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V Kat ËÂ.atOv Kat omopa<;. Pour le XIX o siècle: A. Miliarakis, 'AtlOpr6ç, p. 12-16 ; J.A. Buchon (Voyage dans l'Eubée et les Cyclades, p. 177-184) et J.T. Bent (The Cyclades, p. 501). Au XX O siècle, E. Kolodny (Chora d'Amorgos, p. 134; Méditerranée, 1973-2, p. 20-22). 2. ABSA 65, 1970, p. 76.
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tableau 2. TRIBUT DES ILES DE L'EGEE
AMORGOS ANAPHE (428) ANDROS ASTYPALAIA BELBINE CALYMNA CARPATHOS CARYSTOS CASSOS CHALKE COS CYTHERE EGINE ICARlA ICOS IMBROS
[ms
OLOS rHNOS LEMNOS MELOS MYCONOS NAXOS NISYROS PAROS PEPARETHOS PHOLEGANDROS RHENEE SAMOTHRACE SERIPHOS SIKINOS SIPHNOS SKIATHOS' SYME SYROS TELOS (427) TENEDOS TENOS THERA(430)
Total
440-430
425/4
420-410
1 T. 1000dr. 6T. 2 T.
? 1000 de. 15 T. ? 300 de. ? ? 5 T. ? 2000 - 5000 de. ? 4T.
? ? 7 T. ?
1 T. 3000 de. 2000 dr. 5 T. 1000 dr. 2000 de. 5 T.
30 T. 1 T. 1000 de. 1500 dr. 1 T. 3000 de. 3 T.
-
3 T. 1000 dr. 1800 de. 1500 de. 1 T.? 2 T. 5280 de. 2 T. 3 T.
? ? 1 T. 1 T. lOT. 1000 de. 6 T. 4 T. 15 T. 2 T. 15 T. ? 30 T. ? 2000 de 1000 dr. 15 T. 2 T. 1000 de. 9 T. ? 3000 de. 1 T. 2 T. ? lOT. 5 T.
114 T. 1380 dr.
?
3 T. 4 T. 3000 de.
1 T. 6 T. 4000 de. 1 T. 18 T. 3 T.
300 de. 6 T. 1 T.
-
? 2500 de. + 5 T. 1000 de. 2000 de. ?
? ? 1 T. 3000 de. 6 T. ? 6 T. 2 T. 500 de.
1 T. 7-9 T. ? 18 T. ? 1000 de 500 de. ? 1 T. + 500 de. ? ? ? ? ? ? ? ? ?
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E. Ruschenbusch considère que c'est un bon révélateur des capacités démographiques des cités. Sans doute, en bout de course, peut-on admettre qu'une cité très imposée était plus peuplée qu'une autre au tribut modeste, et les 18 talents de Paros illustrent une puissance démographique sans commune mesure avec les 3000 drachmes de los. Mais la généralisation de cette conclusion recèle un danger : je sais bien que Ruschenbusch ne propose qu'un modèle de construction théorique (un talent = 800 citoyens) dont il ne pense pas une seule seconde qu'il puisse être appliqué partout au pied de la lettre. Il n'empêche qu'établir un rapport aussi direct entre pharos et population est d'abord se méprendre sur les textes ou plutôt en proposer une interprétation fondée sur l'a priori d'une richesse reposant exclusivement sur un travail stéréotypé - pour parler clair l'agriculture, ses rendements, ses limites - et négliger ce que l'on me permettra de désigner sous l'expression trop contemporaine de "valeur ajoutée", certes anachronique mais dont on n'a aucune raison de croire qu'elle n'existait pas, sinon dans la théorie - j'en conviendrais assez bien - du moins dans une vision empirique. Admettra-t-on alors que le chiffre d'affaires d'un négociant était l'équivalent de celui d'un petit agriculteur? Partant de cette idée, on acceptera sans peine je l'espère que les chiffres du pharos se limitent à indiquer un potentiel fiscal, fondé sur la richesse totale de la cité, et ne nous fournissent qu'une image imparfaite et déformée du niveau de la population. D'ailleurs, le seul texte qui nous fournisse quelque indication sur l'assise de la taxation, le réajustement de 425/4, précise bien que le critère fondamental à prendre en compte en vue d'une diminution éventuelle du tribut est la pauvreté de la chôra. Mais par ce mot, il ne faut pas entendre les seules terres cultivées, le terroir, et ce sont toutes les richesses qui sont ici évoquées, tant celles du sol que du sous-sol, en bref toutes celles que j'ai rappelées au cours des troisième et quatrième chapitres 3• Doit-on moduler cette idée générale en l'affectant de quelques correctifs d'ordre historique ? Certaines hausses et baisses laissent perplexes et il n'est peut-être pas nécessaire de rouvrir un débat pour lequel nous n'avons guère d'éléments nouveaux à faire valoir. Que certaines baisses brutales, comme celles d'Andros et de Carystos, aient été motivées par l'envoi de clérouques connu par d'autres sources, est une probabilité intéressante. Mais la généralisation de cette idée ne repose sur rien : associer la chute progressive du pharos d'üinè d'lcaria (8000 drachmes en 453, 6000 en 449, 4000 en 446) à une installation de clérouques, parce qu'Athènes avait quelques raisons de croire avant terme en une révolte des Samiens est, dans le meilleur des cas, une erreur de perspective historique4 . L'idée a d'autre part prévalu que certains montants du tribut auraient pu signifier une volonté athénienne de récompenser une alliée bien disposée ou de punir telle cité d'une attitude inamicale voire hostile. Pour expliquer le maintien du tribut de Carystos à 5 talents lors de l'augmentation de 425/4, R. Meiggs a invoqué la collaboration des Carystiens à l'expédition athénienne en Corinthie l'année de la réorganisation du pharos. Cela n'est certes pas impossible mais on comprend assez mal dans cette hypothèse pourquoi les Andriens, qui eux aussi participèrent à cette opération, eurent à subir un
3. SGHI 69 I. 22. L. Nixon et S. Priee, La Cité grecque, p. 172-178, rejettent aussi l'éventualité d'une relation directe entre pharos et population. 4. Andros, Carystos : R. Meiggs, Athenian Empire, p. 242. Icaria : AI. Papalas, Ancient Icaria, p. 66.
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gonflement de leur tribut de 6 à 15 talents 5 • Dans l'autre sens, on a admis le principe d'une punition pour vélléités agressives à l'encontre d'Egine, taxée à 30 talents à partir de 454/3 et jusqu'en 431, c'est-à-dire avant la création d'une colonie athénienne sur l'île, et alors qu'elle venait d'être vaincue. On sait qu'une telle hypothèse s'appuie aussi sur des paroles attribuées à Périclès et faisant état de la forte méfiance qu'inspirait Egine à sa puissante voisine6 . On a pensé aussi que Paros avait subi un traitement voisin (un pharos de 18 talents) en raison des multiples expéditions athéniennes dans l'île, attestant toutes une volonté de soumettre une île réputée puissante et donc dangereuse?, et bien sOr que Mélos, intégrée d'office dans l'Alliance lors du réaménagement fiscal de 425/4, n'avait pas bénéficié de la mansuétude des Athéniens en raison de son attitude de neutralité bienveillante vis-à-vis de Sparte8• Il est possible que de tels arguments soient recevables, du moins en théorie. Car en pratique, rien n'indique que les sommes exigées, pour élevées qu'elles paraissent, soient exorbitantes en regard des capacités de paiement des cités en question. Au moment où les Eginètes sont soumis par les Athéniens, ce sont soixante-dix vaisseaux qui sont pris par ces derniers, signe évident de la richesse de l'île, plaque tournante du commerce égéen9 • 18 talents sont pour Paros une très forte somme, mais on a vu que le marbre extrait dans l'île était une matière première très recherchée, susceptible de fournir des rentrées d'argent appréciables. Enfin, Mélos est taxée à 15 talents en 425/4, mais l'île est loin d'être pauvre et, pour donner des points de comparaison, c'est la somme à laquelle sont astreintes Andros et Samothrace qui ne me paraissent pas des îles de nature très différente 10. Certes, ces trois îles n'avaient pas à attendre de ménagement particulier de la part des Athéniens, mais rien ne prouve que le pharos exigé était vexatoire ou démesuré, et qu'il outrepassait les possibilités fiscales des alliés en question. Le montant du tribut versé par le secteur insulaire, le nèsiotikos pharos, se monte, avant la Guerre du Péloponnèse, à quatre-vingt dix talents environ mais ce chiffre ne saurait nous convenir en raison, d'une part du rattachement à ce secteur des cités eubéennes que nous avons exclues de notre axe de recherche, d'autre part de l'intégration 5. Thucydide, IV, 42, 1 ; 43, 3-4. R. Meiggs, Athenian Empire, p. S30. 6. Thucydide, l, lOS-108. Des bornes d'un temenos d'Athèna ont été retrouvées à Egine, dont l'une porte le sigma à trois branches caractéristique de l'épigraphie attique (/G IV, 29). R. Meiggs, Athenian Empire, p. 98. "Je vous engage à débarrasser le Pirée d'Egine comme d'un grain de chassie" aurait dit Périclès: Plutarque, Périclès, 8, S ; Démosthène, 1,2 ; Moralia, 803 a. 7. Expédition de Miltiade en 489 : Hérodote, VI, 133-136 ; Ephore, FGrHist. II A 70 F. 63 ; Népos, Miltiade, 7-8. D. Berranger, Paros archaïque, p. 86-88 ; E. Lanzillotta, Paro, p. 108-113. Expédition de Thémistocle en 479 : Hérodote, VIII, 67 (Paros lui donne des "sommes importantes"). Un phoros disproportionné à la richesse réelle de l'île pour E. Lanzillotta, Paro, p. 116-117. 8. Sa "neutralité" affirmée au début de la guerre (Thucydide, II, 9, 4 ; Diodore, XII, 42,. S) ne l'empêche pas de participer à l'effort de guerre des Spartiates au début de la Guerre du Péloponnèse: SGHl67 B 1. 117. Elle est d'ailleurs ravagée par Nicias en 426 : Thucydide, III, 19, 1 ; Diodore, XII, 62, S. 9. Thucydide, l, lOS, 2. Au début du VO siècle, c'est déjà un emporion où les navires débarquent du blé venant du Pont. Au IVo siècle, elle demeure un port actif, surtout dans le commerce des esclaves : [Démosthène], LIlI, 6 ; Aristote, Politique, IV, 4,21 1290 b. 10. A titre de comparaison, les impôts réclamés à Mélos et Naxos par l'Empire ottoman au début du XVIIIO siècle sont presque identiques: 10000 et 10 SOO écus (P. Brun, DHA 19-2, 1993, p. 223-233).
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d'îles dans les autres secteurs fiscaux de l'Empire. Si l'on comptabilise au contraire les îles telles que je les ai définies au départ de cette étude, cela fait trente et une unités insulaires contribuables avant 431, trente-quatre si l'on y inclut Thèra, entrée en 430 11 , Anaphè, en 428 et Télos, contribuable à partir de 427 - mais pour laquelle nous n'avons la somme versée, deux talents, qu'en 425/4; nous garderons ce nombre de trente-quatre puisque cela donne un ordre de grandeur avant la grande augmentation de 425/4. Ce sont presque 115 talents qui sont payés par ces îles de l'Egée, soit à peine moins du tiers de l'impôt global prélevé par les Athéniens et pour un seul des cinq secteurs de l'Empire (tableau 2). De plus, elles fournissent les contingents des plus gros contribuables, avec Egine, trente talents, Paros, dix-huit talents, Naxos, Andros et Samothrace plus de six, pour les prélèvements opérés avant 431. On conviendra aisément dans ces conditions que l'idée d'îles incapables de payer un pharos trop lourd doit être abandonnée. tableau 3. CLASSEMENT DES UNITES INSULAIRES PAR CATEGORIE FISCALE 300 • 3000 dr. ANAPHE CARPATHOS CASSOS CHALKE ICOS lOS RHENEE SKIATHOS SYME SYROS
3000 dr. - 1 T. AMORGOS CALYMNA ICARIA IMBROS MYCONOS NISYROS SERIPHOS TELOS
1 T. - 5 T. ASTYPALAIA CARYSTOS COS KEOS KYTHNOS LEMNOS PEPARETHOS SIPHNOS TENEDOS TENOS THERA
> 5 T. ANDROS EGINE NAXOS PAROS SAMOTHRACE
Allons à présent plus loin et tentons une classification des cités tributaires, toujours avant l'augmentation de 425/4 en écartant donc les îles de Mélos, Kimolos, Pholégandros et Sikinos, dont le pharos ne fut pas exigé avant cette date. Pour cela, il suffit de prendre quatre catégories commodes, jusqu'à 3000 drachmes, de 3000 drachmes à un talent inclus, de un à cinq talents, au-delà de cinq talents l2 • Le tableau 3 fait apparaître un résultat plutôt équilibré: sur les trente-quatre unités insulaires (et non pas civiques puisque c'est ainsi que je regroupe Kéos et !caria, îles multipolitiques, sous 11. Il est difficile de savoir si Thèra a versé la somme exigée: en 426, l'île doit de l'argent à Athènes (lG 13,681. 21-22 = SGHI 68). Peut-être sont-ce des impayés (R. Meiggs, Athenian Empire, p. 328) ? 12. P. Brulé, La cité grecque à l'époque classique, p. 16-18. Les chiffres auxquels il parvient sont sensiblement différents des miens par le fait qu'il intègre toutes les communautés qui furent un jour tributaires et qu'il exclut les cités dont le pharos est jugé exorbitant. D'autre part, je place Télos dans la catégorie 3000 drachmes - 1 talent, bien que nous n'ayons pas son tribut de 427, par comparaison avec les deux autres cités imposées comme elle à deux talents en 425/4, Sériphos et Myconos, qui versaient un talent avant l'augmentation. Mais si l'on se réfère à la très faible progression ou à la stagnation qui a affecté le pharos d'Anaphè et Thèra, entrées aussi dans la Ligue après le début des hostilités, on pourrait imaginer d'intégrer Télos dans le troisième groupe.
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une appellation générique) astreintes au tribut, dix appartiennent au premier groupe (29,4 %), huit au second (23,5 %), onze au troisième (32,4 %), cinq au quatrième (14,7 %). On remarque encore la quasi-égalité des deux groupes séparés par la barrière de un talent de tribut (dix-huit contre seize). Si l'on intègre à ce calcul les îles qui ne sont comptabilisées qu'en 425/4, Belbinè, Cythère, Kimolos, Mélos, Pholégandros et Sikinos, la balance s'infléchit encore en faveur des petits contribuables (Belbinè, Kimolos, Pholégandros et Sikinos rejoignant la première catégorie, Cythère la troisième et Mélos la quatrième), mais pas de façon outrancière (vingt-deux contre dix-huit). Si l'on élargit maintenant cette analyse à l'ensemble des cités tributaires entre 440 et 430 (j'ai écarté la centaine de cités qui n'a plus payé après 441, mais L. Nixon et S. Price, en prenant pour base les communautés alliées en 441, parviennent à un résultat très semblable 13 ), on s'aperçoit que sur 191 communautés sujettes, 98, soit un peu plus de la moitié (51,3 %) doivent être classées dans le premier groupe, celui dont le montant du tribut est inférieur ou égal à 3000 drachmes, 35 (18,3 %) dans le second, 33 (17,3 %) dans le troisième, 25 (13,1 %) dans le quatrième, celui des plus lourdement taxés. La différence entre l'ensemble des cités tributaires et le secteur des îles saute aux yeux: si la proportion des gros assujettis varie, dans les deux cas, à l'intérieur d'une fourchette qui n'est guère significative, elle passe du simple au double (17,3 % contre 32,4 %) pour le groupe taxé de un à cinq talents. C'est cette catégorie, la plus représentée dans le monde insulaire, qui me semble symboliser le mieux l'aisance relative des îles de l'Egée. Mais, à l'autre bout de la chaîne, on n'est pas moins frappé par la proportion plutôt faible (entre le tiers et le quart) de cités figurant parmi les plus modestes alliés d'Athènes, en regard de la sur-représentation des petites communautés dans l'ensemble de l'Empire, majoritaires en nombre, si bien que le point d'équilibre que j'évoquai tout à l'heure et qui s'établissait à un talent pour les îles, s'abaisse à 3000 drachmes si l'on réfléchit à l'échelle de l'Empire. La conclusion s'impose: proportion plus grande des alliés aisés, proportion plus faible des modestes, telle nous apparaît la situation fiscale des îles de l'Egée avant le déclenchement de la Guerre du Péloponnèse.
