Université des Sciences et techniques de Masuku Faculté des Sciences Département de Mathématiques et Informatique
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Université des Sciences et techniques de Masuku Faculté des Sciences Département de Mathématiques et Informatique
COURS DE MESURE ET INTEGRATION 3ème Année de Licence en Mathématiques par
Guy Martial NKIET Professeur Titulaire
Chapitre 1 Espaces et applications mesurables 1. Espaces mesurables * tribu Soient X un ensemble, P (X) l’ensemble des parties de X et T ⊂ P (X). Pour tout ´el´ement A de P (X), on d´esigne par Ac le compl´ementaire de A dans X. D´ efinition 1.1.1. On dit que T est une tribu des parties de X, ou encore tribu sur X si : (i) ∅ ∈ T , X ∈ T (ii) A ∈ T ⇒ Ac ∈ T (stabilit´e par passage au compl´ementaire) S (iii) pour toute famille (An )n∈N d’´el´ements de T , on a n∈N An ∈ T (stabilit´e par r´eunion d´enombrable) Cela permet la d´efinition suivante : D´ efinition 1.1.2. On appelle espace mesurable tout couple (X, T ) o` u X est un ensemble et T une tribu sur X. Remarque 1.1.1. Lorsque (X, T ) est un espace mesurable, les propri´et´es suivantes sont aussi v´erifi´ees: 1) Stabilit´e par r´eunion finie : A ∈ T , B ∈ T ⇒ A ∪ B ∈ T . En effet, il suffit de consid´erer la famille S (An )n∈N d’´el´ements deST , d´efinie par : A0 = A, A1 = B et, pour n ≥ 2, An = ∅; on a alors n∈N An ∈ T , et comme n∈N An = A ∪ B, il vient que A ∪ B ∈ T . 2) Stabilit´e par intersection d´enombrable : pour toute famille (An )n∈N d’´el´ements de T , on a T n∈N An ∈ T . En effet : !c \ [ An = Acn n∈N
n∈N
et le r´esultat est obtenu des stabilit´es par passage au compl´ementaire et par r´eunion d´enombrable. 3) Stabilit´e par intersection finie : A ∈ T , B ∈ T ⇒ A ∩ B ∈ T . En effet, il suffit de consid´erer la famille (An )n∈N d’´el´ements de T , d´efinie T par : A0 = A, A1 = B T et, pour n ≥ 2, An = X; on a alors (d’apr`es la propri´et´e 2 ci dessus) n∈N An ∈ T , et comme n∈N An = A ∩ B, il vient que A∩B ∈T . 4) Stabilit´e par diff´erence : A ∈ T , B ∈ T ⇒ A\B ∈ T . Cela provient de A\B = A ∩ B c et des stabilit´es par passage au compl´ementaire et par intersection finie. 5) Si X 6= ∅ alors T = {∅, X} est une tribu sur X. C’est la plus petite tribu (au sens de l’inclusion) sur X; elle est appel´ee tribu grossi`ere sur X. 6) Si X 6= ∅ alors T = P (X) est une tribu sur X. C’est la plus grande tribu sur X; elle est appel´ee tribu triviale sur X. D´ efinition 1.1.3. Soit E ⊂ P (X). On appelle tribu engendr´ee par E la plus petite tribu sur X contenant E. Elle est not´ee σ (E) . 2
Remarque 1.1.2. 1) Lorsque T est une tribu sur X, on appelle sous-tribu de T toute tribu S sur X v´erifiant S ⊂ T . La d´efinition pr´ec´edente indique que la tribu engendr´ee par E est une sous-tribu de toute tribu T sur X contenant E; c’est ` a dire : E ⊂ T ⇒ σ (E) ⊂ T . 2) Si A et B sont deux tribus sur X, alors A ∩ B est une tribu sur X. En effet: (i) X ∈ A ∩ B puisque X ∈ A et X ∈ B. De mˆeme ∅ ∈ A ∩ B. (ii) Pour tout A ∈ A ∩ B on a Ac ∈ A ∩ B puisque Ac ∈ A etSAc ∈ B. S (iii) Pour toute famille (An )n∈N d’´el´ements de A ∩ B , on a n∈N An ∈ A et n∈N An ∈ B. S On en d´eduit que n∈N An ∈ A ∩ B. 3) Comme cons´equence de la remarque pr´ec´edente, la tribu engendr´ee par E est l’intersection de toutes les tribus contenant E. Exemple 1.1.1. Si A ∈ P (X), A 6= ∅ et A 6= X alors on v´erifie facilement que σ ({A}) = {∅, X, A, Ac }. * tribu bor´elienne Si X est un espace topologique, on a : D´ efinition 1.1.4. On appelle tribu bor´elienne de X la tribu BX engendr´ee par les ouverts de X. On appelle bor´elien de X tout ´el´ement de BX . Remarque 1.1.3. 1) BX est ´egalement engendr´ee par les ferm´es de X. En effet : - BX contient les ferm´es de X : si A est ferm´e, Ac est ouvert, donc Ac ∈ BX . Par la stabilit´e par passage au compl´ementaire, il vient A ∈ BX . - BX est la plus petite tribu sur X contenant les ferm´es de X : soit T une tribu sur X contenant les ferm´es de X; pour tout ouvert A de X, Ac est ferm´e, donc Ac ∈ T . Par la stabilit´e par passage au compl´ementaire, il vient A ∈ T . Donc T est une tribu sur X qui contient les ouverts de X et par suite BX ⊂ T . 2) Quelques bor´eliens de R : les singletons, les intervalles ferm´es, ouverts, semi-ouverts et semiferm´es sont des bor´eliensTde R. En effet, pour (a, b) ∈ R2 , a < b, on a : (i) singletons. {a} = n∈N∗ a − n1 , a + n1 . Comme chaque a − n1 , a + n1 appartient `a BX , la stabilit´e par intersection d´enombrable permet de conclure que {a} appartient `a BX . (ii) intervalles ferm´es. Puisque BR est ´egalement engendr´ee par les ferm´es de R, les intervalles ferm´es de R appartiennent ` a BR . (iii) intervalles semi ouverts. [a, b[ = [a, b] \ {b} ∈ BR ; ]a, b] = [a, b] \ {a} ∈ BR ; ]a, +∞[ = S S ]a, a + n[ ∈ B ; ]−∞, a[ = R n∈N∗ n∈N∗ ]a −Sn, a[ ∈ BR ; S (iv) intervalles semi ferm´es. [a, +∞[ = n∈N∗ [a, a + n[ ∈ BR ; ]−∞, a] = n∈N∗ ]a − n, a] ∈ BR ; 2. Applications mesurables * mesurabilit´e d’une application Soient (X1 , T1 ) et (X2 , T2 ) deux espaces mesurables. 3
D´ efinition 1.2.1. Une application f : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) est mesurable si quelque soit A ∈ T2 , on a f −1 (A) ∈ T1 . Lorsque X1 et X2 sont des espaces topologiques et T1 = BX1 , T2 = BX2 toute application f mesurable est dite bor´elienne . Exemple 1.2.1. 1) Mesurabilit´e d’une fonction indicatrice. Soient X2 = {0, 1}, T2 = P ({0, 1}) et A un ´el´ement de P (X1 ). La fonction indicatrice de A, not´ee 1IA , est l’application de (X1 , T1 ) vers (X2 , T2 ) d´efinie par : 1 si x ∈ A 1IA (x) = . 0 si x ∈ /A On a T2 = {∅, {0} , {1} , {0, 1}} et −1
(1IA )
(X2 ) = X2 , (1IA )
−1
(∅) = ∅, (1IA )
−1
({0}) = Ac , (1IA )
−1
({1}) = A.
Ainsi, si A ∈ T1 alors 1IA est mesurable. 2) Mesurabilit´e d’une fonction constante : toute fonction constante f : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) est mesurable. En effet si ∀x ∈ X1 , f (x) = y0 o` u y0 ∈ X2 , alors pour tout A ∈ T2 on a : - si y0 ∈ A, alors f −1 (A) = X1 ∈ T1 ; - si y0 ∈ / A, alors f −1 (A) = ∅ ∈ T1 .
D´ efinition 1.2.2. Soit une S1 sous-tribu de T1 et f : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) une application. On dit que f est mesurable par rapport ` a S1 , ou encore S-mesurable si, pour tout A ∈ T2 , on a f −1 (A) ∈ S1 . La propri´et´e pr´ec´edente est aussi d´esign´ee en disant que S1 rend f mesurable. * tribu engendr´ee par une application mesurable Proposition 1.2.1. Soient f : X1 → X2 une application et T2 une tribu sur X2 . Alors l’ensemble σ (f ) = f −1 (B) / B ∈ T2 = f −1 (T2 ) est une tribu sur X1 . Preuve. (i) X1 = f −1 (X2 ) ∈ σ (f ) et ∅ = f −1 (∅) ∈ σ (f ) . c (ii) Si A ∈ σ (f ) on a A = f −1 (B) o` u B ∈ T2 . Donc Ac = f −1 (B) = f −1 (B c ); comme B c ∈ T2 on a Ac ∈ σ (f ) . (iii) Si (An )n∈N est une famille d’´el´ements de σ (f ), on a pour tout n ∈ N, An = f −1 (Bn ) o` u Bn ∈ T2 . Donc ! [ [ [ −1 −1 An = f (Bn ) = f Bn n∈N
et comme
S
n∈N
Bn ∈ T2 , on en d´eduit
n∈N
S
n∈N
n∈N
An ∈ σ (f ) .
D´ efinition 1.2.3. La tribu σ (f ) est appel´ee tribu engendr´ee par f .
Proposition 1.2.2. σ (f ) est la plus petite tribu sur X1 qui rend f mesurable. 4
Preuve. σ (f ) rend f mesurable car, par d´efinition, pour tout B ∈ T2 on a f −1 (B) ∈ σ (f ). Soit T une tribu sur X1 qui rend f mesurable, alors pour tout A ∈ σ (f ), puisque A = f −1 (B) o` u B est un ´el´ement de T2 , il vient A ∈ T . On a ainsi montr´e que σ (f ) ⊂ T .
*simplification du crit`ere de mesurabilit´e d’une application Comme on peut facilement l’imaginer, une tribu peut comporter un nombre infini d’´el´ements. Par exemple, BR comporte non seulement les intervalles sp´ecifi´ees dans la remarque 1.1.3, mais aussi leurs compl´ementaires, leurs r´eunions finies ou d´enombrables, leurs intersections finies ou d´enombrables, etc. Ainsi donc v´erifier la mesurabilit´e d’une application par le crit`ere donn´e dans la d´efinition 1.2.1, comme nous l’avons fait dans l’exemple 1.2.1 pour la fonction indicatrice, peut s’av´erer impossible. Cependant, dans certains cas on peut r´eduire l’ensemble des parties sur lesquelles on doit appliquer ce crit`ere pour ´etablir la mesurabilit´e d’une application. Cela est indiqu´e dans la proposition 1.2.3 ci-dessous dont la d´emonstration n´ecessitera le lemme suivant. Lemme 1.2.1. (Lemme de transport ). Soit f : X1 → X2 et E ⊂ P (X2 ). Alors σ f −1 (E) = f −1 (σ (E)) Preuve. (a) montrons σ f −1 (E) ⊂ f −1 (σ (E)); on a f −1 (E) ⊂ f −1 (σ (E)) car E ⊂ σ (E). Comme f −1 (σ (E)) est une tribu (cf. proposition 1.2.1), il vient σ f −1 (E) ⊂ f −1 (σ (E)) . (b) montrons f −1 (σ (E)) ⊂ σ f −1 (E) ; soit T = A ∈ P (X2 ) / f −1 (A) ∈ σ f −1 (E) alors T est une tribu sur X2 . En effet : (i) f −1 (X2 ) = X1 ∈ σ f −1 (E) donc X2 ∈ T . De mˆeme ∅ ∈ T car f −1 (∅) = ∅ ∈ σ f −1 (E) . c (ii) Si A ∈ T , on a f −1 (A) ∈ σ f −1 (E) . Donc f −1 (Ac ) = f −1 (A) ∈ σ f −1 (E) , ce qui c prouve que A ∈ T . (iii) Si (An )n∈N est une famille d’´el´ements de T , on a pour tout n ∈ N, f −1 (An ) ∈ σ f −1 (E) . Donc ! [ [ f −1 An = f −1 (An ) ∈ σ f −1 (E) , n∈N
n∈N
S
ce qui prouve que n∈N An ∈ T . De plus, T contient E car A ∈ E ⇔ f −1 (A) ∈ σ f −1 (E) ; donc σ (E) ⊂ T , d’o` u f −1 (σ (E)) ⊂ −1 −1 −1 −1 f (T ). Or, par d´efinition de T , on a f (T ) ⊂ σ f (E) , on conclut donc que f (σ (E)) ⊂ −1 σ f (E) Ce lemme permet la caract´erisation suivante de la mesurabilit´e d’une application. Proposition 1.2.3. Soit f : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) avec T2 = σ (E) o` u E ⊂ P (X2 ). Alors est mesurable si et seulement si quelque soit A ∈ E, on a f −1 (A) ∈ T1 . Preuve. −1 Si f est mesurable, quelque si soit A ∈ E, on a A ∈ T2 donc f (A) ∈ T1 . R´eciproquement, −1 −1 f (E) ⊂ T1 alors σ f (E) ⊂ T1 et comme, d’apr`es le lemme de transport, on a f −1 (T2 ) = σ f −1 (E) , il vient f −1 (T2 ) ⊂ T1 , c-a-d f est mesurable.
5
Ainsi, au lieu de v´erifier le crit`ere de mesurabilit´e pour tout A ∈ T2 , il suffit de ne l’utiliser que pour A ∈ E, ce qui simplifie la v´erification de la mesurabilit´e de f . Dans le cas o` u la tribu d’arriv´ee est la tribu bor´elienne sur un espace topologique X2 , la proposition pr´ec´edente devient : Corollaire 1.2.1. Lorsque X2 est un espace topologique l’application f : (X1 , T1 ) → (X2 , BX2 ) est mesurable si et seulement si, pour tout ouvert A de X2 , on a f −1 (A) ∈ T1 . Dans le cas o` u X2 = R, on peut obtenir une meilleure simplification de la mesurabilit´e. Cela est ´enonc´e dans le corollaire suivant : Corollaire 1.2.2. Une application f : (X, T ) → (R, BR ) est mesurable si et seulement si, pour tout a ∈ R, on a f −1 (]−∞, a]) ∈ T . Preuve. Si f est mesurable, puisque pour tout a ∈ R on a ]−∞, a] ∈ BR , il vient tout de suite f −1 (]−∞, a]) ∈ T . R´eciproquement, si pour tout a ∈ R on a f −1 (]−∞, a]) ∈ T , montrons d’abord qu’il en est de mˆeme des singletons. En effet, pour tout a ∈ R, on a ! \ \ 1 1 −1 −1 −1 = f ]−∞, a] \ −∞, a − f ({a}) = f a − ,a n n n∈N∗ n∈N∗ \ 1 = f −1 (]−∞, a]) \f −1 −∞, a − ∈T. n ∗ n∈N
Montrons maintenant qu’il en est de mˆeme des intervalles du type ]−∞, a[. En effet : f −1 (]−∞, a[) = f −1 (]−∞, a] \ {a}) = f −1 (]−∞, a]) \f −1 ({a}) ∈ T . Enfin, soit I un intervalle ouvert de R ; comme R est s´eparable, I est une r´eunion d´enombrable de S boules ouvertes, c-a-d I = n∈N∗ ]xn − rn , xn + rn [ o` u xn ∈ R et rn ∈ R∗+ . Ainsi f −1 (I) =
[ n∈N∗
=
[
[
f −1 (]xn − rn , xn + rn [) =
f −1 (]−∞, xn + rn [ \ ]−∞, xn − rn ])
n∈N∗
f −1 (]−∞, xn + rn [) \f −1 (]−∞, xn − rn ]) ∈ T ,
n∈N∗
ce qui termine la d´emonstration.
* propri´et´es des applications mesurables Proposition 1.2.4. Soient f : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) et g : (X2 , T2 ) → (X3 , T3 ) deux applications. Si f et g sont mesurables alors g ◦ f est mesurable. Preuve. −1 Pour tout A ∈ T3 on a (g ◦ f ) (A) = f −1 g −1 (A) ∈ T1 car g −1 (A) ∈ T2 . Proposition 1.2.5. Soient X1 et X2 deux espaces topologiques. Alors si f : (X1 , BX1 ) → (X2 , BX2 ) est une application continue, elle est mesurable. Preuve. Soit Ok l’ensemble des ouverts de Xk (k = 1, 2); On a BXk = σ (Ok ). Puisque f est continue, 6
l’image inverse de tout ouvert de X2 par f est un ouvert de X1 ; ainsi f −1 (O2 ) ⊂ O1 ⊂ σ (O1) = BX1 . Cela implique σ f −1 (O2 ) ⊂ BX1 . Or par le lemme de transport, on a σ f −1 (O2 ) = f −1 (σ (O2 )) = f −1 (BX2 ); donc f −1 (BX2 ) ⊂ BX1 , c’est `a dire que f est mesurable. Proposition 1.2.6. Soit f = (f1 , f2 ) : (X, T ) → R2 , BR2 une application. Alors f est mesurable si, et seulement si, f1 et f2 sont des applications mesurables de (X, T ) vers (R, BR ). Preuve. Si f est mesurable, on consid`ere les projections canoniques πk : (x1 , x2 ) ∈ R2 7→ xk ∈ R (k = 1, 2); ce sont des applications lin´eaires, par cons´equent elles sont mesurables parceque continues. La mesurabilit´e de chaque fk (k = 1, 2) provient alors de ce que fk = πk ◦ f . R´eciproquement, si chaque fk est mesurable (k = 1, 2). Puisque R2 est produit d’espaces S 2 s´eparables, tout ouvert O de R s’´ecrit O = i∈I Ai × Bi o` u I est d´enombrable, Ai et Bi sont des ouverts de R. Donc : [ [ f −1 (O) = f −1 (Ai × Bi ) = f1−1 (Ai ) ∩ f2−1 (Bi ) ∈ T i∈I
i∈I
et, ainsi, f est mesurable. Cette proposition permet d’´etablir les propri´et´es suivantes : Proposition 1.2.7. Soient f1 et f2 sont deux applications mesurables de (X, T ) vers (R, BR ). Alors : (i) ∀ (α, β) ∈ R2 , αf1 + βf2 est mesurable; (ii) f1 f2 est mesurable; (iii) si ∀x ∈ X, f2 (x) 6= 0 la fonction f1 /f2 est mesurable. Preuve. f = (f1 , f2 ) est mesurable d’apr`es la proposition 1.2.6; alors pour toute application mesurable ϕ : R2 → R, l’application ϕ ◦ f est mesurable. (i) ϕ1 : (x1 , x2 ) ∈ R2 7→ αx1 + βx2 est lin´eaire donc continue. Par cons´equent, elle est mesurable et αf1 + βf2 = ϕ1 ◦ f. (ii) ϕ2 : (x1 , x2 ) ∈ R2 7→ x1 x2 est mesurable car continue, et f1 f2 = ϕ2 ◦ f. (iii) ϕ3 : (x1 , x2 ) ∈ R × R∗ 7→ x1 /x2 est mesurable car continue, et f1 /f2 = ϕ3 ◦ f. Proposition 1.2.8. Soit f : (X, T ) → (R, BR ) et g : (X, T ) → (R, BR ) deux applications mesurables. Alors : max (f, g) et min (f, g) sont des applications mesurables. Preuve. Posons ϕ = max (f, g) et ψ = min (f, g) .. Pour tout a ∈ R, on a ϕ−1 (]−∞, a]) = {x ∈ R / ϕ (x) ≤ a} = {x ∈ R / max (f (x) , g (x)) ≤ a} = {x ∈ R / f (x) ≤ a} ∩ {x ∈ R / g (x) ≤ a} = f −1 (]−∞, a]) ∩ g −1 (]−∞, a]) ∈ T . et ψ −1 (]−∞, a]) = {x ∈ R / ψ (x) ≤ a} = {x ∈ R / min (f (x) , g (x)) ≤ a} = {x ∈ R / f (x) ≤ a} ∪ {x ∈ R / g (x) ≤ a} = f −1 (]−∞, a]) ∪ g −1 (]−∞, a]) ∈ T . 7
Remarque 1.2.1. 1) Puisque les applications contantes sont mesurables (cf. exemple 1.2.1), on en d´eduit que si f est mesurable alors pout tout r´eel λ ∈ R, les applications max (f, λ) et min (f, λ) sont mesurables. 2) En particulier, les applications f+ et f− d´efinies par f+ = max (f, 0) et f− = − min (f, 0) sont mesurables; en outre, il est ais´e de v´erifier que ce sont des applications positives et que f = f+ −f− . Ces applications joueront un rˆ ole fondamental dans la d´efinition de l’int´egrale de Lebesgue. La proposition suivante concerne la mesurabilit´e de limites de suites de fonctions mesurables. Proposition 1.2.9. Soit (fn )n∈N une suite de fonctions mesurables de (X, T ) vers (R, BR ). Alors : (i) pour I ⊂ N, les applications supn∈I (fn ) et inf n∈I (fn ) sont mesurables; (ii) les applications lim supn (fn ) et lim inf n (fn ) sont mesurables; (iii) si f = limn→+∞ (fn ), l’application f est mesurable. Preuve. (i). Posant g = supn∈I (fn ) et h = inf n∈I (fn ), on a [ \ g −1 (]−∞, a]) = fn−1 (]−∞, a]) ∈ T et h−1 (]−∞, a]) = fn−1 (]−∞, a]) ∈ T . n∈I
n∈I
(ii). On a lim supn (fn ) = inf n∈N (gn ) o` u gn = supk≥n (fk ); de mˆeme lim inf n (fn ) = supn∈N (hn ) o` u hn = inf k≥n (fk ). D’apr`es (i), les applications gn et hn sont mesurables. Donc, toujours d’apr`es (i), les applications lim supn (fn ) et lim inf n (fn ) sont mesurables. (iii). Si f = limn→+∞ (fn ) alors f = lim supn (fn ) = lim inf n (fn ); la mesurabilit´e de f d´ecoule alors directement de (ii). 3. Fonctions ´ etag´ ees D´ efinition 1.3.1. On appelle fonction ´etag´ee toute application f : (X, T ) → (R, BR ) qui s’´ecrit comme combinaison lin´eaire d’un nombre fini de fonctions indicatrices d’´el´ements de T : f=
p X
αi 1IAi
i=1
avec αi ∈ R et Ai ∈ T (i = 1, · · · , p). Remarque 1.3.1. 1) Une fonction ´etag´ee est mesurable puisqu’elle est combinaison lin´eaire d’applications mesurables. 2) Une fonction est ´etag´ee si, et seulement si, elle prend un nombre fini de valeurs. En effet, si elle prend nombre fini de valeurs (distinctes) P α1 , · · · , αp , on pose Ai = {x ∈ X / f (x) = αi } et on a Pun p p ; pour tout ⊂ {1, · · · , p} f = i=1 αi 1IAi . R´eciproquement, si f = T i=1 αi 1IAi T x ∈ X il existe I P c et J ⊂ {1, · · · , p}, I ∩ J = ∅, tels que x ∈ i∈I Ai ∩ i∈J Ai , on a alors f (x) = i∈I αi . Il y a exactement 2p telles valeurs. 3) La d´ecomposition d’une fonction ´etag´ee comme combinaison lin´eaire d’indicatrices n’est pas unique. Cependant, il existe une unique d´ecomposition telle que les Ai forment une partition de X; elle est appel´ee d´ecomposition canonique . L’importance des fonctions ´etag´ees vient du lemme suivant qui montre que toute fonction mesurable peut ˆetre approch´ee par une suite de fonctions ´etag´ees. 8
Proposition 1.3.1. (Lemme fondamental d’approximation ). Soit f : (X, T ) → (R, BR ) une application mesurable. Alors, il existe une suite (fn )n∈N∗ de fonctions ´etag´ees telles que f = limn→+∞ fn simplement. En outre : (i) si f est positive, on peut choisir la suite (fn )n∈N∗ croissante; (ii) si f est born´ee on peut choisir la suite (fn )n∈N∗ de sorte qu’elle converge uniform´ement vers f . Preuve. 1) Supposons f ≥ 0 et consid´erons k k+1 −1 , (k ∈ {0, · · · , n2n − 1} ) et An,∞ = f −1 ([n, +∞[) ; An,k = f 2n 2n de la mesurabilit´e de f on d´eduit An,∞ ∈ T et An,k ∈ T n n2 −1 X
fn =
k=0
(k ∈ {0, · · · , n2n − 1}). On d´efinit :
k 1IAn,k + n 1IAn,∞ . 2n
(a). Montrons que f = limn→+∞ fn simplement. Soit x ∈ X et un entier n0 ∈ N tel que f (x) < n0 . Alors pour tout n ≥ n0 on a f (x) < n, c-a-d x ∈ / An,∞ . Puisque An,0 , · · · , An,n2n −1 , An,∞ forment une partition de X, il existe k ∈ {0, · · · , n2n − 1} tel que x ∈ An,k . Cela signifie k k+1 ≤ f (x) < 2n 2n
et
fn (x) =
k . 2n
Donc 0 ≤ f (x) − fn (x) < 2−n , ce qui prouve f (x) = limn→+∞ fn (x). (b). Montrons que la suite (fn )n∈N∗ est croissante. Soit x ∈ X : - si x ∈ A , on a k2−n ≤ f (x) < (k + 1) 2−n et fn (x) = k2−n . Comme 2kn , k+1 = 2n 2k 2k+1 n,k 2k+1 2k+2 , ∪ , , on peut ´ e crire : 2n+1 2n+1 2n+1 2n+1 2k k 2k si 2n+1 ≤ f (x) < 2k+1 2n+1 = 2n 2n+1 fn+1 (x) = k 1 2k+1 2k+2 2k+1 = + si ≤ f (x) < n+1 n n n+1 2 2 2 2 2n+1 ce qui montre fn+1 (x) ≥ fn (x) . - si x ∈ An,∞ , on a f (x) ≥ n et fn (x) = n. Comme (n+1)2n+1 −1 [ l l+1 [n, +∞[ = [n, n + 1[ ∪ [n + 1, +∞[ = , ∪ [n + 1, +∞[ n+1 2n+1 2 n+1 l=n2
on peut ´ecrire fn+1 (x) =
l 2n+1
n+1
si si
l 2n+1
≤ f (x) < 2l+1 n+1 , f (x) ≥ n + 1
n2n+1 ≤ l ≤ (n + 1) 2n+1 − 1
;
l puisque pour tout l ≥ n2n+1 on a 2n+1 ≥ n, on d´eduit de l’´egalit´e pr´ec´edente fn+1 (x) ≥ fn (x) . (c). Montrons que si f est born´ee, la convergence est uniforme. On peut trouver n0 tel que f (x) < n0 . Pour n ≥ n0 , on a An,∞ = ∅ et ∀x ∈ X, ∃k ∈ {0, · · · , n2n − 1}, x ∈ An,k . Donc ∀x ∈ X, 0 ≤ f (x) − fn (x) < 2−n , ce qui implique supx∈X |f (x) − fn (x)| < 2−n et entraine la convergence uniforme. 2) Cas g´en´eral pour f . On d´ecompose f = f+ −f− o` u f+ = max(f, 0) et f+ = − min(f, 0); ces deux derni`eres applications sont mesurables positives. D’apr`es 1) il existe des suites de fonctions ´etag´ees
9
(fn+ )n∈N∗ et (fn− )n∈N∗ telles que f+ = limn→+∞ fn+ et f− = limn→+∞ fn− , simplement; posant, fn = fn+ − fn− , il est clair que (fn )n∈N∗ est une suite de fonctions ´etag´ees et f = limn→+∞ fn , simplement. Si f est born´ee, l’´egalit´e |f | = f+ + f− montre que f+ et f− le sont aussi. D’apr`es 1) (fn+ )n∈N∗ et (fn− )n∈N∗ peuvent ˆetre choisies de sorte qu’elles convergent uniform´ement; en cons´equence, (fn )n∈N∗ converge uniform´ement vers f .
