Cancer du sein avancé
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Cancer du sein avancé
Springer Paris Berlin Heidelberg New York Hong Kong London Milan Tokyo
Cancer du sein avancé Sous la direction de Daniel Serin et Gaëtan de Rauglaudre
29es Journées de la Société Française de Sénologie et Pathologie Mammaire (SFSPM) Avignon, 14-16 novembre 2007
Daniel Serin Institut Sainte-Catherine Chemin du Lavarin BP 846 84082 Avignon cedex
Gaëtan de Rauglaudre Institut Sainte-Catherine Chemin du Lavarin BP 846 84082 Avignon cedex
ISBN-13 : 978-2-287-72614-9 Springer Paris Berlin Heidelberg New York © Springer-Verlag France, 2007 Imprimé en France Springer-Verlag France est membre du groupe Springer Science + Business Media Cet ouvrage est soumis au copyright. Tous droits réservés, notamment la reproduction et la représentation la traduction, la réimpression, l’exposé, la reproduction des illustrations et des tableaux, la transmission par voie d’enregistrement sonore ou visuel, la reproduction par microfilm ou tout autre moyen ainsi que la conservation des banques de données. La loi française sur le copyright du 9 septembre 1965 dans la version en vigueur n’autorise une reproduction intégrale ou partielle que dans certains cas, et en principe moyennant le paiement de droits. Toute représentation, reproduction, contrefaçon ou conservation dans une banque de données par quelque procédé que ce soit est sanctionnée par la loi pénale sur le copyright. L’utilisation dans cet ouvrage de désignations, dénominations commerciales, marques de fabrique, etc. même sans spécification ne signifie pas que ces termes soient libres de la législation sur les marques de fabrique et la protection des marques et qu’ils puissent être utilisés par chacun. La maison d’édition décline toute responsabilité quant à l’exactitude des indications de dosage et des modes d’emploi. Dans chaque cas, il incombe à l’usager de vérifier les informations données par comparaison à la littérature existante.
Maquette de couverture : Jean-François Montmarché
Liste des auteurs Aide Nicolas Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Allouache Djellila Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Avril Antoine Institut Bergonié, Centre régional de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex Bardet Stéphane Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Belkacémi Yazid Département Universitaire de radiothérapie Centre Oscar Lambret et Université Lille II 3, rue Frédéric-Combemale 59000 Lille Berthet Pascaline Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Berton-Rigaud Dominique CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique
bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Besse Philippe Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités, Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9 Blanc-Fournier Cécile Laboratoire d’anatomie pathologique Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris 14076 Caen cedex 05 Bonichon Françoise Institut Bergonié Centre régional de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex Botton Estelle Centre Eugène Marquis Rue de la Bataille Flandres-Dunkerque CS 44229 35042 Rennes cedex Bouchardy Christine 55, bd de la Cluse 1205 Genève Suisse Boulle Nathalie Service de biologie cellulaire et hormonale
VI
Liste des auteurs
Hôpital Arnaud de Villeneuve 295, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5 Bourbouloux Emmanuelle CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Brain Étienne Département d’oncologie médicale Centre René Huguenin 35, rue Dailly 92210 Saint-Cloud ; Programme d’action concertée GERICO de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer 101, rue de Tolbiac 75654 Paris cedex 13 Bugat Roland Institut national du cancer 52, avenue André-Morizet 92513 Boulogne Billancourt cedex Buy Xavier Département de radiologie et imagerie médicale Faculté de médecine de Strasbourg 4, rue Kirschleger 67085 Strasbourg cedex Campone Mario CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Cannone Patrice Service d’oncologie médicale AP-HM, CHU Timone Adultes 264, rue Saint-Pierre 13005 Marseille
Chamorey Emmanuel Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Chatellier Thierry CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Clough Krishna Institut du Sein Paris Breast Center 7, avenue Bugeaud 75016 Paris Collignon Marie-Anne Service de chirurgie gynécologique et cancérologique Hôpital Européen Georges Pompidou 20, rue Leblanc 75015 Paris Courdi Adel Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Crouet Hubert Unité de sénologie, service de chirurgie Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris 14076 Caen cedex 05 Cyteval Catherine Service d’imagerie médicale Hôpital Lapeyronnie 371, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5
Liste des auteurs
Dalenc Florence Département d’oncologie médicale Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex
VII
Doyen J. Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2
Debled Marc Institut Bergonié, Centre régional de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex
Dudoit Éric Responsable de l’unité de psychologie Service d’oncologie médicale, AP-HM CHU Timone Adultes 264, rue Saint-Pierre 13005 Marseille
Dejean Sébastien Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9
Dupuy Jean-François Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9
Delcambre Corinne Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05
Durand Michel Institut Bergonié Centre régional de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex
Delozier Thierry Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5036 14076 Caen cedex 05 Devaux Marine Service d’imagerie médicale Hôpital Lapeyronnie 371, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5
Emily-Toudic Floriane Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Ettore Francette Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2
VIII
Liste des auteurs
Falcou Marie-Christine Département de biostatistiques Institut Curie 26, rue d’Ulm 75005 Paris
Granier Cécile Service d’imagerie médicale Hôpital Lapeyronnie 371, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5
Favrot Marie-Christine Département de biologie intégrée, cancérologie biologique et biothérapies Pavillon B, Hôpital de la Tronche CHU Grenoble BP 217 38043 Grenoble cedex 09
Guilloit Jean-Marc Service de chirurgie Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris 14076 Caen cedex 05
Ferrero Jean-Marc Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Frenel Jean Sébastien CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Gallon Élise Service de psycho-oncologie Institut Sainte Catherine 84082 Avignon cedex 2 Gangi Afsihn Département de radiologie et imagerie médicale Faculté de médecine de Strasbourg 4, rue Kirschleger 67085 Strasbourg cedex Gligorov Joseph Service d’oncologie médicale APHP Tenon, Cancer Est Université Pierre et Marie Curie Paris VI 20, rue de la Chine 75970 Paris cedex 20