Le réajustement de 425/4 dans les îles La taxis phorou de 425/4 est considérée, non sans raisons objectives, comme le produit presque mécanique des premières années de la guerre, une surtaxe, légitimée du côté athénien par l'eisphora que la cité impose à ses citoyens, et qui signifie un effort partagé 14 • Mais puisqu'il n'y a pas progression automatique et régulière dans chaque cité, on est obligé d'admettre que les modifications de l'assiette fiscale ne se sont pas opérées selon un taux fixe, même si le résultat final aboutit, pour l'ensemble des cités sur le plan collectif et pour la majeure partie d'entre elles sur un plan individuel, à un triplement approximatif du tribut. Le décret athénien qui établit le réajustement précise que "le 13. La Cité grecque, p. 170. Sur 205 tributaires, 107 (52,2 %), appartiennent à la première catégorie, 38 (18,6 %) à la seconde, 36 (17,5 %) à la troisième, 24 (11,7 %) à la dernière, la plus imposée. On voit que les différences sont minimes. 14. Thucydide, m, 19, 1.
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phoros ne sera pas inférieur pour chaque cité à ce qu'il est aujourd'hui à moins qu'elle ne puisse verser davantage en raison de la pauvreté du territoire ([à1topîa] 't[ê]ç xopaç)". Cette éventualité sous-entend des négociations bilatérales et c'est dans ce sens qu'il faut comprendre l'invitation faite aux cités alliées d'adresser des ambassadeurs à Athènes au mois de Maimaktérion avant que le Conseil ne délibère, devant lequel les cités essayèrent de limiter les dégâts 15 • Ces marchandages ont pu déboucher sur une stagnation du phoros (Carystos demeure à cinq talents, Imbros à un talent) mais, bien sûr, le plus souvent, sur une forte augmentation. Certaines hausses, tout à fait atypiques, surprennent, à l'instar celle de Symè dont le phoros est multiplié par cinq (de 600 à 3000 drachmes). Sans doute objectera-t-on que nous sommes là en présence d'une cité à l'imposition de base très modeste et pour laquelle une croissance en valeur absolue se traduit ipso facto par une progression presque exponentielle en valeur relative. Mais avec Ténos, nous avons l'exemple d'une cité déjà bien imposée (deux talents), désormais au sommet de la hiérarchie puisque grevée d'un tribut de dix talents. La réalité implicite de telles négociations permet d'un autre côté de penser que la taxis phorou de 425/4 permit une forme de rééquilibrage, de mise à jour de contributions qui, globalement, n'avaient pas bougé depuis un demi-siècle. Or la paix, même rompue de temps à autre - mais l'Empire et au premier rang les cités insulaires n'avaient guère eu à souffrir des opérations militaires, avant tout balkaniques - avait dû porter ses fruits. Toutes les cités alliées avaient, à leur niveau, profité de conditions dans l'ensemble favorables et il se pourrait que l'augmentation du tribut en 425/4, outre l'aspect conjoncturel d'état de guerre qui n'est pas niable, enregistrât aussi, dans l'esprit des Athéniens, une richesse accrue des cités alliées et elle serait donc tout autant ajustement qu'alourdissement. Certes, c'est avant tout l'idée d'augmentation que devaient ressentir les Alliés qui voyaient leur contribution doubler ou tripler. Mais il n'est pas sot de penser que, eu égard à la prospérité que les prospections archéologiques de Mélos et de Kéos laissent entrevoir, le poids ne fut pas plus lourd en 425/4 qu'il ne l'avait été un demisiècle auparavant, quand fut exigé le "tribut d'Aristide". De fait, lorsque Thucydide narre la défection de Chios en 41211, il décrit l'île en termes élogieux, "pays de beaux domaines, resté intact depuis les guerres médiques" 16. Mais, à bien réfléchir, on doit constater que c'était le cas de la grande majorité des alliés insulaires lesquels n'avaient été touchés ni par les batailles du va siècle, ni par les prolégomènes de la guerre du Péloponnèse. Conjectures que tout cela? C'est possible. Néanmoins, on aura une confirmation de cette hypothèse par l'examen du tribut des cités qui ne furent imposées qu'assez tard. Thèra, assignée en 430 pour trois talents, vit le montant de son phoros porté à cinq talents, ce qui est l'une des progressions les plus faibles du monde insulaire. De son côté, 15, SGHI 69 1. 21-22 ; 6-7. Maimaktérion (novembre-décembre) est le mois des procès à Athènes: Aristophane, F. 278 Edmonds. Sans doute certaines cités se payèrent-elles les services d'un logographe en vue ou envoyèrent-elles à Athènes les plus illustres de leurs enfants: c'est sans doute à cet épisode qu'il faut rattacher les discours d'Antiphon "Sur le phoros des Samothraciens", F. 1-4 CUF (49-52 Blass), où il dépeint l'île sous des aspects peu reluisants, propres à infléchir la sévérité du traitement fiscal de Samothrace (infra) et "Sur le phoros des Lindiens" (F. 25-33 Blass). C'est peut-être à ce moment que Prodicos, ambassadeur de Kéos, est venu à Athènes devant la Boulè : Platon, Hippias Majeur, 282 b. 16, Thucydide, VIII, 24, 3.
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Anaphè, requise pour 1000 drachmes en 428, bénéficia d'un statu quo. Tout se passe, dans ces deux cas, comme si le pharos de 430 et de 428 avait anticipé la hausse future ou, si l'on préfère, avait assimilé la situation économique et fiscale de ces deux îles et ne nécessitait donc pas une nouvelle et forte majoration. Je ne sais s'il faut généraliser à partir de ces deux seuls cas (on ne retrouve pas, pour l'ensemble des cités alliées, d'autres communautés entrées tardivement dans la Ligue de Délos et pour lesquelles nous aurions conservé le chiffre de leur contribution), mais on m'accordera que cela est troublant 1? . La diminution du tribut après la Paix de Nicias infirmerait-elle cette hypothèse de travail? Je ne le crois pas davantage. On a l'habitude de parler d'un retour au "tribut d'Aristide" pour caractériser le reflux des impositions suivantes. Chacun sait en fait que cette expression ne désigne guère qu'un retour aux prélèvements d'avant-guerre, ce "bon vieux temps" de toutes les périodes de l'Histoire. Cette idée peut être dans son ensemble acceptée, malgré l'état de délabrement des stèles portant témoignage des versements à Athèna postérieurs à 42211. Pour les îles, qui, par le hasard de la conservation des inscriptions, sont les mieux préservées, on constate quatre retours à l'identique: Chalkè, los, Myconos, Paros, auxquelles on doit ajouter Imbros et Carystos, dont le tribut reste inchangé de 433 à 418, et Lemnos, pour qui l'impôt exigé est en baisse par rapport à 431 18 • Par contre, nous avons plusieurs cas attestant une somme due supérieure à celle d'avant-guerre: Rhénée, dont le tribut était passé de 300 à 1000 drachmes, ne revient qu'à 500 drachmes. La somme de Sériphos est perdue mais elle est néanmoins supérieure au talent exigé dans les années 430 19 • Si Andros retourne presque à son pharos d'origine, il s'en faut cependant d'un talent (6, 15, 7 talents). Kéos, qui avait vu son tribut porté de 3 à 10 talents, voit un repli modéré avec 6 talents exigés, Naxos, imposée à 6 talents 4000 drachmes dans les années 430 puis à 15 talents en 425/4, voit son pharos s'abaisser à 7-9 drachmes 2o • Plus curieuse encore est la situation de Kythnos dont la contribution était passée de 3 à 6 talents en 425/4 et qui ne bénéficia pas du moindre allégement après 421. Certes, ces îles ne sont pas les seules à être dans ce cas puisqu'il faut leur adjoindre Lindos et Milet, mais il est notable d'y rencontrer six cités insulaires, dont quatre figurent parmi les plus riches et sont bien représentatives de c~tte aisance économique et financière que l'étude des chiffres du pharos de 440-430 avait permis de mettre en exergue21 • 17. Il est possible, à la lecture de Plutarque, Aristide, 24, 3, d'admettre que le phoros augmenta progressivement entre 430 et 426, avec, par exemple, 800 talents pour 428 : R. Meiggs, Athenian Empire, p. 325 ; 531-537. Mais, en ce qui concerne les exemples du secteur insulaire qui ont subsisté, il n'y a aucune augmentation entre 430 et 426. 18. Le cas de ces deux îles à clérouques est délicat. Peut-être cette diminution cache-t-elle une déduction de citoyens comme ce fut le cas pour Andros où le tribut passa de 12 à 6 talents en raison de l'envoi de clérouques : Plutarque, Périclès, Il,5 ; ATL l, 230-231 ; III, 267-268. R. Meiggs, Athenian. Empire, p. 121. Doit-on penser que les Athéniens des clérouquies étaient, comme leurs homologues de la métropole, astreints à l'eisphora, ce qui aurait dispensé l'île de l'augmentation du pho':~s ? 19. IG 13, 289 1. 11 : H ---. 20. Cette incertitude tient à l'état de la pierre elle-même qui n'a conservé que les premiers chiffres des prémices cqnsacrées à Athéna: IG 13,288: J1lHH --- (420/19 ou 419/8).
21, Lindos, taxée à 6 talents dans les années 430, est imposée à 12 talents en 418 ; Milet connaît une progression similaire (5 et 10 talents). Les exemples de Cyzique (9 à 20 talents en 425/4, 20 talents
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Alors, à moins de vouloir exhumer une fois de plus l'argument de la punition politique, argument qui ne sert qu'à masquer les insuffisances de notre documentation quand ce n'est pas de notre réflexion, force est de constater ou, si l'on préfère une nuance, de proposer à titre d'hypothèse, que le tribut de 425/4 n'avait peut-être pas la dimension exorbitante que l'on se plaît parfois à souligner, qu'il n'était en tout cas pas toujours exagéré en regard des potentialités des îles -le cas est sûr pour Kythnos - et que les sommes exigées avant la guerre ne reposaient plus sur des bases réelles. S'agissant des cités insulaires dont nous venons de parler, il est clair que la seconde moitié du ve siècle est un temps de prospérité, dont il est bien entendu difficile d'établir tenants et aboutissants. Déjà, pour Kythnos ou Kéos, dont on sait par ailleurs la vocation au moins en partie minière, on doit penser que les ressources du sous-sol entraient dans cette prospérité avérée. Pour Ténos, sans richesse minérale majeure, un tribut de 10 talents en 425/4 ne saurait s'expliquer que par des surplus agricoles ou artisanaux largement commercialisés. Bref, un phoros insulaire représentant presque le tiers de toute la somme prélevée dans les cinq secteurs de l'Empire, des cités comptant parmi les plus imposées, un tribut des dernières années enregistrant une relative aisance financière, voilà, je crois, les trois conclusions majeures qui me paraissent s'imposer à l'étude du tribut du ve siècle. Mais il n'est guère risqué d'aller plus loin. Que l'on prenne pour hypothèse de travail les chiffres de 478 ou ceux de 425, et dont nous venons de remarquer qu'ils montrent une certaine richesse, il ne s'agit là que d'une base. Les précédentes conclusions auxquelles nous avons abouti ont montré que le Ive siècle était celui de la mise en valeur générale des espaces insulaires, mise en valeur qui, sur le plan agricole et démographique, s'épanouissait dans la plupart des îles. Et on ne doit pas douter que si quelque Aristide avait, au milieu du Ive siècle, dû procéder à une estimation des potentialités fiscales des îles, à un timèma généralisé, il serait parvenu à des résultats bien plus élevés que ceux établis en 478. DES DOCUMENTS SUBJECTIFS: LE JUGEMENT DES CONTEMPORAINS
A côté des listes du tribut, qui offrent une vision plutôt prospère du monde insulaire, subsistent d'autres images véhiculées par la tradition littéraire et qui peuvent aller à l'encontre de la précédente, quand elles ne se contredisent pas entre elles. Il faut à présent tenter de comprendre les réflexions, laconiques le plus souvent, des auteurs anciens, les replacer dans le contexte de l'oeuvre et du temps. Rares sont les conclusions nuancées, qu'elles soient négatives ou positives, comme nous allons le voir. Les îles fortunées
Certaines îles sont réputées riches. On ne s'étonnera certes pas de voir, dans cette catégorie, les grandes îles de l'est égéen qui ne font pas partie de notre champ d'étude. Pourtant, il est intéressant de souligner ce qui fait la richesse de ces îles, comment elle est vécue et surtout de quand datent les témoignages qui l'attestent.
toujours en 42211) et de Sigée (1000 drachmes avant 431, un talent en 425/4 et en 42211) ne sont guère probants puisque l'imposition de 42211 ne prend pas en compte la diminution postérieure à la paix.
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Le cas le plus criant est celui de Rhodes. Il n'est à coup sOr pas nécessaire de rappeler ce qui fait la gloire de l'île dès la fin du IVo siècle. Très instructif en revanche est le fait que l'on ne trouve pas de commentaires dithyrambiques sur la prospérité de l'île avant le témoignage de Lycurgue qui affirme que, en 338, "les Rhodiens parcourent le monde entier pour leurs affaires"22. Sans doute, dès l'époque archaïque, les Rhodiens participent-ils au mouvement commercial qui les amène à Naucratis, mais si l'île est riche au VO siècle (en 431, le phoros total des trois cités de l'île est de 25 talents, ce qui est imposant mais inférieur à celui d'Egine), elle semble le devoir tant aux produits de son sol, les raisins secs et les figues sèches apparaissant sur les tables athéniennes au milieu d'autres marchandises venues de l'ensemble de la mer Egée et au-delà, qu'à ses capacités commerciales 23 . Toute la richesse de Rhodes est en réalité venue de sa puissance politique: son vin, dont on sait par le grand nombre de timbres amphoriques qu'il était distribué dans toutes les régions du monde grec, ne passait pourtant pas d'une qualité exceptionnelle24 . C'est la puissance politique de Rhodes et non point la qualité du vin qui en a assuré le succès, comme, si l'on me permet cette comparaison, l'attraction du modèle américain est à la base de la vogue du hamburger. A un degré moindre, c'est la conclusion à laquelle on doit parvenir pour les autres grandes îles de l'Egée. Chios, "la plus grasse île de la mer" est, avant sa défection de l'alliance athénienne en 412, le superbe pays que l'on a décrit plus haut faisant de leurs habitants "les plus riches des Grecs". Cette richesse s'appuie sur des realia agricoles, son vin bien sOr, dont nous avons déjà parlé, mais aussi une multitude de récoltes attestant la fertilité du soJ25. Il est évident que cette prospérité est, au VO siècle, tout autant fondée sur les qualités intrinsèques de l'île que sur son statut d'alliée privilégiée dans la Ligue de Délos. Samos est dans une situation semblable : l'île, de par sa taille, la variété de ses paysages, est riche et identifiée en ces termes26 . Mais elle doit autant sa puissance qui lui est reconnue à sa qualité d'alliée d'Athènes. En quelque sorte, celle-ci lui est concédée. 22. C. Léocrate, 15. 23. Hermippos, F. 63 Edmonds, cité par Athénée, l, 27 f. Voir aussi m, 75 e ; 80 c. 24. Le jugement le plus lapidaire, au milieu d'autres moins tranchés mais jamais enthousiastes, est celui d'Athénée, l, 32 e : "la plupart du temps, il ne vaut rien". 25. Hymne homo Apoll. 38. Thucydide, vm, 24, 3 ; 45, 4. Sur le vin, cf. supra, n. 66 p. 62. Huile: Aristote, Politique, l, Il, 9 1259 a. Figuiers et figues sont réputés (Athénée, m, 80 c), exportés en Egypte (PCZen. 59033, 12) et transplantés en Italie (Varron, Ec. Rur. 46, 1). L'île est bien boisée (Athénée, VI, 265 c ; Pline, HN V, 136) et les troupeaux nombreux et variés (Syll.3 986). 26. Les forêts antiques de Samos sont attestées par la toponymie mythique : Dryoussa (Héraclide Pont. FHG II, frag. X, 1), Kyparissia ou Pityoussa (Pline, HN V, 135) : R. Meiggs, Trees and Timber, p. 35. Du bois de charpente' de Samos est employé à Eleusis : lG 112 , 1672 1. 62-65, 93-94. Samos est bien arrosée pour Hymn. homo Apoll. 41 et Callimaque, Délos, 50. Le vin antique n'est pas de qualité, mais pour tout le reste c'est un pays béni (eùÔat!!Olv) aux dires de Strabon, XIV, 1, 15 ; l'huile est vantée par Eschyle, Perses, 882 (supra, n. 92 p. 66) et Antiphanès (F. 331 Edmonds = Athénée, l, 66 O. C'est une exportation essentielle vers l'Egypte au mo S. (PCZen. 56015,20,30) et toutes les productions agricoles sont connues: miel (Hérodote, m, 48), bétail (le paon, oiseau sacré d'Héra, est élevé à Samos: Athénée, XIV, 655 a). "Aethlios de Samos rappelle, dans le 5° livre de sa Chronique de Samos que la figue, le raisin, la nèfle, les pommes et les roses poussent deux fois dans l'année" : Athénée, XIV, 653 f. La pêche au thon enfin est connue par Archestratos, F. 34 ( = Athénée, VII, 301 O, C'est cette richesse qui fit d'elle un objet de convoitise: Strabon, XIV, 1, 15. Sur tout cela, cf. G. Shipley, Samos, p. 4-21.
