un simple développement des qualités de chanteuses que (comme les sirènes peut-être) elles possèdent déjà chez Hésiode (635) ? Ces "Nymphes Hespérides", qui, pour l'auteur de la Théogonie, étaient filles de Nuit (636), portent, dans les Argonautiques, les noms d'Hesperé, Erytheis, Aiglé (637), des noms qui pourraient être, déjà, ceux que leur donnait Hésiode, comme en témoigne peut-être un fragment conservé de son oeuvre à l'authenticité douteuse il est vrai (638). Apollodore, qui en compte quatre, les nomme Aiglé, Erytheia, Hesperia, Arethousa (639)... l'éclatante, la rouge, la vespérale, telles peuvent bien être les filles de Nuit; la fantaisie des poètes et plus encore celle des sculpteurs et des peintres de vases eut tôt fait d'ajouter une (ici Aréthuse) ou plusieurs nymphes à cette liste ;
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Fig. 42 : Héraclès au Jardin des Hespérides sur l'Hydrie du peintre de Meidias (British Museum, E 224)
Ci-dessus, dessin de G. GERHARD, Notice sur le vase de Midias au musée britannique, avec deux planches tirées des Mémoires de l'Académie royale des Sciences de Berlin, Berlin, 1840. Cf. CVA, British Museum, fasc. 6, III, le, pl. 91 (366)
545 Pausanias, visitant Olympie, vit ainsi cinq Hespérides dans le groupe de bronze que Théoclès, le Lacédémonien, avait sculpté pour le temple d'Héra (640) et sur certains vases on peut en dénombrer sept ou même onze! (641). Les noms varient eux aussi : sur le vase de Meidias, les Hespérides rassemblées autour du pommier sacré et de son gardien s'appellent Astéropé, Chrysothémis et Lipara (642)... Apollodore ainsi n'était pas le premier à joindre aux Hespérides quelque Nymphe locale (mais occidentale !) et si les nymphes d'Apollonios font lever l'herbe, croître de jeunes arbustes verdoyants et se transforment elles-mêmes en un peuplier, un orme et un saule, se donnant ainsi comme déesses de la végétation (643), celles du peintre Meidias pourraient être, déjà, garantes de l'abondance (644). Peut-être évoquent-elles encore une généalogie oubliée, celle de Phérécyde pour qui les Hespérides étaient filles de Zeus et de Thémis (645). En tout cas, elles témoignent d'une nette évolution dans la conception du mythe: cueillant elles-mêmes les pommes, de gardiennes qu'elles étaient, elles sont devenues complices et, alors que Iolaos s'apprête à quitter la scène, elles remettent, avec des grâces équivoques, les fruits d'or au héros, jeune éphèbe au repos, appuyé sur sa massue et assis sur la peau du lion, dissimulant ainsi ce que cette dernière pouvait encore conserver de terrible.
2-2 Sur cette image, Héraclès est manifestement parvenu au terme de ses épreuves; il est arrivé au jardin où poussent les fruits d'immortalité... Ce jardin, que nous disons des Hespérides, est en réalité, les sources nous l'ont prouvé, un jardin des dieux, fortement lié à l'hiérogamie de Zeus et d'Héra et ces pommes - objet de la quête d'Héraclès - appartiennent aux Immortels. Elles leur seront rendues d'ailleurs, et Athéna les reportera dans le jardin, "car il n'était pas permis qu'elles fussent placées ailleurs", commente Apollodore (646). Ce thème des pommes d'or, du jardin des dieux où pousse - gardé par des Nymphes et un serpent - l'arbre de vie, est, en lui-même (c'est-à-dire indépendamment de la légende d'Héraclès), un thème ancien; un thème très largement répandu aussi. Il suffit, pour s'en convaincre, de parcourir un répertoire des motifs de la littérature folklorique (647). Nous n'avons pas
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l'intention de multiplier, ici, les comparaisons. Quelques exemples suffiront à éclairer la nature d'un exploit rattaché après coup au cycle d'Héraclès, sans aucun doute bien après la lutte pour les troupeaux de Géryon, en dérivant même a-t-on pu dire, s'appuyant sur le jeu de mots autour de mè/a : des troupeaux, on serait passé aux pommes d'or, créant ainsi un nouvel épisode de la geste du héros. En fait, si le jeu de mot a joué un rôle - d'autres facteurs, nous le verrons, ont eu sans doute plus d'importance - ce ne peut être dans la création, mais bien plutôt dans la captation, au profit du fils d'Alcmène, d'une vieille histoire qui, fort longtemps, n'eut rien à faire avec lui. Cette histoire, les pays scandinaves la connaissent, exposée dans les "Eddas" (648) : C'est celle d'Idhunn, gardienne des pommes, déesse de l'immortalité, qui conserve dans son coffre les fruits que les dieux doivent goûter, lorsqu'ils deviennent vieux pour retrouver leur jeunesse... des pommes d'or, "élixir des Ases", gages de leur jeunesse éternelle. C'est celle du pommier, arbre de ces contrées mystérieuses, où, pour les Celtes, tristesse et mort sont inconnues. Là se rendra Bran guidé par Manannan, le soleil ; là aussi s'en ira Cormac Mac Art, ce roi d'Irlande du IIIème siècle, pour posséder le rameau auquel neuf pommes d'or étaient suspendues... là-bas, dans l'île "au delà des eaux" où la musique attire, où poussent des arbres fruitiers surnaturels; là-bas, vers le soleil couchant, dit Manannan à Bran qui ne sait où trouver ce paradis (649). Cette histoire, en effet est celle du paradis... Le paradis des Iraniens, où pousse le Gaokerena, "l'arbre de toutes les semences" qui rend immortel (650); celui des Chinois, où, dans les montagnes Kwenlun, l'immortelle Reine de l'Ouest possède un pêcher dont le fruit assure d'une longue vie celui qui le détient; celui des Japonais (Horaisan ) où se trouve la montagne de l'immortalité, où pousse un arbre merveilleux avec des racines d'argent, un tronc d'or et des fruits de pierres précieuses (651) ; celui de la Genèse encore, celui de Gilgamesh enfin, qui enferme, lui aussi, un arbre merveilleux : les fruits qu'il porte sont tout rubis, Ses branches courent, suspendues et sont belles à voir; Son feuillage bleu est de lapis-lazuli n porte des fruits et la vue en est admirable (652).
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Nous n'irons pas au-delà de ce rapide survol. n nous paraît suffisant pour qu'on ne puisse, comme le fait J.O. de G. Hanson, affmner que l'idée de l'arbre de vie est hébra'ique et non grecque (653) et, s'il est vrai qu'en Grèce l'accent est mis sur les fruits d'or plus que sur l'arbre lui-même, s'il est vrai que les pommes sont parfois en rapport avec d'autres déesses, avec Aphrodite, par exemple (Apollonios, d'ailleurs, parle des "pommes en or massif des déesses") (654), s'il est vrai que - présents ou gages de mariage - elles ont à voir avec l'amour et avec la beauté, les pommes d'or, don de Gaia, la génitrice universelle, ne peuvent être confinées dans cette seule signification. C'est pour le moins méconnaître le sens de l'hiérogamie et la forte polysémie de ces unions primitives gages d'une merveilleuse fécondité - qui ne disparaîtront jamais tout à fait de l'horizon de la religion grecque (655). C'est méconnaître, de surcroît, le fonctionnement de la pensée mythique que d'affirmer que, dans la légende d'Héraclès, la conquête de l'immortalité ne peut être traduite qu'une fois: par le passage victorieux dans l'Hadès (656); c'est prendre enfin l'effort tardif de rationalisation des mythographes pour vérité première que d'estimer, avec eux, que cette immortalité, le héros la doit surtout aux services rendus à l'humanité. (657) Toutes ces convergences - et c'est la raison profonde de notre brève incursion dans le domaine du comparatisme tout autant que du symbolisme - permettent de se poser d'autres questions. Faut-il vraiment s'évertuer à reconnaître ces fruits d'or? Juba II pensait y retrouver les citrons de son royaume (658) ; d'autres songent aux perles d'ambre, que roulaient les flots de l'Eridan (659) ; d'autres encore évoquent le "fabuleux métal", objet de convoitise et de ce commerce avec l'Afrique profonde qui, selon Jérôme Carcopino, explique, en définitive, la localisation du jardin des Hespérides sur la côte maurétanienne (660). C'est bien d'or qu'il s'agit en effet et de la séduction qu'il exerce, de la place qu'il tient dans l'imaginaire de peuples aussi divers que les Celtes, les Grecs... ou les Japonais. Dans toutes les mythologies, dans tous les folklores, une constante: l'or apparaît, avant tout, comme un attribut divin, et, si les Grecs disent volontiers Apollon à la chevelure d'or, ou même Aphrodite d'or, les Egyptiens sont plus explicites, pour qui l'or est "la chair
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des dieux" (661). Les hymnes védiques donnent, quant à eux, des éléments d'explication: (662). "l'or qui, né du feu, immortel, se maintient au dessus des Mortels";.. "l'or, de la bienheureuse couleur du soleil..." "l'or, sans doute une forme de la divinité... l'or: vie immortelle" "l'or, en vérité, c'est le feu, la lumière et l'immortalité"... "L'or c'est l'immortalité", répètent les Brahmanas, ces textes rituels post-védiques composés à partir du VIIlème siècle avant notre ère et, beaucoup plus tard, les alchimistes tiennent encore le même raisonnement, qui cherchent à obtenir la transmutation des métaux en or pour, eux aussi, vaincre la mort. Qu'il existe en Grèce une relation entre l'éclat de l'or, celui du feu et celui du soleil, le texte de la Premi~re Olympique le prouve, de même que la place - souvent observée - que tient l'or dans l'oeuvre de Pindare (663)... Que l'or soit le symbole même de la divinité et de l'immortalité, le mythe des races tel que l'exprime Hésiode suffit à le prouver (664)... métal divin, métal de la souveraineté aussi. La réalité n'est pas effacée pour autant, pas plus que chez Pindare, qui, dans un fragment d'origine incertaine, laisse à la fois entendre que la "valeur mystique" de l'or tient à son caractère incorruptible (donc immortel) et, dans le même temps, l'installe comme le plus précieux, le plus puissant de tous les biens que puisse posséder l'homme: "L'or est un fils de Zeus,. ni rouille ni vers ne le ronge, et il dompte l'esprit des hommes: c'est de tous les biens le plus puissant" (665). Aussi, au-delà du caractère abrupt de certaines affirmations d'Alain Bresson et d'une excessive insistance sur le rôle de la monnaie, son souci est légitime qui demande qu'on ne voie pas, dans cette valeur mystique de l'or, la seule expression de structures fondamentales de la psychologie humaine, qu'on veuille bien ne pas faire abstraction des données économiques et sociales, car ce sont elles qui font de l'or un "bien séparé", qui, comme tel, peut être considéré comme un attribut de la divinité" (666). Louis Gernet, déjà, remarquait que les objets précieux figurent dans les légendes et même qu'ils y tiennent souvent un
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rôle central (il remarquait aussi que ce n'était pas là "une spécialité de Grèce") (667). Des exemples qu'il étudie se dégage l'idée que la représentation de l'au-delà se concrétise, justement, comme lieu d'origine de l'aga/ma: "comme tant d'objets mythiques dont la représentation côtoie la leur, mais avec une espèce de prédilection, les objets de prix, symboles coutumiers de richesse, sont en relation nécessaire avec cet autre monde que postule la pensée religieuse: tour à tour ils y descendent et ils en proviennent" (668). Quant à l'origine de cette notion mythique de la valeur, elle dérive pour Louis Gernet des thèmes de la royauté magique et cela ne fait pour nous aucun doute. Alain Bresson n'en croit rien, pour qui "la valeur religieuse de l'or à l'époque d'Homère et d'Hésiode, et à plus forte raison à l'époque archaïque et classique n'est pas un héritage des royautés mythiques du passé" (669). fi est dommage que, trop soucieux sans doute de prouver le rôle de la monnaie, il l'ait voulu aussi mécanique et immédiat, qu'il n'ait pas vu à quel point la théorie de l'or comme "bien séparé" se renforçait d'être replacée à l'époque où l'idée du trésor royal, dépôt des richesses les plus rares, s'articulait "sur celle des sacra protecteurs et efficaces que garde, en un réduit sûr, un roi de légende, un dieu souverain" (670), dommage qu'il n'ait pas vu que, dans cette optique, la monnaie, parce qu'elle tendait à imposer, en quelque sorte, la valeur économique de l'or et à en donner une représentation plus objective, s'accompagnerait dans la mémoire sociale d'une autonomie accrue de la matière mythique... rôle décisif dans l'évolution dialectique du vécu humain et de l'imaginaire. Le fragment de Pindare que nous citions tout à l'heure nous paraît, en ce sens, un témoignage d'une importance capitale. Encore un mot: parmi les exemples servant à la démonstration de Louis Gernet, la légende de la toison d'or, synthèse dit-il des deux éléments les plus significatifs de la richesse, la richesse en troupeaux, la richesse en métaux précieux. Or, dans les deux exploits d'Héraclès qui nous occupent: le rapt des troupeaux de Géryon et la quête des pommes d'or, ce sont les mêmes symboles qui apparaissent, dissociés (et même chronologiquement séparés), pourtant finalement solidaires et complémentaires... encore une raison qui,
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pensons-nous - beaucoup plus sérieusement que le possible jeu de mot sur mtla - pourrait, aidée certes par quelques particularités du culte béotien d'Héraclès (671), expliquer la captation au profit du héros de ce nouvel exploit, la conquête qu'il dut entreprendre des pommes d'or, dans le jardin où chantaient les filles de nuit, jardin situé justement, comme les pâturages de Géryon, au-delà d'Océan.
2-3 Au-delà d'Océan, mais encore? Contrairement au mythe de Géryon très tôt imaginé, nous espérons en avoir convaincu le lecteur, à l'Extrême-Ouest, le Jardin des Hespérides, même à une époque tardive, connaissait encore plusieurs localisations. Si Pline, nous l'avons vu (672), cherche "la fameuse forêt" d'arbres aux fruits d'or" dans les environs de Lixos (673), le souvenir d'une localisation cyrénaïque n'en reste pas moins vivant (674), un souvenir qu'avait contribué à fixer le périple du Pseudo-Scylax (675) et, après lui, Apollonios et Ptolémée (676). La légende d'Héraclès est, il faut le dire, bien implantée dans la région de la Syrte : les dunes des Nasamons que les Argonautes doivent traverser portent le nom d"HpaxÀ&\o\ 9ïvE" (677); à Irasa on situe parfois la lutte d'Héraclès et d'Antée (678) ; le gardien des pommes d'or, nous l'avons déjà dit, se nomme Ladon chez Apollonios, rappel évident du Lathon (ou Lethon), le fleuve d'Euhespérides (679)... C'est près de là, enfin, que Jason et ses compagnons rencontrent les nymphes Hespérides après le passage du héros. Quant à ce fameux jardin "creux" du Pseudo-Scylax, profondément encaissé (18 orgyes correspondent à une trentaine de mètres), assez vaste (2 stades, soit plus de 350 mètres) et "couvert de l'ombre des arbres entrelacés, aussi serrés qu'il est possible", arbres parmi lesquels des "pommiers de toutes sortes", mais aussi des lôtos, des grenadiers, des arbousiers, des mûriers etc... (680), il paraît plus proche de Cyrène que d'Euhespérides et Sandro Stucchi propose de le reconnaître dans une vaste doline dont les dimensions, dit-il, correspondent plus ou moins aux mesures de l'auteur ancien. Située à petite distance de la mer, elle est à quatre kilomètres environ de Phykous, dont on voyait encore les ruines au XVIllème siècle (681)... localisation, on le
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constatera, plus nordique que celle que donne Pline: près de Béréniké, autrefois Euhespérides, dans la région de Benghazi, donc, là où précisément serait attesté le mythe des Argonautes (682). François Chamoux, que ce décalage ne péoccupe guère, estime que, bien que les textes ne l'attestent de façon formelle qu'à partir du IVème siècle, c'est dès leur installation en Libye que les colons grecs auraient situé le jardin des Hespérides "près de la ville qui devait lui emprunter son nom" ; en effet "le nom même d'Euhespérides, qui apparaît avant la fm du VIème siècle, prouve que la légende avait été localisée là dès l'époque archaïque" et il en donne, pour autre preuve, une monnaie de Cyrène, datant de 500 avant notre ère environ et représentant Héraclès et une Hespéride encadrant "l'arbre magique" (683). La découverte, dans les années 1971-1972, des fresques de la "maison occidentale" ou "maison de l'amiral" fouillée par Spyridon Marinatos à Akrotiri dans l'île de Théra (684) a renouvelé considérablement les données de l'histoire du monde égéen et, par là-même, suscité un vigoureux débat dont certaines implications nous intéressent au plus haut point (685). Les scènes représentées pourraient, en effet, trouver leur unité comme description d'un voyage ou d'une expédition: paysages "nilotiques" (la flore et la faune ont pu faire penser à l'Afrique), villes plus ou moins exotiques et scènes navales... scènes historiques pour leur "inventeur" qui voit en elles le témoignage de rapports effectifs entretenus par les Théréens de l'époque (vers 1500 avant notre ère) avec la Libye (686). C'est aussi cette hypothèse que développe S. Stucchi, qui, pour sa part, établit un rapport entre la double tradition littéraire localisant en Cyrénaïque le jardin des Hespérides, quelques rares vestiges archéologiques du second millénaire trouvés à Cyrène, et ce qu'il pense être la preuve de la présence des Grecs de l'âge minoen sur la côte africaine la plus proche de leur pays : - le jardin à l'Ouest de Phykous marquerait alors la première étape de l'exploration de ce nouveau monde - celui de Béréniké témoignerait de la reprise des contacts et de la progression le long de la côte. - la localisation à Lixos, enfin, serait l'ultime étape, proprement coloniale, n'intervenant que lorsque toute la Méditerranée finirait par être acquise à la connaissance des
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Grecs. Inutile de souligner ce que pareille reconstitution peut avoir d'arbitraire; l'interprétation "historique" des fresques a déjà été vivement contestée : on lui oppose le caractère purement typique de peintures dans lesquelles on se refuse à voir la trace d'événements singuliers; la connotation libyenne a, elle-même, été fort discutée: ces scènes seraient égéennes, crétoises et leur intérêt "historique" consisterait, précisément à raconter, sur le mode symbolique, les conditions de l'existence dans le monde égéen du début du XVème siècle (687) ; enfin le caractère guerrier de l'expédition a, lui aussi, été mis en question : il s'agirait bien plutôt soit d'une visite pacifique, soit d'une sorte de parade navale, probablement en rapport avec une fête religieuse, célébration par exemple du retour de la saison des navigations (688). De plus l'intérêt majeur de ces fresques paraît bien être - outre l'éclairage qu'elles portent sur la très particulière histoire de Théra - la possibilité de rapprochements, cette fois incontestables et très étroits, qu'elles pennettent avec la civilisation mycénienne et, plus précisément, avec celle de Mycènes même: éléments décoratifs retrouvés presque identiques dans des tombes de Mycènes et de Prosymna (près d'Argos !), frappantes analogies iconographiques... (689). On l'aura deviné, il pourraît être tentant de retrouver à Théra, le jalon d'une "migration vers la Libye d'un mythe des Hespérides qui serait ainsi attesté dès le quinzième siècle" (690) ! tentant sans doute, mais bien peu raisonnable. L'interprétation libyenne, si "elle ne peut être tout à fait exclue" (691), n'est pas suffisamment fondée d'une part; d'autre part les liens ainsi attestés avec la région de Mycènes et d'Argos ne seraient véritablement probants que si, dès cette haute époque, le mythe des Hespérides était en rapport avec Héraclès, ce qui, on le sait bien, n'est pas le cas. Quant aux reconstitutions aussi précises qu'aventureuses de Sandro Stucchi elles sont plus douteuses encore et nous ne pouvons y voir la moindre preuve d'une antériorité de la localisation libyenne: localisation "coloniale" sans aucun doute - et en ce sens François Chamoux avait raison -, localisation secondaire, semblable, à cet effet, à la tentative corinthienne pour situer en Epire les prairies de Géryon, elle date - et sa précision relative, elle-même en fait foi - du moment où déjà Héraclès était mis en rapport avec le mythe, où
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déjà il était devenu l'archégète des colons grecs. Les Hespérides, filles de Nuit, sont à chercher ailleurs, dans l'une de ces eschatiai où finit le monde connu des hommes, l'une de ces terres "au delà desquelles sont les ténèbres" (692), comme le dit Pindare de Gadès, l'un de ces pays, dont "nul saurait trouver la voie merveilleuse" comme il le répète, mais à propos, cette fois-ci, du pays des Hyperboréens (693). Et là est bien le problème: Apollodore le sait, pour qui les Hespérides vivent chez Atlas, dans le pays des Hyperboréens, et non, comme le disent certains, en Libye (694), et si le voyage d'Héraclès est si difficile à suivre dans la Bibliothèque, c'est peut-être parce que son auteur - à moins qu'il ne s'agisse de son inspirateur direct : Phérécyde - a tenté de concilier les itinéraires de versions différentes. Pour aller chez les Hyperboréens Héraclès, en effet, se dirige vers le Nord (le combat contre Cycnos se déroule près de la rivière Echédoros en Macédoine), il traverse ensuite l'lllyrie et interroge les Nymphes de l'Eridan, qui lui indiquent la demeure de Nérée, le Vieillard des Mers. Renseigné sur le lieu où il pourra trouver les pommes d'or, il prend alors le chemin de la Libye mais en sens inverse (Libye / Egypte / Arabie). Enfin, après avoir à nouveau emprunté la coupe du Soleil pour passer la "mer extérieure" (695), il traverse le Caucase (où il délivre Prométhée). C'est alors une autre localisation des Hyperboréens qu'il retrouve, si l'on s'en tient au texte d'Apollodore, la localisation historique: celle qui identifie Hyperboréens et Scythes. Itinéraire libyen? itinéraires hyperboréens (au pluriel) '1 Ce texte d'Apollodore ne se comprend guère, en définitive, qu'en référence avec celui de Phérécyde (696) ; aussi prendrons-nous le risque de nous répéter en refaisant, avec le logographe athénien du Vème siècle, le voyage d'Héraclès: celui-ci apprend donc des Nymphes (filles de Zeus et de Thémis) (697) qui habitent une grotte près de l'Eridari, où il peut trouver Nérée. Le Vieillard des mers lui enseigne le chemin de Tartessos et - ce qui paraît plus satisfaisant pour notre sens de la géographie - c'est de là qu'il gagne la Libye (où il tue Antée), puis l'Egypte (où il tue Busiris) et l'Arabie (où il tue Emathion) (698). TI remonte alors le Nil, et s'enfonce dans les profondeurs de l'Afrique (qu'il nettoie de ses fauves !). Et c'est depuis ce lointain Sud qu'il regagne l'Océan et s'embarque sur la coupe du Soleil... Il vogue jusqu'au Caucase,
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où Prométhée lui indique qu'il doit rejoindre Atlas, dans le Nord lointain (un Nord alors situé par rapport au Caucase, c'est-à-dire assez nettement au Nord Est). M.L. West décompose cet itinéraire dans lequel il voit "a preposterous concatenation of events " (699). Il serait le résultat d'une compilation de Phérécyde lui-même: à l'origine un voyage vers l'Ouest (Tartessos) qui apparaît comme le tenne d'un chemin sur lequel Héraclès a été guidé par Nérée, puis un voyage vers le Sud, qui permet les aventures africaines et mène Héraclès vers les mers extérieures (700) ; enfin un voyage vers le Nord, qui place le Caucase et Prométhée sur le chemin d'une contrée où règne Atlas. Or, Panyasis a pu connaître (et pour M.L. West, inventer) cette situation méridionale. D'une part, il mentionne le meurtre de Busiris, (701), d'autre part, il semble avoir fait vivre, dans les régions inconnues du Sud, les nymphes Hespérides: Aviénus, en effet se réfère à Panyasis pour situer le jardin aux pommes d'or:
... "Qua cedunt medii longe secreta diei Hesperidum venisse locos adque aurea mala, fragment d'interprétation fort difficile en vérité et dans lequel W.I. Matthews voit, au contraire, la preuve d'une localisation hyperboréenne! (702). C'est Phérécyde qui aurait intégré l'épisode de la délivrance de Prométhée dans ce contexte, et déplacé ainsi vers le Nord (ou plus exactement le Nord-Est) le Jardin des Hespérides. L'argumentation me paraît d'autant plus éclairante (703) qu'elle rend compte de l'itinéraire, à première vue tout à fait incohérent, d'Apollodore, qu'elle évite, de surcroît, de faire appel (comme s'y était cru obligé F. Jacoby dans son commentaire) (704) à une interpolation postérieure à Phérécyde pour expliquer ce nouveau passage d'Héraclès dans la coupe du Soleil; qu'elle correspond, enfin, et explique ce qui peut paraître comme une volonté systématique de la part du logographe athénien de promener le héros tout autour du monde, avant qu'il n'atteigne les pommes d'or (705). Dans cette quête, en effet, Héraclès par deux fois semble arrivé au terme de son voyage: à Tartessos, aux confins occidentaux (et là semble bien avoir été sa destination première), puis dans les terres extrêmes de l'Afrique (Il se
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Fig. 43 : Héraclès et Atlas au Jardin des Hespérides
Lécythe à figures noires provenant d~trie (Athènes, Musœ National, 1132) D'après E. SELLERS, Three attic lekythoi from Ere~ JHS, XIII 1892-1893, pl. ID cf. F. BROMMER, Hesperiden, nO 4.
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pourrait bien - c'est du moins l'hypothèse que nous proposons - qu'avant Panyasis, ce soit l'expérience coloniale des Grecs de Cyrénaïque qui ait, là encore, enrichi le mythe et suggéré le détour par le Sud. Mais, dans la volonté d'intégrer encore à la geste d'Héraclès la délivrance de Prométhée (706) et la croyance plusieurs fois affirmée des séjours qu'il fit chez les Hyperboréens (707), nous reconnaîtrons volontiers, en revanche, l'intervention du logographe athénien. Peut-être aussi pouvons-nous trouver, entre cette première localisation occidentale et la version hyperboréenne (et surtout nordique) de Phérécyde, le point commun, le fil directeur qui nous guidera, comme il semble avoir guidé le mythographe : la présence d'Atlas dans ces parages où s'élève la voix claire des Hespérides. Connexion étroite assurée dès la Théogonie (708); connexion, non plus seulement géographique, mais efficace, dans l'imagerie, où très tôt (ce qui bien sûr est relatif, l'exploit lui-même n'étant pas documenté avant le Vlème siècle) Atlas apparaît comme actant dans l'épisode de la quête des pommes d'or. Nous avons évoqué, déjà, le coffre de Cypsélos qui le représentait (709), nous nous attarderons sur l'image que donne du drame un lécythe attique à figures noires sur fond blanc du Vème siècle, provenant d'Erétrie (710). A gauche, Héraclès, vêtu de la peau du lion (à la queue plaisamment relevée et passée dans la ceinture), est courbé sous le poids du ciel (figuré comme un bandeau sur lequel sont représentées la lune et les étoiles) ; la massue, l'arc et le carquois sont posés (ou suspendus ?) au centre de la représentation et, à droite, Atlas avance à grandes enjambées vers Héraclès, corps athlétique qui contraste avec "la touchante faiblesse" du héros (711), longue barbe et longs cheveux... Dans chacune de ses deux mains tendues: deux pommes qu'il offre avec une évidente bonne volonté (fig. 43). C'est la même bonne volonté que nous retrouvons sur la métope du temple de Zeus à Olympie (dont les sculptures furent tenninées peu avant le milieu du Vème siècle), même si Héraclès, grâce à l'aide d'Athéna, apparaît moins écrasé par le poids des Cieux! Dans l'une et l'autre de ces représentations, la version de Phérécyde, prêtant à Atlas l'intention de se décharger de son fardeau aux dépens d'Héraclès, ne paraît pas connue (à moins qu'elle ne soit pas suivie) (712).
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Il semble, en tout état de cause, que l'intervention d'Atlas donnant les pommes à Héraclès (de bonne grâce ou non) soit ainsi familière aux peintres du Vème siècle et déjà très largement répandue, comme le prouvent deux miroirs étrusques du British Museum et du Vatican: sur ce dernier, contemporain de la métope d'Olympie, ne figure pas le nom étrusque d'Héraclès, Herclé, mais bien plutôt Calanice , dérivé du grec Callinice qui apparaît comme épithète d'Héraclès dans un chant d'Archiloque (713).
Or, Atlas soutient "le vaste ciel de sa tête et de ses bras infatigables" (714) "aux limites mêmes du monde, en face des Hespérides au chant sonore" (715). Hésiode le disait et son interpolateur le répète, de façon beaucoup plus insistante, et plus précise encore, et, encore une fois, il n'y a aucune raison de se priver de son témoignage: là, où "sont côte à côte, les sources, les extrémités, de tout, de la terre noire et du Tartare brumeux, de la mer inféconde et du ciel étoilé. Là, où "se dresse l'effrayante demeure de l'infernale Nuit, qu'enveloppent de sombres nuées". Là, où Nuit et Lumière du jour se rencontrent et se saluent en franchissant le vaste seuil d'airain. Là, où "ont leur séjour les enfants de la Nuit obscure, Sommeil et Trépas". Là, où "s'élève en face de l'arrivant la demeure sonore du dieu des Enfers, le puissant Hadès et de Perséphone la Redoutable" (716). Là, "le fIls de Japet, debout, soutient le vaste ciel de sa tête et de ses bras infatigables, sans faiblir" (717). C'est bien en Occident, aux portes de la Nuit, qu'Hésiode, et qu'après lui encore, on situait Atlas, aux ex~mités de tout: de la Terre et du Tartare, de la mer (pontos ) et du Ciel; et c'est encore dans ces régions occidentales que nos plus anciennes sources situent aussi les Hyperboréens, ceux du Catalogue des Femmes (718) et, beaucoup plus tard encore, à l'époque hellénistique, ceux d'Hécatée d'Abdère qui, si l'on en croit Diodore, (719) habitaient au delà de la Celtique, ceux d'Apollonios de Rhodes encore qui situe l'île de l'ambre près du rivage adriatique, là où aboutit l'Eridan (720). Enfin, pour retrouver Héraclès, lorsque Pindare nous rapporte la poursuite de la biche, c'est au pays des Hyperboréens que l'atteint le héros, non loin de l'Isonzo (721), et l'animal aux cornes d'or avait été consacré à Artémis Orthosia, par Taygète, fille d'Atlas, le roi du pays des Hespérides (722).
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Fig. 44 : Héraclès et les Hespérides
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Amphore à col attique à figures noires (520-510) Boulogne, Musée des Beaux Ans et d'Archéologie, 421 F. BRDMMER, cf. Vasenlisten, 111,71(2); D'après E. GERHARD, Auserlesene griechische Vasenbilder, p1.99.
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Qu'une certaine confusion ait pu exister entre le pays des Hespérides et celui des Hyperboréens, une amphore attique à figures noires le prouve, qui, à la [m du Vlème siècle, représente le héros au jardin des Hespérides (fig. 44). Devant l'arbre aux fruits d'or, on s'étonne de voir la biche (ou le cerf), que désigne l'une des Hespérides pendant que l'autre, de la main, montre les rameaux chargés de pommes (723). Notion fluctuante et incertaine, qui d'une frange océanique (incluant les Celtes) reculera progressivement vers l'Est. Si pour Poseidonios les Alpes confinent encore aux régions habitées par les Hyperboréens (724), Strabon repoussera les "Serviteurs d'Apollon" au delà de l'Elbe (725), Pomponius Méla les relèguera au Nord de la Caspienne (726) et Ptolémée au nord de la mer d'Azov (727). Le récit que fait Phérécyde de la quête des pommes d'or, tendrait à prouver qu'au Vème siècle, déjà, ce mouvement est largement amorcé (728), entraînant avec lui le réajustement des errances d'Héraclès, errances occidentales au premier chef, à tel point qu'il est impossible de savoir si Prométhée dans la tragédie d'Eschyle indique la route à suivre pour atteindre les prairies brumeuses de Géryon ou si c'est du chemin des Hespérides qu'il s'agit, et, lorsqu'Hygin prétend que les Ligyens ont été rencontrés par Héraclès sur le trajet de retour et qu'ils ont essayé de dérober le bétail de Géryon... c'est probablement une invention, car chez Strabon, qui a noté l'ensemble du passage d'Eschyle, comme le fait remarquer M.L. West, il n'est pas question de troupeaux (729). En fait, ce qui, probablement, confère à la quête des pommes d'or cette complexité et cet aspect flottant c'est que, dans la légende d'Héraclès. elle est venue se greffer sur un exploit préexistant: la lutte pour les boeufs roux de Géryon. Nous avons déjà donné à cela plusieurs raisons, la localisation occidentale des Hespérides fut sans doute décisive. elle explique qu'à partir du premier voyage. le voyage vers l'île occidentale du monstre triple. se soit créée - sans jamais tout à fait réussir à s'en affranchir - une deuxième odyssée qui, elle aussi. devait donner matière à enrichir le destin étonnant du héros. Avec les Hespérides, en fait, nous retrouvons cette vision cosmogonique du monde que le monstre triple nous avait fait
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pressentir... une vIsIon qu'Euripide - qui, malgré ses déclarations d'athéïsme nous enseigne de la manière la plus sûre ce que fut la religion, ce que fut la pensée grecque - exprime, me semble-t-il, avec beaucoup de bonheur. Dans son Héraclès, le choeur célèbre - parmi les autres exploits du héros - le meurtre du serpent, "au jardin où chantent les vierges Hespérides" (730), et tout aussitôt, il évoque Héraclès, descendant dans "les profondeurs salées pour assurer aux rames des Mortels une mer paisible", (731), puis, dissociant l'épisode d'Atlas de celui des pommes d'or, il montre Héraclès soutenant "les palais étoilés des dieux", (732)... passage qui s'éclaire, me semble-t-il, de la très belle évocation du choeur d'Hippolyte: "Que je parvienne aux bords où poussent les pommes des Hespérides chanteuses, là où le roi de la sombre mer cesse d'assigner une route aux marins et fixe le terme auguste du ciel que soutient Atlas! Des sources d'ambroisie s'épanchent devant la chambre nuptiale de Zeus, aux lieux où, dispensatrice de vie, une terre merveilleuse nourrit la félicité des dieux" (733). Qui, mieux qu'Euripide, pourrait conclure, dire ce jardin où finit le domaine des hommes, où commence l'insaisissable ; chanter ces lieux où, aux inaccessibles profondeurs marines, répond la voûte étoilée des cieux, rappeler, enfin, qu'en cet endroit, pour toujours fécondé par l'hiérogamie de Zeus et d'Héra - coule l'ambroisie, dispensatrice de vie... Qui, mieux qu'Euripide, pourrait lire dans le jardin des Hespérides la réplique souriante de l'île brumeuse de Géryon?
561 III. "PRAIRIES ET JARDINS DE L'AU-DELA"
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Ainsi les prétendues topographies que s'efforcent de préciser les mythographes de l'âge de raison sont largement imaginaires, Euripide nous le confIrme. Pays situés aux extrémités du monde, Eschatiai, comme l'île brumeuse de Géryon ou le jardin des Hespérides, mais aussi comme les Des des Bienheureux ou comme le paradis solaire des Ethiopiens, pays dont l'essence même est d'être inaccessibles, ils sont bien à la fois "pays des dieux, pays des morts, pays des fruits merveilleux... pays de l'âge d'or" (734 bis), en un mot, pays d'un autre monde. La géographie de l'au-delà se fait eschatologie et métaphysique.
3-1 Ainsi en est-il du AE1J16>V d'Erythie. Sa description justifie remarquablement la définition d'une réalité géographique: large étendue de terre humide, pourvue d'une végétation aussi spontanée que luxuriante, très généralement liée, dans l'esprit des Grecs, aux troupeaux de bovidés (parfois même à l'élevage des chevaux). Mais il y coule un fleuve Anthemôus, un fleuve "fleuri" et ces fleurs rappellent celles du leimon de Piérie, où Hermès vint voler les vaches d'Apollon... Ces prairies d'asphodèles (735), proches de celles vers lesquelles ce même Hermès conduit les âmes des morts chez Homère... prairies très longtemps mythiques, en conséquence. Le xnno," des Hespérides est pareillement pourvu d'une végétation abondante, pareillement baigné d'une atmosphère de fécondité merveilleuse, donc surnaturelle; il évoque de fort près, pour ne donner qu'un exemple, ce jardin dont les dieux firent présent à Alkinoos : "verger dont les hautes ramures, poiriers et grenadiers, et pommiers aux fruits d'or, et puissants oliviers et figuiers domestiques portent leurs fruits sans se lasser, ni s'arrêter (736)... ". Prairies et jardins, "images privilégiées de la nature en ce qu'elle représente de plus universel pour un Grec : sa capacité toute divine d'engendrer, de nourrir la vie et de la reprendre", lieux ressentis "comme les foyers d'une vie divine qui déborde
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sans cesse sur les êtres et sur les choses"... lieux où se manifeste, de façon privilégiée "l'ambivalence fondamentale qui traverse la nature"... lieux où, mieux qu'ailleurs, se perçoit le mystère de la vie et de la mort... comment, mieux qu'Alain Motte dans le très beau livre qu'il leur a consacré (737) dire à quel point ils furent, pour les Grecs, "des images exemplaires de la vie", de la terre, qui - et, cette fois, c'est Eschyle qui le dit - "engendre tous les êtres, les nourrit, et en reprend à nouveau le germe fécond" (738). Tels sont bien les lieux où s'achève la quête d'Héraclès - et peut-être faut-il regretter qu'Alain Motte l'ait "oublié", lorsqu'il étudie les dieux qui s'y plaisent ou qui, à l'occasion s'y donnent rendez-vous? - (739). On ne s'étonnera pas que leur nature même ajoute au sens des exploits qu'y accomplit le héros.
3-2 Peut-être convient-il de s'affranchir d'un doute: pour J.H. Croon, on s'en souvient, c'est Géryon qui attire Héraclès dans les prairies brumeuses d'Erythie, le héros n'est "pas tellement" lui-même un démon chthonien, mais bien plutôt le conquérant, le triomphateur de ces ces forces de la fertilité : "it was the very nature ofHeracMs to do so. For by nature he was not so much a chthonic or fertility - daemon as rather a conqueror of the chthonic powers that were once worshipped with awe andfear near these places" (740). En fait, que le thème "infernal" ne soit pas seulement entraîné par la collusion avec Géryon, mais existe indépendamment dans la légende d'Héraclès ne peut guère être nié. Il y a, nous l'avons vu, d'indéniables similitudes entre la quête d'Héraclès pour les troupeaux de Géryon et l'expédition chez Hadès et de multiples traditions mettent, en Grèce même, le fils d'Alcmène en rapport avec les entrées des Enfers: à Pylos, en Elide, où - première version peut-être de cet affrontement avec les forces de la mort - il blesse Hadès et lui fait souffrir de grandes douleurs (741) ; au Cap Ténare, où dans un temple en forme de grotte dédié au dieu marin Poséidon (version qui laisse à penser que l'autre monde peut-être aussi un au-delà des mers !) quelques poètes ont imaginé qu'Héraclès avait fait passer Cerbère le chien des Enfers, fantaisie que critique fort Pausanias: "Il n'y a là aucun souterrain et il n'est vraisemblable ni qu'un dieu tienne
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son empire sous terre. ni que nos âmes s'attroupent là après notre mort" (742). Dans la région de Coronée encore (sur la rive Sud du lac Copaïs). existe un temple à Héraclès surnommé Charops. par lequel - disent les Béotiens - Héraclès avait ramené le chien du dieu des Enfers (743). Mêmes traditions. enfin. à Trézène et Hermione. plus proches d'Argos: A Trézène. c'est dans le temple d'Artémis que des autels aux dieux infernaux cachent deux ouvertures. l'une par laquelle Dionysos retira Séléné des enfers. l'autre par laquelle Héraclès emmena Cerbère (744). A Hermione. c'est derrière le temple de Déméter Chthonia - dont les portes se referment sur des vaches conduites à un bien curieux sacrifice (745) - que trois grandes places fermées par des balustrades de pierre évoquaient de façon fort précise les Enfers: l'une était appelée marais de l'Achéron. l'autre vouée à Hadès. l'autre à Clyménos à qui les habitants sacrifiaient également dans un temple face à celui de Déméter Chthonia. Pausanias. qui paraît avoir entendu dire que ce Clyménos était (comme Héraclès !) un Argien. pense que ce pourrait être plutôt "quelque surnom du dieu des Enfers..." La place qui portait son nom. en tout cas. ouvrait sur les Enfers et par là. pensait-on. Héraclès avait ramené sur terre le chien de l'Hadès (746). Ainsi l'aspect infernal d'Héraclès existe indépendamment de Géryon. comme existe aussi. indépendamment du monstre triple. son rapport aux sources (747). comme existent enfin. indépendamment d'Erythie et du pays des Hespérides. les rapports du héros avec les jardins. avec les prairies humides et fécondantes. certes. mais inquiétantes et parfois maléfiques. Telles sont. en effet. les prairies marécageuses d'Argolide décrites par Strabon et. en particulier. le marais de Lerne situé sur le territoire d'Argos et de Mycènes (748). tels sont les vallons ombreux de Némée (749). telle est encore la région du lac Stymphale où Héraclès est présent dès ses premiers travaux et où son combat contre les oiseaux "quel que soit le sens mythique qu'on lui donne. perpétue le souvenir d'un temps où la région. envahie par le marécage. se peuplait d'oiseaux aquatiques" (750). Il est vrai que de tels exemples pourraient. à la limite. conforter la thèse de J.H. Crron (ces leimones sont tous. après tout. le lieu des combats mythiques du héros 1). Il en est d'autres. toutefois. qui échappent à cette logique: c'est. par
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exemple, le Àf:1JLWV &TOJLOÇ' de Zeus, où, sur le mont Oeta, Sophocle place la mort et l'apothéose d'Héraclès (751) ; c'est aussi le xanaç d'Olympie, formé des mêmes essences que celui des Hyperboréens, puisque c'est chez les fidèles d'Apollon qu'Héraclès était allé les chercher (752) ; ce sont peut-être encore les prairies et jardins merveilleux d'Italie, où, près de Crotone, Héraclès partage avec Héra le pouvoir de faire croître une faune non moins étonnante (753), le verger d'Héraclès à Thasos où les arbres à installer dénotent les préférences du héros (754), ou encore le xanaç d'Héraclès Diomédonteios à Cos (755) ; telle est peut-être même la "creuse" Argos des origines (756), creuse comme l'était aussi, pour le Pseudo-Scylax, le jardin des Hespérides (757).