10
Chapitre 2 Mesure et int´egrale par rapport a` une mesure 1. Mesure sur un espace mesurable Soit (X, T ) un espace mesurable. D´ efinition 2.1.1. On appelle mesure sur (X, T ) toute application µ : T → R+ v´erifiant : (i) µ (∅) = 0 S (ii) pour toute famille (An )n∈N d’´el´ements deux `a deux disjoints de T , on a µ n∈N An = P+∞ et´e de σ-additivit´e ). n=0 µ (An ) (propri´ Si µ (X) < +∞ la mesure µ est dite finie S ou born´ee. Si X peut s’´ecrire sous la forme X = n Xn avec µ (Xn ) < +∞ pour tout n, la mesure µ est dite σ-finie Remarque 2.1.1. La σ-additivit´e pr´ecedente implique la propri´et´e d’additivit´e : ∀ (A, B) ∈ T 2 t.q. A ∩ B = ∅, µ (A ∪ B) = µ (A) + µ (B). En effet, il suffit de consid´erer la famille (An )n∈N d’´el´ements de T d´efinie par : A0 = A, A1S= B et, n ≥ 2, An = ∅; les ´eSl´ements de cette pour P+∞ famille ´etant deux ` a deux disjoints, on a µ n∈N An = n=0 µ (An ), et comme n∈N An = A ∪ B et +∞ X
µ (An ) = µ (A) + µ (B) +
n=0
+∞ X
µ (An ) = µ (A) + µ (B) (car µ (An ) = 0 pour n ≥ 2)
n=2
on obtient la relation recherch´ee. Exemple 2.1.1. 1) La mesure de comptage ou mesure de d´enombrement sur (X, P (X)) : card (A) si A est fini ∀A ∈ P (X) , µ (A) = . +∞ sinon 2) La mesure de Dirac au point a ∈ X : ∀A ∈ P (X) , δa (A) =
1 0
si si
a∈A ; a∈ /A
on peut ´ecrire δa (A) =1IA (a) . 3) La mesure de Lebesgue sur R : c’est l’unique mesure λ sur (R, BR ) telle que pour tout intervalle I de R d’extr´emit´es a et b, on a λ (I) = |b − a|; l’existence de cette mesure est montr´e au chapitre 3. Les propri´et´es essentielles des mesures sont donn´ees dans la proposition suivante : Proposition 2.1.1. Soit µ une mesure sur l’espace mesurable (X, T ). Les assertion suivantes sont v´erifi´ees : 11
(i) ∀ (A, B) ∈ T 2 , si A ⊂ B alors µ (A) ≤ µ (B). Si de plus µ (A) < +∞, alors µ (B\A) = µ (B) − µ (A). (ii) ∀ (A, B) ∈ T 2 , µ (A ∪ B) + µ (A ∩ B) = µ (A) + µ (B) . (iii Soit (An )n∈N une famille croisssante (c-a-d ∀ n ∈ N, An ⊂ An+1 ) d’´el´ements de T , alors : ! [ µ An = lim ↑ µ (An ) . n→+∞
n∈N
(iv) Soit (An )n∈N une famille d´ecroisssante (c-a-d ∀ n ∈ N, An+1 ⊂ An ) d’´el´ements de T telle qu’il existe un entier n0 ∈ N pour lequel µ (An0 ) < +∞, alors : ! \ µ An = lim ↓ µ (An ) . n→+∞
n∈N
(v) Sous σ-additivit´e : Soit (An )n∈N une famille d’´el´ements de T , alors ! µ
[
An
≤
+∞ X
µ (An ) .
n=0
n∈N
Preuve. (i). Lorsque A ⊂ B, on a la r´eunion disjointe B = A ∪ (B\A); donc µ (B) = µ (A) + µ (B\A). Puisque µ (B\A) ≥ 0, il vient µ (B) ≥ µ (A) ; si de plus µ (A) < +∞, on en d´eduit µ (B\A) = µ (B) − µ (A). (ii). Si µ (A ∩ B) = +∞, puisque A ∩ B ⊂ A, A ∩ B ⊂ B et A ∩ B ⊂ A ∪ B, on a aussi, d’apr`es le (i), µ (A) = +∞, µ (B) = +∞ et µ (A ∪ B) = +∞ et la relation annonc´ee est vraie. Si µ (A ∩ B) < +∞, on d´eduit de la r´eunion disjointe A ∪ B = (A\ (A ∩ B)) ∪ (A ∩ B) ∪ (B\ (A ∩ B)) et de (i) que l’on a µ (A ∪ B) = µ (A\ (A ∩ B)) + µ (A ∩ B) + µ (B\ (A ∩ B)) = µ (A) − µ (A ∩ B) + µ (A ∩ B) + µ (B) − µ (A ∩ B) = µ (A) + µ (B) − µ (A ∩ B) ; d’o` u la relation recherch´ee. (iii). SnPosons B0 = A0 et Bn = An \An−1 pour n ≥ 1. V´erifions tout d’abord, par r´ecurrence, que An = k=0 Bk ; cetteSrelation est trivialement vraie pour n = 1, supposons qu’elle le soit `a l’ordre n n, c’est ` a dire An = k=0 Bk . Alors, puisque l’on a la r´eunion disjointe An+1 = (An+1 \An ) ∪ An , il vient ! ! n+1 n n [ [ [ An+1 = (An+1 \An ) ∪ Bk = Bn+1 ∪ Bk = Bk k=0
k=0
k=0
et montr´e la relation cherch´ ee. Remarquons maintenant que cette relation S on a ainsiS S Snimplique que ∈ N tel que x ∈ A = n n∈N An = n∈N Bn ; en effet si x ∈ n∈N An , il existe n k=1 B S Sk . Donc il existe k ≤ n tel que x ∈ Bk , ce qui implique que x ∈ n∈N Bn . Inversement, si x ∈ S n∈N Bn , il existe n ∈ N tel que x ∈ Bn = An ∩ Acn−1 ; donc x ∈ An , ce qui implique que x ∈ n∈N An et ´etablit la relation recherch´ee. De plus, pour tout (n, m) ∈ N2 tel que n 6= m (on peut prendre n > m sans perte de g´en´eralit´e), on a Am ⊂ An−1 et Bm = Am ∩ Acm−1 ⊂ Am ; ceci implique 12
Bn = An \An−1 ⊂ Acn−1 ⊂ Acm et Bn ∩ Bm ⊂ Acm ∩ Am = ∅. Donc Bn ∩ Bm = ∅, c’est `a dire que les Bn sont deux ` a deux disjoints. En cons´equence : ! ! +∞ ! n n [ [ X X [ µ An = µ Bn = µ (Bn ) = lim µ (Bk ) = lim µ Bk = lim µ (An ) ; n∈N
n→+∞
n=0
n∈N
n→+∞
k=0
k=0
n→+∞
la suite est croissante en vertu de (i). (iv). Pour n ≥ 0, la suite d´efinie par Bn = An0 \An0 +n est croissante car Bn = An0 ∩ Acn0 +n ⊂ An0 ∩ Acn0 +n+1 = Bn+1 ; on peut donc appliquer (iii); il vient !
+∞ [
µ
= lim ↑ µ (Bn ) .
Bn
(2.1.1)
n→+∞
n=0
Or +∞ [
Bn =
n=0
+∞ [
+∞ \
An0 \An0 +n = An0 \
An0 +n
n=0
n=0
et
µ
+∞ \
! An0 +n
≤ µ (An0 ) < +∞;
n=0
la relation (2.1.1) devient donc ! +∞ \ µ (An0 ) − µ An0 +n = lim (µ (An0 ) − µ (An0 +n )) = µ (An0 ) − lim µ (An0 +n ) n→+∞
n=0
c’est a` dire µ
+∞ \
! An0 +n
= lim ↓ µ (An0 +n ) = lim ↓ µ (An ) . n→+∞
n=0
Enfin, puisque
T+∞
n=0
n→+∞
An0 +n =
T+∞
n=0
n→+∞
An `a cause de la d´ecroissance des An , on conclut que µ
T +∞
n=0
An =
limn→+∞ ↓ µ (An ) . Sn Pn (v). Montrons par r´ecurrence que µ ( S evident pour n = 1 et k=0 Ak ) ≤ Pk=0 µ (Ak ) . C’est ´ n n vrai pour n = 2 d’apr`es (ii); supposons µ ( k=0 Ak ) ≤ k=0 µ (Ak ) , on a alors : ! ! ! n+1 n+1 n n [ [ [ X µ Ak = µ An+1 ∪ Ak ≤ µ (An+1 ) + µ Ak ≤ µ (Ak ) . k=0
k=0
k=0
Sn
k=0
Pn
Donc pour tout n ∈ N, posant Bn = k=0 Ak , on a µ (Bn ) ≤ k=0 µ (Ak ) ; d’o` u limn→+∞ µ (Bn ) ≤ P+∞ µ (A ) . Or (B ) est une suite croissante; d’apr` e s (iii) et la pr´ e c´ e dente in´ egalit´e on en d´eduit n n n=0 ! +∞ +∞ [ X µ Bn = lim µ (Bn ) ≤ µ (An ) . n=0
n→+∞
n=0
On obtient S+∞ finalement S+∞ l’in´egalit´e recherch´ee en remarquant, tout comme dans la preuve de (iii), que n=0 Bn = n=0 An . D´ efinition 2.1.2. On appelle espace mesur´e tout triplet (X, T , µ), o` u (X, T ) est un espace mesurable et µ une mesure sur (X, T ). 13
D´ efinition 2.1.3. Soit (X, T , µ) un espace mesur´e et N une partie de X. On dit que N est n´egligeable pour µ, ou encore µ-n´egligeable, s’il existe A ∈ T tel que N ⊂ A et µ (A) = 0. Remarque 2.1.1. Evidemment, toute partie A ∈ T tel que µ (A) = 0 est µ-n´egligeable. La d´efinition pr´ec´edente permet aussi de “n´egliger” des parties non mesurables de X, c’est-`a-dire des parties de X n’appartenant pas ` a T. * propri´et´e vraie presque partout Soit P une propri´et´e portant sur les ´el´ements de X et telle que l’ensemble {x ∈ X / P (x) fausse} appartienne ` a T . On a D´ efinition 2.1.4. On dit que P est vraie presque partout pour µ, ou encore µ-presque partout (µ-p.p.), si µ ({x ∈ X / P (x) fausse}) = 0. Exemple 2.1.2. Soient f : (X, T ) → (R, BR ) et g : (X, T ) → (R, BR ) deux applications mesurables. −1 1) On a {f 6= g} = (f − g) (R\ {0}) ∈ T car f − g est mesurable et R\ {0} ∈ BR ; on dit que f = g µ-p.p. si µ ({x ∈ X / f (x) 6= g (x)}) = 0. 2) Soit (fn )n∈N une suite de fonctions mesurables; on a donc {f = limn→+∞ fn } ∈ T . On dit que cette suite converge µ-p.p. vers f si µ ({x ∈ X / f (x) 6= limn→+∞ fn (x)}) = 0. 3) Soit un espace mesur´e (R, BR , µ), o` u µ est une mesure sur (R, BR ) qui ne charge pas les singletons n n (c’est ` a dire : ∀x ∈ R, µ ({x}) = 0); consid´erons la suite d´efinie par fn (x) = (cos (x)) 1 − nx 1I[0,n] (x) et montrons qu’elle converge µ-p.p. vers la fonction f d´efinie par f (x) = e−x 1I2πN (x) bien qu’elle ne converge pas vers cette fonction. Si x < 0, on a fn (x) = 0, donc limn→+∞ (fn (x)) = 0. Si x ∈ 2πN, alors cos (x) = 1 et pour n ≥ [x] + 1 (o` u [x] d´esigne la partie enti`ere de x), on a n n 0 ≤ x ≤ n, donc fn (x) = 1 − nx ; ceci implique limn→+∞ (fn (x)) = limn→+∞ 1 − nx = e−x . n n Si x ∈ πN\ (2πN), alors cos (x) = −1 et, pour n ≥ [x] + 1, fn (x) = (−1) 1 − nx ; ceci implique que fn (x) n’a pas de limite lorsque n → +∞ et, par cons´equent, que la suite (fn )n∈N∗ ne converge pas vers f car f (x) = 0. Si x ∈ R+ \ (πN), alors −1 < cos (x) < 1 et, pour n ≥ [x] + 1, on a n n fn (x) = (cos (x)) 1 − nx ; donc limn→+∞ (fn (x)) = 0. Ce qui pr´ec`ede permet d’affirmer que
lim fn 6= f
= πN\ (2πN) = {(2k + 1) π / k ∈ N} =
n→+∞
+∞ [
{(2k + 1) π} ;
k=0
d’o` u µ
lim fn 6= f
n→+∞
=
+∞ X
µ ({(2k + 1) π}) = 0,
k=0
c’est a` dire, limn→+∞ fn = f µ-p.p.. * Mesure image On consid`ere deux espaces mesurables (X1 , T1 ) et (X2 , T2 ) et ϕ : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) une application mesurable. Soit µ une mesure sur (X1 , T1 ), on introduit l’application ν : A ∈ T2 7→ µ ϕ−1 (A) ∈R+ . On a alors Proposition 2.1.2. ν est une mesure sur (X2 , T2 ) de mˆeme masse que µ. Preuve.(a) Montrons que est une mesure sur (X2 , T2 ). 14
(i) ν (∅) = µ ϕ−1 (∅) = µ (∅) = 0; (ii) soient A ∈ T2 , B ∈ T2 tels que A ∩ B = ∅, on a ν (A ∪ B) = µ ϕ−1 (A ∪ B) = µ ϕ−1 (A) ∪ ϕ−1 (B) et comme ϕ−1 (A) ∩ ϕ−1 (B) = ϕ−1 (A ∩ B) = ϕ−1 (∅) = ∅, il vient ν (A ∪ B) = µ ϕ−1 (A) + µ ϕ−1 (B) = ν (A) + ν (B) . (iii) soit (An )n∈N une famille d’´el´ements deux `a deux disjoints de T2 , on a ! ! !! [ [ [ ν An = µ ϕ−1 An =µ ϕ−1 (An ) ; n∈N −1
or pour n 6= m, on a ϕ
n∈N −1
(An ) ∩ ϕ
n∈N
−1
(Am ) = ϕ
(An ∩ Am ) = ϕ−1 (∅) = ∅, donc
! [
ν
An
=
n∈N −1
(b) On a ν (X2 ) = µ ϕ
X
X µ ϕ−1 (An ) = ν (An ) .
n∈N
n∈N
(X2 ) = µ (X1 ), ces deux mesures ont donc mˆeme masse.
On peut alors d´efinir : D´ efinition 2.1.5. On appelle mesure image de µ par ϕ, la mesure sur (X2 , T2 ), not´ee ϕ ∗ µ, d´efinie par (ϕ ∗ µ) (A) = µ ϕ−1 (A) pour tout A ∈ T2 . 2. Int´ egrale de fonction ´ etag´ ee positive On note E (T ) l’ensemble des fonctions ´etag´ees T -mesurables et E+ (T ) le sous-ensemble de E (T ) constitu´e des fonctions ´etag´ees positives. Pp D´ efinition 2.2.1. P Soit f := i=1 αi 1IAi ∈ E+ (T ); on appelle int´egrale de f par rapport `a µ la p quantit´e Iµ (f ) := i=1 αi µ (Ai ) . L’exemple suivant d´etermine l’int´egrale d’une fonction ´etag´ee par rapport aux mesures de Dirac et de comptage. Pp Exemple 2.2.1. Soit f := i=1 αi 1IAi ∈ E+ (T ). 1) Pour tout a ∈ X, p p X X Iδa (f ) = αi δa (Ai ) = αi 1IAi (a) = f (a) . i=1
i=1
2) Soit m la mesure de comptage; on a Im (f ) =
p X
αi m (Ai ) =
i=1
Or, on a card(Ai ) =
P
x∈X 1IAi
Im (f ) =
p X i=1
p X
αi card (Ai ) .
i=1
(x); donc αi
X x∈X
1IAi (x) =
p XX x∈X i=1
15
αi 1IAi (x) =
X x∈X
f (x) .