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Cette puissance se marque à l'époque hellénistique par une volonté expansionniste dans les îles et nous avons déjà vu qu'au 111° siècle des Samiens s'installent à Minoa d'Amorgos tandis qu'au n°, des colons repeuplent l'antique cité icarienne d'Oinè 27 . On voit alors comment se juxtaposent, sur des notions concrètes de richesse, des éléments d'origine bien politique. Diodore de Sicile a bien résumé, au 1° siècle avant notre ère, la situation enviée de toutes ces îles de l'est égéen, de Lesbos jusqu'à Rhodes: "Ces îles, bien exposées aux vents, garantissaient à leurs habitants un air sain. Abondantes en toutes récoltes et opulentes, on les appela îles fortunées (j..laKaptat) [...] Ces îles furent bien plus riches que les îles voisines dans le passé comme elles le sont aujourd'hui encore. En effet, en raison de la fertilité du sol, de leur belle situation et de la bonté du climat, on les dénomma et elles sont véritablement des îles fortunées" 28 • L'éternité de la richesse qui se dégage de ces propos élogieux et parfois exagérés (un pédologue aurait quelque difficulté à admettre la fertilité du sol de Rhodes ... ) suffirait déjà à justifier l'élimination de ces îles de notre champ d'étude. C'est ce qui fait la différence essentielle avec les îles moyennes de l'Egée, celles que nos sources estiment cependant, de temps à autre, prospères. Cette aisance, là encore, est souvent d'ordre agricole et quelques îles sont présentées comme des pays de cocagne, telle Amorgos, qui "porte à foison du vin, de l'huile et des fruits", ou Péparéthos, "île du bon vin, des beaux arbres et qui porte du blé"29. Si ces jugements datent du IY O siècle, ils sont en quelque sorte intemporels puisqu'ils reposent sur des critères liés à la fertilité de la terre. Plus nombreux cependant sont les témoignages de richesse de certaines îles qui se réfèrent à un moment précis de l'histoire de la cité, en général l'époque archaïque ou le début des temps classiques. De la prospérité d'Egine, d'ordre, on le sait, commercial, car la bonne terre y était rare, tous les signes nous reportent avant 455 et sa soumission envers Athènes3o • Que Paros fût une île riche, certaines réflexions que nous avons faites à propos de son marbre, de son vin, ne nous permettent pas de douter. Il n'est pas indifférent, là non plus, de constater que la plupart des allusions à sa prospérité sont antérieures à son entrée dans la Confédération ou, quand elles lui sont postérieures, vivent sur le souvenir de son antique gloire: c'est le d'Ephore pour qui Paros, lors du siège qu'elle dut subir de la part de Miltiade, était "la plus riche et la plus importante des Cyclades" 31. Naxos, patrie du vin, dont Dionysos a fait la gloire, et qui aux Yllo-Ylo
27. supra, note 57 p. 21. 28. Diodore, V, 82. 29. Héraclide Pont. (FHG II, p. 217 frag. XIX (supra, n. 1 p. 144) ; id. FHG II, frag. XIII à propos de Péparéthos : aü'tll 'h vftaoç eüotv6ç ean, Kat eüôevôpoç Kat aî'tov cpÉpet. 30. Strabon, VIII, 6, 16. C'est d'ailleurs, selon lui, la pauvreté agricole de \'île qui a poussé les habitants à tirer leurs ressources du commerce. Diodore, XI, 70, 2 ; 78, 4 ; Plutarque, Thémistocle, 4, 2. Bacchylide, Epinik. XII, 4-6, parle de "l'heureuse île d'Egine". 31. Ephore, FGrHist. II A 70 F. 63 ; Cornélius Népos, Miltiade, 7 (cf. supra, n. 29 p. 98). Si Miltiade vient assiéger Paros (Hérodote, VI, 133-136), c'est pour en tirer de l'argent, preuve de sa richesse : H.1'. Wallinga, Ships and Sea Power, p. 145-148. D'ailleurs, les murailles de la cité sont en place et le succès Hnal des Pariens démontre leur solidité: D. Berranger, Paros archaïque, p. 86-88 ; D. Lanzillotta, Paro, p. 108-113. Paros demeure dans l'imaginaire grec le prototype de "l'île heureuse" comme la définit
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siècles, semble exercer quant à elle une thalassocratie en Egée, domination largement démontrée à Délos et sur laquelle il n'y a pas lieu de revenir. C'est pour cette période que nous avons les témoignages les plus clairs de sa prospérité32 . Mais la mémoire a pu en être conservée parce que les réalités économiques ne réfutaient pas pareille analyse. Naxos est décrite par le géographe Agathémère "la plus puissante des Cyclades, surnommée pour cela la petite Sicile"33. Et on ne prendra pas pour une contradiction le fait que Paros et Naxos, comme la plupart des cités insulaires au IVo siècle, ont des dettes à Délos: en 377, les Naxiens sont débiteurs de 4 talents vis-à-vis d'Apollon, les Pariens, de 12 talents34 . Au travers de ces exemples, on discerne certaines constantes. La prospérité d'une cité peut être assurée par des réalités intrinsèques tenant le plus souvent à la fertilité de son sol, ou plus exactement au soin apporté aux cultures car Amorgos, louée par Héraclide Pontique, n'est pas un modèle de fertilité primaire: à l'image des autres îles, la terre en est montagneuse, les plaines sont rares et petites. Par contre, pour accéder au rang de riche, une cité se doit de posséder les attributs de la puissance politique, et de préférence ceux de l'hégémonie : on devine là un lien assez fort entre les deux notions de richesse et de force. L'île de Cos nous en offrira une illustration en quelque sorte inversée. Sa richesse est vantée par de multiples sources, Théocrite, Callimaque, Strabon, Pline et Antoninus Liberalis, pour qui la terre de Cos fournissait des récoltes abondantes35 . L'idylle VII de Théocrite décrit un domaine à Cos en des termes qui valent d'être repris: "Au dessus de nous, nombre de peupliers et d'ormes frissonnaient et inclinaient leurs feuilles vers nos têtes; tout près, une eau sacrée tombait en murmurant d'un antre consacré aux Nymphes (...] Tout exhalait l'odeur de la belle saison opulente, l'odeur de la saison des fruits. Des poires à nos pieds, des pommes à nos côtés roulaient en abondance et des rameaux surchargés de prunes étaient affaissés jusqu'à terre. De la
au IVo siècle le poète comique Alexis (P. 22 Edmonds = Athénée, XV, 644 b), de "l'île divine" chantée par Pindare (F. 1) un siècle plus tôt. 32. La richesse de Naxos est décrite par Aristagoras pour inciter les Perses à la conquérir: "Naxos était une île d'une étendue restreinte mais par ailleurs belle et fertile, voisine de l'Ionie et renfermant beaucoup de biens et d'esclaves". Pour S. Vilatte, L'insularité dans la pensée grecque, p. 196, Hérodote "reprend tout un langage codifié par la tradition épique sur l'insularité", accentué sans doute par l'intérêt qu'Aristagoras avait à dépeindre l'île sous les plus beaux attraits. Pindare, dont les réminiscences archaïques ne sont plus à démontrer, parle de la "brillante Naxos", EV 8è NâSCJl Àt1tap~ (Pythiques, IV, 88). D'Un autre côté, l'étude des ateliers céramiques archaïques de Naxos et l'analyse par microscopie optique de J. Gautier, "Les Cyclades antiques. Caractérisation de centres de productions céramiques par microscopie optique", Recherches dans les Cyclades, p. 168-203, montre que la céramique naxienne, durant la période archaïque, est exportée dans les Cyclades: "Au rayonnement politique et culturel de \'île de N\lXOS dans le monde égéen pendant cette période, nous pouvons ajouter un élément nouveau, le rayonne,ment de ses ateliers céramiques qui préfigure, en quelque sorte, celui des ateliers athéniens" (p. 203). 33. GGM II, p. 486. 34. ID 98 ; R. Bogaert, Banques et banquiers, p. 128. 35. Callimaque, Délos, 165 : Cos, "autant que nulle autre grasse et riche en pâture". Pline, HN XXIX, 4, l'appelle "île des plus célèbres, des plus puissantes, consacrée à Esculape". Pour Strabon. elle est riche en fruits (eüKapn:oç) : XIV, 2, 19. Antoninus Liber. XV, 1.
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tête des jarres, on enleva un enduit de quatre ans"36. Théocrite est originaire de Cos et cela compte dans une étude serrée du passage. Il faut bien sûr faire jouer le contexte de l'oeuvre, contexte littéraire et historique en ce début de période hellénistique où le bucolique fait son apparition dans la poésie. Mais surtout, on soulignera deux choses : aucun de ces auteurs n'est antérieur à la seconde moitié du IVo siècle, c'est-à-dire antérieur au synoecisme de Cos en 366. D'autre part, le succès du culte d'Asclépios est bien attesté dorénavant et Pline fait un lien direct entre la richesse de l'île et sa consécration au dieu d'Epidaure. La puissance de Cos est d'ordre divin, sa richesse en est, d'une certaine manière, un contrepoint matériel. Avec l'étude des îles les plus pauvres - ou perçues ainsi - nous allons voir que cette idée d'un rapport presque consubstantiel entre opulence et puissance demeure, en négatif, valable.
Les îles miséreuses 1. Le thème de la petitesse géographique et de la faiblesse politique
* Sur un plan collectif "Sur le continent, les peuples des petites cités soumises peuvent se rassembler pour combattre ensemble. Mais les sujets d'une puissance maritime, étant des insulaires, ne peuvent rassembler leurs forces en un endroit. La mer les sépare et leurs maîtres règnent sur la mer. Et même si les insulaires parvenaient à se rassembler dans une seule île, ils mourraient de faim: [Xénophon], Const. Ath. II, 2.
* Sur un plan individuel Egine: "N'est-ce pas une honte pour nous que ces Eginètes, habitants d'une petite île (vllO'ov 1l11cpâv) et qui n'ont aucun sujet de s'enorgueillir (oùÔÈv Ëxov'taç Èq>' cp IlÉya xpn q>povEÎv ùu'tOÛÇ), n'aient pas encore aujourd'hui donné le droit de cité à Lampis, qui possède la plus grande entreprise de nauclère de toute la Grèce et qui a fait tous les travaux d'aménagement de leur ville et de leur port ?" : Démosthène, XXIII, 211.
leos: "La petite terre d'kos" (~paxû~<:oÀoç "hcoç) : Anth. Pal. VII, 2.
los: "La petite île (V1lO't8lOV) d'los" : Strabon, X, 5, 1.
Kéos: "Ce sont les grands Etats qui triomphent des petits par les armes et les réduisent en esclavage [...], comme les Athéniens pour les Kéiens" : Platon, Lois, 638 b.
36. Idylles, VII, 135-147.
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"Iulis, petite partie (IlÉpoÇ IltKpov) de l'île de Kéos, qui n'est pas grande (ou lleyaÀ.l1ç vlÎcrou)" : Plutarque, Démosthène, 1,2.
Kythnos et Siphnos : "Oui, si je vous savais semblable au peuple de Siphnos ou de Kythnos ou à quelques autres, ce serait le premier de ces conseils [s'occuper de ses propres affaires] que je vous donnerais; mais puisque vous êtes Athéniens, ce que je vous conseille, c'est d'organiser votre force" : Démosthène, XIII, 34. "Il valait mieux participer à la libération des Grecs sous le commandement des Kythniens et des Siphniens que de déserter ces glorieux combats" : Plutarque, de malign. Herod. 863 f.
Kythnos et Mélos : "Il est vraiment étrange que tous les combattants qui s'illustrèrent dans cette bataille (Platées) n'aient pas éprouvé de ressentiment en voyant inscrit sur les trophées le nom des Kythniens et des Méliens : Plutarque, de malign. Herod. 873 e.
Mélos: "Vous (les Méliens) êtes faibles et un seul mouvement de la balance règlera votre sort" : Thucydide, V, 103,2 (extrait du dialogue des Méliens). "J'ai du mal à admettre également que les citoyens d'un Etat minuscule (lltKpo1toÀ.heu), qui ne se sont distingués par aucune action d'éclat comme les Méliens, préfèrent l'honneur à la sécurité, qu'ils soient prêts à endurer des pires maux plutôt que d'être contraints à des vilenies: Denys d'Halicarnasse, Thucydide, VII, 41, 6. "Il nous est arrivé de commettre des fautes à propos d'îlots si petits et d'une importance telle (vl1crûÙpta 'tow':ù'ta Kat 'tl1À.tKœû'ta) que bien des Grecs ne les connaissent pas [...] Je répondais à ceux qui font reproche à notre patrie des malheurs de Mélos et de semblables petites villes ('tàç 'tIDV 'tOtoû'trov 1toÀ.txvirov crul-.l<popàç), non pas en soutenant qu'il n'y avait pas de fautes commises, mais en montrant que leurs amis avaient ruiné plus de villes et des villes plus grandes que nous ne l'avions fait" : Isocrate, XII, 70 ; 89.
Myconos: "Modeste Myconos" : Ovide, Métamorphoses, VII, 463. "Voisin myconien" : cette expression s'emploie pour souligner la mesquinerie et la petitesse et cela en raison de l'extrême petitesse (crlltKpo'tl1'ta) de l'île de Myconos : Suidas, s. V., MUK~vioç yehrov.
Péparéthos : "Si quelqu'un se lève pour donner un conseil au peuple d'Athènes ou de Péparéthos" : Platon, Premier Alcibiade, 16 d.
Pholégandros et Sikinos : "Pholégandrien ou Sikinite, au lieu d'être Athénien, ayant changé de patrie" : Plutarque, Praec. ger. reip. 813 f (propos attribué à Solon) ; cf. Diogène Laerce, 1,47.
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Sériphos: "J'ai épousé une Sériphienne, fille d'une famille bien plus importante que ne semble le comporter son pays" : Isocrate, XIX, 9 (plaidoirie d'un Siphnien devant un tribunal d'Egine). Cf. supra, p. 141-143. "C'est vrai, si j'étais de Sériphos, je ne serais pas devenu célèbre, mais toi non si tu étais Athénien" : Platon, République, 329 e (propos attribué à Thémistocle, mais chez Hérodote, VIII, 125, qui sert de référence à Platon, c'est l'îlot de Belbinè et non Sériphos qui fait la comparaison). "Petite Sériphos" : Ovide, Métamorphoses, V, 242. "Il étouffe, le malheureux, comme s'il était enfermé dans les rochers de Gyaros ou dans la petite Sériphos" : Juvénal, Satires, X, 170. "Paroles d'un Sériphien : à un Athénien qui le méprisait en raison de la petitesse de sa cité (lltKpo1toÀl'tEÎa), un Sériphien répliqua: pour moi, c'est ma patrie qui est méprisée, alors que toi tu es méprisé par la tienne" : Stobée, XXXIX, 29.
Siphnos: "Siphnos, surnommée l'osselet (àcr'tpâyaÀov) de Siphnos en raison de son insignifiance (btà 'tl,v Et>'tÉÀnav)" : Strabon, X, 5, 1, citant un poète inconnu; Eustathe, Corn. Denys Pér. 525, GGM II, p. 319. "Parmi les choses impossibles: si quelqu'un disait que les Siphniens ou les Maronites pouvaient prendre des résolutions concernant la domination de la Grèce, ou bien que la Pythie mentait" : Hermogène, II, 1, 106-109.