3-3 Lieux où "se boucle le cycle de la Génésis et de la phthora" (758), lieux "marqués d'un sceau funèbre" (759) l'île rouge de Géryon, île du Soleil Couchant, et le pays des Hespérides, ces Nymphes du Soir sont de surcroît, aux rives océanes, aux frontières de Nuit, la divine (aJL6p6c:na), de Nuit" dompteuse des dieux et des hommes", de Nuit qui ajoute, comme le dit Clémence Ramnoux, une troisième dimension au chthonien (Eschyle ne distingue-t-il pas un Hermès Chthonios et un Hermès Nychios 1) (760) ... Règne fait de brouillards et de ténèbres, frontières où les directions se confondent, marges où se rejoignent les "trois premières grandes peurs de l'homme" (761), le vide, le noir, la mort. Là, dit Hésiode - ou son interpolateur! - Nuit et Lumière du jour se rencontrent en franchissant le vaste seuil d'airain, là "Sommeil et Trépas peuvent surprendre", là réside une déesse odieuse aux Immortels, la terrible Styx, fille ainée d'Océan, là "s'élève la demeure sonore du dieu des Enfers, le puissant Hadès et de Perséphone la Redoutable" (762). La "demeure sonore d'Hadès"! Elles participent bien des Enfers, ces créatures de Nuit et de Flot, qu'en ces lieux, rencontrera Héraclès: Géryon "celui qui fait résonner sa voix", comme Cerbère, le chien d'Hadès "à la voix de bronze", comme "ces maîtres des animaux" que, dès le Paléolithique, on rencontre, en compagnie des rhombos, et que les anthropologues retrouvent dans les sociétés traditionnelles, en relation avec les
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initiations des jeunes gens (763)... Les Hespérides "chanteuses" (liguphonoi ) dont la voix, pour être plus hannonieuse, n'en est pas moins éclatante Le serpent, ou dragon, enfin, "aux sons multiples et bigarrés" Tous méritent, en effet de peupler "la demeure sonore d'Hadès"! Mais si l'exploit contre Géryon insiste sur l'aspect infernal (on oubliera vite les boeufs merveilleux, symboles de la nature généreuse de ces prairies chthoniennes), la quête des Hespérides, tout en participant du même monde infernal (le serpent est là pour le rappeler, et, nous l'avons vu, déjà, la généalogie des nymphes du soir), insiste, quant à elle, sur l'aspect souriant d'une nature surtout appréhendée comme source de vie au sens le plus immédiat du terme (fertilité/fécondité), mais encore au sens de vie éternelle (le symbole des pommes d'or est là pour le prouver). Jardin des dieux où eut lieu l'hiérogamie (une des hiérogamies!) de Zeus et d'Héra (764), mariage divin qui exalte la fécondité de la nature, mais qui - point n'est besoin d'insister - reduplique l'union primordiale à la fois origine du monde et promesse de renouvellement, donc de durée éternelle. Cette croyance semble commune aux représentations cosmogoniques de nombreux peuples méditerranéens (nous avons pu voir, ainsi, l'Héraclès des Grecs se confondre avec le Melqart phénicien, lui-même engagé aux côtés d'Artémis dans une de ces unions sacrées) parèdre de l'une de ces potniai, primitives, hypostases de la nature entière... parèdre, c'est-à-dire ftls mortel et amant de la "maîtresse" (comme l'était Adonis pour Aphrodite, comme l'était probablement aussi le dactyle lasion pour Déméter). La mort annuelle et la renaissance de tels dieux (qu'on se souvienne du réveil de Melqart/Héraclès) s'insèrent dans un cycle vital dont le temps fort semble d'abord avoir été celui de l'hiérogamie, à l'âge où la prééminence de la déesse l'emportait largement sur l'importance du parèdre. Que ce jardin des dieux, que ces pommes d'or, fruits de l'hiérogamie aient été mis en rapport avec Héraclès n'étonne pas. Ne venait-il pas d'un pays lui-même propice à l'hiérogamie? Le marais de Leme n'était-il pas la couche nuptiale de Zeus et de 10 (765), de Poseidon et d'Amymoné, (766) d'Hadès et de Coré ? (767). Héra elle-même n'était-elle pas une de ces grandes déesses primitives ? et, si l'on en doutait, la couche de la déesse, conservée en son temple d'Argos, prouve que le souvenir n'en
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était pas oublié, alors que, sur la statue d'or et d'ivoire conçue par Polyclète, Zeus est représenté sous la forme d'un minuscule coucou perché sur son sceptre (768). Quant à Héraclès, n'était-il pas le serviteur désigné de la déesse, à une époque que nous imaginons volontiers très reculée... une époque que pourrait évoquer, sans doute, l'Héraclès dactyle dont le souvenir, grâce à Pausanias, est parvenu jusqu'à nous... une époque que les premiers travaux et l'espace qui les détermine nous aident à concevoir... une époque que, peut-être, permet encore de retrouver un attribut commun: le lion. Lié à Héraclès, dès les débuts de sa légende, le lion l'est également à la déesse, si l'on en juge par la statuette archaïque retrouvée à Délos et décrite par Pierre Lévêque comme la représentation indubitable d'une maîtresse des fauves (769) et si l'on en croît Callimaque pour qui la statue d'Héra à Samos et à Argos reposait sur une peau de lion (770). De cette n6TV1Q 9TJpWv la Grèce ne se souviendra guère, l'Italie beaucoup mieux, nous l'avons vu (771) ; elle revivra au temps de Lucien dans la grande déesse syrienne qui, associée elle aussi à des lions, perpétue le nom d'Héra (772). Héritage, encore, et qui permet de mieux comprendre le rôle d'Héraclès dans ces prairies et jardins du lointain couchant... Il n'en est certes pas le maître, comme Géryon est maître des prairies et des troupeaux d'Erythie, il ne s'en approprie pas les fruits: les troupeaux seront sacrifiés à Héra, les pommes d'or replacées dans le jardin des dieux; mais, s'il les parcourt, c'est en serviteur de la grande déesse d'Argos, et c'est grâce à elle encore qu'il conquerra l'immortalité bienheureuse: le mariage avec Hébé, l'apothéose, sont en effet directement liés à ces derniers exploits terrestres d'Héraclès... mais ce n'est plus notre propos (773). Cette apothéose nous choisirons seulement de l'évoquer, en prolongeant, une dernière fois, l'héritage jusqu'à nous - ou presque - dans Le triomphe d'Héraclts , projet de David laissé sans lendemain et qui, sur le rideau de scène de l'Opéra, devait figurer le triomphe du peuple français sur la monarchie.
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Fig. 45 :"David: "Triomphe du peuple sur la monarchie"
Projet pour le rideau de scène de l'Opéra (printemps 1794) D'après: M. VOVELLE, La Révolutionfrançaise, Images et récits, Paris, 1986, III, p. 227 (détail)
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NOTES DE LA QUATRIEME PARTIE
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G. BATAll..LE, Théorie de la religion, Paris, 1973, pp. 69-70, de réd. TEL de Gallimard J. DOURNES, dans Le Conte. Pourquoi. Comment, op. cit., p. 580 cf. supra notre deuxième partie, p. 319 et notes 498 et 500.
NOTES DU PREMIER CHAPITRE
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SOPHOCLE, Trachiniennes, 35. AVIANUS, fable XXXII. La traduction est celle de P. Constant, éditions Garnier. Paris, 1937. C'est ce que fait F.M. SCHTAJERMAN, Die Krise der Sklavenhalterordnung. Berlin 1964 qui met en relation la fable xxxn d'Avianus avec la pensée des Cyniques (p. 117). Peut-être faudrait-il d'ailleurs nuancer le rapport, par trop exclusif, établi entre la popularité du héros parmi les petites gens et la philosophie des Cyniques qui fIrent de lui "l'idéal du combattant infatigable contre les tyrans et les riches" (p. 129) et le modèle du bonheur, mérité par une voie droite et un labeur acharné. ÉSOPE, Fables, 72, Le bouvier et Héraclès (Les Belles Lettres, 1960 p. 34). La morale est déjà celle qu'AVIANUS donnera: "mets la main aux roues, aiguillonne tes boeufs et n'invoque les dieux qu'en faisant toi-même un effort; autrement tu les invoqueras en vain". Esope, faut-il le rappeler, vivait au Vlème siècle. (Hérodote en fait le compagnon de la célèbre courtisane Rhodopis, elle-même contemporaine du souverain égyptien Amasis). K. MARX, IntrodUction, (dite "de 1857"), Manuscrits de 1857-1858. "Grundrisse", LI, Editions sociales, Paris 1980, pp. 38 et 39. J.-P. VERNANT, Le travail et la pensée technique, dans Mythe et pensée chez les Grecs, Paris, 1965, pp. 185-247, singuli~ement, p. 219. En hommage à Lucien FEBVRE, Travail: évolution d'un mot et d'une idée, dans JourMl de Psychologie, 41, 1948 (1), pp. 19-28. J.-P. VERNANT, loc. cit., p. 197.
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Cf. J.-P. VERNANT, loc. cit., p. 198 et N. LORAUX, "Ponos", sur quelques difficultés de la peine comme nom du travail, dans Archeologia e storia antica, W, Naples, 1982, pp. 171-192. Je renvoie, sur ce point, au prologue de cet ouvrage: Le mythe/mode d'emploi. L'expression est empruntée à L. GERNET. J.-P. VERNANT, loc. cit., pp. 198-199. A. AYMARD, Hiérarchie du travail et autarcie individuelle dans la Grèce archarque, Revue d'histoire de la philosophie et d'histoire générale de la civilisation, 1943, pp. 124-146, repris (et condensé) dans Journal de Psychologie, 41, 1948, l, pp. 29-45; J.-P. VERNANT, voir note 8 supra. N. LORAUX, loc. cit., (Ponos ), Cf. note 11. J.-P. VERNANT, Prométhée et la fonction technique, op. cil., pp. 185-195, particulièrement p. 194. J.-P. VERNANT, Le travail et la pensée technique, op. cit., p. 220. Voir note 11. N. LORAUX, loc. cit., p. 184 et note 72 (Philoctète, 1419, 1420, Trachiniennes, 21,170,825 (où Ponos dit l'exploit), 70, 356 (où il dit la servitude), 680, 985 (où il sert à désigner la souffrance physique). C'est vrai de SOPHOCLE (cf. note précédente) et d'EURIPIDE (pour Alceste 481, 1149-1150; pour Héraclès; 22, 357, 388,427, 1275, 1353, 1410). Cf. N. LORAUX, loc. cil., p. 185 sq.. P. CHANTRAINE, Dictionnaire etymologique de la langue grecque, II,881, S.v. ntvofLQt. Mochthos "peine, effort, difficulté" d'après P. CHANTRAINE, op. cit., II, 716. EURIPIDE, Héraclès: 698, 830, 1270 (mais pas 281 où mochthos ne s'applique pas aux travaux d'Héraclès) et chez SOPHOCLE, Trachiniennes. 1046-1047 (verbe fLoX9tw) - voir encore N. LORAUX, loc. cit., p. 185 et note 70. P. CHANTRAINE, op. cit., p. 881. Il est vrai que les occurrences connues, chez Homère par exemple, concernent souvent les travaux ménagers. Il se pourrait d'ailleurs que ntvofLQt ait originellement désigné une sorte particulière de travail ménager (FRISK, s.v.,
nivofLQt). 25-
26-
F. MAWET, Le vocabulaire homérique de la douleur. Mémoires de la classe de Lettres, LXIII, 4, Bruxelles, 1979; en particulier pp. 37~381, pour l'étude des mots de la famille de ponos. F. MAWET, op. cil., pp. 379-380.
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F. MAWET, op. cit., p. 377. F. MAWET, op. cit., p. 378. Les Travaux et les Jours, 432. Pour ce qui est de ponos, R. DESCAT, L'acte et l'effort. une idéologie du travail en Grèce ancienne (8ème-5ème siècle av. J.-C), Paris, 1986, a relevé 5 occurrences dans Les Travaux et les Jours, deux dans la Théogonie. Le tenne est donc très rare dans la vocabulaire hésiodique, alors qu'on s'attendrait à ce que le monde difficile des Travaux soit un monde du ponos . Peut-être, c'est du moins l'hypothèse de l'auteur, parce que "le ponos est imposé implicitement à la condition humaine dont il nous fait la description" (p. 64). La différence avec les emplois homériques est particulièrement frappante, lorsque le tenne est utilisé pour dire la "peine" que donne aux oiseaux le petit esclave qui, suivant le semeur, cache à mesure les grains qui viennent d'être lancés (Les Travaux et les Jours, 470). F. MAWET, op. cit., p. 379. F. MAWET, op. cit., p. 379. On pourrait - mais là n'est pas notre propos - en tirer sans doute une indication pleine d'intérêt sur la place respective de l'homme et de la femme dans ce domaine du travail, une place "pensée", semble-t-il, de façon moins radicalement différente qu'elle ne le sera plus tard. De rares exceptions toutefois: chez HÉSIODE (frgs. 248 et 249, MERKELBACH-WEST) Héraclès est ponerotatos Icai aristos. Poneros, l'un de ces dérivés au vocalisme e (comme penia et penes ) ne signifie peut-être que malheureux, "accablé de maux" (CHANTRAINE, 881); il finira, avec Aristophane par désigner le gueux (Cavaliers, 181-186) - A l'époque helIénistique, Théocrite retrouvera les douze mochlhoi d'Héraclès (XXIV, 82-83). Chez Hérodote ergon est employé 143 fois, ponos 23 fois seulement (+ 2 fois ponéo ) ; chez Thucydide ergon l'est 153 fois, ponos 20 fois, alors que chez les Tragiques la proportion s'inverse (Eschyle: 72 occurrences pour 103 pour ergon . Seul Sophocle utilise plus souvent ergon (104) que ponos (50). Cf. R. DESCAT, op. cit., pp. 87-89 et 82). PINDARE, Néméennes, l, 49-52. Pour les emplois les plus aICharques d'ath/os voir infra pp. 432 sq. et notes correspondantes. Pour les emplois postérieurs, voir infra p. 437sq. et notes correspondantes. Pour PINDARE, cf. Isthmiques, VI, 48 (toujours la même fonne aethlos ). Pour les Tragiques, voir, par exemple, les Trachiniennes (36; 80) et le Philoctète (508-509) de SOPHOCLE, ou l'Alceste (481; 1149-1150) et l'Héraclès (827)
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d'EURIPIDE. Dans cette dernière pièce, on notera - ce qui est assez rare - qu'agôn remplace athlos au vers 789. Cf. aussi SOPHOCLE, Trachiniennes, 20. P. CHANTRAINE, op. cit., l, 21, s.v. &t9),oç Cf. pourtant EURIPIDE, Héraclès 789, SOPHOCLE, Trachiniennes, 20. P. CHANTRAINE, op. cit., l, 21. H. TROMPY, Kriegerische Fachausdrilc/œ im griechischen Epos, Bâle 1950, p. 150-151 ou Lexikon desfrilhgriechischen Epos, l, Gottingen 1979, S.v. : aethlos. Contra P. CHANTRAINE, op. cit., 1,21. Iliade, VIII, 263 ; XV, 639 ; XIX, 133. Iliade, XV, 639. Il est, dans ce passage, question de Coprée, qui longtemps porta à Héraclès les ordres d'Eurysthée. Ce dernier préférait, d'après Apollodore, ne pas avoir de commerce direct avec un héros qui l'effrayait par trop (APOLLODORE, II, 76 = II, 5, 1). Ilïade, XIX, 132-133: ergon aeikes. Ilïade, VIII, 362-363. Odyssée, XI, 618-626. Odyssée, XI, 620... le' terme aeikes avec son a privatif dit bien d'ailleurs ce qu'ont d'inconvenants et d'indignes de tels travaux. Odyssée, IV, 170: tIL6yt1C7E:V liE:9),ouç : c'est d'ailleurs l'un des exemples pris par H. TROMPY (op. cit., v: note 31) à l'appui de sa théorie; cf. encore P. CHANTRAINE, op. cit., 1,21. lliode, III, 126. Il est question, dans ce passage, de la représentation sur un manteau tissé par Hélène des "épreuves" que, pour elle, Achéens et Troyens subirent "sous les coups d'Arès". Odyssée, XIX, 584. P. CHANTRAINE, op. cit., 21 ,col. 2. Et ce, malgré l'interprétation de P. CHANTRAINE. (Cf. supra note 38). Ponerotatos pour Hésiode (cf. supra, note 32), athlios pour Euripide, encore, (Héraclès, 1015). Moins "puissant" sans doute que ne le suggère la traduction d'alkimos par P. Mazon (Les Belles Lettres, 1928). HÉSIODE, Thiogonie, 950-955. "Héraclès habite désormais chez les Immortels, soustrait au malheur et à la vieillesse" (grammaticalement, il est vrai, la phrase n'indique qu'une idée de succession - encore que l'aoriste âvuaaaç puisse suggérer une valeur causale). Nous noterons encore le qualificatif d' ·O),6toç appliqué à Héraclès. Sur ce terme cf. P. LÉVEQUE
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.. 0>'0\0," et la félicité des initiés, dans Rayonnement Grec. Hommages à Ch. Delvoye. Bruxelles, 1982, pp. 113-126. PUNI>AJUE,JVén1éennes. l, 111-112. Hymne homérique à Héraclès . Une variante, choisie par F. CASSOLA, dans l'édition italienne de la "Fondatione Lorenzo Valla", (Inni Omerici, Vérone, 1975) met directement ces souffrances en rapport avec les ordres d'Eurysthée. Sur aethlonlathlon = prix du concours, cf. P. CHANTRAINE, op. cit., l, 21. Cf. encore N. LORAUX, loc. cit., pp. 188-189. Contrairement à ce qu'affume N. LORAUX, loc. cit., p. 186 note 76, la désignation des "Travaux" comme athloi n'apparait pas dans l'Hymne hon1érique, qu'on choisisse l'une ou l'autte variante. J.-P. VERNANT, Travail et nature dans la Grèce ancienne, op. cit., p. 198. HÉSIOI>E, Théogonie, 954. On trouve des expressions semblables dans l'Odyssée, XXI, 26: ~c1M.>V bnicnopa lpY6>v. Iliade, XIX, 133 : ergon aeilœs. P. CHANTRAINE, op. cit., l, 364 à 366, S.v. fpyov. PINI>ARE, JVén1éennes. l, 70. Les travaux d'Héraclès sont dits
"KŒI1c1T6>V ~c1M.>v". 6465-
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R. I>ESCAT, op. cit., p. 243-246, n'envisage le terme que dans un court passage et avec le seul sens de fatigue. Voir sur ce point E. WILL (Aux origines du régime foncier grec, REA, LIX, 1957, pp. 5-50) qui considère que "le kama garde son secret" (p. 39) et A. MELE, Il catasto miceneo da Pilo, Terre et dépendants dans les sociétés antiques, Colloque de BESANCON, 1974, Lyon-Paris, 1979, pp. 11-79) particulièrement pp. 18 et 22. La seule continuité véritablement attestée le serait avec le terme KŒl1clV connu par une glose d'HÉSYCHIUS. Quant au rapprochement avec le verbe Kc1I1V6>, P. CHANTRAUNE, juge "qu'il reste en l'air", op. cit., 1,488, S.v. KŒl1clv. N. LORAUX, loc. cit., p. 172, 191, 192. B. BRAVO, Commerce et noblesse en Grèce archarque, à propos d'un livre d'A. MELE, DHA, 10, 1984, pp. 99-160. Citation note 25 page 153. R. I>ESCAT, op. cit., pp. 35-51. R. I>ESCAT, op. cit., pp. 59-63. R. I>ESCAT, op. cit., p. 44. Pour A. MELE (Il commercio greco arcaico, Prexis ed emporie, Naples 1979, p. 14) ces formes verbales du groupe d'ergon "semblent
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exprimer une obligation de travail... qui n'est en rien de nature exclusivement religieuse". Quant à erdo qu'étudie plus précisément J. CASABONA (Recherches SUT le vocabulaire des sacrifices en Grèce, des origines à lafin de l'époque classique, Thèse - Lettres, Paris 1967, p. 328), il a dû "désigner l'exercice d'une activité productive, conçue comme un service public, mais dont les emplois généraux semblent, dès Homère, en voie de disparition", et il aurait été remplacé, dans la langue parlée, au sens de travailler, par ergazomai . Cf. R. DESCAT, op. cit., pp. 48-51. Dans le cadre de notre participation aux travaux du Centre de Recherches de Besançon (U.A. 338 du CNRS: Analyse des formations sociales de l'Antiquité) et à l'ATP "Polythéïsme" du CNRS (Analyse du discours mythologique chez Apollodore) nous avons pu disposer de l'enregistrement informatisé du texte d'APOLLODORE (Edition R. WAGNER, Mythographi Graeci, 1. Apollodori Bibliotheca, Teubner, réimpression de Stuttgart, 1965). Les travaux de l'ATP, précisons-le, se développent, pour l'instant, autour d'un programme différent: établissement des généalogies divines et héroïques, constitution d'une grille destinée à répertorier les syntagmes relatifs à l'union et à la procréation. Chapitres IV à VIII pour l'ensemble de la vie d'Héraclès; le chapitre V, à lui tout seul, étant consacré au récit des "Travaux". De la même façon, dans le livre l, qui, après la Théogonie, rapporte le destin des descendants de Deucalion, Apollodore consacre un très long excursus à l'expédition des Argonautes. APOLLODORE, Ill, 113 (= 111, 10,2) sous la forme: tpyaaciJ1&voÇ. Il s'agit de la fabrication de la lyre par Hermès enfant avec la carapace d'une tortue et les boyaux des boeufs qu'il vient de sacrifier. Je ne retiens ici que les termes susceptibles de dire le travail, ou les travaux au sens le plus large... Nous retrouverons plus tard ceux qui traduisent la servitude ou impliquent le salaire. APOLLODORE, II,127 (= II, 6,1). APOLLODORE, III, 142 (= III, 12, 3). Ce prix du concours: cinquante jeunes garçons et cinquante jeunes fIlles. Sur ce point, cf. F. BROMMER, Herakles. die 'ZWolfTaten des Helden in antilcer Kunst IUId Literatur, MUnster-Cologne, 1953-1972 et du même auteur, Denlcmtilerlisten ZUT griech. Heldensage, l, Heralcles, 1971. Cf. aussi C. ANNEQUIN,loc. cit., DHA, 8,1982. Dans des expressions comme "le résultat de ses travaux" (II, 76 II,
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=
5, 1); "les autres travaux" (II, 76 II, 5, 1); tous ces travaux (II, 113 II, 5, 11 et II, 127 II, 6, 1) ou simplement "les travaux" (II, 73 =II, 4, 12). 81APOLLODORE, II, 80 (= II, 5,2) ; II, 91 (= II, 5,5). 82APOLLODORE, II, 73 (= II, 4, 12). Certains manuscrits (suivis par F. CLAVIER dans sa traduction française) corrigent en "douze travaux" un texte original qui parait bien avoir compté "dix travaux". C'est en tout cas la version suivie par R. WAGNER, version qui nous parait être dans la logique même du texte d'Apollodore. Ce passage est, en effet, l'énoncé de l'oracle rendu par Delphes à Héraclès, oracle qui lui enjoint de se soumettre aux ordres d'Eurysthée. Or Apollodore expliquera plus tard que c'est parce que ce dernier refusait d'''homologuer'' deux des dix travaux réalisés qu'il en impose un onzième, puis un douzième (II, 113 = II, 5, Il puis II, 122 = II, 5, 12). 82bis- APOLLODORE, II 77 (=II, 5, 2). Cf. aussi II, 81 (= II, 5, 3) ; II, 83 (= II, 5, 4) ; II, 88 (= II, 5, 5) ; II, 92 (= II, 5, 6) ; II, 94 (= II, 5, 7) ; II, 96 (= II, 5, 8) ; II, 98 (= II, 5, 9) ; II, 113 (= II, 5, 11). Une légère variante remplace parfois la fonne tnha(ev par wTci'YTl : II, 106 (= II, 5, 10) ; II, 122 (= II, 5, 12). 83N. LORAUX, loc. cit., p. 187. 84DIODORE DE SICILE, V, 13, 1 ; IV, 13, 2 ete... 85DIODORE DE SICILE, XV, l,LOn se reportera sur ce point à notre seconde partie: retour aux sources. 86DIODORE DE SICILE, IV, 7, 4 à IV, 8, 5. 87DIODORE DE SICILE, IV - 7, 4; IV, 8, 5. 88DIODORE DE SICILE, IV, 8, 5. 89DIODORE DE SICILE, IV, 8, 1; IV, 8, 3 (2 fois); IV, 8, 5. 90HOMBRE, lliode, VIII, 364.. 91Une exception: celle d'EURIPIDE, Cf. infra, note 96. 92ARISTOPHANE, La paix, 741 sq.. 93n n'est qu'à lire, pour s'en convaincre, l'éblde que, dans DouJeia (pp. 125-176), M.-M. MACTOUX consacre à Doulos et aux autres dénominations des esclaves chez Aristophane (Annales littéraires de l'Université de Besançon, 250, Paris 1980). 94SOPHOCLE, Trachiniennes, 35 ().aTptuoVTa). 95- lliade, XVIII, 28, Odyssée, l, 398 par exemple. Etymologie "douteuse" ou alors "populaire" selon P. CHANTRAINE (op. cit., s.v. BJWç l, 289-290) qui juge raisonnable de' faire dériver BJWç de
=
B6JLOÇ.
=
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EURIPIDE, Héraclès, 17-2iJ. EURIPIDE, Héraclès" 20-21. Avec le seul génitif, cf. EURIPIDE, Héraclès, 1102. EURIPIDE, Héraclès, 1278, 830... ete. LUCIEN DE SAMOSATE, Oeuvres, II, XLIV.,Jupiter tragique, 21. Cf. ARISTOTE: "L'être qui, grâce à son intelligence est capable de prévoir est gouvernant, par nature; l'être qui, grâce à sa vigueur corporelle, est capable d'exécuter, est gouverné et par nature esclave" (Politique, l, 2, 2). LUCIEN DE SAMOSATE, Oeuvres, l, XXV. Comment il/aut écrire l'histoire, 10. Lucien décrit là un tableau représentant Héraclès esclave d'Omphale. Cf. P. CHAN1RAINE, op. cit., s.v. ).chpov II,622. Cette famille de mots latris, latreia, latreuo dont dérivera le latro latin n'a apparemment, en Grèce, aucune relation avec une quelconque idée de banditisme ; travail obligatoire, service dû, contre une compensation ou parce qu'on est dans une condition d'infériorité telle qu'elle vous place dans la dépendance... il est intéressant de constater que ce sont ces notions-mêmes qui, connotant le travail, la servitude, l'infériorité sociale, fmiront à Rome, par désigner le bandit Sur l'histoire du terme voir G. STEINMAYR, Sviluppi semantici della base latro in Grecia e in Roma, Atti e memori dell'Academia di Verona (1955-1956) pp. 151-163 et, dans un contexte plus romain que grec, Brent D. SHAW, Bandits in the roman Empire, Past and Present, 105, Novembre 1984, pp. 32-52. PINDARE, Olympiques, X, 34-35. SOPHOCLE, Trachiniennes, 851 et 831, cf. supra p. 440 note 94. SOPHOCLE, Trachiniennes, 70 et 356-357. APOLLODORE, II, 134-136, (II, 6, 4). APOLLODORE, II,132-133 (= II, 6, 3). Déjà dans l'Iliade (XXI, 443) pour la servitude chez Laomédon et chez PHÉRÉCYDE pour la servitude chez Admète (F. Gr. Hist., 3F, 35a). Cf. encore APOLLODORE l, 9, 15 et III, 10,4. Sur cette servitude des dieux et héros voir Istvan HAHN, Dieux et héros comme esclaves et mercenaires dans Index, 10, 1981, pp. 11-19. ARISTOTE, Ethique à Eudème, VII, 12, 19 (= 1245b 33). APOLLODORE, III, 4, 2 à{BlOV tVlaUTOv t9~TEUatV "'Aptl. CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Protreptique II, 35. 1. n opposera dans les Stromates (II, 22, 5) ce "joug de la servitude" au "joug de la liberté" de l'Evangile. Le travail d'Apollon et de Poséidon chez
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Laomédon est déjà mentionné dans l'Iliade (VII, 472 et XII, 441). Apollon, quant à lui, avait dQ servir chez Admète (comme berger de ses troupeaux) pendant huit ans (APOLLODORE III, 122 = III, 10,4). Fragment nO 16 Héracléia éd. K.INK.FL: Ep. gr. Frg.1 p.261. Hymne homérique à Déméter, 91. Sur Dédale (et sur HéphaIstos) voir M. DELCOURT, Héphafstos ou la légende du magicien, Paris, 1957; F. FRONTISI-DUCROUX, Dédale. Mythologie de l'artisan en Gr~ce ancienne, Paris, 1975. Cf. Istvan HAHN, loc. cit., p. 12. APOLLODORE, II, 88-91 (= II, 5, 5). DIODORE DE SICILE, IV, 13,3. Voir encore PAUSANIAS, V, 1, 9-11 : pour lui, Héraclès dut nettoyer non seulement les étables d'Augias, mais encore tout le pays. PINDARE, Olympiques, X, 34-35. On pourrait toutefois penser que l'épisode était connu d'Homère qui, dans le Catalogue des vaisseaux, mentionne Mégès, fils de Phylée et précise que ce dernier avait jadis émigré à Doulichion "par courroux contre son père". (Iliade, II, 627-630). Or on sait que le fils d'Augias, pour avoir pris le parti d'Héraclès contre son père, avait été contraint de quitter l'Elide (APOLLODORE II, 88-90 = II, 5, 5). PAUSANIAS, V, 10, 9. F. BROMMER, Herakles, die zwtJlfTaten des Helden in antilcer Kunst und Literatur, Milnster!Kôln 1953, Appendice p. 88 et tableau p. 54. G. ORSOLINI et C. DI BARI, L'elaborazione eleuronica dei vasi altici a figure nere e rosse dei Corpus vasorum antiquorum, colloque de Rouen (1982), Image et céramique grecque, Rouen, 1983, pp. 81-90. On imagine mal, par exemple, les colons grecs offrir à la clientèle indigène cette image de leur archég~te, du héros qui, avant eux, était venu conquérir et apporter la civilisation du pays. SÉNEQUE, Hercule furieux, 247-248. C'est d'ailleurs la seule mention de ce "turpis labor", alors qu'à plusieurs reprises, tant dans Hercule furieux que dans Hercule sur l'Oeta, les tIavaux du héros sont complaisamment rappelés. En ce qui concerne les mosaïques représentant le cycle des tIavaux d'Hercule (une dizaine environ) voir S. GOZLAN, H. LAVAGNE, Au dossier des mosaïques héracléennes: Acholla (Tunisie), Cartama (Espagne), St-Paul-les Romans (Gaule), RA, 1979, 1, pp. 35-72 et 1979, 2, pp. 269 sq., Pour la mosatque d'Ostie cf. F. SQUARCIAPINO, Fatiche d'Breole, Archeologia Classica, X, 1958, Ereole e le stalle di Augia in un emblema ostiense, pp. 106-111. Pour
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la mosaïque de Liria, cf. G. LIPPOLD, Herakles Mosai'k von Liria, JDAl, XXXVI, 1922, l, pp. 2-12 pl. 1; A. BALIL, El Mosarco de "los trabajos de Hercules" hallado en Liria (Valencia), dans APL, XV, 1978, pp. 265-275. On trouvera dans le premier article cité (RA, 1979, 1 et 2) une importante bibliographie. LUCIEN, Les Fugitifs, 23. DIODORE, IV, 13,3. HOMERE,lIiade, XIX, 132-133 : ergon aeikes. (Voir sur ce point la note 42 supra ). Cf. encore, à l'époque romaine, la mention par SENEQUE, de turpis labor (Hercuiefurieux, 247-248). APOLLODORE, II, 73 (= II,4, 12). Voir encore II, 113 (= II, 5, Il) et II, 122 (= II, 5, 12). DENYS d'HALICARNASSE, IV, 10,7. LUCIEN, Jupiter tragique, 21 cf. p. 441 et note 100. APOLLODORE, II, 89 à 91 (= II, 5, 5). APOLLODORE, II, 104 (= II, 5, 9). APOLLODORE, II, 103 (= II, 5, 9). APOLLODORE, II, 151 (= II, 7, 6). Deux autres emplois concernent un misthos pour lequel il y a surenchère (II, 28 =II, 2,2). Le dernier, enfin est la récompense d'un meurtre commandé (II, 179 II,8,5). PAUSANIAS, V, 1,9-10. C'est ici Augias qui promet à Héraclès une partie de l'Elide "ou toute autre récompense qu'il lui plairait de demander", s'il venait à bout de ce travail; misthos refusé ensuite sous prétexte qu'ayant, pour le faire, détourné le Minyée (et non le Pénée ou l'Alphée donnés habituellement), l'ingéniosité (sophia) avait eu plus de part que l'effort et la peine (ponos ) dans ce travail. Sur le problème du misthos voir E. BENVENISTE, Le vocabulaire des institutions indo-européennes, Paris 1969, l, pp. 163-170; E. Wll..L, Notes sur 1L\C796ç, Hommages à Claire Préaux, Bruxelles 1975, p. 427-438; CI. MOSSE, Les salariés à Athènes au IVème siècle, DHA, 2, 1976, pp. 97-101. PLATON, République, II, 371 e. CI. MOSSÉ, loc. cit., p. 97. Précisons afin de ne pas trahir l'auteur que c'est là une question qu'elle pose, question à laquelle elle répond de façon plutOt négative: "le texte de Platon ne saurait donc être tenu pour une preuve de l'existence d'un "marché du travail" à Athènes au IVème siècle. Platon, certes, utilise le vocabulaire de l'échange, mais la transaction qu'il évoque relève de rapports qui ne sont pas ceux du "marché" au sens abstrait du terme. En fait ce que le texte révèle, c'est la contradiction entre une structure sociale qui est celle de la cité
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grecque, communauté d'hommes libres, et les conséquences de l'irruption dans cette structure de l'échange et de la marchandise" (p. 1(0).
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n y aurait. bien sûr, beaucoup à dire sur ce sujet que nous ne pouvons pas traiter ici. On comparera simplement ce texte de Platon il ceux d'Aristote (note 101) et de Lucien (note 100). Cf. supra p. 442 et note 110 p. 576. Cf. le plan factoriel ln. lexical des trois livres d'Apollodore, réalisé dans le cadre de l'ATP "Polythéisme" sous la direction de M.M. Mactoux, après enregistrement du texte par le Centre Informatique de Liège (voir supra note 73). Les termes lemmatisés ont été retenus jusqu'à la fréquence 10. Pour l'axe horizontal (axe 1) l'inertie est de 56,13%. Pour l'axe vertical (axe 2) l'inertie est de 43,81 %. A droite le vocabulaire est "orienté vers les individus" déterminés par ce qu'ils sont, par leur nature (dieux, mortels), leur sexe, parenté, bref c'est un vocabulaire qui est surtout "reconnaissance et identification". A gauche, au contraire, le vocabulaire est plutÔt orienté vers le mouvement. le déplacement. l'action (M.M. MACfOUX rapport sur l'ATP). Or, totalement isolés il l'extrémité gauche de l'axe (et ainsi surdéterminés), nous avons eu la surprise de trouver les trois termes dont notre étude avait mis en valeur les rapports : ath/os et misthDs d'une part, et très proche d'eux epitatto. Sur l'importance du terme dans le récit d'Apollodore sm Héraclès voir supra. SOPHOCLE, Trachiniennes, 35 ; 70; 357; 831. APOLLODORE n, 73 (= II,4, 12) : II, 131 (= II, 6, 2) ; II, 133 (= II,6,3) ; II, 134 (= II, 6, 4). Les deux autres occurrences concernent l'une Hypsipyle "esclave" de Lycurgue roi de Némée (III, 65 =m, 6, 4) l'autre la servitude d'Apollon il Phères, chez Admète (II, 122 =m, 10,4).
APOLLODORE, l, 118 (= l, 9, 9) et n, 132 (II, 6, 3); deux autres occurrences n'ont qu'un intérêt limité dans le récit (III, 90 =m, 7, 5 et m, 133 = m, Il, 1), la troisième concerne Podarque qui, vendu comme esclave sm ordre d'Héraclès, puis racheté par sa soeur Hésione, prend le nom de Priam (II, 136). 145- M.-M. MACI'OUX, Le système sémantique des termes désignant les esclaves chez Aristophane, Index, 8, 1978-79, pp. 7-47 - Cf. p. 13 : "Si Héraklès est parfois associé aux douloi désignant les personnages comiques, c'est l'Héraklès grotesque, mais jamais le ms d'Alcmène". 146- ESCHYLE, Agamemnon, 1040-1()41. 147- HÉRODOTE, l, 7. Hérodote, il faut le dire, ne mentionne pas 144-
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qu'Héraclès était esclave, mais prétend, curieusement, que les H&aclides descendent du héros et d'une esclave d'Iardanos. La version la plus courante fait d'Omphale, non pas l'esclave, mais la fille d'Iardanos et la reine de Lydie. DIODORE DE SICILE, IV, 31,1 à 8. APOLLODORE, II, 127-133 (II, 6,1-3). APOLLODORE, II, 130-131 (=11,6,2). APOLLODORE, II,131 (= Il, 6, 2). DIODORE, IV, 31, 5. APOLLODORE, II, 131-133 (= Il, 6, 3). DIODORE DE SICILE, IV, 31, 5-8. HOMERE, Odyssée, XXI, 23. PHÉRÉCYDE, Homère Schol. Od., XXI, 23. Pour Phérécyde comme pour Diodore, dans l'Odyssée, et également chez Sophocle (Trachiniennes, 270), ce sont des cavales et non des boeufs qui ont été volées à Eurytos. L'épisode était également raconté par HERODORE (Scholie à EURIPIDE, Hippolyte, 545). DIODORE, IV, 31, 8. OVIDE (Hérol'des, IX, 54) attribue, lui aussi, un fils à Omphale et Héraclès: "le lydien Lamus". PROPERCE, EUgies, III, 11, 17-20. SÉNEQUE, Hercule sur l'Oeta, 371-376. On trouve un développement fort semblable, mais plus critique (il est d'ailleurs mis dans la bouche de Lycos) dans Hercule furieux, 465-471:"Appellerons-nous courageux celui dont les épaules laissèrent tomber la peau du lion, donnée en cadeau à une femme, et la massue; celui dont le flanc fut paré d'une brillante robe (teinte de pourpre) de Sidon? Appellerons-nous courageux celui dont la chevelure hirsute fut humide de nard ; celui dont les mains, glorieuses de leurs exploits, s'agitèrent au son efféminé du tambour, tandis qu'il couvrait son front farouche de la mitre barbare ?". APULÉE, frg. 21. Cette robe est la sandyx, qu'Apulée met en rapport avec la mention d'un Hercule Sandon attestant une forme gréco-romaine de SANDAS, dieu cilicien (cf. notre première partie). ACHILLE TATIUS, Leucippé et Clitophon, Il, 6. "Bonjour ma reine", dit Clitophon à Leucippé, et il lui explique qu'un dieu l'a vendu à elle comme Héraclès à Omphale... Ce dieu, bien sûr, n'est pas, comme elle le pense, Hermès, mais Eros. Voir p. 441 et note 102 p. 576. OVIDE, Hérordes, IX, surtout 25-26. OVIDE, Fastes, Il, 205.
581 165- OVIDE, Héroides, IX, 79-80. 166- Celle-ci peut trouver une explication soit dans le cadre de syncrétismes avec les divinités orientales (en particulier le culte de Melqart dont les prêtres portaient ce vêtement long). On peut aussi voir en elle le souvenir de rites initiatiques (cf. notre troisième partie), voire d'un hiéros gamos primitif (cf. infra). 167- ESCHYLE, Agamemnon, 1040-1041. 168- SOPHOCLE, Trachiniennes, 249-252; cf. encore Trachiniennes 275-276. Cf. aussi PHÉRÉCYDE, Scholie à Homère, Odyssée, XXI, 23, pour qui cette vente rapporte trois talents. Pour DIODORE, elle fut effectuée par un ami d'Héraclès (IV, 31, 5) et pour APOLLODORE, par le dieu Hermès (II, 131 =II, 6, 3). Sur pipraslco voir E. BENVENISTE, op. cit., l, p. 133. 169- SOPHOCLE, Trachiniennes, 254. 170- SOPHOCLE, Trachiniennes, 254-257. 171- Sur cette utilisation du discours mythique pour mieux opposer Grecs et Barbares cf. G. PICCALUGA, La mitizzazione dei Vicino Oriente nelle religioni dei mondo classico, dans Mesopotamien und seine Nachbachn, éd. par HJ. NISSEN, J. RENGER, Berlin, 1982, pp. 573-612. 172- Voir M.-M. MACfOUX, op. cit., Douleia, p. 14 sq. Pour l'emploi de Doulos cf. Eschyle (1041) Apollodore, Diodore et Clément d'Alexandrie, cf. supra. notes 112 p. 576 et 168 p. 581. 173- SOPHOCLE, Trachiniennes, 70; 357 (il s'agit là, précisément des services chez Omphale), mais aussi APOLLODORE (voir note 107). 174- SOPHOCLE, Trachiniennes, 253. 175- APOLLODORE, II,131 (= II, 6, 2). 176- Voir note 156. 177- Le but n'étant pas ici d'établir des comparaisons qui n'auraient aucune valeur historique, nous donnerons seulement une des estimations les plus basses: celle qu'au IVè siècle, Xénophon transmet dans les Poroi. Le prix moyen d'un esclave travaillant dans les mines est évalué alors à 180 drachmes. Ce prix pouvait, bien sQr, varier considérablement avec l'origine, l'lge et surtout la qualification de l'esclave. Un esclave intendant pouvait, par exemple, être acheté un talent. Voir Y. GARLAN, Les esclaves en Gr~ce ancienne, Paris, 1982, pp. 66-77. 178- MoI. FINLEY, La servitude pour dettes, dans Revru: Historiqru: de Droitfrançais et étranger, XLm, 1965, pp. 159-184 et surtout dans Recherches Internationales, 84, 1975, pp. 78·95. L'Onomastilcon ou
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Thesaurus (cf. M.1. FINLEY, 1975, p. 78) date du Ile siècle de notre ère. 179- M.I. FINLEY, /oc. cit., (1975), p. 79. 180- Et pourtant, pour M.I. FINLEY qui sur ce point suit G. HERZOG-HAUSER, R.E., XXVIII, l, 1939, col. 387-88, s. v. Omphale, le mythe serait purement grec et transféré en Lydie probablement au VIème siècle av. J.-C. Sur les pratiques de l'esclavage dans le Moyen-Orient ancien, voir J. MENDELSOHN, Slavery in the ancient Near-East, Wesport-Connecticut, 1978 (2). En particulier, pp. 14 sq. sur la "self-sale". 181· M.I. FINLEY, loc. cit. (1965) : cf. ce texte de Nuzi (III, 299) qui "stipule que, pour trois talents de cuivre, un homme donne son ms qui est tisserand pour cinquante ans et que, si le "débiteur" rompt son engagement, il rendra le cuivre, reprendra son fils et fournira un autre tisserand". 182- M.I. FINLEY, loc. cit., (1975), p. 79 "Si l'un de tes frères ... t'est vendu, il te servira six ans ; mais, à la septième année, tu le renverras libre de chez toi... Mais si ton esclave te dit qu'il ne veut pas sortir de chez toi, parce qu'il t'aime toi et ta maison, et parce qu'il se trouve bien avec toi, tu prendras un poinçon, tu lui perceras l'oreille contre la porte, et il sera pour toujours ton serviteur", Deutéronome, 15, 12-17. 183- Cf. B. LASKER, Human Bondage in Southest Asia. Chapel Hill 1950, p. 114 (cité par M.I. FlNLEY, /oc. cit., (1965), p. 166 et note 31); cf. surtout K. MARX qui montre bien à quel point, dans les sociétés archaYques, le travail reste, en quelque sorte, intégré à la personne même du travailleur assujetti à la productionn par la contrainte extra économique (Formen ... op. cil.. Cf. le nO 84 des Recherches Internationales: Formes d'exploitationn du travail et rapports sociaux dans l'Antiquité classique, en particulier la
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présentation de J. ANNEQUIN, F. FAVORY, M. CLAVEL-LÉVEQUE, pp. 3-44). W.D. JORDAN, The emergence of Slavery in anglo-american unthinking decision, enslavement of negroes in America, in Slavery in American Society, Lexington, 1969, p. 3. 1. MEYERSON, Le travail, fonction psychologique, dans, Le Travail, les métiers, l'emploi, vol. collectif, Paris 1955, p. 3. Ceci après une époque où chacun s'attachait à rechercher "la vraie nature" d'Héraclès, et, bien sûr, la retrouvait différente. Pour ne pas citer ici ces théories sur l'origine du héros, je renverrai au prologue de cet ouvrage.