* propri´et´es de l’int´egrale sur E+ (T ) Proposition 2.2.1. Soient f et g dans E+ (T ). Alors : (i) Additivit´e . Iµ (f + g) = Iµ (f ) + Iµ (g) . (ii) Croissance . f ≤ g ⇒ Iµ (f ) ≤ Iµ (g) . (iii) Positive homogen´eit´e . ∀λ ≥ 0, Iµ (λf ) = λIµ (f ) . (iv). f = 0 µ-p.p. ⇔ Iµ (f ) = 0. Pp Pq Preuve. On ´ecrit f et g sous forme canonique f = i=1 αi 1IAi et g = j=1 βj 1IBj , o` u (Ai )1≤i≤p et (Bj )1≤i≤q sont des partitions de X (et les αi et βj sont non nuls). (i). Les Ai ∩ Bj sont disjoints; en effet soient (i, j) et (k, l) distincts, si i 6= k alors (Ai ∩ Bj ) ∩ (Ak ∩ Bl ) ⊂ Ai ∩ Ak = ∅; donc (Ai ∩ Bj ) ∩ (Ak ∩ Bl ) = ∅. De mˆeme, si j 6= l on montre que (Ai ∩ Bj ) ∩ (Ak ∩ Bl ) = ∅. De plus, on a les unions disjointes suivantes q q [ [ Ai = Ai ∩ X = Ai ∩ Bj = (Ai ∩ Bj ) (2.2.1) j=1
et
p [
Bj = Bj ∩ X = Bj ∩
j=1
! Ai
=
i=1
donc
p X
f=
αi
1ISq
j=1 (Ai ∩Bj )
g=
q X
(Ai ∩ Bj ) ;
(2.2.2)
i=1 p X q X
=
αi 1IAi ∩Bj
i=1 j=1
i=1
et
p [
βj 1ISpi=1 (Ai ∩Bj ) =
p X q X
βj 1IAi ∩Bj .
i=1 j=1
j=1
On en d´eduit f +g =
p X q X
(αi + βj ) 1IAi ∩Bj
i=1 j=1
et par d´efinition de l’int´egrale Iµ (f + g) =
=
p X q X i=1 j=1 p X q X
(αi + βj ) µ (Ai ∩ Bj ) αi µ (Ai ∩ Bj ) +
i=1 j=1
=
p X i=1
αi
p X q X
βj µ (Ai ∩ Bj )
i=1 j=1 q X
µ (Ai ∩ Bj ) +
j=1
q X
βj
j=1
p X
! µ (Ai ∩ Bj ) .
i=1
D’apr`es (2.2.1) et (2.2.2) on a µ (Ai ) = µ
q [
(Ai ∩ Bj ) =
j=1
q X j=1
16
µ (Ai ∩ Bj )
et
p [
µ (Bj ) = µ
! (Ai ∩ Bj )
=
i=1
ainsi Iµ (f + g) =
p X
µ (Ai ∩ Bj ) ;
i=1
αi µ (Ai ) +
i=1
p X
q X
βj µ (Bj ) = Iµ (f ) + Iµ (g) .
j=1
Pp Pq (ii). g = f + (g − f ) et g − f = i=1 j=1 (βj − αi ) 1IAi ∩Bj . Puisque g − f ≥ 0 on a pour tout (i, j) ∈ {1, · · · , p} × {1, · · · , q}, βj ≥ αi ; donc Iµ (g − f ) =
q p X X
(βj − αi ) µ (Ai ∩ Bj ) ≥ 0.
i=1 j=1
Or d’apr`es (i) : Iµ (g) = Iµ (f ) + Iµ (g − f ) ; donc PpIµ (g) ≥ Iµ (f ) . (iii). Si λ = 0, c’est trivial; si λ > 0, on a λf = i=1 (λαi ) 1IAi ; donc Iµ (λf ) =
p X
(λαi ) µ (Ai ) = λ
i=1
p X
αi µ (Ai ) = λIµ (f ) .
i=1
(iv). Remarquons queTf (x) ´egal ` a 0 si, et seulement si x n’appartient Sp `a aucun des Ai ; cela signifie p que l’on a {f = 0} = i=1 Aci , ce qui est ´equivalent `a {f 6= 0} = i=1 Ai . Si f = 0 µ-p.p., il vient ! p p [ X f = 0 µ-p.p. ⇔ µ ({f 6= 0}) = µ Ai = µ (Ai ) = 0 i=1
i=1
⇔ ∀i ∈ {1, · · · , p} , µ (Ai ) = 0 ⇔
p X
αi µ (Ai ) = 0
i=1
⇔ Iµ (f ) = 0
3. Int´ egrale de fonction mesurable positive On note M+ (T ) l’ensemble des fonctions mesurables positives de (X, T ) vers R+ , BR+ . D´ efinition 2.3.1. Soit f ∈ M+ (T ). On appelle int´egrale de f sur X par rapport `a µ la quantit´e Z f (x) dµ (x) := sup {Iµ (ϕ) dµ, ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )} . X
Remarque 2.3.1. R R 1) Pour simplifier les ´ecritures, on note souvent X f dµ au lieu de X f (x) dµ (x). 2) R Comme la fonction nulle est ´etag´ee positive, d’int´egrale nulle et minore f on a forc´ement f dµ ≥ 0. X Le lien entre l’int´egrale introduite ci-dessus et celle du paragraphe pr´ec´edent est pr´ecis´e ci-apr`es. 17
R Proposition 2.3.1. Soit f ∈ M+ (T ); si f est une fonction ´etag´ee, alors X f dµ = Iµ (f ). Preuve. Si f ∈ E+ (T ), pour tout ϕ ∈ E+ (T ) tel que ϕ ≤ f , on a Iµ (ϕ) ≤ Iµ (f ) (cf. proposition 2.2.1-(ii)). Ainsi, Iµ (f ) majore l’ensemble {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )}. Soit λ un autre majorant; puisque f ∈ E+ (T ) et f ≤ f , c’est-`a-dire que f appartient `a cet ensemble, il vient Iµ (f ) ≤ λ. Donc Iµ (f ) est le plus petit majorant de l’ensemble {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )}, c’est-`a-dire Z Iµ (f ) = sup {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )} = f dµ. X
* propri´et´es de l’int´egrale sur M+ (T ) Proposition 2.3.2. (Croissance de l’int´egrale ). Soit f et g deux ´el´ements de M+ (T ); si f ≤ g R R alors X f dµ ≤ X g dµ. Preuve. Pour tout ϕ ∈ E+ (T ) tel que ϕ ≤ f, on a ϕ ≤ g. Donc {ϕ ∈ E+ (T ) / ϕ ≤ f } ⊂ {ϕ ∈ E+ (T ) / ϕ ≤ g} d’o` u sup {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )} ≤ sup {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ g, ϕ ∈ E+ (T )} R c’est-` a-dire X f dµ ≤ X g dµ. R
Cette proposition permet d’obtenir le th´eor`eme suivant qui est un outil important dans la construction de l’int´egrale de Lebesgue. Th´ eor` eme 2.3.1. (Th´eor`eme de convergence monotone, de Beppo Levi ). Soit (fn )n∈N une suite croissante (c-a-d ∀n ∈ N, ∀x ∈ X, fn (x) ≤ fn+1 (x)) de fonctions mesurables positives de (X, T ) vers R+ , BR+ . Alors posant f = limn→+∞ fn , on a : Z
Z f dµ = lim ↑
fn dµ.
n→+∞
X
X
R R Preuve. Montrons d’abord que limn→+∞ ↑ X fn dµR≤ X f dµ; on a fn ≤ fn+1 ≤ f donc R R R fn dµ ≤ X fn+1 dµ ≤ X f dµ. Ainsi, la suite X fn dµ n∈N est une suite croissante et X R R R major´ee par X f dµ; d’o` u limn→+∞ ↑ X fn dµ ≤ X f dµ. Montrons maintenant l’in´egalit´e (λ)
inverse; soit ϕ ∈ E+ (T ) tel que ϕ ≤ f. Pour tout λ ∈ ]0, 1[, posant En := {fn ≥ λf }, on a (λ) (λ) −1 En ∈ T car En = {fn − λf ≥ 0} = (fn − λf ) ([0, +∞[). De plus, remarquons que, puisque (λ)
fn ≤ fn+1 , on a, pour tout n ∈ N, l’inclusion En
(λ)
⊂ En+1 qui montre que
(λ)
En
est une
n∈N
famille croissante. D’autre part , λϕ 1IE (λ) ∈ E+ (T ) et comme n
λϕ 1IE (λ) ≤ λf 1IE (λ) ≤ fn 1IE (λ) ≤ fn n
il vient
n
Z X
d’o` u
n
Z λϕ 1IE (λ) dµ ≤ n
fn dµ X
Z lim
n→+∞
X
Z λϕ 1IE (λ) dµ ≤ lim
n→+∞
n
18
fn dµ. X
(2.3.1)
Or, posant ϕ =
Pp
i=1
αi 1IAi , on a
Z X
λϕ 1IE (λ) dµ =
Z X p
n
X i=1
λαi 1IAi ∩E (λ) dµ =
p X
n
λαi µ Ai ∩ En(λ)
i=1
d’o` u Z lim
n→+∞
X
λϕ 1IE (λ) dµ =
p X
n
λαi
i=1
lim µ Ai ∩
n→+∞
En(λ)
=
p X
λαi µ Ai ∩
+∞ [
!! En(λ)
(2.3.2)
n=0
i=1
(λ) la derni`ere ´egalit´e provenant de la croissance de la famille Ai ∩ En . Montrons maintenant n∈N S+∞ (λ) (λ) que n=0 En = X; puisque les En sont des sous-ensembles de X, il suffit de montrer que S+∞ (λ) (λ) X ⊂ n=0 En . Soit x ∈ X, si f (x) = 0, on a trivialement fn (x) ≥ λf (x) c’est `a dire x ∈ En , S+∞ (λ) pour tout n ∈ N; donc x ∈ n=0 En . Si f (x) > 0, puisque f (x) = limn→+∞ fn (x), on a pour tout ε tel que 0 < ε < (1 − λ) f (x) l’existence d’un entier n0 v´erifiant f (x) − ε ≤ fn0 (x); or f (x) − ε > f (x) − (1 − λ) f (x) = λf (x) S+∞ (λ) (λ) donc fn0 (x) ≥ λf (x) c’est ` x ∈ n=0 En . On peut alors conclure a dire x ∈ En0, ce qui implique S+∞ (λ) S+∞ (λ) que n=0 En = X et on en d´eduit Ai ∩ = Ai ∩ X = Ai ; reportant cette ´egalit´e dans n=0 En (2.3.2) on obtient Z lim
n→+∞
X
λϕ 1IE (λ) dµ =
p X
n
λαi µ (Ai ) = λIµ (ϕ)
i=1
et, d’apr`esR (2.3.1), on a ainsi montr´e que, pour tout ϕ ∈ E+ (T ) tel que ϕ ≤ f , on a λIµ (ϕ) ≤ limn→+∞ X fn dµ. Donc Z λ sup {Iµ (ϕ) , ϕ ≤ f, ϕ ∈ E+ (T )} ≤ lim fn dµ n→+∞
R
X
R
c’est a` dire λ X f dµ ≤ limn→+∞ X fn dµ. Comme cette in´egalit´e est vraie pour tout λ ∈ ]0, 1[, il vient que pour tout m ∈ N∗ , on a Z Z 1 f dµ ≤ lim fn dµ; 1− n→+∞ X m X R R en faisant tendre m vers +∞, on obtient X f dµ ≤ limn→+∞ X fn dµ. Les deux exemples ci-dessous illustrent l’utilisation du th´eor`eme de Beppo-Levi pour obtenir certaines propri´et´es concernant l’int´egrale des fonctions mesurables positives. Exemple 2.3.1. Int´egration par rapport ` a la mesure de Dirac. Soit a ∈ X et f ∈ M+ (T ), R montrons que X f dδa = f (a) . D’apr`es le lemme fondamental d’approximation, il existe une suite croissante (fn )n∈N d’´el´ements de E+ (T ) telle que f = lim R n→+∞ ↑ fn . Comme chaque fn est dans E+ (T ) on a (cf. proposition 2.3.1 et exemple 2.2.1) X fn dδa = Iδa (fn ) = fn (a); d’apr`es le th´eor`eme de Beppo Levi, il vient Z Z f dδa = lim ↑ fn dδa = lim ↑ fn (a) = f (a) . X
n→+∞
n→+∞
X
19
Exemple 2.3.2. Montrons que si A ∈ T est µ-n´egligeable, alors pour tout f ∈ M+ (T ), on a R f 1 I dµ = 0. A X Pp 1) Si f est ´ etag´ee, f = i=1 αi 1IAi avec Ai ∈ T pour tout i ∈ {1, · · · , n}; on a alors f 1IA = Pp i=1 αi 1IAi ∩A ∈ E+ (T ). Comme Ai ∩ A ⊂ A et µ (A) = 0, il vient que pour tout i ∈ {1, · · · , n}, on a µ (Ai ∩ A) = 0. Donc Z f 1IA dµ = Iµ (f 1IA ) = X
p X
αi µ (Ai ∩ A) = 0 .
i=1
2) Soit f ∈ M+ (T ), alors, d’apr`es le lemme fondamental d’approximation, il existe une suite croissante (fn )n∈N d’´el´ements de E+ (T ) telle que f = limRn→+∞ ↑ fn . Par cons´equent, f 1IA = limn→+∞ ↑ fn 1IA ; le th´eor`eme de Beppo-Levi et le fait que X fn 1IA dµ = 0 (puisque fn ∈ E+ (T )) permettent donc d’´ecrire Z Z f 1IA dµ = lim ↑ fn 1IA dµ = 0. n→+∞
X
X
On va, ` a pr´esent, obtenir d’autres propri´et´es de l’int´egrale de fonctions mesurables positives, par utilisation du th´eor`eme de Beppo Levi. Proposition 2.3.3. Soient f et Rg dans MR+ (T ). Alors : R (i) Additivit´e . X (f + g) dµ = X Rf dµ + X g dµ. R (ii) Positive homogen´eit´e . ∀λ ≥ 0, X λ f dµ = λ X f dµ. Preuve. (i). il existe (fn )n∈N et (gn )n∈N suites croissantes d’´el´ements de E+ (T ) telles que f = limn→+∞ ↑ fn et g = limn→+∞ ↑ gn . Alors (fn + gn )n∈N est une suite croissante d’´el´ements de E+ (T ) telle que f + g = limn→+∞ ↑ (fn + gn ); d’apr`es le th´eor`eme de Beppo Levi : Z Z (f + g) dµ = lim ↑ (fn + gn ) dµ X
n→+∞
X
= lim ↑ Iµ (fn + gn ) n→+∞
= lim (Iµ (fn ) + Iµ (gn )) n→+∞
= lim Iµ (fn ) + lim Iµ (gn ) n→+∞ n→+∞ Z Z = lim fn dµ + lim gn dµ n→+∞ X n→+∞ X Z Z = f dµ + g dµ. X
X
20
(ii). On a aussi λf = limn→+∞ ↑ (λfn ); par le th´eor`eme de Beppo Levi, il vient : Z Z λf dµ = lim ↑ λfn dµ n→+∞
X
X
= lim Iµ (λfn ) n→+∞
= lim (λIµ (fn )) n→+∞
= λ lim Iµ (fn ) n→+∞ Z = λ lim fn dµ n→+∞ X Z =λ f dµ. X
R Proposition 2.3.4. Soit f dans M+ (T ). Alors f = 0 µ-p.p.⇔ X f dµ = 0. Preuve. Il existe (fn )n∈N suite croissante d’´el´ements de E+ (T ) telle que f = limn→+∞ ↑ fn . ⇒) Si f = 0 µ-p.p.; comme ∀n ∈ N, 0 ≤ fn ≤ f on a {fn 6= 0} = {fn > 0} ⊂ {f > 0} = {f 6= 0} donc 0 ≤ µ ({fn 6= 0}) ≤ µ ({f 6= 0}) = 0 ainsi µ ({fn 6= 0}) = 0 c’est-` a-dire fn = 0 µ-p.p.; onR en d´eduit (cf. proposition 2.2.1- (iv)) R R f dµ = 0. D’o` u , d’apr` e s le th´ e or` e me de Beppo Levi, f dµ = lim ↑ f dµ = 0. n n→+∞ n X X R RX R ⇐) Si f dµ = 0, puisque 0 ≤ f ≤ f on a 0 ≤ f dµ ≤ f dµ = 0 c’est `a dire n n X X X R f dµ = I (f ) = 0, ce qui implique f = 0 µ-p.p. pour tout n ∈ N (cf. proposition 2.2.1n µ n n X (iv)). Or \ {fn = 0} ⊂ {f = 0} n∈N
c’est a` dire {f 6= 0} ⊂
[
{fn 6= 0}
n∈N
d’o` u
! 0 ≤ µ ({f 6= 0}) ≤ µ
[
{fn 6= 0}
≤
+∞ X
µ ({fn 6= 0}) = 0
n=0
n∈N
donc µ ({f 6= 0}) = 0, c’est ` a dire f = 0 µ-p.p..
R R Proposition 2.3.5. Soient f et g dans M+ (T ). Si f = g µ-p.p. alors X f dµ = X g dµ. Preuve. Soit l’application h d´efinie par max (f, g) − min (f, g) sur {min (f, g) < +∞} h= ; 0 sur {f = g = +∞} c’est une application mesurable et positive. Si
f = g µ-p.p., puisque {h 6= 0} ⊂ {f 6= g}, il vient
0 ≤ µ ({h 6= 0}) ≤ µ ({f 6= g}) = 0.
21
R RDonc h = 0 µ-p.p.,Rce qui implique X h dµ = 0. Comme max (f, g) = min (f, g) + h, on obtient max (f, g) dµ = X min (f, g) dµ. Or X Z Z Z max (f, g) dµ ≥ f dµ ≥ min (f, g) dµ X
et
X
Z
Z
Z
max (f, g) dµ ≥ X
donc
X
Z
g dµ ≥ X
Z
Z
f dµ =
Z
g dµ =
X
min (f, g) dµ X
X
min (f, g) dµ = X
max (f, g) dµ.
X
* Mesure ` a densit´e Dans ce paragraphe, nous allons voir comment le Th´eor`eme de Beppo-Levi permet de d´efinir la notion de mesure ` a densit´e qui revˆet une tr`es grande importance, notamment dans la th´eorie des probabilit´es. On consid`ere un epace mesur´e (X, T , µ) et ψ : (X, T ) → R+ , BR+ une application mesurable; on consid`ere on introduit l’application Z ν : A ∈ T 7→ ψ1IA dµ ∈ R+ X
et on a Proposition 2.3.6. ν est une mesure sur (X, T ) v´erifiant : ∀A ∈ T , µ (A) = 0 ⇒ ν (A) = 0. Preuve. (a) Montrons que ν est une mesure sur (X, T ). R (i) Comme 1I∅ = 0, il vient ν (∅) = X ψ1I∅ dµ = 0. (ii) Soient A ∈ T , B ∈ T tels que A ∩ B = ∅, on sait que 1IA∪B =1IA +1IB ; donc Z Z Z Z ν (A ∪ B) = ψ1IA∪B dµ = ψ (1IA + 1IB ) dµ = ψ1IA dµ + ψ1IB dµ = ν (A) + ν (B) . X
P
X
X
X
(iii) Soit (An )n∈N une famille d’´el´ements deux `a deux disjoints de T , on sait que 1ISn∈N An = n∈N 1IAn . Donc ! Z Z Z n [ X X ν An = ψ1ISn∈N An dµ = ψ 1IAn dµ = lim ψ 1IAk dµ. X
n∈N
P n Puisque la suite ψ k=0 1IAk
X
n∈N
X n→+∞
k=0
est croissante et positive, il vient d’apr`es le Th´eor`eme de Beppon∈N
Levi : ! ν
[ n∈N
An
Z = lim
n→+∞
ψ X
n X k=0
1IAk dµ = lim
n Z X
n→+∞
k=0
X
ψ1IAk dµ =
XZ n∈N
X
ψ1IAn dµ =
(b) Si µ (A) = 0, on a d´eja montr´e dans l’exemple 2.3.2 qu’alors ν (A) = On peut alors d´efinir :
22
X
ν (An ) .
n∈N
R X
ψ1IA dµ = 0.
D´ efinition 2.3.2. On appelle mesure de densit´e ψ par rapport `a µ, la mesure sur (X, T ), not´ee ϕ · µ, d´efinie par Z ∀A ∈ T , (ϕ · µ) (A) = ψ1IA dµ. X
Dans ce cas, l’application ψ est appell´ee densit´e de ν par rapport `a µ. D´ efinition 2.3.3. Soient µ et ν deux mesures sur (X, T ), on dit que ν est absolument continue par rapport ` a µ, on note ν << µ, si µ (A) = 0 ⇒ ν (A) = 0 pour tout A ∈ T . Ainsi, d’apr`es la proposition 2.3.6, ϕ · µ est absolument continue par rapport `a µ. On peut se demander si la r´eciproque est vraie, c’est `a dire, une mesure absolument continue par rapport ` a une autre admet-elle une densit´e par rapport `a cette derni`ere ? La r´eponse est affirmative dans certains cas, comme le montre le th´eor`eme suivant que nous admettrons.