Gunzer Katharina Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Hardouin Agnès Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Huchet Virginie Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Kerbrat Pierre Centre Eugène Marquis Rue de la bataille Flandres-Dunkerque CS 44229 35442 Rennes cedex Université de Rennes I Khalil Ahmed Service d’oncologie médicale APHP Tenon, Cancer Est 20, rue de la Chine 75970 Paris cedex 20
Liste des auteurs
Lacroix-Triki Magali Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9 Lallement Michel Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Largillier Rémy Centre azuréen de cancérologie 1, place du Docteur J.L. Broquerie 06250 Mougins Lartigau Éric Département universitaire de radiothérapie Centre Oscar Lambret et Université Lille II 3, rue Frédéric-Combemale 59000 Lillle Le Frère-Belda Marie-Aude Service de chirurgie gynécologique et cancérologique Hôpital Européen Georges Pompidou 20, rue Leblanc 75015 Paris Le Pourhiet Annick CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain
IX
Lecuru Fabrice Service de chirurgie gynécologique et cancérologique Hôpital Européen Georges Pompidou 20, rue Leblanc 75015 Paris Lesieur B. Service de chirurgie gynécologique et cancérologique Hôpital Européen Georges Pompidou 20, rue Leblanc 75015 Paris Lesur Anne Unité de sénologie Centre Alexis Vautrin Route de Bourgogne 54511 Vandœuvre-lès-Nancy cedex Lévy Christelle Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Loridon Brigitte Centre de pathologie 19, rue de Passy 75016 Paris Lotz Jean-Pierre Service d’oncologie médicale APHP Tenon, Cancer Est 20, rue de la Chine 75790 Paris cedex 20 Luporsi Élisabeth Service de recherche clinique Centre Alexis Vautrin Avenue de Bourgogne 54511 Vandœuvre-lès-Nancy cedex
X
Liste des auteurs
Maestro Catherine Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Mariani Pascale Institut Curie 26, rue d’Ulm 75005 Paris Marie David Service d’oncologie médicale, AP-HM CHU Timone Adultes 264, rue Saint-Pierre 13005 Marseille Martin Pierre-Marie Assistance Publique Hôpitaux de Marseille, CHU Nord Laboratoire de transfert en oncologie biologique 13000 Marseille ; Inserm, E359, Marseille ; Université de la Méditerranée Aix-Marseille II, Faculté de médecine de Marseille Secteur Nord IFR Jean Roche, Laboratoire de cancérologie expérimentale bd Pierre-Dramard 13916 Marseille cedex 20 Martin Sandrine Service de chirurgie Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris 14076 Caen cedex 05 Marx Gilles Unité de psycho-oncologie Centre René Huguenin 35, rue Dailly 92210 Saint-Cloud
Maudelonde Thierry Service de biologie cellulaire et hormonale Hôpital Arnaud de Villeneuve 371, av. du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5 Mauriac Louis Institut Bergonié Centre régional de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex Namer Moïse 472, route de Bellet 06200 Nice Nos Claude Service de chirurgie gynécologique et cancérologique Hôpital Européen Georges Pompidou 20, rue Leblanc 75015 Paris ; Institut du Sein 7, avenue Bugeaud 75016 Paris Ollivier Jean-Michel Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Ouafik L’Houcine Inserm, E359, Marseille, Université de la Méditerranée Aix-Marseille II, Faculté de médecine de Marseille Secteur Nord IFR Jean Roche, Laboratoire de cancérologie expérimentale bd Pierre-Dramard
Liste des auteurs
13916 Marseille cedex 20 ; Assistance Publique Hôpitaux de Marseille, CHU Nord, Laboratoire de transfert en oncologie biologique 13000 Marseille Pierga Jean-Yves Département d’oncologie médicale Institut Curie 26, rue d’Ulm 75005 Paris Pouillart Pierre Département d’oncologie médicale Institut Curie 26, rue d’Ulm 75005 Paris Poulet Bruno Institut de pathologie de Paris 49, rue du Ranelagh 75016 Paris Raoust Inès Centre Antoine Lacassagne 33, avenue de Valombrose 06189 Nice cedex 2 Rapiti Elisabetta 55, bd de la Cluse 1205 Genève Suisse Rivière Alain Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Roché Henri Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre
XI
31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9 Rouanet Philippe CRLC Val d’Aurelle, Montpellier 208, rue des Apothicaires Parc EuroMédecine 34298 Montpellier cedex 5 Rouëssé Jacques Fédération française des oncologues médicaux, Domus Médica 79, rue de Tocqueville 75017 Paris Sadot Sophie CLCC, René Gauducheau Institut du Cancer Nantes-Atlantique bd Jacques-Monod 44805 Nantes cedex Saint-Herblain Salmon Rémy Département de chirurgie Institut Curie 26, rue d’Ulm 75005 Paris Ségura Carine Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Selle Frédéric Service d’oncologie médicale APHP Tenon, Cancer Est 20, rue de la Chine 75970 Paris cedex 20
XII
Liste des auteurs
Solassol Jérôme Service de biologie cellulaire et hormonale Hôpital Arnaud de Villeneuve 295, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5 Spano Jean-Philippe Département d’oncologie médicale Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière 47, bd de l’Hôpital 75013 Paris ; Université Paris VI Stines Joseph Service de radiodiagnostic Centre Alexis Vautrin 54511 Vandœuvre-lès-Nancy cedex Suau Aurélien Service d’imagerie médicale Hôpital Lapeyronnie 371, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5 Switsers Odile Centre François Baclesse 3, avenue Général Harris BP 5026 14076 Caen cedex 05 Taourel Patrice Service d’imagerie médicale Hôpital Lapeyronnie 371, avenue du Doyen Gaston Giraud 34295 Montpellier cedex 5 Troufléau Philippe Service de radiodiagnostic Centre Alexis Vautrin 54511 Vandœuvre-lès-Nancy cedex Tunon de Lara Christine Institut Bergonié Centre régional
de lutte contre le cancer 229, cours de l’Argonne 33076 Bordeaux cedex Vagner Stéphan Inserm U563 Institut Claudius Regaud 20-24, rue du pont Saint-Pierre 31052 Toulouse cedex ; Laboratoire de statistiques et probabilités Institut de mathématiques de Toulouse Université Paul Sabatier 31062 Toulouse cedex 9 Verkooijen Helena 55, bd de la Cluse 1205 Genève ; Department of Community Occupational and Family Medicine National University of Singapore 16 Medical Drive 117597 Singapore Vlastos Georges Hôpitaux Universitaires de Genève Département de gynécologie et d’obstétrique Service de gynécologie Unité de sénologie et oncogynécologie chirurgicales 30, bd de la Cluse 1211 Genève 14 Suisse Zerbib Éric Centre Imagerie médicale de l’Ouest parisien CIMOP-Val d’Or 16, rue Pasteur 92211 Saint-Cloud
Sommaire Avant-propos..........................................................................................