Ténédos : "Au cours du temps, en raison de leur faiblesse (imo àcr8EvEÎaç), les Ténédiens s'unirent avec les habitants d'Alexandrie de Troade, ville située sur le continent" : Pausanias, X, 14, 4. Ces réflexions sont riches d'enseignements et de diversité. Diversité chronologique tout d'abord puisque l'on y trouve des propos remontant à l'époque archaïque (paroles de Solon sur Pholégandros et Sikinos) aussi bien que des textes du 11° siècle ap. J.C. (Pausanias), voire tardifs (Stobée). Diversité géographique ensuite, puisque l'on voit que sont concernées toutes les régions insulaires de la mer Egée. Une constante demeure néanmoins: les îles de l'Egée étaient d'une grande faiblesse politique. Mais il est préférable, avant d'analyser en détail ces extraits, de voir un autre volet de l'infériorité des îles, celui de leur pauvreté intrinsèque. 2. Le thème de la pauvreté
* Sur un plan collectif "Les insulaires méritent notre pitié quand nous les voyons contraints par l'insuffisance de leur territoire de cultiver des montagnes, alors que les continentaux, parçe que leur terre est inépuisable, en laissent inculte la majeure partie et, de celle qu'ils cultivent, retirent une telle richesse" : Isocrate, IV, 132.
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"Parcours les déserts, les îles les plus sauvages, Skiathos et Sériphos, Gyaros et Cossyra" : Sénèque, Consolation à Helvia, VI, 6.
* Sur un plan individuel : Andros: "(Les Andriens répondirent qu'ils) étaient au plus haut point pauvres de terres et deux divinités qui ne peuvent rendre aucun service ne sortaient pas de leur île mais s'y tenaient toujours sans bouger, Pauvreté (IIeviTl) et Incapacité ('AIl'l1Xavi'l1) : Hérodote, VIII, 111 (réponse des Andriens aux menaces de Thémistocle qui, voulant faire payer les Andriens, leur avait dit qu'il venait accompagné de deux déesses, Persuasion (IIet9ô» et Contrainte ('AvaYKai'l1)37 : Hérodote, VIII, 111. "La belle terre qu'Andros, île peu fortunée, que je reçois en échange de la bienheureuse Italie, moi, Flaccus [...] Que signifie pareil changement ? Que dire de cet îlot (tllV v'I1criùa 'tau't11v 'ti
;) ? Le lieu de mon bannissement ou une nouvelle patrie? Un lieu de refuge ou un exil malheureux? Tombeau serait son nom plus exact" : Philon Alex. C. Flaccus, 157-159.
Gyaros: "La pauvre Gyaros" : Strabon, X, 5, 3 "L'île la plus sinistre" : Philon Alex. C. Flaccus, 151. "Gyaros : Antigone de Carystos dit que dans cette île, les rats dévorent le fer et que le poirier sauvage y est mortel" : Etienne Byz. s. v.
Gyaros et Kinaros : "Gyaros ou Kinaros, une île rebelle à la culture et à la végétation" : Plutarque, de exil. 602 c.
Kéos: "Oui, moi aussi, qui n'habite qu'un rocher (cr[K01t]eÂoç), je suis célèbre par mes exploits dans les jeux de la Grèce [...] Mes champs portent aussi quelques-uns de ces fruits de Dionysos, qui sont un don précieux pour la vie [...] Je n'ai pas de chevaux et j'ignore les pâturages [...] Renonce, ô mon coeur, au pays des cyprès, aux pâturages qui entourent l'Ida. Ce qui m'est échu est peu de chose, un taillis de chênes (9
37. "Jamais la Contrainte ne put triompher de l'Impuissance" (oùôallà yàp àô'UvaatT)ç àvâylO) Kpécrcrrov Ëq>'l» : Hérodote, VII, 172. Ainsi s'expriment les Thessaliens pour signifier aux Grecs qu'ils ne pouvaient être de leur côté s'ils ne les aidaient pas contre l'avancée de Xerxès..
zoo
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Myconos: "Les Myconiens, parce qu'ils étaient pauvres et habitaient une île misérable (Àunpàv vflcrov), étaient décriés pour leur collante âpreté au gain" : Athénée, l, 7 f.
Pholégandros : "Pholégandros, surnommée l'île de fer, tant son sol est dur" : Strabon, X, 5, 1
5, 3. Pholégandros
et
Siphnos :
"Iles désertées, fragments de continents, vous avez imité Siphnos et l'aride Pholégandros, infortunées (aÙX/lllP~V oÀÉyav8pov, 'tÀ1Î/lOVEÇ) : Anth. Pal. IX, 421.
Samothrace : "L'île que nous occupons est haute (1nl'l1À1Î) et rude ('tpaXEîa). Une faible partie de la terre est utilisée et peut être travaillée. La plus grande partie est en friche et l'île est petite" : Antiphon, F. 2 (Blass, 50). (Discours d'Antiphon pour les Samothraciens, à propos de leur pharos). Les premiers colons quittent Samothrace "à cause d'une terre ingrate et d'une mer déchaînée" 'tE Àunpq. Kat 8aÀâ't't1l àypiq,). Denys Halicar. Ant. rom. l, 61, 4.
(m
Sériphos : "L'île est en effet si pierreuse que les poètes comiques la prétendent eUe aussi changée en pierre par la Gorgone" : Strabon, X, 5, 9. "Si tu étais né à Sériphos et si tu n'avais jamais quitté l'île où tu avais été accoutumé à ne voir que des lièvres et des renards, à la description de lions et de panthères, tu te refuserais à croire en leur existence: Cicéron, de nat. deorum, l, 88.
Siphnos: "Siphniens : [Histoire des mines englouties par la vengeance d'Apollon, cf. chap. IV] "L'île tomba désormais dans une pauvreté insulaire et une gêne affreuse (dç nEviav Vllcrleo'tlK~V Kat ànopiav 8Elv1Îv)" : Suidas, s. v.
Skyros: "La rocailleuse Skyros" : Sophocle, Philoctète, 549. "Le kyanos est un oiseau qui aime les régions désertes et qui se plaît sur les sommets des montagnes et les ravins profonds. Il n'aime guère le continent ni les îles agréables, mais plutôt Skyros, terre tout à fait triste, stérile et vide d'hommes, et d'autres du même genre" (ayav Àunpà Kat ayovoç Kat àv8pômeov XllPEûoucra) : Elien, Anim. IV, 59. "Skyros doit son nom à l'aspect rude (crKÀllPÔV) de l'île et aux pierres (crKup&8EÇ) qui la recouvrent" : Eustathe, Cam. Denys Pér. 525, GGM II, p. 317. "Commandement de Skyros : cette expression se dit à propos de l'incapacité et d'un commandement sans intérêt, dans la mesure où c'est une terre ingrate et rocailleuse,
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et en raison de son indigence (nE'tpOOOTlÇ l'at Â:unpà l'at olà 'to1>'to nEvlXPci), Skyros n'est pas digne d'intérêt" : Suidas, s. v. apXTl Ll'upia (cf. Hésychius, ib.). Il n'est pas question, dans de tels exercices, d'espérer approcher l'exhaustivité mais l'échantillonnage est cependant déjà bien large et il nous permet de voir, au travers de ces deux thèmes complémentaires de la faiblesse et de la pauvreté, un certain nombre de faits compatibles avec les textes épigraphiques que j'ai exploités plus haut, mais encore d'autres sentences - le mot n'est pas trop fort - en contradiction parfaite avec eux. La cohérence entre les textes tient d'abord à la présence conjointe de certaines cités dans les deux thèmes, celui de la faiblesse et celui de la pauvreté, association assez commune à la pensée grecque: c'est le cas de Kythnos, Siphnos, Kéos, Sériphos, Myconos, Pholégandros considérées à la fois petites et pauvres par des textes différents et Suidas fait, à propos de Skyros, un lien direct entre ces deux thèmes. Mais il ne s'agit que d'une cohérence interne à ces types de textes. Car si l'on compare maintenant ces réflexions à la situation que nous livrent les listes du tribut du VO siècle, force est de constater que la contradiction est grande. Certes, pas pour toutes les cités. Pholégandros, avec ses 2000 drachmes en 425/4 et ses 1000 drachmes la paix revenue, peut, effectivement, être qualifiée de petite et de faible sans que l'on puisse se récrier. Pour Myconos et Sériphos, taxées à 1 talent avant la guerre et après la Paix de Nicias, avec une pointe à 2 talents en 425/4, le terme est déjà plus discutable. Et que dire de la présence simultanée dans ces deux groupes de Kythnos, Siphnos et Kéos dont nous avons montré, d'une part le pharos élevé qui leur était assigné, d'autre part leur maintien, après 421 pour Kythnos et Kéos, à un montant supérieur à celui d'avant 431 ? La remarque vaut aussi pour les cités qui n'apparaissent qu'une fois, soit dans la catégorie des faibles, soit dans celle des pauvres. A côté d'îles dont la comparaison avec les listes du tribut montre un évident parallélisme (Icos, 1500 drachmes de tribut avant 431, los 3000 drachmes, Pholégandros 2000 drachmes et Sikinos 1000 drachmes en 425/4), nous trouvons des îles qui ne correspondent à coup sOr pas à cette définition, ainsi Mélos, "faible" (mais qui est imposée pour 15 talents en 425/4), Andros et Samothrace, "pauvres" mais qui, curieusement, sont toutes deux requises en 425/4 pour ce montant de 15 talents, dont on aura quelque difficulté à admettre qu'il est le signe d'une pauvreté, fût-elle relative. Notre trouble, si l'on s'en tient aux réflexions antiques, est accentué par la mention de certaines cités, dans les deux camps opposés, celui des cités pauvres et faibles, et celui des cités riches. C'est le cas de Péparéthos, paradigme de l'impuissance pour Platon 38 , modèle de prospérité pour Héraclide Pontique. , Il va de soi, par conséquent, qu'il est impossible d'accepter les remarques des auteurs anciens sans les faire passer par le filtre de l'analyse, car les contradictions que l'on a relevées ne sont peut-être qu'apparentes. Le premier garde-fou que l'on doit poser concerne la date de rédaction de l'oeuvre. Gageons, après ce que nous avons dit sur l'appauvrissement de la Grèce en général et plus encore en particulier du monde insulaire à l'époque romaine, qu'il doit s'agir le plus souvent à cette époque de réflexions de 38. Cette interprétation de la phrase de Platon est combattue par Ph. Bruneau, BeH, Ill, 1987, p. 473· 474, qui préfère voir dans cette opposition une notion d'éloignement, parce que, dit-il, "Péparéthos ne fait nullement figure d'infime cité". Nous verrons infra que c'est la vision athénienne qui dicte sa loi.
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circonstance, vraies indubitablement à la période où le poète, le géographe, le moraliste écrivent, mais obsolètes dès lors que notre étude porte sur les seules périodes classique et hellénistique. C'est le cas pour les jugements des auteurs latins sur Sériphos - Cicéron, Juvénal, Ovide, Sénèque - que j'ai ailleurs analysés et où je renvoie 39 . L'ensemble des bons mots rapportés par Strabon à propos de Siphnos, Sériphos, Pholégandros ou los, les vers d'Antipater de Thessalonique repris dans l'Anthologie Palatine, les propos tranchés d'Elien sur Skyros et d'Hermogène sur Siphnos, s'inscrivent dans cette perspective historique d'îles désormais appauvries. La conclusion de Denys d'Halicarnasse, incapable de croire en un sentiment d'honneur de la part des Méliens parce que leurs ancêtres n'avaient rien fait de marquant ni de glorieux (il en oublie leur courageux engagement du côté grec en 480) et mettant pour cela en doute la véracité et la teneur du "dialogue mélien" rapporté par Thucydide, est très révélatrice des réalités insulaires de l'époque augustéenne. La phrase de Plutarque soulignant que la neutralité pendant les guerres médiques était plus condamnable que l'acceptation d'une hégémonie mélienne ou kythnienne, n'est, outre la figure de style, que le témoignage de l'aversion qui prévaut vis-à-vis des îles au lIa siècle après J.e. A la fin du n° siècle de notre ère, Philostrate, originaire de Lemnos, évoque, de façon plus subtile et touchante, le peu de cas que l'on faisait alors des îles de l'Egée : "Tout Lemnien que je suis, je considère aussi Imbros comme ma patrie et avec bienveillance, je les lie l'une à l'autre et moi-même aux deux ensemble"40. Que cette vision négative ait été renforcée sinon créée par la destruction de Délos41 , l'appauvrissement des îles de l'Egée et, en bout de course de cette décadence, par leur vocation d'exil impérial, voilà quelques évidences qui permettraient de moduler quelque peu l'impact de ces extraits, dans une perspective d'étude classique et hellénistique du monde insulaire. Toutefois, une telle conclusion, d'une certaine manière rassurante parce que fournissant une réponse bien datée, ne saurait être que partielle. En effet, on constate que bien des jugements négatifs, et les plus virulents d'entre eux, datent de l'époque classique, du Va ou du IV O siècle. Prenons en premier lieu le thème de la pauvreté. La phrase d'Isocrate, que j'ai déjà sollicitée à propos des terrasses de culture, établit une forme de vulgate de la pensée athénienne sur la pauvreté des îles - entendons, dans l'esprit athénien, des Cyclades. Il y a des caractères objectifs, susceptibles d'expliquer une telle conclusion, tels que, pour les îles les plus petites, des superficies réduites et des terroirs modestes en quantité et plus encore en qualité. Ainsi se justifient les arrêts définitifs portés à l'encontre de Pholégandros ou de Gyaros pour ne citer qu'elles, cette dernière aux époques hellénistique et romaine puisqu'elle n'existait politiquement pas aux temps classiques. Je pense en effet que les plus petites îles, celles qui, dans le tableau 3, occupent la première colonne, celles des plus modestes contribuables de la Ligue de Délos, doivent correspondre au schéma d'Isocrate de ces terres mises en valeur non sans difficulté. Mais il ne saurait être question d'accepter pour elles la description par Platon des petites îles dénudées, où la bonne terre est emportée dans la mer par les pluies violentes: peut-être cette phrase de Platon s'inscrit-elle déjà dans un processus de 39. ZPE 99, 1993, p. 165-183.
40. Lettres, 70. 41. Les textes relatifs au thème de l'ahandon de Délos ont été repris par Ph. Bruneau, BeH 92, 1968, p.691-693.
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dénigrement des îles en général, mais je pense qu'il faut plutôt voir là un modèle insulaire plus petit encore, celui des "îles à chèvres"42. Néanmoins, et quand bien même nous avons replacé à leur juste place les phrases d'Isocrate et de Platon, il reste beaucoup d'îles, décrites par les auteurs classiques sous les traits de la pauvreté extrême, qui n'offrent pas, si l'on examine les autres sources et en premier lieu les chiffres du tribut du y o siècle, une telle image. On remarque que certains des témoignages négatifs sur la prospérité de l'île, et les plus anciens, ont une origine insulaire. Premier exemple, celui de la pauvreté de Kéos, avouée par un Kéien et, pourrait-on dire, chantée par Pindare: il n'habite qu'un rocher à la végétation rare, avec quelques taillis de chênes, sans prairies, sans cyprès, bref il ne possède que "peu de choses". On hésite entre réalisme et pessimisme et sans doute y a-t-il des deux puisque le but avoué du péan, chanter la gloire de l'île, est atteint dès lors que cette gloire a été gagnée malgré un cadre général défavorable. D'une certaine manière, l'exploit n'en est que plus grand et le mérite en revient en priorité aux lois de la cité puisque Pindare ajoute que celle-ci ne connaît pas de stasis. Nous sommes là face, non pas à une pauvreté infamante, mais à une austérité voulue, ce qui, si l'on accepte cette interprétation, est loin de s'intégrer dans la réflexion d'Isocrate et de Platon sur la situation des îles. N'oublions pas que Pindare compose au milieu du y o siècle, c'est-àdire en un temps où la mise en valeur systématique de l'île en est à ses premiers balbutiements. Et que penser des propos d'Archiloque qui, dans un vers isolé - sorti donc de son contexte - et transmis par Athénée, conseille de "laisser Paros et ses fameuses figues et sa vie qu'il faut tirer de la mer"43, ou dit (F. 17) de Thasos qu'elle est "pelée telle le dos d'un âne" ? Pauvreté extrême de Paros pour A. Bonnard qui pense que "à l'époque d'Archiloque, Paros n'est qu'une île nue et chauve, comme il y en a beaucoup dans l'Egée avec des troupeaux de chèvres sur les rochers, quelques figuiers, quelques vignobles, de maigres céréales dans les bas-fonds, quelques villages de pêcheurs sur la côte44 ". D'autres estiment au contraire que "cette pacotille romantique est maintenant démonétisée "45. Il est sûr que la richesse de Paros à la fin de l'époque archaïque serait incompréhensible si l'on devait prendre le mot d'Archiloque au pied de la lettre et accepter la vision misérabiliste de Bonnard. Toutefois, c'était déjà le cas pour Kéos, il ne faut pas perdre de vue l'époque à laquelle nous ramène cette phrase d'Archiloque, le Yllo siècle, et peut-être ne doit-on pas juger la situation de Paros aux temps du haut-archaïsme avec celle que l'on appréhende au début du y o siècle. C'est un schéma différent qui s'offre à nous avec les cas d'Andros et de Samothrace, où le thème de la pauvreté se décline dans une atmosphère de guerre, réelle ou larvée. Andros, tout d'abord, est sous domination perse en 480 et, à ce titre, fournit des vaisseaux à la flotte de Darius46 . En représailles, une escadre grecque commandée par Thémistocle vient demander des comptes une fois le danger perse passé. Ce sont en fait 42. Platon, Critias, 111 d ; cf. supra, p. 40. ., 43. Archiloque, F. 105 (= Athénée, III, 76 c), traduction de D. Berranger, Paros archaïque, p. 154-155. A. Bonnard traduit, lui, "Laisse Paros, ses tristes figues ... " 44. A. Bonnard, Archiloque, Fragments (CUF), p. VI. 45. O. Reverdin, Entretiens sur l'Antiquité classique, Archiloque. Tome X, 1964, p. 77 ; D. Berranger, Paros archaïque, p. 156. 46. Eschyle, Perses, 887 ; Hérodote, VIII, 66.