583 187- J. SVENBRO, La parole et le marbre, aux origines de la poétique grecque, Lund, 1976, p. 14. Les travaux de M. PARRY sont accessibles dans l'édition qu'en donne A. PARRY, The making of Homeric Verse, Oxford 1971. Cf. aussi V. RADLOFF, Proben der Volkliteratur der niJrdlichen tilrkischen Stllmme, vol. V, Der Dialect der Kara-Kirgisen, St Petersburg 1855. 188- Cf. M. AUGÉ, Génie du paganisme, Paris 1982 , p. 147: "les héros, en cela différents des dieux, parlent moins de l'ordre du monde de la nature - que de la naissance de la société· de la culture". 189- L'expression est celle que M. DELCOURT (Légendes et cultes des héros en Grèce, Paris 1942, note 1 p. 135) applique à l'ethnologie et à l'histoire. 190- PAUSANIAS, vrn, 32. Ces fonnes "carrées" sont pour Pausanias (beaucoup plus sûrement que pour les historiens de l'Antiquité !) gages de l'archaIsme des statues. Notons cependant que si l'on doit mettre ces représentations, vues au pied de la colline qui portait le temple d'Artémis et d'Asclépios, en rapport avec la cité de Mégalopolis, cet "archaIsme" devient très relatif... Il est vrai que cette colline étant simplement située dans la région, l'argument n'est pas absolu. 191- Dans la traduction LOEB, Pausanias, Description of Greece. 1961, IV, p. 65, Cf. aussi, supra, notre analyse d'ergon. 192- On remarquera à ce titre la présence d'Ilithye "sanctifiant" l'accouchement. Une fois de plus s'affrrme que le seul ponos (ici même ergon ), la seule seule épreuve qualiftante des femmes est bien l'accouchement (On verra à ce sujet N. LORAUX, loc. cit., 1982, p. 175). 193- Cf. notre troisième partie. Cf. aussi Nicole LORAUX, "Le lit, la guerre dans L'homme 1981, XXI, 1, p. 37-67 (sur Héraclès, pp. 57-67) et du même auteur: Le surmâle et le féminin, Revuefrançaise de psychanalyse, 4,1982, pp. (f}7-729. 194- PLUTARQUE, Questions grecques, 58. D'autres exemples peuvent être invoqués: en Grèce propre, celui d'Argos ou de Sparte (PLUTARQUE, Lycurgue, XV, 4·7). On peut encore invoquer les Œtes d'Héra à Samos. Sur ces pratiques, cf. FRAZER, Adonis, Attis, Osiris, Londres 1914, n, p. 253 sq. et COOK, CR, XX, 1906, pp. 306 sq. etc... 195- HICKS ET PATON, Inscr. de Cos. pp. (f}-71, 36c et R. D'ARESTE, B. HAUSSOULLIER et Th. REINACH, ~ecueil des Inscriptions juridiques grecques, 2ème série, Paris, 1898, p. 98. L'inscription est
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citée par A. de RIDDER, Héraclès et Omphale, RA. XXXVI, 1900, pp. 99-114. PLUTARQUE, Questions grecques, 58. Voir encore Iliade XIV,255. Cf. DIBBELT, Quaest. Coae Mythologae, Gryphisw, 1891. Cf. encore la représentation d'Hercule sur l'autel de Lucius Munius à Rieti (M. VERZAR BASS, L'ara di Lucius Munius a Rieti, MEFRA, 97, 1985, 1, pp. 215-223 ; p. 303 (fig. 3) pour le dessin qu'au XVlè s. Pirro Ligorio a laissé d'Hercule). Pour M. LAUNEY, la légende de la naissance de Théogénès à Thasos serait le souvenir d'un hieros gamos lié au culte d'Héraclès. J. POUILLOUX, op. cit., p. 66, partage plutôt le scepticisme de A.D. NOCK (AJA, 1948, p. 298). L'hypothèse cependant se renforce des nombreux indices attestant de l'importance du thème, tant dans le culte que dans le mythe d'Héraclès. On se reportera sur ce point à notre troisième partie. Cf. par exemple E.G. SUHR, Herakles and Omphale, AJA, 57,1953, 4, pp. 251-263. Cf. aussi A. DE RIDDER, loc. cil., pp. 112-114. A. DE RIDDER, Un bronze chalcidien sur l'Acropole, BCH, XX, 1896, pp. 401-422 et planches 1 et 1 bis. Voir aussi J.-R. JANNOT, Décor et signification, à propos d'un trépied de Vulci, RA, 1977, 1, pp. 3-22 qui rapproche ce bronze d'un groupe de trépieds étrusques datés des dernières années du Vlème siècle ou du début du Vème siècle. L. SAVIGNONI, Monumenti antichi, VII, p. 377 sq. planches VIII et IX. A. DE RIDDER, loc. cit.RA, pp. 99-114. A. DE RIDDER, loc. cit. (RA) , pp. 99-114. Notons que J.-R. JANNOT (loc. cit. ) interprète le groupe comme représentant Héraclès et Héra. Pour P. ZANCANI-MONTUORO, Un mito italiota in Etruria, ASA, 1950, p. 85., la scène représenterait plus précisément le héros défendant Héra contre les Silènes, telle qu'elle est sculptée à l'Héraion du Silaris, inspirée probablement par une légende de Stésichore d'Himère. Rappelons que pour W. POETSCHER (note 256 p. 87) le mariage d'Héraclès avec Hébé serait un souvenir de l'union primitive d'Héraclès et d'Héra dont elle serait un doublet Cf. supra notes 197 et 203. HÉRODOTE, l, 7. Cf. H. USENER, GtJtternamen. Versuch einer Lehre von der religitJsen Begrïffsbildung, Bonn, 1896, p. 34 8 et aussi E.G. SUHR, loc. cit., pp. 259-260.
585 207- Cf. U. VON WILAMOWITZ-MOELLENDORF, Herakles, 2e éd. l, p. 75, sq. suivi, par exemple, par M.I. FINLEY, (loc. cit., p. 160) qui pourtant s'attache à montrer les parallèles orientaux de la servitude d'Héraclès. Pour G. HERZOG-HAUSER, R.E., XVIII, 1 (1939), col. 387-388, S.v. Omphale, la légende fait appel à de nombreux "motifs" asiatiques, mais le mythe lui-même ne trouve pas ses origines dans cette même Asie occidentale. 208- Déjà noté par A. DE RIDDER, loc. cit., (RA) pp. 110-111. 209- PLUTARQUE, Questions grecques, 58. 210- Pour Delphes, cf. DIODORE, XVI, 24, 3; pour Erythrées, PAUSANIAS, VII, S, 5-8. Ce dernier exemple est particulièrement intéressant: on apprend comment les habitants d'Erythrées fondèrent le culte d'Héraclès en ramenant sa statue cultuelle, venue par mer de Phénicie, échouée et disputée entre leur cité et celle de Chios. Le songe d'un pêcheur avait en effet prescrit de ramener le radeau grlce à une corde faite de chevelures féminines tressées. Mais, comme seules les femmes thraces - tant celles qui étaient esclaves que celles qui, librement, habitaient au pays - avaient consenti à ce sacrifice, elles eurent seules, ensuite, le droit de pénétrer dans le sanctuaire du dieu.. L'aition cultuel présente des thèmes assez analogues à celui de Cos et, en particulier, le même entrecroisement du thème initiatique (à Cos : l'échange des vêtements ; à Erythrées l'offrande de la chevelure) et du thème de l'exclusion - voire de la servitude -, On notera enfin que, dans les deux cas, le culte lui-même est donné comme peu grec, le vêtement des prêtres à Cos, les rapports avoués avec la Phénicie à Erythrées invitent fortement à envisager des rapports étroits avec le culte du Melqart tyrien. Cf. encore F. DE POLIGNAC, La naissance de la cité grecque, Paris 1984, qui utilise l'aition rapporté par Pausanias pour étudier le thème de l'affrontement pour la possession d'un lieu sacré placé "au milieu". Le Cap Mesate (Cap du milieu) où était échouée la statue du culte, est, en effet, situé entre les cités d'Erythrées et de Chios. 211- On peut, par exemple, signaler le rOle joué par Héraclès dans la manumission des esclaves. Cf. A. CALDERINI, La manomiSsiOM e la condizioM dei liberti in Grecia, Milan, 1908, p. 108. 212- HOMERE, Iliade, 124 et 126. 213- HOMERE,IUade,133. 214- HÉRODOTE, IX, 2f>-27. 215- TIlUCYDIDE, l, 9, 2. "Atrée... reçut la royauté de Mycènes, ainsi que tous les pays où régnait EUIYsthée". On notera l'étendue d'un royaume
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qui ne se limite pas à Mycènes. B. SERGENT, La liste de Kom el Hétan et le Péloponnèse, Minos, 1977, pp. 126-173. L. GODARD, Minoici e Micenei: precolonizzatori e precolonizzati, colloque "Momenti precoloniali nel Mediterraneo antico ", Rome, Mars 1985, à paraître. Nous avons - après d'autres - eu l'occasion de rappeler ces rapports étroits qui très certainement unissent Héra et Héraclès avant qu'ils ne les opposent, et ce, à la fois dans l'étymologie et dans le mythe. Cf. notre prologue. Cf. supra, pour l'image primitive d'un Héraclès maitre des fauves, Prologue pp. 61-62 et pour une étude des rapports du héros et du sacrifice, le deuxième chapitre de cette quatrième partie. Ce qui autorise les célèbres railleries de LUCIEN, Jupiter tragique, 21. Cf. les travaux de B. SERGENT, déjà cités, en particulier dans Minos, 1977, pp. 126-173. Cf. M.D. PRETRUSEVSKI et Ph. ILIEVSKI dès 1958 dans Ziva Antika, VIII, pp. 265-278; et B.D. EPHRON, Minos, VII, 1961, pp. 78-84. Cf. encore les articles de M.D. PRETRUSEVSKI, dans l'Annuaire de la Faculté, Université de Skopje, XVI, 1964, pp. 152-196 et Ziva Antika XV, 1965, p. 12; cf. enfin la mise au point de M. LEJEUNE, dans Mémoires de Philologie mycénienne, III, pp. 181-199. M. LEJEUNE, loc. cit., p. 199. M. LEJEUNE, loc. cil., p. 198. Cf. M.D. PRETRUSEVSKI dans Annuaire ...(loc. cit.) 1964 et Ziva Antika, 1965. Autre exemple de sa brutalité: dans l'Iliade, il blesse les dieux; Homère le juge "brutal" (392), "misérable et violent" (403)... Il est capable d'accomplir, "sans s'en inquiéter, des actions indignes" (404). HOMERE, Iliade, V, 392 ; 403-404. APOLLODORE, II,4, 9. Le lion de Némée était pour SOPHOCLE "le fléau des bouviers" (Trachiniennes, 1092), la biche, pour EURIPIDE, "un fléau pour les paysans" (HéracMs, 377). Pour APOLLODORE, le sanglier "ravageait toute la Psophide" (II, 5, 4) et l'hydre "ruinait les champs et les troupeaux". Quant aux oiseaux du lac Stymphale, si PAUSANIAS les affmne anthropophages (VIII; 22,4), ils dévastent, pour DIODORE, les récoltes des contrées voisines (IV, 13,2). APOLLODORE, II, 118 (= II, 5, Il).
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Cf. J. BAYET, Les origines de l'Hercule romain, Paris, 1926, p. 140. Depuis J. BAYET les découvertes archéologiques ont attiré l'attention sur ce sanctuaire où existait, avant le temple du Vème siècle, un édifice archaïque avec autel intérieur de plan beaucoup plus ramassé, où l'on a retrouvé de nombreux ex-voto (dont un taureau du géométrique final). Signalons encore que, dans l'enclos sacré, ont été mis au jour des vases mycéniens. Cf. J. TOurAIN, Observations sur le culte d'Hercule li Rome, REL, 1928, pp. 200-212. Cf. aussi notre article, De l'Héraclès grec à l'Hercule romain, Concilium Eirene, Prague 1983, l, pp. 267-273. Ou encore ici même notre épilogue. Cf. F. Van WONTERGHEM, Le culte d'Hercule chez les Paeligni, AC, XLII, 1973, l, pp. 36-48. Cf. infra., les rapports d'Héraclès et du sacrifice, cf. aussi J.-L. DURAND, F. LISSARAGUE, Héros cru ou hôte cuit: histoire quasi cannibale d'Héraclès chez Busiris, Image et céramique grecque, Rouen 1983, pp. 153-167 et discussion pp. 180-181. APOLLODORE, n, 73 (= II, 4, 12). DIODORE, IV, 9,4 li 6. Pour PINDARE, c'est Tirésias qui annonce le destin d'Héraclès (Néméennes, l, 55-75). SOPHOCLE (Trachiniennes, 824-826) évoque pour sa part "les prédictions de l'antique oracle". Cf. Istvan HAHN, Dieux et héros comme esclaves et mercenaires, Index, 10, 1981. p. 13 sq.. L'auteur cependant gomme les états successifs du mythe, dans la mesure où il fait de tous les épisodes disant la servitude des dieux et héros la même conséquence d'un meurtre.
Cf. Istvan HAHN,loc. cit., p. 16. APOLLODORE, II, 64 (= n, 4, 9). n est vrai qu'Apollodore rapporte qu'Héraclès a dû se présenter devant les bibunaux, et se défendre en invoquant la loi de Rhadamante. 239- G. GLOlZ,La solidmité de lafamille dans le droit crintiMl en Gr~ce. Paris 1904. 240- G. GWTZ, op. cit., pp. 50-81. 241- On pourrait trouver là, d'ailleurs, une confirmation des thèses de G. GLOTZ, sur l'étymologie de poiM. Contte ceux qui veulent retrouver dans ce ttmle un radical exprimant la pureté et qui, rapprochant nüp et no\vit comme ils rapprochent PU"lS, punire, poe1ltJ en latin, estiment que "dès le berceau des langues indo-européennes" poin~ serait ainsi "la punition comme moyen de purification", il fait valoir 237238-
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que "dans toute l'épopée homérique, on ne trouve pas trace de cette conception mystique" et que tous les emplois du tenne l'apparentent plutôt au radical -Tl qui "désigne le fait de fixer un prix, priser, estimer... et le fait de donner un prix, payer, dédommager". op. cit., pp. 105-106. On notera que cette interprétation s'accommode mieux du fait que, dans l'exemple héracléen, la purification existe de façon indépendante, avant la compensation demandée au héros. LUCIEN, Dialogue des Morts, 11 (= 16), Diogène à Héraclès: "Dis-moi, beau vainqueur, tu es mort? Et moi qui, sur terre, t'offrais des sacrifices comme à un dieu!" Tout le dialogue joue ainsi sur la présence du héros à la fois chez les morts et chez les dieux ; des deux, lequel est le véritable Héraclès, lequel est son ombre (ou son image) ? DIODORE, IV, 8, 1. E. BENVENISTE, op. cit., 1, p. 164. E. BENVENISTE, op. cit., 1, p. 165. HOMBRE, Iliade. X, 304 ; Odyssée, XVIII, 358. Cf. sur ce point, aussi bien E. BENVENISTE, op. cit., p. 165 que E. WILL, loc. cit., (1975) pp. 427-438. D'après les Mémorables de XÉNOPHON, II, l, 21-34. Notons cependant que le thème est peut-être plus ancien (voir infra ). Pour AJ. FESTUGIERE, (L'idéal religieux des Grecs et l'Evangile, Paris 1932, p. 81) l'origine pythagoricienne de l'Apologue semble bien assurée. Cf. encore Ch. PICARD, Représentations antiques de l'Apologue dit de Prodicos, CRAI, 1951, p. 310 sq. ; RA, 1952, XLII, pp. 10-41. et M. DETIENNE, Héraclès, héros pythagoricien RHR, CLVIII, 1960, pp. 19-53, spécialement p. 38 et note 2. XÉNOPHON, Mémorables, II, 1,21. Cf. notre troisième partie. XÉNOPHON, Mémorables. II, 1,23. XÉNOPHON, Mémorables, II, 1,25. On rapprochera la fonnule de celle du choeur, qui, dans l'Hercule furieux de SENEQUE, oppose "l'agréable oisiveté" d'Eurysthée à l'activité d'Héraclès qui se fatigue à la tâche (526 sq .). Cf. G. GUSDORF, Mythe et métaphysique, Paris, réed. 1984 (1ère éd. 1953), p. 82. JAMBLIQUE, Vie de Pythagore, 50. Cf. M. DETIENNE,loc. cit., p. 22 et note 2. Cf. A. DELATTE, Essai sur la politique pythagoricienne, p. 39. Cf. encore M. DETIENNE, loc. cit., p. 46 notes 1 et 2. Sur l'importance
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de cette conception "philosophique" d'Héraclès chez les Cyniques, voir DIOGENE LAERCE, Vie. doctrines et sentences des philosophes illustres, VI, les Cyniques. Cette influence est reconnue sur Diogène
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"qui prétendait vivre comme Héraclès" et, comme lui, accordait une valeur primordiale "aux exercices physiques qui acheminent vers la vertu" et li "l'askesis" qui permet li l'homme de se surpasser: c'est encore ce qu'enseignait Antisthène dans son Hercule en accm1- ajoute Diogène Laen:e - avec les stoiciens. n faudrait enfm citez l'exemple de Cléanthe (livre VII, Les Stolciens), qui, d'abord pugiliste, se mit li l'école de Zénon, se rendit célèbre "par son amour du travail", et mérita, pour cette raison, le nom de "Second Hercule". M. DETIENNE, loc. cit., p. 53. Raoul LE FEYRE, Le roman d'Hercule dans le Recueil des hystoires de Troyes, écrit vers 1464. cf. M.-R. JUNG, Hercule dans la littérature française au XV/brie si~cle, Thèse Lettres, 1966, p. 26. Hercule, en effet, est l'un de ces symboles qu'emprunte li l'Antiquité l'imagerie révolutionnaire. La représentation ci-contre, que je dois li R. CHAGNY, est le logotype de la ville de Lyon, devenue, en l'an II, Ville Affranchie. Dans certains cas le symbolisme est plus précis encore, qu'Hercule apparaisse gardien de la Déclaraûon des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (comme sur une estampe anonyme - conservée au musée Carnavalet) ou qu'il devienne - plus explicitement encore - "une pezsonnification de la force populaire et donc du peuple lui-même", comme l'écrit M. VOVELLE, La Révolution Française, Images et Récits, Paris 1986, m, p. 228 (plusieurs représentations illustrent ce propos: III, p. 221; 227; 228, 229 et IV p. 140-141, 168-169 . Cf. encore le texte des pages 214-215 (III). SÉNEQUE, Hercule SUT l'Oeta, 61-62. Héraclès vient, il est vrai, de rappeler tous les travaux qui lui furent ordonnés, pour ajouter, d'ailleurs, "qu'ils lui ont été aisés". Cf. supra, le commentaire des analyses de J.P. Vernant et son explication marxiste de l'absence d'un mot unique qui désignerait le concept de tJavaîl. Ceci parce qu'on a souvent "tiré" en ce sens les analyses de J.P. Vernant et considhé comme inhérente aux "structures mentales" des Grecs ce qui devenait leur prétendu dédain au tJavaîl. R. FIRTH, Primitive polynesian EcollOmy, Londres 1939, cf. particulièrement p. 110. Ce phénomène est, depuis, largement confmné par les études des anthropologues.
590 Ce développement est emprunté à la note 53 p. 26 de R. DESCAT, op. cit.. 263- N. NOUGAYROL, Journal de Psychologie, 41 (1948,1) discussion, p.50. 264- G. GUSDORF, Mythe et métaphysique, Paris 1984 (2), p. 77. 265- Ils affinnent l'existence d'une unité entre "a) la divinité, b) le despotenous préférons, quant à nous, le terme de souverain -, c) les fonctions politico-juridiques, celles d'organisation (normatives et répressives) de l'Etat "tributaire", d) le fonctionnement du cosmos, e) la fertilité des champs... c'est une telle unité qui s'exprime par exemple dans les préceptes de Sehetebibré (Ancien Empire) où il est dit que le roi "plus que le Nille plus riche en eau fait reverdir le pays" ou encore dans le code du roi accadien du XIXème siècle, Lipit-Ishtar qui afftrme que celui qui enfreindra la loi verra "le pays s'écrouler" (cf. Ion BANU, La formation sociale "asiatique" dans la perspective de la philosophie orientale antique, dans Sur le mode de production asiatique, CERM, Paris 1969, pp. 285-307, singulièrement pp. 290-291). Voir aussi les travaux de P. BRIANT, en particulier, Forces productives, dépendance rurale et idéologie religieuse dans l'Empire achéménide, dans Religions, Pouvoirs, Rapports sociaux, Paris, 1980, pp. 16-68. 266- A. MELE a étudié de façon fort convaincante cette dépendance "normale et collective" des communautés rurales à l'égard du palais (alors que le concept de liberté, lorsqu'il est exprimé dans les tablettes, est celui d'une liberté conçue toujours comme un privilège et désignée comme une autonomie par rapport au palais mycénien) : Esclavage et liberté dans la Société·mycénienne. Colloque de Besançon, 1973, pp. 115-155. 267- Voir l'article de J. ANNEQUIN, Comparatisme comparaison: ressemblances et hétérogénéités des formes d'exploitations esclavagistes. Quelques réflexions, DHA, XI, 1985, pp. 639-672. 268- F. BADER, Sémiologie des travaux d'Héraclès, dansVisages du destin dans les mythologies, Mélanges J. Duche,,"n. Actes du colloque de Chantilly, 1980, Paris 1983, pp. 55-67. Le thème est repris dans Héraclès et les points cardinaux, Minos, XVIII, 1983, pp. 219-256. 269- F. BADER, loc. cit., p. 57. 270- F. BADER, loc. cit., pp. 61-64. 271- Sur ces termes, empruntés à G. DURAND, voir notre prologue; le mythe/mode d'emploi. 272- S. AMIN, Le développement inégal, Essai sur les formations sociales du capitalisme périphérique, Paris 1973, p. 19. 262-
591 273-
M. GODELIER, Le marxisme dans les sciences humaines, Raison présente, XXXVII, p. 74. Pour le statut de l'idéologie, voir l'ensemble de l'oeuvre de M. GODELIER; le numéro spécial consacré à l'idéologie par la revue L'Homme, XVIII, Juill. Déc. 1978 (avec en particulier les contributions de M. AUGE et de M. GODELIER) ; voir aussi E. GUIBERT-SLEDZIEWSKI, Comment penser l'idéologie? La Pensée 1983; M. VOVELLE, Idéologies et mentalités, Paris, 1982...
NOTES DU DEUXIEME CHAPITRE
274- G. BATAILLE, Théorie de la religion, op. cit., p. 66. 275276-
APOLLODORE, II, 112 (= II, 5, 10). W. BURKERT, Le mythe de Géryon: perspectives préhistoriques et tradition rituelle. Il mito Greco, op. cit., pp. 474-475. 277- Cf. T.J. DUNBABIN, The Greeks and their Eastern Neighbours, Londres, 1957, p. 78 pour la datation. Cf. surtout F. BROMMER, op. cit., (Herakles... ) pp. 39-42. M. ROBERTSON, Stésichorus and the vase-paintezs, The Classical Quaterly, XIX, 1969, pp. 207-221 et l'article de L. TIBERI, loc. cit., auquel nous empruntons notre représentation 31,1. Pour M. ROBERTSON,la pyxide date du milieu du VIIème siècle. 278- N° 202. Cf. A. RUMPF, Chal/ddische Vasen, Berlin/Leipzig, 1927, pp. 8-9 et 10-11. tables VI-IX et VIII-XV. Cf. ici fig. 31-2. 279- Cf. PAGE, op. cit., P.M.G, frg. 9, LGS, 56. 280- Pour une bibliographie détaillée de ces représentations, et la discussion suscitée par ces vases dits "chalcidiens", voir M. ROBERTSON,loc. cit., notes 2 et 3 p. 208. 281- N° 2620 (J. 337): la coupe est datée de 520-510. Cf. Beazley, ARV2, 16 et 17. (cf. notre fIgure 32). 282- PAUSANIAS, III, 18, 13. Rien n'indique, en revanche, que, sur le coffre de Cypselos ("sur le quatrième cOté, en tournant, vers la gauche"), soit figuré autre chose que "le combat d'Héraclès contre Géryon, représenté avec trois corps réunis" (pAUSANIAS, V, 19, 1), comme le laisserait supposer la reconstitution d'Ho SlUART JONES (The chest of Kypselos, JR.S., XIV, 1894, pp. 30-80) qui reproduit le vase chalcidien mentionné supra. 283- Cf. J.L. MYRES, Handbook of the Cesnola Collection, 1914, n°
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père" (Iliade II, 627-630), Homère paraît avoir connu cette version du mythe. THÉOCRITE, Idylle. XXV. Cette idylle, qui ne figure que dans quelques manuscrits, n'est pas donnée dans l'édition des Belles Lettres (E. LEGRAND, Bucoliques Grecs, l, Thlocrite, Paris, 1925). Le texte, d'ailleurs, pose problème; on a voulu y voir les fragments d'une oeuvre consacrée à Héraclès; d'aucuns ont même évoqué à leur sujet Pisandre de Rhodes (REISIŒ), ce qui parait pour le moins douteux; voir à ce sujet la notice de Ph. H. LEGRAND, op. cit., pour qui la facture de l'idylle est hellénistique et ne diffèle "en rien d'essentiel" d'une oeuvre de Théocrite. Notre uaduction est fondée sur l'édition anglaise, avec traduction et commentaire de A.S.P. GOW, vol. 1, Cambridge, 1952. Pour la description des troupeaux voir les vers 85 à 95. Selon Lucien (Pseudomantis, 1), Augias aurait eu trois mille boeufs. APOLLODORE, II, 106 = II, 5, 10. Nous aurons, bien sûr, à revenir sur ces pâbJrages où paissent aussi bien les boeufs de Géryon que ceux d'Hadès. Selon POMPONIUS MÉLA (II, 5) qui rapporte l'anecdote de la pluie de cailloux sur la Crau, ces deux chefs s'appelaient Albion et Bezgius. Cf. encore ANTONINUS LIBERALIS, Recueil de mJtamorpltoses, qui rapporte que "les Celtes ont combattu Héraclès, pour lui enlevez les génisses de Géryon, d'après NICANDRE et ATHANADAS". D'après M. LE LANNOU, cité par L. GALAND, Le vol de bétail dans le monde méditerranéen, Gli interscambi cwturali e socio-economici
Jra l'Africa settentrionale e l'Europa meœterranea, Actes du Congris International d'Amalfi (1983), éd. L. SERRA, Naples, 1986, pp. 369-378. C'est à L. Galand que nous empruntons les deux exemples
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suivants. Cf. L. GALAND, /oc. cit., p. 371. HOMERE, Odyssle, XIV, 1()()...108. HOMERE, Iliade, XI, 669-761. DIODORE DE SICILE, IV, 36, 3. Nélée exigea ce présent de ceux qui recherchaient sa fille en mariage. C'est. on le sait, Mélampous qui obtint les boeufs d1phiclès pour son treze Bias qui les remit ft Ntl6e. Cf. aussi APOLLODORE qui précise que ces boeufs d'Iphiclès se trouvaient à Phylaque. APOLLODORE, II, 54-56 = II, 4, 6 (le passage est. dit le scholiaste, tiré d'Hérodore). Cest pour rejoindre l'un des boeufs qui s'&ait 6chappé qu'Amphitryon, jetant une massue, frappe accidentellement Electryon
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et le tue. Sous ce prétexte, Amphitryon est chassé de toute l'Argolide, des royaumes de Mycènes et de Tirynthe, et doit s'exiler à Thèbes. Dans le Bouclier d'Héraclès, il est déjà question de la mort d'Electryon à la suite d'une dispute éclatée au sujet des boeufs. On se reportera, sur ce point, au premier chapitre de notre quatrième partie. Suivant HOMBRE, PHÉRÉCYDE (Scholie à HOMBRE, Odyssée, 21-23), SOPHOCLE (Trachiniennes, 270) et DIODORE DE SICILE (IV, 31, 5-8), c'étaient des juments et non des boeufs que recherchait Iphitos. Hymne homérique à Hermès, 68-141. Cf. Norman O. BROWN, Hermes the thief. New-York, 1947. Citons encore le vol des troupeaux du soleil dans l'Odyssée, XII, 339. Cf. B. LINCOLN, The Indo-European cattle-raiding myth, History of religion. XVI, 1976, pp. 42-61 ; P. W ALCOT, Cattle-raiding, Heroie Tradition and Ritual : The Greek evidence, History of religion. XVIII, 1979, pp. 326-351. Cf. B. LINCOLN, loc. cit., pp. 62·65 qui donne de nombreuses références. Cf. encore, pour une étude du vocabulaire: F. BADER, De 'protéger' à 'razzier' au néolithique indo-européen : phraséologie, étymologies, civilisation, Bulletin de la Société de linguistique de Paris, 73, 1978, pp. 103-219. Il faut, sur ce point, se reporter à notre prologue pp. 58 sq. et à notre troisième partie pp. 393 sq.. J. BAYET, Origines, ... op. cit., 1ère partie: l'Italie héracléenne du Vlème au IVème siècles. PAUSANIAS, V, 14, 1. PAUSANIAS, V, 13,8. Pour S. REINACH, cette Héra Lacinienne, protectrice du bétail, était peut-être, à l'origine, une déesse-vache (RHR, 1914, p. 51). Cf. aussi J. BAYET, op. cit., p. 410. Cf. enfin supra note 230 et infra note 498. Nous reviendrons sur ce mythe dans notre épilogue: De l'Héraclès grec à l'Hercule romain. Voir infra, notre épilogue. DENYS D'HALICARNASSE, Antiquités romaines. l, 40 et DIODORE DE SICll.E, IV, 21. Cf. J. TOUTAIN, Observations sur le culte d'Hercule à Rome, REL, 1928. pp. 200-212, singulièrement p. 208. SERVIUS, Commentaire sur l'Enéide, VITI, p. 83. ATHÉNÉE, Deipnosophistes, IV, 153, c et d.
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PLUTARQUE, Sylla, 35 et Crassus, 12. DIODORE DE SICll.E, IV, 21,4. MACROBE, Saturnales, III, 6, 11. Sur le banquet on lira les articles de P. SCHMITT-PANTEL, Banquet et cité grecque. Quelques questions suscitées par les recherches récentes, MEFRA, 97, 1985, 1, pp. 135-158; J. SCHEID, Sacrifice et banquet Il Rome: Quelques problèmes, ibid, pp. 193-206 et O. MURRAY, Symposion and Mannerbund, Concilium Eirene XVI, op. cit., 1, pp. 47-52. J. TOUTAIN, loc. cit., donne de nombreux témoignages de ce culte dans la région de Sulmona. F. VAN WONTERGHEM, loc. cit., pp. 36-48. On trouvera une étude détaillée des sources de la légende de Cacus dans le livre déjà ancien de P. HUVELIN qui l'appréhende sous l'angle du droit: Etudes sur le Furtum dons le tris ancien droit romain, Lyonl Paris, 1915 (il existe une seconde édition Rome, 1968) chapitre VII: la chasse au voleur vers le début du VIIème siècle U.C. Pour une vue plus récente, cf. A.M. ADAM, Monstres et divinités bicéphales dans l'Italie primitive, MEFRA, 97, 1985, pp. 577.fn}. SERVIUS, Commentaires sur l'Enéide, VIII, 190. SERVIUS, Commentaires sur l'Enéide, VIII, 203. Pour P. HUVELIN (pp. 309-310) ces Libri Pontificalium sont l'oeuvre "d'un auteur du nom de Veranius, qui vivait Il la fin de la République". Il aurait emprunté lui-même l'histoire de Cacus Il un écrivain antérieur, et les deux versions rapportées par l'Origo gentis Romanae seraient Il peu près contemporaines. P. HUVELIN, op. cit., p. 309. S. FERRI, Mosbi inferi delle stele daunie, RAL, XXIV, 1969, pp. 133-153 et G. PUCCIONI, Hercule Trikaranos nell Origo gentis Romanae, Scripta Untersteiner, 1970, pp. 235-239. Nous reviendrons sur ce sujet dans notre épilogue. LUCIEN, Icaroménippe ou le vqyage au-dessus des nuages, 27. CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Protreptique, VII, 76, 5. Cf. la description que donne le poète comique ÉPICHARME, dans son Busiris, d'après ATHÉNÉE, 411, a et b. Voir supra p. 301 et note 392 p. 345. ION, Omphale, T.G.F., 737 d'après ATHÉNÉE, X, 411, b. PINDARE, P L.G.• 457 d'après ATHÉNÉE, X, 411, c. Cf. aussi, infra note 341. Voir A. PUECH, Pindare, IV, Paris, 1923, fragments d'origine incertaine, nO 48 : "Ils .placèrent sur les charbons les corps encore chauds des deux boeufs et les faisaient cuire au feu ; alors
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j'entendis les viandes bruire et craquer sourdemment les os". ATHÉNÉE, X, 411, c. La mouette est dite ~oucpayoç Cf. encore ATHÉNÉE IV, 164, b. pour la gloutonnerie d'Héraclès, qui, parmi les livres, lui fait choisir un traité de cuisine. Cf. ATHÉNÉE, XIV, 656, b, qui cite STRATTIS dans Callippides (cf. aussi ARISTOPHANE, Grenouilles, 549-578) et ARCHIPPOS dans Héraclès se marie. ATHÉNÉE, VII, 276, f. TO\)ç ~6t:la '&aQ{ovTaç oTaç "'T1V 'HpaxAliç ; Héraclès est dit ~ouQo{vaç (Anthologie de Planude, 123), BOUcpayO(" (Anthologie Palatine, IX, 59), Bal1aAT1cpayoç (Anthologie Palatine, IX, 237). Suivant PINDARE, cité par PHILOSTRATE, Imagines, II, 24. ARISTOPHANE, us Grenouilles, 506. ATHÉNÉE, X, 412, a et b. ELlEN rapporte aussi cette histoire (Var. Hist., l, 24). PAUSANIAS, V, 5,4. PLUTARQUE, Questions grecques, 58. HOMERE, Iliade, XIV, 250 et XV, 28. APOLLODORE, II, 137 = II, 7, 1. L'anecdote était déjà connue de Phb'écyde et de Pindare. Cf. supra, notre troisième partie. APOLLODORE, II, 118 = II, 5, 11. Cette légende est également rapportée par ORIGENE, Contre Celse, VII, 54, 1-9, par LACTANCE, Des Institutions divines, l, 21. CONON, qui en fait état dans ses Narrations (XI) transmises dans la Biblioth~que de PHOTIUS, 186 (JACOBY, F. Gr. Hist., 26 F Il), ajoute qu'Héraclès avait avec lui son jeune fils Hyllos, ce qui, plus encore que dans les autres versions, rapproche l'épisode de celui qui, chez les Dryopes, oppose Héraclès à Theiodamas. PHILOSTRATE, Imagines, II, 24. Il en est de même pour AMMIEN MARCELLIN, XXII, 12,4. Cf. aussi la note précédente. CONON, Narrations, XI, cf. note 349. APOLLODORE, II,153 = II, 7,7. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, l, 1211-1221. SCHOLIE à APOLLONIOS, l, 1212. D'après E. CLAVIER, (Bibliothèque d'Apollodore, op. cit., II, pp. 320-321) le scholiaste s'inspirerait "peut-être" de PHÉRÉCYDE. Aucune preuve ne vient, hélas, appuyer cette affmnation, si ce n'est, peut-être, la mention des Dryopes que donnait PHÉRÉCYDE (F. Gr. Hit 3 F 19) : un
A1')CJTP1XOv f9vaç.
597 Cf. E. CLAVIER. Bibliolhique d'Apollodore, op. cil.• n. p. 287. Dans le fragment 7. 19 sq., le poète demande li la muse pourquoi les deux sacrifices s'accomplissent sous les injures; dans les fragments 22 et 23 la muse répond sur le point du sacrifice lindien. Cf. R. PFEIFFER, Kallimachossludien; cf aussi J.H. CROON. Heracles at Lindus. Mnemosyne. VI. 1953. pp. 283-297 qui donne le texte des fragments et une bibliographie complète. 357- Cf. CALLIMAQUE. Ed. et traduit par E. COHEN. Paris. Les Belles Lettres. 1961. Les Origines. VI. Héraclès et Theiodamas. Le poète chante Hyllos "rageant de faim" tirant et arrachant les poils de la poitrine de son père. Héraclès s'adressant "sur le champ aux trois labours" au vieillard Théiodamas. "qui faisait paître son attelage". Et. si le texte de la requête est perdu. on sait qu'elle fut vaine. puisque le Dryope répond qu'il ne peut nourrir "tous ceux qui passeront. affamés. devant sa charrue". Après une importante lacune. nous retrouvons Theiodomas "lançant ses injures" et le héros les écoutant "tout autant qu'un Selle. sur les monts du Tmaros. écoute le bruit de l'onde icarienne. ou que les oreilles de jeunes prostitués se soucient d'un
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amant pauvre...". Cf. J.H. CROON. loc. cil.• pp. 287-288. Ce qui bien sOr intéresse J.H. CROON. c'est que le nom lui-même paraît dériver de sources chaudes. sources chaudes elles aussi présentes dans la région de l'Oe&a. (aux Thermopyles. par exemple). Thennydres pourrait être identifié avec l'actuel Porto Paradiso (p. 288). 359- CONON. XI (cf. supra note 349). 360- LACTANCE. Div. Insl. 1. 21. (= C.S.E.L.• XIX. Vienne. 1890. p. 84 sq.). "illum sibi amarissime conviciantem cum risu et cachinnis audiebaL.. quot negaret se umquam epulatwn esse jucundius". 361- PHILOSTRATE. Imagines. n. 24. 358-
àya901 St tJUW,xUaaa9at xat
~).tTOt.
PHILOSTRATE. Imagines, n. 24. ànon&tp6>J.L&v~ TWV aapx(;)v el 363- PHll..OSTRATE. op. cil.• 362-
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J1CI).ÔTTOVTat fiS".
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PHll..OSTRATE. op. cil.•
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365- LACTANCE. Div. Insl. 1.21.31-37. op. cil.. 366- GRÉGOIRE DE NAZIANCE. IV. 77. 103. 122 (= MIGNE. P.G., XXXV. 604. 640. 661). Cf. Anlhologie de Planude. 123. Voir aussi
598 J.H. CROON, loc. cit., pp. 288-289 et note 7. et ici même note 340. On se rappellera qu'Apollonios ne voit, dans la querelle qui oppose Héraclès et Théiodamas pour le boeuf de labour, qu'un prétexte pour porter la guerre chez les Dryopes. La faim n'est plus ici que parabole, médiation par laquelle passe la fonction acculturante du héros. 368- Ti;) Ino8ti;) (Loeb, IV, p. 220) et non no).ti;) (Clavier, V, p. 65). 369- PAUSANIAS, IX, 12, 1. (tpy(ÎTa~ ~oik). 370- Scholie au vers 132 des Phénomènes d'ARATOS. Cf. édition MARTIN, p. 138. 371- Cf. K. MEULI, Griechische Opferbraüche, Phyllobolia, Festschrift P. von der MUhll, 1946, pp. 185-288 (et C.R. par A.J. FESTUGIERE, REG, 59-60, 1946, pp. 447-455) ; W. BURKERT, Homo necans, The Anthropology ofAncient Greek sacrificial Ritual and Myth, éd. de 1983 (Berkeley/Los Angeles) p. 16 (1ère édition Berlin, 1972). Pour mieux comprendre cette "comédie de l'innocence" qu'éclairent bien certains travaux anthropologiques, on pourra se reporter au livre de E. LOT-FALCK, Les rites de chasse chez les peuples sibériens, Paris, 1953. On Y voit bien le sentiment de culpabilité du chasseur, qu'il s'agisse de restrictions verbales pour dissimuler le meurtre: on "arrête" l'ours, on "fait descendre" l'oiseau (chez les Bouriates), le fusil est nommé "la baguette" , et la balle destinée à l'ours porte le nom altaren qui, dans la vie courante, désigne le cadeau fait par le jeune homme à sa fiancée ete... Qu'il s'agisse de la volonté manifeste du chasseur de ne jamais porter seul la responsabilité du meurtre (on pense, évidemment aux Bouphonies!): les Yakoutes, au moment de la mise à mort, tirent tous en même temps sur l'ours; le chasseur Votiak a, pour sa part, recours à une tierce personne pour donner le coup de grâce à l'animal pris au piège; le Toungousse, avant de manger l'ours, lui assure que c'est une flèche, une hache, un fusil, "faits par les Russes" qui l'a exterminé... ete. Pour une bibliographie du sacrifice, cf. J. SVENBRO, Bibliographie du sacrifice grec, La cuisine du sacrifice en Grèce ancienne, Paris, 1979, pp. 309-323. 372- On se référera bien entendu au livre collectif: La Cuisine du sacrifice en pays grec. M. DETIENNE, et J.P. VERNANT éditeurs, Paris, 1979; à l'article de J.F. VERNANT, Théorie générale du sacrifice et mise à mort dans la Qua{a grecque, dans Entretiens sur l'Antiquité classique: le sacrifice dans l'Antiquité, XXVII, Genève 1980, pp. 1 à 21, discussion pp. 33 à 39 et, plus particulièrement aux études proposées par J.L. DURAND, Le corps du délit, Communications, XXVI, 1977, pp. 46-61; Le rituel du mewtre du boeuf laboureur et les 367-
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mythes du premier sacrifice animal en Attique, Il mito greco, op. cit., pp. 121-134, et tout récemment. Sacrifice et labour en Grüe ancienne, essai d'anthropologie religieuse, Paris/Rome, 1986. Pour un bilan et une étude bibliographique de ces rechen:hes on se reportera à la "note critique" de N. LORAUX, La Cité comme cuisine et comme partage, Annales ESC, Juillet-Août 1981, pp. 614-622 et à la recen- sion de P. SCHMIIT-PANTEL, Banquet et Cité grecque. Quelques questions suscitées par les rechen:hes récentes, MEFRA, 97,1985, pp. 135-158. Pour trouver une analyse détaillée des sources du mythe étiologique et du rite on se reportera à l'étude de J. BOUFFARTIGUE qui précède l'édition et la tradition du livre II de PORPHYRE, De l'abstinence, Paris, Belles Lettres 1979 pp. 51·58. L'auteur compare en particulier le témoignage de THÉOPHRASTE (dans PORPHYRE, D.A., II, 29-30) et celui de PAUSANIAS, l, 24, 4. Il donne également une bibliographie étendue sur la question des Bouphonies (note 1 p. 52). PORPHYRE, De l'Abstinence, II, 31, 1; II,31,2. PORPHYRE, De l'Abstinence, II, 25, 1 ; II, 25, 3. PORPHYRE, De l'Abstinence, IV, 15. G. BERTInAUME,Les rôles du mJJgeiros, Etude sur la boucherie. la cuisine et le sacrifice dans la Gr~ce ancienne, Leiden, 1982. Préface de M. DETIENNE pp. IX-XX. Récit de Porphyre, p. IX, citation p. XI. M. DETIENNE, op. cit. (préface) p. XII. Dans la version de Théophraste, exposée supra. Cf. notre intervention au colloque de Rouen, en 1982 (op. cit., ) après la communication de J.L. DURAND et F. LISSARRAGUE, Héros cru ou hôte cuit; Histoire quasi cannibale d'Héraklès chez Busiris, pp. 153·167; discussion pp. 180-181. Sur le partage du boeuf par Prométhée on se reportera aux travaux de J.P. VERNANT, à l'article donné dans la Cuisine du Sacrifice, op. cit., par exemple: A la table des hommes, pp. 37-132. Anthologie de Planude. op. cit., lOI, 3 : ~oüv 6p6T11V lÂxoV'Ta xai 6V'TavUoV'Ta xopw"v. CALLIMAQUE, Origines, VI, 23: 6cnipa, vai xtpeWv PTitlV 5PlCTrt ~v. "Mais l'immolation il ne l'a pas dépeinte", dit-il de l'artiste qui a représenté la querelle avec Théiodamas, et aussitOt il imagine une explication :"Sur les lèvres de Théiodamas, peut-être a-t-il placé un cri plaintif et, à l'entendre, Héraclès lui a fait grâce". Dans les Argonautiques d'APOLLONIOS de RHODES, en revanche, au cours du sacrifice. - parfaitement conforme aux usages - qu'offrent les
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Argonautes à Apollon avant leur départ, Héraclès est chargé d'assommer l'un des deux boeufs et "le frappe en pleine tête sur le front", l, 425-428. ANTONINUS LIBERALIS, Recueil de Métamorphoses, XII, Cycnos. Cette légende est également évoquée par OVIDE, Métamorphoses, VIT, 371-381. ANTONINUS LIBERALIS, Cycnos, XII, 2. ANTONINUS LIBERALIS, Cycnos, XII, 7. La pièce est à ajouter au dossier des rapports entretenus par Héraclès avec l'initiation des jeunes gens. On se reportera à notre troisième partie. ANTONINUS LIBERALIS, XII, 8... la mort du jeune homme remplace ainsi la mort du taureau. Mort initiatique? on connaît l'importance "des sauts dans la mer" dans les légendes de ce type (et peut-être des rituels d'immersion correspondants). Sur la localisation de l'épisode voir les notes pp. 98 à 100. Cf. F. BROMMER, Vasenlisten '" ,p. 155. Dans l'Idylle XXV du Pseudo-Théocrite Héraclès dompte également le taureau Phaéthon (138-152). PAUSANIAS, VIII, 19,2. L'usage concerne "les hommes"(av8peç). IG 12 84; SOKOLOWSKI, Lois sacrées des cités grecques, 1969, nO 13. cf. aussi, H.W. PARKE, Festivals of the Athenians. 1977 et J. RUDHARDT, Notions fondamentales de la pensée religieuse et actes constitutifs du culte dans la Grèce classique, Genève, 1958, p. 261 et notes 4 à 8. Parmi les éloges adressés aux éphèbes à la fin de leur service, celui-ci: "Ils ont courageusement soulevé les boeufs pour les Eleusinies" (IG 112 1028 1. 10 et 28 ; 1029 1. 7 et 16 ete... (cf. J. RUDHARDT, op. cit., p. 261). THÉOPHRASTE, Caractères, XXVII, 5. L'usage de "soulever le boeuf' est encore attesté par EURIPIDE, Hélène 1561 sq., Electre, 813 sq.. C'est probablement cet usage que représente une amphore à figures noires (v. 550) retrouvée dans les réserves du musée de Viterbe et décrite par J.L. DURAND (un vase sacrificiel inédit, REG, 472-474, t. XCIX, 1986, p. XVIII): un bovidé, porté sur les épaules de sept personnages barbus, est maintenu en extension, par deux autres pendant que deux desservants (dont l'un porte la makhaira) s'apprêtent à immoler l'animal. Cf. M. DETIENNE, Pratiques culinaires et esprit de sacrifice, La cuisine du sacrifice. op. cit., pp. 7-35, singulièrement p. 19.