1
Comment prouver l’origine mammaire d’une métastase prévalente ? Y aurait-il un intérêt à biopsier les métastases d’un cancer du sein connu ? F. Dalenc et M. Lacroix-Triki...........................................................................
3
SESSION PLÉNIÈRE 1 Le cancer du sein métastatique. Définitions actuelles, épidémiologie, présentations cliniques E. Luporsi ........................................................................................................
17
SESSION PLÉNIÈRE 2 Le phénotype biologique du potentiel métastatique des cancers du sein existe-t-il ? T. Maudelonde, N. Boulle et J. Solassol ............................................................
27
SESSION PLÉNIÈRE 3 Nouveauté et analyse critique des facteurs de pronostic et de réponses thérapeutiques J.-P. Spano .......................................................................................................
49
SESSION PLÉNIÈRE 4 Imagerie de la maladie métastatique dans le cancer du sein P. Taourel, C. Cyteval, C. Granier, M. Devaux et A. Suau ...............................
55
Influence de la concentration sérique de CA 15-3 sur les performances diagnostiques de la TEP FDG chez patientes ayant un cancer du sein avec imagerie négative N. Aide, O. Switsers, D. Allouache, C. Lévy, C. Delcambre-Lair, V. Huchet, T. Delozier, A. Hardouin et S. Bardet ..............................................................
67
SESSION PLÉNIÈRE 5 Le cancer du sein métastatique d’emblée : place du traitement locorégional du sein G. Vlastos, E. Rapiti, H.M. Verkooijen et C. Bouchardy....................................
71
XIV
Sommaire
Curages axillaires séparés sein-bras dans les cancers du sein avancés C. Nos, B. Lesieur, M.A. Collignon, E. Zerbib, M.A. Le Frère-Belda, B. Poulet, B. Loridon, K. Clough et F. Lecuru ..................................................................
81
MATINALE Place de l’imagerie dans le bilan d’extension et l’évaluation de la réponse thérapeutique des cancers du sein J. Stines et P. Troufléau.....................................................................................
85
SESSION PLÉNIÈRE 6 LEÇON CHARLES-MARIE GROS Interactions entre les cellules tumorales et le microenvironnement tissulaire « Quand le dialogue remplace le monologue » ............................................... P.M. Martin et L’H. Ouafik
97
SESSION PLÉNIÈRE 8 Évaluation des facteurs pronostiques déterminants pour la stratégie thérapeutique des patientes métastatiques après cancer du sein. Évaluation de la prise en charge de 1 096 patientes traitées entre 1980 et 2005 au centre Antoine Lacassagne-Nice R. Largillier, E. Chamorey, J. Doyen, A. Courdi, F. Ettore, C. Maestro, I. Raoust, M. Lallement, M. Namer et J.M. Ferrero .........................................................
127
SESSION PLÉNIÈRE 9 Évolution de l’histoire naturelle et du pronostic des métastases des cancers du sein sur quatre décennies. Étude de 4 110 cancers du sein métastasés T. Delozier, O. Switsers, J.M. Ollivier, C. Lévy, A. Rivière, D. Allouache, C. Delcambre, P. Berthet et K. Gunzer .............................................................
131
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie M. Campone, E. Bourbouloux, D. Berton-Rigaud, A. Le Pourhiet, S. Sadot, T. Chatellier et J.S. Frenel ................................................................................
139
SESSION PLÉNIÈRE 10 Bilan des traitements ciblés de la phase métastatique : quelles perspectives pour demain ? J. Gligorov, A. Khalil, F. Selle et J.-P. Lotz.........................................................
159
SESSION PLÉNIÈRE 11 Informer en phase métastatique : Un défi ? Quelles limites ? J. Rouëssé et G. Marx.......................................................................................
167
Sommaire
XV
L’annonce de la rechute du cancer du sein… entre rupture et continuité E. Gallon, J Guérin et I. Piollet .......................................................................
175
SESSION PLÉNIÈRE 12 Soins palliatifs : peut-on parler de qualité de vie en phase métastatique ? P. Kerbrat et E. Botton .....................................................................................
181
Sensualité, sexualité et cancer du sein : l’expérience d’ateliers esthétiques P. Cannone, D. Marie et E. Dudoit .................................................................
191
VESPÉRALE Le cancer du sein métastatique chez la femme âgée : revue synthétique de l’ensemble des options thérapeutiques E. Brain...........................................................................................................
197
SESSION PLÉNIÈRE 13 La nanomédecine est-elle une réalité ? Quelles perspectives en cancérologie ? M.C. Favrot.....................................................................................................
207
SESSION PLÉNIÈRE 14 Chirurgie de rattrapage des cancers du sein localement évolués et des récidives locales agressives P. Rouanet........................................................................................................
217
Conservation mammaire et survie à long terme après chimiothérapie néoadjuvante. Expérience de l’Institut Bergonié M. Debled, M. Durand, A. Avril, C. Tunon de Lara, F. Bonichon et L. Mauriac pour le Groupe Sein de l’Institut Bergonié .........................................................
227
SESSION PLÉNIÈRE 15 Chirurgie des métastases hépatiques de cancer du sein R -J. Salmon, P. Mariani, J.-Y. Pierga, M.-C. Falcou, P. Pouillart ....................
231
Métastases hépatiques : vers une amélioration de la survie ? C. Ségura, C. Lévy, D. Allouache, C. Delcambre, O. Switsers, JM. Ollivier, P. Berthet, F. Emily-Toudic et T. Delozier .........................................................