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des exigences financières qui sont apportées par le stratège, et c'est dans cet esprit qu'il faut comprendre la réponse andrienne à la menace athénienne. D'autre part, cette réponse somme toute d'une grande banalité sur la pauvreté de la cité - la pauvreté de la Grèce est un topos face à la richesse et au luxe perses47 - est une reprise intégrale de vers d'Alcée: "Mal fâcheux que la Pauvreté, mal intolérable, qui abat grandement le peuple, en compagnie de sa soeur, l'Incapacité"48. Si cette réminiscence, qui ne saurait être fortuite, fait d'abord honneur à la culture lyrique des gens d'Andros, elle risque bien, d'un autre côté, de s'inscrire au rang de ces lieux communs qui parsèment la littérature grecque. Sans doute la forte participation des Andriens au mouvement de colonisation archaïque témoigne-t-elle, sous certaines conditions, et pour le VIIo siècle, de difficultés à vivre49 . Mais on ne sache pas que les problèmes perdurèrent. La taxation à 12 talents de l'île en 451/0, c'est-à-dire à sa première apparition dans les listes du tribut, fait de l'île l'un des tout premiers contribuables de la Ligue5o • Je crois alors qu'il serait aventureux de prendre en compte cette anecdote pour prouver la pauvreté de l'île. C'est encore sur un plan de pauvreté affichée mais suspecte qu'il faut étudier la situation de Samothrace. Les habitants qui, par la voix d'Antiphon, viennent se plaindre devant la Boulè en espérant un adoucissement de leur propre taxis phorou, peuvent mettre en avant les particularités géographiques de leur île, difficile à cultiver en raison de l'altitude, de la violence du vent et de la mer dans cette partie septentrionale de l'Egée. Cela n'est pas niable et le témoignage de Denys d'Halicarnasse, les conclusions des géographes actuels, permettent de défendre cette thèse 51 . Mais c'est oublier quelques données qui vont à l'encontre de cette vision dramatique: à la pointe occidentale de l'île, la culture des céréales et des oliviers a pu se développer sans grande difficulté à l'abri des grands vents dominants 52 • C'est oublier aussi la position avantageuse de l'île par rapport au continent, à sa pérée et au détroit de l'Hellespont tout proche. C'est oublier enfin les 6 talents versés par Samothrace à la Ligue avant 431 et les 15 talents exigés en 425/4, qui devaient bien reposer sur quelque réalité concrète. Que cette dernière se situât pour partie sur le continent, c'est bien possible, mais on se saurait croire qu'une autre partie n'existât point dans l'île même.
47. Hérodote, VII, 102, où Démarate présente les raisons de la force grecque: "La Grèce est de tout temps nourrie dans la pauvreté (tn 'EÂMiôt 7tEvi" J..lÈv aid lCOtE O'uvtpo
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Sur quels critères un auteur de l'Antiquité peut-il donc affirmer qu'une terre est pauvre? L'analyse des passages ci-dessus ne prête guère à confusion et c'est l'infertilité du sol qui est à la base de tout. Ainsi pense Isocrate, pour qui les Insulaires sont obligés de cultiver les montagnes. D'après Plutarque, Gyaros et Kinaros, les modèles des îlots égéens, sont rebelles à la culture ; Pholégandros est l'île de fer et Sériphos celle de la pierre, quand Samothrace est rude, Skyros stérile et Myconos misérable. Il semble bien que les conditions naturelles soient à la base de tout, du moins quand les îles n'ont pas pu, à l'instar d'Egine, s'affranchir de la pauvreté du sol par le commerce S3 • Pauvres, certes, mais pour quelles cultures ? Nous ne disposons pas de documents antiques sur les rendements agricoles, mais les chiffres du début du Xxo siècle pallient efficacement cette carence. A ce moment, l'agriculture grecque dans son ensemble, et si l'on excepte quelques terres du nord du pays où balbutie une agriculture moderne, demeure fidèle dans ses grandes lignes aux pratiques ancestrales. Sans doute, l'introduction de nouvelles cultures a-t-elle modifié quelques perspectives. Le tabac, le coton et le maïs pour les grandes cultures, la tomate et l'aubergine pour les légumes, certains arbres fruitiers (agrumes, abricotiers) ont fait leur apparition dans les îles mais pour l'essentiel, la trilogie méditerranéenne - céréales, vigne, oliviers - reste en place. On a déjà vu que les conditions prévalant alors ressemblaient, mutatis mutandis, à celles qui régnaient durant l'Antiquité. Je pense avoir montré plus haut la vigueur de la viticulture insulaire antique et il n'est pas nécessaire d'y insister de nouveau. Il est possible, voire probable, que la culture des oliviers et l'élevage des bovins, s'ils n'ont jamais été dans un état de déliquescence absolue, n'ont pas eu le rendement de terres mieux dotées. En contrepartie, nous avons répertorié les avantages des îles pour l'élevage du petit bétail. Mais c'est pour la production majeure, les céréales, que l'étude des rendements du début du Xxo siècle nous sera précieuse. Les chiffres en sont commodément rassemblés par A. Jardé pour l'année 192154 mais les statistiques ont été établies par nomes, ce qui nous oblige - les Sporades étant ainsi rattachées à la Thessalie, Thasos et Samothrace à la Macédoine - à réfléchir sur les seules Cyclades. On constate que cet archipel, avec un rendement de blé à l'hectare de 6,77 quintaux, se classe au 14° rang sur les 22 nomes que comptait la Grèce. Par contre, en ce qui concerne l'orge, les Cyclades, avec un rendement de 11,22 quintaux à l'hectare, se situent au 2° rang. Ces chiffres n'ont à coup sOr pas à être reportés intacts dans l'Antiquité, mais ils fournissent malgré tout un ordre d'idées révélateur d'une situation beaucoup plus nuancée que celle à laquelle on pouvait s'attendre à la lecture de ces extraits littéraires. On peut donc accepter le principe d'une inadéquation entre d'un côté la situation agricole et, au-delà, la situation économique des îles de l'Egée, de l'autre les remarques que les Anciens ont porté. Cette conclusion s'harmonise plutôt avec celle induite par l'étude du phoros de la Ligue de Délos. Mais, sauf à croire que les auteurs anciens se plaisaient à manier en permanence le paradoxe, voire à inventer des situations misérables là où elles n'existaient pas, nous ne saurions nous contenter d'un tel épilogue. Il nous faut comprendre une telle attitude, découvrir le cheminement d'une pensée qui a fini par admettre le principe d'une pauvreté insulaire, 1tEVta VllCHC1YtllCl1, élevée au rang de topos.
53. Strabon, VIII, 6, 16. 54. Les céréales. p. 203-204.
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C'est sans doute du côté de la faiblesse politique des cités de l'Egée que nous la trouverons car les îles, petites ou moyennes sont, dans le cadre d'une thalassocratie - et à partir du V O siècle, il n'en manquera pas pour imposer sa force - démunies de toute action politique. Déjà Homère disait du roi de Symè, Nirée, qu'il "n'a pas une grande puissance (àÀa1taôvôç) car il a peu de monde sous ses ordres", sur quoi renchérit Eustathe qui, commentant ce passage, écrit que "le poète dédaigne l'île parce qu'elle n'a pas une grande puissance (il reprend l'adjectif àÀa1taôvôç homérique) et que c'est une petite cité (Bpax{moÀtç)55. Le "Vieil Oligarque", du temps de la splendeur d'Athènes, a bien senti l'incapacité chronique des îles à secouer le joug athénien: parce que séparées les unes des autres, sous la coupe de la marine athénienne, elles n'ont d'autre possibilité que de succomber les armes à la main ou de les déposer. C'est bien ainsi que les Athéniens parlent et agissent à l'encontre des Méliens, en affirmant qu'il n'est pas question pour eux d'envisager "qu'un peuple insulaire en réchappe face aux maîtres de la mer, et un peuple plus faible que les autres"56. Alors, que les îles d'kos, los, Myconos, Pholégandros ou Sikinos soient qualifiées de "petites" par les auteurs antiques n'a rien de surprenant puisqu'elles le sont à tous les niveaux objectifs que nous pouvons observer, superficie, population, mise en valeur réduite attestée par le faible phoros demandé par Athènes. Plus surprenant est le cas des autres îles "moyennes", mais à première vue seulement. Car on remarque que, pour cette catégorie d'îles, le principe de la faiblesse est posé par les sources athéniennes, Hérodote, Thucydide, Isocrate, Platon, Démosthène, les fleurons de la littérature classique. On comprend alors que c'est la vision athénienne qui dicte sa loi ; c'est le point de vue du fort qui prévaut lorsque Thucydide fait dire aux hérauts athéniens que les Méliens sont faibles, quand Platon affirme sans sourciller que les grands Etats (Athènes) triomphent des petits (Kéos) par la force, quand Démosthène, méprisant, souligne que les citoyens de Siphnos et de Kythnos n'ont pas à s'occuper des affaires de la Grèce ou lorsque Démosthène laisse encore éclater son mépris à l'égard des Eginètes qui n'auraient "aucun sujet de s'enorgueillir". C'est pourquoi l'on ne doit pas s'étonner de voir le mot micropolites employé pour les citoyens de cités qui ne correspondent pas vraiment à l'image que l'on s'en fait, sauf lorsque l'on est Athénien ou bien que l'on a puisé son hellénisme aux bonnes sources de la rhétorique et de la pensée attiques. Nous en avons vu l'usage pour Sériphos et Mélos, mais on doit signaler encore qu'Eschine l'utilise pour désigner la position des Chalcidiens vis-à-vis des Athéniens 57 . Un dernier exemple de cette vision athénienne est rapporté par Plutarque. Selon lui, Euripide aurait composé en l'honneur d'Alcibiade un éloge, un enkômion, dans lequel il est dit que "la première condition du bonheur est d'appartenir à une ville célèbre"58. Les protestations d'un Plutarque - né à Chéronée - sont trop personnelles et intéressées pour pouvoir refléter une idée générale et elles accréditent au contraire l'idée qu'au 11° siècle après J.c. comme au V O siècle avant, c'est le schéma de pensée athénien qui est le modèle dominant. De fait, Athènes est, pour ses citoyens, l'antithèse absolue de la micropoliteia59 et le mépris s'exerce tout naturellement vers les cités soumises. 55. Homère, Wade, Il, 671 ; Eustathe, Com. Wade, ib. 56. Thucydide, V, 97. 57. Eschine, Ambassade, 120: "Les citoyens des petites cités craignaient la politique secrète des grands". 58. Plutarque, Démosthène, 1, 1. 59. Aristophane, Cavaliers, 817.
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Dédaigneuses, ces affirmations n'en étaient pas moins réalistes et on peut comprendre dès lors comment le thème de l'impuissance, de la pauvreté politique en quelque sorte, a emporté la décision: incapables de s'assurer une autonomie véritable, faciles à conquérir, estime-t-on un brin cynique à Athènes6o , les îles, au y o et au IYo siècles, ont représenté le contre-modèle politique absolu. Des conditions naturelles plus difficiles qu'ailleurs ont fait le reste, mêlant dans un ensemble répulsif les tares de l'impuissance et de la pauvreté. S'il est vrai que ce mépris affiché pour les insulaires n'est pas exclusif6 1, on constate que les îles ont été, plus que toutes les autres cités, les cibles privilégiées de l'ironie et des moqueries athéniennes, qui deviennent un lieu commun de la littérature. Je ne crois pas qu'il faille accorder un crédit démesuré au propos du Sériphien anonyme rapporté par Stobée, propos qui s'avère à ce point la contrepartie très exacte de la réplique de Thémistocle qu'il en est suspect; mais il illustre néanmoins bien l'idée que le mépris athénien pour les insulaires était devenu proverbial. L'attitude athénienne a servi de base à toute une tradition hellénistique: une scholie d'Aristophane peut sans sourciller expliquer que Ténos ne possède guère que des scorpions et des sycophantes62 et un fragment du Cynique Télès, qui vivait au 111° siècle, transmis par Stobée, montre que l'on pouvait reprocher à quelqu'un son origine, Cythère, Myconos ou Belbinè. Hérodote rappelle que l'on surnomme "lemnien" tout acte de cruauté évoquant les Pélasges qui peuplaient Lemnos avant les Athéniens, légitimant d'autant l'occupation athénienne. Etienne de Byzance, bon connaisseur de la tradition antique, signale que le verbe crt
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guerre de Troie et cette pauvreté, indispensable pour le scénario du drame, pouvait à bon droit être tenue pour mythique - en a cependant fourni la base des réflexions conjointes et parallèles d'Elien, Hésychius, Eustathe et Suidas, qui ignoraient tout de l'île. Il est possible que sur ces deux notions de pauvreté et d'impuissance soit venue se greffer une troisième que j'appellerais pauvreté culturelle sous toutes ses formes. Pendant qu'Athènes se parait de marbre, quelle île pouvait entrer en concurrence artistique ou intellectuelle ? Certes, cette remarque ne vaut pas que pour les cités insulaires : Athènes faisait la Grèce et les insulaires, les premiers peut-être, y affluèrent. Ion de Chios, Prodicos de Kéos, Polygnotos de Thasos au VO siècle, Scopas de Paros, Théophraste d'Erésos, le peintre Kydias de Kythnos au IVO siècle, doivent leur succès à leur passage ou leur installation à Athènes. Il n'est pas indifférent de comparer la destinée de ces hommes avec celle, antérieure à l'hégémonie culturelle athénienne, de Simonide ou de Bacchylide de Kéos, qui ne doivent pas leur célébrité à la cité d'Athèna. L'afflux des artistes, philosophes, poètes de toute la Grèce vers Athènes à partir de la seconde moitié du VO siècle, a amené les Athéniens à regarder les autres Grecs à la façon dont certains habitants d'une capitale moderne jugent avec la commisération voulue leurs concitoyens de la province. Que beaucoup de ces immigrés fussent des Insulaires ne faisait qu'accentuer l'idée d'une supériorité athénienne sur un monde égéen soumis. Les Athéniens ont alors d'une certaine manière construit la pauvreté de leurs alliés insulaires, en ont défini les contours d'abord politiques et y ont ajouté, volens nolens, tous les attributs concrets de cette pauvreté. Cette attitude dominatrice n'est pas l'apanage d'Athènes mais caractéristique de tout pouvoir hégémonique: le Milésien Phocylide, qui vivait au VIc siècle, désignait les habitants de Léros - île sous le contrôle de Milet - du qualificatif de "méchants"64. Pour en revenir à Athènes, les multiples témoignages négatifs d'époque romaine, outre qu'ils entérinent sur le plan littéraire une déchéance contemporaine, révèlent aussi un parti-pris pro-athénien, une appropriation des thèses classiques en vogue à Athènes, que la pauvreté impériale des îles ne fait qu'accréditer et rendre permanente et, pour tout dire, intemporelle et naturelle. On en arrive, en fin de parcours de toute la tradition hellénique, à Suidas, excellent dépositaire de la mémoire culturelle de l'Antiquité, pour qui Siphnos, une fois ses mines englouties par la mer, bras vengeur de la rancune apollinienne, est devenue un modèle de "pauvreté insulaire". S'il est vrai que le lexicographe n'a pas trouvé dans la littérature une expression si tranchée, on conviendra néanmoins qu'il pouvait puiser dans les écrits antérieurs de quoi alimenter pareille observation. De fait, à une prospérité archaïque se substitue, pour les îles de l'Egée, une soumission et, partant, une forme de pauvreté classique. J'ai déjà souligné qu'il y avait les plus grandes chances pour que les mines d'or et d'argent de Siphnos n'eussent pas été englouties par la mer ainsi que le veut la trop belle légende rapportée par Pausanias, mais qu'elles aient été contrôlées par les Athéniens, moins sous forme d'exploitation directe que par le biais du phoros. Ces îles ne sont pas pauvres pour autant car ce qui a fait leur prospérité, voire leur richesse, subsiste, et les chiffres élevés de leur tribut respectif sont là pour le rappeler. C'est sur le plan politique qu'elles ont été abaissées. Dans ces conditions, on comprend pourquoi Solon, le plus ancien des auteurs ayant dénigré la micropoliteia insulaire, choisit Pholégandros et Sikinos comme l'anti-paradigme 64. AÉptOt KaKo{ : Strabon, X, 5, 12; Eustathe, Corn. Denys Pér. 530.