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trapeza dans l'espace où sacrifie Héraclès cf. J.L. DURAND.loc. cit., p. 180 ou encore p. 153 dans les Actes du Colloque de Rouen. op. cit.• lmage et céramique grecque. Cf. JL. DURAND. Du rituel comme instrumental. dans La cuisine du sacrifice, op. cit.• p. 180. CONON. Narrations. XI, 'Hpad.ijç- 8~ xaÀE:n~vaç- lva TWV ~O<..>v )CaTaoqlCl(aç- aÙT6ç- TE: 90lVQTal )Cal Tif> na181 8{&>OlV. LACTANCE, Div.lnst.• 1.21. J.P. VERNANT. loc. cit.• (Fondation Hardt), p. 6. PORPHYRE. De l'abstinence. II. 25. 3 et 7. J.P. VERNANT. Manger au pays du soleil, La cuisine.... op. cit.• pp. 239-249. HOMBRE. Odyssée. 1. 5-9. et XII, 312-449. HOMBRE, Odyssée, XII, 395-396. HOMBRE. Odyssée. 1. 9; cf. aussi XII, 419. On en trouvera la reproduction dans l'article de R. BLAïI'ER, Herakles beim Gelage, Archliologischer Anzeiger. 91, 1976, pp. 49-52 (reproduction p. 51). La massue est appuyée contre le lit; sous le lit une peau de bête avait (elle ressemble à la peau d'une panthère) fait penser d'abord à Dionysos. Athéna, proche d'Héraclès. tourne la tête vers l'arrière. ce qui tendrait à prouver qu'elle attend d'autres "invités". Hymne homérique à Hermès, 130-135. On se reportera, pour un parallèle avec le comportement d'Héraclès dans le mariage qui. comme le dit J.P. VERNANT, "est à la consommation sexuelle ce que le sacrifice est à la consommation de nourriture carnée", à la belle étude de Ch. SEGAL. Mariage et Sacrifice dans les Trachiniennes,AC. 44,1975. pp. 31-53. Hymne homérique à Hermès, 344. Sur le terme admetes qui désigne ces boeufs divins, on se reportera à l'étude de L. KAHN-LYOTARD. Le récit d'un passage et de ses points nodaux, Il Mito Greco, op. cit.• pp. 107-117. singulièrement p. 111 et note 22. LYCOS DE RHEGION. cf. F. Gr. Hist.• III B, 570 Fla (scholie à ARISTOPHANE), 1 b (PHOTIUS). Cf. aussi. SUIDAS, S.v., Aaplvol ~oéç-. DIODORE DE SICll..E, IV. 18.3. DIODORE DE SICll..E. IV, 23,4. Cf. supra., le troisième chapitre de notre seconde partie.
603 428- DIODORE DE SICILE, IV, 24, 3 et 4. 429- Hymne homérique à Hermès, 70-72. 430- Hymne homérique à Herm~s, 111. Ce feu n'est plus, comme celui de Prométhée, le feu divin, volé et donné aux hommes, mais celui que, grâce à une technique, on peut fabriquer. Sur ce sacrifice, cf. L. KAHN-LYOTARD, Le récit d'un passage et ses points nodaux, Il milo greco, op. cil., pp. 107-117. 431- APOLLODORE III, 112-113 =III, 10,2. 432- Hymne homérique, 134-137. On trouve ici, en effet, mention de chairs grasses et d'un nouveau feu allumé en dessous, allusion aux "chairs bouillies" dont parle Apollodore ? 433- Hymne homérique à Hermès, 436. 434- Peut-être faut-il rappeler qu'en de multiples occasions Héraclès fonde ou permet que se perpétuent des sacrifices: chez les Lacédémoniens, par exemple, il sacrifie une chèvre à Héra Aigophage, "une coutume pratiquée depuis ce temps-là" (pAUSANIAS, III, 15, 9). Selon certaines traditions rapportées par Pausanias, l'autel de cendres d'Olympie était son oeuvre (cf. supra, troisième partie) de même que l'autel de Didyme, construit d'un mortier mêlé au sang des victimes : PAUSANIAS, V, 13,8 (Olympie) et V, 13, 11 (Didyme). 435- DIODORE DE SICILE, IV, 27,3. Cf. aussi l, 67, 11; l, 88, 5 (dans ces deux derniers passages Diodore doute fortement de l'existence de Busiris). 436- APOLLODORE, II, 116 = II, 5, Il : a,op{a. On peut se demander si traduire par sécheresse, comme le font J.L. DURAND et F. LISSARRAGUE, qui fondent leur analyse sur l'argument du "sacrifice bloqué par la sécheresse et restauré par l'eau" n'implique pas un glissement un peu aventureux (Héros cru ou hôte cuit... Image el Céramique grecque, op. cil., pp. 153-167). 437- APOLLODORE, II, 116 = II, 5, 11. Cf. déjà PHERECYDE, 3F17 (JACOBY) et Scholie à APOLLONIOS DE RHODES, IV, 1396. 438- Voir note 436 supra. 439- Loc. cil., pp. 156-157 fig. 3 et 4. Il s'agit d'une péliké à figures rouges d'Athènes (MN 9683). 44Q- J.L. DURAND et F. LISSARRAGUE, loc. Cil., p. 156. 441- Cf. les travaux déjà cités de J.P. VERNANT et de M. DETIENNE. 442- PINDARE,Islhmiques, IV, 51-61. On remarquera que, dans le récit d'Apollodore, Busiris est donné comme fIls de Poséidon. Nous avons remarqué déjà, dans notre ~ partie, eeue dormée bès prégnante du mythe: un Héraclès opposé aux divinités ou aux forces de la mer.
604 443- MACROBE, Saturnales, l, 31. 444- PISANDRE DE RHODES, Frg. 10 (Kinkel). 445- K. REINHARDT, Sophocle, traduction française, Paris, 1971 (1ère édition: 1933). Sur les Trachiniennes, pp. 61-98: "Nul rayon de divinité ne vient délivrer Héraclès de ses maux et le transfigurer. La théose reste hors-jeu, ne prend aucune part au destin humain qu'elle nous présente. La délivrance des peines promise par les Trachiniennes n'est point au sommet de l'Olympe, mais au sein de la mort". 446- Ch. SEGAL. Mariage et sacrifice dans les Trachiniennes, loc. cit., pp. 31-53. 447- La fin très noire des Trachiniennes inciterait à le penser: "l'avenir, personne ne le connaît; le présent, il fait notre douleur, il fait aussi la honte des dieux... tout cela est l'oeuvre de Zeus" (1270-1272 et 1278). 448- Pour Diodore: devant les progrès de la maladie causée par la tunique de Déjanire qu'avait revêtue le héros pour sacrifier à Zeus Kénaios, Héraclès envoie consulter l'oracle de Delphes et c'est Apollon qui, achevant de dicter le destin du héros, ordonne qu'on le transporte au Mont Oeta et qu'on dresse le bûcher. Pour Apollodore comme pour Sophocle, la décision est prise par le seul Héraclès. Divergence aussi quant au personnage acceptant d'allumer le bûcher: Philoctète chez Diodore (comme chez le scholiaste d'Homère ou chez Ovide); Poeas (son père) "qui était venu là pour chercher ses troupeaux" pour Apollodore. Tous deux reçoivent en récompense l'arc et les flèches du héros. 449- DIODORE DE SICILE, IV, 38, 3 à 5. 450- APOLLODORE, II,160 = II, 7, 7. 451- Scholies à l'Iliade, II,724. Pour ces témoignages on se reportera à Y. BÉQUIGNON, La Vallée du Spercheios des origines au Wème siècle, op. cit., p. 206. Plus récemment, cf. J. BOARDMAN, Herakles in extremis, Festschrift K. Schauenburg, Mayence, 1986, pp. 127-132 ; pl. 21 et 22. 452- Peut-être pourrait-on être tenté de comparer ce dispositif avec ceux qui, à Thasos comme à Chypre, ont été mis en rapport avec la pratique des banquets sacrificiels (cf. notre première partie). 453- Cf. SOPHOCLE, Philoctète, 1431-1433. Sur ces fouilles de l'Oeta cf. l'~pxato~oyu(àv ~E~"(OV ,V, 1919 (paru en 1922) et les chroniques du BeH, XLIV, 1920, pp. 392-393; XLV, 1921, pp. 523-524; XLVI, 1922, pp. 513-514; XLVII, 1923, p. 522. Cf. M.P. NILSSON, Fire-festivals in Ancient Greece, JHS, XLIII, 1923,
605 pp. 144-148. Cf. enfm, Y. BÉQUIGNON, op. cit., pp. 206-215. 454- BCH, XLVI, 1922, Chronique, p. 513. Sur le culte de Commode, cf. par exemple, M.A. LEVI, Commodo ed Breole, Omaggio a P. Treves, Padoue, 1984, pp. 195 sq.. 455- BCH, XLIV, 1920, Chronique, p. 392; XLVII, 1923, Chronique, p. 513. Cf. encore Y. BÉQUIGNON, op. cit., p. 211. 456- Cf. BCH. XLIV, 1920 p. 393. Cf. Y. BÉQUIGNON, figures 1 et 2 de la planche VIII.
457- BCH, XLIV, 1920, Chronique, p. 392 et n. 7. 458- V. BÉRARD, op. cit., p. 90. 459- On se reportera à notre première partie pp. 124-127; pp. 158-160. 460- Cf. FLAVIUS JOSEPHE, Antiquités Juives, VIII, 5, 3 qui au 1er s. ap. J.C., cite MÉNANDRE D'EPHESE (IIIème et IInd siècles avant notre ère) Cf. aussi Contre Apion 1, 117-119. Sur cette f!te, voir
461462463-
essentiellement E. LIPINSKI, La f!te de l'ensevelissement et de la résurrection de Melqart, Actes de la XVlIIime rencontre Assyriologique Internationale, Bruxelles, 1969, Ham-sur-Heure, 1970. On trouvera dans la thèse de C. BONNET (pp. 83-88 de l'exemplaire dactylographié) le rappel des différentes ~s (panni lesquelles elle retient, précisément, celle de E. LIPINSKI). On lira aussi l'étude pleine d'intérêt des invectives d'Ezéchiel au Prince de Tyr (28,1 , 19), étude qui permet à l'auteur de montrer comment le prophète "associe dans une même dénonciation le prince terrestre de Tyr et son roi mythique... Melqart", de relevez ses allusions au sanctuaire du dieu (les stèles) et - ce qui, ici, nous intéresse - au rite du bOcher. Le gymnasiarque Maphtan. Cf. E. LIPINSKI, loc. cit., pp. 30-31. E. LIPINSKI, /oc. cit., p. 57 et notes 3 et 4 de la même page. Cf. G. COLONNA, M. PALLOTTINO, L. VLADBORELLI, G. GARBINI, Scavi nel santuario etruseo de Pyrgi. Relazione preliminare della settima campagna, 1964, e scoperta di tre lamine d'oro inscritte in etrusco e in punico,Archeologia classica, XVI, 1964, pp. 49-117 et pl. XXV à XXXIX. Une table ronde leur a été consacrée : Le lamine di Pyrgi, Rome, 1970. On trouvera une notice bibliographique détaillée dans l'article cité de E. LIPINSKI, pp. 34-38. Les lignes 6 à 9 ont été traduites ainsi par J.G. FÉVRIER (A propos du hieros gamos de Pyrgi,JA, 253.1965. pp. 11-13): "Parce que Astart6 a 6t6 ~ par ses soins (= de Tiberié) (en) l'année 3 de 801'1 règne. Dans le mois de KRR au jour de l'ensevelissement de la divinité (- du dieu)". Disons cependant que cette lraduction. qui lie ainsi la déesse et le roi de la cité.
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représentant du dieu, a été contestée par S. MOSCATI, Sull'iscrizione fenicio-punica di Pyrgi, Rivista degli studi Orientali, 39, 1964, pp. 257-260. Cf. supra, pp. 457-459. Peut-être aussi certains témoignages, qu'ils soient archéologiques (l'autel-foyer du sanctuaire de Kition-Bamboula, par exemple, cf. supra pp. 147 sq.), qu'ils soientlilléraires (cf PLINE, HN. XXXVI, 39 ou lERTULLIEN, Apologétique, XV). L. GERNET, A. BOULANGER, Le génie grec dans la religion, Paris, 1932, p. 10. Cf. Y. BÉQUIGNON, op. cit., pp. 216-219. Sur les Daidala de Platées, en l'honneur d'Héra, cf. PAUSANIAS, IX, 3, 1-4 ; sur les fêtes de Tithorée, PAUSANIAS, X, 32, 14; sur les fêtes en l'honneur d'Artémis Laphria" cf. PAUSANIAS, VII, 18,8. Y. BÉQUIGNON, op. cit., p. 219. Y. BÉQUIGNON, op. cit., p. 219. Cf. aussi, L. GERNET, op. cit., p.58. Y. BÉQUIGNON, op. cil., p. 225. M.P. NILSSON, Mycenaean origin, op. cil., p. 193. Mais pourquoi s'efforcer de démontrer les rapports d'Héraclès et de la végétation, pourquoi rappeler l'importance de l'Héraclès dactyle, si ce n'est pas pour conclure que ces rites agraires pouvaient lui appartenir en propre? Hymne homérique à Déméter, 231-262. Cf. Ch. PICARD, Les bachers sacrés d'Eleusis, RHR. 1933, l, p. 150 sq.. Remarquons que cette indépendance n'est que relative, l'Héraclès dactyle étant, quant à lui, aussi bien à Olympie qu'en Béotie, fortement lié à Déméter. CONON, Na"ations, 17. Cf. PHOTIUS, Bibliothèque. 186. APOLLODORE, II, 72 = II, 4, 12. ANDRON D'HALICARNASSE, F. Gr. Hisl., 10 F 10 + Scholie à l'Iliade l, 52. Cf. W. BURKERT, Homo Necans, op. cil., p. 52 et note 18. J.P. VERNANT, A la table des hommes, Cuisine, op. cit., p. 66. Elle était jusque là à la fois plus symbolique et plus concrète :
passage par le royaume des morts. On se reportera à la conclusion de notre troisième partie. RONSARD, sonnet 139 cité par M.R. JUNG, op. cit., p. 151. 480- Hymne homérique à Hennis, 436. 481- On se reportera à notre épilogue. 478479-
482-
Cf. la description que nous avons donnée de l'Héracléion de Thasos (pp. 157-162 et fig. 19) et du sanctuaire de Kition-Bamboula, en
007 particulier pp. 150 sq. Cf. peut-être aussi l'édifice non identifié de l'Oeta. Sur le problème des repas rituels dans les sanctuaires cf. M.S. GOLDSTEIN, The Setting of the Ritual Meal in Greek Sanctuaries: 600-300 B.C., Berkeley, (ni Thasos, ni Kition-Bamboula n'y figurent, mais on lira pp. 333-342 la description du bâtiment Ouest (VII) de l'Mraion d'Argos comme salle de banquet du sanctuaire). 483- Cf. au Cynosargues, voir supra p. 359. 484- F. de VISSCHER, Heraldes epitrapezios, Paris, 1962. 485- Construisant son analyse du sacrifice d'Hermès dans l'Hymne homérique sur l'opposition hiéros - hosios, L. KAHN-LYOTARD (Ioc. cit., Il mito Greco) conclut "qu'Hermès ouvre une brèche dans le mur qui sépare les deux espaces du sacrifice et passe" (p. 115). Une fois de plus nous voyons se croiser les chemins du héros et du dieu. 486- La terrasse supérieure avec son mur cyclopéen paraît dater de la seconde moitié du VIIIème siècle. Sur l'Héraion d'Argos on verra: Ch. WALDSTEIN, The argive Heraeum I/II, 1902-1905; C.W. BLEGEN, Prosymna : the Helladic Seulement preceeding the argive Heraeum, 1937; A. FRICKENHAUS, Tiryns, l, 1912, pp. 114-120. Cf. encore P. AMANDRY, Sur les concours argiens, Etudes Argiennes, supplément BCH, VI, 1980, pp. 211-253; et du même auteur: Le bouclier d'Argos, BCH, 107, 1983, pp. 627-634. 487- Sur le réaménagement du sanctuaire, et, en particulier sur le nouveau temple construit dans la deuxième moitié du Vème siècle, cf. G. MILLER, AJA, 77, 1973, pp. 9-10. 488- PAUSANIAS, II,17, 1. 489- On a même pensé qu'Héra était l'héritière d'une déesse zoomorphe, ce que réfute E. SIMON, Die GoUer der Griechen, Munich, 1969, p. 35 sq. : les multiples découvertes des boeufs ou des taureaux ne doivent pas être prises comme des représentations de la déesse, mais comme attestation de ses offrandes préférées ; de même les maisons à abside qui furent ses premiers temples et, et qu'en terre cuite, on lui offrait comme ex-voto, seraient vraisemblablement des "étables" (p. 38) agréables à recevoir pour une divinité protectrice des troupeaux. 490- Etymologicum Magnum. s.v. ùu(t8{a. Pour les rapports d'Héra avec les génisses voir encore FARNELL, op. cit., l, p. 181 et COOK, Zeus, l, p. 144sq.. 491- HÉRODOTE, l, 31 ; PAUSANIAS, II, 20, 3. 492- PINDARE, Olympiques, VII, 83, Néméennes, X, 22-23 (et scholies). 493- Cf. le terme ~v qui dans l'Iliade, VII, 238 désigne le bouclier. Cf. W. BURKERT, Homo necans, op. cit., p. 167 et note 26.
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CALLIMAQUE, frg. 653. Cf. encore W. BURKERT, Homo Necans, op. cit., p. 163 et note 9. Sur ces fêtes, connues par des inscriptions, assez tardivement, alors qu'elles ont été "transportées" à Argos même (où elles deviendront les Héraia ) voir les articles déjà cités de P. AMANDRY (cf. supra note 486). Euboia vient d'un très ancien mot grec : bous = boeuf et E. SIMON (op. cit., p. 44) fait remarquer qu'on retrouve cette étymologie dans le nom de l'île d'Eubée où semble avoir existé un très ancien culte à Héra; dans celui de Béotie, également, où "la déesse glorieuse des Eoliens" (ALCEE frg. 129 6 f. de Loebel-Page) était célèbre pour ses fêtes, les Daidala . E. SIMON, op. cit., pp. 35-45. STRABON, V, 1,9. TITE-LIVE, 24, 3, 2. Le temple d'Héra était entouré de grasses prairies où toutes sortes de troupeaux "paissaient sans berger". Les panégyries y amenaient les Grecs de toute l'Italie du Sud et de plus loin encore. Sur l'importance de ce culte dans la confédération des cités grecques qui prit le nom d'Italia, voir E. SIMON, op. cit., p. 45. Cf. encore supra notes 230 et 315. W. BURKERT, Homo Necans, op. cu., pp. 165-166. Anthologie Palatine, IX, 237. XalpO\t'. ' AÀXtlBa Bal1a~Tlcpay&. Ka' TaB& CPPOUP&\ liu~\a Koft( 6~lY(a)V l1up\6GOla Tlet\
NOTES DU TROISIEME CHAPITRE
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G. BATAILLE, Théorie de la religion, op. cit., p. 66. Cette insistance - si visible dès les poèmes homériques - à souligner la différence entre les hommes mortels et les dieux "toujours vivants" n'est pas particulière à la Grèce; on la retrouve, profondément ancrée, dans d'autres civilisations: dans l'Iran ancien, pour ne prendre qu'un exemple, l'unique mot pour désigner "un homme" c'est martiya qui signifie mortel; l'humanité est dite "semence mortelle" et le père mythique de l'humanité est Gayomard: "la vie mortelle". Cf. Ph. GIGNOUX, Vie et mort en Iran ancien, La mort, les morts... , op. cit.,
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M. DELCOURT, Ugendes et cultes des héros en Gr~ce, op. cit., pp.
p.349.
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135-136. Héraclès et Géras. Péliké du Louvre (G. 234), trouvée près de Capoue ARV (2) p. 286-16 (vers 48(470). Toutes les citations des notes 505 à 508 appartiennent au texte de la version assyrienne : ici tablette VI d'après la traduction en langue anglaise de S.N. KRAMER dans J.B. PRITCHARD, Ancient Near eastern Texts. Princeton, 1950. Traduction proposée par M. LETIJRMY, Dieux, héros et mythes, Paris, 1958. Notons encore ici que le poème, pour dire la mort d'Enkidu, utilise cette périphrase "l'a atteint le destin de l'homme". Tablette VII, col. 3. Tablette VIII, col. 2. Tablette VII, col. 4. Ce texte extrait de la tablette X (collet col 4) est celui d'une ancienne version babylonienne. Cf. Gilgamesh et sa légende, études recueillies par P. GARELLI à la VIIème Rencontre Assyriologique Internationale, Paris, 1960. On trouvera dans ce volume une importante introduction bibliographique et une étude des différentes versions de la légende. On se reportera sur ce point à la rapide étude des sources que nous avons faites dans notre prologue et, pour plus de précisions, au chapitre "Retour aux sources" de notre seconde partie. X Col. 1 (Version babylonienne). Tablette XI. On se reportera au récit du voyage vers Erythie chez APOLLODORE (II, 106-112 =II, 5, 10), aux menaces d'H&aclès contre le soleil et à raide que fmalernent lui apportera ce dernier pour traverser l'Océan. Ainsi E. CLAVIER ajoute vingt enfants à la liste déjà longue d'Apollodore II, 78 (et II note 47 pp. 331-332) et selon ARISTOTE (Hist Anim. VII, 6 ) Héraclès eut soixante-douze enfants dont une seule fille. DIODORE DE SICILE, IV, 29, 3. Pour APOLLODORE toutefois (II, 66 = II, 4,10) Héraclès disposa de cinquante nuits. J. BAYET, Hercule funéraire, MEFR, XXXIX, 1921-1922, pp. 219-266 et XL, 1923, pp. 18-102. En 1926, dans la quatrième partie (chapitre III) de son étude des Origines de l'Hercule romain. Paris, 1926. MEFR,loc. cit., chap. VII. On pourrait contester, par exemple, que l'olivier ait toujours "une signification infernale nette"... de même que l'eau, surtout quand elle est contenue dans une amphore (cf. supra, p. 361 et note 39, pour
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l'argumentation de D. EMMANUEL-REBUFFAT,loc. cit., Latomus, pp. 473-488). Chapitre VI. Chapitres III et IV. HÉSIODE, Théogonie, 211 sq.. Sur le catalogue des enfants de Nuit, on consultera C. RAMNOUX La nuit et les enfants de la Nuit, Paris, 1959. HÉSIODE, Théogonie, 215-216. Cf. C. RAMNOUX, op. cit., p. 65. HÉSIODE, Théogonie. 274-275, 276; 286. HÉSIODE, Théogonie, 295-300. HÉRODOTE, IV, 10, 11. HÉSIODE, Théogonie, 306-332. HÉSIODE, Théogonie, 333-336. P. MAZON adopte une correction apportée par WILAMOWITZ (c:m&lpT'lalv ~yaÀ1]ç'). ML WEST, pour sa part, préfère revenir au texte des manuscrits (n&lpaalV tv ~yaÀolç').
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A propos de DIODORE qui donne les deux versions (cf. tableaux Vet VI de la Deuxième partie) : pommes (IV, 26) ou brebis (IV, 27), nous avons déjà évoqué ce double sens de ~iiÀa. Il n'y a guère de raison de préférer ici brebis, alors que les pommes d'or sont incontestablement connues d'Hésiode (215-216).
531- H. FRÂNKEL, DichJung und Philosophie desfrilhens Griechentums. Un. de l'Illinois, 1951, pp. 139 à 151. Cf. aussi l'analyse de C. RAMNOUX, op. cit., p. 83 sq.. 532- C. RAMNOUX, op. cit., p. 84. 533- De façon un peu arbitraire nous confondons ici Pontos et Océanos. 534- "Das Wechselnde und Ungestalte ". Cf. H. FRÂNKEL, op. cit. 535- HÉSIODE, Théogonie, 295-296. 536- Dans notre première partie. 537- Des "cartes-images", par opposition à la "carte-instrument" selon la distinction introduite par G. KISH, La carte image des civilisations. Paris, 1980. Cest en ce sens qu'il faut lire les représentations que nous donnons fig. 1 : représentations circulaires dont la Grèce est le centre et l'Océan la périphérie; représentations symétriques aussi, donc puissamment reconstruites, c'est-à-dire fortement imaginaires. 538- HÉSIODE, Théogonie, 295; cf. encore 300 (Uno XtOOtal ya{11Ç') et 304 (Uno X96va). 539- HÉSIODE, Théogonie, 334 (même expression qu'en 300). 540- Atlas est donc de la descendance de Terre (les puissances positives dans l'analyse de FRÂNKEL). Rappelons que, dans la séquence des
611 Hespérides. il est adjuvant et non pas opposant. HÉSIODE. Théogonie. 517-518. Hésiode écrit d'ailleurs ndpacnv iv yaiTl," "et ces limites de la terre". nous paraissent plus éclairantes et plus riches encore. 542- Nous ne reviendrons pas ici sur l'épreuve qualifumte que représente pour le héros cette lutte avec les monstres marins. ou avec ces "vieux de la mer" qui comme Nérée. se métamorphosent et détiennent un savoir qu'ils ne révèleront qu'au terme d'un combat. Cf. sur ce point D. BRIQUEL. Vieux de la mer grecs et descendant des eaux indo-européens. D'Héraldès à Poséidon. mythologie et protohistoire. ed. R. Bloch. Genève/Paris. 1985. pp. 141-158. Cf. aussi G. AHLBERG-CORNELL. Herakles and the Sea-Monster in Attic Black-Figure Vase-Painting, Stockholm. 1984. 543- PHOTIUS. Bibliothèque. 186 (142 b). On se reportera sur ce point à notre étude des somees dans la seconde partie. 544- PINDARE. Isthmiques. IV, 55-60. Pindare parle du fIls d'Alcmène et plus précisément du héros venu de "Thèbes la Cadméenne" (53). mais nous avons vu dans le premier chapitre de cette quatrième partie comment il avait su transformer le héros. 546- HÉSIODE. Théogonie. 294: CJTaOfL tv f!epoevn. On se reportera aussi à la note 56 du Prologue. 547- APOLLODORE. II. 106-109 II. 5.10. 548- APOLLODORE. 125 = II. 5. 12. 549- On se reportera supra. p. 281. 550- J.H. CROON. The Herdsman of the Dead. Studies on Some Cuits, Myths and Legends of the Ancient Greek Colonization Area. Utrecht. 1952. 551- Une dissertation sur les cultes. mythes et légendes des sources chaudes dans le monde grec (Cambridge. 1950). 552- On trouvera. dans l'introduction de l'ouvrage de J.R. CROON. op. cit.• les références qui font d'Héraclès le patton des sources chaudes (p. 6.7) ; les sites où est attesté le culte d'Héraclès (p. 7-8 et pour le monde romain 9) et enfin une bibliographie commentée des auteurs qui. tels P. FRIEDLANDER. L.R. FARNELL. O. GRUPPE. C. ROBERT. H.J. ROSE et surtout J. BAYET. ont étudié ces rapports d'Héraclès et des sources chaudes (p. 9-11). On y ajoutera. pour la Grèce R. GINOUVES. Balaneutilce. Recherches sur le bain...• Paris. 1959. pp. 361-366 et pour l'Asie Mineure. la thèse de P. DEBORD. Aspect sociaux et économiques de la vie religieuse dans l'Anatolie gréco-romaine 1977; Pour Lindos: Hl. CROON. Mnemosyne. IV. 6. 1953; pour la Bithynie: L. ROBERT. OMS. 1. Amsterdam. 541-
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1969, pp. 402-406 et Villes d'Asie Mineure, Paris, 1962, p. 401. Cf. SUÉTONE, Tibère, 14, Cf. supra, dans notre deuxième partie p. 281 et note 261. J.H. CROON, op. cit., p. 36. Cf. p. 32: "in view of the fact, observed above, that the story is often localized near hot springs, we would not he surprised ifwefound such springs at Gadès. But the evidence for tms is doubtful..." On se reportera, sur ce point, à notre première partie. Il ne fait aucun doute, pour nous, que la localisation à Gadès tient à l'existence ancienne, en ce lieu, du sanctuaire du Melqart phénicien. C'était déjà bien entendu: cf. WILAMOWITZ, op. cit., 1, p. 45 et 65: ZWICKER, R.E., 1913, VIII, Col. 516-528; B. SCHWEITZER, op. cit., p. 87; J. BAYET, loc. cit., F. BENOIT, La légende d'Héraclès et la colonisation grecque dans le delta du Rhône, Lettres d'Humanités, VIII, 1949, pp. 104-148. Cf. J.H. CROON, op. cit., pp. 31-32 et note 18. On rapprochera la théorie de J.H. CROON de l'hypothèse de A.W J. HOLLEMAN, Larentia, Hercules et Mater MabJta (Tib. II, 5) sur un "bouvier de Dis" au Vélabre, AC, 1976, pp. 197-207. Cf. J.H. CROON, op. cit., pp. 31-32. Pour d'autres éléments dans cette discussion au sujet du bétail de Géryon voir surtout HJ. ROSE, Chthonian Caule, Numen, 1, 1954, pp. 213-227. C. GALLINI, Animali e al di là, SMSR, XXX, 1959,1, pp. 65-81. Pour les Esquimaux, cf. K. RASMUSSEN, Thulefahrt, Francfort, 1926, p. 245; F. BOAS, The Eskimos of Baffin land and Hudson Bay, Vth Annual Rept. of the Amer. Mus. of Nat. Hist., XV, 1901, pp. 109 sq.. Pour une bibliographie plus complète on se reportera à C. GALLINI, loc. cit., p. 74 notes 56 et 57. Pour la Sibérie, cf. E. LOT-FALCK, op. cit., singulièrement p. 123. C. GALLINI, loc. cit., p. 81 propose de reconnaître dans l'aventure d'Héraclès et de Géryon un schéma semblable: "Iotta cioè, con una figura più 0 meno demoniaca, signora dell al di là e degli animali, e sussequente concessione degli animali stessi". W. BURKERT, loc. cil., (II Mito greco) p. 279. W. BURKERT,loc. cit., (II Mito Greco) p. 281. Pour M. ROBERTSON, cependant (Geryoneis: Stesichorus and the vase-painters, The Classical Quaterly, XIX, 1969, pp. 207-221), cette pyxide date du milieu seulement du Vllème siècle. Cf. encore C. SMITH, JHS, 5, 1884, pp. 176-184, C et D; H. PAYNE, Necrocorintma, Oxford, 1931, p. 130; F. BROMMER, Vasenlisten,
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op. cil., p. 63 n° 3 et, en dernier lieu L. TIBERI, Stesicoro e le raffigurazioni vascolari della Gerioneide, Archeologia classica, XXIX, l, 1977, pp. 175-179) à qui nous empruntons sa représentation (Cf. notre fig. 31.1, cf. encore p. 478 et note 277) ref. BM.65-7-20, 17. Pour E. KUNZE, Olympische Forschungen, II Berlin 1950, p. 106 sq. pl. 30, la représentation serait à placer entre le premier et le troisième quart du VIème siècle. M. ROBERTSON (loc. cil.) choisit le début du VIème siècle, peut-être même le VIIème siècle. Cf. notre frontispice. On en dénombre plus de soixante. Une étude exhaustive aurait peu d'intérêt après les recensions de F. BROMMER, op. cil., J.H. CROON, op. cil., appendix B, et celles, plus récentes, de M. ROBERTSON, de L. TIBERI. loc. cil., ou encore de Ph. BRIZE, Die Geryoneis des Slesichoros und diefro'he griechische Kunsl, Wurzburg, 1980. Amphore d'Exekias (Louvre F 53) provenant de Vulci. Cf. GERHARD, 197; CROON nO 6, représentée ici fig. 37. Amphore de Bassegio, maintenant à Londres. Cf. GERHARD 108, CROON, nO 8. Ici fig. 38. Cf. l'amphore attique à tableaux, et à figures noires du Musée du Louvre, (F. 55), CVA, 3, pl. 15 ; Ph. BRIZE, op. cil., p. 185 nO 22; Hommes. dieux el héros de la Grèce. op. Cil., pp. 228-229 et figure 93 a (vers 540 avant J.C.) non représentée ici. Amphore du Louvre (F 55), amphore de Paris (Cabinet des Médailles). Cf. n° 1 représentée ici fig. 31.2. GERHARD, 108 = CROON n° 8 ; représentée fig. 38. Probablement ces images - gardons nous de toute sur-interprétation -, étaient-elles communes sur de très réels boucliers, destinés de toute façon à inspirer l'effroi. n semble bien malgré tout que la sélection qui a été faite ne soit pas innocente et fortuite. Cf. notre frontispice, voir p. 529 et note 567. F 55/ Voir page 529 et note 572. Coupe à figures rouges signée du potier Cachrylion et du peintre Euphronios et datant de la fin du VIème siècle (520-510) cf. J. BOARDMAN, Ait. Red Fig. Arch.• 26 1 et 2 ; CROON, nO 50 (Munich 2620). Notre fig. 32 représente, quant à elle, les troupeaux. Cf. supra : Héraclès, protecteur des bouviers. Sur la coupe d'Euphronios (Munich 2620) fig. 32 (représentation des troupeaux) et p. 478-479. On notera qu'Euphronios a représenté Orthos avec deux têtes et une queue terminée en tête de serpent. Cf. aussi l'amphore chalcidienne de la fig. 31. 2.
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On la verra. par exemple, identifiée par une inscription sur les deux amphores chalcidiennes du milieu du Vlème siècle dont nous donnons la représentation fig. 31.2. et fig. 39. PAGE, P MG, frg. 18 LGS, 56A, frg. 3. Mais était-ce une innovation 7 Pour Homère, on le sait (lliade, VIII, 360-369) Athéna a, de nombreuses fois, sauvé Héraclès "lorsqu'il était à bout de souffle au cours des travaux d'Eurysthée". Dans les fragments Il, 19 et 25 du papyrus. APOLLODORE, II, 114 II, 5, 11. Servius dans son Commentaire de l'Enéide, l, 484 dit qu'Hésiode l'enseignait ainsi. Cf. HÉSIODE frg. 360 (MERKELBACH-WEST, 1967). Argonautiques, IV, 1399. Pour HELLANICOS (F. Gr. Hist.,4 F 110) Erytheia. est, de plus, la mère d'Eurytion. PAUSANIAS, X, 17, 5. Norax était, assure-t-on, fils d'Hermès et d'Erythie, fille de Géryon. PAUSANIAS est suivi par STEPHANE DE BYZANCE. PAUSANIAS, V, 19, 1. ESCHYLE, Agamemnon, 870. APOLLODORE, II, 5, 10 = II, 106. Cf. DL. PAGE, L.G.S., Oxford, 1978, frg. 4. Cf. DL. PAGE, L.G.S. 56 (= PAGE, PMG 186). Cf. D.L. PAGE, L.G.S. 56 (= PAGE, PMG, 186). Cf. p. 478-479. Cf. fig. 31.2. Amphore de Caere conservée au British Museum (cf. WALTERS, II, B 155), cf. RUMPF, op. cit., 10 et 47 nO 6-65 pl. 13-15, Cf. encore GERHARD, Auserlesene ... op. cit., pl. CCCXXIII, et CROON représentée ici fig. 39. Cf. supra, pp. 280-281; Cf. encore G.Q. GIGLIOLI, L'Arte etrusca, Milan, 1935, pl. CCXLVIII. Bronze conservé au Musée des Beaux Arts à Lyon (Inv. L. 1) cf. notre figure 40. Cf. S. BOUCHER Bronzes grecs. hellenistiques et étrusques de Musées de Lyon, Paris, 1970, pp. 72·73, nO 50, qui le date de la fm du Vlème siècle. On trouvem d'autres exemples dans l'article de A.M. ADAM, Monstres et divinités tricéphales dans 11talie primitive, MEFRA, 97, 1985.2, pp. 577-«1}. Cf. supra, p. 59 note 237 et surtout p. 487 note 332. Cf. B. LIOU-GIT.LE, Cultes "Mrorques" romains. Les Fondateurs, Paris 1980, pp. 25-30. Cf. supra note 596.
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A.M. ADAM, loc. cit., p. 603. Et, on le notera une fois de plus, plus d'indépendance qu'on ne le pensait entre tradition littéraire et imagerie. Sur ces problèmes de perception de l'image on se reportera à L. MARIN, Etudes Sémiologiques, Paris, 1971 et aux travaux de G. CHARRIERE sur l'art scythe. La citation est empruntée à un article de ce dernier, L'art barbare scythe. La Nouvelle Critique, nO 43, avril 1971. O. BENNDORF, Griechische Md sicilische Vasenbilder, Berlin, 1869-1893, pp. 87-88 et planche XXXXII. Le lécythe à figures noires sur fond beige (avec rehauts de blanc et de rouge/brun pour le dessin) provient de Géla. P. HEYDEMANN range d'ailleurs cette représentation parmi les vases humoristiques (Humorist. Vasenbilder. Berlin, 1870,4). DIODORE DE SICILE IV, 26, 4. (cf aussi les Tabula Albana, F. Gr. Hist. 40 FIc). Pour Apollodore la quête des Hespérides et celle de Cerbère font partie des exploits qu'ajoutera Eurysthée aux dix épreuves qu'aurait dû accomplir Héraclès, parce qu' il avait disqualifié deux d'entre elles. Ces deux derniers travaux apparaissent ainsi comme renforçant le sens du dixième - qui aurait dû être le dernier - : la quête des troupeaux de Géryon. F. BROMMER, Vasenlisten, op. cit.• et du même auteur, Herakles und die Hesperiden aof Vasenbildern, Jahrbuch des Deutschen ArchiJologischen Instituts, 57, 1942, pp. 105-123. Pour les raisons bien connues de cette évolution on se reportera à M. METZGER, Recherches sur l'imagerie athinienne, Paris, 1965. G. GRUNWALD, BoOtischer Amphoriskos : Nereus zeigt Herakles den Weg zu den Hesperiden, Sème Congrès International d'Etudes Classiques. Bonn. 1969. On sait qu'une Centauromachie y figurait. L'identification d'un fragment de Stésichore dans le Paradoxographus Vaticanus Rhodii, XXXIII (E. Rhode, Acta Societatis Philologae Lipsiensis, l, 1871, pp. 22-42) permet d'ailleurs d'affll1ller que l'6pisode de Nérée essayant de se soustraire à la requête d'Héraclès et de ne pas lui indiquer le chemin des Hespérides (cf. Apollonios de Rhodes, IV, 1326) lui était connu (C. BRll.LAN1E, Un frammento della Gerioneide di Stesicoro, QUCC, 1982,41, pp. 17-20). E. CLAVIER, op. cit., II, 5, Il, p. 199. Scholiaste à APOLLONIOS de RHODES, Argonautiques, IV, 1396. PHÉRÉCYDE F. Gr. Hist., 3F 16. ÉRATOSTHENE, Katasterismoi, 4. Cf. encore HYGIN, Poetica
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astronomica, II, 3 et le scholiaste des Aratea de Germanicus. Cf. C. ROBERT, Eratosthenis Catasterismorum Reliquiae, 62-65. APOLLODORE, II, 5, Il =II, 113. Il pourrait Yavoir une allusion à ce serpent qui parle dans les lignes 1 à 5 du papyrus 71 de Lille (mention des pommes d'or et des Heures): cf. C. MEILLIER, CR/PEL, VI, 1981. pp. 243-252. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3F 16. "Ut refert Panuasis Heraclea serpens hortorum custos immensae magnitudinis insomnisque fuisse" : schol. GERMANICUS, Aratae, BP 61A, cf encore HYGIN, Poetica Astronomica, II, 6... On se reportera au Fragment 10 K de PANYASIS. Cf. VJ. MATTHEWS, Panyassis ofHalikarnassos, Leiden, 1974. pp. 66-67. HESIODE, Thiogonie, 333. HESIODE, Thiogonie, 333. APOLLONIOS, Argonautiques, IV, 1396, PISANDRE, F. Gr. Hist., 16 F 8. C. ROBERT, Heldensage, op. cit., p. 491. Lathon: STRABON, 17, 3, 20; PTOLEMEE, 4, 4, 3 et 5 ; Lethon: PTOL. EVERG. II, 234 F 1 JACOBY; LUCAIN, 9, 355; PLINE, Hist. Nat. 5, Il; SOLIN, 27, 54. Cf. les notes complémentaires: nO 3 p. 195-196 au chant IV d'APOLLONIOS, Argonautiques, t. III, par F. VIAN et E. DELAGE, Paris, Belles Lettres, 1981. Cf. supra, III, 1 =Le monstre triple, image de la mort. DIODORE DE SICILE, IV, 26, 2. Le premier exemple se trouve sur un alabastre conservé au Musée de Nauplie et datant du milieu du Vème siècle (p. BROMMER, loc. cit., Hesperiden, nO 9 et 10) ; peu après on retrouve cette représentation sur l'hydrie de Paris, puis sur celle du peintre de Meidias. HESIODE, Thiogonie, 517-520. PANYASIS: Frg. 10 de KINKEL. Cf. V.J. MATTHEWS, op. cit., pp. 66-71 ; F. K 10 et peut-être aussi F.32 (Schol. à NICANDROS, Theriaca, 256). Pour PHERECYDE : F. Gr. Hist. 3F 16. On lira, sur les rapports entre le poète d'Halicarnasse et le logographe athénien , M.L. WEST, The Prometheus trilogy. JHS, XCIX, 1979, pp. 130-148; Panyasis meurt en 450, alors que l'acmè de Phérécyde se situe vers 45615 (chronologie d'Eusèbe), mais M.L. WEST fait remarquer que l'Héracléia de Panyasis a pu parvenir à Athènes avec Hérodote, son parent, c'est-à-dire vers 445. PAUSANIAS, V, 18,4: version "brutale" de l'épisode, puisqu'Atlas porte sur ses épaules le ciel et la terre et, dans la main, les pommes
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des Hespérides. Héraclès se précipite sur lui, l'épée nue et l'inscription commente "Atlas, certes, soutient le ciel, mais il IAchera les pommes". EURIPIDE, HéracUs, 394-400. Cf. également SOPHOCLE, Trachiniennes, 1099-1100. EURIPIDE, HéracMs, 403-407. EURIPIDE, HéracMs, 400-403. W. FURTWAENGLER, La collection Sabouroff, 1. l, planche
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APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, 1400-1405. On a pu lire supra, p. 539 la description de QUINTIJS de SMYRNE. A moins que les "filles d'Atlas", dont il est question ne soient pas encore les HeSpérides. Chez DIODORE de SICILE, IV, 27, 1 et 2, cependant, les Nymphes du soir sont filles d'Atlas et d'Hesperis, elle-même fille d'Hespérus, le frère d'Atlas. Cf. encore SERVIUS, Commentaire de l'Enéide, IV, 484. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, 1396-1399. Cf. F. VIAN et E. DELAGE, op. cit., p. 195 note 2. Elles sont dites ÀlYUcpwVOl = à la voix éclatante, HÉSIODE, Théogonie, 275 et 518. HÉSIODE, Théogonie, 215. Cf. aussi le scholiaste à EURIPIDE, Hippolyte, 742-748. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, 1427-1428. Dans le fragment 360 elles sont appelées Aiglé, Erythéia et Hespérétoussa (cf. M.L. WEST, édition de la Théogonie, 228 sq.). APOLLODORE, II, 5, JO = II, 114. Certains manuscrits donnent pour Hespéria Hestia. PAUSANIAS, V, 17, 1. Vase d'Archémoios et vase de Ruvo: cf. F. DORRBACH, op. cit., 95,4 et 5. Hydrie du British Museum, E. 224. Cf. H.B. WALTERS, III, p. 173: AIITEPOnH
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Si l'on en croit la lecture de GERHARD, qui se réfère à HESYCHIUS: Asichertré (qu'il lit, à tort, au lieu d'Ast6ropé) signifierait l'abondance et dériverait du mot 6a1XElp, fJa1XElp (Notice sur le vase de Mimas au Musée Britannique, Berlin, 1940). Mais pour FurtwAngler, Griechische Vasenmakrei, l, pp. 38-46 tables 8 et 9 il faut lire Astéropé . Astéropé est l'une des Pléiades, fille
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d'Atlas. Certains (Cf. VIAN et E. DELAGE, op. cit., p. 62 note 3) y ajoutent Hygie, assise et plutôt spectatrice qu'actrice, semble-t-il. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3 F 16 a, d'après le scholiaste à Apollonios de Rhodes, IV, 1396. Mais n'y a-t-il pas confusion avec les nymphes de l'Eridan 'l APOLLODORE, II,121 II, 5,11. STITH THOMPSON, Motif index ofFolk Literature. a Classification ofNarrative Elements in Folklales. Bailads. Myths. Fables, Mediaeval Romances. Exempla. Fabliaux. Fest-Books and Local Legends; édition révisée, Copenhague, 1955. Les Eddas ont été rassemblées par Snorri Sturluson (1178-1241). Cf. CJ. MAC CULLOCH, The Mythology of ail Races, II, Eddie, Boston 1930 (chapitre 16) ; cf. G. DUMEZIL, Loki, Paris, 1948, p. 25 et plus récemment R. BOYER, La religion des anciens Scandinaves, Paris, 1981 (sur les Eddas, pp. 28-37). Cf. CJ. MAC CULLOCH, J. MACHAL, The Mythology of ail races, m, Celtic. slavic. A. BERRIEDALE KEITH, A.J. CARNOY, The Mythology of ail races. VI, Indian, Iranian. W.J. PERRY, Les iles des Bienheureux, Folk Lore. 1921, pp. 150-180. G. CONIENAU, L'épopée de Gilgamesh, Paris, 1939. J.O. de G. HANSON, Heracles and the apples of the Hesperides, Museum Africum, l, 1972, pp. 1-3. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, 1434. Cf. en dernier lieu P. LEVEQUE, Bêtes, dieux et hommes, Paris, 1985, pp. 95 sq, 121. J.O. de G. HANSON, loc. cit., p. 2. J.O. de G. HANSON, loc. cit., p. 1. Cf. supra, p. 99 (d'après ATHÉNÉE, III, 25 et F. Gr. Hist., III A, 275 F 6). J.R. MARÉCHAL, Les pommes d'or du jardin des Hespérides, Techniques et Civilisations, vol. III, nO 5, 1954, pp. 156-160. Cf. aussi F. LE ROUX, Notes d'histoire des religions, (à propos de) J. MARÉCHAL... OGAM, VII, 1955, pp. 305-314. On se reportera sur ce point à notre première partie. Cf. F. DAUMAS, RHR, 149, 1956, pp. 1-8. De Ré, par exemple, le dieu solaire: "ses os sont d'argent et sa chair est d'or". Atharva Veda, cf. WJ. PERRY, Les Iles des bienheureux, loc. cit., pp. 150-180. PINDARE, Olympiques, l,là 7. Sur ce rOle de l'or chez Pindare on
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verra J. DUCHEMIN, Pindare. poète et prophète. Paris, 1955. (chapitre, Or, lumière et couleur) et A. BRESSON, Mythe et Contradiction, analyse de la V/Ume Olympique de Pindare (chapitres IV et V) Paris, 1979. Cf. J.P. VERNANT, Le mythe hésiodique des races, essai d'analyse structurale, Mythe et pensée chez les Grecs, op. cit., pp. 19-47. PINDARE, frg. 97 (Schol. IV, Pyth. 407; PLUTARQUE, dans PROCLUS, ad. Hesiod. Opp. 430 (pUECH, p. 228). A. BRESSON, op. cit., p. 99: Cf. encore p. 94: "Pindare a choisi l'or comme signifumt de la richesse. car il est la richesse abstraite, celle dont la possession dispense d'exercer une activité particulière et permet effectivement de faire tout ce qu'on veut..". L. GERNET, La notion mythique de la valeur en Grèce. Anthropologie de la Grèce antique, Paris, 1968 pp. 93·137, en particulier, p. 99 sq.. L. GERNET, loc. cit., p. 119. A. BRESSON, op. cit., note 23 p. 110, affirme sur ce point son désaccord avec Louis GemeL L. GERNET, loc. cit., p. 130. On se reportera sur ce point à la page 509. On se reportera sur ce point à notre première partie (chapitre 1). Nous ne reprendrons pas ici, l'ensemble des témoignages tardifs que nous avons donnés de cette localisation. La variante libyenne se trouve chez AGROITAS, F. Gr. Hist., III C, 762 F 3 et sans doute aussi chez ASCLEPIADE DE MENDES, F. Gr. Hist.• III C, 617 FI. PLINE, HN., V, 2, et XIX, 63. PLINE, H N .• XIX, 41 et V, 5. PSEUDO-SCYLAX, 91 F (Fabricius. Teubner) 108 M (Périples libyques, 7). PTOLÉMÉE, IV, 4, 5. PSEUDO-SCYLAX, 92 F 109 M. Cf. PINDARE, Pythiques, lX. 105-106. Cf. F. CHAMOUX, Cyrène sous la monarchie des Battimks, Paris. 1952, pp. 280-285. Pour F. VIAN et E. DELAGE, la rencontre des Argonautes et d'Héraclès pourrait, de plus, être attestée - quoique de façon peu sOre ailleurs que chez Apollonios: sur la scholie de TZETZES à LYCOPHRON, 871 on se reportera à la notice, op. cit., p. 62 note 2. L'argument qu'ils cherchent à tirer de la présence de Médée sur le vase de Meidias (British Museum E 224) nous parait plus discutable encore en raison de l'incroyable diversité des scènes mythiques rapportées sur les flancs de cette hydrie.