233
SESSION PLÉNIÈRE 16 Métastases ovariennes, péritonéales et rétropéritonéales du cancer du sein H. Crouet, A. Lesur, C. Blanc-Fournier, S. Martin et J.-M. Guilloit.................
239
XVI
Sommaire
Altérations de l’expression, et implications pronostique et thérapeutique, des protéines régulatrices de l’épissage des ARNm dans les cancers du sein M. Lacroix-Triki, J.F. Dupuy, F. Dalenc, S. Dejean, P. Besse, H. Roché et S. Vagner..
253
Irradiation des métastases cérébrales des tumeurs du sein E. Lartigau et Y. Belkacémi ..............................................................................
257
Contrôle local des métastases vertébrales A. Gangi et X. Buy ..........................................................................................
259
La chimiothérapie orale, le point de vue de l’INCa R. Bugat ..........................................................................................................
265
Avant-propos
Les 29es journées de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire (SFSPM), qui se tiennent pour la troisième fois à Avignon (1987, 1997 et 2007), sont consacrées cette année au cancer du sein avancé. Si ce sujet regroupe deux entités bien définies – le cancer du sein localement évolué et le cancer du sein métastatique – son actualité reste très prégnante tant au niveau épidémiologique qu’au niveau du développement des connaissances scientifiques et de l’amélioration constantes des résultats thérapeutiques ; le comité scientifique de la SFSPM a donc considéré que ce thème méritait d’être développé sur la totalité de ces journées. En effet, si la pratique du dépistage systématique du cancer du sein amène à découvrir des cancers du sein à un stade de plus en plus précoce (15 % de cancers in situ en France), il existe en revanche un chiffre toujours considérable de Françaises dont la lésion mammaire est découverte à un stade avancé. Par ailleurs, si le nombre de Françaises qui décèdent chaque année de métastases de cancer du sein a tendance à se stabiliser autour de 11 000 depuis le début des années 2000, il n’a pas encore amorcé de décrue significative. Outre que ces seules considérations épidémiologiques justifient que la SFSPM consacre ses journées nationales à ce thème, l’avancée des connaissances dans ce domaine comme les progrès thérapeutiques considérables réalisés ces dernières années renforcent l’intérêt du sujet. En effet, si les approches néo-adjuvantes sont considérées aujourd’hui comme un domaine particulièrement pertinent pour tester les nouvelles molécules et les nouvelles stratégies, les progrès réalisés dans le traitement de la phase métastatique ont non seulement allongé la survie globale des patientes (autour de 30 mois aujourd’hui) mais aussi amélioré leur qualité de vie. Nos remerciements vont donc au comité scientifique qui nous a confié un sujet passionnant à traiter et à toutes celles et à tous ceux qui ont accepté de travailler sur ces sujets, d’y apporter leur compétence, d’avoir pris le temps de la réflexion et de l’écriture pour nous fournir la matière de ce livre qui s’inscrit totalement dans la mission de formation médicale continue à laquelle s’est attachée la SFSPM depuis sa création.
2
Avant-Propos
Le thème du cancer du sein avancé a été pour le comité d’organisation l’occasion de mettre une fois de plus en exergue la pluridisciplinarité qui est un des piliers de la SFSPM. Comme chacun le sait, la prise en charge des patientes porteuses d’un cancer du sein localement avancé comme des patientes en phase métastatique ne se réduit à une seule pratique oncologique médicale ou radiothérapique. Les réunions de concertation pluridisciplinaires sont devenues le lieu où s’exprime le mieux cette nécessaire mise en commun des connaissances et des compétences. Les radiologues, les chirurgiens, les gynécologues, les oncologues radiothérapeutes ou médicaux, les acteurs des soins de supports, les infirmières engagées dans le dispositif autour de l’annonce, les médecins généralistes, chacun a sa place et nous avons voulu leur donner la parole lors des 29es Journées et dans ce livre. Alors un grand merci à tous. Bon congrès et bon séjour à Avignon ! Daniel Serin, Gaëtan de Rauglaudre, Anne Lesur
Comment prouver l’origine mammaire d’une métastase prévalente ? Y aurait-il un intérêt à biopsier les métastases d’un cancer du sein connu ? F. Dalenc et M. Lacroix-Triki
Ces questions et les réponses qui en découlent soulignent le rôle croissant des pathologistes dans le diagnostic mais aussi dans l’aide à la décision de la prise en charge thérapeutique des cancers du sein, y compris à un stade métastatique. Hier, à ce stade avancé de la maladie, les décisions thérapeutiques étaient principalement prises en tenant compte des caractéristiques cliniques (métastases viscérales ou non, âge des patientes) et biologiques sériques (taux de LDH, bilan hépatique). Mais d’ores et déjà et encore plus dans un futur proche, du moins peut-on l’espérer, les décisions tiendront compte des profils immunohistochimiques voire moléculaires tumoraux, constituant des facteurs prédictifs de réponse aux traitements et donc des compléments d’information pouvant potentialiser la prise en charge des patientes. Ces profils biologiques tumoraux varient-ils au cours de l’histoire naturelle d’une tumeur et sous l’effet des différents traitements médicaux ? Sont-ils relativement identiques chez une patiente donnée entre la tumeur primitive et les métastases et entre les métastases elles-mêmes ?