Th´ eor` eme 2.3.2. (Radon-Nikodym) . Soient ν et µ deux mesures finies sur (X, T ). Alors ν << µ si, et seulement si, il existe une application mesurable ψ : (X, T ) → R+ , BR+ telle que ν = ψ · µ. 4. Int´ egrale de fonction mesurable Soit (X, T , µ) un espace mesur´e et une application mesurable f : (X, T ) → (R, BR ); on sait alors que f+ = max (f, 0) et f− = − min (f, 0) sont aussi des applications mesurables. Ces applications ´etant mesurables positives, on sait d´efinir leurs int´egrales. Remarquons que l’on a f = f+ − f− ; cela permet de d´efinir l’int´egrale de f . D´ efinition 2.4.1. R (i). Une application mesurable f : (X, T ) → (R, BR ) est dite µ-int´egrable si X |f | dµ < +∞. Dans ce cas, on appelle int´egrale de f par rapport ` a µ la quantit´e Z Z Z f (x) dµ (x) := f+ (x) dµ (x) − f− (x) dµ (x) X
X
X
o` u f+ = max (f, 0) et f− = − min (f, 0). (ii). L’ensemble des fonctions µ-int´egrables de (X, T ) vers (R, BR ) est not´e L1 (X, T , µ) ou simplement L1 (µ) lorsqu’il n’y a pas d’ambiguit´e sur l’espace mesurable correspondant. Remarque 2.4.1. R R 1) Ici encore, pour simplifier les ´ecritures, on note souvent X f dµ au lieu de X f (x) dµ (x). 2) Il est facile de v´erifier que l’on a |f | = f+ + f− ; en cons´equence on a f ∈ LR1 (µ) si et seulement 1 1 1 si R f+ ∈ L R(µ) et f− ∈R L (µ). Ceci montre que si f ∈ L (µ) , le nombre X f dµ est fini (car f dµ = X f+ dµ − X f− dµ ). X Exemple 2.4.1. Soit a ∈ X et f : (X, T ) → (R, BR ) une application mesurable. Alors f est δa -int´egrable car, d’apr`es l’exemple 2.3.1, on a Z |f | dδa = |f | (a) = |f (a)| < +∞. X
23
L’int´egrale de f par rapport ` a δa se calcule grˆace `a une nouvelle utilisation du r´esultat de l’exemple 2.3.1. En effet, on a d’apr`es ce r´esultat Z Z f+ dδa = f+ (a) et f− dδa = f− (a) ; X
donc
Z
X
Z f+ dδa −
f dδa = X
Z
X
f− dδa = f+ (a) − f− (a) = f (a) . X
R Exemple 2.4.2. Si A ∈ T est µ-n´egligeable, alors pour tout f ∈ L1 (µ), on a X f 1IA dµ = 0. En effet, tout d’abord si (f 1IA )(x) > 0 on a alors (f 1IA )+ (x) = (f 1IA )(x) = f (x) 1IA (x). Puisque cela implique f (x) > 0 et 1IA (x) = 1, on en d´eduit que f+ (x) = f (x) et donc que (f 1IA )+ (x) = f+ (x) 1IA (x). D’autre part, si (f 1IA )(x) ≤ 0 on a alors (f 1IA )+ (x) = 0. Puisqu’alors f (x) ≤ 0 ou 1IA (x) = 0, c’est ` a dire f+ (x) = 0 ou 1IA (x) = 0, il vient que f+ (x)1IA (x) = 0 = (f 1IA )+ (x). On a ainsi montr´e que (f 1IA )+ = f+ 1IA . On montre de mˆeme que R R (f 1IA )− = f− 1IA ; ainsi, puisque, d’apr`es l’exemple 2.3.2, on a n´ecessairement X f+ 1IA dµ = X f− 1IA dµ = 0, on en d´eduit que : Z Z Z Z Z f 1IA dµ = (f 1IA )+ dµ − (f 1IA )− dµ = f+ 1IA dµ − f− 1IA dµ = 0. X
X
X
X
X
Les propri´et´es essentielles de l’int´egrale d’une fonction mesurable par rapport `a une mesure sont donn´ees dans la proposition suivante. Proposition 2.4.1. Soit (X, T , µ) un espace mesur´e. (i) Si f ∈ L1 (µ) alors f est fini µ-p.p.. 2 R R (ii) Pour tout (f, g) ∈ L1 (µ) , si f = g µ-p.p. alors X f dµ = X g dµ. 2 (iii) Lin´earit´e . Pour tous (f, g) ∈ L1 (µ) et (α, β) ∈ R2 on αf + βg ∈ L1 (µ) et Z Z Z (αf + βg) dµ = α f dµ + β g dµ. X
X
X
(iv) Positivit´e . Pour tout f ∈ L1 (µ), si f ≥ 0 µ-p.p. alors X f dµ ≥ 0. 2 R R (v) Croissance . Pour tout (f, g) ∈ L1 R(µ) , si f ≤ g µ-p.p. alors X f dµ ≤ X g dµ. R (vi) Pour tout f ∈ L1 (µ), X f dµ ≤ X |f | dµ. Preuve. (i). \ c {f est fini} = {|f | = +∞} = {|f | ≥ n} ; R
n∈N
comme ({|f | ≥ n})n∈N est une suite d´ecroissante on en d´eduit c
µ ({f est fini} ) = lim ↓ µ ({|f | ≥ n}) ; n→+∞
or Z
Z
Z
|f | dµ = X
|f | 1I{|f |≥n} dµ + X
|f | 1I{|f |
Z ≥
|f | 1I{|f |≥n} dµ X
Z ≥n
1I{|f |≥n} dµ = nµ ({|f | ≥ n}) . X
24
Donc
1 µ ({|f | ≥ n}) ≤ n
Z |f | dµ X c
d’o` u limn→+∞ ↓ µ ({|f | ≥ n}) = 0, c’est-`a-dire µ ({f est fini} ) = 0. (ii). Si f = g µ-p.p., on a µ ({f 6= g}) = 0. D’autre part, on a {f+ 6= g+ } ⊂ {f 6= g}, donc 0 ≤ µ ({f+ 6= g+ }) ≤ µ ({f 6= g}) = 0, c’estR`a dire f+ = R g+ µ-p.p.; on R montre de R mˆeme que f− = g− µ-p.p.. Donc (cf. Proposition 2.3.5) f dµ = g dµ et f dµ = g dµ; on + + − X X X X − R R en d´eduit X f dµ = X g dµ. 2 (iii). Il suffit de montrer que pour tous (f, g) ∈ L1R(µ) et α ∈ RR, on a f + g ∈ L1 (µ) et R R R αf ∈ L1 (µ), puis X (f + g) dµ = X f dµ + X g dµ et X αf dµ = α X f dµ. - On a |f + g| ≤ |f | + |g|; donc en utilisant les propositions 2.3.2 et 2.3.3-(i), on a Z Z Z |f + g| dµ ≤ |f | dµ + |g| dµ < +∞ X
X
X
1
ce qui prouve que f + g ∈ L (µ). On a f + g = (f + g)+ − (f + g)− et de plus : • si f + g ≥ 0 on a (f + g)+ = f + g = f+ + g+ − f− − g− et (f + g)− = 0; • si f + g < 0 on a (f + g)− = −f − g = −f+ − g+ + f− + g− et (f + g)+ = 0. Donc f + g = (f + g)+ − (f + g)− = f+ + g+ − f− − g− , c’est-`a-dire (f + g)+ + f− + g− = (f + g)− + f+ + g+ ; en utilisant la proposition 2.3.3-(i), obtient alors Z Z Z Z Z Z (f + g)+ dµ + f− dµ + g− dµ = (f + g)− dµ + f+ dµ + g+ dµ X
X
X
X
X
X
c’est a` dire Z Z Z Z Z Z (f + g)+ dµ − (f + g)− dµ = f+ dµ − f− dµ + g+ dµ − g− dµ, X
X
X
X
X
X
ce qui revient ` a Z
Z f + g dµ =
X
Z f dµ +
X
g dµ. X
- Pour tout α ∈ R, on a |αf | = |α| |f |; d’o` u en utilisant la proposition 2.3.3-(ii) Z Z |αf | dµ = |α| |f | dµ < +∞ X
X
ce qui prouve que αf ∈ L1 (µ). De plus αf = (αf )+ − (αf )− et αf = α (f+ − f− ) = (α+ − α− ) (f+ − f− ) = α+ f+ − α+ f− − α− f+ + α− f− , o` u α+ = max (α, 0) et α− = − min (α, 0). Donc (αf )+ − (αf )− = α+ f+ − α+ f− − α− f+ + α− f− c’est-` a-dire (αf )+ + α+ f− + α− f+ = (αf )− + α+ f+ + α− f− ;
25
d’o` u, en utilisant la proposition 2.3.3 : Z Z Z Z Z Z (αf )+ dµ + α+ f− dµ + α− f+ dµ = (αf )− dµ + α+ f+ dµ + α− f− dµ X
X
X
X
R
R
X
R
X
R (αf )+ dµ + α+ X f− dµ + α− X f+ dµ = X (αf )− dµ + α+ X f+ dµ + α− X f− dµ R R R R R R ⇔ X (αf )+ dµ − X (αf )− dµ = α+ X f+ dµ − X f− dµ − α− X f+ dµ − X f− dµ R R R R R ⇔ X (αf ) dµ = α+ X f dµ − α− X f dµ = (α+ − α− ) X f dµ = α X f dµ.
⇔
R
R
X
(iv). Si f ≥ 0 µ-p.p., puisque {f < 0} R R = {f 6= f+ } , on a µ ({f 6= f+ }) = µ ({f < 0}) = 0, c’est a dire f = f+ µ-p.p.. Donc X f dµ = X f+ dµ ≥ 0. ` (v). On a g − f , puis R applique (iv) R ` R (iii). (vi). X f dµ = ε X f dµ = X εf dµ R avec ε ∈ R{−1, 1}. Or εf ≤ |f |; en apliquant (v) on R R obtient alors X εf dµ ≤ X |f | dµ, c-a-d X f dµ ≤ X |f | dµ. Remarque 2.4.2. Aux paragraphes 2 et 3, on a vu comment calculer l’int´egrale d’une fonction ´etag´ee positive. Les r´esultats ci-dessus permettent Pp d’´etendre la formule correspondante aux fonctions ´ e tag´ e es quelconques. En effet soit f = i=1 αi 1IAi ∈ E (T ), puisque 1IAi ∈ E+ (T ) on R a X 1IAi f dµ = Iµ (1IAi ) = µ (Ai ). Comme chaque 1IAi est (trivialement) µ-int´egrable, on a en utilisant la lin´earit´e de l’int´egrale : Z Z p p X X f dµ = αi 1IAi dµ = αi µ (Ai ) . X
i=1
X
i=1
* Int´egration par rapport ` a une mesure image On consid`ere deux espaces mesurables (X1 , T1 ) et (X2 , T2 ) et ϕ : (X1 , T1 ) → (X2 , T2 ) une application mesurable. Soit µ une mesure sur (X1 , T1 ), on rappelle que la mesure image ϕ ∗ µ de µ par ϕ a ´et´e d´efinie par ϕ ∗ µ : A ∈ T2 7→ µ ϕ−1 (A) ∈R+ . La proposition suivante indique comment int´egrer par rapport ` a cette mesure. Proposition 2.4.2. Une application f : (X2 , T2 ) → (R, BR ) mesurable est ϕ ∗ µ-int´egrable si, et seulement si, f ◦ ϕ est µ-int´egrable et on a : Z Z f d (ϕ ∗ µ) = f ◦ ϕ dµ. X2
X1
Preuve. (a) Si f est une fonction ´etag´ee, f = Z f d (ϕ ∗ µ) = X2
p X
Pp
i=1
αi (ϕ ∗ µ) (Ai ) =
i=1
Z = X1
Z = X1
p X i=1
p X i=1 p X
αi 1Iϕ−1 (Ai ) dµ αi 1IAi ◦ ϕ dµ
i=1
Z f ◦ ϕ dµ.
=
αi 1IAi , Ai ∈ T2 . On a
X1
26
αi µ ϕ−1 (Ai )
(b) Si f est positive, il existe une suite croissante (fn )n∈N de fonctions ´etag´ees v´erifiant f = limn→+∞ fn . Par le th´eor`eme de Beppo-Levi, on a Z Z f d (ϕ ∗ µ) = lim fn d (ϕ ∗ µ) n→+∞ X X2 Z 2 = lim fn ◦ ϕ dµ (d’apr`es le (a)); n→+∞
X1
or ∀x ∈ X2 , fn (ϕ (x)) ≤ fn+1 (ϕ (x)) et limn→+∞ fn (ϕ (x)) = f (ϕ (x)), on d´eduit alors d’une nouvelle utilisation du th´eor`eme de Beppo-Levi Z Z Z f d (ϕ ∗ µ) = lim fn ◦ ϕ dµ = f ◦ ϕ dµ. n→+∞
X2
X1
X1
(c) Cas g´en´eral. On a d’abord, d’apr`es (b) Z Z Z |f | d (ϕ ∗ µ) = |f | ◦ ϕ dµ = X2
X1
|f ◦ ϕ| dµ
X1
ce qui prouve que f est ϕ ∗ µ-int´egrable si, et seulement si, f ◦ ϕ est µ-int´egrable. D’autre part, de f = f+ − f− on obtient Z Z Z f d (ϕ ∗ µ) = f+ d (ϕ ∗ µ) − f− d (ϕ ∗ µ) X2 X2 X2 Z Z = f+ ◦ ϕ dµ − f− ◦ ϕ dµ (d’apr`es (b)) X1 X1 Z (f+ ◦ ϕ − f− ◦ ϕ) dµ = ZX1 (f+ − f− ) ◦ ϕ dµ = ZX1 = f ◦ ϕ dµ X1
* Int´egration par rapport ` a une mesure `a densit´e On consid`ere un epace mesur´e (X, T , µ) et ψ : (X, T ) → R+ , BR+ une application mesurable; la proposition suivante pr´ecise la mani`ere d’int´egrer par rapport `a la mesure ψ · µ de densit´e ψ par rapport ` a µ. Proposition 2.4.3. Une application f : (X, T ) → (R, BR ) mesurable est ψ · µ-int´egrable si, et seulement si, f ψ est µ-int´egrable et on a : Z Z f d (ψ · µ) = f ψ dµ. X
X
27
Preuve. (a) Si f est une fonction ´etag´ee, f = Z f d (ψ · µ) = X2
p X
Pp
i=1
αi 1IAi , Ai ∈ T . On a
αi (ψ · µ) (Ai ) =
i=1
Z = X
Z = X
p X
Z αi
p X
ψ1IAi dµ X
i=1
αi ψ1IAi dµ
i=1 p X
! αi 1IAi
ψ dµ
i=1
Z =
f ψ dµ. X
(b) Si f est positive, il existe une suite croissante (fn )n∈N de fonctions ´etag´ees v´erifiant f = limn→+∞ fn . Par le th´eor`eme de Beppo-Levi, on a Z Z fn d (ψ · µ) f d (ψ · µ) = lim n→+∞ X X Z = lim fn ψ dµ (d’apr`es le (a)); n→+∞
X
or ∀x ∈ X, fn (x) ψ (x) ≤ fn+1 (x) ψ (x) et limn→+∞ fn (x) ψ (x) = f (x) ψ (x), on d´eduit alors d’une nouvelle utilisation du th´eor`eme de Beppo-Levi Z Z Z f d (ψ · µ) = lim fn ψ dµ = f ψ dµ. n→+∞
X
(c) Cas g´en´eral. On a d’abord, d’apr`es (b) Z Z |f | d (ψ · µ) = X
X
X
Z |f | ψ dµ =
X
|f ψ| dµ X
ce qui prouve que f est ψ · µ-int´egrable si, et seulement si, f ψ est µ-int´egrable. D’autre part, de f = f+ − f− on obtient Z Z Z f d (ψ · µ) = f+ d (ψ · µ) − f− d (ψ · µ) X ZX Z X = f+ ψdµ − f− ψdµ (d’apr`es (b)) X ZX = (f+ − f− ) ψ dµ ZX = f ψ dµ X
5. Th´ eor` emes de convergence et applications
* th´eor`emes de convergence
28
Dans le paragraphe 3, on a d´eja ´etudi´e un th´eor`eme de convergence qui concerne les suites croissante de fonctions mesurables positives (Th´eor`eme de Beppo-Levi). Dans le pr´esent paragraphe, nous allons voir d’autres th´eor`emes de convergence qui font de l’int´egrale de Lebesgue un outil int´eressant.
Th´ eor` eme 2.5.1. de Fatou ). Soit (fn )n∈N une suite de fonctions mesurables µ positives (Lemme de (X, T ) vers R+ , BR+ . Alors : Z
Z
fn dµ .
lim inf (fn ) dµ ≤ lim inf n∈N
X
n∈N
X
Preuve. Soient ϕn = inf k≥n (fk ) ; on a 0 ≤ ϕn ≤ ϕn+1 et lim inf n∈N (fn ) = limn→+∞ ϕn . D’apr`es le th´eor`eme de Beppo-Levi, il vient Z Z lim inf (fn ) dµ = lim ↑ ϕn dµ. n→+∞
n∈N
X
X
R R D’autre part, Rpuisque ϕn ≤ fk pour R tout k ≥ n, il vient : ∀k ≥ n, X ϕn dµ ≤ X fk dµ, ce qui implique que X ϕn dµ ≤ inf k≥n X fk dµ. Donc Z Z Z lim ↑ ϕn dµ ≤ lim inf fn dµ = lim inf fn dµ , n→+∞
n→+∞
X
et on obtient le r´esultat annonc´e.
k≥n
n∈N
X
X
Ce r´esultat permet l’extension suivante : Th´ eor` eme 2.5.2. (Th´eor`eme de Fatou-Lebesgue ). Soit (fn )n∈N une suite d’´el´ements de L1 (µ); on suppose qu’il existe g ∈ L1 (µ) telle que pour tout n ∈ N, |fn | ≤ g µ-p.p.. Alors : Z Z Z Z lim inf (fn ) dµ ≤ lim inf fn dµ ≤ lim sup fn dµ ≤ lim sup (fn ) dµ. X
n∈N
n∈N
n∈N
X
X
X
n∈N
Preuve. Soient ϕn = g + fn et ψn = g − fn ; ce sont des fonctions µ-p.p. positives, on a donc en utilisant le lemme de Fatou Z Z lim inf (ϕn ) dµ ≤ lim inf ϕn dµ X
c’est a` dire
Z
n∈N
Z X
X
Z
Z lim inf (fn ) dµ ≤
g dµ + X
ou encore
n∈N
n∈N
g dµ + lim inf
n∈N
X
Z
Z lim inf (fn ) dµ ≤ lim inf X
De mˆeme
n∈N
n∈N
X
Z
Z lim inf (ψn ) dµ ≤ lim inf X
n∈N
n∈N
29
X
fn dµ . ψn dµ X
fn dµ
c’est a` dire Z
Z lim inf (−fn ) dµ ≤
g dµ + X
n∈N
X
ou encore
Z g dµ + lim inf − fn dµ
Z
n∈N
X
X
Z lim inf (−fn ) dµ ≤ lim inf − fn dµ
Z
n∈N
X
n∈N
X
ce qui, en remarquant que lim inf n∈N (−fn ) = − lim supn∈N (fn ) , ´equivaut `a Z Z lim sup (fn ) dµ ≥ lim sup fn dµ . n∈N
X
Ainsi Z
Z n∈N
n∈N
X
Z Z fn dµ ≤ lim sup fn dµ ≤ lim sup (fn ) dµ.
lim inf (fn ) dµ ≤ lim inf X
n∈N
n∈N
X
X
n∈N
X
On peut ` a pr´esent ´etablir le th´eor`eme suivant qui constitue l’un des r´esultats les plus importants de la th´eorie de l’int´egration.
Th´ eor` eme 2.5.3. (Th´eor`eme de convergence domin´ee, de Lebesgue ). Soit (fn )n∈N une suite d’´el´ements de L1 (µ) v´erifiant: (i) (fn )n∈N converge µ-p.p. vers une fonction mesurable f ; (ii) il existe g ∈ L1 (µ) telle que pour tout n ∈ N, |fn | ≤ g µ-p.p.. Alors f ∈ L1 (µ) et on a : Z Z f dµ = lim fn dµ. n→+∞
X
X
Preuve. (a) Montrons d’abord que f ∈ L1 (µ); posant ! \ A= {|fn | ≤ g} ∩ f = lim fn , n→+∞
n∈N
on a
! A⊂
\
{|fn | ≤ g}
∩ |f | = lim |fn | ⊂ {|f | ≤ g} , n→+∞
n∈N
donc
! c
{|f | ≤ g} ⊂
[
c
{|fn | ≤ g}
∪ f 6= lim fn n→+∞
n∈N
et c
0 ≤ µ ({|f | ≤ g} ) ≤ µ
f 6= lim fn
ce qui revient ` a dire que |f | ≤ g µ-p.p., d’o` u
n→+∞
R X
|f | dµ ≤
30
+
X
c
µ ({|fn | ≤ g} ) = 0
n∈N
R X
g dµ < +∞ et f ∈ L1 (µ).
(b). Puisque (fn )n∈N converge µ-p.p. vers f , on a µ-p.p. f = lim inf n∈N (fn ) = lim supn∈N (fn ); en cons´equence, le th´eor`eme 2.5.2 implique Z Z Z Z f dµ = lim inf fn dµ = lim sup fn dµ = f dµ. n∈N
X
Donc la suite
n∈N
X
X
X
f dµ n∈N est convergente et X n
R
Z
Z f dµ = lim
n→+∞
X
fn dµ.