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Cf. p. 99. Nous reprenons ici la traduction donnée par 1. DESANGES, op. cit., p. 406. Nous n'avons pu consulter: A. PEREITI, Il periplo di Scilace. Studio sul primo portolano dei Mediterraneo, Pise, 1979. S. STUCCm, Il giardino delle Esperidi e le tappe della conoscenza greca della costa cirenaica, Quaderni di Archeologia della Libia, 8, 1976, pp. 19-73. Le périple donne comme voisin du jardin le golfe de Phykos ('ux~ x6À1tOÇ) S. FERRI, Historia. Studi stor. per l'ant. class.I, 3, 1927, pp. 66-107 et dans Quad. di. Arch. della Libia, 8,1976, pp. 11-17. F. VIAN et E. DELAGE, op. cit., notice p. 63 et note 3, sont très réservés quant à l'interprétation jugée "hasardeuse" du relief hellénistique trouvé à
Benghazi. F. CHAMOUX, Cyrène sous la monarchie des Battiades, Paris, 1952, p.280. Sp. MARINATOS, Excavations at Thera l, Athènes 1968 à VII, Athènes 1976. La fresque décore la salle 5 de la maison dite de l'Amiral et date de la fm de la période d'occupation des grandes maisons d'Acrotiri (1550-1490 av.l.-C). On trouvera l'exposé de cette controverse dans l'article de O. LONGO, Théra (Santorino) e l'erozione deI 1500 B.C. dans Atena e Roma, 1985, fase. 3-4, pp. 115-136. SP. MARINATOS, Excavations at Thera, VI, 1974, pp. 38 sq.. Cf. P. WARREN, The Miniature Fresco from the West House at Alcrotiri, Thera and its Aegean Setting, lHS, 99, 1979, pp. 115-129, Pl. A et B ; S.A. IMMERWARR, Mycenaeans on Thera: Sorne Reflections on the Paintings from the West House, dans Greece and
the Eastern Mediterranean in Ancient History and Prehistory. Studies presented to F. SCHACHERMEYR, BerlinlNew-York, pp. 173-191. On se reportera encore à l'article et à la bibliographie de O. LONGO, loc. cit., pp. 131 sq.. 688- L.M. BROWN, The Ship Procession in the miniature fresco, dans Th/ra and the Aegean World, Second International Scientific Congress, 689-
690-
Santorin, AoOt 1978, pp. 629-644. Cf. O. LONGO, Zoe. cit., pp. 133-135. Dans cette optique, on évoquera quelques pages consacrées aux Hesp&:ides, par U. PESTALOZZA (Pagine di religione mediterranea, II, chap. III, Milan, 1945) qui souligne le lien qui, à propos des Hespérides, existerait entre Crète et Libye: Critè, l'éponomyne de l'ile minoenne est donnée comme une Hespéride par STEPHANE DE BYZANCE, ou comme fille d'une Hespéride par PLINE (H.N., IV, 58) ; les Hespérides, par ailleurs, sont chez Apollonios filles d'une
621
691692693694-
terre mère (cf supra) et libyennes. Cf. P.M. WARREN,loc. cit., p. 122. PINDARE, Néméennes. IV, 68-69. PINDARE, Pythiques, X, 29-30. _ APOLLODORE, II, 113 = II,5, Il. ,.aÜTa Bt ft y oüx &>ç l'lvtt'
tTnoy ty Al6ul), 6U' bd ,.où "A,.AaV1'Ot' ty·Yru:p6opéOlt'. Cette localisation, mppe1ons-Ie, était celle que donnait PHERECYDE,
F. Gr. Hist., 3 F17. 695-
APOLLODORE II, 119
noptuOtk tnl ,.tJy xa,.aAa~66:vtl.
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F. Gr. Hist., 3 F 16-17. Dans la Théogonie, 901·906, Zeus et Thémis donnent naissance aux Heures et aux Moires. PHÉRÉCYDE. F. Gr. Hist., 3 F 73. M.L. WEST, loc. cit. (JHS, 1979) p. 145. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3 F 17. Cet extitme sud ne serait donc pas la côte cyrénalque, contrairement à ce que pense Ph. BRIZE,loc. cit., pp. 78·79. PANYASIS, F 26 K. Cf. V.J. MATTHEWS, op. cit., p. 70, qui, étudiant ce passage et en donnant différentes interprétations, remarque que tant chez Aviénus que chez d'autres auteurs, "medius dies" peut signifier "le Sud", mais comprend l'ensemble des deux vers comme l'indication d'une terre "loin du sud". Contra M.L. WEST,loc. cil., note 90 page 145. Beaucoup plus convaincante chez M.L. WEST,loc. cit., que chez Ph. BRIZE pour qui le récit de Phérécyde représente aussi une tentative pour unir différentes localisations des Hespérides et intégrez la tradition de la rencontre avec Prométhée (op. cit., p. 74). F. JACOBY, op. cit., l, 2 commentaire p. 395. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3 F 16 a, 17 = Scholie à APOLLONIOS DE RHODES, IV, 1396. Déjà affmné dans la Théogonie. d'HÉSIODE, 526-528. Héraclès avait rapporté l'olivier d'Olympie "des sources ombreuses de 11stros, "où il était allé le chelcher, chez les Hypezboréens, "serviteurs d'Apollon", "au-delà des souffles du froid Borée "PINDARE, Olympiques, m, 14; 16; 31-32. HESIODE, Théogonie, 518 ; 746-757 (interpolation). Cf. supra, p. 479 note 282. Cf. notre figure 43, représentation empruntée à E. SELLERS, l'bree aUic le/cythoi front Eretria, JHS. XIII, 1892-1893, pp. 1-2, pl.
m.
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Je reprends là une expression de Eugénie SeUers. Sur la métope d'Olympie, Héraclès, au moment de l'arrivée d'Atlas, porte déjà un coussin entre le ciel et lui; on sait que c'est là la ruse par laquelle il réussira à rendre à Atlas le fardeau dont il cherchait à se
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Cf. J.D. BEAZLEY, The World of the etruscan miror, JHS, LXIX, 1949, pp. 117: miroir de Londres (B.M. 544) GERHARD Pl. 134 p. 4 et fig. 2 (daté du 3ème quart du Vème siècle) ; miroir du Vatican (GERHARD, pl. 137) p. 34 pl. III b, daté du milieu du Vème siècle et "plutôt avant" . HÉSIODE, Thiogonie, 519. HÉSIODE, Thiogonie, 518. Ménoitios est, quant à lui, envoyé au fond de l'Erèbe (514-515) et Prométhée paraît, à l'autre bout du monde (Orient 7), lié à sa colonne: pilier symétrique de celui d'Atlas (521-525). HÉSIODE, Thiogonie. 736-737; 744-745; 748-750; 758-759; 767-768. HÉSIODE, Thiogonie, 746-747. Cf. M.L. WEST, The Hesiodie Catalogue ofWomen. Oxford, 1985, p. 85 (les Hyperboréens, nés de la terre, sur les bords de l'Eridan). DIODORE DE SICILE, II,47, et HECATEE D'ABDERE, F. Gr. Hist, III A, 264 F 7. APOLLONIOS DE RHODES, Argonautiques, III, 505-506 et 596-611. PINDARE, Olympiques, III, v. 45 sq.. PINDARE, Olympiques, III, 27 et scholie au vers 53. Amphore à col attique à figures noires datée de 520-510. Boulogne, Musée des Beaux Arts et d'Archéologie, 421. Cf. Vasenlisten, III, 71, (2) ; E. GERHARD, Auserles. grieeh. Vasenbilder, pl. 99 à qui nous empruntons sa représentationn (fig. 44). D'après le scholiaste à Apollonios de RHODES, Argonautiques, II, 675. STRABON, VII, 3, 1. POMPONIUS MÉLA, 1,12-13 et III, 36. PTOLÉMÉE, III, 5, 5 et 10. Cf. R. DION, La notion d'Hyperboréens et ses vicissitudes au cours de l'Antiquité, BAGB, 1976, 2, pp. 143-157. Nous nous abstenons volontairement d'envisager ici le problème des offrandes et des routes hyperboréennes vers Délos. M.L. WEST, loe. cit., p. 143. EURIPIDE, Héracl~s, 394-396. Le serpent au dos fauve un 6paK6v
débarrasser.
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71&7177187197~
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nupa6v(a)TOV. 731-
EURIPIDE, HiracUs, 400-402.
novTla" 9'
a).~ ~uxo~
E!a&6alVE 732733-
EURIPIDE, Héracl~s, 403-407. EURIPIDE, Hippolyte. 742-751- v. 742: "aux bords" traduit mcTâv rivages et limites à la fois... ; v. 744-745; le roi de la mer (novTo~i8(a)v) refuse aux marins l'accès aux eaux sombres" nopcpup&a" ). (~va,," ; v. 749-750: Z1"lV~ ~E).â9pc.>v npo
KolTav. 734- En hommage au beau livre d'A. MOTfE, qui porte ce titre. 734bis- Cf. L. GERNET, La cité future et le pays des morts, REG, 46,1933 pp. 293-310 735- Hymne homérique à Hennis, 221-223. 736- HOMERE, Odyssée, V, 112-132. 737- A. MOTfE, Prairies et Jardins de la Gr~ce Antique. De la Religion à la Philosophie, Bruxelles, 1973. Citations p. VIII, puis p. 37. 738- ESCHYLE, Les Choéphores, 127-128. 739- Il est vrai que son propos est autre: ébJdiez les divinités des prairies et jardins, ou dégager les thèmes hiérogamiques; il est vrai aussi que dans la note 8, pp. 234-235 il remarque que "le cycle d'Héraclès fournirait à lui seul une abondante matière". 740- HJ. CROON, op. cit., p. 12. L'auteur ne le dit pas, mais on voit se profiler l'ombre du conquérant dorien, victorieux des maléfiques puissances autochtones. 741- Cf. PAUSANIAS, VI, 25, et déjà HOMERE,lliade, V, 395-397. Cf. encore CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Protreptiqlle, II, 36, 2.. "Aidoneus, lui aussi fut atteint d'une flèche d'Héraclès, HomQe le dit, et Panyasis raconte ensuite qu'Héra qui préside aux mariages fut blessée par le même Héraclès dans la "Pylos des Sables". Sosibios dit qu'Héraclès à son tour eut la main blessée par les Hippokontides". Pour PANYASIS, cf. frg. 6 et 20 K; cf. encore AGATHARCHIDE de CNIDE, 444 b dans PHOTIUS, Bibliot~que, 25 a. Hadès avait, dit Pausanias, un temple chez les Pyliens, temple qui ne s'ouvrait qu'une fois dans l'année pour signifiez "que l'on ne descend qu'une fois dans les lieux soutezrains où il tient son empire". 742- Cf. PAUSANIAS, m, 25, 5 et 6 exprime les mêmes doutes au sujet de Cerbère, le chien des Enfers: HomQe qui le premier en a par16 ne lui donne pas de nom, et Hécalée de Milet pourrait avoir raison, qui dit que cet endroit du Ténare aurait été le repaire d'un énorme serpent appelé "chien des Enfers". 743- PÀUSANIAS, IX, 34, 5.
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PAUSANIAS, II, 31, 2. Cf. M. DETIENNE, Violentes Eugénies, La Cuisine du Sacrifice, op. cit., pp. 183-214; singulièrement pp. 203-207. PAUSANIAS, II, 35,4-11. STRABON, VIII, 6,12, dit aussi que les habitants d'Hennioné considéraient cette ouverture comme "le chemin le plus court pour descendre chez Hadès", en vertu de quoi ils n'enterraient pas leurs morts avec la pièce de monnaie, due à Charon. Rapport fortement affrrmé en Italie, en Gaule également, comme en témoignent les cultes de Mouriès, de Glanon... et jusqu'à celui, plus récemment découvert, de Deneuvre. Cf. dans l'article de G. MOITRIEUX, Un siècle de recherches archéologiques à Deneuvre (Revue archiologique de l'Est et du Centre-Est, XXXII, fase. 1 et 2, 1981, pp. 65-88) la partie consacrée aux recherches contemporaines et singulièrement au sanctuaire d'Hercule au lieu dit "le Premier Silorit" : sanctuaire de source, "centre d'hydrothérapie" peut-être, qui aurait existé, dans l'état acbJel des recherches, du début du Und siècle à la fin du IVème siècle (pp. 78-86). STRABON, VIII, 6, 7-8. Cf. R. BALADIÉ, op.cit., pp. 102-104. Le nom même de Némée a été rapproché de v~J.W faire pattre et, il s'expliquerait, au dire des Anciens (Etym. Magnum, s.v.• N&J1~a), par les grasses prairies que nourrissait le vallon. STRABON, VIII, 6, 8 et VIII, 8, 4. Cf. R. BALADIE, op. cit., pp. 103-104. SOPHOCLE, Trachiniennes, 200 ; 435 ; 1191 sq.. PINDARE, Olympiques, III, 11-35. TITE-LIVE, 24, 3, 2 Cf. supra, p. 484-485 et notes 230,315,498. Cf. M. LAUNEY, Le verger d'Héraclès à Thasos, BCH, 61,1937,2, pp. 380-409. Ligne 12 à 14 pour les arbres à planter: 10 figuiers, 10 pieds de myrtes, 10 noisetiers. Cf. encore Ch. PICARD, Jardins sacrés, RA, XII, 1938, pp. 245-247. Cf. Ch. PICARO,loc. cir., dans la note précédente. SOPHOCLE, Oedipe à Colone, 378, 1387 Koilos (traduit par montagneux). Sur le territoire d'Argos, cf. R. BALADIE, op. cit;, p. 111). Cf. supra, pp. 550-551. A. MOlTE, op. cit., p. 241. A. MOlTE, op. cit., p. 233. Eschyle, Orestie, Cf. C. RAMNOUX, op. cit., pp. 37-39. C. RAMNOUX, op. cit., p. 45. HÉSIODE, Th/ogonie, 747·750; 759; 775-777; 767-769. (interpolation).
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Sur le Maître des animaux et le rhombos cf. P. LEVEQUE, Bêtes. dieux et hommes, op. cit., pp. 20-21. Cf. PHÉRÉCYDE, F. Gr. Hist., 3 F 1 6 c. cf. EURIPIDE, Hippolyte, 749-750. Cf. supra, pp. 559·560. On se reportera au tableau proposé par A. MOrrE, op. cit., pp. 208-212 pour constater que les "rives océanes", sont encore le lieu de l'hiérogamie de Poseidon et Méduse (HÉSIODE, Théogonie, 279 sq.) et qu'elles virent encore (mais peut-être faudrait-il tenter là, une géographie, ou du moins une orientation de l'Océan 7) l'union d'Achille et de Médée (APOLLONIOS DE RHODES, IV, 811 sq.), de Borée et d'Orithye (SOPHOCLE, frg. 956), de Zéphyr et de Podarge (HOMERE,/liade, XVI,151). ESCHYLE, Prométhée, 647; Suppliantes, 540; EURIPIDE, Phéniciennes, 187 sq.; APOLLONIOS DE RHODES, m, 124 sq.; NONNOS, Dionysiaques VIII, 240 sq. PAUSANIAS, II, 36, 7. Pour Hermione, voir encore PAUSANIAS, II,35,3. PAUSANIAS, II,17,3 et 4. Mais rien n'autorise à dire, comme le fait A. MOTfE (op. cit., p. 226), que la statue de Polyclète représente Héra sur sa couche. P. LÉVEQUE, Héra et le lion d'après les statuettes de Délos, BCH, 73, 1949, pp. 125-132. CALLIMAQUE frg. 101. Cf. E. SIMON, (Die G(Jtter der Griechen, Munich, 1969) qui pp. 59-60, donne d'autres exemples de ces lions qui, associés à la déesse, intensifient sa puissance. Pour l'Italie grecque. Signalons encore qu'à Capoue, J. HEURGON retrouve, au sanctuaire du Fondo PattureUi, la même alliance ancienne d'une déesse mère (et il ne fait aucun doute pour lui qu'il s'agisse d'Héra Argeia) et d'Héraclès (Recherches SUT l'histoire. la religion et la civilisation de Capoue préromaine, Paris, 1970). LUCIEN, De Dea Syria, 451, 462. Cf. la thèse de A. F. LAURENS, Hébé, Images, Mythes et Cultes. op. cit., qui donne de nombreuses représentations de l'apothéose d'Héraclès. Nous rappellerons ici que c'est au Vllème siècle que se rattache la plus ancienne représentation du mariage d~ et d'Héraclès (cratère orientalisant provenant de Samos - non représenté - nO 180). Mais qu'elle apparaît surtout (comme les scènes d'apothéose) au dernier quart du VIème siècle.
ÉPILOGUE
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"Ite boues... arnaque mugitu sandte Bouaria /ongo : nobile erit Romae pascua uestra Forom" Properce. E/égies, IV. 9. 16-20.
On connaît la légende de l'Hercule romain : au retour de l'île d'Erythie. séjour brumeux du bouvier Géryon. le héros fait halte au bord du Tibre avec le troupeau qu'il vient de conquérir et triomphe de Cacus qui cherchait à lui voler son bétail. Evandre. roi des Arcadiensétablis à Pallantium. sur le futur site de Rome. loin de punir le meurtrier. reconnaît sa divinité et lui élève un autel (774). Selon d'autres versions. c'est Hercule lui-même qui fonde son culte et l'Ara Maxima (775). C'est ainsi qu'au premier siècle avant notre ère. la légende romaine. greffée. notons-le. sur un épisode de la geste occidentale d'Héraclès telle que la racontaient les Grecs. désigne l'Ara Maxima. situé sur la rive gauche du Tibre au pied du Palatin. dans la région nord du Forum Boarium. comme le plus ancien lieu du culte d'Hercule. pratiqué sur le site de Rome avant même la fondation de la ville. Dans la même région. entre Tibre et Aventin. près de la porte Trigemina, hors de l'enceinte sacrée. un autre foyer du culte rendu à Hercule relevait. quant à lui. des sacra peregrina . De nombreux édifices sacr6s. qu'il est parfois difficile de distinguer les uns des autres. sont venus. au cours des siècles. compliquer cette topographie des cultes héracléens à Rome (776). Tous concourent cependant. à prouver le rapport étroit qui s'était, dès le départ. noué entre le dieu "installé" en terre étrangère et ce lieu de passage et d'échanges qu'était "le marché aux boeufs". n n'est évidemment pas dans mon intention de reprendre l'étude des origines et de la légende et des cultes. Sur bien des points d'ailleurs l'ouvrage de Jean Bayet reste fondamental (777). Il n'est pas question non plus d'envisager. dans son ensemble. l'avenir de ce dieu devenu romain (778): seul m'intéresse l'Héraclès grec. C'est donc à l'intérieur de sa propre histoire. et plus particulièrement des adaptations et transformations des mythes qui affirment sa présence en Occident, que j'aimerais. sur quelques points. trouver des raisons de mieux comprendre.
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peut-être, ce que fut l'Hercule romain. On se souvient de la théorie de Jean Bayet, pour qui le culte d'Hercule, à Rome, représente "un exemple rare et frappant de latinisation d'un dieu grec" (779)... Grec est en effet le culte officiel de la Porta Trigemina, fondé, pense-t-il, dans le courant du Vème siècle par des marchands helléniques; non moins grec et "postérieur à coup sûr" (780) lui paraît être également le culte de l'Ara Maxima (781). L'étatisation de ce culte privé en 312, à l'instigation du censeur Appius Claudius, les Potitii vendant leur sacerdoce familial à l'Etat avec les désastreuses conséquences que l'on sait (782), fait triompher le dieu du Palatin. "Nationalisé, au lieu d'en souffrir, il en profita, "résume Jean Bayet (783), et c'est désormais avec le dieu de l'Ara Maxima que se confond l'Hercule romain, celui de Tibur facilitant l'acception, en un sens militaire, des épithètes de Victor et d'Invictw déjà utilisées sur le Forum Boarium. A cette hypothèse - très largement admise par les historiens modernes - d'une origine grecque de l'Hercule romain, Denis van Berchem devait opposer une théorie nouvelle (784) : l'Ara Maxima" est pour lui, la plus ancienne assise du culte herculéen à Rome, et, conformément à la tradition, notons-le, il place sa fondation avant même la naissance de la ville, dès les IXè-VlIIè siècles. Enfin et surtout, il en attribue la création aux Phéniciens qui, remontant le Tibre à cette haute époque, auraient installé là le culte de leur Melqart tyrien. Cette hypothèse, fondée sur une nouvelle interprétation du rituel - difficilement expliqué jusque là, il faut le dire, comme un rituel proprement héroYque - fut accueillie avec scepticisme, et par J. Bayet (785), et par les historiens de la religion romaine (786). Elle paraît cependant, sur bien des points, incontournables, et, si l'on peut toujours contester l'appartenance exclusive de telle ou telle pratique, de tel ou tel interdit, au domaine sémitique, le faisceau de convergences recueillies par D. van Berchem dénote une parenté étonnante entre le culte de l'Ara Maxima et ceux d'autres sanctuaires d'Héraclès pour lesquels la tradition antique affirme une origine phénicienne (Gadès et Thasos, en particulier) (787). L'explicationn proposée au nom des Pontii ,détenteurs du sacerdoce jusqu'en 312, est, elle aussi, très convaincante: refusant de voir en eux l'une des plus anciennes
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familles romaines (788) - laquelle dans ce cas n'aurait, curieusement joué aucun rôle dans l'histoire de la ville -, il propose d'entendre le terme comme désignant les "possédés", souvent en rapport avec les cultes des divinités orientales. Ces "possédés", il les conçoit, à l'origine, comme "une communauté vouée mystiquement au service exclusif du dieu" (789). Nous aimerions, dans un premier temps, revenir sur ce problème des origines, très lié, nous l'avons vu dans notre première partie, à celui de la diffusion en Occident de la légende d'Héraclès, et, plus encore, - peut-être - du culte de Melqart. La difficulté, chacun l'a senti, réside dans l'hypothèse, nécessaire dans l'esprit de Denis Van Berchem, d'une présence phénicienne, à cette haute époque, sur le site qui plus tard sera celui de Rome... enjeu d'un débat plus vaste - nous l'avons évoqué plus haut (790) : celui de l'expansion des Phéniciens en Méditerranée occidentale. Or, s'il est difficile de contester leur empreinte, dès le IXème siècle, dans la Sardaigne toute proche (791), qu'en est-il des côtes tyrrhéniennes, et, plus particulièrement, du Latium? Les recherches sur la Rome protohistorique et archaïque, progressant de façon remarquable, on pouvait espérer que s'éteigne l'argument "a silentio" - toujours douteux - qu'oppose l'archéologie. Or les fouilles, et tout particulièrement celles de S. Omobono, au Nord du Forum Boarium (792), démontrent essentiellementl'importance de la présence étrusque, plus tardive cependant à Rome que dans le Latium (fin Vile s.) et surtout - ce qui peut-être est plus étonnant -l'importance des contacts avec la Grèce (793). Dès le VIDe siècle (phase latiale III, circa 770-730) des importations de céramique en provenance de l'Eubée et des Cyclades ne laissent aucun doute sur le rôle ancien - et direct - des commerçants grecs des îles Pithécusses sur le site où se développait Rome; un peu plus tard (phase latiale IV, orientalisante, circa 730-580) ce commerce véhicule une céramique grecque plus variée et de nombreuses marchandises ou influences orientales. Il est difficile d'exclure absolument, dans ces rapports avec l'Orient, le canal phénicien (sans doute d'ailleurs aurait-on tort d'insister sur la concurrence, l'exclusivité de tel ou tel courant), mais la Grèce semble vraiment très présente. La Grèce et surtout les marchands eubéens qui, ne l'oublions pas, jouent également un grand rôle dans l'emporion d'Al Mina
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(fondé dès la fin du IXème siècle sur la côte syrienne). Sans doute ont-ils représenté, eux aussi, pour les peuples de la côte tyrrhénienne, une porte ouverte sur l'Orient. Enfin, et plus précisément, les fouilles récentes de "l'Aire Sacrée" de Sant'Omobono et le réexamen 'du matériel ancien ont attiré l'attention sur des fragments de terres cuites architectoniques appartenant au décor d'un petit temple archaïque qui précéda, au Vlème siècle, les temples jumeaux républicains de Fortuna et Mater Matuta (794). Parmi ce matériel dont A. Sommel1a Mura souligne à la fois la parenté avec le matériel étrusque et l'évidente inspiration gréco-orientale, deux statues de terre cuite, probablement groupées sur la même base, couronnaient sans doute le toit de l'édifice dans la deuxième moitié· du VIème
Fig. 46 : S. Omobono : Reconstitution du temple archaïque D'après le catalogue de l'exposition de Rome (1981) EMa Ml Lazio. Archeologia e mito
Cf. A. SOMMELLA MURA, La decorazione architettonica. p.117.
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Fig. 47 L'aire sacrée de S. Omobono (1 l Stratigraphie des monuments sous l'~glise de S. Omobono
d'après T. HACKENS et B. VAN DEN DRIESSCHE,
Antiquités italiennes. étrusques et romains. Louvain, 1977, pl. 126 Al. Croquis repris dans: J. POUCET, La Rome archaïque, quelques nouveau~s arch~ologiques, A.C.. XLIX, 1980, pp. 286-315.
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(2) Plan d'après A.M. COLlNI, Ambiente e storia dei tempi più
antichi, p .P.• XXX Il, 1977, p. 1 I.
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Fig. 48: Le groupe d'acrotère "Héraclès et Athéna"
D'après le Catalogue de l'exposition de Rome (1981)
Enea nel Lazio, Archeologia e mito Cf. A. SOMMELLA MURA, La decorazione architettonica, p. 121.
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siècle (795). L'une d'elles est incontestablement un Héraclès; l'autre, dont il reste surtout un tête casquée et des fragments de vêtements féminins, est interprétée comme étant une Athéna, l'ensemble offrant, pour l'auteur, une représentation de l'apothéose d'Héraclès (796). Ce groupe pose encore de nombreux problèmes: du temple de quelle divinité formait-il le couronnement? Est-ce bien Athéna qui accompagne Héraclès? Si nous nous en tenons pour l'instant à l'essentiel: la présence d'Héraclès au VIè siècle sur un édifice cultuel, bien avant donc que le premier lectisterne (399) ne consacre l'entrée dans la religion romaine d'un Hercule alors accompagné de Diane, les conclusions - certaines quant à elles - sont d'importance: le culte du héros, ou du dieu "grec" est beaucoup plus ancien à Rome, et en particulier dans cette zone nord du Forum Boarium - celle de l'Ara Maxima - que ne l'imaginait Jean Bayet. La tradition ne mentait pas, lorsqu'elle faisait du marché aux boeufs le lieu d'implantation le plus antique du culte d'Hercule. Peut-être, cependant, pouvons-nous aller plus loin. En découvrant ces terres cuites de S. Omobono à la faveur de leur récente exposition, le type d'Héraclès m'a paru évoquer avec force celui des statues provenant du sanctuaire d'Amrith, sur la côte syrienne - que j'avais pu étudier au musée de Damas... un type rencontré à Chypre et diffusé, comme nous l'avons vu, assez largement (797)... à Chypre là où le sanctuaire de Kition, qui probablement voit se développer cette représentation syncrétique, est, sans contestation possible, un sanctuaire phénicien; à Chypre, où, non moins probablement, est né Héraclès-Melqart ! Aussi avais-je proposé, au congrès Eirene de Prague (798), de voir dans cet Héraclès du Forum Boarium, non pas l'Héraclès purement hellénique des colonies grecques, non pas le pur Melqart phénicien, mais l'Héraclès-Melqart chypriote... Ainsi se comprendraient mieux les caractères sémitiques, décelés fort justement par Denis van Berchem dans les cultes de l'Ara Maxima : à moins que de nouvelles découvertes archéologiques ne viennent prouver - ce qui, après tout, n'aurait rien d'aberrantla présence phénicienne à Rome, ces influences orientales pourraient alors raisonnablement s'expliquer par un premier syncrétisme gréco-phénicien...
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D'ailleurs, lorsqu'il s'arrête sur les bords du Tibre, Hercule-Héraclès ne vient-il pas de Gadès, le grand sanctuaire de Melqart en Occident? Cette hypothèse "chypriote" offre peut-être une clef pour résoudre, de surcroît, la délicat problème de l'identification de la déesse armée et casquée qui accompagne Héraclès. Anna Sommella Mura reconnaît en elle la compagne habituelle du héros en Grèce: Athéna et interprète la scène comme étant celle de l'apothéose d'Héraclès... Une hypothèse qui suscite, semble-t-il, une large discussion : "Très tôt on a opposé à Athéna le nom de Fortuna ; et si, en 1981, Carmine Ampolo (799) et Antonio Giuliano (800) apportaient au débat des raisons de croire à l'hypothèse première, celle de l'apothéose, Filippo Coarelli, pour sa part, faisait remarquer que d'autres déesses armées existaient, qui, en Italie, étaient susceptibles d'assister Héraclès: Héra Oplosmia, par exemple, en Grande-Grèce (à Crotone et Poseidonia), mais aussi dans le Latium avec Iuno Sospita et Iuno Curitis... D'autres encore (801)... Nous retiendrons surtout, cependant, parce qu'elle nous tente nous-même fortement, la référence à une autre déesse armée, plus orientale celle-ci: l'Astarté chypriote... Compagne d'Héraclès, Astarté l'est dans son sanctuaire de Kition, et, sur les côtes tyrrhéniennes, les lamelles de Pyrgi, la mentionnent, à la même époque, à peu près, où s'édifie le petit temple archaïque, et ce, s'il faut croire à l'hypothèse de E. Lipinski, en étroit rapport avec Melqart (802). Se pourrait-il qu'il n'y ait là qu'une coïncidence? Cet Hercule romain en qui se mêlent influences orientales et influences grecques - pour ne pas parler ici de l'héritage italique (803) - continue de vivre aux côtés d'un Héraclès grec, qui n'a pas lui-même cessé d'évoluer et qui, c'est du moins ce que je voudrais montrer, ne cesse pas de l'influencer. Retrouvons un instant les longues pages que Diodore - ce Sicilien qui hante les bibliothèques romaines - consacre au mythe grec. Aucun doute pour lui, nous le savons (804), si le fils d'Alcmène a conquis l'immortalité, c'est grâce à ses "pénibles travaux entrepris au profit du genre humain" (805), travaux par lesquels "il répandait la civilisation sur la terre" (806)... Que ce thème ait joui à Rome d'un succès durable, Macrobe le prouve,
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qui attribue à Héraclès la transfonnation des Saturnales et explique comment, remplaçant les sacrifices humains, on ne peut plus barbares, par des rites de substitution il en avait fait une fête civilisée plus conforme, de surcroît, aux exigences bien comprises des dieux (807). Mais nous avons pu voir également combien les aventures de celui que Georges Dumézil appelait "l'illustre marcheur de la fable grecque" (808) s'étaient enrichies de l'expérience des colons, qui, comme lui, avaient un jour quitté la mère patrie; comment, en particulier, s'étaient chargées d'un sens nouveau les aventures lointaines du héros, et singulièrement ce véritable périple de la Méditerranée occidentale que constitue l'expédition vers Erythie. Manipulée, infléchie par l'événement, interprétée dans le cadre de ce qu'à la suite de Georges Balandier, j'appellerai la "situation coloniale" (809), la tradition du voyage occidental d'Héraclès fait du héros grec l'archégète, expliquant et justifiant à la fois la présence de ses compatriotes dans ces régions où, de gré ou de force, ils s'étaient installés; légitimant, de même, la violence qui pouvait être faite aux indigènes - ces Barbares - dans le processus d'acculturation. Nous espérons avoir montré (810) que cet ordre, ainsi établi par le héros grec, était celui de la cité, que le mythe se structurait, en effet, autour de l'opposition nature/culture, alors profondément ressentie; que cette dichotomie entre la vie civilisée et l'agriotès, entre la chôra et l'eschatié, la légende, endossée par les Grecs de la colonisation la déplaçait, en quelque sorte, aux limites du monde connu, de l'oicouménè .., que, dans cette nouvelle perspective, l'eschatié s'étendait à tout ce qui n'était pas le monde civilisé, à tout ce qui n'était pas la Grèce. En même temps, il nous apparaissait clairement que, par delà la Grèce de Diodore, se profilait une autre réalité historique: celle de la Rome de César (811). Alors que l'Héraclès d'Apollodore, plus fidèle à la tradition purement grecque, ne fait, comme celui d'Eschyle, qu'effleurer la Gaule et n'y rencontre que des Ligures, celui de Diodore pénètre dans la Celtique, parcourt toute la contrée "abolit les coutumes sauvages, entre autres celle de tuer les étrangers" (812); s'unissant à la fille d'un roi du pays, il engendre un fils, nommé Galatos, qui, donnant son nom à son peuple (813), en fera l'héritier du héros grec; s'enfonçant "dans les profondeurs" du
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pays il fonde Alésia, "ville libre et imprenable, depuis le passage du héros... jusqu'à ce que César... réussisse à la soumettre, elle et le reste de la Celtique, à la puissance des Romains" (814). Traversant les Alpes, enfin, il rend la route "de rude et difficile qu'elle était, accessible à une armée avec tout son bagage" et, alors que les Barbares avaient coutume de piller et de massacrer quiconque passait les cols, il assure "pour toujours, la sécurité des passages" (815). La fable est on ne peut plus claire... Tous les éléments de l'action acculturatrice y sont exprimés (816) : captation, au profit du vainqueur, de l'histoire indigène (et par là même, sans aucun doute, "coup de pouce" donné aux différenciations sociales) (817); présentation optimiste de l'action "civilisatrice" (Héraclès pacifie, il abolit les moeurs par trop barbares, châtie les pillards et les brigands, assure la sécurité) ; fondation d'une ville destinée à devenir, comme le dit lui-même Diodore, "le foyer et la métropole de toute la Celtique"... Bref, Alésia, et la Celtique tout entière, conquises par Héraclès, appartiennent au monde civilisé, Diodore, en tout cas, les revendique avec force. C'est du même coup - puisqu'Alésia elle-même, à nouveau, a sombré dans la barbarie (818) - justifier les campagnes de César, et leur donner un sens: elles sont une reconquête, conduite pour rendre, une fois de plus, l'héritage d'Héraclès à ses descendants... Car c'est bien, derrière "le marcheur de la fable grecque", César et l'armée romaine qui se profilent désormais. On aurait tort, sans doute. de méconnaître la charge idéologique du récit de Diodore: ce paradigme qu'est devenu Héraclès, le Sicilien l'utilise désormais au profit du Romain. Comme son modèle mythique. César mérite d'être "divinisé pour la grandeur de ses exploits" ; c'est ainsi que se conclut le récit du passage d'Héraclès par la Gaule; les boeufs de Géryon, que le héros est censé ramener. ont sombré dans l'oubli; l'histoire a détourné le mythe... Encore fallait-il conférer à Rome ses droits à l'héritage d'Héraclès... Là encore l'exceptionnelle vigueur sexuelle du héros devait être détournée à des fins politiques: le fils d'Alcmène, passant par le Latium, y laissera deux fils : Palans; conçu par Lavinia, fille d'Evandre. et Latinos, né de la jeune fille hyperboréenne qui. enceinte de ses oeuvres, avait épousé Faunus
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roi des Aborigènes (819). Pour Diodore, il semble bien que l'épisode de la halte dans la Latium réponde au même but: le vol de Cacus, gommé, nous l'avons vu, (820), est remplacé par la rencontre idyllique d'Héraclès et des indigènes du Mont Palatin, l'établissement de l'Ara Maxima (821), sur les bords du Tibre, scellant définitivement l'alliance de ceux qui deviendraient les Romains et de celui qui, pour chacun, représentait l'image même de la Grèce présente en Occident. Denys d'Halicarnasse, un peu plus tard, affirmera de même l'origine hellénique des Romains et, plus encore que Diodore, donnera une interprétation "militaire" de la fonction civilisatrice d'Héraclès. Plus nettement aussi il fera servir la geste du héros grec en Occident aux desseins politiques sous-jacents dans son oeuvre (822). Nous ne reprendrons pas ici la démonstration de Paul Marie Martin qui met parfaitement en évidence comment, par "le choix de travaux hétérodoxes" et par "une série de coups de pouce assez discrets", il cherche à diffuser la politique augustéenne en direction du monde grec (823). Ce modèle de la cité, étendu par les Grecs de la colonisation jusqu'aux marges du monde grec, aux marges de la civilisation, Diodore n'a pas eu trop de mal à en faire celui d'un monde où c'est Rome qui, désormais, comme aux temps mythiques Héraclès, transforme une nature sauvage en un pays prospère, ouvre des routes et en assure la sécurité (l'allusion déjà citée à la route des Alpes est à ce titre on ne peut plus claire !) C'est elle, désormais, qui "pacifie", qui, à l'anarchie barbare substitue le règne de la justice et de la loi. Comme Polybe et Poseidonios l'avaient fait avant lui - Arnaldo Momigliano l'a bien montré(824). Diodore traite Rome en membre à part entière de la communauté civilisée que formait le monde grec ; non seulement il accepte la domination romaine, mais il prend fait et cause pour ses entreprises. Redisons le, c'est un aspect très limité de la personnalité, tellement complexe, tellement diverse aussi, de l'Hercule romain que nous avons abordé ici : sa nature chthonienne, par exemple, si fortement affirmée en Occident, si bien mise en valeur par Jean Bayet, n'apparaît guère. Elle explique pourtant qu'à Rome,
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Hercule restera longtemps le dieu qui donne la prospérité; elle explique aussi le grand succès populaire d'un culte qui. en Italie comme en bien d'autres régions de l'Empire. absorbe les pouvoirs de divinités topiques si facilement que ce n'est jamais le même Hercule qu'on vénère ici ou là. Tenue par les limites mêmes de mon sujet. j'ai simplement voulu rappeler que Rome - beaucoup plus tôt qu'on ne l'avait pensé - avait connu le culte d'un dieu moins purement grec. sans doute. qu'on ne le croyait. J'ai voulu montrer surtout que. dans l'Hercule romain. si souvent honoré par les épithètes deVictor et d'Invictus. dans le dieu dont on retrouve les traces partout où sont allés les légions et les fonctionnaires romains. dans le culte officiel. qu'à l'image d'Alexandre les empereurs lui voueront bientôt. il n'était pas possible de lire. uniquement. la transformation en un sens militaire. par un peuple conquérant. de la victoire sur la mort qui assurait au héros grec une immortalité tranquille. L'influence grecque en effet a continué de jouer sur le dieu romain (mais plus à sens unique. nous l'avons vu). L'hégémon.l'archég~te qu'était déjà Héraclès chez Stésichore. Pisandre. Pindare et qu'affmne plus exclusivement Diodore. justifie la conquête romaine. comme il avait justifié la colonisation grecque et le succès de ses entreprises garantit désormais celui de Rome. Mythe ou fable politique? Qu'il nous soit permis. après avoir cherché à dégager ce qu'au 1er siècle le mythe grec pouvait encore apporter à l'Héraclès romain. de dire. pour terminer. quelques mots du rapport dialectique qui s'est instauré entre une situation historique. celle de la conquête romaine. et un mythe. celui d'Héraclès... Sous la pression des circonstances et parce qu'en Grèce la classe dominante à laquelle appartiennent ces intellectuels s'accomode fort bien à d'une présence romaine qui a mis fin aux luttes sociales. le mythe connaît une nouvelle vie. une "dérivation" supplémentaire en tout cas... mais. à évoluer ainsi. il finit par perdre toute prégnance symbolique: Géryon n'est plus le monstre tricéphale symbole des forces des Enfers - car c'était bien là le sens initial de l'épreuve d'Héraclès -. Il n'est plus qu'un dynaste barbare cousu d'or. A trop dériver. le mythe s'est usé : il est devenu fable politique. instrument idéologique au service du conquérant romain.