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d'Athènes. Il s'agit en tous points de petites îles mais Solon n'aurait pu, à l'instar de Platon ou de Démosthène, prendre Siphnos ou Kéos pour illustrer sa métaphore, l'écart de puissance et de richesse entre Athènes et ces deux îles n'étant pas en ce temps-là assez flagrant pour servir d'opposition crédible. Nul risque, et cela à toutes les périodes, avec Pholégandros et Sikinos. Dans des cas inverses, pour Paros ou Naxos, le souvenir d'une gloire passée joint à l'évidence d'une prospérité agricole explique que le thème de la richesse soit récurrent dans les sources et les voyageurs modernes. Dans le cas de Siphnos, où la richesse ne fut que fugace, elle pouvait à bon droit passer pour mythique, et c'est ainsi que Démosthène au Ive siècle puis Strabon savent se gausser de l'insignifiance de l'île. Souvenir. Le grand mot est lâché. Car, sur la base des jugements antiques, toute la littérature de voyage moderne - qui fera l'objet des pages suivantes - a retrouvé, croyait-elle, une vérité millénaire. Mais il serait exagéré de charger les seuls auteurs modernes d'avoir emboîté le pas à toute la tradition athénocentrique du pouvoir et de la richesse. J'ai, dans un article encore récent, tenté de montrer comment s'était bâtie la légende noire de l'île de Sériphos - où de longues randonnées m'ont pourtant convaincu qu'elle n'était pas, et de loin, l'île la plus démunie de l'Archipel - légende noire née à Athènes dans la seconde moitié du ve siècle et dans laquelle l'humour des comiques a apporté sa touche d'ironie un peu lourde65 , amplifiée par la suite. Aux références que je présentai alors, je voudrais en ajouter une, qui m'avait échappée, et qui illustre bien la déviation intellectuelle prévalant à l'encontre de Sériphos. Il s'agit d'une épigramme funéraire de Rhénée66 : "Ce tombeau est celui de Pharnakès et de son parent Myron [...] d'Amisos. Ces naufragés, qui avaient échappé à la tempête de Borée, ce sont les épées des paysans (à:ypoiK:rov ÇupÉEO'cn) de l'île de Sériphos qui les firent périr". Le commentaire de l'éditeur s'inscrit dans cette logique, les marins en question ayant été "tués par des paysans sériphiens qui crurent avoir affaire à des pirates [la date conviendrait à cette hypothèse] ou qui, plus vraisemblablement, étaient des pilleurs d'épaves"67. S'il est impossible de croire à une invention totale de l'événement, on notera que pilleurs d'épaves ou naufrageurs ne sont pas une spécialité sériphienne68 et on comprendrait fort bien que cette version poétique de la mort de deux marins s'inscrivît dans une tradition séculaire de mépris pour Sériphos.
65. ZPE 99, 1993, p. 165-183. "Sériphos aux troupeaux abondants" se moque Cratinos, F. 212 Edmonds (21 i Kock).' Aristophane (F. 705 Edmonds) surnomme Sparte Sériphos en raison de la vie austère que les Spartiates menaient. Aristophane encore évoque comme motif possible d'une guerre entre Lacédémoniens et Athéniens le rapt, par les premiers, d'un petit chien à Sériphos (Achamiens, 542). 66. EAD XXX, 475, milieu 11° s. 67. ib. L. Robert, "Sur des inscriptions de Délos", Etudes déliennes, BCH Suppl. I, 1973, p. 470-471, insiste sur le massacre conscient et sur le sens d'agroikos, toujours péjoratif, de "rustre". Cela n'empêche cependant pas une épigramme, composée en mémoire d'un Abdéritain retrouvé noyé sur le rivage de Sériphos, de parler des "pieuses mains" qui ont recueilli le corps et lui ont assuré les honneurs funèbres: Antk. Pal. XIII, 12. 68. Dion Chrysostome, VII, 32, parle de naufrageurs en Eubée.
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LES ILES CHEZ LES VOYAGEURS: DE NOUVEAUX PARADOXES
A partir du Xvo siècle, les Occidentaux redécouvrent la Grèce. Les premiers voyageurs peuvent seuls connaître les derniers moments de l'Empire byzantin qui ne contrôlait d'ailleurs plus les îles. Les relations suivantes se déroulent dans un contexte d'occupation étrangère et, ce qui est sans doute plus important encore, dans le cadre de guerres presque permanentes: séquelles de l'occupation latine, présence vénitienne, avancées françaises et anglaises, sans oublier l'intrusion de pirates d'origine grecque, tel est le lot de la Grèce. Et comme ces arrivées successives se font par voie maritime, les îles de l'Egée sont de toutes les terres grecques les plus exposées aux bouleversements. Il faut toujours avoir en mémoire les divers éléments qui sont désormais le lot de l'Egée moderne: tout d'abord la très forte fiscalité ottomane69 , sur laquelle pouvaient venir se greffer d'autres prélèvements d'origine étrangère, à la frontière floue entre impositions sauvages et rançon70 • Cette taxation, qui absorbait la quasi-totalité des revenus tirés de la vente des surplus agricoles réalisés, empêchait aussi l'exploitation des mines. A Kimolos, plusieurs voyageurs soulignent que l'extraction de la terre dite cimolée et des mines d'argent n'était pas souhaitée par les habitants qui craignaient une main-mise turque et une imposition des plus lourdes, préférant ignorer ou feindre d'ignorer les richesses minérales qui dormaient dans le sous-sol de l'île71 . Terroir agricole mal exploité ensuite, en raison de l'inégale répartition des terres. Dans les îles petites et moyennes de l'Egée, l'occupation ottomane a toujours été intermittente : il n'y a pas de çiftlik, triple symbole .de l'aspect latifundiaire, d'une faible mise en valeur et de l'oppression étrangère. En contrepartie, il existe des metochia, ces dépendances des grands monastères, qui concentrent les terres les plus fertiles et cela depuis longtemps, le XO siècle au moins. A Sériphos, Pitton de Toum~fort décrit l'accaparement des zones les plus riches par les moines de Saint Michel Taxiarchos ; à Amorgos, le monastère de la Chozoviotissa est, avant et après l'Indépendance, le plus gros propriétaire de l'île ; à Myconos, le monastère de Tourliani, au centre de l'île, possède de grandes propriétés dans l'Ano Meria, la région agricole la plus fertile et ses troupeaux occupent l'îlot voisin de Tragonisi ; à Mélos, frappée par une véritable catastrophe économique et démographique dont l'origine pourrait être d'ordre géologique (accentuation des phénomènes volcaniques), seul le monastère d'Ayia Marina peut offrir à Guillaume Olivier un séjour agréable et une chère excellente72 • Il ne s'agit là que de quelques exemples pris au hasard dans la littérature de voyage. li y avait aussi de grandes 69. Exemple d'un jugement de C.S. Sonnini, Voyage en Grèce, II, p. 264, à propos de Siphnos : "L'île de Siphanto serait encore la plus riche de l'Archipel, si elle cessait d'être soumise à un gouvernement qui l'écrase de sa main de fer". De façon plus générale, sur la lourdeur de la fiscalité ottomane, B.J. Slot, Arcipelagus Turbatus, p. 267. 70. J. Thévenot, Relation d'un voyage fait au Levant, p. 27 : "Les habitants [de Kéos] payent de caradge [i.e. karaç] ou tribut tous les ans aux Turcs 3400 piastres et aux Vénitiens 2600 outre les avanies et voleries qu'on leur fait. Ce qui les ruine et oblige plusieurs d'abandonner leurs maisons et leur pays". 71. Choiseul-Gouffier, Voyage pittoresque de la Grèce, p. 8 ; G. Olivier, Voyage dans l'Empire oth'oman, l, p. 322-323 ; C.S. Sonnini, Voyage en Grèce, II, p. 36. 72. Sériphos : J. Pitton de Tournefort, Voyage du Levant, l, p. 214-215. Amorgos : ib. p. 271-279. Myconos : ib. p. 336. Mélos: G. Olivier, Voyage dans l'Empire othoman, l, p. 332-334.
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propriétés privées, tenues par des Grecs. Rien bien sûr qui, de près ou de loin, puisse approcher les immenses domaines d'un Benaki dans la région de Kalamata, mais toutes les relations du XVIIIo siècle évoquent un ou plusieurs personnages ayant acquis quelque puissance - et quelque fortune. C'est ainsi qu'un historien de Kéos, LN. Psyllas, rapporte une tradition selon laquelle le fondateur du monastère de Kastriani, au nord-est de l'île, un certain Nikolaos Yiakoumetos, possédait vers 1700 un troupeau de 4000 têtes 73 . En échange de quoi les relations nous présentent - le cas le plus net est celui de Sériphos - des paysans misérables. Etat de guerre chronique ensuite. Sans doute n'est-il pas indispensable de rappeler tout ce que la Grèce en général et les îles de la mer Egée en particulier ont subi, depuis les premières incursions latines au XIIIO siècle jusqu'à la guerre d'Indépendance au XIXO siècle. Les raids de Barberousse au XVIe siècle, les massacres de Psara, pour en être sans doute les plus célèbres et les plus emblématiques, n'en sont pas pour autant isolés. La guerre rosso-ottomane amena de véritables désastres à Paros, où l'armée russe avait établi son quartier général et la population, qui s'élevait à 6000 âmes au moins au début du XVIIIo siècle, s'effondra pour ne plus atteindre que 2000 habitants environ74 • Dépendant de cet état de guerre et approfondissant ses conséquences, la piraterie chronique, plus ou moins organisée par certains belligérants, un peu à l'image de la piraterie étolienne encouragée par Philippe V à la fin du IIIo siècle, joue un rôle essentiel dans la situation des îles de l'Egée. C'est ainsi que Choiseul-Gouffier, abordant à Sikinos, est chassé à coups de fusil, ou qu'Olivier est accueilli à Kimolos sous la menace des armes par des habitants qui croyaient à un retour des pirates75. Couronnant le tout, les épidémies se propagent vite à l'intérieur de populations affaiblies. A Kythnos, au milieu du XVIIIo siècle, l'Anglais Lord Charlemont découvre une population très réduite, décimée par une "peste" qui avait fauché l'île quelques années auparavant76 • Cette situation n'est pas sans rappeler le contexte qui prévaut dans les îles de l'Egée à partir de la fin du IIIO siècle, à l'exception de la fiscalité dont il est impossible de dire si elle était plus appuyée qu'à l'époque athénienne. Pour le reste, on notera les similitudes des situations entre la période IIo - 1° siècles avant notre ère et la période 1300 - 1800 en ce qui concerne l'état de guerre et les destructions qui l'accompagnent (les sacs successifs de Délos ont de multiples correspondants à l'époque moderne), la piraterie dont il n'est guère nécessaire de souligner les méfaits aux deux périodes considérées mais qu'il convient tout autant, nous l'avons remarqué dans un chapitre précédent, de ne pas exagérer - et les diminutions drastiques de la population, voire sa presque disparition. Le destin de Délos et de Rhénée, là encore, est comparable à plusieurs cas connus aux XVoXVIIIO siècles, Paros, dont nous venons de parler, ou Sériphos, qui jusqu'à la fin du XVIIIo siècle, ne put jamais passer le cap des mille habitants77 • Les grandes propriétés dont nous voyons le développement - à l'échelle insulaire bien entendu - apanages, on l'a 73. 'Imop{a rfiç vJ]aov Kéaç, p. 192. . .. 74. J. Pitton de Tournefort, Relation d'un voyage du Levant, J, p. 242 ; Pasch·di Krienen, Breve Descrizione, p. 118-125 ; C.S. Sonnini, Voyage en Grèce, II, p. 272-273. G. Olivier, Voyage dans l'Empire othoman, J, p. 315. 75. Voyage pittoresque de la Grèce, p. 17 ; G. Olivier, Voyage dans l'Empire othoman, J, p. 321-322. 76. W.B. Stanford - E.l. Finopoulos, The travels of Lord Charlemont, p. 102-103. 77. Pasch di Krienen, Breve descrizione, p. 105; L. Ross, Reisen, J, p. 134-135.
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dit, des notables locaux et surtout des grands monastères, ne sont pas sans rappeler la création progressive, à la fin de l'époque hellénistique, de vastes domaines. A l'inverse, au XIXo siècle, la guerre n'existe plus, entraînant la fin progressive de la piraterie ; les terres des grandes propriétés monastiques et celles des notables ont pu être partagées. Sans doute, le rôle du clergé dans le soulèvement de 1821 a-t-il placé l'Eglise grecque dans une position de force, que l'on songe à l'opportune découverte de l'icône miraculeuse en 1822, qui fait de Ténos l'équivalent contemporain de ce que put être Délos antique, ou à l'école de Siphnos, tenue par les religieux et d'où sont issus plusieurs des combattants et des officiers de l'armée qui y puisèrent leur idéal d'indépendance. C'est la raison pour laquelle les moines de la Chozoviotissa d'Amorgos ont pu conserver de très fortes positions tant dans l'île que dans les îles et îlots voisins, puisque Bent écrit que "it is the wealthiest convent in Greece next to Megaspelaion, having aIl the richest lands in Amorgos, and the neighbouring islands of Skinoussa and Karos belong exclusively to it, besides possessions in Crete, in the Turkish islands and elsewhere" ; l'expropriation réelle n'eut lieu qu'en 195278 . Néanmoins, dans certaines îles, c'est le cas de Kéos, les terres des monastères se réduisent, par vente ou par location des terres 79 • La loi de 1835 sur la dotation de terres, même si elle ne fut que peu appliquée, détermina l'évolution, et le système du voli, droit de propriété éminente sur le sol - en général de grandes superficies - détenu par un archôn, disparut. D'une façon ou d'une autre, que ce soit par un processus de redistribution, par défrichement de terres incultes, la petite propriété réapparaît et elle est désormais plus présente encore dans les îles que sur le continent ; les campagnes retrouvent une activité perdue et un habitat permanent. D'une certaine manière, on devine, au milieu du XIXo siècle, dans les îles plus que partout ailleurs en Grèce, une répétition générale à échelle réduite des réformes menées après la Première Guerre Mondiale par Vénizélos. Dans ces conditions, les relations postérieures à la Guerre d'Indépendance ont toutes les chances de donner une image de la vie dans les îles qui s'approche davantage de la période allant du VO à la fin du 111° siècles avant notre ère. Tous ces faits doivent intervenir pour une bonne lecture de la littérature de voyage. Privilégier une époque dans ce type de sources, c'est courir le risque de s'enfermer dans la période antique qui lui correspond le mieux. Mais ce n'est pas le seul danger qu'il convient de surmonter. L'oeil du voyageur est rarement objectif. Venir en Grèce au XVlIIo siècle, c'est opérer une sorte de pèlerinage vers les origines de la civilisation occidentale: autant dire que les auteurs sont le plus souvent férus de culture classique et que le choc est dur entre l'image qu'ils se font de l'Antiquité, image livresque mâtinée des rêveries de l'abbé Barthélémy et de son jeune Anacharsis, et la réalité. Les îles, dont on a vu qu'elles possédaient un biotope sans doute plus difficile que celui du continent mais dont les ingratitudes avaient pu être compensées par un travail des plus opiniâtres parce que la population alors nombreuse permettait et nécessitait un labeur de tous les instants, les îles donc, dès lors que les conditions indispensables à leur épanouissement ne sont pas réunies, représentent l'archétype de la pauvreté. Le lien avec les propos de certains auteurs classiques que nous avons analysés plus haut s'explique désormais et c'est une pauvreté éternelle que les voyageurs retrouvent dans les îles de 78. J.T. Bent, The Cyclades, p. 474 ; E. Kolodny, Chom d'Amorgos, p. 37-43. 79. T.M. Whitelaw, "Recent Rural Settlement", Northern Keos, n. 5 p. 364.