Comment prouver l’origine mammaire d’une métastase prévalente ? Lorsque, dans un contexte connu et prouvé de carcinome mammaire, le bilan d’extension utilisant les méthodes classiques d’imagerie (radiographie du
4
F. Dalenc et M. Lacroix-Triki
thorax, échographie hépatique, scintigraphie osseuse, voire scanner) révèle plusieurs lésions d’allure secondaire et réparties sur des organes, classiquement le siège de site métastatique des cancers du sein, le diagnostic fait assez peu de doute. Le clinicien pousse alors rarement plus loin les investigations. À l’inverse, lorsque la lésion survient à distance du primo-diagnostic, qu’elle est unique, d’aspect radiologique et/ou de localisation atypique, le clinicien se trouve souvent dans l’interrogation. Il peut alors avoir recours au dosage des marqueurs tumoraux. Mais ni le CA15-3 ni l’ACE ne sont des paramètres fiables, suffisamment sensibles et spécifiques pour affirmer l’origine mammaire d’une métastase. Dans ce contexte, seule une biopsie, pour analyse anatomopathologique, pourra être tentée dans l’espoir de prouver l’origine secondaire et mammaire de la lésion. Le pathologiste peut parfois suspecter l’origine mammaire d’une métastase d’après son aspect morphologique, et idéalement, en le comparant, lorsque que cela est possible, à celui de la lésion mammaire primitive. Toutefois, deux carcinomes d’une origine tissulaire différente peuvent avoir une morphologie très ressemblante et, par conséquent, le diagnostic différentiel peut être très difficile. De plus, cette analyse morphologique est parfois rendue délicate par des prélèvements de petites tailles, plus ou moins fragmentés, et contenant donc uniquement quelques cellules cancéreuses, éventuellement noyées dans un matériel nécrotique ou inflammatoire. Une étude immunohistochimique complémentaire, avec une interprétation fine et détaillée de l’expression d’un panel bien choisi de protéines, peut alors être d’une aide précieuse et orienter vers l’origine mammaire ou non de la métastase. La recherche d’une expression des récepteurs hormonaux (RE et RP) est systématiquement réalisée mais 30 à 40 % des carcinomes mammaires sont négatifs. De plus, cette expression n’est pas spécifique. Certains adénocarcinomes, ovariens ou bronchiques par exemple, peuvent exprimer le RE. En revanche, la surexpression de HER-2, quand elle existe, oriente fortement vers l’origine mammaire, car peu de carcinomes surexpriment ainsi cette oncoprotéine. La présence de la mammaglobine (MGB1) détectée au moyen d’un anticorps commercialisé pour l’immunohistochimie, quand elle existe, oriente très fortement vers l’origine mammaire (1). Quand le doute existe avec un adénocarcinome d’origine bronchique, la présence de TTF1 (thyroid transcription factor-1) n’a de valeur que positive et exclura l’origine mammaire. Enfin, quand le doute existe avec un carcinome d’origine digestive, l’expression différentielle des cytokératines 20 et 7 guidera le pathologiste ; les carcinomes mammaires étant CK7+ et CK20– et les carcinomes digestifs CK7– et CK20+.
Comment prouver l’origine mammaire d’une métastase prévalente ?
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En conclusion, la preuve de l’origine mammaire d’une métastase prévalente peut parfois être difficile. C’est le plus souvent un diagnostic anatomopathologique, morphologique et immunohistochimique qui nécessite un dialogue entre clinicien et pathologiste. Les avancées en biologie moléculaire permettront peut être un jour une meilleure connaissance de l’histogenèse des lésions et de leur filiation par rapport au tissu d’origine.
Y aurait-il un intérêt à biopsier les métastases d’un cancer du sein connu ? Est-il pertinent de biopsier une métastase chez une patiente ayant présenté un cancer du sein prouvé ? Quel pourrait être l’intérêt ou les intérêts réel(s) d’un geste potentiellement invasif (risque de douleurs post-biopsie, risque hémorragique, risque de pneumothorax…) et anxiogène pour les patientes ?
Intérêt diagnostique On peut s’assurer qu’il s’agit bien d’une métastase du carcinome mammaire connu et non d’une seconde tumeur primitive. Plus de 15 registres, pour la plupart européens, regroupant un nombre variable de femmes (de plusieurs milliers à plus de 500 000) et ayant présenté un cancer du sein primitif ont été, à ce jour, publiés (2, 3). Après un suivi médian variable, allant de 8 ans à plus de 30 ans, il apparaît que 10 % de ces femmes présenteront un second cancer primitif au cours de leur vie, ce qui correspond à une augmentation d’incidence de 20 à 30 % par rapport à une population témoin. Cet excès de risque concerne de nombreuses tumeurs : cancers de l’ovaire, du poumon, du rein, sarcomes des tissus mous, mélanomes mais aussi tumeurs de la thyroïde, des glandes salivaires, du côlon, de l’œsophage et leucémies. Le rôle de facteurs génétiques, des hormones endogènes, des facteurs environnementaux et des traitements du cancer du sein primitif (hormonothérapie, chimiothérapie et radiothérapie) est fortement discuté. Il s’agit donc de situations auxquelles il faut savoir penser et notamment, dès que la présentation clinique et/ou radiologique s’avère un peu atypique. Il faut également avoir en mémoire le fait qu’une patiente peut développer une seconde tumeur primitive alors que son cancer du sein métastatique, éventuellement lentement évolutif, est contrôlé par les traitements.
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Intérêt thérapeutique Le pathologiste identifie des biomarqueurs prédictifs de la réponse aux traitements. Deux sont utilisés quotidiennement : l’expression des récepteurs hormonaux (RH) et celle du récepteur tyrosine kinase HER-2. Peut-être y en aura t-il d’autres demain ? Quoi qu’il en soit, cela est essentiel et guide le thérapeute dans ses décisions (hormonothérapies et inhibiteurs de HER-2). Deux questions se posent donc : – Existe-t-il des variations phénotypiques, en particulier des variations d’expression des RH et de HER-2 entre la tumeur primitive et la ou les métastase(s) ? – Existe-t-il des variations phénotypiques sous l’effet des traitements médicaux? La tumorigenèse mammaire résulte d’une cascade d’événements génétiques, s’étalant sur plusieurs générations cellulaires, pour aboutir, finalement, à une prolifération sélective et non contrôlée d’un clone tumoral. À ce jour, la nature et la séquence exacte de ces événements successifs et cumulatifs ne sont pas connues et l’on pense que plusieurs scénarios sont possibles, aboutissant in fine à une grande hétérogénéité des cancers du sein. Contrairement à ce que l’on pensait il y a quelques années, la comparaison des profils d’expression génique des tumeurs primitives du sein et des métastases, rendue à présent possible grâce aux développements des techniques d’analyse génomique à large échelle (puces à ADN), objective une assez grande similarité de ces profils chez une même patiente (4). Cela suggère que la capacité métastatique d’une tumeur du sein est inhérente à la tumeur et non fondée sur une sélection clonale. Les recommandations thérapeutiques reposant sur le profil d’expression de la tumeur primitive semblent donc pouvoir constituer une approche rationnelle pour la prévention de la croissance des métastases. Cependant, au-delà du primo-traitement et avec le temps, d’autres événements génétiques apparaissent naturellement. De plus, on ne peut exclure que les traitements médicaux induisent eux-mêmes certains changements. Par conséquent, on peut craindre qu’en situation métastatique, le profil d’expression de la tumeur primitive pourrait ne pas toujours refléter celui des métastases.