X
Exemple 2.5.1. On reprend le troisi`eme point de l’exemple 2.1.2 et on suppose que +∞; calculons Z x n n lim (cos (x)) 1 − 1I[0,n] (x) dµ (x) . n→+∞ R n
R R
e−x dµ (x) <
On a vu dans l’exemple 2.1.2 que l’on a limn→+∞ fn = f µ-p.p., o` u f est d´efinie par f (x) = e−x 1I2πN (x) ; 1/u
d’autre part, appliquant l’in´egalit´e (1 − u) remarquant ensuite que fn (x) = (cos (x))
n
< e−1 (pour 0 < u < 1), on obtient 1 −
1−
x n n
< e−x ;
x n 1I]0,n[ (x) + 1I{0} (x) , n
il vient |fn (x)| ≤ e−x + 1I{0} (x) . La fonction g d´efinie par g (x) = e−x +1I{0} (x) ´etant µ-int´egrable, on peut appliquer le th´eor`eme de convergence domin´ee. On obtient alors Z Z x n n lim (cos (x)) 1 − 1I[0,n] (x) dµ (x) = e−x 1I2πN (x) dµ (x) . n→+∞ R n R Or, 2πN est µ-n´egligeable car µ (2πN) = µ
+∞ [
! {2kπ}
k=0
par cons´equent,
R R
=
+∞ X
µ ({2kπ}) = 0;
k=0
e−x 1I2πN (x) dµ (x) = 0 et Z x n n 1I[0,n] (x) dµ (x) = 0. lim (cos (x)) 1 − n→+∞ R n
* application aux s´eries de fonctions Les th´eor`emes de convergence monotone et domin´ee donnent des conditions simples d’interversion des symboles de somme et d’int´egrale. Th´ eor` eme 2.5.4. Soit (fn )n∈N une suite de fonctions mesurables de (X, T ) vers R, BR . 31
R P+∞ P+∞ R (i) Si les fn sont positives pour tout n ∈ N, alors X fn dµ = n=0 X fn dµ. n=0 P+∞ R P+∞ P+∞ (ii) Si la s´erie |f | dµ converge alors fn , n=0 |fn | et n=0 fn sont µ-int´egrables et n=0 X R n R P+∞ P+∞ fn dµ. n=0 fn dµ = n=0 X P X n Preuve. (i). On pose Fn = k=0 fk ; c’est une suite croissante de fonctions positives car Fn+1 = Fn + fn ≥ Fn . On peut alors appliquer le th´eor`eme de Beppo-Levi : Z Z lim Fn dµ = lim Fn dµ; n→+∞
X n→+∞
X
comme +∞ Z X n=0
fn dµ = lim
n Z X
n→+∞
X
n→+∞
X
k=0
Z X n
fk dµ = lim
et lim Fn = lim
n→+∞
n→+∞
n X
Z fk dµ = lim
n→+∞
X k=0
fk =
+∞ X
Fn dµ X
fn ,
n=0
k=0
on obtient la relation P+∞recherch´ee. (ii). Soit g = n=0 |fn |; on a, en utilisant (i) : Z |g| dµ = X
Z X +∞
|fn | dµ =
X n=0
+∞ Z X n=0
|fn | dµ < +∞
X
ce quiPmontre que g ∈ L1 (µ). Donc g est fini µ-p.p. (cf. proposition 2.4.1), cela signifie que la +∞ s´erie n=0 fn est µ-p.p. absolument convergente, elle est donc µ-p.p. convergente. La fonction P+∞ efinie sauf ´eventuellement sur un ensemble n´egligeable o` u on lui attribue, n=0 fn est donc bien d´ Pn P+∞ par exemple, la valeur 0. Ainsi la suite F = f converge µ-p.p. vers n k=0 k n=0 fn et |Fn | ≤ Pn |f | ≤ g. D’o` u , par utilisation du th´ e or` e me de convergence domin´ e e de Lebesgue k=0 k Z Z lim Fn dµ = lim Fn dµ n→+∞
X n→+∞
X
en proc´edant comme au (i) on montre que cela ´equivaut `a :
R X
P+∞
n=0
fn dµ =
P+∞ R
n=0 X
fn dµ.
* application aux int´egrales d´ependant d’un param`etre Soient (X, T , µ) un espace mesur´e, (E, d) un espace m´etrique et une fonction f : E × X → R. On s’int´eresse ` a la fonction Z F (t) = f (t, x) dµ (x) X
lorsqu’elle est d´efinie. Il s’agit en fait d’´etudier la continuit´e et la d´erivabilit´e de cette fonction; cela est donn´e dans les th´eor`emes qui suivent. Th´ eor` eme 2.5.5. (Continuit´e sous le signe int´egrale ). Soit t0 ∈ E. Si : (i) pour tout t ∈ E, l’application f (t, ·) est mesurable de (X, T ) vers (R, BR ); (ii) l’application f (·, x) est, pour µ-presque tout x, continue en t0 ; 32
(iii) il existe une fonction g : X → R, µ-int´egrable telle que ∀t ∈ E, |f (t, ·)| ≤ g µ-p.p. alors F est d´efinie sur E et continue en t0 . R Preuve. Puisque |f (t, ·)| ≤ g, la fonction f (t, ·) est aussi µ-int´egrable c’est-`a-dire X |f (t, x)| dµ (x) < +∞ ce qui montre bien que F est d´efini sur E. Soit (tn )n∈N∗ une suite d’´el´ements de E telle que limn→+∞ tn = t0 ; on pose fn = f (tn , ·) et f0 = f (t0 , ·). D’apr`es (ii), on a µ ({x ∈ X / f (·, x) non continue en t0 }) = 0; or
f0 6= lim fn n→+∞
⊂ {x ∈ X / f (·, x) non continue en t0 }
donc µ ({f0 6= limn→+∞ fn }) = 0. Ceci signifie que f0 = limn→+∞ fn µ-p.p.; de plus on a d’apr`es (iii) |fn | ≤ g µ-p.p.. On peut alors appliquer le th´eor`eme de convergence domin´ee qui donne Z Z fn (x) dµ (x) = f0 (x) dµ (x) lim n→+∞
R
X
X
R
R R et comme X fn (x) dµ (x) = X f (tn , x) dµ (x) = F (tn ) et X f0 (x) dµ (x) = X f (t0 , x) dµ (x) = F (t0 ), cela signifie limn→+∞ F (tn ) = F (t0 ). Ainsi, F est continue en t0 . On suppose maintenant que E est un ouvert non vide de R. Les deux th´eor`emes suivant permettent d’´etudier la d´erivabilit´e de F . Th´ eor` eme 2.5.6. (D´erivation sous le signe int´egrale ). Soit t0 ∈ E. Si : (i) pour tout t ∈ E, l’application f (t, ·) est µ-int´egrable; ∂ f (t0 , ·) existe µ-p.p.; (ii) la d´eriv´ee partielle ∂t (iii) il existe une fonction g : X → R, µ-int´egrable telle que ∀t ∈ E, |f (t, ·) − f (t0 , ·)| ≤ g |t − t0 | alors F est d´efinie sur E, d´erivable en t0 ,
∂ ∂t f
µ-p.p.
(t0 , ·) est µ-int´egrable et :
Z
∂ f (t0 , x) dµ (x) . ∂t X R Preuve. Puisque f (t, ·) est µ-int´egrable on a X |f (t, x)| dµ (x) < +∞ ce qui montre bien que F est d´efini sur E. Soit (tn )n∈N∗ une suite d’´el´ements de E telle que tn 6= t0 et limn→+∞ tn = t0 ; on pose f (tn , ·) − f (t0 , ·) , fn = tn − t0 0
F (t0 ) =
∂ d’apr`es (ii), (fn )n∈N∗ converge µ-p.p. vers ∂t f (t0 , ·). De plus d’apr`es (iii), on a |fn | ≤ g µ-p.p.. On peut appliquer le th´eor`eme de convergence domin´ee qui donne Z Z ∂ f (t0 , x) dµ (x) lim fn (x) dµ (x) = n→+∞ X ∂t X
c’est a` dire
F (tn ) − F (t0 ) = n→+∞ tn − t0
Z
lim
33
X
∂ f (t0 , x) dµ (x) ∂t
0
donc F est d´erivable en t0 et F (t0 ) =
R
∂ f X ∂t
(t0 , x) dµ (x) .
Corollaire 2.5.1. (D´erivation globale sous le signe int´egrale ). Si : (i) pour tout t ∈ E, l’application f (t, ·) est µ-int´egrable; (ii) pour µ-presque tout x la fonction f (·, x) est d´erivable sur E; (iii) il existe une fonction g : X → R, µ-int´egrable telle que ∂ ∀t ∈ E, f (t, ·) ≤ g µ-p.p. ∂t alors F est d´efinie et d´erivable sur E et a pour d´eriv´ee Z 0 ∂ F (t) = f (t, x) dµ (x) . ∂t X 0
Preuve. Il faut montrer que F est d´erivable en tout point t0 ∈ E et que F (t0 ) = Soit un tel point, par le th´eor`eme des accroissements finis on a µ-p.p. ∂ |f (t, ·) − f (t0 , ·)| ≤ sup f (s, ·) × |t − t0 | ≤ g × |t − t0 | ; ∂t s∈(t,t0 )
∂ f X ∂t
R
(t0 , x) dµ (x) .
0
on donc appliquer le th´eor`eme 2.5.6 et conclure que F est d´erivable en t0 et que F (t0 ) = R peut ∂ f (t 0 , x) dµ (x) . X ∂t Exemple 2.5.2. Soit un espace mesur´e (R, BR , µ), o` u µ est une mesure sur (R, BR ) qui v´erifie R −x2 R −x2 e dµ (x) < +∞ et |x| e dµ (x) < +∞. Posons alors R R Z 2 f (t) = e−x cos (tx) dµ (x) . R
2 2 2 Cette fonction est bien d´efinie puisque e−x cos (tx) ≤ e−x et la fonction x 7→ e−x est µint´egrable, par hypoth`ese. Montrons maintenant que f est d´erivable sur R et calculons sa d´eriv´ee. 2 On a d´eja vu ci-dessus que, pour tout t ∈ R, la fonction x 7→ e−x cos (tx) est µ-int´egrable. De 2 plus, pour tout x ∈ R, la fonction t 7→ e−x cos (tx) est d´erivable sur R; cette propri´et´e est donc, en particulier, vraie µ-p.p.. Enfin, on a ∂ −x2 = xe−x2 cos (tx) ≤ |x| e−x2 , e cos (tx) ∂t 2
et comme la fonction x 7→ |x| e−x est µ-int´egrable, on peut appliquer le corollaire 2.5.1; f est donc d´erivable sur R, et Z Z 2 0 ∂ −x2 f (t) = e cos (tx) dµ (x) = xe−x cos (tx) dµ (x) . R R ∂t
34
Chapitre 3 La mesure de Lebesgue sur
R
Dans ce chapitre nous introduisons la mesure de Lebesgue sur R, ´etudions ses propri´et´es et montrons comment int´egrer par rapport `a elle. Plus pr´ecis´ement, il s’agit de montrer que sous certaines conditions, int´egrer par rapport `a cette mesure revient `a calculer une int´egrale au sens de Riemann. 1. Prolongement Nous allons d’abord donner un th´eor`eme de prolongement tr`es important pour la construction de la mesure de Lebesgue. Soit X un ensemble et E un ensemble de parties de X. D´ efinition 3.1.1. E est une alg`ebre de Boole sur X, si : (i) X ∈ E ; (ii) ∀ (A, B) ∈ E 2 , A ∪ B ∈ E; (iii) ∀A ∈ E, Ac ∈ E. On peut introduire sur une alg`ebre de Boole E une application ayant `a peu pr`es les mˆemes propri´et´es qu’une mesure. D´ efinition 3.1.2. On appelle pr´e-mesure sur (X, E) toute application µ : E → R+ v´erifiant : (i) µ (∅) = 0; S (ii) pour toute famille (An )n∈N d’´el´ements deux `a deux disjoints de E telle que n∈N ∈ E, on a P+∞ S µ n∈N An = n=0 µ (An ) . Si µ (X) < +∞ la pr´e-mesure µ est dite S finie ou born´ee. Si X peut s’´ecrire sous la forme X = n Xn avec µ (Xn ) < +∞ pour tout n, la pr´e-mesure µ est dite σ-finie. On peut alors ´enoncer le th´eor`eme de prolongement suivant que nous admettrons. Th´ eor` eme 3.1.1. (Th´eor`eme de Carath´eodory ). Soient E une alg`ebre de Boole sur X et µ une pr´e-mesure sur (X, E) , alors il existe une unique mesure µ b sur (X, σ (E)) telle que µ b|E = µ. Si de plus µ est σ-finie sur E alors µ b est unique et σ-finie sur σ (E). 2. La mesure de Lebesgue sur R Dans ce paragraphe, on va utiliser le th´eor`eme de Carath´eodory pour construire la mesure de Lebesgue sur R. Consid´erons ( ) p [ E = A= Ai / (Ai ) famille d’intervalles deux `a deux disjoints de R . i=1
On a alors Lemme 3.2.1. E est une alg`ebre de Boole sur R. 35
Preuve. (i). R = ]−∞, 0[ ∪ [0, +∞[ ∈ E. S Sq p (ii). Soient A et B dans E, on a A = i=1 (ai , bi ) et B = i=1 (ci , di ), o` u ai , bi , ci , di sont des ´el´ements de R. Donc A∪B =
p [ q [
(ai , bi ) ∪ (cj , dj ) =
i=1 j=1
p [ q [
(ai ∧ cj , bi ∨ dj ) ,
i=1 j=1
Spq o` u a ∧ b = min (a, b) et a ∨ b = max (a, b). Ainsi, on a pu ´ecrire A ∪ B = i=1 Ci o` u les Ci sont des intervalles de R (pas n´ecessairement disjoints). Posant D1 = C et D = C \C 1 i i i−1 pour Spq i ∈ {2, · · · , pq}; lesSDi sont deux ` a deux disjoints et on a aussi A ∪ B = i=1 Di ; donc A ∪ B ∈ E. p (iii). Soit A = i=1 (ai , bi ) ∈ E, on peut, sans perte de g´en´eralit´e, prendre a1 < b1 < · · · < ai < bi < ai+1 < bi+1 < · · · < ap < bp d’o` u c
A = ]−∞, a1 ) ∪
p−1 [
! (bi , ai+1 )
∪ (bp , +∞[ ∈ E.
i=2
Remarque 3.2.1. Soient E0 l’ensemble des intervalles de R, on a E0 ⊂ E ⊂ BR ; donc σ (E0 ) ⊂ σ (E) ⊂ BR et comme σ (E0 ) = BR on en d´eduit σ (E) = BR . Ainsi E engendre la tribu bor´elienne de R. * une pr´e-mesure sur (R, E) On d´efinit la longueur d’un intervalle I = (a, b) par b−a si (a, b) ∈ R2 l (I) = +∞ si a = −∞ ou b = +∞ et on introduit l’application λ0 : A =
p [
Ai ∈ E 7→
i=1
p X
l (Ai ) ∈ R+ ,
i=1
il est clair que pour un intervalle I = (a, b), on a I ∈ E et λ0 (I) = l (I) = b − a. Les propri´et´es de λ0 sont donn´es dans les quatre lemmes qui suivent. LemmeP3.2.2. Si I1 , · · · , In sont des intervalles deux `a deux disjoints contenus dans un intervalle n I, on a k=1 λ0 (Ik ) ≤ λ0 (I) . Preuve. On pose I = (a, b), Ik = (ak , bk ) et on peut, sans perte de g´en´eralit´e, supposer a ≤ a1 < b1 < · · · < ai < bi < ai+1 < bi+1 < · · · < an < bn ≤ b; donc n X k=1
λ0 (Ik ) =
n X
(bk − ak ) =
k=1
≤ bn +
n X
bk −
k=1 n−1 X
ak+1 −
k=1
≤ b − a = λ0 (I) .
n X
n X
ak = bn +
k=1
ak = bn +
k=1
36
bk −
k=1 n X k=2
n−1 X
ak −
n X k=1
n X
ak
k=1
ak = bn − a1
Sn Lemme 3.2.3.P Si K = [a, b] est un intervalle ferm´e born´e tel que K ⊂ k=1 Uk avec Uk = ]ak , bk [, n alors λ0 (K) ≤ k=1 λ0 (Uk ) . Preuve. Il existe k1 ∈ {1, · · · , n}, a ∈ Uk1 = ]ak1 , bk1 [. Si bk1 ≤ b, puisque bk1 ∈ [a, b] car ak1 < a < bk1 ≤ b, il existe k2 ∈ {1, · · · , n} tel que bk1 ∈ ]ak2 , bk2 [. Si bk2 ≤ b, puisque a < bk1 < bk2 ≤ b, on a bk2 ∈ [a, b] et il existe k3 ∈ {1, · · · , n} tel que bk2 ∈ ]ak3 , bk3 [. Et ainsi de suite jusqu’` a ce que bkm > b. On a ainsi construit une suite k1 , · · · , km , avec m ≤ n, telle que ak1 < a < bk1 , akm < a < bkm , · · · , aki+1 < bki < bki+1 (i = 1, · · · , m − 1) d’o` u m X i=1
λ0 (Uki ) =
m X
bki −
i=1
m X
aki = bkm +
i=1
> bkm +
m−1 X
bki −
i=1
aki+1 −
i=1
m−1 X
m X
aki
i=1
aki = bkm +
i=1
m X
m X
aki+1 −
i=2
m X
aki = bkm − ak1
i=1
> b − a = λ0 (K) . Pm Pn et puisque i=1 λ0 (Uki ) ≤ k=1 λ0 (Uk ), on obtient le r´esultat recherch´e.
S u I est un Lemme 3.2.4. Si (In )n∈N∗ est une suite d’intervalles de R telle que I ⊂ n∈N∗ In , o` P+∞ intervalle de R, alors λ0 (I) ≤ n=1 λ0 (In ) . Preuve. C’est ´evident s’il existe n ∈ N∗ tel que λ0 (In ) = +∞. Si λ0 (In ) < +∞ pour tout n ∈ N∗ , on a deux cas. 1er cas : λ0 (I) < +∞. Pour tout ε > 0, il existe un intervalle ferm´e born´e K tel que K ⊂ I et λ0 (I) ≤ λ0 (K) + ε. En effet, soit I = (a, b); si ε < 2(b − a) il suffit, par exemple, de prendre K = a + 4ε , b − 4ε , et on a λ0 (I) = λ0 (K) − 2ε ≤ λ0 (K) + ε. Dans le cas contraire, c’est `a dire si ε ≥ 2(b − a), on prend K = [α, β] avec K ⊂ I; alors λ0 (K) + ε = β − α + ε ≥ β − α + 2(b − a) ≥ 2(b − a) ≥ b − a = λ0 (I). De mˆeme, il existe des intervalles ouverts Un tels que In ⊂ Un et λ0 (Un ) ≤ λ0 (In ) + ε 2−n (par exemple Un = an − ε 2−n−2 , bn + ε 2−n−2 si In = (an , bn )). Les intervalles Un recouvrent le compact K; d’apr`es le th´eor` Sepme de Bolzano Wieirstrass, on peut extraire un recouvrement fini (Uki )1≤i≤p c’est `a dire K ⊂ i=1 Uki . Utilisant le lemme 3.2.3, on en d´eduit p +∞ X X λ0 (K) ≤ λ0 (Uki ) ≤ λ0 (Un ) ; n=1
i=1
d’o` u λ0 (I) ≤ λ0 (K) + ε ≤ ε + ≤ε+
+∞ X n=1
+∞ X
λ0 (Un )
n=1 +∞ X
λ0 (In ) + ε
n=1
2−n = 2ε +
+∞ X
λ0 (In ) .
n=1
P+∞ Puisque cela est vrai pour tout ε > 0, on en d´eduit λ0 (I) ≤ n=1 λ0 (In ). 2`eme cas : λ0 (I) = +∞. Pour tout A > 0, il existe un compact K tel que K ⊂ I et λ0 (K) ≥ A; de mˆeme que dans le premier cas, il existe une famille (Un ) d’intervalles ouverts telle que In ⊂ Un et λ0 (Un ) ≤ λ0 (In ) + ε 2−n , on peut en extraire un recouvrement fini (Uki )1≤i≤p . Utilisant le
37
lemme 3.2.3, on en d´eduit A ≤ λ0 (K) ≤
p X
λ0 (Uki ) ≤
P+∞
n=1
+∞ X
λ0 (Un ) ≤
n=1
i=1
Ainsi ∀A > 0, A ≤ P+∞ n=1 λ0 (In ).
+∞ X
λ0 (In ) + ε
n=1
λ0 (In ), cela signifie que
+∞ X
2−n = ε +
n=1
P+∞
n=1
+∞ X
λ0 (In ) .
n=1
λ0 (In ) = +∞ et on a encore λ0 (I) ≤
Lemme 3.2.5. Si (In )n∈N∗ est une suite d’intervalles deux `a deux disjoints de R telle que I = S P+∞ (I) = n=1 n∈N∗ In soit un intervalle, alors λ0S Sλ0 (In ) . n Preuve. Pour tout n ∈ N∗ , on a k=1 Ik ⊂ n∈N∗ In = I; en utilisant le lemme 3.2.2 il vient Pn P+∞ λ0 (Ik ) ≤ λ0 (I) et, par passage `a la limite, n=1 λ0 (In ) ≤ λ0 (I). D’autre part, puisque k=1 S P+∞ I ⊂ n∈N∗ In le lemme 3.2.4 permet de conclure que λ0 (I) ≤ n=1 λ0 (In ). L’utilisation du lemme pr´ec´edent permet d’obtenir la proposition suivante Proposition 3.2.1. λ0 est une pr´e-mesure σ-finie sur (R, E). Preuve. (i). On a λ0 (∅) = λ0 ([a, a[) = 0. S (ii). Soit (En )n∈N∗ une famille d’´el´ements deux `a deux disjoints de E telle que E = n∈N∗ En ∈ Spn (n) (n) E. On u pn ∈ N∗ et les Ik sont des intervalles deux `a deux disjoints; de mˆeme Sap En = k=1 Ik , o` E = k=1 Ik o` u les Ik sont des intervalles deux `a deux disjoints. Puisque pour tout k ∈ {1, · · · , p}, on a Ik ⊂ E, on peut ´ecrire ! [ [ Ik = Ik ∩ E = Ik ∩ En = (Ik ∩ En ) [
=
n∈N∗ !! p n [ (n) Il l=1
Ik ∩
n∈N∗
d’apr`es le lemme 3.2.5, on a alors λ0 (Ik ) =
λ0 (E) =
p X
P
n∈N∗
λ0 (Ik ) =
n∈N∗ pn [ [
=
(n)
Ik ∩ Il
;
n∈N∗ l=1
Ppn
l=1
(n) . D’o` u λ0 Ik ∩ Il
p X pn +∞ X X
(n) λ0 Ik ∩ Il .
k=1 n=1 l=1
k=1
Or En = En ∩ E = =
pn [
(n)
Il
∩
pn [
l=1 p [
l=1
pn [
(n)
Il
∩E
l=1
!! Ik
k=1 (n)
∩E =
=
pn [ p [
(n)
Il
∩ Ik ;
l=1 k=1
P+∞ et on en d´eduit λ0 (E) = n=1 λ0 (En ). On a montr´e S+∞ que λ0 est une pr´e-mesure sur (R, E), elle est σ-finie car on a R = n=1 ]−n, n[ et λ0 (]−n, n[) = 2n < +∞. donc λ0 (En ) =
Ppn Pp
! (n) Il
l=1
k=1
λ0 Il
∩ Ik
38
* existence et unicit´e de la mesure de Lebesgue sur R Th´ eor` eme 3.2.1. Il existe une unique mesure λ sur (R, BR ) telle que si I est un intervalle d’extr´emit´es a et b, on a λ (I) = |b − a|. Preuve. Puisque σ (E) = BR et λ0 est une pr´e-mesure σ-finie sur (R, E); le th´eor`eme de Carath´eodory garantit l’existence et l’unicit´e d’une mesure λ sur (R, BR ) telle que λ|E = λ0 . On a alors λ (I) = λ0 (I) = |b − a|; si une mesure sur (R, BR ) v´erifie cette derni`ere propri´et´e, elle co¨ıncide sur E avec λ0 , elle est donc ´egale ` a λ par unicit´e de celle-ci. D´ efinition 3.2.1. On appelle mesure de Lebesgue sur R, l’unique mesure λ sur (R, BR ) telle que si I est un intervalle d’extr´emit´es a et b, on a λ (I) = |b − a|. Des propri´et´es de cette mesure sont donn´ees dans les propositions suivantes Proposition 3.2.2. L’espace mesur´e (R, BR , λ) est invariant par translation, c’est `a dire : ∀B ∈ BR , ∀a ∈ R, B + a ∈ BR et λ (B + a) = λ (B) . Preuve. Soit
ϕ : (R, BR ) x
→ (R, BR ) 7 → x−a
on a x ∈ ϕ−1 (B) ⇔ ϕ (x) ∈ B ⇔ x − a ∈ B ⇔ x = (x − a) + a ∈ B + a c’est a` dire B + a = ϕ−1 (B). Puisque ϕ est bor´elienne, car continue, on en d´eduit B + a ∈ BR . De plus, posant µa (B) = λ (B + a) = λ ϕ−1 (B) , on v´erifie ais´ement que µa est une mesure sur (R, BR ). Pour tout intervalle I = (α, β), on a µa (I) = λ (I + a) = λ ((a + α, β + a)) = |β − α| . Par unicit´e de λ on en d´eduit µa = λ, c’est `a dire ∀B ∈ BR , λ (B + a) = µa (B) = λ (B) .