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l'Egée, par contraste avec la flamboyante beauté des monuments de l'Acropole, les réflexions antiques sur Sériphos suffisant dans ces conditions à expliquer l'infertilité de l'île. Mais ce n'est pas la pauvreté seule qui est retrouvée. Le mépris est également au rendez-vous: Pitton de Tournefort, dont l'oeuvre demeure pourtant un des modèles de ce genre de littérature, ne craint pas d'écrire que "[les Sériphiens] sont aussi fainéants et méprisables que leurs ancêtres" ; c'est encore le révérend J.T. Bent, qui voyage à la fin du XIX o siècle, et qui, en évoquant les Sériphiens, admet "the usual sharp-wittedness of their race"80. C'est donc tout naturellement, qu'à l'image des sentences antiques sur Sériphos et Pholégandros, la littérature du XIX o siècle se répand en bons mots, comme celui de l'acide Edmond About, pour qui Patmos - où il n'a bien sOr jamais mis les pieds - est "une île sauvage où il ne pousse que des apocalypses"81. On ne négligera pas non plus l'origine géographique des voyageurs, l'Europe occidentale la plupart du temps. Un homme habitué aux vertes prairies du Pays de Galles ou de la Normandie aura beaucoup de mal à imaginer dans les bovins de la Grèce égéenne autre chose que des animaux étiques - ce qu'ils ne sont pas toujours - et dans les pâturages de la phrygana une nourriture acceptable. Il n'y a guère que Pitton de Tournefort, botaniste de formation et Provençal de surcroît, pour ne pas s'étonner du cheptel insulaire et de son alimentation. Quant à l'aspect brOlé du paysage, il est d'autant plus dramatisé que le séjour se déroule à la fin de l'été, donnant une impression de stérilité absolue et faisant oublier qu'au printemps, "les îles sont vertes comme l'Irlande" ou qu'en hiver l'aspect de la plaine littorale bien entretenue de los (Kato Kambos) "is as green as in an English valley"82. Faut-il s'étonner de ce que Choiseul-Gouffier dise de Kimolos : "Je n'ai jamais vu de séjour plus propre que cette île à inspirer le dégoût et la tristesse. Couverte de rochers qui laissent à peine pousser quelques arbres, la terre n'y présente jamais de verdure" ? Doit-on être surpris des propos de Sonnini à Anaphè où "tout s'y ressent de la misère insulaire" ou de ceux de Bent à Kythnos, île dans laquelle il avoue avoir "so much difficulty in going through the necessary compliments of admiration as when the demarch took us over his town. Nothing will grow near it"83 ? Ce type de comportement est bien analysé par Chateaubriand, dans son Itinéraire de Paris à Jérusalem: "Toutes ces îles si riantes autrefois, ou peut-être si embellies par l'imagination des poètes, n'offrent aujourd'hui que des côtes désolées et arides. De tristes villages s'élèvent en pain de sucre sur des rochers ; ils sont dominés par des châteaux plus tristes encore, et quelquefois environnés d'une double ou triple enceinte de murailles : on y vit dans la frayeur
80, Voyage du Levant, l, p. 215-216. The Cyclades, p. 3. 81, La Grèce contemporaine. Edité par J. Tucoo-Chala, Paris, 1996, p. 9. 82. G. Rougemont, JS 1990, p. 203 ; J.T. Bent, The Cyclades, p. 151. Voir la belle et édifiante remarque de R. Saulger, Histoire nouvelle des anciens ducs et autres souverains de l'Archipel, p. 358 : "C'est dans l'Archipel qu'il faut aller pour voir le printemps dans toute sa beauté". 83, Choiseul-Gouffier, Voyage pittoresque de la Grèce, p. 8 ; C.S. Sonnini, Voyage en Grèce, I, p. 304 ; J.T. Bent, The Cyclades, I, p. 432. A cette perception du monde insulaire par J.T. Bent, peut se rattacher la vision qui se dégage des nombreux articles de H. Hauttecoeur, qui ne semble pas avoir bien compris les impératifs de l'agriculture égéenne.
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perpétuelle des Turcs et des pirates. Comme ces villages fortifiés tombent cependant en ruine, ils font naître à la fois, dans l'esprit du voyageur, l'idée de toutes les misères"84. A l'exception de Bent qui décrit le monde insulaire sous un jour très noir, passant le plus clair de son temps à narrer les peurs et les superstitions des habitants et dont le travail possède aujourd'hui un intérêt avant tout ethnologique, et de quelques autres trop subordonnés aux sources anciennes 85 , les relations les plus négatives sur le monde insulaire datent des années précédant la guerre d'Indépendance. Compte tenu de ce que nous avons dit sur les correspondances entre ce monde antérieur au XIXo siècle et les îles égéennes aux débuts de l'occupation romaine - guerres, piraterie, concentration de la propriété foncière - il n'y a pas lieu de s'étonner d'une telle vision du monde. Mais puisque le cadre chronologique de cette étude est le monde aux temps classiques et hellénistiques, il est normal de privilégier les sources postérieures à 1830. Le changement, sans être radical, est bien perceptible. L'ouvrage essentiel de cette période est celui de Ross, qui analyse chaque île dans une période où la population est en pleine croissance, sans se soucier des réflexions antiques défavorables et surtout capable de les critiquer ouvertement. Le meilleur exemple de la démarche de Ross, c'est sans doute à Pholégandros qu'on le trouvera. Pholégandros, l'une des plus pauvres de l'Archipel pour les Anciens - et les voyageurs modernes, bien sûr86 . Ross explique cette critique systématique de l'île: "Die ganze Westhtilfte (die sogennante Ano Meria) besteht aus stark verwittertem Thon und Glimmerschiefer, und ist fruchtbar und wohl angebaut. Sie schneidet sich scharf von breiten, aus dürren Kalk - und Marmorfelsen bestehenden OsthaIfte ab, und da auf dieser die alte Stadt nebst dem eine Stunde entfernten Hafen lag, flüchtige Besucher also nur die Schattenseite der Insel sahen, so mogen hieraus die so ungünstigen Urtheile der Alten entstanden seyn. Auch Tournefort kam nicht über die Kalkfelsen hinaus". Pholégandros était-elle donc pauvre en 1840, selon les critères du temps? Les lignes suivantes de Ross indiquent bien que telle n'est pas sa conclusion: "Sie ztihlt gegen anderthalb tausend Einwohner, die von dem Absatz ihrer überflüssigen Producte und Getreide und Schlachtvieh nach der reichen und vieler Einfuhr bedürftigen Thera recht wohlleben"87. Cette analyse contraste avec la vision misérabiliste offerte par les relations précédentes. Dans ces contradictions, plusieurs choses ont pu jouer, qui se sont 84. 1811, page 916-917 dans l'Edition de La Pléiade. 85. Je pense notamment à L. Lacroix, Les îles de la Grèce, dont les propos sur Sériphos (p. 472, "une des plus misérables [îles] de l'Archipel"), sur Syros surtout (p. 447) où, commentant les vers d'Homère sur la fertilité poétique de l'île et les comparant avec "sa stérilité actuelle", il considère que celle-ci est "un effet de l'incurie des hommes et du temps: trop de raisons nous en rendent compte pour qu'on se croit autorisé à taxer Homère d'inexactitude". 86. J. Thévenot, Relation d'un voyage fait au Levant, p. 201 note bien que les Pholégandriens "vivent assez bien, ayant de fort bon pain, de volailles, des moutons et d'autres choses nécessaires". Mais les autres témoignages s'arrêtent au mot d'Aratos rapporté par Strabon: "pays rude et raboteux" pour Dapper, Description, p. 384; "île pierreuse, sèche et pelée" pour Tournefort, Voyage du Levant, 1. p. 308. même s'il avoue que "l'on y recueille assez de blé et de vin pour l'usage des habitants". Le plus significatif des ces jugements emplis d'a priori est celui de Choiseul-Gouffier qui ne fait que passer à Pholégandros, parce que·"des montagnes escarpées en défendent l'abord; on l'appelait autrefois île de fer et je savais d'ailleurs que l'intérieur n'offre rien qui dût m'engager à descendre" (Voyage pittoresque de la Grèce, p. 17). 87. Reisen, l, p. 147.
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renforcées mutuellement. Un élément chronologique tout d'abord puisque les îles connaissent, nous l'avons déjà dit, une renaissance économique et sociale dans le second tiers du XIXO siècle, réussite qui oblitère le contenu des sources antiques, lesquelles pouvaient, à l'inverse, paraître plus réalistes aux voyageurs antérieurs, qui évoluaient dans un contexte historique défavorable aux îles de l'Egée et dans un contexte culturel très révérencieux vis-à-vis des textes anciens. Elément géographique ensuite : l'opposition est en effet très vive entre les deux parties de l'île de Pholégandros, l'est, domaine de la phrygana et de l'élevage extensif, sans le moindre arbre, avec sa haute falaise de plus de deux cents mètres d'altitude qui plonge dans la mer, donnant l'illusion, pour qui arrive de Mélos, d'une barrière infranchissable, et l'ouest, où la prédominance des roches schisteuses permet, par le jeu de terrasses encore bien entretenues, un environnement plus verdoyant et plus productif8 8 • Cette remarque, faite par tous les voyageurs à la suite de Ross, n'a pas à être remise en cause à l'heure actuelle. Mais on ne saurait aller trop loin dans cette voie sans prendre le risque de se couper d'un certain nombre de réalités, au premier desquelles le phoros très modeste exigé par Athènes. C'est vrai que l'on doit faire intervenir l'époque -le VO siècle - auquel ces chiffres se rapportent: nul doute qu'à ce moment, Pholégandros, Sikinos, Anaphè ou d'autres îles de nature équivalente, n'abritait qu'une faible population qui a crO au siècle suivant à l'image de ses voisines cycladiques. Autant dire que la nécessité de mettre en valeur des terres n'était guère ressentie par des insulaires trop peu nombreux pour se livrer à pareille tâche. Ces îles produisaient sans doute tout ce dont elles avaient besoin et ce qu'une vie rurale fondée sur la xèrophagia, la frugalité, demandait. Mais sans jamais avoir la possibilité de dégager des surplus suffisants pour entrer dans les circuits commerciaux et se développer. Autarciques, au sens où Aristophane l'entendait, ces îles l'étaient, mais on devine la modestie induite par cette autarcie. La micro-insularité, qui fait intervenir une faible surface cultivable/cultivée et une population réduite pose, on le voit, un certain nombre de problèmes spécifiques. On ne saurait cependant se servir du modèle de ces petites îles pour généraliser la situation insulaire dans l'Antiquité. Que Sikinos n'eût rien à voir avec Naxos, nul n'en a jamais douté. Mais peut-être exista-t-il quelques tentations pour admettre que Sériphos ou Kythnos n'étaient pas très éloignées de la première nommée: sans doute est-ce là l'origine d'un évident processus d'amalgame qui prit corps dans l'Antiquité, et que les voyageurs reprirent avec un bel ensemble. En décrivant, avec toutes les nuances voulues, la réalité de la situation dans ces îles mineures, Ross a montré d'une part que ces îles n'étaient pas l'enfer complaisamment étalé, mais aussi tout ce qui les différenciait d'unités insulaires plus grandes. Doit-on, par voie de conséquence, être lecteur d'un seul livre - Ross - ou à tout le moins de la seule littérature du XIXo siècle? Cela n'aurait guère de sens, en écartant toute la littérature antérieure, de se priver d'une telle quantité de relations fort utiles à divers titres. Mais il ne faut sans doute pas non plus les admettre en guise de vérité absolue ni en 88. Tel est bien le constat de J.T. Bent, The Cyclades, p. 203, d'A. Philippson, Die griechischen Landshaften, IV, p. 138, du Geographical Handbook, III, p. 470: "Springs are more abundant here (dans la partie occidentale) and good harvests are obtained from the terraced hillsides". Voir enfin l'étude géologique de l'île par S. Verginis, "Beitrage zur Geomorphologie der Inseln Folegandros und Sikinos", p.330-350.
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déduire, en les ajoutant aux jugements antiques négatifs dont nous avons vu les tenants et les aboutissants, l'image d'une indigence inscrite dans les impératifs géographiques. Les a priori modernes étant fondés, pour partie sur des conditions historiques spécifiques dont on a parfois du mal à se dégager, pour partie sur des méconnaissances climatiques et agronomiques, pour partie enfin sur une excellente compréhension des textes anciens et une fidélité absolue accordée à leurs auteurs, les utiliser pour conforter ces derniers ou se livrer à l'opération inverse ne peut aboutir qu'à une impasse.