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Fig. 49 : Hercule étrusco-italique (Vème siècle)
Lyon
= musée des Beaux-Arts. Inv. X 254 Photo C. Annequin
642 NOTES DE L'ÉPILOGUE
774775-
776-
777778-
779780781-
TITE-LIVE, 1,7 (= l, VI, 4 sq. ) et DENYS D'HALICARNASSE, Antiquités Romaines, l, 39-40. VIRGILE, Enéide, 8,193 sq.; PROPERCE, Elégies, IV, 9,1 à 74; OVIDE, Fastes, 1,581; pour DIODORE DE SICILE, IV, 21, 1 à 4 Héraclès fut accueilli, sur les bords du Tibre, par quelques indigènes habitant sur le Palatin, dont Cacius et Pinarius, les plus considérables d'entre eux. A son départ, il institue l'usage de la dîme: quiconque lui offrira le dixième de ses biens bénéficiera d'une vie très heureuse. Il n'est pas question, chez Diodore, du vol des troupeaux par Cacus. Sur les sources de la légende on se reportera à la quatrième partie (lIème chapitre, 1-3). Cf. H. LYNGBY, Beittllge zur Topographie des Forum Boarium Gebietes in Rom, dans Acta /nst. Rom. R.S., VIII, 7, Lund, 1954. cf. aussi D. VAN BERCHEM, Sanctuaires d'Hercule-Melqart, III, Syria, XLIV, 1967, qui (p. 308-311) discute les conclusions de H. Lyngby. J. BAYET, Les origines de l'Hercule romain, Paris, 1926. Outre les ouvrages généraux sur la religion romaine, signalons ici la mise au point récente de M. JACZYNOWSKA, Le culte de l'Hercule romain au temps du Haut-Empire, in ANRW, II, 17, 2, 1981, p. 631-661 qui, dépassant le cadre chronologique proposé, se propose de "montrer l'état et les directions de recherches sur le culte de l'Hercule romain" (p. 631). J. BAYET, op. cil., p. 476. J. BAYET, op. cil., p. 477. J. BAYET, op. cit., p. 478. J. Bayet, cependant, décèle "quelques indices d'apparence orientale" qu'il expliquerait volontiers par l'intermédiaire étrusque, ceux-ci ayant combiné en leur Herclé "certains traits de Melqart avec ceux d'Héraclès". Cf. aussi, du même auteur, Herclé, étude critique des principaux monuments relatifs à l'Hercule étrusque, op. cit., 1926. Cette idée d'un culte de rite grec est fondée sur le terme de ritus Graecus, presque constamment appliqué par les Anciens à l'Ara Maxima (TITE-LIVE l, VII, 3; DENYS d'HALICARNASSE, l, 40,3"; STRABON V, 3, 3 ete...), mais D. VAN BERCHEM note que l'épithète définit la tenue du sacrificateur (tête découverte et couronnée de lauriers) qui s'oppose certes à l'usage romain, mais ne suffit pas, à elle seule, à désigner un culte grec ; loc.
643
782783784-
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788789790791792-
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cil., pp. 307- 308). Sur ce point voir encore R. SCHILLING, Sacrum et Profanum, Latomus. 1971, pp. 963-968 repris dans Rites. cultes et dieux de Rome. Paris, 1979 du même auteur. La famille des Potitii s'éteignit dans l'année qui suivit et Appius Claudius perdit la vue. J. BAYET, op. cit., p. 479. D. VAN BERCHEM, Hercule Melqart à l'Ara Maxima. R.P.AA.. XXXII, 1959-1960, pp. 61-68 et, du même auteur, loc. cit., Syria. XLIV, 1967, pp. 73-109 et 307-333. J. BAYET. Histoire politique et psychologique de la religion romaine. 2ème édition, Paris, 1969, p. 289 ne modifie pas son opinion d'une origine hellénique de l'Hercule romain et doute de la présence phénicienne en ces lieux : "mais qui pouvait les attirer en cette pauvre région" ? Par exemple R. SCHILLING, La situation des études relatives à la religion romaine de la République (1950-1970), ANRW, l, 2, Berlin. 1972, p. 324. Parmi ces particularités, l'exclusion des femmes, le choix des victimes, le vêtement féminin des hommes participant au culte. L'usage de la dîme, de même, est attesté dans la religion phénicienne dès le IInd millénaire (p. 325). On se reportera à l'étude, faite dans notre première partie, des sanctuaires de Gadès et de Thasos. TITE-LIVE, l, 7, 12. D. VAN BERCHEM, loc. cit., (1967), p. 313. Dans notre première partie (deuxième chapitre: Lîxos et Gadès, fondations phéniciennes). On se reportera sur ce point au deuxième chapitre de notre première partie. Cf. le congrès tenu à Rome en nov. 1977: Lazio arcaico e mondo greco (PP. XXXII, 1977) et aussi le catalogue de l'exposition Naissance de Rome, Paris, 1977 et celui de l'exposition Enea nel Lazio. archeologia e mito. Rome 22 sept-31 déc. 1981. On trouvera une chronique et une bibliographie plus complète de J. POUCET, in A.C., XLIX, 1980, pp. 286-315. Enfin, le volume XXXVI de La Parola dei Passato (1981), Lazio arcaico e monde greco. présente plusieurs mises au point sur ce sujet. Cf. E. LA ROCCA, Note sull'importazioni greche in territorio laziale nell VIII secolo A.C., PP., XXXII, 1977, pp. 375·397. Pour l'auteur cette céramique peut être produite aussi bien dans la fondation grecque des Pithécusses que dans l'île d'Eubée, peut-être même à Rome, par des
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artisans grecs des Pithécusses. E. LA ROCCA a même envisagé l'existence d'un emporion grec au Forum boarium (D. Arch, VIII, 1974-1975 p. 94; contra G. Colonna, MEFR, 89, 1977, p. 486). Cf. bibliographie donnée en note supra. Dans cette région de S. Omobono, (à la fm du VIIème siècle ou au début du Vlème siècle) un sol de terre battue correspondrait à une zone sacrificielle (avec attestation, par les ossements, du suovetaurilia ) ; dans la 1ère moitié du Vlème siècle se construit un temple à podium, détruit après le milieu du siècle, mais immédiatement reconstruit Fin Vlè siècle le temple est abandonné et le niveau du sol surélevé. C'est sur ce niveau que s'établira le podium des temples jumeaux à Fortuna et Mater MalUta. A. SOMMELLA MURA, La decorazione architellOnica deI tempio arcaico, PP, 1977 pp. 62-128 ; Dans une mise au point de la P.P. XXXVI, 1981 (op. cit.,) A. SOMMELLA MURA, malgré les interprétations divergentes, réaffmne le bien fondé de ses hypothèses (Il gruppo di Eracle e Athena pp. 59-64). On se reportera. sur ce point, à notre étude iconographique (à paraître). Certes, M. CRISTOFANI insiste, pour sa part, sur les rapprochements avec la sculpture étrusque (SuUe terrecotte di S. Omobono, PP. 1981, pp. 31-32), mais peut être pourrait-on poser le problème d'une commune inspiration : il est frappant de constater, par exemple, à quel point les premiers bronzes étrusques représentant Héraclès adoptent le type chypriote (cf. Herclé, loc. cit., de J. Bayet). De l'Héraclès grec à l'Hercule romain, (congrès Eirénè, Prague, 1982), Proceedings of the 16 th International Eirene Conference, Prague, 1983, l, pp. 267-273. C. AMPOLO, Il gruppo acroteriale di S. Omobomo, PP, XXXVI, 1981, pp. 32-35. A. GIULIANO, Sul fronlOne di S. Omobono, PP, XXXVI, 1981, p. 35 (l'auteur se prononce aussi sur le groupe sculpté "d'Athéna et Héraclès"). F. COAREll..I, Sull'Area sacra di S. Omobono, PP, XXXVI, 1981, pp. 35-38. On se reportera, sur ce point, à notre étude de l'egersis de MeJqan (dans le deuxième chapitre de notre quatrième partie). On se reportera au deuxième chapitre de notre quatrième partie pour cette rencontre de l'Héraclès grec et d'un héros ou dieu topique des peuples italiques, peut-être le Récaranus de la légende.
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Dans notre deuxième partie (Héraclès et la colonisation. Il, La resémantisation du mythe ). DIODORE DE SICILE, l, 2, 4. DIODORE DE SICILE, IV, 8, 5. MACROBE, Saturnales, 1,31. G. DUMÉZIL, La religion romaine archaïque, Paris, 1966, p. 420. G. BALANDIER, Sens et puissance, Paris, 1981 (2e éd.). Héraclès et la colonisation II, La resémantisation du mythe. Cf. encore Héraclès, héros culturel, loc. cit., (1984), pp. 9-29. On ne s'en étonnera pas, si on se reporte au second chapitre de notre deuxième partie. Retour aux sources. DIODORE DE SICILE, IV, 19,1. DIODORE DE SICILE, V, 24, 1-3. DIODORE DE SICILE, IV, 19,2. DIODORE DE SICILE, IV, 19,3 et4. Pour une étude plus détaillée du processus on se reportera à notre seconde partie. Cette parenté avec le vainqueur que confère aux familles règnantes de tels épisodes mythiques, ou d'une façon générale, l'héritage accepté de la civilisation du vainqueur a très certainement joué un rôle important dans l'évolution des sociétés indigènes. La fin d'Entremont, par exemple, montre le sort privilégié réservé par les Romains au parti hellénisé, lorsqu'ils prennent et détruisent l'oppidum des Salyens. Cf. DIODORE IV, 19, 2. On se reportera, sur ce point, à notre seconde partie. Pour A. MOMIGLIANO (Sagesses Barbares, Paris, 1979, p. 31), l'héritage d'Hercule est revendiqué par les grandes familles romaines depuis fort longtemps. Contre F. MONzER qui considère que la légende développée par les Fabü d'une descendance d'Hercule est une invention d'un érudit de l'époque augustéenne (R.E., 1 v. FabU ), il oppose le témoignage de PLINE, H .N., 34, 40 qui fait remonter au moins à Fabius Cunctator, pendant la seconde guerre punique, le culte voué par les Fabii à Hercule. Pour l'étude d'une confumation de la tradition historico-érudite par la découverte du temple de l'aire de S. Omobono, cf. F. SBORDONE, Il culto di Eracle e il tempio arcaico di S. Omobono, PP, XXXVI, 1981, pp. 28-31. DIODORE, IV, 21,1 à 4. Cf. notre seconde partie. DIODORE DE SICILE, IV, 21, 4. L'Ara Maxima n'est pas mentionnée mais bien plutÔt l'usage de la d1me qui lui est lié et Diodore ajoute que "les Romains ont élevé à ce dieu, sur le bord du
646 Tibre, un temple splendide, où ils lui consacrent la dixième partie de leurs biens". 822- DENYS d'HALICARNASSE, Antiquités Romaines, l, 34 à 44. 823- P.M. MARTIN, Héraclès en Italie d'après Denys d'Halicarnasse, Athenaeum, L, 1972, pp. 252-275. 824- A. MOMIGLIANO, Sagesses barbares, Paris, 1979. Cf. en particulier le chapitre il: Polybe et Poseidonios.
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CONCLUSIONS
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"... Il ny a de réalité que le présent. Dès qu'un événement est au passé, il devient imaginaire, donc hypothétique" Friedrich Dürrenmatt, interview au Monde des Livres, 19-IX-1986
Notre cheminement, peut-être, aura paru un peu vagabond... D'une rive à l'autre de la Méditerranée, des auteurs romains qui tardivement situent le mythe à Hésiode qui le pose comme vérité, cette démarche récurrente que nous avons suivie inspirée peut-être des préoccupations stratigraphiques de l'archéologue - nous a semblé, en définitive, inévitable... En cela, nous ne dirons pas que "la méthode c'est le chemin après qu'on l'a parcouru", même si l'expérience appone beaucoup en savoir certes, mais aussi en pratique de l'histoire. Qu'on entende bien: nous n'avions, au départ, rien à démontrer, rien à vérifier et, peut-être même, tout à apprendre: mais le souci qui, dès lors, était nôtre et a guidé notre route a été de traiter le mythe (et on acceptera peut-être, ici, ce singulier pour parler de deux exploits qui, dans la légende d'Héraclès apparaissent - ne serait-ce que chronologiquement - bien différents) comme un horizon privilégié de la connaissance : privilégié parce que total, parce que globalisant; souci encore de ne rien sacrifier, ni de l'universalité d'un thème (le besoin s'est toujours fait sentir, et partout, d'apprivoiser l'homme à la mort qui est son destin), ni de son unicité, dans la mesure, où, comme tout mythe, celui que nous avions choisi d'étudier était système de référence pour une expérience historique donnée, et nous entendons le terme, bien sûr, dans son sens le plus large (825). Cette exigence signifiait qu'alors même que nous considérions comme indispensable le recours au comparatisme, à la psychanalyse, au symbolisme, nous n'en fassions jamais la ou les explication(s) suffisante(s), et qu'en dernier ressort l'expérience grecque sur laquelle nous nous penchions restât bien le sujet de notre étude... Bref c'est le souci prioritaire de l'histoire qui nous a guidée jusques et y compris dans nos rapports avec la nécessaire étape du structuralisme.
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Cette étude - et nous voudrions clore, par ces quelques remarques, notre discours sur la méthode - (826) nous aura, dans ce domaine, apporté quelques certitudes. Elle nous aura permis, en particulier, de vérifier l'extraordinaire pouvoir d'adaptation, de réactivation d'un mythe qui, né peut-être avec l'histoire, "fonctionne" encore, alors même que s'épuise l'expérience grecque. Et c'est surtout ce que nous voudrions retenir ici, en soulignant : - La nécessaire autonomie du mythe, une autonomie, que n'en déplaise à certains détracteurs d'un marxisme conçu bien à tort comme un "réductionnisme économique" (827) - Marx avait reconnu bien avant qu'on ne l'utilise comme argument contre l'histoire; une autonomie qui procède du statut même de la conscience (qu'on relise la IVème thèse sur Feuerbach !) (828) et qui rend illusoire de lire, dans le mythe, le simple reflet du champ social ou de l'histoire, dont cependant il procède. Si le mythe, en effet, naît d'un réel historique défini, il ne s'en caractérise pas moins par "la déperdition de la qualité historique des choses" : le mythe ne nie pas les choses, précise Roland Barthes, sa fonction est au contraire d'en parler; simplement "il les purifie, les innocente, les fonde en nature et en éternité" (829). - L'importance de la fonction symbolique comme opérateur dans cette "prestidigitation", dans ce retournement du réel, fonction symbolique qui, précisément, rend si complexes les rapports entre les pratiques sociales et le langage mythique. Ce dernier n'en est ni le reflet, ni l'expression - fût-elle opaque -, mais simplement "pose une relation nécessaire entre des termes dont le rapport n'est ni évident, ni pensable, ni expérimentable..." lie ce qui doit "rester ensemble" sans qu'on puisse éprouver ou prouver cette nécessité" (830). Et, à ce titre, il est bien vrai qu'une théorie du langage symbolique reste à construire. - L'évolution qui cependant se dessine au fur et à mesure qu'on s'éloigne des origines: avec la naissance conjointe de la philosophie et de la science dans les cités économiquement évoluées de l'Ionie, avec le développement de l'histoire, avec les exégèses rationnelles qui se répandent, plus ou moins vite, plus ou moins complètement, on a l'impression qu'à la fois s'accuse cette autonomie du mythe par rapport au réel qui l'a vu naître et qu'en même temps elle s'estompe, par l'usage qu'on en fait dans
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une situation nouvelle. De vérité qu'il était, le mythe n'est plus guère que récit susceptible de manipulations diverses. Alors même que sa dimension symbolique se perd, sa fonction idéologique tend à s'accroître: l'utilisation qu'en fait Diodore est, à cet égard, révélatrice. - Et, pour terminer, ce qui nous paraît fondamental: tant d'indépendance par rapport à la réalité de l'histoire n'empêche pas qu'on la retrouve à chaque pas. Si, dans une première partie, nous avons vu le mythe simplement poussé par les vagues de l'histoire, c'est en lui-même que nous avons pu, ensuite, retrouver, dans la longue durée, les traces des transformations de la société. Dans les "dérivations" successives du mythe, dans l'évolution même de ce qu'il en reste d'essentiel: la victoire brutale sur les forces de la mort se changeant en quête vertueuse de l'immortalité... Le mythe, en quelque sorte, nous a paru fonder sa propre diachronie.
La dérivation majeure, celle qu'il était le plus facile d'appréhender, apparaît, nous l'avons vu dans notre seconde partie, lorsque le mythe s'inscrit dans le cadre de la cité, et plus précisément - le thème du voyage vers l'Ouest s'y prêtait - dans le contexte de la colonisation. Il est assez piquant, à cet égard, de remarquer que l'expression, jugée "particulièrement emphatique" de "mission civilisatrice" remonte pour les historiens ou les sociologues de la colonisation (la nôtre) à Napoléon III (831). Or nous avons vu Diodore exprimer constamment cette idée à propos d'Héraclès, apportant - au prix d'une juste violence! - la paix, la sécurité, la culture aux Barbares d'Occident... C'est bien une "situation coloniale" qui vit se multiplier les épisodes de la geste héracléenne et le fit parcourir en tous sens les domaines nouvellement conquis. Quelles que soient les différences - qu'on ne saurait oublier - le phénomène antique et celui, plus proche de nous et aux effets directement observables encore, de la colonisation européenne, se rejoignent à certains égards : une même minorité se superposant à une majorité indigène de civilisation et de comportement différents: une minorité qui agit sur les peuples autochtones "avec une vigueur disproportionnée au nombre, (qui)
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est si l'on veut extrêmement contagieuse et, de sa nature, déformante" (832); une domination économique (833) qui "cherche constamment à se justifier par un ensemble de pseudo-raisons", qui développe, en conséquence, une idéologie légitimatrice : l'exemple d'Héraclès gagnant à la lutte le royaume d'Eryx, s'il n'est pas le seul, offre peut-être la plus transparente de ces justifications ! ; "rapports qui impliquent tensions et conflits" (834), tensions et conflits à l'image desquels se transforment les anciens combats d'Héraclès: Géryon, le maître des animaux, le monstre triple, devient le souverain barbare cousu d'or, alors que se multiplie le nombre des adversaires du héros, brigands pillards ou souverains impies et ignorants de la loi qu'il est indispensable de châtier; tentative, enfin, "pour compromettre en l'intéressant l'aristocratie indigène" (835)... un projet que sert bien l'exceptionnelle vigueur sexuelle d'Héraclès (836).
Mais, si la colonisation fit du voyage occidental d'Héraclès le paradigme de l'acculturation du Barbare, si l'ordre, les normes qui furent ainsi étendues aux limites mêmes du monde grec sont bien l'ordre et les normes de la cité, il serait abusif d'en tirer argument pour méconnaître ce qui, dans le mythe, a pu préexister à cette mise en forme, nous dirions volontiers à cette mise en structure. Cet amont de la légende constituée d'Héraclès - ces thèmes qui tiennent à la pérennité du mythe - et qui portent en eux leurs propres dérivations, leur propre évolution - nous avons essayé de les retrouver dans nos troisième et quatrième parties. Ils éclairent, pensons-nous, les fonctions d'Héraclès - et par là-même du héros - ils disent aussi, croyons-nous, la raison d'être essentielle du mythe: fournir, en dernière analyse, une justification de l'existence humaine Image d'un Héraclès qui, loin d'être le banal compagnon d'Hermès comme protecteur de la jeunesse au gymnase (837) (la présence d'Hennès, à elle seule, pourrait interroger l'historien!),
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joue un rôle dans la cité, à Athènes comme à Sparte, à Thasos comme à Agyrion dans l'intégration des jeunes gens dans la communauté des citoyens. Invention de la Cité ou héritage bien assumé? Le combat du héros contre le monstre triple, figure bien connue des initiations indo-européennes, maître des animaux depuis une époque plus reculée encore, incite à pencher pour l'héritage... le mythe a éclairé la pratique à la fois religieuse et sociale; celle-ci, à son tour, invite à relire le mythe en ce sens... l'initiation à Eleusis, qui finalement devient la condition du triomphe d'Héraclès sur l'Hadès, montre à la fois la charge potentielle du thème et le poids d'une évolution, parallèle à celle du sentiment religieux en Grèce. Image d'Héraclès au travail... image celle-ci paradoxale, car rien, apparemment, n'est plus éloigné du travail que la quête des boeufs de Géryon ou celle des pommes des Hespérides. Mais il se trouve que ces épreuves font partie de la série des ath/oi qui engagent Héraclès dans la dépendance d'Eurysthée... Il fallait donc, pour bien les comprendre, se débarrasser de cette contradiction apparente et, si cette démarche nous a éclairée sur le sens des "travaux" d'Héraclès, elle nous a donné aussi - dans la mesure où elle nous permettait d'appréhender l'idée qu'en Grèce on se faisait du travail- la possibilité d'en mieux saisir, une fois de plus, l'évolution, de mieux comprendre comment il était inévitable qu'Héraclès devînt, finalement, le héros du ponos librement consenti. Image d'Héraclès bouvier et sacrificateur à la fois ; image imposée par le rapt des rouges vaches d'Erythie, finalement sacrifiées à Héra, et qui, dans la mesure même où elle estompe les frontières du modèle classique de la thusia, dévoile le statut ambigu d'un héros qui, une fois de plus, parcoun tout l'hinter/and entre bêtes, hommes et dieux. Dernière image enfin, celle d'Héraclès face au double visage de l'au-delà: /eimon d'Erythie et k~pos des Hespérides, visage triple du monstre infernal et pommes d'or gage d'immonalité... Autant d'images déployées "comme une possibilité de kaleïdoscope qu'on n'aurait pas encore fait tourner" (838).
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Ce kaléidoscope, il faut maintenant le faire tourner, ou, plus exactement (car nous ne savons rien des hasards ou des lois qui en déterminent le fonctionnement !), il faut essayer de retrouver une logique dans l'organisation de ces images. Toutes, nous l'avons remarqué, conduisent à Argos, à Argos où s'impose l'idée d'un Héraclès, non pas tant ennemi que serviteur de la déesse, une déesse à la gloire de laquelle il travaille avant même que la légende n'en fasse celui qui tient sa gloire d'Héra (839), Héra "argienne" comme le dit encore Homère, déesse primitive aux multiples fonctions, potnia théron règnant sur la terre riche en boeufs, Héra, "la Dame", comme ailleurs on dit, la "Despoina", la maîtresse; Héra, le féminin - peut-être - de héros. Cette position subalterne du parèdre, Héraclès la conservera, assez proche de ce qu'elle pouvait être à l'origine, en Occident, où le héros apparaît encore beaucoup plus comme l'allié de la déesse que comme son ennemi; plus proche encore en Orient où cet héritage lui permettait de se glisser facilement dans le rôle des dieux mourant et renaissant. De ces identifications, l'une - et nous espérons en avoir éclairé les raisons - devait avoir le succès que l'on sait : celle qui ferait d'Héraclès le parèdre d'une autre de ces grandes déesses primitives: Astarté, et l'homologue d'un dieu phénicien, de Melqart qui, quelles que soient les fonctions dont on l'a gratifié (840), quels que soient ses propres héritages, fmit par être, du moins par apparaître, comme "l'éponyme déifié des rois de Tyr" (841). Paolo Xella voit dans cette appartenance de Melqart à la catégorie des mlk (m) la raison essentielle du syncrétisme qui l'unit à Héraclès, le héros-dieu; tous deux ne participent-ils pas à la fois de la nature divine et de la nature humaine? (842) Cet éclairage nouveau est certes fondamental. Peut-être cependant ne doit-on pas l'envisager (ou pas exclusivement) sur le plan de la nature de l'un et de l'autre, mais bien plutôt en tenant compte des fonctions qu'ils assument : nous pensons en effet que, plus qu'autour de la nature des dieux, c'est autour des fonctions divines que s'articulent les associations, les syncrétismes. Or, comme Melqart, roi de la cité, Héraclès, par son passé achéen, est héritier de la royauté sacrée, comme lui il paraît avoir assumé le très large éventail des fonctions qui assurent la survie,
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la reproduction, le succès de la communauté qu'il protège... des fonctions pour lesquelles il faut, périodiquement, entretenir sa force vitale (car c'est bien là le rôle de l'égersis de Melqart et ce pourrait être aussi, à l'origine, celui du bûcher d'Héraclès qui - s'il n'est pas un pur emprunt au dieu oriental - se rattacherait ainsi sans incohérence au lointain passé du parèdre d'Héra). Ce sont ces fonctions, enfin, qui, faisant d'eux des protecteurs "complets" de la cité, expliquent, qu'ils aient pu en être les archégttes . Et, si nous avons, dans cette recherche, fait tant de place à l'expansion commerciale des deux peuples, c'est parce qu'il semble bien que, tant géographiquement que chronologiquement, cette dynamique de l'archégète ait eu un rôle déterminant dans la rencontre de Melqart et d'Héraclès. Mais nous n'en sommes pas encore là. En Grèce, où avec les Achéens, puis avec les Doriens s'est imposée l'empreinte indo-européenne, la réinterprétation du mythe - favorisée peut-être par certaines rencontres (843) - semble bien être à l'origine du développement de la légende: la soumission d'Héraclès devenait celle du guerrier au souverain Eurysthée et se développait le thème de l'hostilité d'Héra, rendue nécessaire pour comprendre cette nouvelle situation.
TI est plus facile - et moins hypothétique - de retrouver la marque de la cité sur la légende. Elle témoigne tout à la fois des capacités intégratrices et du pouvoir structurant de ces communautés nouvelles; elle révèle, en même temps, les rapports inédits qui s'établissent en leur sein, - non seulement entre les hommes, - mais encore entre les hommes et les dieux - et, pourrait-on dire, à la jonction de ces deux espaces: l'espace horizontal de la société, l'espace vertical du divin, au lieu où se définit la place de l'homme dans l'univers, où s'individualiseront, après les fortes cosmogonies des débuts, les territoires de la géographie, de la philosophie, de l'eschatologie ou de la métaphysique. Héraclès, en effet, aide à "penser" les rapports des hommes
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entre eux: intégration des jeunes dans la communauté des adultes; place respective de tous dans la cité; situation de certains "entre l'esclavage et la liberté"... Il aide les hommes également, lui le héros/bête, lui le héros/dieu, à se situer sur l'échelle verticale des valeurs; il met en rapport le profane et le sacré: c'est vrai de ses "travaux" qui passent de l'activité la plus vile à l'exploit proprement surnaturel; c'est vrai de son rôle dans l'initiation; c'est vrai encore de son rôle dans le sacrifice; c'est vrai enfin de toute son existence, puisque son apothéose finale - qu'elle s'explique par l'initiation à Eleusis, se traduise par le bûcher de l'Oeta, ou se réalise par l'adoption d'Héra ou le mariage avec Hébè - le fait, pour sa part, quitter définitivement le monde des hommes pour celui de la félicité éternelle avec les dieux. Héraclès, enfin, aide les hommes à trouver leur place dans un cosmos lourd de signification cachée et c'est cet aspect, surtout, que nous retiendrons, dans la mesure où il nous parait cristalliser, à lui seul, les multiples facettes du mythe occidental d'Héraclès.
Le voyage d'Héraclès vers l'île rouge de Géryon, ou vers le jardin des Hespérides (nous espérons avoir convaincu que c'est du même pays du Couchant qu'il s'agit) s'est enrichi, c'est bien évident, des connaissances géographiques des Grecs. TI reste cependant, au moment même où, au terme de son évolution, nous l'avons appréhendé, largement imaginaire: dans les jalons que nous avons tenté de cartographier il ne faut pas chercher d'itinéraire véritable, pas plus qu'il ne serait raisonnable de voir, dans les cartes ioniennes, des instruments précis de la connaissance géographique. "Cartes-images", avons-nous dit (844), images largement mythiques du monde et, en ce qui concerne les nôtres, images d'un mythe étendu aux limites mêmes du monde (845). L'intérêt du mythe est autre: ce pays du couchant, où, très tôt Héraclès tue Géryon pour mieux voler ses boeufs, où plus tard, il va cueillir les fameuses pommes d'or, est, à tous égards, l'espace de la conjonction des extrêmes: du connu et de l'inconnu, du Jour et de la Nuit, de la vie et de la mort. Passé ce
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seuil est le C6cpot' ... un tenne qu'utilise Pindare pour définir l'au-delà de Gadès et qui, lourd de sens, connote à la fois les ténèbres et les Enfers, mais aussi l'Occident... On s'en aperçoit bien dans l'emploi que, dans la XXVème Idylle, en fait Théocrite (846). Conjonction des extrêmes, encore: il est le pays où, nous l'avons vu, "les palais étoilés des Cieux" répondent aux "abûnes marins". Mais cela suffit-il pour faire de cet univers d'Atlas et des Hespérides, comme le dit Alain Ballabriga, un omphalos, "un nombril du monde, c'est-à-dire un point qui, d'une façon "central" comme l'implique le texte d'Euripide, se présente comme une zone où s'effectuent la rupture et la fusion des niveaux cosmiques, dans le sens vertical: coïncidence du haut et du bas, ou horizontal: coïncidence du levant et du couchant" (847) ? Nous ne le pensons pas: lointains indéfinissables, eschatiai disent nos premiers textes, finistères, répèteront les Romains... L'idée dominante nie précisément celle de l'ombilic et la conjonction des extrêmes, que nous relevons nous aussi, n'autorise pas, à elle seule, à en faire un "centre". En revanche, ce qui nous paraît à la fois plus confonne à l'image du monde que nous ont laissée les Grecs, plus respectueux aussi de cet imaginaire dans lequel intervient Héraclès, ce que, par conséquent, nous envisagerions volontiers, c'est de reconnaître, dans le héros, ce "centre" mythique, cet opérateur logique qui aide à "penser l'espace" et fait, précisément se rejoindre les extrêmes: Gilles Deleuze l'avait pressenti, qui, dans la Logique du sens, parle ainsi du héros: "Il est le pacificateur et l'arpenteur de la terre, il foule même la smface des eaux... Il remonte ou redescend à la surface, par tous les moyens... double lutte contre la profondeur et la hauteur: toute la pensée réorientée, nouvelle géographie" (848). Nouvelle cosmogonie plutôt, car c'est bien de l'inscription de l'homme dans le cosmos qu'il s'agit, de sa place dans un monde mal connu, de ses angoisses, aussi, devant un au-delà qui signifie la mort... ... La mort qui plane sur tous les travaux du héros, dès que, chez Homère, ils nous sont connus, la mort, présente, plus singulièrement encore, au coeur de ceux que nous avons étudiés. Cette mort, Héraclès, contrairement à Gilgamesh, réussira à la
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vaincre; ces fruits d'or des Hespérides que nul ne peut cueillir, il les obtiendra; ce pays merveilleux auquel nul ne peut accéder, lui seul l'atteindra, et ce à la suite d'une série d'épreuves /transgressions dont Mircéa Eliade a bien montré, non seulement qu'elles constituaient l'archétype des rites d'initiation, mais, de plus, traduisaient "sous une forme plastique et dramatique l'acte même par lequel l'esprit transcende un cosmos conditionné, polaire et fragmentaire, pour retrouver l'unité fondamentale d'avant la création" (849), d'avant la séparation d'avec les dieux, dirions-nous plutôt pour la Grèce! Héros de la médiation (et si, sur toutes ces marges où croisait Héraclès, nous avons rencontré Hennès, ce n'est pas un hasard !); héros de la transgression aussi... comme cette femme-chaman en honneur chez les Chors et parvenue au rang d'Esprit - Maître pour avoir bravé le grand dieu Ulgen, "cas de divinisation à la suite d'une transgression, ainsi qu'il advient souvent aux héros civilisateurs", commente Eveline Lot-Falck... (850). Les fonctions d'Héraclès, on le voit, peuvent se joindre en un tout cohérent. Si le mythe d'Héraclès fmit ainsi par devenir pour les Grecs un véritable mythe d'identité, s'il les aide à se définir par rapport à l'autre, qu'il soit bête ou dieu, qu'il soit tout simplement homme, si enfin - ultime dérivation - les hommes se servent de lui pour se définir par rapport à ce qui n'est pas la Grèce (ou, plus tard encore, le monde gréco-romain) ... bref, par rapport au Barbare... Si Héraclès, ainsi, aide à penser l'altérité, ne serait-ce pas parce qu'au coeur du mythe, se trouve la victoire sur Hadès, sur "cette altérité radicale, cette extrême absence de forme, ce non être par excellence que constitue le phénomène de la mort" (851). Homme ou dieu? mortel ou immortel? le destin d'Héraclès répond à une question que seul le mythe ose résoudre et que. plus tard. poseront les philosophes. en des tennes. il est vrai. différents. à la fois universels et ontologiques:
"Les immortels sont mortels et les mortels immortels, les uns vivent de la mort des autres, les autres meurent de la vie des uns" Héraclite (852)
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NOTES DE LA CONCLUSION
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"(Celle) de son subconscient, (celle) de son insertion dans le groupe social et dans le cosmos". Cf. P. LÉVEQUE, Problèmes de l'histoire et des sociétés antiques, Aujourd'hui l'histoire, Paris, 1974, pp. 71-93. Jean OOURNES, loc. cit., cite un proverbe japonais: "Prenez garde d'analyser le doigt qui montre la lune en oubliant la lune". Nous nous pennettons de citer cette phrase (qui pourrait être un encouragement pour un retour au positivisme) dans la mesure où nous avons conscience d'avoir accordé nous même une certaine importance à la méthode t Ils sont légion, Cf. par exemple, J. MOLINO, Sur la situation symbolique, l'ARC, numéro consacré à G. Duby, Paris, 1978, pp. 20-25. MARX, Thèses sur Feuerbach, L'idéologie allemande (Marx et Engels) Paris, traduction des Editions sociales, 1976; cf. C. JOURDAIN-ANNEQUIN, loc. cit., DHA, 8, 1982, note 275. Marx, il est vrai, a laissé peu exploré ce domaine de l'activité humaine, mais il a toujours souligné, comme le note J. DUVIGNAUD, (L'ARC, op. cit., pp. 26-31», "l'enchevêtrement complexe du champ mental et du champ social, de l'imaginaire et de l'activité productrice". Voir sur ce chapitre les travaux de M. GODELIER: entre autres, Marxisme anthropologie et religion, Raison présente, xvrn, 1971, pp. 45-65 et, La part "idéelle" du réel, l'ARC, op. cit., pp. 49-56... Voir aussi les recherches de O. LONGO, par exemple, Rapporti di riproduzione, "sacrifici" di adolescenti e controllo demographico nella Grecia antica, Colloque de Bressanone, op. cit., pp. 127-163. R. BARTHES, op. cit., p. 230. M. DE CERTEAU, L'Arc, op. cit., "table ronde", pp. 82-83. G. BALANDIER, La situation coloniale, une approche théorique dans Cahiers Internationaux de Sociologie, XI, 1951, pp. 44-79. H. LAURENTIE, Notes sur une philosophie de la politique coloniale française, Renaissance, nO spécial, oct. 1944. Cité par G. BALANDIER, loc. cit., p. 62. Nous ne parlerons pas, dans le cas de la colonisation grecque, de domination politique: lorsqu'elle reste dans les limites de la cité en effet (et nous l'avons vu la politique de conquête territoriale des
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DeYnoménides, à cet égard, a des implications intéressantes!) l'intégration est moindre et le processus de refus plus facile. G. BALANDIER, loc. cit., p. 54. Cf. G. BALANDIER, loc. cit., p. 48 qui, à ce propos cite Lyautey: "mettre la classe dirigeante dans nos intérêts" On se reportera sur ce point p. 356 et note 4 (Inème partie). Cf. encore récemment, M. JOST (Sanctuaires et Cultes d'Arcadie, Paris, 1985) mentionne, dans la rubrique "divers cultes mineurs" et sans les commenter, les témoignages rapportés par Pausanias des mythes et cultes perpétuant le souvenir d'Héraclès en Mégalopolitide et estime simplement, à propos du temple conjoint d'Héraclès et d'Hermès, près du stade, sur la rive sud de l'Hélisson, que "les attributions agonistiques d'Héraclès, ce modèle mythique de l'athlète complet, étaient consacrées, à Mégalopolis, par l'existence d'un culte de type divin" p. 533. Je rappelle que j'emprunte l'image primitive à Jean Dournes, cf. supra, p. 319 et note 500 (IIème partie). Pour le nom d'Héraclès, on se reportera à la note 256 du prologue. Cf. supra, , notre première partie. E. LIPINSKI, loc. cit ., p. 51. Cf. encore C. BONNET, op. cit., p. 89: "Melqart est à la fois un roi déifié et un dieu souverain". Cf. F.C. PHILIPS, pour qui la figure classique d'Héraclès est la réunion de deux héros locaux à l'origine séparés, l'un béotien, l'autre peloponnésien, Héraclès, CW. LXXI, 1978, pp. 431-440. Distinction établie, nous le rappelons, par G. KISH, op. cit., p. 9. L'image des cieux était-elle plus précise? C'est apparemment ce que pensent R. ROSENSTINGL et E. SOLA, qui - sans toutefois apporter d'arguments convaincants - voient, dans le dixième des Travaux d'Hercule, un vieux périple vers les terres hispaniques: El décimo trabajo de Hercule: Un paleoperiplo por tierras Hispanicas, Ampurias, 3840, 1977, pp. 543-548. THÉOCRITE, Idylles, XXV, 85. A. BALLABRIGA, Le Soleil et le Tartare, l'image mythique du monde en Grèce archarque, Paris, 1986, p. 84. Nous prenons connaissance, au moment de conclure notre étude, de ce livre qui vient de paraître. Si, en ce qui concerne les mythes héracléens, utilisés, parmi d'autres, pour appréhender cette image mythique du monde en Grèce archarque (souligné par nous) nous sommes sensibles à de larges convergences avec nos propres observations, nos réticences sont
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grandes à admettre (outre l'idée de cet ombilic) la structure à quatre pôles solsticiaux que constituerait la quête des Hespérides, structure il est vrai amorcée au Vème siècle par Phérécyde et dans laquelle entre, à notre gré, une forte part de reconstitution arbitraire. G. DELEUZE, Logique du sens, Paris, 1969, p. 157. M. ELIADE, Traité d'histoire des religions, Paris, 1962, p. 358 (II n'est pas question d'Héraclès, mais de l'initiation en général). E. LûT-FALCK, Rites de chasse chez les peuples sibériens, op. cit., p. 61. Une fois de plus, constatons-le, les racines du mythe nous paraissent plonger dans un monde où, sur un autre plan, conduisait la théorie de W. Burkert (dans Il Mito Greco, op. cit.), une théorie qu'au départ, nous jugions pourtant audacieuse ! J.P. VERNANT,dans son Introduction àLa mort. les morts dans les Sociétés anciennes. op. cit., p. 6. HÉRACLITE, De la nature. frg. 2 H. DIELS, W. KRANZ, Die Fragmente der Vorsokratiker. Berlin, 1960 (9), noté ici dans la traduction de J. BRUN, Héraclite ou le philosophe de l'éternel retour, Paris, 1969 (2) p. 132.
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2. Auteurs Lorsqu'elles ne sont pas précisées, les références sont celles des Editions des Belles Lettres, CUF, Paris. Les éditions autres utilisées - ne serait-ce qu'à titre comparatif - ou les traductions personnelles sont signalées en notes. En ce qui concerne certains auteurs, dont l'importance est capitale pour le sujet: Diodore, Apollodore, Pausanias... nous noussommesreportée: - soit au texte de l'édition anglaise (Loeb Classical Ubrary) pour Diodore: C.H. OLDFATHER, Diodorus of Sicily, vol. 1 à III, Londres / Cambridge, 1967-1970. pour Pausanias: W.H.S. JONES et RA. ORMEROD, Pausanias, Description of Greece, Londres/Cambridge, 1959-1961. - soit au texte de l'édition allemande (Teubner) en particulier pour Apollodore: R. WAGNER, Mythographi Graeci, J, Apollodori Bibliotheca, Stuttgart, rééd. 1965.
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Beazley Archive Computer Project, Ashmo1ean Museum Library, Oxford et par l'Istituto di Archeologia dell'Università di Pisa qui infonnatise le Corpus Vasorum Antiquorum . Nous tenons à remercier très vivement Ruth Glynn, d'une part, Carla di Bari et Gabriella Orsolini-Ronzitti, d'autre part. III . BIBLIOGRAPHIE MODERNE
C'est une bibliographie succincte qu'on trouvera ici. Seules les études les plus régulièrement citées y figurent. Il va de soi que cette bibliographie ne présume pas de l'importance historique des lectures prises en compte tout au long de cette recherche et qu'elle ne se substitue en aucune façon aux références d'ouvrages et articles mentionnés dans les notes.
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690 TABLEAUX
1.
Le dodécathlos dans la tradition littéraire.
II·
Auteurs et oeuvres cités par Apollodore.
III .
L'héritage mythographique d'Apollodore. Approche chronologique.
p. 240
Apollodore: la quête des pommes d'or des Hespérides, schéma actantiel.
p.265
Diodore de Sicile: la quête des pommes d'or des Hespérides (N, 26), schéma actantiel.
p. 266
Diodore de Sicile: la quête des pommes d'or des Hespérides (IV, 27), schéma actantiel.
p. 266
IV -
VVI-
p. 13 p.237-239
VII . Apollodore: la quête des boeufs de Géryon, schéma actantiel.
p. 267
VIII . Diodore de Sicile : la quête des boeufs de Géryon, schéma actantiel.
IX -
Ath/os et misthos dans l'épisode d'Héraclès chez Augias.
p. 267 p.449
691
FIGURES ET CARTES Couverture: Héraclès chypriote (provenance Dhali). Louvre, réserve Lefuel, MNB, 315. (photo 1971) Voir planches XIV et XV de l'annexe iconographique, à paraître prochainement sous le titre: Héraclès - Melqart à Amrithl contribution à l'étude d'un syncrétisme. photo C. ANNEQUIN.
Frontispice: Héraclès et Géryon (Musée d'Olympie). Cf. E. KUNZE, Olympische Forschungen, II, Archaische Schildbiinder, Berlin, 1950, pl. XXX.
Revers de couverture: Le dragon et l'arbre des Hespérides. Boschius, Symbolographia, Symb. LVII, class. III, tab. IV.
PREMIERE PARTIE Fig. 1 : Les travaux occidentaux d'Héraclès sur une "carte-image" de l'oicouménè.
p. 104
Fig. 2 : Cadix et Gadès.
p. 107
Fig. 3 : L'estuaire du Loukkos et Lixos.
p. 113
Fig. 4 : Lixos : plan et vue aérienne des fouilles.
p. 116
Fig. 5:
Relief de l'Université américaine de Beyrouth (inventaire nO 4721).
p.122
692
Fig. 6: Lixos, le quartier des temples, première étape : le temple H.
Fig. 7 : Lixos, le temple H, détails d'architecture. Fig. 8: Fig. 9:
p. 129 p.130
Lixos, le temple F et ses annexes : plan et essai de reconstitution.
p. 132
Lixos, le complexe cultuel de l'Acropole (photos, 1969).
p.133
Fig. 10 : Plan d'Arnrith.
p. 140
Fig. Il : Amrith: le Ma'abed (photos 1971).
p. 141
Fig. 12 : Amrith: le Ma'abed, essai de reconstitution.
p.142
Fig. 13 : Carte de l'île de Chypre: sites archéologiques et mines de cuivre.
p. 145
Fig. 14 : Le sanctuaire de Byblos (monnaie de l'Empereur Macrin).
Fig. lS : Chypre: le site de Kition-Bamboula.
p. 148 p. 149
Fig. 16 : Chypre: le sanctuaire de Kition-Bamboula, premier état
p. 151
Fig. 17 : Chypre: le sanctuaire de Kition-Bamboula, deuxième état.
p. 152
Fig. 18 : Chypre: le sanctuaire de Kition-Bamboula, la troisième phase archaique (550-500).
p. 154
Fig. 19 : Le sanctuaire de Thasos : plan.
p. 159
Fig. 20 : Autour du combat contre l'hydre.
p. 166
Fig. 21 : L'Héraclès chypriote et l'Héraclès d'Amrith.
p. 170
693
DEUXIEME PARTIE Fig. 22 : Héraclès dans la coupe du soleil (coupe de la manière de Douris).
p.219
Fig. 23 : Auteurs et oeuvres cités par Apollodore : essai de représentation cartographique.
p. 249
Fig. 24 : L'expédition contre Géryon chez Apollodore et chez Diodore de Sicile : essai de représentation cartographique.
p. 254
Fig. 2S : L'expédition contre Géryon chez Diodore de Sicile: Héraclès en Italie du Sud et en Sicile.
p. 271
Fig. 26 : Céramique mycénienne en Italie et en Sicile. Carte des découvertes archéologiques.
p. 284
TROISIEME PARTIE Fig. 27 : Herclé, Vilae et Tunns (Miroir étrusque).
p. 362
Fig. 28 : Herclé allaité par Uni (Miroir étrusque).
p. 401
Fig. 29 : Héraclès allaité par Héra (Lécythe d'Anzio British Museum).
p. 402
QUATRIEME PARTIE Fig. 30: Héraclès "révolutionnaire" : logotype de la ville de Lyon. p. 469
694
Fig. 31 : 1) Héraclès et Géryon. Pyxide protocorinthienne. p. 476 2) Héraclès et Géryon. Amphore à col de Vulci.
Fig. 32 : Héraclès et Géryon. Coupe d'Euphronios.
pp. 476-477 p.478
Fig. 33 : Héraclès et Géryon. Bas-relief de la collection Cesnola.