Proposition 3.2.3. λ ne charge pas les singletons, c’est `a dire ∀x ∈ R, λ ({x}) = 0. Preuve. ! \ 1 1 1 = lim ↓ λ x, x + = lim = 0. λ ({x}) = λ x, x + n→+∞ n→+∞ n n n ∗ n∈N
3. Int´ egrale de Riemann et int´ egrale par rapport ` a la mesure de Lebesgue L’objectif dans ce paragraphe est de montrer que, sous certaines conditions, l’int´egrale d’une fonction par rapport ` a la mesure de Lebesgue se ram`ene `a l’int´egrale de Riemann de cette fonction. C’est ce r´esultat qui permet le calcul pratique de l’int´egrale de Lebesgue (par rapport `a la mesure de Lebesgue), de mˆeme qu’elle permet `a l’int´egrale de Riemann d’h´eriter des propri´et´es int´eressantes de celle de Lebesgue. On commencera par rappeller l’int´egrale de Riemann, puis on ´etablira le th´eor`eme qui permet de faire le lien avec l’int´egrale de Lebesgue. * l’int´egrale de Riemann sur [a, b] 39
Soit E0 ([a, b]) l’ensemble des fonctions en escaliers sur [a, b], c’est-`a-dire les fonctions u pour lesquelles il existe une subdivision a = x0 < x1 < · · · < xn = b Pn−1 et des r´eels (Ai )0≤i≤n−1 tels que u = etag´ees i=0 Ai 1I]xi ,xi+1 [ ; ce sont donc des fonctions ´ Rb Pn−1 particuli`eres. Pour une telle fonction, on a a u (x) dx = i=0 Ai (xi+1 − xi ). Remarquons que l’on peut ´ecrire l’´egalit´e suivante qui donne un premier lien avec l’int´egrale de Lebesgue Z
n−1 X
b
u (x) dx = a
Z Ai λ (]xi , xi+1 [) =
u dλ. [a,b]
i=0
Soit maintenant une fonction f : [a, b] → R; on pose : (Z
)!
b
U0 (f ) = sup
u (x) dx; u ∈ E0 ([a, b]) , u ≤ f a
(Z
)!
b
u (x) dx; u ∈ E0 ([a, b]) , u ≥ f
V0 (f ) = inf
;
a
ce sont, respectivement le supremum et l’infimum des sommes de Darboux inf´erieures et sup´erieures. La fonction est int´egrable au sens de Riemann si U0 (f ) = V0 (f ) et dans ce cas b
Z
f (x) dx = U0 (f ) = V0 (f ) . a
Cette notion d’int´egrabilit´e est caract´etis´ee de la fa¸con suivante : f est int´egrable sur [a, b] si et seulement si Z b 2 ∀ε > 0, ∃ (uε , vε ) ∈ E0 ([a, b]) , uε ≤ f ≤ vε , (vε (x) − uε (x)) dx < ε; a
cela revient ` a dire qu’il existe deux suites (un )n∈N et (vn )n∈N dans E0 ([a, b]) telles que un ≤ f ≤ vn Rb pour tout n ∈ N et limn→+∞ a (vn (x) − un (x)) dx = 0. Dans ce cas Z
b
Z f (x) dx = lim
a
n→+∞
b
Z vn (x) dx = lim
n→+∞
a
b
un (x) dx. a
* int´egrabilit´e au sens de Riemann et int´egrabilit´e au sens de Lebesgue Le lien entre ces deux notions est donn´e dans le th´eor`eme suivant: Th´ eor` eme 3.3.1. Si f : [a, b] → R est int´egrable au sens de Riemann sur [a, b] et bor´elienne, alors f est λ-int´egrable (au sens de Lebesgue) et on a : Z
b
Z f (x) dx =
a
f dλ. [a,b]
40
Preuve. Si f est int´egrable au sens de Riemann sur [a, b], f est n´ecessairement born´ee. En Rb 2 effet, il existe a (u1 , v1 ) ∈ E0 ([a, b]) , u1 ≤ f ≤ v1 , a (v1 (x) − u1 (x)) dx < 1. On a donc |f | ≤ max {|u1 | , |v1 |}; or u1 =
p X
ai 1I]xi ,xi+1 [ , v1 =
i=1
q X
bi 1I]yi ,yi+1 [
i=1
Pp Pq Pp Pq donc |u1 | ≤ i=1 |ai | et |v1 | ≤ i=1 |bi |, ce qui implique |f | ≤ max { i=1 |ai | , i=1 |bi |} = C. Comme cons´equence, f est λ-int´egrable sur [a, b] car Z Z |f | dλ ≤ C dλ = C λ ([a, b]) = C (b − a) < +∞. [a,b]
[a,b]
Il reste ` a montrer que les int´egrales de Lebesgue et de Riemann de f co¨ıncident. On sait qu’il existe deux suites (un )n∈N et (vn )n∈N dans E0 ([a, b]) telles que un ≤ f ≤ vn pour tout n ∈ N et Rb limn→+∞ a (vn (x) − un (x)) dx = 0. On a alors Z Z Z un dλ ≤ f dλ ≤ vn dλ [a,b]
c’est a` dire Z
[a,b]
b
[a,b]
Z
Z
un (x) dx ≤
f dλ ≤
a
[a,b]
b
vn (x) dx a
et par passage ` a la limite, puisque b
Z
Z f (x) dx = lim
n→+∞
a
il vient
R [a,b]
f dλ =
Rb a
f (x) dx.
b
Z vn (x) dx = lim
n→+∞
a
41
b
un (x) dx, a
Chapitre 4 Espaces
Lp
1. L’espace Lp pour 1 ≤ p < +∞ Soit (X, T , µ) un espace mesur´e; on consid`ere l’ensemble Lp (X, T , µ) des fonctions mesurables p f : (X, T , µ) → (R, BR ) telles que |f | soit µ-int´egrable. On va d’abord montrer que cet ensemble est un espace vectoriel r´eel; pour cela, on aura besoin des lemmes suivants : Lemme 4.1.1. Soit (α, β) ∈ R2+ tel que α + β = 1 et (u, v) ∈ R2+ . Alors uα v β ≤ αu + βv. 2 Preuve. L’in´egalit´e est ´evidente si u ∈ {0} ∪ {+∞} ou v ∈ {0} ∪ {+∞}. Si (u, v) ∈ ]0, +∞[ , posant s = ln (u), t = ln (v) on a d’apr`es la convexit´e de l’exponentielle eαs+βt ≤ αes + βet ; c’est a dire ` α β eln(u v ) ≤ αu + βv ce qui donne l’in´egalit´e recherch´ee.
Cette in´egalit´e, appel´ee in´egalit´e de Young , permet d’obtenir le th´eor`eme suivant 2
Th´ eor` eme 4.1.1. Soient (p, q) ∈ ]1, +∞[ tel que mesurables de (X, T ) vers (R, BR ). Alors : Z
Z f g dµ ≤ X
Z
p1
= 1, et f et g deux fonctions positives
(In´egalit´e de H¨older );
X
≤
(f + g) dµ
1 q
p1 Z q1 q f dµ g dµ
Z
p1 Z p1 p f dµ + g dµ p
X
X
+
p
X
p
1 p
(In´egalit´e de Minkowski ).
X
1 1 R R Preuve. On pose A = X f p dµ p , B = X g q dµ q , F = f /A et G = g/B. Alors, d’apr`es 1/p 1/q lin´egalit´e de Young F G = (F p ) (Gq ) ≤ p1 F p + 1q Gq ; donc Z
1 F G dµ ≤ p X
c’est a` dire
1 AB
Z f g dµ ≤ X
1 pAp
Z
Z
1 F dµ + q X p
f p dµ +
X
1 qB q
donc Z
Z
p
f g dµ ≤ AB = X
Z
Z
Gq dµ
X
g q dµ =
X
p1 Z
f dµ X
1 1 + =1 p q
q1 g dµ . q
X
R R Montrons ` a pr´esent e de Minkowski; elle est ´evidente si RX f p dµ = +∞ ou si X g p dµ = R l’in´egalit´ R p +∞ ou encore si X (f + g) dµ = 0. Supposons maintenant que X f p dµ < +∞, X g p dµ < +∞ p R p et X (f + g) dµ > 0; pour p > 1 l’application t 7→ tp est convexe, donc f +g ≤ 12 f p + 12 g p 2
42
ce qui implique obtient
p
R
p−1
(f + g) dµ < +∞. Appliquant l’in´egalit´e de H¨older `a h = f (f + g)
X
Z
p−1
f (f + g)
p1 Z q1 p−1 q (f + g) ; f dµ dµ
Z
p
dµ ≤
X
X
X
or
on
p p−1 p−1 = 1 = (p − 1) = p, q p − 1 1 1− p
on a donc obtenu Z
p−1
f (f + g)
Z dµ ≤
X
q1 (f + g) dµ .
p1 Z
p
p
f dµ X
X
En ´echangeant les rˆ oles de f et g , on obtient aussi : Z p1 Z q1 Z p−1 p p g (f + g) dµ ≤ g dµ (f + g) dµ . X
X
X
En additionnant ces deux in´egalit´es, on obtient "Z p1 # Z q1 p1 Z Z p p p p + g dµ (f + g) dµ (f + g) dµ ≤ f dµ X
X
X
X
ce qui ´equivaut ` a Z
p
1− q1
p1 Z p1 f p dµ + g p dµ
Z ≤
(f + g) dµ
X
X
X
et donne le r´esultat cherch´e en remarquant que 1 −
1 q
=
1 p.
Ce lemme permet d’obtenir le r´esultat suivant : Proposition 4.1.1. Lp (X, T , µ) est un espace vectoriel r´eel. Preuve. Il suffit de montrer que c’est un sous-espace vectoriel de l’espace vectoriel des applications de X vers R. L’application nulle est trivialement dans Lp (X, T , µ). Soient f et g deux ´el´ements de Lp (X, T , µ), et α un r´eel; on a Z Z p p p |αf | dµ = |α| |f | dµ < +∞ X
X
p
donc αf ∈ L (X, T , µ). Par ailleurs Z
p
Z
|f + g| dµ ≤ X
p
p1 Z p1 #p p |f | dµ + |g| dµ
"Z
p
(|f | + |g|) dµ ≤ X
X
X
R
p
la derni`ere in´egalit´e provenant de l’in´egalit´e de Minkowski. Donc X |f + g| dµ < +∞ c’est ` a dire f + g ∈ Lp (X, T , µ). Ainsi Lp (X, T , µ) est un sous-espace vectoriel. Consid´erons maintenant l’application Np : Lp (X, T , µ) f
→ 7→ 43
R+
R X
1 p |f | dµ p
on a Proposition 4.1.2. Np est une semi-norme sur Lp (X, T , µ). Preuve. Notant 0 l’application nulle, on a trivialement Np (0) = 0. Pour tout α ∈ R, on a Z Np (αf ) =
p1 Z p = |α| |αf | dµ p
Z p1 |f | dµ = |α| p
X
X
p1 = |α| Np (f ) . |f | dµ p
X
Enfin, utilisant l’in´egalit´e de Minkowski, on obtient Np (f + g) ≤ Np (f ) + Np (g).
Remarque 4.1.1. 1) Np n’est pas une norme car Np (f ) = 0 n’implique pas f = 0. En effet, utilisant la proposition 2.3.4, on a p Np (f ) = 0 ⇔ |f | = 0 µ-p.p. ⇔ f = 0 µ-p.p. et f = 0 µ-p.p. n’implique pas f = 0. 2) Un exemple de fonction non nulle mais nulle µ-p.p.. On consid`ere (R, BR , λ) et la fonction f : (R, BR ) → (R, BR ) d´efinie par x si x ∈ Z f (x) = . 0 sinon Cette fonction n’est pas nulle (car elle ne l’est pas en les points de Z∗ ); montrons qu’elle est nulle λ-p.p.. On a ! +∞ [ X ∗ λ ({f 6= 0}) = λ (Z ) = λ {−n, n} = λ ({−n, n}) n∈N∗
=
+∞ X n=1
λ ({−n}) +
+∞ X
n=1
λ ({n}) = 0
n=1
ce qui prouve que f = 0 λ-p.p.. 3) L’´egalit´e µ-p.p. est une relation d’´equivalence. En effet, elle est r´eflexive car µ ({f = 6 f }) = µ (∅) = 0. La sym´etrie est triviale. Pour ´etablir la transitivit´e, supposons f = g µ-p.p. et g = h µ-p.p.; comme h − f = (h − g) + (g − f ), on peut ´ecrire {h 6= f } ⊂ {h 6= g} ∪ {g 6= f } et on en d´eduit 0 ≤ µ ({h 6= f }) ≤ µ ({h 6= g}) + µ ({g 6= f }) = 0 donc f = h µ-p.p. et la transitivit´e est d´emontr´ee. 4) Les remarques 1) et 3) permettent de voir que la classe de la fonction nulle est l’unique classe d’´equivalence comportant une fonction f telle que Np (f ) = 0. Cela indique une m´ethode permettant de passer de la semi-norme ` a la norme : consid´erer l’espace quotient. D´ efinition 4.1.1. On appelle espace Lp (X, T , µ) l’espace quotient de Lp (X, T , µ) par la relation d’´equivalence d’´egalit´e µ-p.p..
Remarque 4.1.2. 1) On notera f la classe de la fonction f ∈ Lp (X, T , µ) 44
2) Il est clair que Lp (X, T , µ) est un espace vectoriel muni des lois de composition interne et externe respectivement d´efinies par f + g = f + g et α f = αf , et de l’´el´ement neutre 0. 3) Grˆ ace au passage ` a l’espace quotient on obtient une norme `a partir de Np . En effet, pour tout R R 2 p p p p p (f, g) ∈ (L (X, T , µ)) , on a f = g µ-p.p. ⇒ |f | = |g| µ-p.p.⇒ X |f | dµ = X |g| dµ ⇔ Np (f ) = Np (g). Ainsi, on peut d´efinir l’application k·kp : Lp (X, T , µ) → f 7→
R+ . Np (f )
p C’est une
norme sur L (X, T , µ). En effet :
(i) f p = 0 ⇔ Np (f ) = 0 ⇔ f = 0 µ-p.p.⇔ f = 0.
(ii) αf p = αf p = Np (αf ) = |α| Np (f ) = |α| f p .
(iii) f + g p = f + g p = Np (f + g) ≤ Np (f ) + Np (g) = f p + kgkp .
Ainsi, Lp (X, T , µ) , muni de la norme k·kp , est un espace vectoriel norm´e. On va maintenant ´etablir que c’est un espace de Banach. Pour cela, on utilisera la caract´erisation suivante des espaces de Banach. Lemme 4.1.2. Soit (E, k·k) un espace vectoriel norm´e. Alors (E, k·k) est un espace de Banach si, et seulement si, toute s´erie normalement convergente dans (E, k·k) est convergente dans (E, k·k). Preuve. Supposons que (E, k·k) soit un espace de Banach. Soit (xn )n∈N une suite dans E telle P+∞ Pn que n=0 kxn k < +∞; on consid`ere sn = k=0 xk et on a
n+p
n+p
X
X
xk ≤ kxk k . ksn+p − sn k =
k=n+1
k=n+1
Pn+p Comme limn→+∞ k=n+1 kxk k = 0, il vient limn→+∞ ksn+p − sn k = 0, c’est `a dire que (sn )n∈N est une suite de Cauchy dans (E, k·k). De la compl´etude de cet espace, on d´eduit que (sn )n∈N converge dans (E, k·k). Maintenant, on suppose que toute s´erie normalement convergente dans (E, k·k) est convergente dans (E, k·k). Soit (xn )n∈N une suite de Cauchy dans (E, k·k); on pose k0 = 0 et on va montrer par l’absurde que pour tout n ∈ N∗ , kn−1 ´etant d´efini, il existe k > kn−1 tel que ∀m ≥ k, kxm − xk k < 2−n . Supposons que pour tout k > kn−1 on puisse trouver m ≥ k tel que kxm − xk k ≥ 2−n ; puisque la suite est de Cauchy il existe k ≤ kn−1 tel que ∀m ≥ k tel que kxm − xk k < 2−n . Soit 0 0 0 alors k tel que k > kn−1 , on a m ≥ k ⇒ m ≥ k ⇒ kxm − xk k < 2−n et on aboutit `a une contradiction. On conclut que la propri´et´e annonc´ee est vraie. On d´efinit alors pour tout n ∈ N∗ l’entier kn = min k > kn−1 / ∀m ≥ k, kxm − xk k < 2−n ;
cela d´efinit une sous-suite (xkn )n∈N qui v´erifie : ∀n ≥ 1, xkn+1 − xkn < 2−n . Posant alors Pn u0 = xk0 = x0 et un = xkn − xkn−1 pour n ≥ 1 ≥, on a xkn = l=0 ul et kul k < 21−l pour P+∞ l ≥ 2; donc n=0 kun k < +∞ ce qui, en vertu d l’hypoth`ese initiale, implique la convergence de P+∞ la s´erie n=0 un , c’est ` a dire celle de la sous-suite (xkn )n∈N . En conclusion, (xn )n∈N est une suite de Cauchy dans (E, k·k) qui admet une sous-suite convergente; elle converge donc et (E, k·k) est un espace de Banach. Utilisant ce lemme, on obtient le r´esultat fondamental suivant :
45
Th´ eor` eme 4.1.2. (Riesz-Fischer ). Lp (X, T , µ) est un espace de Banach.
P+∞ Preuve. Soit fn n∈N une suite dans Lp (X, T , µ) v´erifiant n=0 fn p < +∞, on a en utilisant l’in´egalit´e de Minkowski
n ! n n
X
X
X
|fk | = |fk | = Np |fk |
k=0
k=0
p
≤
n X
k=0
p
Np (|fk |) =
k=0
n X
+∞ n X X
fn < +∞
fk ≤ p p
Np (fk ) =
k=0
n=0
k=0
P
P P+∞
+∞
+∞ donc n=0 |fn | = Np n=0 |fn | < +∞, ce qui implique n=0 |fn | < +∞ µ-p.p. en vertu p P+∞ de l’assertionn(i) de la proposition o 2.4.1. En cons´equence, la s´erie n=0 fn est µ-p.p. convergente. P+∞ Soient A := n=0 |fn | < +∞ et P+∞
n=0
f= on a |f −
Pn
k=0
fk | ≤
P
k≥n+1
fn
0
sur sur
A , Ac
|fk | sur A, c’est `a dire |f −
Pn
k=0
fk | ≤
P
k≥n+1
|fk | µ-p.p.. Donc
! n n n
X X X
f k = Np f − fk fk = f −
f −
k=0 k=0 k=0 p p X X X
fk ≤ Np |fk | ≤ Np (|fk |) = p k≥n+1
et puisque limn→+∞
P
k≥n+1
k≥n+1
k≥n+1
fk = 0, on en d´eduit que P+∞ fn dans Lp (X, T , µ) et a pour n=0 p
somme f ; le lemme 4.1.2 permet alors de conclure que Lp (X, T , µ) est un espace de Banach.