CONCLUSION Je ne voudrais pas, au moment de clore ce livre, laisser une impression déformée de l'aire géographique que je me suis efforcé d'étudier, offrir par là une vision idyllique de ce monde insulaire de l'Egée, et reprendre ainsi à mon compte le bucolique de Théocrite à propos de Cos. Mais, le balancier étant, selon mon avis, parti trop loin dans un sens, celui d'une thèse misérabiliste, j'ai peut-être par moments fait des efforts un peu appuyés pour le renvoyer dans l'autre. Sans doute est-il l'heure de trouver le point d'équilibre le plus juste possible. Ce point d'équilibre, pour être atteint, et j'espère l'avoir démontré, ne doit pas faire abstraction des éléments chronologiques, du contexte historique dans lequel ont évolué ces îles. En effet, il me paraît fallacieux d'imaginer que l'immuabilité du cadre géographique sur une grande échelle a généré celle de la vie insulaire. Celle-ci n'est pas la même aux différentes époques de l'histoire de la Grèce, et je ne saurais trop insister une fois encore sur les spécificités de la période concernée, car il est avéré que l'arrivée des Romains en mer Egée au tournant des IIIo et IIo siècles a transformé profondément les conditions générales de circulation des personnes et des biens, de la propriété du sol et donc l'ensemble des structures sociales. Dans cette optique, si la peinture des îles de l'Egée que je propose apparaît un peu adoucie, c'est certes parce que, pour les raisons que je viens d'invoquer, j'ai tenu à présenter avant tout les éléments à décharge, mais c'est aussi parce que, de 500 à 200 av. J.C. environ, ceux-ci me semblent l'avoir emporté sur les éléments négatifs. On objectera que les conditions historiques ont été les mêmes pour tous les Grecs. Ce n'est vrai qu'en partie, les guerres, amenant des déprédations répétées en Grèce, ayant touché, pour l'époque considérée, davantage le continent que les îles. Mais là n'est pas le plus important, qui se situe dans les spécificités géographiques de l'espace insulaire, plus prompt à réagir aux aspects positifs ou aux aspects négatifs : un temps de prospérité assez lo'ng à partir du début du VO siècle, après l'occupation perse qui s'est déroulée dans des conditions d'installation souvent dramatiques, a débouché au siècle suivant sur une expansion démographique à laquelle les insulaires ont su répondre par la double solution agricole (mise en terrasses des versants des collines et des montagnes) et commerciale (jamais les îles ne se tournèrent plus vers la mer qu'à ce moment-là) à défaut d'avoir choisi, à l'instar de l'époque archaïque, la voie de l'émigration. Cette solution a permis de nourrir une population abondante, elle-même nécessaire pour assurer les travaux des champs, plus exigeants en main d'oeuvre que sur le continent. Mais ces îles devenues populeuses étaient désormais fragilisées par l'impérieuse nécessité d'une situation
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générale favorable aux échanges pour assurer les exportations indispensables à l'achat de certains biens parfois déficitaires, d'une atmosphère pacifique, sans prélèvement exagéré de la piraterie par exemple. Ces trois siècles possèdent, pour les îles, une réelle cohérence économique et sociale. Certes, l'histoire politique, la "grande histoire", touche la mer Egée et ses îles, mais elle ne paraît pas remettre en cause en profondeur les grandes tendances mises en place dès le début du V O siècle: affirmation de la petite propriété, développement démographique, ouverture commerciale progressive et les changements successifs de l'hégémonie n'ont guère de prise sur ces réalités insulaires. Quelques signaux s'allument néanmoins au I11° siècle, dont nous ne percevons qu'une pâle lueur. Corèsia de Kéos s'affaiblit au moment où une garnison ptolémaïque s'y installe, sans que l'on soit capable de repérer un lien de causalité entre les deux phénomènes. Des Samiens se fixent à Minoa d'Amorgos comblant sans doute une vide démographique que nous ne comprenons pas, avant de faire la même chose au siècle suivant à Oinè d'Icaria. A la fin du Ill o siècle, la piraterie s'institutionnalise et sert de relais aux opérations militaires classiques, gênant des îles dont la prospérité est liée au commerce maritime. Avec le retour des Athéniens à Délos, les îles voisines subissent de plein fouet l'internationalisation de l'île et c'est tout l'équilibre traditionnel qui se rompt, entraînant une chute plus rapide encore que ne le fut l'ascension. Les cas de Délos, de Rhénée, sont sans doute aberrants aussi bien dans leur succès que dans leur déroute finale, mais ils sont emblématiques et attestent, à leur manière, que c'est l'histoire qui fait les îles. Comment expliquer que la petite Rhénée versait 300 misérables drachmes au V O siècle dans les caisses du Trésor athénien, ce qui correspond à la ferme annuelle d'un seul domaine d'Apollon au Illo siècle, sinon par l'intensité tardo-classique et hellénistique de la mise en valeur d'un terroir pauvre à l'état brut, rentable une fois exploité et intégré dans une économie dynamique ? D'un autre côté, les massacres sont forcément plus dramatiques dans un milieu où toute fuite est impossible (voir l'épisode sanglant de Mélos) ; la reconstruction des infrastructures est plus longue dans un contexte démographique dépressif et dans un espace où la permanence des champs eux-mêmes est menacée par le manque d'entretien et, à cet égard, tant l'histoire de Délos au 1° siècle avant notre ère que les quelques exemples que nous avons pris concernant l'époque byzantine sont éclairants. Si l'on recherche une réelle originalité des îles de l'Egée, c'est dans ce paradoxe d'une économie rurale réclamant un labeur énorme et une main d'oeuvre nombreuse, que la terre parvient à nourrir, produisant même des surplus commercialisables si les conditions extérieures - ne dépendant en rien des insulaires - le permettent, qu'on la trouvera. On conçoit alors que ces conditions nécessitent un concours de circonstances difficile à obtenir, en clair une thalassocratie peu ou pas discutée: protégées donc, mais soumises et nous tombons sur l'autre volet de réalités insulaires, cette incapacité à imaginer une Confédération authentiquement insulaire ou à assurer une réelle autonomie politique dans le cadre d'un pouvoir extérieur fort, qu'il soit exercé depuis la Pnyx, la Corne d'Or ou la place Syndagma aujourd'hui. Cette étude aura je l'espère montré avant tout que l'insulaire, qu'il soit paysan ou navigateur, n'obéit pas à un modèle unique, transposable d'une île à l'autre ni surtout d'un millénaire à l'autre pas plus qu'on ne peut parler d'un modèle unique de paysage sorti du contexte historique dans lequel ont évolué les hommes. Au XVIIlo siècle,
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Watteau représentait Cythère, dans son célèbre tableau L'embarquement pour Cythère, en île verdoyante et arborée et l'abbé Barthélémy croyait, sans avoir parcouru la Grèce lui non plus et comme beaucoup de ses contemporains, il est vrai, à un monde antique fait de forêts majestueuses peuplées de biches et de nymphes, à une Rhénée dominée par "la richesse de ses collines et de ses campagnes", une Naxos arrosée par "des sources intarissables d'une onde vive et pure" et où des "troupeaux s'égarent dans l'épaisseur des prairies", une Siphnos aux "campagnes émaillées de fleurs et toujours couvertes de fruits"}. C'est peut-être pour cela que les voyageurs de l'époque moderne et jusque vers 1830-1850 furent tant déçus de leur première approche de la Grèce. Guidés par cette notion de déterminisme géographique et politique, ils ne pouvaient résoudre l'inadéquation entre leur Grèce rêvée et leur Grèce vécue qu'en faisant intervenir les concepts douteux de dégénérescence de la race sous les coups redoublés des invasions successives (qui expliquaient la disparition du fameux "profil grec"), de l'incurie des hommes et de l'asservissement2 • Une étude plus apaisée de la Turcocratie permit cependant de comprendre le poids des événements dans l'approche économique et sociale du milieu égéen. Néanmoins, il est difficile, compte tenu de l'aspect parcellaire des sources antiques, d'apprécier l'impact exact de l'histoire sur les îles. Bien sOr, on sait que l'expulsion des Déliens de leur île en 166 et celle, indirecte, des nombreux insulaires qui y faisaient de prospères affaires, changea pour les Cyclades la donne plus encore que la destruction de l'emporion par les troupes de Mithridate. Mais que savons-nous exactement des conséquences de la création de la Ligue des Nésiotes sur le chapelet cycladique ? Pouvons-nous d'ailleurs être certains qu'il y en eut? Plus encore, et plus disputé, comment mesurer à leur juste valeur les chocs répétés que représentent les raids piratiques quand à Ténos, une étude serrée a démontré l'impossibilité de relier cet événement ponctuel à la décision politique de construire une ville sur le littoral ? Aussi bien les solutions que j'ai proposées ne peuvent-elles souvent dépasser le stade de l'hypothèse. Soumis à ce que E. Badian appelle "l'histoire entre crochets"3, avec force restitutions, nous ne pouvons que juger les grandes tendances séculaires. Et de même, parlant des îles comme d'un ensemble cohérent, nous avons trop tendance à sous-estimer les conditions locales spécifiques - parce que nous les entrevoyons mal, ce qui est un euphémisme - permettant de comprendre l'originalité agricole, commerciale, historique, politique pour tout dire, de chacune. Quand bien même nous avons souligné la cohérence chronologique des V O - 111° siècles, cette période n'est pas homogène et ne recoupe pas les frontières traditionnelles entre siècles valables d'abord pour Athènes: les anciens membres de la Ligue de Délos voient en 404 les Athéniens remplacés par des Lacédémoniens, l'harmoste se substituer au chef de la garnison et le changement vu de l'Archipel n'est guère flagrant. Au V O siècle, un temps de paix assez long explique une croissance démographique que n'altère pas beaucoup la guerre du Péloponnèse et qui trouve son apogée, les prospections archéologiques de Mélos ou de Kéos le confirment, au IV O siècle. Dès le début du 111° 1, Voyage du jeune Anacharsis en Grèce, VI, p. 321, 345, 348. O. Murray, Opus, 11, 1992, p. 15. 2. Sur la littérature de voyage prise dans le contexte de chaque époque, voir R. Eisner, Travelers to an
Antique land. The History and Literature ofTravel in Greece, Ann Arbor, 1991. 3, E. Badian, "History from Square Brackets", ZPE 79, 1989, p. 59-70.
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siècle, les îles de l'Egée, prises dans le tourbillon des luttes entre diadoques, suivent des chemins séparés: Samothrace est dans l'orbite de Lysimaque, les Sporades du Nord sous obédience macédonienne, les Cyclades sous contrôle lagide et Rhodes essaie, vaille que vaille, de délimiter son aire d'influence. Avant, à la fin du 111° siècle et au début du 11°, que les îles ne tombent sous la coupe des Romains et n'entrent dans un monde nouveau où elles sont quantité négligeable. Au fil des pages toutefois, on aura remarqué la fréquence des allusions au IV o siècle avant J.c., son importance pour le monde égéen. Tout porte à croire en effet que ce fut à ce moment de leur histoire que les îles connurent leur optimum démographique. La conquête par la céréaliculture d'îles mineures, auparavant pâturages extensifs réservés au petit bétail, est en soi un indice que le point culminant est atteint et par cette expression j'entends l'impossibilité matérielle dans un cadre normal d'aller au-delà sauf à pouvoir s'affranchir de ces réalités par l'exploitation minière (Théophraste fournit de multiples témoignages de de son existence) ou le commerce (et l'épigraphie insulaire, dans la seconde moitié du IV o siècle, devient prolixe sur le sujet) c'est-à-dire à développer toutes ses potentialités, ce qui nous éloigne du schéma d'îles à l'économie purement vivrière. Couronnant le tout, l'archéologie tant urbaine que religieuse donne des traces tangibles de cette expansion. Autant dire qu'une analyse historique du IV o siècle dans les îles est nécessaire pour mieux cadrer cette prospérité insulaire. Mais les réflexions générales que j'ai essayé de mener en étaient sans doute les prolégomènes indispensables.
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LES ILES DE L'EGEE
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LES CYCLADES OCCIDENTALES ~ EPHYRA ::
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LES ARCHIPELS ÉGÉENS DANS L'ANTIQUITÉ GRECQUE
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BIBLIOGRAPHIE On ne trouvera dans les pages suivantes que les ouvrages ou articles dont le lien avec le sujet est direct. D'autres, au fil des notes, sont repris, mais je n'ai pas jugé utile de les placer en bibliographie s'ils n'intervenaient qu'une seule fois. Plusieurs types de travaux sont représentés ici. Quelques mots d'introduction ne seront pas superflus : les plus utiles, pour notre perspective de recherches, sont ceux, fort récents, qui publient les résultats d'enquêtes de détail sur le terrain qui se sont multipliées ces dernières années: un bilan en a été dressé par S.E. Alcock, J.F. Cherry et J.L. Davis: "Intensive survey, agricultural practice and the classicallandscape of Greece", Classical Greece. Ancient histories and modem archaeologies, 1. Morris éd., p. 137-170, et J. Cherry, "Regional Survey in the Aegean : the "New Wave" and after", Beyond the site, P.N. Kardulias éd., p. 91-112. Concernant le domaine géographique des îles, ont paru : Renfrew (c.) - Wagstaff (M.), An Island Polity. The archaeology of exploitation in Melos, Cambridge, 1982 Cherry (J.F.) - Davis (J.L.) - Mantzourani (E.), Landscape Archaeology as Long-Term History. Northem Keos in the Cycladic Islands, Los Angeles, 1991 De nouvelles prospections en cours ou terminées doivent déboucher rapidement sur des publications: c'est le cas pour Amorgos, sous la direction de L. Marangou et C. Renfrew, et pour le sudouest de l'île de Kéos, sous la responsabilité de L. Mendoni. D'autres publications témoignent de recherches peut-être moins systématiques mais aux résultats fort intéressants pour les îles de Naxos et d'Amorgos : Les Cyclades. Matériaux pour une étude de géographie historique, Paris, 1983 Recherches dans les Cyclades, sous la direction de R. Dalongeville et G. Rougemont, Lyon, 1993 L'approche géographique est indispensable pour une telle enquête. La somme d'A. Philippson, le livre déjà ancien de géographie historique de E.C. Semple, sont toujours précieux et les travaux d'E. Kolodny d'une importance capitale pour le paysage et les modes de vie. L'étude de G. Rougemont sur la géographie historique des Cyclades trace les meilleures pistes pour une bonne compréhension des paysages insulaires. Il existe peu de monographies insulaires si l'on met de côté les grandes îles de l'Egée et bien sOr Délos et les îles voisines de Myconos et Rhénée, mais les dernières années ont vu de nettes avancées. L'oeuvre colossale réalisée sous la houlette deF. Hiller von Gaertringen à Thèra reste un modèle du genre. Quelques exceptions tout de même avec le travail de grande ampleur qu'effectue L. Mendoni à Kéos (révision des inscriptions, travail de terrain), les recherches archéologiques et historiques de R. Etienne à Ténos, la publication sur les tours de Siphnos de N.G. Ashton et E.T. Pantazoglou, l'étude de A. Mazarakis-Ainian sur les murailles de Kythnos. Paros est également bien connue, surtout pour l'époque archaïque avec le livre récent de D. Berranger, et Cos a bénéficié d'un traitement de choix avec l'ouvrage de S.M. Sherwin-White. Le livre de E.M. Craik sur les îles doriennes du sud de l'Egée apporte peu. Les monographies ne se justifient d'ailleurs pas toujours: la tentative de AJ. Papalas pour Icaria est à cet égard révélatrice et décevante. Pour les autres îles, il faut trop souvent se contenter de quelques articles, comme par exemple celui de Ph. Bruneau sur Péparéthos, de A. Frantz, H.A. Thomson et J. Travlos sur Sikinos. La suite d'articles écrits il y a un siècle environ par H. Hautteçoeur a le seul mérite d'exister et de retranscrire le plus souvent en français des monographies en langue p~re difficiles d'accès (voir les remarques acides mais justifiées de L. Robert, OMS l, n. 1 p. 552). Disons-le tout net: Hauttecoeur était un plagieur peu discret qui n'utilisait pas beaucoup les guillemets. Un peu à part dans cette catégorie de monographies, on doit dire un mot de ces petits ouvrages parus dans la seconde moitié du XIXo siècle et consacrés à l'histoire et la géographie d'une île. De qualité très inégale, ces ouvrages souffrent de leur diffusion restreinte et de leur c~mposition en langue pure.
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Rares sont ceux à avoir été réédités, comme le livre de A Vallindas sur Kythnos, réimprimé en 1990 par les soins de la municipalité de Kythnos et celui de K. Manthos sur Kéos, réédité avec commentaires de L. Mendoni. IG XII 3, 5 et 7 donnent une liste exhaustive de ces monographies et voici ceux - ils ne sont pas nombreux - que j'ai pu compulser: Ampelas (T.), 1mop{a rijç vryaov l:vpov, Hermoupolis, 1874 Gabalas (Z.D.), IIepi rijç vryaov l:lIdvov, Athènes, 1885 Gabalas (Z.D.), 'H vryaoç t!JoÂ,éyavôpoç, Athènes, 1886 Manthos (K.), 'APxawÂ,oy{a mi 1mop{a Kéaç. Edité et annoté par L. Mendoni, Athènes, 1991 Miliarakis (A), 'YnoJ.lvryJ.lam neplYpaqJllrà TroV KVK"Â,aôwv vryawv K"aTà J.lépoç. "Avôpoç, Kéwç, Athènes, 1880 Miliarakis (A), 'YnoJ.lvryJ.lam neplYpaqnK"à TroV KVK"Â,aôwv vryawv K"aTà J.lépoç. 'AJ.lopy6ç, Athènes, 1884 Miliarakis (A), 'Yn0J.lvryJ.laTa neplypaqJlK"à TroV KVK"Â,aôwv vryawv K"aTà J.lépoç. K{J.lwÂ,oç, Athènes, 1899 Paschalis (D.), 'H qJwvr, T1jÇ "Avôpov, Syros, 1899 Psyllas (LN.), 1aTop{a Tflç vryaov Kéaç, Athènes, 1921 Stamatiadis (E.I.), 'IK"aplaK"à TiTOl imop{a K"ai neplypaqJr, rijç vryaov 'IK"ap{aç, Samos, 1893 Vallindas (A), KVOVlaK"a, Hermoupolis, 1882 (rééd. Athènes, 1990) La littérature de voyage que j'ai beaucoup utilisée au cours de mes recherches est immense et, là encore, de qualité très inégale. Les relations les plus complètes sont celles de J. Pitton de Tournefort et de L. Ross, mais d'autres peuvent donner d'utiles points de vue. Des listes exhaustives sont fournies par J. Bennet et S. Voutsaki, "A Synopsis and Analysis of Traveler's' Accounts of Keos (to 1821)", Northern Keos, p. 366, et D. Berranger, Paros archaïque, p. 21-54 (avec analyse critique et édition des passages concernant Paros) que l'on complétera par la nomenclature, valable pour les XIvo-XVIo siècles, établie par S. Yerasimos. Certains voyageurs, et ils sont nombreux, ont pu limiter leur voyage à une ou quelques îles seulement, ce qui ne facilite pas la recherche. Voici ceux, dans l'ordre chronologique des voyages, qui ont fait de ma part l'objet d'une recension toute particulière: Ch. Buondelmonti, Liber insularum Archipelagi, (1420), E. Legrand éd., Paris, 1897 P. Belon du Mans, Observations de plusieurs singularités et choses mémorables trouvées en Grèce, Asie. Judée, Arabie et autres pays étrangers, Paris, 1554 P. Carlier de Pinon, Voyage en Orient, publié avec des notes historiques et géographiques par E. Blochet, Paris, 1920 M. Boschini, L'Arcipelago, Venise, 1658 J. Thevenot, Relation d'un voyage fait au Levant, Paris, 1664 J. Spon, Voyage de l'Italie, de Dalmatie, de Grèce et du Levant, Lyon, 1678 F. Piacenza, L'Egeo redivivo, Modène, 1688 R. Saulger, Histoire nouvelle des anciens ducs et autres souverains de l'Archipel, Paris, 1699 O. Dapper, Description exacte des îles de l'Archipel, Amsterdam, 1703 J. Pitton de Tournefort, Voyage du Levant, Paris, 1717 W.B. Stanford - E.J. Finopoulos édd., The travels ofLord Charlemont in Greece and Turkey, 1749, Londres, 1984 Maihows, Voyage en France, en Italie et aux Isles de l'Archipel, ou lettres écrites de plusieurs endroits de l'Europe et du Levant en 1750, Paris, 1763 Pasch di Krienen, Breve descrizione dell'Arcipelago e particolarmente delle diciotto isole sottomise l'anno 1771 al dominio russo, Livourne, 1773 Baron de Riedesel, Remarques d'un voyageur moderne au Levant, Leipzig, 1774 (Trad. fr. Paris, 1802) Choiseul-Gouffier, Voyage pittoresque de la Grèce, Paris, 1782
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