Fig. 34 : Héraclès et le sacrifice.
p.479 p.499
Fig. 35 : Héraclès "mangeur de rois" . Grawre parue dans le journal "Les Révolutions de Paris".
p. 512
Fig. 36 : Héraclès et les monstres marins. Coupe de l'atelier du peintre de Xénoclès.
p. 524
Fig. 37 : Héraclès et Géryon. Amphore d'Exékias.
p. 531
Fig. 38 : Héraclès et Géryon. Amphore de Bassegio.
p. 532
Fig. 39: Héraclès et Géryon. Amphore de Caere.
p. 534
Fig. 40 : Guerrier tricéphale. Bronze étrusque du Musée des Beaux Arts à Lyon.
p. 535
Fig. 41 : Héraclès au jardin des Hespérides. Dessin O. BENNDORF.
p. 538
Fig. 42 : Héraclès au jardin des Hespérides. Hydrie du peintre de Meidias.
p. 544
Fig. 43 : Héraclès et Atlas au jardin des Hespérides.
p. 555
Fig. 44 : Héraclès et les Hespérides. Amphore de Boulogne.
p. 558
Fig. 45 : Projet de David pour le rideau de scène de l'Opéra (Printemps 1794).
p.567
695
ÉPILOGUE
Fig. 46: Reconstitution du temple archaïque de S. Omobono p. 632 d'après: Enea net Lazio, Arche%gia e miro. Fig. 47: L'aire sacrée de S. Omobono 1 - Stratigraphie d'après J. POUCET, AC, XLIX, 1980. 2 - Plan d'après A.M. COLINI, PP, XXXII, 1977
p.633
Fig. 48: Le groupe d'acrotère: Héraclès et "Athéna" d'après: Enea net Lazio, Arche%gia e miro, p. 121.
p. 634
Fig. 49 : Hercule étrusco-italique (Lyon X 254).
p. 641
Note. Sauf indication contraire, photos C. Annequin. Que N. Saliby qui m'a donné accès aux statues de la favissa d'Arnrith conservées au musée de Damas, A. Caubet qui m'a procuré toutes facilités pour photographier les sculptures de la réserve Lefuel au Louvre, que M. Yon, qui m'a autorisée à utiliser la documentation photographique de la Mission Française à Chypre (chantier de Kition - Bamboula), que le Musée des Beaux-Arts à Lyon, enfin, soient ici très vivement remerciés.
INDEX DES NOMS DE LIEUX GEOGRAPHIQUES OU MYTHIQUES
Ont été exclues les indications trop vagues (Occident. Méditerranée...) ou trop fréquentes (Grèce). A
ABANO TERME p. 536. ABDERE p. 252; 255; 331 n. 176; 368. ABYLA (Mont) p. 80 n. 177; 103; 174 n. 29, 30; 180 n. 88. ACADÉMIE p. 358; 414 n. 114. ACHÉLOOS p. 307. ACHÉRON p. 364; 563. ACHO (Mont) p. 80 n. 177; 174 n. 30; 180 n. 88. AÇORES p. 171 n. 1. ACROTIRI p. 551 ; 620 n. 684. AFRIQUE p. 102; 111; 115; 117; 212-214 ; 224; 252; 347 n. 435; 379; 380; 547 ; 551 ; 553; 554. AGRIGENTE p. 278 ; 334 n. 234. AGRAI p. 424 n. 262. AGYRION p. 59; 228; 257; 275; 279-282 ; 287; 292; 308; 312; 336 n. 268; 347 n. 433; 370; 371; 372375; 406 n. 11; 413 n. 111 ; 653. AINURA (CHYPRE) p. 204 n. 381 ; 208 n. 418. AL MINA p. 631. ALAMBRA (CHYPRE) p. 147; 200 n.327. ALEP p. 119; 169; 199 n. 315 ; 207 n. 409 ; 209 n. 432. ALÉS lA p. 246; 253; 308; 309; 310 ; 638. ALEXANDRIE p. 236 ; 248. ALMÉRIA p. 109.
ALMUNECAR p. 109. ALPES p. 267; 307; 308; 331 n. 177; 638; 639. ALPHÉE p. 411 n. 66; 443; 445; 484 ; 578 n. 135. AMANZORA (rio) p. 109. AMATHONTE 209 n. 430. AMBÉLIKOU p. 146; 147; 200 n.327. AMÉRIQUE p. 382 ; 453. AMMAN p. 508. AMRITH p. 135; pp. 137-144 ; 153; 158; 169; 192 n. 209; 193 n. 216; 196 n. 279 ; 635. AMYCLÉES p. 479. AMYMONÉ (fontaine) p. 480. ANAPHÉ p. 490. ANDALOUSIE p. 209; 110; 181 n. 100; 186 n. 150. ANGLETERRE p. 453. ANTAS p. 110. ANTHÉMOUS (fleuve) p. 561. APONUS (Source) p. 281 ; 526. ARABIE p. 22; 118; 188 n. 179; 489; 553. ARA MAXIMA p. 81 n. 195; 195 n. 251; 253; 308; 485; 487; 513; 629-641 ; 642 n. 781 ; 645 n. 821. ARCADIE p. 292; 346 n. 413; 360; 367; 376; 397. ARGENTARIUS (Mont) p. 100. ARGOLIDE p. 52, 358; 377; 459; 460; 464; 514; 563; 594 n. 306. ARGOS p. 20; 26; 62; 87 n. 256; 225; 235; 268; 318; 326 n. 117; 377; 440-441 ; 514-515; 528; 552; 563;
698 564; 565; 566; 583 n. 194; 607 n. 482 ; 486 ; 608 n. 494 ; 624 n. 756 ; 654. ARTÉMISION (Mont) p. 346 n. 413. ARV AD p. 138. ASIE p. 22; 45; 103; 112; 233 ; 450; 507; 611 n. 552. ASSYRIE p. 163. ATHENES p. 34; 296; 326 n. 121; 349 n. 467; 355; 356; 369; 371-372; 375; 392; 394; 403; 441; 447; 456; 458; 470; 478; 496-497; 578 n. 138; 616 n. 626; 653. ATHlENAU p. 479. ATIIIÉNOU p. 147. ATLAS (Mont) p. 22; 101; 180 n. 88; 541. ATTIQUE p. 358-359 ; 407 n. 17; 408 n. 28; 493; 513; 540. AVENTIN p. 85 n. 235; 420 n. 212; 629. AVERNE (lac) p. 253 ; 307 ; 347 n.434. AYIA IRINI p. 153; 202 n. 348; AYIOS IAKOVOS p. 153; 202 n. 348. B
BAALBECK p. 194 n. 245. BAETIS p. 96; 100.
BABYLONIE p. 169. BAIES p. 526. -BALÉARES p. 111 ; 185 n. 142. BARBARO (Mont) p. 298. BATSALOS p. 138. BAULI p. 348 n. 442. BELICE (fleuve) p. 298. BENGHAZI p. 551; 620 n. 682. BÉOTIE p. 360; 414 n. 122; 509 ; 510 ; 606 n. 472 ; 608 n. 495.
BÉRÉNIKÉ p. 551. BÉRYTE p. 192 n. 205. BÉTIQUE p. 95; p. 188 n. 177. BISMARCK (archipel) p. 417 n. 168. BITHYNIE p. 611 n. 552. BOSAp.110. BREIDJ p. 169. BRUTTIUM p. 225. BURKINA FASO p. 45. BYBLOS p. 135; 143; 148; 192 n. 205; 193 n. 220; 198 n. 305.
C CADIX p. 98 ; 106-109 ; 176 n. 43,44. CAERE p. 537. CALPÉ p. 80 n. 177 ; 103; 174 n. 29,30. CALYDON p. 307. CAMPANIE p. 61 ; 78 n. 158; 269; 274; 333 n. 220; 462; 486. CANARIES p. 176 n. 46. CAPITOLE (le) p. 295. CAPOUE p. 342 n. 359; 609 n. 504 ; 625 n. 771. CARTHAGE p. 52; 82 n. 196; 105; 106; 112; 115; 119; 120; 124; 131; 179 n. 75; 182 n. 110; 207 n. 404; 211 ; 256; 508. CASSIBILE p. 283. CASSITERIDES (Iles) p. 178 n. 72. CATANE p. 286. CAUCASE (Mont) p. 22; 96;
553-554. CELTIQUE p. 246; 253; 267; 308; 309; 310; 311; 557; 637; 638. CERNÉ p. 179 n. 75, 82; 214. CEUTA p. 80 n. 177; 180 n. 88.
699 CHALCIDIQUE: PHLEGRES p. 274. CHALCIS p. 322 n. 23 ; 359. CHAONIE p. 503 ; 526. CHAMPS PHLÉGRÉENS (les) p. 253 ; 267 ; 269 ; 274. CHIOS p. 585 n. 210. CHRÉMÉTES (fleuve) p. 101. CHRÉTES (fleuve) p. 214. CHYPRE p. 24; 41 ; 52; 57; 61; 76 n. 141; 115; 119; 124: 135: 138: 144-157 dont p. 146 = ALASÀ: ALASIA: KU-PI-RI-JO: 160165: 167: 168: 169: 186 n. 146: 189 n. 184; 190 n. 195; 198 n. 313 : 204 n. 380; 208 n. 417, 420: 209 n. 430: 318: 393: 479: 494: 508: 510 : 513 : 604 n. 452; 635. CILICIE p. 127: 509. CIRTA p. 330 n. 168. CITHÉRON (Mont) p. 62, 397: 461 : 480; 592 n. 285. CmMILE p. 78 n. 158. CNOSSOS p. 147. COLONNES D'ATLAS p. 78 n. 169: 174 n. 30. COLONNES D'HÉRACLES, COLONNES d'HERCULE p. 23 ; 49: 50; p. 78 n. 169; 80 n. 177: 91: 96: 101: 103: 106; 112: 118; 119: 126; 174 n. 29, 30: 179 n. 82; 180 n. 87, 88: 194 n. 242; 201 n. 341: 211; 223; 224; 252: 253; 263; 307; 311 ; 312; 331 n. 176; 451. CONOPÉ p. 496. COPAlS (lac) p. 563. CORFINIUM p. 61. CORINTHE p. 321 n. 7; 358 : 529. CORONÉE p. 414 n. 122: 563.
CORSTOPlTUM (CORBRIDGE) p. 202 n. 361. COS p. 335 n. 256 : 422 n. 246 ; 457: 459: 489: 564: 585 n. 210. CRAU p. 96; 225; 347 n. 432: 593 n. 300. CRETE p. 146; 167; 233; 251 ; 253; 267; 307; 350 n. 467 ; 364: 369: 370: 398: 503: 620 n. 690. CRIMÉE p. 351 n. 486. CROTONE p. 61: 267 : 297: 308 : 309 : 334 n. 234 ; 348 n. 442: 462; 468: 484: 564: 636. CUMES p. 80 n. 181 : 253; 274; 347 n. 437 ; 526. CYANÉ p. 257; 275: 278; 287; 503. CYCLADES p. 631. CYNOSARGUE p. 358-359: 368 : 407 n. 22. CYRÉNAIQUE p. 96: 172 n. 20 : 551 ; 556. CYRENE p. 177 n. 55: 409 n. 36; 550-551. D
DARADOS (fleuve) p. 101. DARAT (fleuve) p. 101. DÉLOS p. 82 n. 197; 371: 566; 622 n. 728. DELPHES p. 297: 332 n. 198: 357; 364; 398; 422 n. 241 ; 446: 450: 454: 463-465 ; 480 ; 575 n. 82 ; 604 n. 448. DENEUVRE p. 624 n. 747. DIDYME p. 603 n. 434. DIOMÉIA p. 359; 408 n. 29. DJEBILA P. 117. DOULICHION p. 577 n. 119; 592 n.296. DRAA (oued) p. 101 : 213.
700 DRÉPANE (cap)p. 274. DYRIS (fleuve) p. 101. DZIRA SIDI YOUSSEF p. 214. E
ÉBLA p. 144; 162. ÉCHÉDOROS (fleuve) p. 553. ÉGÉE p. 146; 147; 148. ÉGINE p. 413 n. 109. ÉGYPTE p. 22; p. 70 n. 63; 117; 146; 147; 148; 163; 233; 247; 253; 308; 328 n. 140 ; 489 ; 505 ; 553. EL AMARNA p. 119. EL ARGAR p. 109. ELBEp.559. ÉLEUSIS p. 403; 424 n. 262, 264 ; 442; 510; 653; 656. ÉLIDE p. 363; 367; 375; 443446 ; 460; 481 ; 483; 488; 562; 577 n. 119; 578 n. 135. ÉLIS p. 363; 370; 466. ENKOMI p. 144; 147; 155; 200 n. 331, 332. ENNA p.277. ENTELLA p. 294. EN1REMONT p. 645 n. 817. ÉPIRE p. 92; 255 ; 552. ÉREBE (l') p. 18. ÉRÉTRIE p. 556. ÉRIDAN p. 173 n. 27; 547; 553; 557; 618 n. 645; 622 n. 718. ÉRYMANTHE (Mont ou Fleuve) p. 367; 480. ÉRYTHÉIA (ou ÉRYTHIE) île de Géryon p. 11; 23; 51; 54; 55; 56; 58; 79 n. 172; 80 n. 182; 91; 92 ;96; 97; 98; 108; 164; 222; 223; 224; 246; 251; 252; 259; 261 ; 263; 264; 267; 268; 288; 293; 305; 312; 320 n. 7; 321; n. 17; 322 n. 32;
331 n. 178; 348 n. 447; 372; 394; 419 n. 206; 420 n. 224; 478; 482; 502; 528; 561-566; 609 n. 513; 629; 637; 653. ÉRYTHRÉES p. 335 n. 256; 459 ; 585 n. 210. ÉRYX p. 185 n. 135; 252; 255 ; 256; 273; 287; 292; 293; 294; 295. ESPAGNE 1 PÉNINSULE IBÉRIQUE p. 91; 102; 109; 115; 117; 118; 173 n. 27; 175 n. 43; 186 n. 155; 189 n. 180; 221 ; 222; 247; 348 n. 442; 444. ÉTHIOPIE p. 69 n. 43; 118; 233; 247. ETNA p. 287 ; 337 n. 280. ÉTRURIE p. 46, 110; 186 n. 151 ; 247; 361 ; 423 n. 259 ; 485. EUBÉE ('l1e) p. 608 n. 495; 631 ; 643 n. 793. EUBOIA (Mont) p. 514. EUHESPERIDES p. 541; 550551. EUPHRATE p. 144. EUROPE p. 251 ; 252; 307 ; 347 n.435. ÉVÉNos (fleuve) p. 447. F
FORUM BOARIUM p. 52; 61; 225; 318; 462; 485; 629641 ; FUENTE ALAMO p. 109. G
GABON p. 383. GADEIRA (Gadès) p. 79 n. 172; 95; 97; 103; 106; 112;
701 118; 126; 158; 180 n. 87; 189 n. 180; 222; 251 ; 312. GADES p. 24; 49; 50; 51; 52; 79 n. 172; 80 n. 181; 93; p. 95-109; 112; 114; 117; 118; 124; 126-127 ; 128; 131; 157; 158; 160; 161 ; 163; 167; 168; 172 n. 21; 176 n. 45; 180 n. 92; 182 n. 106, 110; 188 n. 178, 179; 194 n. 238; 195 n. 252; 202 n. 361 ; 222; 247; 253 ; 318; 503; 508; 510; 526; 553; 612 n. 555, 556; 630; 636; 643 n. 787; 657. GADIR (Gadès) p. 105; 189 n. 180. GAULE p. 111 ; 224 ; 308 ; 309; 310 ; 624 n. 747; 638. GÉLA p. 277; 281 ; 287; 334 n. 234; 339 n. 307, 309; 615 n. 603. GIBRALTAR p. 50; 80 n. 177; 91; 92; 103; 105; 174 n. 30; 180 n. 88; 224; 322 n. 25. GLANON p. 624 n. 747. GRANDE-BRIERE p. 178 n. 72. GRANDE-GRECE p. 47; 61; 82 n. 195; 84 n. 224; 222; 225; 276; 315 ; 334 n. 234 ; 636. GROTTA VANELLA p. 298; 343 n. 362 ; 344 n. 378. GROTTES D'HERCULE p. 117. GUADALETE p. 106; 108; 176 n.43. GUADALQUIVIR p. 96; 109; 176 n. 43; 222. H
HADES (1') / Les ENFERS p. 19; 23; 55; 56; 64 n. 3; 83 n. 213; 85 n. 241 ; 251; 376;
395; 396; 414 n. 122; 421 n. 225 ; 424 n. 262; 427; 525; 526; 526-564 ; 653 , 657. HADRANON p. 336 n. 268. HADRUMETE p. 207 n. 404. HALA SULTAN TEKKÉ p. 147. HÉCATOMPYLE p. 253; 308; 503. HÉLISSON (fleuve) p. 660 n. 837. HÉRACLÉE (de Sicile) p. 256; 298 ; p. 343 n. 371. HERCULANUM p. 348 n. 442. HERCYNIENS (Monts) p. 331 n. 177. HERMIONÉ p. 414 n. 122; 563. 624 n. 746; 625 n. 767. HIÉRAPOLIS p. 194 n. 245. HIMERE p. 39; 100; 223 ; 292 ; 299 ; 348 n. 453 , 526. HUELVA p. 102. HYAMPOLIS p. 509. HYLAIA p. 312. HYMETTE (Mont) p. 407 n. 16.
1 IBÉRIE p. 52; 57; 92; 96; 100; 109; 110; 111; 112; 173 n. 27; 224; 245; 252; 253 ; 308; 503. IBIZA p. 111. IDA p. 293 ; 300; 365. IDALION p. 147; 148; 153; 162; 168; 189 n. 184; 201 n. 338; 202 n. 348; 208 n. 421. ILES BRITANNIQUES p. 246. ILES DES BIENHEUREUX p. 95 ; 172 n. 21; 351 n. 488; 461. ILE DU SOLEIL p. 501. ILES LIPARI p. 285; 321 n. 15; 333 n. 222 ; 338 n. 292. ILION p. 294 ; 442. ILLYRIE p. 22 ; 553. IONIE p. 650.
702 INDE p. 50; 103; 118; 181 n. 100; 247; 487. IRAN p. 608 n. 502. !RASA p. 550. IRLANDE p. 546. ISRAEL p. 181 n. 100. ISONZO p. 557. ISTROS/ISTER p. 366; 621 n. 707. ITALIE p. 61 ; p. 78 n. 166; 86 n. 247; 111; 224; 225; 255; 273; 285; 295; 311; 317; 323 n. 40; 342 n. 359; 348 n. 442; 468; 484 ; 485 ; 486; 487; 564; 608 n. 498 ; 624 n. 747; 640. ITHAQUE p. 433 ; 460. ITHÔME p. 360.
J JARDIN des DIEUX p. 545. JARDIN (OU PAYS) DES HESPÉRIDES p. 23; 39; 78 n. 158; 92; 95; 96; 98; 99; 101; 167; 171 n. 7; 172 n. 20; 176 n. 55; 321 n. 7; 355 ; 396; 420 n. 224 ; 539566; 653; 656. JÉRUSALEM p. 143 ; 194 n. 245. K
KATHARI p. 147; 157. KENYA P. 381. KITION p. 135; 138; 146; 147157; 160; 161; 162; 163; 167 ; 168; 189 n. 184; 200 n. 330, 331 ; 201 n. 338, 341 ; 202 n. 355 ; 208 n. 420, 421 ; 209 n. 425 ; 635 ; 636. KITION-BAMBOULA p. 148; 150; 153; 155; 156; 157; 162; 163; 200 n. 331; 606 n. 465; 482.
KOINYRA (CHYPRE) p. 204 n. 381. KOM-EL-HÉTANp.460. KWENLUN (Mont) p. 546. L
LACINION (Cap) p. 484. LACONIE p. 357; 479. LADON/LATHON/LÉTHON (fleuve) p. 346 n. 413; 541 ; 550. LAPITHOS p. 146. LARISSOS (fleuve) p. 368. LARNACA p. 147. LARNAKA TIS LAPITHOU p. 190 n. 195; 508. LATIUM p. 82 n. 195; 294; 295; 341 n. 332; 342 n. 356; 631 ; 636; 638; 639. LÉONTINOI p. 257; 279; 292; 299 ; 335 n. 252 ; 344 n. 381. LE PIRÉE p. 358. LEPTIS MAGNA p. 197 n. 291. LERNE p. 480; 563; 565. LESBOS P.. 592 n. 285. LEUCOGEES p. 274. LIBYE p. 22; 91 ; 95; 96; 99 ; 100; 101; 102; 112; 174 n. 30; 179 n. 82; 180 n. 87; 182 n. 107; 193 n. 226; 211; 225; 247; 252; 253; 267; 297; 307; 308; 503; 542; 551-553 ; 620 n. 690. LIGURIE p. 252; 253; 255; 267; 482. LIKS p. 81 n. 187; 181 n. 95. LILYBÉE p. 184 n. 135; 341 n. 338. LIMÉNAS p. 204 n. 381. LIMNAION p. 361. LINDOS p. 490; 492; 500; 611 n.552. LIRIA p. 444 ; 578 n. 124. LIXOS/LIXUS p. 24; 49; 50; 51 ; 52; 93; 95-103; 105;
703 114-118;128-135; 137; 158; 161; 167; 172 p. 21 ; 179 n. 82; 180 n. 93; 196 n. 269; 201 n. 344; 212-214 ; 318; 550; 551. LOCRES p. 61 ; 255; 307 ; 484. LOS MILLARES p. 109. LOUKKOS (fleuve) p. 114, 131 ; 213-214. LUCRIN (lac) p. 274. LYCÉE (Mont) p. 357. LYDIE p. 451-452 ; 459; 580 n. 147 ; 580 n. 180. LYNX (Lixos) p. 103. M MACÉDOINE p. 22 ; 553. MAINAKÉ p. 109; 331 n. 176. MALTE p. 52, Il1-Il2; 119; 185 n. 140; 202 n. 361; 206 n. 393; 318. MANGO p. 298. MARATHON p. 279; 358-359; 363; 406 n. Il ; 407 n. 22, 25. MARATHUS p. 137; 138; 193 n. 216. MARI p. 146; 199 n. 314. MAROC p. 115; 117; 118; 212-213. MARSALA p. 110. MARSEILLE p. 311. MAURÉTANIE p. 96; 134; 547. MAURUSIE p. 95; 99; 103; 118. MÉGALOPOLIS p. 334 n. 236; 360; 367; 376; 456; 583 n. 190; 660 n. 837. MÉGARE p. 370. MÉLANÉSIE p. 398. MÉLlTÉ p. 358. MER ADRIATIQUE p. 255 ; 296. MER CASPIENNE p. 559. MER D'AZOV p. 559.
MER IONIENNE p. 92; 252; 256. MER ROUGE p. 181 n. 100. MÉSATE (Cap) p. 585 n. 210. MESSENE p. 66 n. 24, 334 n. 236. MESSÉNIE p. 360; 367; 451. MESSINE (détroit) p. 482. MÉT APONTE p. 484. MILAZZO p. 285. MINYÉE p. 578 n. 135. MISENE p. 274. MOGADOR p. 115; 117; 179 n. 82; 187 n. 161 ; 189 p. 181 ; 213 ; 322 n. 25. MOLINO DELLA BADIA p. 283. MONT-AUX-SINGES p. 80 n. 177; 174 n. 30; 180 n. 88. MONTE SIRAI p. 207 n. 404. MOTYÉ p. 110; 184 n. 135; 186 n. 152; 195 n. 249; 207 n. 404 ; 299; 341 n. 338; 348 n. 442. MOURIES p. 624 n. 747. MUSA (Mont) p. 180 n. 88. MYCALESSOS p. 334 n. 236; 509. MYCENES p. 67 n. 31 ; 208 n. 417; 251; 459; 463; 464; 481 ; 483; 514; 552; 563; 585 n. 215 ; 586 n. 215 ; 594 n.306. MYLAI p. 322 n. 25. MYRTOU PIGADHES p. 146; 153. N
NAFfIA (lac) p. 286. NAUPLIE p. 26 ; p. 70 n. 62. NÉMÉE p. 398; 481; 522; 563; 592 n. 285, 292; 624 n. 749. NICOSIE p. 201 n. 341; 208 n. 417. NIL p. 101 ; 553; 590 n. 265.
704 NORA p. 110-111 ; 168; 208 n.
P
423. NUMIDIE p. 330 n. 168.
NUZI p. 582 n. 181.
o OCÉAN (1') p. 11; 22; 23; 50;
56; p. 79 n. 169; 91; 92; 93; 96; 98; 101; 105; 106; 112; 114; 131; 172 n. 12, 15, 18; 174 n. 30; 221 ; 222; 223; 224; 251; 252; 253; 261; 295; 305; 307; 312; 314; 315; 323 n. 36; 331 n. 178; 503; 521 ; 550; 553. OECHALIE p. 450. OENOÉ p. 346 n. 413. OESTRYMNIDES (Iles) p. 101; 178 n. 72. . OETA (Mont) p. 23; 61; 62; 85 n. 241; 195 n. 255; 227; 303; 484; 489; 490; 506511 ; 513; 526; 527; 563 ; 597 n. 358 ; 604 n. 448 ; 607 n. 482; 656. OICOUMÉNE p. 49; 50; 92; 103; 309; 311 ; 315. OLYMPE (Mont) p. 19; 277 ; 347 n. 433; 389; 434; 524. OLYMPIE p. 21; p. 68 n. 35; 242; 321 n. 7; 346 n. 410; 363-361 ; 370; 393; 418 n. 187; 443; 444; 480; 484; 529; 530; 545; 556; 557; 563 ; 603 n. 434 ; 606 n. 472; 621 n. 707 ; 622 n. 712. ORTYGIE p. 277. OSTIE p. 444. OUMM EL'AHMED p. 121 ; 135;
143; 162; 198 n. 305 ; 206 n. 395.
PADOUE p. 281; 296; 343 n.
365; 526. PALATIN (Mont) p. 253; 630;
639 ; 642 n. 775. PALÉOPAPHOS p. 146; 165. PALERME p. 184 n. 135; 186 n.
152. PALIKÉ p. 287. PALLANTION / PALLANTIUM
p. 225; 629. PALESTINE p. 156. PALMYRE p. 143. PANORME p. 341 n. 338. PANTALICA p. 283; 285; 338 n.
290. PAPHOS p. 293. PAROS p. 377. PARTHENOPÉ p. 274. PATRAS p. 509. PAYS DES HYPERBORÉENS p.
22; 96; 346 n. 413; 553-
559. PÉLOPONNESE p. 62; 255;
263; 267; 269; 318; 375; 377 ; 459; 480; 484; 503. PÉLORE (Cap) p. 256; 273. PÉNÉE (fleuve) p. 304; 307; 443 ; 445; 578 n. 135. PHALERE p. 358. PHÉNÉE p. 360 ; 376. PHÉNICIE p. 120; 121; 124; 143; 156; 188 n. 177; 193 n. 216, 233 ; 585 n. 210. COlE PHÉNICIENNE p. 24. PHERES p. 442; 579 n. 143. PlllLADELPHlE p. 508. PHILIPPINES p. 45. PHLEGRES p. 326 n. 106. PHLIONTE p. 368. PHOCÉE p. 100. PHOCIDE p. 509. PHRYGIE p. 400 ; 437. PHYKOUS p. 550-551.
705 PHYLAQUE p. 593 n. 305. PIÉRIE p. 483; 502; 504 ; 561. PISE p. 366. PISÉATIDE p. 461. PITHÉCUSSES (îles) p. 189 n. 181 ; 631 ; 643 n. 793. PLATANISTAS p. 357; 361; 363 ; 406 n. 10. PLATÉES p. 509 ; 606 n. 467. POGGIORÉALE p. 75 n. 124; 273; 298. POLYNÉSIE p. 387 ; 398 ; 415 n. 141; 417 n. 171. PONT-EUXIN p. 312. PORTO PARADISO p. 597 n. 358. POSÉIDONIA p. 484 ; 636. POTAMIA p. 204 n. 381. POUll..LES (les) p. 283 ; 486. PROSYMNA p. 552. PSOPHIDE p. 304 ; 481 ; 586 n. 228. psopms p. 292. PYLOS p. 56; p. 84 n. 221; 365; 396; 420 n. 218 ; 435 ; 461 ; 483; 562; 623 n. 741. PYRÉNÉES p. 100; 178 n. 69. PYRGI p. 202 n. 361; 508-509 ; 636. R
RAS-SHAMRA p. 119; 169; 184 n.133. RÉKADA p. 131. RHÉGION p. 61; 252; 255; 307 ; 462 ; 482 ; 484. RHODES p. 22; 235; 248; 489-490 ; 526. RHÔNE p. 173 n. 27. RIO DE ORO p. 179 n. 75. ROME p. 41; 52; 61; 82 n. 195; 102; 134; 225; 248; 308; 318; 342 n. 356; 349 n. 446; 395 ; 422 n. 246 ; 423
n. 259; 462; 485; 487; 513 ; 576 n. 103; 629-646. ROUAD 1 ARADOS (ile de) p. 139 ; 143 ; 409 n. 36. ROUM (merde) p. 91. S S. ANGELO MUXARO p. 283. S. OMOBONO p. 82 n. 195; 225; 631-635 ; 644 n. 794 ; 645 n. 819. SAINT-PAUL-LES ROMANS p. 444. SAGONTE p. 348 n. 442. SALAMINE (DE CHYPRE) p. 163 ; 200 n. 331. SAMOS p. 100; 235; 423 n. 260 ; 566 ; 583 n. 194; 625 n. 773. SAMOTHRACE p. 208 n. 381 ; 400. SANTI PÉTRI p. 106; 126. SARDAIGNE p. 52; 81 n. 194; 100; 108; 110-112; 119; 167 ; 168 ; 185 n. 140; 186 n. 150; 189 n. 180; 186; 201 n. 333; 207 n. 404 ; 247; 309; 318; 349 n. 465; 482; 631. SARDES p. 442. SAURUS (Mont) p. 368. SCIACCA p. 110; 184 n. 133. SCYTHIE p. 316. SÉBON (Oued) p. 214. SÉGESTE (ou ÉGESTE) p. 37; 276; 292; 294; 296; 297; 298 ; 343 n. 362. SÉLINONTE p. 37 ; 207 n. 404 ; 273 ; 298 ; 299 ; 344 n. 378. SÉNÉGAL p. 101. SEXI p. 109. SICANIE p. 293 ; 337 n. 280. SICILE p. 47; 80 n. 181 ; 82 n. 195; 84 n. 224; 100; 110; 111 ; 112; 184 n. 133; 135;
706 185 n. 140; 207 n. 404 ; 225 ; 228; 247; 248; 251-300 ; 309; 312; 315; 317; 318; 322 n. 25; 323 n. 42; 338; n. 287; 292; 341 n. 332; 342 n. 348; 344 n. 381; 347 n. 433; 348 n. 442; 370; 372; 406 n. 11; 482; 484; 503; 526. SICYONE p. 160; 205 n. 384, 385; 360; 363; 376. SIDON p. 131 ; 138; 143; 194 n. 245 ; 508 ; 580 n. 159. SIERRA DE MONTÉRILLA p. 109. SIERRA MORENA p. 102 ; SILARIS p. 273 ; 346 n. 412 ; 584 n.203. SIRIS p. 296. SKYROS p. 400. SOLONTE p. 184 n. 135; 299; _ 348 n. 442. ~OR p. 37, 52 voir TYR. SOUDAN p. 101; 179 n. 75. SPARTE ou LACÉDÉMONE p.
232; 297; 326 n. 117; 356; 357; 361; 367; 368; 369; 271-272 ; 375; 387; 411 n. 71; 413 n. 111; 416 n. 160; 423 n. 260; 441 ; 451; 583 n. 194; 653. STRYMON (fleuve) p. 252; 267 ; 347 n. 432; 482. STYMPHALE p. 375 ; 563. STYX p. 18; 261. SULCIS p. 111 ; 207 n. 404. SYBARIS p. 297. SYRACUSE p. 257; 269; 275279; 282; 287; 290; 291 ; 299 ; 308 ; 339 n. 309 ; 503. SYRIE p. 143 ; 194 n. 245. COlE SYRIENNE p. 41. SYRlES p. 91 ; 171 n. 6; 550.
T
TAMASSOS p. 201 n. 338. TANGER p. 115; 181 n. 99; 188
n.I77. TARSE p. 127; 508. TARSmSH p. 105; 181 n. 100. TARQUINIA p. 536. TARTARE p. 557. TARTESSOS p. 50; 52; 80 n.
183; 91 ; 96; 97; 99; 100; 101; 102; 105; 106; 109; 175 n. 43; 177 n. 63; 178 n. 71, 73; 181 n. 100; 188 n. 178; 189 n. 181; 221; 222; 223; 224; 247; 252; 318; 322 n. 23, 25; 527; 553554. TAS SILG p. 111; 189 n. 188. TCHAO p. 381. TCHEMLICH p. 213. lEL KAZEL p. 138. lELL AMARNA p. 146. lELL ASMAR p. 165. lELL MARDIKH p. 146; 199 n.
315. lEMPÉ (fleuve) p. 307; 465. TÉNARE (cap) p. 414 n. 122;
562; 623 n. 742. TÉNÉDOS p. 207 n. 404. TÉNÉRIFFE p. 341 n. 330. TÉTRACOMOS p. 358. THARROS p. 81 n. 194; 110;
189 n. 186; 207 n. 404. THASOS p. 24, 52, 158-161 ;
167; 195 n. 251; 204 n. 381 ; 205 n. 384, 386; 208 n. 418 ; 318; 376-377 ; 398-399 ; 409 n. 36; 415 n. 142; 422 n. 240; 509; 513; 564; 584 n. 197 ; 604 n. 452; 606 n. 482 ; 630 ; 643 n. 787 ; 653. THEBES p. 18; 304; 358 ; 360 ; 368; 370; 375; 376; 386; 397; 398; 400; 406 n. 12;
707 415 n. 142; 416 n. 160; 423 n. 256; 463-464; 481; 494 ; 594 n. 306 ; 611 n. 544. THÉRA p. 369-370; 551-552 ; THÉRAPNÉ p. 334 n. 236. THERMOPYLES p. 510; 526527 ; 397 n. 358. THERMYDRES p. 489; 491; 597 n. 358. THISBÉ p. 409 n. 35. THRACE p. 52; 86 n. 255 ; 252 ; 255; 267; 318; 459; 482; 502. THYMOITIDE p. 358. THYRRHÉNIE p. 252 ; 253 ; 255. TIBRE (fleuve) p. 253; 485; 629-641 ; 642 n. 775 ; 646 n. 821. TIBUR p. 630. TINGIS (Tinge) p. 95 ; 174 n. 29. TIPHA p. 409 n. 35. TIRYNTHE p. 11; 41; 96; 260; 261; 263; 360; 427; 452; 459; 462; 463-464 ; 502; 514 ; 594 n. 306. TITHoRÉE p. 509; 606 n. 467. TMOLOS ou TMOLE p. 451. TORRE DEL MAR p. 109; 110. TOSCANOS p. 183 n. 130. TRACHINE p. 490. TRACHIS p. 507; 509. TRÉZENE p. 376; 563. TRIGÉMINA (porte) p. 629-630. TRINX (Lixos) p. 103 ; TRIPOLITAINE p. 171 n. 6; TRITON (lac) p. 91; 99; p. 171
n. 7. TROADE p. 294; 332 n. 212; 342 n. 349. TROIE p. 18; 66 n. 19; 241 ; 292; 295 ; 323 n. 51 ; 341 n. 332 ; 342 n. 358 ; 343 n. 365 ; 391 ; 489; 511. TURDÉTANIE p. 79 n. 169; 95.
TYR p. 24; 37; 51 ; 52; 82 n. 197; 105; 108; 118; 119; 120; 121; 123; 124; 125; 126; 131; 138; 157; 158; 160; 162; 163; 167; 168; 169; 181 n. 100; 190 n. 195; 191 n. 204; 192 n. 209 ; 193 n. 233, 235; 194 n. 245, 246; 195 n. 252 ; 203 n. 364 ; 318; 364; 410 n. 48; 605 n.460; 654.
u URUKp.518. UTIQUE p. 51; 105; 108; 182 n. 110. V
VÉLABRE p. 83 n. 215; 485; 612 n. 558. VIA HÉRACLÉA p. 274. VOUNOUS p. 155. VULCI p. 46 ; 533.
X XYPÉlÉ p. 358. y
YOUGOSLAVIE p. 45.
INDEX DES NOMS DE PEUPLES GÉOGRAPHIQUES, HISTORIQUES OU MYTHIQUES
(sauf Grecs) A
ACHÉENS p. 17; 200 p. 331; 291; 292; 294; 317; 318; 352 n. 493; 368; 371 ; 416 n. 1~.L572 n. 47 ; 655. AGYlUiliNS p. 59. ARCADIENS p. 225 ; 367 ; 496 ; 629. ARÉOI (POLYNÉSIE) p. 415 n. 141; 417 n. 171. ARGIENS p. 422 n. 241 ; 459. ASSYRIENS p. 325 n. 101. ATHÉNIENS p. 288; 406 n. 15; 452; 480; 493. AUSONES p. 285; 295; 338 n. 292. B BAMBARA p. 467. BÉOTIENS p. 297. BERBERES p. 482. BOURIATES (SIBÉRIE) p. 598 n. 371. BRETONS p. 246. C CARTHAGINOIS p. 101; 297; 298; 186 n. 155; 188 n. 178; 255; 256; 297; 298. CELTES p. 231; 546-547 ; 559 ; 593 n. 300. CHALCIDIENS p. 50; 80 n. 181 ; 223; 282; 314; 322 n. 23. 25 ; 344 n. 382; 526. CHÔNES p. 296. CHORS (Sibérie) p. 658.
CHYPRIOTES p. 109; 111 ; 168. CILICIENS p. 508. ClllNOIS p. 546. CRÉTOIS p. 17. CROTONIATES p. 344 n. 372. CYCLOPES p. 294. CYNAITHÉENS p. 496. D
DANAOI p. 26 ; p. 70 n. 63. DORIENS p. 17; 344 n. 382; 358; 375 ; 655. DRYOPES p. 22; 489-492; 497 ; 596 n. 349 ; 354; 597 n. 357 ; 598 n. 367. E ÉGÉENS p. 222; 321 n. 15. ÉGESTÉENS p. 298. ÉGYPTIENS p. 70 n. 62; 360; 505; 547. ÉLÉENS p. 364 ; 368 ; 371. ÉLYMES p. 255; 269; 273; 294-298 ; 343 n. 362; 482. ÉOLIENS p. 608 n. 495. ÉPIDAMNIENS p. 68 n. 35. ESQUIMAUX p. 528. ÉTHIOPIENS p. 179 n. 82 ; 264 ; 561. ÉTRUSQUES p. 46; 403. H HÉBREUX p. 83 n. 213. lllNDOUS p. 423 n. 254. HYPERBORÉENS p. 320 n. 7 ; 364; 553-559; 564; 621 n. 707 ; 622 n. 718.
709 MEDES p. 325 n. 101. MÉROPES p. 457 ; 489. MINYENS p. 397-398; 462;
1 lATMUL p. 386. IBERES p. 100; 112. INDIENS YAGHAM (CHILI) p.
463; 480. MORGETES p. 285. MOSSI (BURKINA FASO) p. 45 . N
384. INDO-EUROPÉENS p. 374 ; 394397. IRANIENS p. 546. ITALIQUES (peuples) p. 59. 61.
NAMBlITI (AUSTRAUE) p. 386. NASAMONS p. 550. NUMIDES p. 213.
o
J JAPONAIS p. 546; 547.
OENÔTRES p. 295. OJIBWÉ p. 415 n. 141. ORCHOMÉNIENS p. 376.
K p KIKUYU (KENYA) p. 381. KIRGHIZ p. 45. KPELLE (GUINÉE. LIB~RIA) p.
383. L LACÉDÉMONIENS p. 603 n. 434. LESTRYGONS p. 294 ; 344 n.
381. LIBÉRIENS p. 388. LIBYENS p. 101; 297. LIBYPHÉNICIENS p. 211. LIGURES p. 225; 309; 347 n.
432; 637. LIGYENS p. 96; 225; 559. LINDIENS p. 489-492. LIXlTES p. 51; 105; 118; 212214. LOCRIENS p. 369. LYDIENS p. 441. M MANOBO (pHILIPPINES) p. 45.
PAELIGNI / PAELIGNIENS
p.
61; 486. PEUPLES DE LA MER p. 108; 200 n. 331. PHÉNICIENS p. 9 ; 39 ; 52 ; 57 ; 81 n. 195; 100; 101; 105;
109; 110; 111; 112; 118; 125; 148; 150; 160; 163; 167; 176 n. 43; 177 n. 63; 179 n. 82; 180 n. 92; 182 n. 107; 183 n. 127; 185 n. 142; 189 n. 180; 194 n. 242; 200 n. 331; 201 n. 341; 205 n. 386; 208 n. 418; 213; 223;256;297; 300; 318; 338 n. 287; 341 n. 338; 364 ; 630; 631. PHÉNICO-PUNIQUES (peuples) p. 176 n. 43. PHOCÉENS p. 50; 51; 80 n. 181 et 183; 97; 175 n. 43; 221 ; 314; 322 n. 23; 526. PHOCIDIENS p. 341 n. 348. PHRYGIENS p. 294; 442.
710 POLYNÉSIENS p. 471. POSÉIDONIATES p. 255. PYGMÉES p. 69 n. 42. PYLIENS p. 623 n. 741. R
RHODIENS p. 50; 51; 80 n. 183; 97; 175 n. 43; 314; 489. ROMAINS p. 99; 246; 248; 292; 295; 309; 349 n. 466; 356; 638; 639; 645 n. 817; 657.
S SALYENS p. 645 n. 817. SARA (TCHAD) p. 380-381 ; 384. SAMIENS p. 80 n. 183; 175 n. 43; 223. SCYTHES p. 54; 312; 553. SÉNOUFO (COTE D'IVOIRE) p. 381 ; 382; 383 ; 423 n. 254. SICANES p. 257; 267; 269; 275; 282-292; 294; 296; 297; 337 n. 280 ; 283. SICILIENS p. 277. SICULES p. 281; 283-285 ; 290-291 ; 294; 337 n. 280; 283 ; 338 n. 292 ; 343 n. 362. SIDONIENS p. 111. SO (OUGANDA) p. 422 n. 240. SPARTIATES/LACÉDÉMONIENS p. 357; 442. SUMÉRIENS p. 518. SYBARITES p. 343 n. 372. SYRACUSAINS p. 257; 275279.
SYRIENS p. 109; 111. T
TARTESSIENS p. 97; 101; 176 n. 43; 177 n. 63. TAPHIENS p. 483. THASIENS p. 160; 205 n. 386; 363. THÉBAINS p. 360; 480; 492; 493. THESSALIENS p. 483. TONGOUSSES (SmaRIE) p. 528 ; 598 n. 371. TROYENS p. 276; 294; 295; 296; 341 n. 348; 343 n. 365 ; 463 ; 572 n. 47. TYRIENS p. 111; 160; 182 n. 108; 205 n. 386. TYRRHÉNIENS p. 225; 253; 255.
v vA! (LIBaRIA) p. 417 n. 168. VÉNETES p. 281; 296; 515. VOTIAK (SmaRIE) p. 598 n. 371. W
WIKO (ANGOLA) p. 384. WIRADJURI (AUSTRAUE) p. 381 ; 384. y
YAKOUTES (SIBaRIE) p. 598 n. 371.
PERSONNAGES HISTORIQUES OU MYTHIQUES DIVINITÉS ET EPICLESES; ADVERSAIRES D'HÉRACLES
(Sauf Héraclès si le nom n'est suivi d'aucune précision) A
ACESTE p. 293 ; 205. ACHÉMÉNIDES (les) p. 143. ACHILLE p. 18; 93 ; 172 n. 12; 400; 455 ; 625 n. 764. ADAM p. 78 n. 158. ADMETE p. 442,519; 527; 576 n. 109; 577 n. 112; 579 n. 143. ADONIS p. 124; 192 n. 205; 193 n. 220; 565. ADRANOS p. 287. AEGESTOS/ÉGESTOS p. 295; 342 n. 358. AEGLE (Hespéride) p. 265; 543 ; 617 n. 638. AIGLE DE PROMETHÉE p. 265. AJAXp.44. ALBION (voir aussi IALÉBION) p. 593 n. 300. ALCESTE p. 23; 83 n. 213; 517; 519. ALCIDE p. 87 n. 256; 225; 257; 293 ; 515. ALMÉONIDES (les) p. 78 n. 165; 349 n. 467. ALCMENE p. 18; 19; 37; 39; 66 n. 28; 158; 160; 168; 169; 192 n. 209; 223; 227; 257; 276; 303; 311 ; 346 n. 414; 347 n. 428; 359; 363 ; 364; 367; 376; 389; 410 n. 47; 426; 431, 441; 450; 455; 470; 489; 494; 509; 511 ; 521 ; 524; 525; 540; 546; 562; 579 n. 145; 611 n. 544; 636; 638.