2. Un cas particulier important : l’espace L2 (X, T , µ) Soient f et g deux ´el´ements de L2 (X, T , µ), d’apr`es l’in´egalit´e de H¨older, on a Z
Z |f g| dµ ≤ X
2
21 Z
12 |g| dµ < +∞; 2
|f | dµ X
X
donc f g est µ-int´egrable. Par cons´equent, on peut d´efinir une forme bilin´eaire sym´etrique sur L2 (X, T , µ) par Z hf, gi = f g dµ. X
Elle n’est pas d´eg´en´er´ee car, puisque hf, f i = N2 (f ), on sait que hf, f i = 0 ⇔ f = 0 µ-p.p.. 0 0 0 0 D’autre D part, puisque f = f µ-p.p. et g = g µ-p.p. implique f g = f g µ-p.p., ce qui implique E 0 0 hf, gi = f , g , on peut d´efinir l’application h·, ·i :
L2 (X, T , µ) f, g 46
2
→ R . 7→ hf, gi
Il est facile de v´erifier que cette application est une forme bilin´eaire sym´etrique sur L2 (X, T , µ). De plus, elle est non d´eg´en´er´ee car
f , f = 0 ⇔ hf, f i = 0 ⇔ f = 0 µ-p.p. ⇔ f = 0. q
f , f = f 2 , le th´eor`eme de Ainsi, il s’agit d’un produit scalaire sur L2 (X, T , µ) et puisque Riesz-Fischer devient Corollaire 4.2.1. L2 (X, T , µ) est un espace de Hilbert. 3. L’espace L∞ (X, T , µ) * borne essentielle sup´erieure Soit f : (X, T ) → (R, BR ) une application mesurable; on suppose ici µ 6=0. D´ efinition 4.3.1. On appelle µ-borne essentielle sup´erieure de f le r´eel N∞ (f ) d´efini par N∞ (f ) = inf {M > 0 / |f | ≤ M µ-p.p.} = inf {M > 0 / µ ({|f | > M }) = 0} . La proposition suivante donne des propri´et´es de la borne sup´erieure essentielle qui seront utiles dans la suite. Proposition 4.3.1. Si N∞ (f ) < +∞ alors N∞ (f ) = min {M > 0 / µ ({|f | > M }) = 0}, c’est ` a dire : (i) µ ({|f | > N∞ (f )}) = 0; (ii) µ ({|f | > M }) = 0 ⇒ N∞ (f ) ≤ M . Preuve. (i). Suposons ∀M ≥ N∞ (f ) , µ ({|f | > M }) > 0; cela revient `a avoir µ ({|f | > M }) = 0 ⇒ M < N∞ (f ). Cela est impossible car par d´efinition de N∞ (f ), on a µ ({|f | > M }) = 0 ⇒ N∞ (f ) ≤ M ; donc il existe M ≥ N∞ (f ) tel que µ ({|f | > M }) = 0. Posons alors M0 = min {M ≥ N∞ (f ) / µ ({|f | > M }) = 0}; pour M > 0 tel que µ ({|f | > M }) = 0, on a N∞ (f ) ≤ M par d´efinition de N∞ (f ). Ceci implique que M0 ≤ M puisque l’on a ´etablit que M appartient ` a {M ≥ N∞ (f ) / µ ({|f | > M }) = 0}. On a ainsi prouv´e que M0 minore {M > 0 / µ ({|f | > M }) = 0} et puisque M0 minore appartient `a cet ensemble, il vient M0 = inf {M > 0 / µ ({|f | > M }) = 0} = N∞ (f ) . Donc µ ({|f | > N∞ (f )}) = µ ({|f | > M0 }) = 0. (ii) est ´evident par d´efinition de N∞ (f ). D´ efinition 4.3.2. L’application f est µ-essentiellement born´ee si N∞ (f ) < +∞. On note L∞ (X, T , µ) l’ensemble des applications µ-essentiellement born´ee de (X, T ) vers (R, BR ) . On va maintenant examiner les liens entre µ-bornetude essentielle et bornetude. Posant kf ksup = supx∈X |f (x)|, on a d’abord : Proposition 4.3.2. Si f est mesurable et born´ee, alors essentiellement born´ee. 47
N∞ (f ) ≤ kf ksup ; donc f est µ-
n o Preuve. Si f est born´ee, on a kf ksup < +∞, ce qui implique |f | > kf ksup = ∅, d’o` u n o µ |f | > kf ksup = 0. La proposition 4.3.1 permet alors de conclure que N∞ (f ) ≤ kf ksup < +∞. En r´ealit´e, il existe un lien plus profond entre ces deux notions. Pour l’´etablier on aura besoin du lemme suivant. Lemme 4.3.1. Soient f et g deux applications mesurables de (X, T ) vers (R, BR ). Si f = g µ-p.p. alors N∞ (f ) = N∞ (g). Preuve. On a la r´eunion disjointe {|f | > M } = ({|f | > M } ∩ {f = g}) ∪ ({|f | > M } ∩ {f 6= g}); donc µ ({|f | > M }) = µ ({|f | > M } ∩ {f = g})+µ ({|f | > M } ∩ {f 6= g}) . Or, comme {|f | > M }∩ {f 6= g} ⊂ {f 6= g} et µ ({f 6= g}) = 0, on a µ ({|f | > M } ∩ {f 6= g}) = 0. Donc µ ({|f | > M }) = µ ({|f | > M } ∩ {f = g}) = µ ({|g| > M } ∩ {f = g}) + µ ({|g| > M } ∩ {f 6= g}) la derni`ere ´egalit´e provenant de ce que, comme pr´ec´edemment, on a µ ({|g| > M } ∩ {f 6= g}) = 0. Finalement µ ({|f | > M }) = µ (({|g| > M } ∩ {f = g}) ∪ ({|g| > M } ∩ {f 6= g})) = µ ({|g| > M }) ; d’o` u N∞ (f ) = N∞ (g).
Ce lemme permet alors d’obtenir Proposition 4.3.3. f est µ-essentiellemnt born´ee si, et seulement si, il existe une application g : (X, T ) → (R, BR ) mesurable et born´ee telle que f = g µ-p.p. et N∞ (f ) = N∞ (g) = kgksup . Preuve. ⇒) Si f ∈ L∞ (X, T , µ), consid´erons g = f 1I{|f |≤N∞ (f )} ; l’application g est born´ee puisque |g| ≤ N∞ (f ) < +∞. On a donc kgksup ≤ N∞ (f ) < +∞. De plus, on a {|f | ≤ N∞ (f )} ⊂ {f = g}, c’est-` a-dire {f 6= g} ⊂ {|f | > N∞ (f )}, ce qui implique 0 ≤ µ ({f 6= g}) ≤ µ ({|f | > N∞ (f )}) = 0, c’est-` a-dire f = g µ-p.p.. On a alors (cf. lemme 4.3.1) N∞ (f ) = N∞ (g), et comme N∞ (g) ≤ kgksup (cf. proposition 4.3.2) il vient N∞ (f ) = N∞ (g) = kgksup . ⇐) S’il existe g mesurable et born´ee telle que f = g µ-p.p., alors N∞ (g) < +∞ (cf. proposition 4.3.2) et N∞ (f ) = N∞ (g) (cf. lemme 4.3.1); donc N∞ (f ) < +∞. * structure de L∞ (X, T , µ) Proposition 4.3.4. L∞ (X, T , µ) est un espace vectoriel r´eel. Preuve. Il suffit de montrer que c’est un sous-espace vectoriel de l’espace vectoriel des applications de X vers R. (a) . Montrons que l’application nulle appartient `a L∞ (X, T , µ). En effet, si f = 0 on a : ∀M > 0, µ ({|f | > M }) = 0 car {|f | > M } = ∅. Donc {M > 0 / |f | > M } = R∗+ ; d’o` u N∞ (f ) = inf ({M > 0 / µ ({|f | > M }) = 0}) = inf R∗+ = 0 < +∞. 48
(b) . Soient f1 et f2 deux ´el´ements de L∞ (X, T , µ), et (α, β) un couple de r´eels; montrons que αf1 + βf2 appartient ` a L∞ (X, T , µ). Il existe g1 et g2 born´ees telles que f1 = g1 µ-p.p., f2 = g2 µ-p.p., N∞ (f1 ) = N∞ (g1 ) = kg1 ksup et N∞ (f2 ) = N∞ (g2 ) = kg2 ksup (cf. proposition 4.3.3); on en d´eduit que αf1 + βf2 = αg1 + βg2 µ-p.p. et, d’apr`es le lemme 4.3.1 et la proposition 4.3.2, il vient : N∞ (αf1 + βf2 ) = N∞ (αg1 + βg2 ) ≤ kαg1 + βg2 ksup ≤ |α| kg1 ksup + |β| kg2 ksup < +∞. Donc, on a bien αf1 + βf2 ∈ L∞ (X, T , µ) .
Proposition 4.3.5. N∞ est une semi-norme sur L∞ (X, T , µ). Preuve. (a). On sait d´eja que N∞ (0) = 0 (cf. preuve de la proposition 4.3.4) (b) . Montrons que pour tout f ∈ L∞ (X, T , µ) et tout α ∈ R, on a N∞ (αf ) = |α| N∞ (f ) . Si α = 0 c’est ´evident. Si α 6= 0, on a µ ({|αf | > |α| N∞ (f )}) = µ ({|f | > N∞ (f )}) = 0 donc |α| N∞ (f ) ∈ {M > 0 / µ ({|αf | > M }) = 0}. De plus, soit M > 0 tel que µ ({|αf | > M }) = 0, on a 1 M = µ ({|αf | > M }) = 0 µ |f | > |α| donc (cf. proposition 4.3.1) N∞ (f ) ≤
1 |α| M ,
c’est `a dire |α| N∞ (f ) ≤ M ; ainsi
|α| N∞ (f ) = min ({M > 0 / µ ({|αf | > M }) = 0}) = N∞ (αf ) . (c). Montrons maintenant l’in´egalit´e triangulaire. Soient f et g dans L∞ (X, T , µ); d’apr`es 0 0 0 0 la proposition il existe f et g born´ e s tels que f = f µ-p.p., g = g µ-p.p., N∞ (f ) =
0 04.3.3, 0 0 0
0 N∞ f = f et N∞ (g) = N∞ g = g . Donc f + g = f + g µ-p.p.et sup
sup
0 0 N∞ (f + g) = N∞ f + g
0
0
≤ f + g sup
0
0
≤ f + g sup
sup
= N∞ (f ) + N∞ (g) .
Remarque 4.3.1. N∞ n’est pas une norme car N∞ (f ) = 0 ´equivaut `a f = 0 µ-p.p.. En effet, si f = 0 µ-p.p., alors N∞ (f ) = N∞ (0) = 0. R´eciproquement, si N∞ (f ) = 0, il existe une application g mesurable et born´ee telle que f = g µ-p.p et N∞ (f ) = N∞ (g) = kgksup = 0; donc g = 0 et, par cons´equent, f = 0 µ-p.p. On peut cependant d´efinir l’espace suivant : D´ efinition 4.3.3. On appelle espace L∞ (X, T , µ) l’espace quotient de L∞ (X, T , µ) par la relation d’´equivalence d’´egalit´e µ-p.p.. 49
Remarque 4.3.2. 1) Il est clair que L∞ (X, T , µ) est un espace vectoriel muni des lois de composition interne et externe respectivement d´efinies par f + g = f + g et α f = αf , et de l’´el´ement neutre 0. 3) Grˆ ace au passage ` a l’espace quotient on obtient une norme `a partir de N∞ . En effet, pour tout 2 (f, g) ∈ (L∞ (X, T , µ)) , on a f = g µ-p.p. ⇒ N∞ (f ) = N∞ (g); ainsi, on peut d´efinir l’application k·k∞ : L∞ (X, T , µ) → R+ . f 7→ N∞ (f ) ∞ Montrons
maintenant que c’est une norme sur L (X, T , µ). (i) f ∞ = 0 ⇔ N∞ (f ) = 0 ⇔ f = 0 µ-p.p.⇔ f = 0.
(ii) αf ∞ = αf ∞ = N∞ (αf ) = |α| N∞ (f ) = |α| f ∞ .
(iii) f + g = f + g = N∞ (f + g) ≤ N∞ (f ) + N∞ (g) = f ∞
∞
∞
+ kgk∞ .
Ainsi, L∞ (X, T , µ) , muni de la norme k·k∞ , est un espace vectoriel norm´e. On va maintenant ´etablir que c’est un espace de Banach. Th´ eor` eme 4.3.1. (L∞ (X, T , µ) , k·k∞ ) est un espace de Banach. Preuve. Soit B (X) l’espace des fonctions born´ees de X vers R; on sait que cet espace, muni de la norme k·ksup est un espace de Banach. Soit fn n∈N une suite dans (L∞ (X, T , µ) , k·k∞ ); posons ! A=
[ n∈N
{|fn | > N∞ (fn )}
∪
[
{|fn − fm | > N∞ (fn − fm )} ,
(m,n)∈N2
on a µ (A) = 0 puisque A est une r´eunion d´enombrable d’ensembles µ-n´egligeables. On d´efinit alors gn = fn 1IAc ; c’est une fonction born´ee car |gn | = |fn | 1IAc ≤ N∞ (fn ) < +∞. De plus
|gn − gm | = |fn − fm | 1IAc ≤ N∞ (fn − fm ) = fn − fm ∞
≤ fn − fm ∞ , ce qui prouve que (gn )n∈N est une suite de Cauchy dans
donc kgn − gm ksup B (X) , k·ksup ; elle est donc convergente dans cet espace vers un ´el´ement g de B (X). En particulier, on a la convergence simple de (gn )n∈N vers g, ce qui montre que g est mesurable. D’autre part
fn − g = N∞ (fn − g) ≤ N∞ (fn − gn ) + N∞ (gn − g) = N∞ (fn 1IA ) + N∞ (gn − g) , ∞
et comme {fn 1IA 6= 0} ⊂ A et µ (A) = 0, il vient µ (fn 1IA 6= 0) = 0, c’est `a dire fn 1IA = 0 µ-p.p.. En cons´equence, N∞ (fn 1IA ) = 0, d’o` u
fn − g ≤ N∞ (gn − g) ≤ kgn − gk sup ∞ la derni`ere in´egalit´e venant de ce que gn − g ∈ B (X); en cons´equence g = limn→+∞ fn dans L∞ (X, T , µ) .
50
Chapitre 5 Int´egration sur un espace produit 1. Tribu produit * g´en´eralit´es On consid`ere deux epaces mesurables (X1 , T1 ) et (X2 , T2 ). D´ efinition 5.1.1. On appelle tribu produit de T1 et T2 , la tribu sur X1 × X2 d´efinie par T1 ⊗ T2 = σ ({A × B; A ∈ T1 , B ∈ T2 }) . Cette tribu peut ˆetre caract´eris´e au moyen des projections canoniques d´efinies par π1 : (x1 , x2 ) ∈ X1 × X2 7→ x1 ∈ X1 et π2 : (x1 , x2 ) ∈ X1 × X2 7→ x2 ∈ X2 . En effet, on a :
Proposition 5.1.1. T1 ⊗ T2 est la plus petite tribu sur X1 × X2 rendant mesurables π1 et π2 . Preuve. T1 ⊗ T2 rend mesurables π1 et π2 ; en effet pour tout (A, B) ∈ T1 × T2 , on a π1−1 (A) = A × X2 ∈ T1 ⊗ T2 , et π2−1 (B) = X1 × B ∈ T1 ⊗ T2 . Soit T une tribu sur X1 × X2 qui rend mesurables π1 et π2 ; on a pour tout (A, B) ∈ T1 × T2 A × B = (A × X2 ) ∩ (X1 × B) = π1−1 (A) ∩ π2−1 (B) ∈ T donc {A × B; A ∈ T1 , B ∈ T2 } ⊂ T , ce qui implique que T1 ⊗ T2 ⊂ T
* produit de tribus bor´eliennes
On suppose ici que X1 et X2 sont munies de topologies. Proposition 5.1.2. (i) BX1 ⊗ BX2 ⊂ BX1 ×X2 . (ii) Si X1 et X2 sont ` a bases d´enombrables d’ouverts, alors BX1 ×X2 = BX1 ⊗ BX2 . Preuve. (i). Il suffit de montrer que BX1 ×X2 rend mesurables π1 et π2 . Ces applications ´etant continues on a π1−1 (OX1 ) ⊂ OX1 ×X2 ⊂ σ (OX1 ×X2 ) = BX1 ×X2 . En utilisant le lemme de transport (lemme 1.2.1), on obtient : π1−1 (BX1 ) = π1−1 (σ (OX1 )) = σ π1−1 (OX1 ) ⊂ BX1 ×X2 ; on montre de mˆeme que π2−1 (BX2 ) ⊂ BX1 ×X2 . (ii). Soient U = {Un ; n ≥ 1} et V = {Vn ; n ≥ 1} les bases d´enombrables d’ouverts de X1 et X2 respectivement. Alors U × V = {Un × Vm ; n ≥ 1, m ≥ 1} est une base d´enombrable d’ouverts de X1 × X2 . Remarquons d’abord que Un × Vm ∈ {A × B; A ∈ BX1 , B ∈ BX2 }, ce qui implique
51
que Un × Vm ∈ BX1 ⊗ BX2 , c’est ` a dire U × V ⊂ BX1 ⊗ BX2 . D’autre part pour tout A ∈ OX1 ×X2 , puisque [ Un × Vm ∈ BX1 ⊗ BX2 A= (n,m)∈I×J
il vient que OX1 ×X2 ⊂ BX1 ⊗ BX2 , ce qui implique que BX1 ×X2 = σ (OX1 ×X2 ) ⊂ BX1 ⊗ BX2
Remarque 5.1.1. 1) Puisque R est ` a base d´enombrable d’ouverts, on a donc BR2 = BR ⊗ BR . 2) Plus g´en´eralement puisque pour n ≥ 1, Rn est `a base d´enombrable d’ouverts, on a pour n ≥ 2 BRn = BRn−1 ⊗ BR = BR ⊗ BRn−1 . 3) On peut v´erifier que le produit ⊗ est asociatif; les relations pr´ec´edentes impliquent donc BRn = BR ⊗ BR ⊗ · · · ⊗ BR . {z } | n fois
* sections d’un ´el´ement de T1 ⊗ T2 Soient A ⊂ X1 × X2 et (x, y) ∈ X1 × X2 ; on consid`ere les sections de A d´efinies par Ax = {y ∈ X2 / (x, y) ∈ A}
et Ay = {x ∈ X1 / (x, y) ∈ A} .
On s’int´eresse ` a la question de savoir `a quelle(s) condition(s) ces sections sont mesurables; la r´eponse est donn´ee dans la proposition suivante : Proposition 5.1.3. ∀ (x, y) ∈ X1 × X2 , ∀A ∈ T1 ⊗ T2 , Ax ∈ T2 et Ay ∈ T1 . Preuve. Consid´erons Tx = {A ∈ T1 ⊗ T2 / Ax ∈ T2 } (a). Montrons que T1 ⊗ T2 ⊂ σ (Tx ). Soit C = A × B, A ∈ T1 , B ∈ T2 ; si x ∈ A, on a : (x, y) ∈ A × B ⇔ y ∈ B, c’est ` a dire : y ∈ Cx ⇔ y ∈ B, ce qui signifie Cx = B et montre que Cx ∈ T2 . Si x ∈ / A, on a Cx = ∅ ∈ T2 . On a ainsi prouv´e que quelque soit x ∈ X1 , on a Cx ∈ T2 , donc C ∈ Tx . En cons´equence {A × B; A ∈ T1 , B ∈ T2 } ⊂ Tx , ce qui implique T1 ⊗ T2 ⊂ σ (Tx ). (b). Montrons maintenant que Tx est une tribu sur X1 × X2 . On a d’abord (X1 × X2 )x = X2 ∈ T2 , donc X1 × X2 ∈ Tx . De plus ∅ ∈ Tx car ∅x = ∅ ∈ T2 . Soit A ∈ Tx , on a Ax ∈ T2 ; les ´equivalences c y ∈ (Ac )x ⇔ (x, y) ∈ Ac ⇔ (x, y) ∈ /A⇔y∈ / Ax ⇔ y ∈ (Ax ) c
montrent que (Ac )x = (Ax ) , et de la stabilit´e par passage au compl´ementaire de la tribu T2 on d´eduit (Ac )x ∈ T2 , c’est ` a dire Ac ∈ Tx , ce qui ´etablit la stabilit´e par passage au compl´ementaire de Tx . Soit (An )n∈N une famille d’´el´ements S de Tx , on a pour tout n ∈ N, (An )x ∈ T2 ; la stabilit´e par r´eunion de la tribu T2 implique alors n∈N (An )x ∈ T2 . Les ´equivalences ! [ [ [ y∈ An ⇔ (x, y) ∈ An ⇔ ∃n ∈ N, (x, y) ∈ An ⇔ ∃n ∈ N, y ∈ (An )x ⇔ y ∈ (An )x n∈N
S
n∈N
n∈N
x
S
montrent que n∈N An x = n∈N (An )x ∈ T2 , ce qui signifie par r´eunion d´enombrable de Tx . 52
S
n∈N
An ∈ Tx et ´etablit la stabilit´e
(c). On d´eduit de (a) et (b) que T1 ⊗ T2 ⊂ Tx , c’est `a dire ∀A ∈ T1 ⊗ T2 , Ax ∈ T2 . (d). Par un raisonnement similaire bas´e sur T y = {A ∈ T1 ⊗ T2 / Ay ∈ T1 }, on montre que ∀A ∈ T1 ⊗ T2 , Ay ∈ T1 . * sections d’une application Soit f : (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ) → (R, BR ) une application; on consid`ere les sections de f d´efinies par fx : y ∈ X2 7→ f (x, y)
(section d’abscisse x)
et f y : x ∈ X1 7→ f (x, y)
(section d’ordonn´ee y).