Variation d’expression des RH et de HER-2 entre tumeur primitive et métastases Expression des RH Parmi l’abondante littérature, concernant les RH et les carcinomes mammaires, peu d’études se sont intéressées à la question. Ces études, déjà
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anciennes, ont été réalisées sur un petit nombre de patientes et/ou à partir de matériaux tissulaires très hétérogènes. Les RH ont été dosés par méthode biochimique et trop souvent, en particulier au niveau des métastases, il y a possiblement eu une contamination par des cellules non tumorales. Les taux de concordance pour trois de ces études sont de 46 %, 76 % et 85 % respectivement (5-7). Plus récemment, en 1996, Kuukasjärvi et al. (8) ont évalué le statut RE et RP par immunohistochimie au niveau de la tumeur primitive et d’une métastase chez 50 patientes n’ayant reçu qu’un traitement initial locorégional. Environ 70 % (n = 35) des tumeurs primitives étaient RE+ et 60 % (n = 30) étaient RP+. Le taux de discordance entre tumeur primitive et métastase est de 36 % (n = 18). Ils observent une perte d’expression du RE dans six cas, une perte d’expression du RP dans six cas et enfin une perte d’expression des 2 RH dans six cas également. Seulement une patiente sur huit présentant une métastase RE–, a répondu au tamoxifène (12,5 %) alors que 14 patientes sur 19 présentant une métastase RE+ y ont été sensibles (74 %). Point important, aucune patiente présentant initialement une tumeur RH– n’a présenté par la suite une métastase RH+. Cela laisse sous-entendre qu’en ne réévaluant pas le statut RH au niveau d’une métastase, le risque de ne pas faire bénéficier une hormonothérapie à une patiente est quasiment nulle.
Expression de HER-2 La surexpression de l’oncoprotéine HER-2 et/ou l’amplification du gène correspondant semblent être un événement précoce de la cancérogenèse mammaire et qui se maintient au cours du temps. Une analyse de la littérature rapporte des taux de concordance entre la tumeur primitive et les métastases variant de plus de 80 à 100 % selon les études et les techniques utilisées (le plus souvent > à 90 %) (9-20). Une synthèse non exhaustive est rapportée dans le tableau I. Il faut cependant souligner que, dans ces études, les femmes n’avaient pas reçu de traitement par trastuzumab en adjuvant. À première vue, chez les patientes, au moment la rechute, il apparaît donc logique de ne biopsier la métastase dans le but de déterminer le statut HER-2 qu’en cas de situations particulières : statut HER-2 de la tumeur initiale indisponible, statut HER-2 de la tumeur initial douteux (++ en IHC sans CISH ou FISH techniquement possible) ou si la tumeur primitive est essentiellement intracanalaire. Dans les autres cas, la décision d’administrer ou pas une thérapie ciblée anti-HER-2 peut être prise en tenant compte du phénotype de la tumeur primitive. Mais, finalement, le risque maximal, pour nos patientes, en évaluant incorrectement le statut HER-2 serait de ne pas administrer à
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une femme, présentant une tumeur HER-2 +++, une thérapie ciblée susceptible d’améliorer son pronostic de survie. Or, il apparaît, et essentiellement à partir des données les plus récentes, que dans un faible pourcentage de cas, des métastases puissent être HER-2 +++ alors que la tumeur primitive ne surexprimait pas la protéine. Si bien que l’on peut être tenté de proposer la biopsie d’une métastase, chaque fois qu’il en existe une de facilement accessible, afin de s’assurer de l’absence d’indication à prescrire une thérapie anti-HER2. Seule une étude publiée en 2004 (21) est en contradiction avec ces données et suggère que l’amplification du gène codant pour la protéine HER-2 pourrait être un événement apparaissant tardivement lors de la progression du cancer du sein. En effet, les auteurs rapportent l’apparition d’une amplification du gène HER-2 au niveau de cellules tumorales circulantes chez neuf patientes sur 24 qui présentaient une tumeur initialement considérée comme HER-2 négative. Quatre de ces neuf femmes ont reçu un traitement contenant du trastuzumab et trois semblent y avoir été sensibles. Cependant, la technique utilisée dans cette étude est critiquable (le phénotype des cellules circulantes est-il le reflet des cellules formant les métastases ?) et non aisément reproductible en pratique quotidienne.
Nbre de cas
Fréquence variation (%)
+→–
–→+
Tapia, 2007 (20)
105 FISH
8 (7,6 %)
5
3 (2,85 %)
Zidan, 2005 (18)
58 IHC
8 (13,8 %)
1
7 (3 réponses au trast.) (12 %)
Regitnig, 2004 (17)
17 FISH
4 (23,5 %)
0
4 (23.5 %)
Gong, 2003 (19)
60 FISH
2 (3,3 %)
2
0
Bozzeti, 2003 (16)
14 FISH
0
0
0
Vincent-Salomon, 2002 (15)
44 IHC
2 (4,5 %)
2
0
Gancberg, 2002 (14)
107 IHC 68 FISH
6 (5,6 %) 5 (7,35 %)
0 2
6 (5,6 %) 3 (4,4 %)
Tanner, 2001 (13)
46 FISH
0
0
0
Schimizu, 2000 (12)
21 IHC
0
0
0
Références
Tableau I – Analyse de la littérature rapportant des taux de concordance entre la tumeur primitive et les métastases.