ALEXANDRE p. 103; 139; 144; 231; 233; 247; 640. ALKINOOS p. 561. ALKIOPOS p. 457 ; 459. AMALTHÉE p. 100. AMAZONES (les) p. 13; 41; 247; 305; 473. AMÉNOPillS III p. 26. AMPHITRYON p. 62; 84 n. 221 ; 160; 164; 205 n. 389; 227; 242; 360; 363; 364; 366; 367; 368; 376; 396; 397; 408 n. 34; 440; 461 ; 463464 ; 480 ; 481 ; 483 ; 593 n. 306. AMYMONÉ p. 70 n. 62 ; 565. ANCHISE p. 293 ; 294 ; 295. ANTAGORAS p. 489. ANTÉE p. 22; 23; 95; 96; 174 n. 29 ; 225 ; 253 ; 264; 265 ; 267; 308; 313; 503; 505; 550. ANTÉNOR p. 343 n. 365. APATÉ p. 521. APHRODITE p. 29; 256; 273; 292; 293; 294; 295; 300; 328 n. 146; 341 n. 338; 547 ; 565. APHRODITE D'ÉRYX p. 161; 292 ; 293 ; 299 ; 341 n. 332. APOLLON p. 273; 307; 369; 370; 376; 398; 418 n. 187; 442; 447; 450; 463; 465; 479; 483; 490; 527; 547; 459 ; 561 ; 564; 576 n. 112; 579 n. 143 ; 600 n. 384 ; 604 n. 448 ; 621 n. 707. APOLLON AGYEUS p. 456.
712 APOLLON CARNÉIOS p. 369; 375. APOLLON des CENDRES p. 492. APPIUS CLAUDIUS p. 630; 643 n.782. ARES (ou MARS) p. 22; 265; 442; 572 n. 47. ARÉTHOUSNARÉTHUSE (Hespéride) p. 265 ; 543. ARGANTHONIOS p. 100; 177 n. 61 ; 223 ; 322 n. 23. ARGÊIOS p. 5ll. ARGONAUTES p. 91; 210 n. 438; 227; 233; 241; 341 n. 338; 488; 550-551 ; 574 n. 74; 600 n. 384 ; 619 n. 679. ARGOS PANOPTES p. 235; 515. ARIS1ÉE p. 244. ARTAXERXES MEMNON p. 325 n. 101. ARTÉMIS p. 277; 355; 360; 361 ; 371 ; 375-377 ; 414 n. ll4, 128; 484; 5ll; 526; 527 ; 563; 565; 583 n. 190. ARTÉMIS EUCLÉIA p. 376. ARTÉMIS HÉGÉMAQUE p. 375. ARTÉMIS LAPHRIA p. 509; 606 n.467. ARTÉMIS ORTIllA p. 414 n. 128. ARTÉMIS ORTHOSIA p. 557. ARTÉMIS POLOS p. 422 n. 240. ASARHADDON p. ll9. ASCLÉPIOS p. 138; 234; 329 n. 167 ; 526 ; 583 n. 190. AS DIV AL p. 32. ASES (les) p. 546. ASHTART p. 121 ; 155. ASSURBANIPAL p. 43. ASTARTÉ p. 108; Ill; 120; 121; 124; 147; 156; 157; 161; 162; 163; 189 n. 184, 188; 190 n. 193; 191 n. 204 ; 192 n. 205; 193 n. 220; 194 n. 245; 202 n. 361; 206 n.
395; 299; 300; 508; 605 n. 463 ; 636; 654. AS1ÉRIE p. 120-121 ; 161. ASTÉRION p.514. ASTÉTOPÉ (Hespéride) p. 545; 617 n. 644. ASTRONOÉ p.121 ; 193 n. 220. ATAGARTIS p. 194 n. 245. ATHÉNA p. 18, 19, 29, 34, 56, 125; 260; 261; 262; 265; 323 n. 42; 333 n. 218 ; 349 n. 453; 360; 391; 394; 395; 398; 399; 400; 403 ; 418 n. 187; 420 n. 217; 422 n. 253; 423 n. 259; 260; 443 ; 458; 478; 501; 530; 533; 537; 545 ; 556; 602 n. 420; 614 n. 581 ; 635; 636. ATHÉNA ERGANÉ p. 456. ATLAS p. 20; 22; 68 n. 33; 34; 35; 79 n. 169; 245; 264; 265; 266; 321 n. 7; 523; 541-542 ; 554-557 ; 560 ; 610 n. 540; 616 n. 627 ; 617 n. 633; 618 n. 644; 622 n. 712, 715 ; 657. ATRÉE p. 459,585 n. 215. AUGÉ p. 192 n. 209; 414 n. 120; AUGIAS p. 13; 303 ; 304 ; 364 ; 441-449 ; 457; 460-461 ; 464; 466; 470; 473; 481; 488; 527; 577 n. ll8; ll9; 578 n. 135; 592 n. 293 ; 593 n.297. AUGUSTE p. 144 ; 225. AZBAAL (roi de Kition) p. 208 n. 421. B
BA'AL p. ll9; 120; 123; 161; 162. BA'AL HADAD p. 120.
713
BA'AL HAMMON p. 143; 206 n. 404 ; 207 n. 404. BAALMELEK 1er (roi de Kilian) p. 208 n. 421. BA'AL SHAMEN p. 120; 121. BAR-HADAD p. 207 n. 409. BAûBo p. 278. BEL p. 143. BERGIUS p. 593 n. 300. BES p. 57; 61 ; 163; 393; 529. BIAS p. 593 n. 305. BITON p. 514. BODMELQART p. 137. BORÉE p. 96; 173 n. 26; 481 ; 621 n. 707 ; 625 n. 764. BOUPHONAS p. 283-289. BUTAEAS p. 283-289. BOUTAS/BOUTES p. 256; 288; 293. BOUTES (Argonaute) p. 341 n. 338. BRANp.546. BUSIRIS p. 21; 22; 23; 65 n. 10; 253; 264; 265; 267; 308; 328 n. 140; 494; 503505 ; 554 ; 603 n. 435, 442. C
CABIRES p. 410 n. 57. CACUS p. 54; 59; 85 n. 234; 86 n. 244; 395; 419 n. 212 ; 485-487; 536; 592 n. 283; 595 n. 327; 330; 629; 639; 642 n. 775. CACWS p. 642 n. 775. CADMOS p. 400 ; 442. CALLIRHOÉ p. Il; 331 n. 174; 521 ; 530. CASSANDRE p. 44. CAVALES DE OIOMEDE (les) p. 13; 126; 305; 369; 393; 441.
CENTAURES (les) p. 243; 302; 304 ; 347 n. 423 ; 420 n. 222 ; 424 n. 262 ; 441. CERBERE p. 13; 20; 56; 57; 65 n. 3; 84 n. 229; 251; 260; 261; 279; 331 n. 174; 376 ; 403 ; 420 n. 221 ; 421 n. 225; 427; 444; 473; 511; 517; 520; 522; 525; 562; 563-564; 615 n. 605; 623 n.742. CERCOPES (les) p. 164; 302; 308; 450. CÉRES p. 277. CERF OU BICHE CÉRYNlTE p. 13; 303; 304; 346 n. 413; 389; 390; 391 ; 393; 418 n. 187; 460; 480; 586 n. 228. CERUN p. 281 ; 525; 536. CÉSAR p. 228 ; 229; 231 ; 246; 248; 310; 327 n. 123; 637; 638. CÉTÔ p. 521-522 ; 541. CHARON p. 624 n. 746. CHARONDAS de CATANE p. 351 n.487. CIDMERE p. 522. CHROMIOS d'ETNA p. 277 ; 340 n.327. CHRYSAOR p. Il; 245; 252; 253; 267; 268; 269; 331 n. 174; 394' 395; 521. CHRYSOTIdMIS (Hespéride) p. 545. CLAUDE p. 95 ; 134. CLÉOBIS p. 514. CLÉOMENE p. 297. CLÉOPÂmE p. 188 n. 179. CLYMÉNOS p. 563. COCALOS p. 275. COLAIOS p. 80 n. 183; 100; 175 n. 43; 223; 322 n. 22. COMMODE p. 507 ; 605 n. 454. COPRÉE p. 572 n. 41.
714
cORÉ p. 84 n. 224; 123; 257 ; 275-279; 315; 334 n. 234; 484; 565. CORMAC MAC ART p. 546. CORONOS p. 488. CORYBANTES p. 410 n. 57. COURETES p. 363-367; 410 n. 57. CRASSUS p. 485. CRÉTE (Hespéride) p. 620 n. 690. CRIMISOS p. 294 ; 295. CRONOS p. 18; 211 ; 365 ; 433. CRÔTON 1 CROTONE p. 255; 280. CRUTIDAS p. 283-289. CUCHULAIN p. 395. CURIACES p. 328 n. 148 ; 395. CYATHOS p. 368. CYCNOS p. 22; 265 ; 495-496. CYPSÉLOS (coffre de) p. 21 ; 321 n. 7; 540; 542; 556; 591 n. 282. CYRUS p. 144. D
DACTYLES (les) p. 363-367, 410 n. 57. DANAOS p. 70 n. 63. DANAïDES p. 26; p. 70 n. 62, 63. DÉDALE p. 275; 360; 367; 442. DÉINOMÉNIDES (les) p. 277; 290; 291; 299; 334 n. 236; 335 n. 241 ; 660 n. 833. DÉJANIRE p. 30; 399; 442; 451-452 ; 490; 604 n. 448. DELLOI (les) p. 287 ; 292 ; 339 n. 307. DÊMAROUS p. 191 n. 203. DÉMÉTER p. 84 n. 224; 123; 257; 275-279; 315; 334 n. 234, 236; 366; 398; 422 n.
253; 442; 484; 488; 509; 510; 565; 606 n. 472. DÉMÉTER CHTHONIA p. 563. DÉMOPHON p. 442; 510. DERCYNOS p. 252; 255; 267; 268; 282. DESPOINA = MAITRESSE (La) p. 367; 376; 654. DÉTRESSE p. 11 ; 521. DEUCALION p. 234 ; 574 n. 74. DEUX DÉESSES (les) p. 257;
275-279. DIANE p. 635 DIüCLES p. 370. DIOMEDE p. 85 n. 234. DIOMOS p. 359; 368 ; 493. DIONYSOS p. 50; 76 n. 139; 91; 103; 233; 244; 246; 311 ; 327 n. 123; 400; 413 n. 109 ; 414 n. 114; 424 n. 262; 458; 488; 496; 563; 602 n. 419. DIS p. 83 n. 215 ; 612 n. 558. DORIEUS p. 256; 274; 297298 ; 309 ; 310; 344 n. 372. DOUCÉTIOS p. 287 ; 290. DRAGON ou SERPENT des HESPÉRIDES p. 394; 522;
541-543. DUMUZI p. 509. E
ÉCHÉPHRON p. 293. ÉCHIDNA p. 251; 331 n. 174; 521-523 ; 541. ÉCHO p. 592 n. 292. ÉGESTE (nymphe) p. 256. ÉGESTES p. 294. EITA p. 536. EL p. 120; 121. ÉLECTRE p. 422 n. 253. ÉLECTRYON p. 483 ; 593 n. 306. ÉLYMOS p. 294; 295; 342 n. 358.
715 ÉMATHION p. 22, p. 69 n. 44 ;
264 ; 265. ÉNÉE p. 292; 293; 294; 295; 300; 341 n. 332. ENKIDU p. 518 ; 609 n. 505. ÉPAMINONDAS p. 416 n. 160. ÉPHARMÔSTOS D'OPONTE p. 359. ERGINOS p. 304 ; 376; 480. ERGOTÉLES D'HIMERE p. 225. ÉRIS p. 521-522 ; ÉROS 369-370 ; 580 n. 161. ÉRYTHÉIA/ÉRYTHIE (Hespéride) p. 175 n. 31; 265; 530; 543; 614 n. 584; 585; 617 n.
638. ÉRYX p. 225; 251 ; 255-256 ;
267; 268; 269; 273; 288; 291; 292-300; 309; 310; 341 n. 338 ; 482 ; 526; 652. ESHMOUN p. 124; 137-138 ; 189 n. 184; 190 n. 191 (la-sumu-nu); 197 n. 287; 288. ESHMOUN~MELQART p. 138. EUDOXE DE CYZIQUE p. 117118; 188 n. 179. EUMÉE p. 460 ; 483. EUROPE p. 400. EURYPYLE p. 68 n. 37. EURYSTHÉE p. Il; 18; 19; 20; 26; 56; 66 n. 19; 68 n. 33; 71 n. 76; 251; 252;
259; 260; 261; 264; 265; 266; 267; 268; 273; 302; 303; 332 n. 198; 351 n. 480 ; 394; 395; 398; 412 n. 93 ; 421 n. 225 ; 427; 440-449 ; 451; 457; 459; 460; 462466; 472; 480; 482; 483; 496; 502 ; 572 n. 41 ; 573 n. 56; 575 n. 82; 585 n. 215 ; 614 n. 581 ; 615 n. 605; 653 ; 655. EURYTION p. 11; 57; 58; 251; 260; 261; 267; 268;
479; 482; 520; 525; 527; 530 ; 533 ; 614 n. 584. EURYTOS p. 60; 66 n. 24, 398 ; 450 ; 452 ; 464 ; 483 ; 580 n. 156. ÉVANDRE p. 225; 311; 486; 629; 638. ÉVERGETE p. 117. ÉVHÉMERE p. 244. ÉZÉCHIEL p. 605 n. 460.
F FABU Oes) p. 645 n. 819. FAUNE p.450. FAUNUS p. 311 ; 638. FORTUNA p. 632; 636; 644 n.
794. G GAIAITERRE p. 522; 540-541 ; 547 ; 610 n. 540. GALATOS p. 311 ; 637. GANYMEDE p. 368; 437; 447. GARANUS p. 85 n. 236; 281 ;
486. GAYOMARD p. 608 n. 502. GÉANTS (les) p. 304; 326 n. 106 ; 346 n. 407. GÉLON p. 340 n. 327. GÉRAS p. 517 ; 521 ; 609 n. 504. GÉRYON p. Il, 13,23, 37, 38, 39,
46, 49, 51, 52, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 67 n. 28; 69 n. 47; 79 n. 172; 80 n. 181, 182; 83 n. 212; 84 n. 225; 86 n. 244; 91; 92; 95; 96; 97; 98; 99 ... 102; 164; 167; 168; 174 n. 31; 217; 221; 222; 223; 224; 225; 243; 251; 252; 253; 260; 261; 262; 263; 267; 268; 278; 279; 280; 281; 289; 293; 296; 305;
716
308; 312; 315; 320 n. 7; 321 n. 17; 331 n. 174; 340 n. 330; 341 n. 335; 347 n. 432 ; 348 n. 447; 350 n. 467; 351 n. 480; p. 355; 372; 393; 394-396 ; 419 n. 206; 421 n. 225; 444; 462; 473; 475; 478-480 ; 482; 483; 484; 485; 487; 502; 503; 504; 514; 517; 520-537; 539; 540; 546; 549; 550; 552; 559; 560; 561-566; 591 n. 282 ; 592 n. 283 ; 593 n. 300 ; 612 n. 560; 614 n. 585; 615 n. 605; 629; 640; 652; 653; 656. GÉRYON (le héros) p. 59; 257 ; 275; 279-281 ; 308; 372; 503. GILGAMESH p. 43; 62; 393; 518-519; 546; 657. GLUCHATAS p. 283-289. GORGONES (Les) 521; 523; 529. GRANDE DÉESSE (la) p. 300. GYPTIS p. 311. H
HADES/AIDONEUS p. 18; 23; 55; 56; 66 n. 24; 84 n. 221 et 229; 260; 261; 268; 278; 279; 281 ; 332 n. 213; 395; 396; 404; 482; 522; 525; 527; 536; 547; 557; 562-566; 623 n. 741 ; 624 n. 746. HADRIEN p. 202 n. 361 ; 339 n. 302. HANNON p. 51; 81 n. 186; 105; 117; 171 n. 6; 179 n. 75; 211-214. HARMONIE p. 400 ; 422 n. 253. HAROUM EL RACIDD p. 144.
HÉBÉ p. 19; 30; 262; 303; 340 n. 327; 359; 360; 368; 389; 396; 403 ; 423 n. 259 ; 260; 434; 458; 506; 524; 566; 584 n. 203 ; 625 n. 773 ; 656. HÉLENE p. 361; 409 n. 44; 441 ; 572 n. 47. HÉLIOS / SOLEIL p. 55; 218; 223; 224; 252; 268; 270; 331 n. 178; 481; 501; 527; 554. HÉPHAÏSTOS p. 93 ; 125; 172 n. 12; 255; 398; 399; 442; 526. HÉRA / HÉRÉ p. 18; 19; 20; 29; 30; 56; 60; 62; 84 n. 221, 224; 86 11. 255, 256; 252; 261 ; 262; 264; 267; 268; 303; 315; 318; 321 n. 7; 332 n. 198, 213; 333 n. 218 ; 334 n. 234; 347 n. 423 ; 366; 370; 376; 377; 389; 390; 394; 395; 396; 398; 399; 400; 403 ; 406 n. 12; 414 n. 122, 129; 420 n. 224 ; 421 n. 228, 229; 423 n. 259, 260; 441; 457; 459; 460; 462; 463; 466; 475; 482; 484; 489; 502; 506; 510; 511; 514; 517; 522; 524; 528; 540-541; 545; 560; 564; 565; 566; 583 n. 194; 584 n. 203 ; 586 n. 218 ; 606 n. 467; 607 n. 489; 608 n. 495, 498; 623 n. 741; 625 n. 768, 771; 653; 654; 655; 656. HÉRA ACRAIA p. 514. HÉRA AIGOPHAGE p. 603 n. 434. HÉRA EUBOIA p. 514. HÉRA LACINIENNE p. 61 ; 255 ; 309; 334 n. 234; 462; 515; 594 n. 315. HÉRA OPLOSMIA p. 636.
717 HÉRA PROSYMNA p. 514; 517. HÉRACLES ACHÉEN p. 165. HÉRACLES ARGIEN p. 18. HÉRACLES CHAROPS p. 563. HÉRACLES CHYPRIOTE p. 82 n.
195; 169. HÉRACLES COURETE p. 363367. HÉRACLES CRÉTOIS p. 363;
409 n. 47. HÉRACLES DACTYLE p. 18, p. 65 n. 15; 334 n. 236; 363367 ; 409 n. 47; 484; 509;
566; 606 n. 471, 472. HÉRACLES DIOMEDONTÉIOS p.
564. HÉRACLES ÉGYPTIEN p. 126; 182 n. 108; 194 n. 237 ; 346
n. 407; 409 n. 47. HÉRACLES GADITAN p. 126;
127; 137. HÉRACLES INDIEN p. 409 n. 47. HÉRACLES LÉONTOPHONOS p.
592 n. 296. HÉRACLES-MELQART p. 41 ;
51 ; 81 n. 194; 82 n. 195; 125; 131; 137; 139; 144; 150; 157-162 ; 169; 189 n. 186; 190 n. 188; 194 n. 238 ; 196 n. 279 ; 201 n. 338; 208 n. 421; 300; 508; 565; 635. HÉRACLES PARASTATES p. 363-367; 370. HÉRACLES PHÉNICIEN p. 120;
158; 161. p. 160; 203 n. 370; 204 n. 383 ; 205 n. 384,387,389; 410 n. 48. HÉRACLES THÉBAIN p. 18; 126; 363 ; 409 n. 47. HÉRACLES TYRIEN p. 125; 127; 167; 189 n. 184; 190 n. 188; 191 n. 203; 192 n. 209 ; 202 n. 361. HÉRACLES THASIEN
HÉRACLIDES p. 182 n. 106; 232; 297 ; p. 580 n. 147. HERCLÉ p. 361; 419 n. 203;
423 n. 257; 557; 642 n. 781 ; HERCULE p. 17; 49; 54; 61 ;
64 n. 7, et 8; 65 n. lI, 12, 13; 86 n. 247, 248; 91 ; 95 ; 97; 105; 118; 171 n. 1 ; 174 n. 29, 30; 194 n. 244; 195 n. 252; 209 n. 433; 225; 281 ; 322 n. 32; 330 n. 168; 355; 442 n. 246; 441 ; 444; 485487; 520; 589 n. 257; 624 n. 747; 629-646 ; 660 n. 845. HERCULE COURTOIS p. 468. HERCULE-MELQART p. 81 n.
194. HERCULE PROMACHOS p. 86 n.
247. HERCULE SANDON p. 580 n.
160. HERMES p. 19; 84 n. 228;
261 ; 307; 314; 315; 358; 360; 361; 367; 369; 370; 376; 392; 396; 398; 409 n. 36; 418 n. 194; 420 n. 217 ; 422 n. 253; 437 ; 450; 456; 458; 475; 483; 501; 507; 513; 515; 539; 561; 564; 574 ; 580 n. 161 ; 607 n. 485 ; 614 n. 585 ; 652; 660 n. 837 ; HERMES ARGÉIPHONTES p.
515. HERMES-HÉRACLES p. 409 n.
36. HÉSIONÉ p. 247; 294; 446;
579 n. 144. HESPÉRÉTOUSSA (Hespéride) p.
617 n. 638. HESPÉRIA (Hespéride) p. 543;
617 n. 639. HESPÉRIDES p. Il; 13; 17;
21; 22; 49; 55; 56; 57; 68 n. 32, 33, 37 ; 68 n. 32, 33,
718 37; 78 n. 167; 79 n. 172; 83 n. 213 ; 84 n. 225 ; 229; 95; 96; 97; 99; 102; 167; 173 n. 24 ; 175 n. 31 ; 210 n. 438; 217; 221; 245; 251; 259; 260; 263; 264; 265; 266; 305; 320 n. 7; 322 n. 31; 444; 473; 502; 521; 523; 530; 539·560 ; 611 n. 540; 615 n. 605; 617 n. 627, 633; 620 n. 690 ; 621 n. 703; 653 ; 656; 657. HESPÉRIS p. 617 n. 633. HESPÉRUS p. 617 n. 633. HESTIA (Hespéride) p. 265 ; 617 n. 639. IDÉRON p. 277. HIMERE (Nymphe) p. 256. HIMILCON p. 211. HIPPOCOON p. 368 ; 375. HIPPOCRATES (de Géla) p. 340 n. 327. HIPPODAMIE p. 366. HIPPOLYTE p. 247. HIRAM 1er p. 119; 124; 163; 181 n. 100; 191 n. 204 ; 508. HORACES (les) p. 328 n. 148. HRUNGNIR p. 394. HYDRE DE LERNE p. 13; 41 ; p. 67 n. 28; 126; 303; 304; 331 n. 174; 441 ; 444; 446; 460; 480; 522; 543; 586 n. 228. HYGIE p. 618 n. 644. HYLAS p. 490. HYLLOS p. 489 ; 490; 500; 596 n. 349 ; 597 n. 357. HYPNOSISOMMEIL p. Il, 56; 521 ; 557; 564.
1 IALÉBION/ALÉBION p. 252; 255 ; 267 ; 268; 482. IARDANOS p. 580 n. 147.
lASION p. 565. ICARE p. 450. IDHUNNp.546. ILITHYE p. 456; 583 n. 192. ILOS p. 437. INACHOS p. 234 ; 235 ; 437. INANNA p. 509. INDRA p. 54 ; 394. 10 p. 235 ; 565. 10LAOSp. 59; 164; 193 n. 226; 257; 275; 279-281 ; 287; 309; 359; 360; 361; 364; 368; 370; 372·375 ; 386; 408 n. 34; 412 n. 75; 416 n. 159; 423 n. 260; 446; 503; 506; 539; 545. IOLE p. 60; 421 n. 228; 437; 450. IPHICLES p. 360; 462; 483; 593 n. 305. IPHITOS p. 60; 66 n. 24; 228; 364; 366; 421 n. 228; 443 ; 450-452 ; 463; 464; 465; 480. IRIS p. 423 n. 259. ITALOS p. 323 n. 40. ISIS p. 509. 1UN0 CURmS p. 636. 1UN0 SUSPITA p. 636. IXION p. 347 n. 423.
J JAPET p. 523 ; 557. JASON p. 550. JOUR p. 56. JUBA 1er p. 330 n. 168. JUBA II (roi de Maurétanie) p. 99 ; 101; 115; 134; 330 n. 168; 547. JUNON p. 189 n. 188 ; 451. JUPITER p. 441.
719 K
KAHATIÉLÉO p. 381. KÉLÉos p. 442. KERES, KERE p. Il, 56, 517; 521. KOULO TYOLO P 381. L
LACINIOS p. 255; 267; 280; 309. LADON p. 541 ; 550. LAGIDES (les) p. 188 n. 179. LAMOS p. 451. LAOMÉDON p. 294 ; 442; 445 ; 446; 447; 576 n. 109; 577 n. 112. LARINOS p. 503. LATINOS p. 280; 638. LAVINIA p. 311 ; 638. LÉPRÉE p. 488. LEUCASPIS p. 283-289; 339 n. 309. LIBÉRA p. 277. LICHAS p. 490. LINOS p. 301 ; 464; 480. LION DE NÉMÉE p. 13; p. 67 n. 28; p. 69 n. 42; 168; 303; 304 ; 328 n. 131; 331 n. 174; 361 ; 389; 393; 418 n. 187; 444; 460; 473; 480; 481; 522 ; 586 n. 228 ; 592 n. 285. LIPARA (Hespéride) p. 545. LOCROS p. 280. LUCULLUS p. 485. LYCAON p. 442. LYCOS p. 391 ; 392; 580 n. 159. LYCURGUE p. 357 ; 361 ; 406 n. 10 ; 409 n. 44. LYGDAMIS p. 327 n. 122.
M
MAIAp.504. MACRIN 1? 148; 201 n. 337. MALAKBEL p. 192 n. 209. MANANNAN p. 546. MATER MATUTA p. 632 ; 644 n. 794. MÉDÉE p. 619 n. 679; 625 n. 764. MÉDUSE p. 521 ; 625 n. 764. MÉGARA p. 30, 386; 398 ; 408 n. 34; 462. MÉGES p. 577 n. 119. MÉLICERTE p. 207 n. 404. MÉLÉAGRE p. 389. MELQART p. 24; 37; 51 ; 52; 57; 61; 65 n. 9; 75 n. 123; 82 n. 196; 103; 108; 110; 119-127; 128; 131; 137; 143; 147; 155; 156; 157; 160-162; 163; 167; 168; 169; 184 n. 133; 189 n. 184, 186; 190 n. 189, 191 (Mi-ilqar-li), 195; 191 n. 199, 203 ; 197 n. 291 ; 204 n. 380; 205 n. 384; 206 n. 395, 404; 207 n. 404, 405, 409 ; 208 n. 418 ; 209 n. 425, 427, 428, 432; 263; 273; 318; 409 n. 36; 419 n. 202 ; 422 n. 246; 487 ; 508; 509; 510; 511; 525; 565; 581 n. 166; 585 n. 210; 605 n. 460; 630; 631 ; 635; 636; 642 n. 781 ; 654; 655; 660 n. 842. MÉNÉLAS p. 433. MÉNOITIOS p. 482; 525; 527; 622 n. 715. MÉTANIRE p. 510. METTEN p. 109. MIKAL p. 157 ; 161. MILK'ASHTART p. 121; 189 n. 188; 206 n. 395. MINOS p. 275 ; 442. MINOTAURE (le) p. 394.
720 MIXOPARTHÉNOS (la) p. 521. MOIRES (les) p. 56; 621 n. 697. MOROS p. 521. MOTYÉ p. 299. MUSES (les) p. 301.
N NÉLÉE p. 364 ; 483 ; 593 n. 305. NÉMÉSIS p. 521. NÉRÉE p. 22; 223; 265; 322 n.
31; 522; 540; 554; 611 n. 542; 615 n. 609. NERGAL p. 62; 87 n. 256; 169; 393; 487. NESSOS p. 346 n. 412; 420 n. 221 ; 442; 447; 490. NESTOR p. 483. NIOBÉ p. 241. NORAX p. 614 n. 585. NOTOS p. 481. NUIT p. lI, 56, 521-523 ; 543; 557; 564. NYMPHES (les) p. 22; 91 ; 256 ; 265; 267; 275; 292; 323 n. 42; 348 n. 453 ; 539; 545.
o OCÉANOS/OCÉAN p. Il; 23;
49; 55; 223; 224; 252; 268; 323 n. 36; 331 n. 174; 178; 521-524; 564. OCTAVIUS HERENUS p. 485. OEDIPE p. 25 ; 29 ; 32 ; p. 72 n. 78, 79; 385; 394 ; 437. OENOS p. 368. oINÉos p. 368. OISEAUX DU LAC STYMPHALE (Les): p. 13; 303; 304;
391; 393; 441 ; 444; 460; 473; 517; 586 n. 228. OLYMPIENS p. 19; 257; 301; 396; 501 ; 504.
OMPHALE p. 30; 60; 228; 308; 399; 421 n. 228; 441443 ; 448; 450·459; 463;
465; 470; 475 ; 483; 576 n. 102; 580 n. 147, 161. ORITHYE p. 625 n. 764. ORTHOS/ORTHROS p. Il; 57; 58; 84 n. 229; 251; 260; 261; 267; 268; 331 n. 174; 420 n. 221 ; 479; 482; 520; 522·523 ; 525 530; 533; 613 n. 579. OURANOS p. 68 n. 33; 522. OUSIR p. 121. p PALAIMON p. 207 n. 404. PALANS p. 638. PALIQUES (les) p. 286·287; . ~~0--i 291.292 ; 336 n. 268. PAMMENES p. 416 n. 160. PANDORE p. 33, 397; 495. PARQUES (les) p. 521. PASIPHAÉ p. 307. PATROCLE p. 234. PÉDIACRATES/PÉDIOCRATES : pp. 283·289 ; 339 n. 309. PÉDIOS p. 287. PÉGASE p. 521. PÉLIAS p. 364. PÉLOPS p. 364; 365; 366;
367; 411 n. 63. PENTATHLOS p. 274 ; 298 ; 333
n.222. PERSÉE p. 437 ; 521. PERSÉPHONE p. 23; 55; 257;
275; 277; 278; 484; 536; 557; 564. PHAETON p. 328 n. 140; 600 n. 390. PHÉNODAMAS p. 294. PHERSIPNAI p. 536. PHIALO p. 414 n. 120.
721
PHILOCTETE p. 341 n. 348; 391 ; 507 ; 604 n. 448. PHILOTES p. 521. PHIX p. 522. PHOLOS p. 302; 303; 498; 601 n.405. PHORKYS p. 252; 521-522 ; 541. PHOTIUS p. 230; 231. PHYLÉE p. 481 ; 577 n. 119; 592 n.296. PHYLIOS p. 496. PINARIUS p. 642 n. 775. PIRITHOUS p. 69 n. 52. PISISTRATE, PISISTRATIDES p. 47; 78 n. 165; 333 n. 218; p. 349 n. 467; 407 n. 19; 419 n. 204. PLÉIADES (les) p. 617 n. 644. PLUTON p. 517. PODARGE p. 625 n. 764. POBAS p. 604 n. 448. POLYDAMAS p. 393; 419 n. 200. PONTOS / FLOT p. 521-523 ; 564. POSÉIDON p. 190 n. 195; 225; 252; 255; 265; 267; 268; 270; 314; 332 n. 212; 398 ; 411 n. 63; 413 n. 109; 437; 442; 447; 482; 488; 496; 505; 521-524; 562; 565; 576 n. 112; 603 n. 442; 625 n.764. POTITII (les) p. 630 ; 643 n. 782. PROMACHOS p. 293. PROMÉTHÉE p. 21; 22; 33; 67 n. 28; 68 n. 33; 96; 265; 304; 347 n. 432; 504; 542 ; 554-599; 599 n. 381 ; 603 n. 430; 621 n. 703; 622 n.715. PRonS p. 311. PSOPHIS p. 293 ; 341 n. 335.
PTOLÉMÉE (roi de Maurétanie) p. 115; 134. PTOLÉMÉES p. 144; 147; 153; 188 n. 179; 201 n. 338. PUMAÏ p. 194 n. 246. PUMIATHON p. 153 ; 201 n. 338. PYGMALION p. 109; 126; 194 n. 246; 494. PYRÉNE p. 265. PYTHAGORE p. 65 n. 15. PYTHIE (la) p. 446; 462 ; 463 ; 465. PYTHON p. 465. R
RÉCARANUS p. 59; 281; 486487; 644 n. 803. RESHEF p. 162; 169; 184 n. 133; 196 n. 283 ; 197 n. 287. RHÉA p. 365 ; 400.
S SALOMON p. 119; 124; 181 n. 100; 508. SANDAS / SANDON p. 127; 169; 209 n. 434; 210 n. 435; 487; 508; 509; 510; 580 n. 160. SANGLIER D'ÉRYMANTHE (le) : p. 13; 273; 303; 304; 389; 391 ; 460; 480; 586 n. 228. SARCASME p. Il ; 521. SARDOS p. 81 n. 194; 189 n. 186. SARGON p. 144; 163. SATIJRNE p. 120. SCYTHES p. 312. SEDNA p. 528. SÉLÉNÉ p. 563. SÉLEUCOS NICATOR p. 247. SHADRAPHNSHEDROFÉ p. 169; 197 n. 287, 291.
722 SHAMASH p. 518. SICULOS p. 295. Sll...ENES (les) p. 584 n. 203. SIRENES (les) p. 341 n. 338. SISYPHE p. 85 n. 234. SOLON p. 369 ; 465. SOLONTE p. 299. SOPATROS p. 493. SOSTRATOS p. 368; 371. SPHINX p. 394. STRYMON p. 267 ; 268. STYX p. 564. SYLEUS 1SYLÉE p. 308; 450; 475; 510. SYLLA p. 485.
THOUTMOSIS III p. 70 n. 63. THRAËTONA p. 394. TIMOLÉON p. 281. TIMOTHÉE p. 350 n. 467. TIRÉSIAS p. 587 n. 235. TITHON p. 22 ; 265. TRAJAN p. 339 n. 302. TRICARANOS p. 395 ; 487. TRITO p. 58 ; 60; 420 n. 213 ; 484. TRITON p. 419 n. 204. TURMS p. 361. TYPHON p. 193 n. 226; 251; 331 n. 174; 541.
u
T LE TAUREAU DE CRETE p. 13; 304; 393 ; 398; 496. TAYGETE p. 557. TÉLÉMAQUE p. 433. TÉLEPHE p. 192 n. 209. TÉLÉSICLES p. 52. TÉLINES p. 277. THANATOS/MORT p. 11; 56; 83 n. 213; 521. THEFARIE VELIANAS = TIBERI~ p. 508; 605 n. 463. THÉIODAMAS p. 489·491; 495; 504; 513; 596 n. 349; 597 n. 357; 598 n. 367; 599 n.384. THÉMIS p. 541; 545; 621 n. 697. THÉOGÉNES p. 584 n. 197. THÉSÉE p. 23; 69 n. 52; 164; 227; 230; 358; 360; 371; 394 ; 400 ; 406 n. 15; 437. THESPIS ou THESTIUS p. 301 ; 345 n. 394; 397; 461 ; 462; 463; 480. THESPIADES (les) p. 309 ; 349 n. 465. THÔRR p. 394.
ULGEN p. 658. ULYSSE p. 19; 56; 66 n. 24; 230; 396; 433; 460; 483 ; 501. UNI p. 423 n. 257. V
VÉNUS de l'IDA p. 293. VÉNUS ÉRYCINE p. 295. Vll...AE p. 361. VULCAIN p. 420 n. 212. y
YAM p. 119; 120.
Z ZALEUCOS de LOCRES p. 351 n. 487. ZÉPHYR p. 625 n. 764. ZEUS p. 17; 18; 19; 20; 21; 37; 56; 60; 62; 66 n. 28; 68 n. 35; 84 n. 221; 87 n. 256; 120; 121; 161; 190 n. 193; 194 n. 245; 225; 244 ; 260; 262; 264; 277; 304;
723 308; 359; 370; 224; 433; 444 ; 458 ;
311; 347 n. 428. 432; 363; 364; 365; 366; 389; 410 n. 57; 420 n. 421 n. 228. 229; 426; 434; 437; 442; 443; 445; 446; 451 ; 456; 459; 462; 463 ; 466;
475; 480; 481 ; 484; 495; 505; 524 ; 539; 540-541 ; 545; 548; 556; 560; 564; 565; 604 n. 447; 621 n. 697. ZEUS APOMYIOS p. 364 ; 484. ZEUS KÉNAIOS p. 604 n. 448.
TABLE DES MATIERES INTRODUCTION
p.9 p. 15
PROLOGUE CHAPITRE 1 : DES POMMES D'OR DES HESPÉRIDES AUX AVENTURES OCCIDENTALES D'HÉRACLES
p.17
CHAPITRE II : LE MYTHE/MODE D'EMPLOI
p.25
2.1. 2.2. 2.3. 2.4. 2.5. 2.6.
Le mythe : "une parole choisie par l'histoire" ? Le mythe: "un fait social total" ? Le mythe: comme le rêve...? Le mythe, "discours ultime" ? Le mythe, un langage à décoder? Le mythe, "un jeu de cache-cache entre la forme et le sens"
CHAPITRE III : DES MOTS ET DES IMAGES: AUX SOURCES DU DISCOURS MYTHIQUE
3.1. 3.2.
Des mots Des images
CHAPITRE IV : PERSPECTIVES
4.1. 4.2. 4.3.
Héraclès et l'écume des temps : l'enquête historique Héraclès et le modèle absent de la cité : le schéma structuraliste Héraclès entre le rêve et la réalité: symbolisme et fonctionnalisme
p.26 p.28
p. 29 p. 31 p. 32 p. 35
p. 37 p. 37 p.41
p.49 p.49 p.52 p.55
726
NOTES DU PROLOGUE
p. 64
PREMIERE PARTIE D'UNE RIVE A l'AUTRE DE LA MÉDITERRANÉE CHAPITRE 1: LlXOS ET GADES, BORNES OCCIDENTALES DU MONDE CONNU
1.1. 1.2. 1.3.
Localisations Un mirage occidental Des "finistères"
p.95 p.95 p.97 p.102
CHAPITRE Il: LlXOS ET GADES FONDATIONS PHÉNICIENNES
2.1.
Gadès L'expansion phénicienne en Méditerranée occidentale Lixos
2.2.
2.3. CHAMTREIII:
3.1.
3.3.
p.109 p.114
HÉRACLES-MELQART ET SES SANCTUAIRES DE LIXOS ET GADES
3.2.
p.105
Melqart Le sanctuaire de Melqart à Gadès Les sanctuaires de Lixos
p. 119
p. 120 p. 126 p. 128
CHAPITRE IV: HÉRACLES - MELQART D'UNE RIVE A L'AUTRE DE LA MEDITERRANEE
4.1. 4.2.
Annith Chypre
p.137 p.137
p. 144
727
4.3.
Confrontations
p. 157
CONCLUSIONS
p.167
NOTES DE LA PREMIERE PARTIE
p. 171
ANNEXE : LE PÉRIPLE D'HANNON
p.211
DEUXIEME PARTIE HÉRACLES ET LE MODELE ABSENT DELA CITÉ A. HÉRACLES ARCHÉGETE (HÉRACLES ET LA COLONISATION, 1). FIXATION ET ENRICHISSEMENT DU MYTHE
p. 221
CHAPITRE 1: RETOUR AUX SOURCES: DIODORE ET APOLLODORE
p.227
CHAPITRE II: HÉRACLES EN OCCIDENT: LE RÉCIT
2.1.
2.2. 2.3.
Le voyage vers l'Ouest Le récit Pour une objectivation du récit
p.251 p.251 p. 255 p.258
CHAPITRE III: HÉRACLES EN SICILE: LE MYTHE ET SES DÉRIVATIONS
3.1.
3.2. 3.3. 3.4.
Syracuse Agyrion Les chefs sicanes Éryx
p.273 p. 275 p.279 p. 282 p.292
B. HÉRACLES CIVILISATEUR (HÉRACLES ET LA COLONISATION, II). RESÉMANTISATION DU MYTHE
p.301
728 CHAPITRE 1: DE LA VIE SAUVAGE A LA VIE CIVILISÉE HÉRACLES ET LA DÉFINITION D'UNE CULTURE p.
303
CHAPITRE II : HÉRACLES AUX MARGES DU MONDE. CULTURE ET BARBARIE p.
307
CHAPITRE III: LA CITÉ, "MODELE ABSENT" DANS LE PROCES D'ACCULTURATION p.311 CONCLUSIONS
p. 316
NOTES DE LA DEUXIEME PARTIE
p. 320
TROISIEME PARTIE HÉRACLES DANS LA crrÉ L'INTÉGRATION DES JEUNES GENS CHAPITRE 1: CULTES
p. 357
CHAPITRE II: INITIATIONS
p. 379
CHAPITRE III: MYTHES
p. 389
CONCLUSIONS
p. 404
NOTES
p.406
DE LA TROISIEME PARTIE
QUATRIEME PARTIE HÉRITAGES CHAPITRE 1: IMAGES DU TRAVAIL
1.1. 1.2. 1.3.
Le travail : des mots pour le dire Héraclès au travail: des mots aux choses Héraclès latris et doulos : mythe et réalité sociale
CONCLUSIONS
p. 427
p.428 p.440 p. 455 p.470
729
CHAPITRE II: IMAGES DU SACRIFICE
2.1. 2.2. 2.3.
Héraclès bouvier, protecteur des troupeaux De la cuisine... au sacrifice Du sacrificateur... à la victime du sacrifice
p.475 p.478 p.488 p. 502
CONSLUSIONS
p. 513
CHAPITRE III: IMAGES DE LA MORT ET DE LtIMMORTALITÉ
p. 517
3.1. 3.2. 3.3.
Le monstre triple, image de la mort Les pommes d'or, gages d'immortalité "Prairies et jardins de l'au-delà"
p. 520 p. 538 p. 561
NOTES DE LA QUATRIEME PARTIE
p. 569
ÉPILOGUE
p.627
CONCLUSIONS
p.647
BIBLIOGRAPHIE
p. 663 TABLES
1. Tableaux
p. 690
2. Figures et cartes
p. 691
INDEX TABLE DES MATIERES
p. 697 p. 725
ANNALES LITI'ERAlRES DE L'UNIVERSITE DE BESANÇON CENTRE D'HISTOmE ANCIENNE Dernières publications: 68 - Les grandes figures religieuses: fonctionnement pratique et symbolique dans l'Antiquité, 1986 (volume 329). 69 - Dialogues d'histoire ancienne, 11, 1985 (volume 330). 70 - Céramiques héllénistiques et romaines, 2, 1987 (volume 331). 71 - Ch. PEREZ. Monnaie du pouvoir et pouvoir de la monnaie, 1986 (volume 332). 72 - Tables fréquentielles de grec classique, 1985 (volume 336). 73- R. DESCAT. L'acte et l'effort. Une idéologie du travail en Gr~ce ancienne. VIIIe-Ve s. avant J.-C., 1986 (volume 339). 74 - Dialogues d'histoire ancienne, 12, 1986 (volume 349). 75 - F. VANNIER. Richesse privée et finances publiques dans le discours athénien aux Ve et Ne srecles, 1987 (volume 362). 76 - P. BRULÉ. La fille d'AtMnes. La religion des jeunes filles à AtMnes à l'époque classique, 1987 (volume 363). 77"- P. THOLLARD. Barbarie et civilisation chez Strabon, 1987 (volume 365). 78 - Dialogues d'histoire ancienne, 13, 1987 (volume 366). 79 - Mélanges P. Uvêque, 1, 1988 (volume 367). 80 - L.-P. MARINOVIC. Le mercenariat grec au IVe si~cle aV.n.~. et la crise de la polis, 1988 (volume 372). 81 - Dialogues d'histoire ancienne, 14,1988 (volume 376). 82 - Mélanqes P. Uvêque, 2, 1989 (volume 377). 83 - Ch. PEREZ. Index thématique des références à l'esclavage et à la dépendance, 1988 (volume 380). 84- R. NOUAILHAT. Saints et patrons. Les premiers moines de Urins, 1989 (volume 382). 85 - C.-R. WHITTAKER. Les frontreres de l'Empire romain, 1989 (volume 390). 86 - Entre hommes et dieux. Le convive, le héros, le propMte, 1989 (volume 391). 87 - Dialogues d'histoire ancienne, 15/1 (Actes du congrès de la SOPHAU 1988 - Espace, paysages, histoire, Antiquité), 1989 (volume 395). 88 - Monique CLAVEL-LÉVÊQUE. Puzzle gaulois. Les Gaules en mémoire. Images. Textes. Histoire, 1989 (volume 396). 89 - Colette JOURDAIN-ANNEQUIN. Héracl~s aux portes du soir. Mythe et histoire, 1989 (volume 402). 90- Rita COMPATANGELO. Un cadastre de pierre. Le Salento romain, 1989 (volume 403). 91- Mélanges P. Uvêque, 3, 1989 (volume 404).
ACHEVE D'IMPRIMER SUR LES PRESSES DE VA.N.R.T. UNIVERSITE DE LILLE III MARS 1990