Nous nous int´eressons ` a la mesurabilit´e de ces sections. Celles ci sont donn´ees dans la proposition suivante : Proposition 5.1.4. Si f est mesurable, alors pour tout (x, y) ∈ X1 ×X2 , fx et f y sont mesurables. Preuve. Pp (a). Si f est ´etag´ee, f = i=1 αi 1IAi avec Ai ∈ T1 ⊗ T2 . On a fx (y) = f (x, y) =
p X
αi 1IAi (x, y) =
i=1
p X
αi 1I(Ai )x (y)
i=1
et comme (Ai )x ∈ T2 , fx est T2 -mesurable comme fonction ´etag´ee. On montre de mˆeme que f y est T1 -mesurable. (b). Dans le cas g´en´eral, f est limite d’une suite de fonctions ´etag´ees (fn )n∈N sur (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ) . Donc fx (y) = f (x, y) = lim fn (x, y) = lim (fn )x (y) ; n→+∞
n→+∞
or chaque (fn )x est T2 -mesurable d’apr`es (a), donc fx est T2 -mesurable comme limite de fonctions T2 -mesurables. On montre de mˆeme que f y T1 -est mesurable. 2. Mesure produit Soient (X1 , T1 , µ1 ) et (X2 , T2 , µ2 ) deux espaces mesur´es σ-finis. La mesure produit est d´efinie dans le th´eor`eme suivant : Th´ eor` eme 5.2.1. (i). Il existe une unique mesure sur (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ), not´ee µ1 ⊗ µ2 , v´erifiant : ∀A ∈ T1 , ∀B ∈ T2 , (µ1 ⊗ µ2 ) (A × B) = µ1 (A) µ2 (B) ; cette mesure est σ-finie et appell´ee mesure produit de µ1 et µ2 . (ii). Pour tout C ∈ T1 ⊗ T2 Z Z (µ1 ⊗ µ2 ) (C) = µ2 (Cx ) dµ1 (x) = µ1 (C y ) dµ2 (y) . X1
X2
Sp Preuve. (i). Soit E = { i=1 Ai × Bi ; Ai ∈ T1 , Bi ∈ T2 , (Ai × Bi )i deux `a deux disjoints} . 53
(a). ebre de Boole sur X1 × X2 . Il est clair que X1 × X2 ∈ E; soient Sp Montrons que E est0 uneSalg` 0 0 q C = i=1 Ai × Bi ∈ E et C = i=1 Ai × Bi ∈ E; on a 0
C ∩C =
p [ q [
0
0
(Ai × Bi ) ∩ Aj × Bj =
i=1 j=1
p [ q [
Cij
i=1 j=1
0 0 0 o` u Cij = Ai ∩ Aj × Bi ∩ Bj . Pour pouvoir conclure que C ∩ C ∈ E , il reste `a montrer que les Cij sont deux ` a deux disjoints; pour (i, j) 6= (k, l), on a 0 0 0 0 Cij ∩ Ckl = Ai ∩ Aj ∩ Ak ∩ Al × Bi ∩ Bj ∩ Bk ∩ Bl . Si i 6= k, comme Ai × Bi et Ak × Bk sont disjoints, c’est `a dire (Ai × Bi ) ∩ (Ak × Bk ) = (Ai ∩ Ak ) × (Bi ∩ Bk ) = ∅, il vient Ai ∩ Ak = ∅ ou Bi ∩ Bk = ∅; d’o` u Cij ∩ Ckl = ∅. De mˆeme, si j 6= l on montre que 0 Cij ∩ Ckl = ∅. Donc les Cij sont deux `a deux disjoints et C ∩ C ∈ E. Cela permet d’obtenir les stabilit´es par passage au compl´ementaire et par r´eunion finie; en effet pour S tous A ∈ T1 et B ∈ T2 , c p c c c c (A × B) = (A × B) ∪ (A × B ) ∪ (A × B ) ∈ E. Ainsi pour tout C = i=1 Ai × Bi ∈ E, on a T p c C c = i=1 (Ai × Bi ) ∈ E ` a cause de la stabilit´e par intersection finie de cet ensemble. D’autre 0 c c 0 0 ∈ E `a cause des stabilit´es par part, soit un autre ensemble C ∈ E, on a C ∪ C = C c ∩ C passage au compl´ementaire et par intersection de cet ensemble. On peut alors conclure que E est une alg`ebre de Boole sur X1 × X2 . (b). Montrons que la tribu engendr´ee par E est T1 ⊗ T2 . Soit E0 = {A × B ; A ∈ T1 , B ∈ T2 }, il est clair que E0 ⊂ E ⊂ T1 ⊗ T2 ; donc σ (E0 ) ⊂ σ (E) ⊂ T1 ⊗ T2 et comme σ (E0 ) = T1 ⊗ T2 il vient σ (E) = T1 ⊗ T2 . (c). Consid´erons l’application ν :
p [
p X
Ai × Bi ∈ E 7→
i=1
µ1 (Ai ) µ2 (Bi ) ∈ R+
i=1
Sp et montrons que c’est une pr´e-mesure σ-finie sur E. Il est clair que ν (∅) = 0; soient C = i=1 Ai × Sq 0 0 0 0 Bi ∈ E et C = i=1 Ai × Bi ∈ E tels que C ∩ C = ∅, puisque pour (i, j) ∈ {1, · · · , p} × {1, · · · , q} on a 0 0 0 (Ai × Bi ) ∩ Aj × Bj ⊂ C ∩ C = ∅ il vient 0
C ∪C =
p [
! Ai × B i
i=1
d’o` u
∪
q [
0
0
Aj × B j ∈ E
j=1
p q X 0 0 0 X 0 ν C ∪C = µ1 (Ai ) µ2 (Bi ) + µ1 Aj µ2 Bj = ν (C) + ν C . i=1
j=1
Il reste ` a ´etablir la σ-additivit´e. Remarquons d’abord que pour tout C = a ν (C) =
p X
Z µ1 (Ai ) µ2 (Bi ) =
f dµ1 X1
i=1
54
Sp
i=1
Ai × Bi ∈ E on
Pp o` u f = i=1 µ2 (Bi ) 1IAi . Or pour i ∈ {1, · · · , p}, si x ∈ Ai on a (Ai × Bi )x = Bi et si x ∈ / Ai on a (Ai × Bi )x = ∅; on en d´eduit : ! p p [ [ [ Cx = Ai × Bi = (Ai × Bi )x (Ai × Bi )x = i=1
i=1
x
i∈Ix
o` u Ix = {i ∈ {1, · · · , p} / x ∈ Ai }. Donc p X
f (x) =
µ2 (Bi ) 1IAi (x) =
i=1
X
µ2 (Bi ) =
X
µ2 ((Ai × Bi )x )
i∈Ix
i∈Ix
et comme pour i 6= j (Ai × Bi )x ∩ (Aj × Bj )x = ((Ai × Bi ) ∩ (Aj × Bj ))x = ∅x = ∅ il vient
! X
f (x) =
[
µ2 ((Ai × Bi )x ) = µ2
i∈Ix
(Ai × Bi )x
= µ2 (Cx )
i∈Ix
R et donc ν (C) = X1 µ2 (Cx ) dµ1 (x) . Soit (Cn )n∈N une famille d’´el´ements de E deux `a deux S Sn disjoints telle que C = n∈N Cn ∈ E, S on pose Qn = k=0 Ck ; alors (Qn )n∈N est une famille croissante d’´el´ements de E telle que C = n∈N Qn . Remarquons que l’on a alors (Qn )x ⊂ (Qn+1 )x et donc, posant fn (x) = µ2 ((Qn )x ), il vient fn (x) ≤ fn+1 (x). D’o` u ! ! [ [ ν Cn = ν Qn n∈N
n∈N
!
Z =
µ2 X1
[
(Qn )x
dµ1 (x)
n∈N
Z =
lim µ2 ((Qn )x ) dµ1 (x) Z = lim µ2 ((Qn )x ) dµ1 (x) (par le th´eor`eme de Beppo-Levi) X1 n→+∞
n→+∞
X1
= lim ν (Qn ) n→+∞
= lim
n→+∞
=
+∞ X
n X
ν (Ck )
k=0
ν (Cn ) .
n=0
Montrons S maintenant que S ν est σ-finie; cette propri´et´e ´etant vraie pour µ1 et µ2 , on peut ´ecrire X1 = n∈N An et X2 = n∈N Bn , S o` u pour S tout n ∈ N on a An ∈ T1 , Bn ∈ T2 et µ1 (An ) < +∞, µ2 (Bn ) < +∞. Donc X1 × X2 = n∈N n∈N (An × Bm ) avec ν (An × Bm ) = µ1 (An ) µ2 (Bn ) < +∞. (d). On en d´eduit l’existence et l’unicit´e de µ1 ⊗ µ2 par une application directe du th´eor`eme 3.1.1; on a alors ∀ (A, B) ∈ T1 × T2 , (µ1 ⊗ µ2 ) (A × B) = ν (A × B) = µ1 (A) µ2 (B) . 55
R´eciproquement, si une mesure µ sur (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ) v´erifie cette derni`ere propri´et´e, l’additivit´e de µ montre que µ|E = ν, d’o` u, par unicit´ R e (Th´eor`eme 3.1.1) µ = µ1 ⊗ µ2 . (ii). Soit m : C ∈ T1 ⊗ T2 7→ X1 µ2 (Cx ) dµ1 (x); montrons que m est une mesure sur (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ). Tout d’abord Z Z m (∅) = µ2 (∅x ) dµ1 (x) = µ2 (∅) dµ1 (x) = 0; X1
X1
0 0 0 0 soient C et C dans T1 ⊗ T2 tels que C ∩ C = ∅, puisque Cx ∩ Cx = C ∩ C = ∅x = ∅ il vient x
m C ∪C
0
Z =
µ2
C ∪C
x
X1
Z =
0
dµ1 (x)
0 µ2 Cx ∪ Cx dµ1 (x)
X1
Z
0 µ2 (Cx ) + µ2 Cx dµ1 (x) X Z 1 Z 0 = µ2 (Cx ) dµ1 (x) + µ2 Cx dµ1 (x) X1 X1 0 = m (C) + m C . =
Soit (Cn )n∈N une famille d’´el´ements deux `a deux disjoints de T1 ⊗ T2 , puisque pour n 6= m on a (Cn )x ∩ (Cm )x = (Cn ∩ Cm )x = ∅x = ∅ il vient ! Z ! ! [ [ m Cn = µ2 Cn dµ1 (x) X1
n∈N
n∈N
Z =
[
µ2 X1
Z =
X
XZ n∈N
=
X
dµ1 (x)
n∈N
X1 n∈N
=
(Cn )x
!x
X1
µ2 ((Cn )x ) dµ1 (x) µ2 ((Cn )x ) dµ1 (x)
m (Cn ) .
n∈N
Ainsi, m est une mesure sur (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ); pour tous A ∈ T1 et B ∈ T2 , elle v´erifie Z m (A × B) = µ2 ((A × B)x ) dµ1 (x) X1 Z Z = µ2 ((A × B)x ) 1IA (x) dµ1 (x) + µ2 ((A × B)x ) 1IAc (x) dµ1 (x) X1 X1 Z = µ2 (B) 1IA (x) dµ1 (x) car µ2 ((A × B)x ) 1IAc (x) = 0 X1
= µ1 (A) µ2 (B) ; 56
on d´eduit de cette propri´et´e et de l’unicit´e de µ1 ⊗ µ2 que m = µ1 ⊗ R µ2 . Par un raisonnement 0 0 analogue, on montre aussi que m = µ1 ⊗ µ2 o` u m : C ∈ T1 ⊗ T2 7→ X2 µ1 (C y ) dµ2 (y). Remarque 5.2.1. 1) Ce th´eor`eme permet de d´efinir la mesure de Lebesgue sur Rn , n ≥ 2. En effet, on peut v´erifier que le produit des mesures est associatif. On peut donc poser λn = λ ⊗ · · · ⊗ λ; | {z } n fois
cette mesure, appell´ee mesure de Lebesgue sur Rn , est l’unique mesure sur (Rn , BRn ) qui v´erifie que pour tous intervalles I1 , · · · , In de R, on ait λn (I1 × · · · × In ) = λ (I1 ) λ (I2 ) · · · λ (In ) . 2) La propri´et´e (iii) du th´eor`eme pr´ec´edent indiquecomment calculer l’int´egrale d’une fonction indicatrice par rapport ` a une mesure produit. En effet, elle ´equivaut `a Z Z Z Z Z 1IC d (µ1 ⊗ µ2 ) = 1ICx (y) dµ2 (y) dµ1 (x) = 1IC y (x) dµ1 (x) dµ2 (y) , X1 ×X2
X1
c’est-` a-dire Z Z 1IC d (µ1 ⊗ µ2 ) = X1 ×X2
X1
X2
Z
X2
Z 1IC (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) =
X2
X2
X1
Z
1IC (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) .
X1
3. Int´ egration par rapport ` a une mesure produit Soient (X1 , T1 , µ1 ) et (X2 , T2 , µ2 ) deux espaces mesur´es σ-finis; on cherche, dans ce pargraphe, ` d´eterminer comment int´egrer par rapport `a une mesure produit. Une premi`ere r´eponse `a cette a pr´eoccupation est donn´ee dans la remarque pr´ec´edente qui consid`ere le cas de fonctions indicatrices. Dans les th´eor`emes ci-dessus, nous allons ´etendre cette propri´et´e tout d’abord aux fonctions mesurables positives, puis aux fonctions mesurables quelconques.
Th´ eor` eme 5.3.1. (Fubini - Tonelli ). Soit f : (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ) → R+ , BR+ une fonction mesurable. Alors : R R (i). Les applications x ∈ X1 7→ X2 f (x, y) dµ2 (y) et y ∈ X2 7→ X1 f (x, y) dµ1 (x) sont respectivement T1 -mesurable et T2 -mesurable. (ii). On a : Z Z Z Z Z f d (µ1 ⊗ µ2 ) = f (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) = f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) . X1 ×X2
X1
X2
Preuve. (a). Si f est une fonction ´etag´ee, f =
X2
Pp
i=1
57
X1
αi 1ICi o` u les Ci appartiennent `a T1 ⊗ T2 , on
a Z F (x) = X2
Z = = =
p X
Z f (x, y) dµ2 (y) = p X
αi 1I(Ci )x (y) dµ2 (y)
X2 i=1 Z p X
αi
i=1 p X
αi 1ICi (x, y) dµ2 (y)
X2 i=1
X2
1I(Ci )x (y) dµ2 (y)
αi µ2 ((Ci )x )
i=1
et la T1 -mesurabilit´e des applications x 7→ µ2 ((Ci )x ) implique celle de F . De plus, d’apr`es le th´eor`eme 5.2.1 Z Z p X F (x) dµ1 (x) = αi µ2 ((Ci )x ) dµ1 (x) X1
= =
i=1 p X i=1 p X
X1
αi (µ1 ⊗ µ2 ) (Ci ) Z 1ICi d (µ1 ⊗ µ2 )
αi
i=1
X1 ×X2
Z
p X
=
αi 1ICi d (µ1 ⊗ µ2 )
X1 ×X2 i=1
Z f d (µ1 ⊗ µ2 ) ,
= X1 ×X2
R R f d (µ ⊗ µ ) = f (x, y) dµ (y) dµ1 (x) . Par un raisonnement ana1 2 2 X1 ×X2 X1 X2 R R logue on montre que G (y) = X1 f (x, y) dµ1 (x) est T2 -mesurable et que X1 ×X2 f d (µ1 ⊗ µ2 ) = R R R G (y) dµ2 (y) = X2 X1 f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) . X2
c’est ` a dire
R
(b). Si f n’est pas ´etag´ee, il existe une suite croissante (fn )n∈N de fonctions ´etag´ees positives telle que f = limn→+∞ fn . Le th´eor`eme de Beppo-Levi permet alors d’´ecrire Z Z Z F (x) = f (x, y) dµ2 (y) = lim ↑ fn (x, y) dµ2 (y) = sup fn (x, y) dµ2 (y) X2
n→+∞
n∈N
X2
et comme, d’apr`es le point pr´ec´edent, x ∈ X1 7→
58
R X2
X2
fn (x, y) dµ2 (y) est T1 -mesurable, il vient
que F est T1 -mesurable. De plus, une nouvelle application du th´eor`eme de Beppo-Levi donne Z Z Z Z Z f (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) = F (x) dµ1 (x) = lim fn (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) X1 X2 X1 X1 n→+∞ X2 Z Z = lim ↑ fn (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) n→+∞ X2 ZX1 = lim ↑ fn d (µ1 ⊗ µ2 ) (d’apr`es le a) n→+∞ X1 ×X2 Z = lim fn d (µ1 ⊗ µ2 ) (par le th´eor`eme de Beppo-Levi) X1 ×X2 n→+∞ Z = f d (µ1 ⊗ µ2 ) . X1 ×X2
R Par un raisonnement analogue on montre que G (y) = X1 f (x, y) dµ1 (x) est T2 -mesurable et que R R R R f d (µ1 ⊗ µ2 ) = X2 G (y) dµ2 (y) = X2 X1 f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) . X1 ×X2 Le th´eor`eme suivant ´etend le r´esultat pr´ec´edent `a des fonctions non positives. Th´ eor` eme 5.3.2. (Fubini ). Soit f : (X1 × X2 , T1 ⊗ T2 ) → (R, BR ) une fonction µ1 ⊗ µ2 int´egrable. Alors : (i). Pour µ1 -presque tout x la fonction fx est µ2 -int´egrable et pour µ2 -presque tout y la fonction f y est µ1 -int´egrable; R R (ii). x ∈ X1 7→ X2 f (x, y) dµ2 (y) et y ∈ X2 7→ X1 f (x, y) dµ1 (x) sont respectivement µ1 -int´egrable et µ2 -int´egrable. (iii). On a : Z Z Z Z Z f d (µ1 ⊗ µ2 ) = f (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) = f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) . X1 ×X2
X1
X2
X2
R
X1
R
Preuve. (i). Soit ϕ (x) = X2 |fx (y)| dµ2 (y) = X2 |f (x, y)| dµ2 (y); le th´eor`eme 5.3.1 montre que ϕ est T1 -mesurable, et, en utilisant ce mˆeme th´eor`eme, on obtient : Z Z Z Z |ϕ| dµ1 = |f (x, y)| dµ2 (y) dµ1 (x) = |f | d (µ1 ⊗ µ2 ) < +∞, X1
X1
X1 ×X2
X2
ce R quiyimplique ϕ < +∞ µ1 -p.p.. Par un raisonnement analogue, on montre que posant ψ (y) = |f (x)| dµ1 (x), on a ψ < +∞ µ2 -p.p.. X1 (ii). En utilisant les propri´et´es de l’int´egrale, puis le th´eor`eme 5.3.1, on obtient : Z Z Z Z Z f (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) ≤ |f (x, y)| dµ2 (y) dµ1 (x) = |f | d (µ1 ⊗ µ2 ) < +∞ X1
X2
et Z Z X2
Z
X1
X1
Z f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) ≤
X2
X1 ×X2
X2
Z
Z |f (x, y)| dµ1 (x) dµ2 (y) =
|f | d (µ1 ⊗ µ2 ) < +∞.
X1 ×X2
X1
(iii). On a f = f+ − f− ; l’application du th´eor`eme 5.3.1 `a f+ et f− donne : Z Z Z Z f+ d (µ1 ⊗ µ2 ) = f+ (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) = f+ (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y)
X1 ×X2
X1
X2
X2
59
X1
et Z
Z
Z f− d (µ1 ⊗ µ2 ) = X1
X2
f d (µ1 ⊗ µ2 ) =
X1
f+ d (µ1 ⊗ µ2 ) −
= X1
Z = X1
Z =
f− d (µ1 ⊗ µ2 ) Z Z f+ (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) − f− (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) X X X2 Z 2 1 (f+ (x, y) − f− (x, y)) dµ2 (y) dµ1 (x) X2 Z f (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) X1 ×X2
Z
X1
X2
Z
Z f+ d (µ1 ⊗ µ2 ) −
f d (µ1 ⊗ µ2 ) = X1 ×X2
Z
X1 ×X2
Z
et Z
Z
f− (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) ; X2
Z
X1 ×X2
Z
f− (x, y) dµ2 (y) dµ1 (x) =
X1 ×X2
d’o` u Z
f− d (µ1 ⊗ µ2 ) Z Z Z Z = f+ (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) − f− (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) X X X X1 2 Z 2 Z 1 (f+ (x, y) − f− (x, y)) dµ1 (x) dµ2 (y) = X2 X1 Z Z = f (x, y) dµ1 (x) dµ2 (y) . X1 ×X2
X1 ×X2
X2
X1
4. Int´ egration sur Rn : formule du changement de variables Soient U et V deux ouverts de Rn et un h : U → V un diff´eomorphisme (c’est `a dire h est bijectif , et h et h−1 sont diff´erentiables); on note Jh (x) le Jacobien de h en x. On a alors : Th´ eor` eme 5.4.1 (Formule du changement de variable ). Pour toute fonction f λn -int´egrable sur V , |det (Jh)| (f ◦ h) est λn -int´egrable sur U et Z Z f (y) dλn (y) = |det (Jh (x))| f (h (x)) dλn (x) . V
U
60
:
V → R
Index absolue continuit´e, 23 additivit´e, 11 d´enombrable, 11 alg`ebre de Boole, 35 application bor´elienne, 4 essentiellement born´ee, 47 mesurable, 4
mesure `a densit´e, 23 finie, 11 image, 15 produit, 53 sigma finie, 11 sur un espace mesurable, 11 mesure de Lebesgue, 39
borne essentielle sup´erieure, 47
pr´e-mesure, 35 propri´et´e d’additivit´e de l’int´egrale, 16 d’additivt´e de l’int´egrale, 20 de croissance de l’int´egrale, 16, 18, 24 de lin´earit´e de l’int´egrale, 24 de positive homog´en´eit´e, 20 de positive homogeneit´e de l’int´egrale, 16 de positivit´e de l’int´egrale, 24 vraie presque partout, 14
changement de variables, 60 continuit´e croissante de la mesure, 12 d´ecroissante de la mesure, 12 croissance de la mesure, 12 d´ecomposition canonique, 8 densit´e, 23
sections d’un ensemble, 52 d’une application, 53 sous-additivit´e d´enombrable, 12 finie, 12 stabilit´e par diff´erence, 2 par intersection d´enombrable, 2 par intersection finie, 2 par passage au compl´ementaire, 2 par r´eunion d´enombrable, 2 par r´eunion finie, 2
ensemble n´egligeable, 14 espace de fonctions intgrables, 23 mesur´e, 13 mesurable, 2 fonction ´etag´ee, 8 indicatrice, 4 int´egrable, 23 in´egalit´e de H¨ older, 42 de Minkowski, 42 de Young, 42 int´egrale de fonction ´etag´ee positive, 15 de fonction mesurable, 23 de fonction mesurable positive, 17
th´eor`eme de Carath´eodory, 35 de continuit´e sous l’int´egrale, 32 de convergence domin´ee (Lebesgue), 30 de convergence monotone (Beppo-Levi), 18 de d´erivation globale sous l’int´e de d´erivation sous l’int´egrale, 33 de Fatou-Lebesgue, 29 de Fubini, 59 de Fubini-Tonelli, 57 de Radon-Nikodym, 23 de Riesz-Fischer, 46
lemme de Fatou, 29 de transport, 5 fondamental d’approximation, 9 61
tribu bor´elienne, 3 des parties des ensemble, 2 engendr´ee par un ensemble, 2 engendr´ee par une application mesurable, 4 grossi`ere, 2 produit, 51 triviale, 2
62