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Variations phénotypiques sous l’effet des traitements Expression des RH sous l’effet d’une hormonothérapie (HT) Plusieurs études suggèrent qu’une HT, et en particulier le tamoxifène, pourrait inhiber la croissance des cellules tumorale RE+, alors que les cellules RE– continueraient à proliférer. En 1995, Jonhston et al. (22) rapportent une perte d’expression du REa dans 39 % des cas (7 cas sur 18), après un traitement adjuvant par tamoxifène pour une tumeur primitive RE+. L’étude plus récente de Dowsett et al. (23), réalisée dans la même situation clinique, n’affiche une perte d’expression du REa que dans 17 % des cas (5 cas sur 29).
Expression des RH sous l’effet du trastuzumab En raison des interrelations, mises en évidence in vitro, entre les voies du REa et celles découlant des récepteurs à activité tyrosine kinase, une équipe milanaise (24) a étudié l’impact d’un traitement par trastuzumab ± chimiothérapie sur l’expression des RH et de HER-2 chez dix patientes présentant une tumeur initialement RE–, RP– et HER-2 +++. Après une période médiane de 9 semaines (allant de 3 à 37 semaines), une deuxième biopsie pour analyse de l’expression de chacune de ces trois protéines a été réalisée : alors que toutes les tumeurs continuent à surexprimer l’oncoprotéine HER-2 ; trois tumeurs sont devenues RH+ (valeur seuil > 10 %). Deux de ces patientes ont ensuite reçu une HT et l’une d’entre elle n’a pas manifesté de signe de progression sous létrozole pendant 3 ans. Bien que portant sur un très faible nombre de cas, cette étude illustre bien le fait que des thérapies ciblées, et notamment le trastuzumab, pourraient parfois provoquer une expression des RH par les tumeurs et donc peut être une certaine hormonosensibilité offrant la possibilité aux thérapeutes d’envisager dans un second temps des traitements hormonaux. Cela reste à confirmer par d’autres études conduites à plus grande échelle et prospectives. De plus, l’expression des RH ne permet pas d’affirmer une hormonosensibilité. Dans l’immédiat, on ne peut recommander de biopsier pour réévaluer le statut RH (initialement négatif ) après un traitement par trastuzumab, sauf exceptionnellement : par exemple, en cas de lésions très accessibles (notamment cutanées) et d’évolutivité relativement lente.
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Expression de HER-2 sous l’effet du trastuzumab Nous méconnaissons, à ce jour, le taux de concordance concernant la surexpression de HER-2 entre la tumeur primitive et les métastases pour les femmes traitées par trastuzumab en situation adjuvante ou néoadjuvante. Il s’agit pourtant d’une situation clinique qui va être de plus en plus fréquente en raison de la prescription de l’anticorps depuis plus de deux ans maintenant dès le stade précoce. Seule une étude grecque permet d’aborder la réponse (25). Les auteurs ont comparé l’expression de HER-2 entre la tumeur primitive le plus souvent (n = 10) ou une métastase (n = 6) et une métastase après traitement par trastuzumab : ils rapportent une perte de surexpression de HER-2 dans un tiers des cas. Cela pourrait être une des causes d’échappement plus rapide (temps médian jusqu’à progression de 9,5 mois versus 12 mois ; p = 0,001). Mais quelle en est la signification ? S’agit il d’une « down regulation » de HER-2 sous l’effet de l’anticorps par extrapolation à ce qui a pu être décrit in vitro ou bien est-ce la conséquence d’une sélection de clones tumoraux différents, c’est-à-dire surexprimant ou pas HER-2 ? Dans quelle mesure cela pourrait impacter la décision des thérapeutes à la progression ? D’autant plus que la seule présence de la cible HER-2 ne suffit pas à garantir un effet antitumoral du trastuzumab et que, de plus, des travaux récents suggèrent des effets possibles même en l’absence de surexpression de HER-2 (en cas de forte expression de la neuréguline). Tout cela est loin d’être clair et toute conclusion définitive serait trop hâtive en particulier parce que l’étude porte sur un petit nombre de patientes (n = 16).
Expression des RH et de HER-2 sous l’effet des chimiothérapies Plusieurs études ont comparé l’expression des RH et/ou de HER-2 par les cellules de la tumeur primitive avant et après chimiothérapie et parfois en comparant par rapport à une série témoin n’ayant pas reçu de traitement néoadjuvant (biopsie versus pièce opératoire). L’étude française de Vincent Salomon (15) retrouve une assez bonne concordance d’expression de HER2 par la tumeur primitive avant et après une chimiothérapie de type FAC. Quinze tumeurs primitives sur 59 surexprimaient HER-2. Après chimiothérapie, le statut HER-2 a été évaluable chez 13 des 15 patientes car il y avait deux réponses histologiques complètes. La surexpression de HER-2 a été retrouvée dans 11 cas. Dans deux cas seulement, une perte d’expression a pu être constatée. D’autres équipes se sont également intéressées à la question et retrouvent un pourcentage de discordance similaire voire à peine plus important (26-28). Par exemple, Quddus et al. (28) relatent une perte de
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surexpression de HER-2 (3+ → 0) chez 5 patientes sur 39 soit dans 12,5 % ; alors que cela n’est observé que dans deux cas sur 60 (soit 3,3 %) chez des patientes témoins n’ayant pas reçu de CT néoadjuvante. Deux études (29, 30), portant sur des petits nombres de patientes (n = 21 et 59) rapportent une variation d’expression du RE et du RP dans environ 50 % des cas. Toutefois, une modification du statut RH (seul élément important car pris en compte par le thérapeute) avant et après chimiothérapie néoadjuvante n’est observée que dans 6 et 5 % des cas. Lee et al. (30) relatent le même taux de discordance du statut RH chez une population témoin. Là aussi, il faut être prudent dans l’interprétation des données : s’agit-il d’une sélection de clones tumoraux sous l’effet des cytotoxiques ou d’une fausse appréciation initiale du phénotype car réalisée sur un prélèvement de petite taille (micro-biopsie) et donc peu représentatif ?
Quel est l’intérêt pour la connaissance de la cancérogenèse mammaire ? Quel est l’intérêt pour la connaissance de la cancérogenèse mammaire et un meilleur développement des nouvelles molécules et en particulier des thérapies ciblées ? Compte tenu de la possible perte d’expression (spontanée ou induite par le tamoxifène) des RH, dans un pourcentage de cas qui n’est peut être pas négligeable, entre la tumeur primitive et les métastases, une nouvelle évaluation systématique du statut RH avant tout traitement par HT (seule ou associée à une autre thérapie ciblée) à un stade métastatique serait souhaitable (du moins à chaque fois qu’une tumeur est assez facilement accessible) pour une meilleure évaluation et interprétation des données d’efficacité, notamment lorsqu’il s’agit d’une étude clinique prospective. La perte d’expression des RH est très loin d’être le seul facteur pouvant déclencher une hormonorésistance mais reste une des causes envisageables. D’autre part, dans les études cliniques prospectives conduites en phase métastatique, la recherche de facteurs biologiques tumoraux (recherche de la cible ou étude de la fonctionnalité des voies de signalisation en aval de la cible) prédictifs de la sensibilité aux traitements devrait systématiquement être réalisée à partir du tissu tumoral métastatique et non à partir de la tumeur primitive. Des biopsies réalisées au moment de l’échappement aux traitements médicaux pourraient aussi nous permettre de mieux en comprendre les mécanismes, sachant toutefois que d’autres paramètres (pharmacogénomique ou pharmacodynamique), indépendants de la tumeur, peuvent être en cause et
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ne doivent donc pas être oubliés. Il est toutefois très difficile de proposer ces biopsies itératives et invasives aux patientes ; mais elles pourraient au moins se réaliser lorsqu’il existe une métastase facilement accessible.
Cas particuliers La biopsie d’une métastase chez des patientes qui auraient présenté deux ou plusieurs tumeurs primitives mammaires de phénotype différent, synchrones ou non, paraît indispensable dans le but de définir le profil d’expression des RH et de HER-2 et pour guider au mieux le choix thérapeutique. On peut conseiller la biopsie d’une métastase chez une patiente qui rechute plusieurs années après le primo-traitement (en moyenne 5 ans). Dans ces caslà, l’appréciation du statut RH (surtout si considéré comme négatif au niveau de la tumeur primitive) peut avoir été incorrecte pour des raisons techniques par exemple. Dans ce cas précis, la biopsie aura aussi pour but de confirmer l’origine mammaire de la métastase. Si le choix se présente quel(s) tissu(s) biopsier préférentiellement ? Il paraît logique de biopsier le site le plus aisément accessible, par exemple des métastases cutanées et ou ganglionnaires superficielles quand elles existent. Le geste sera moins traumatisant et moins risqué pour la patiente. Il faut, dans la mesure du possible, éviter de biopsier les métastases osseuses. La décalcification obligatoire du matériel au cours de la technique anatomopathologique rend moins fiable les analyses immunohistochimiques dont la lecture est déterminante pour le diagnostic de certitude et pour le choix des traitements systémiques (analyse des facteurs prédictifs de réponse).
Conclusion En routine, on ne peut recommander en systématique la biopsie d’une métastase. Celle-ci ne doit être envisagée que dans des cas particuliers : soit dans le but de vérifier un diagnostic histologique, soit dans le but de préciser le statut HER-2 et RH afin d’orienter le thérapeute dans son choix et de ne faire perdre aucune chance aux patientes de recevoir un possible traitement ciblé. En ce qui concerne les RH, il apparaît que la discordance se fasse exceptionnellement d’une négativité initiale vers une positivité. La perte de chance pour les patientes à ne pas recevoir d’HT paraît donc très faible. À l’inverse,
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pour les raisons exposées ci-dessus, on aurait tendance à proposer une réévaluation du statut HER-2, à chaque fois qu’il existe une métastase facilement accessible.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Florence Dalenc
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Le cancer du sein métastatique Définitions actuelles, épidémiologie, présentations cliniques E. Luporsi
Introduction Le pronostic du cancer du sein métastatique reste un problème majeur pour l’oncologue ; depuis ces sept dernières années, les progrès thérapeutiques, du fait des nouveaux traitements mais aussi de l’évaluation de nouvelles stratégies, montrent une amélioration significative de la survie. De plus, les soins de support et la prise en charge psychologique ont modifié considérablement le contexte de cette maladie. La meilleure connaissance des facteurs biologiques est une donnée capitale pour les données à venir et devrait permettre de sélectionner les populations dans le cadre des essais cliniques. Les tumeurs évoluées ou métastatiques entrent dans le cadre de la multidisciplinarité et l’édition récente de guidelines montre tout l’intérêt d’une structuration des stratégies thérapeutiques dans le but d’une prise en charge optimale. La participation des patientes à ces guides de bonne pratiques nous a fait bannir ces deux dernières années les termes de maladie non curable et de maladie chronique au profit de traitement adapté en fonction de l’évolution de la maladie.
Définitions actuelles Types de maladie métastatique Deux formes sont décrites classiquement : le cancer du sein métastatique d’emblée qui représente 1 % des cas de cancer et plus fréquemment le cancer du
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sein traité au stade précoce qui devient métastatique au cours du temps. On parle également de cancer du sein au stade IV. Il s’agit d’une maladie hétérogène avec deux extrêmes : la maladie peut être à progression rapide avec de nombreuses localisations viscérales, résistantes à l’hormonothérapie et ou à la chimiothérapie avec une survie courte ou bien la maladie est indolente, lente d’évolution avec métastases osseuses par exemple, sensibles à l’hormonothérapie et à la chimiothérapie avec plusieurs années de survie. Les facteurs qui peuvent expliquer la différence sont : l’intervalle libre sans maladie par rapport au traitement adjuvant, le statut des récepteurs hormonaux, les sites de la maladie métastatique, le volume de la maladie métastatique, le performance status et les co-morbidités, le statut HER2-neu et la réponse au premier traitement (hormonothérapie et/ou chimiothérapie). Cependant, il y a certains facteurs liés à l’individu qui ne sont pas identifiés et qui sont importants à évaluer et ceci ne peut être réalisé qu’en mettant en place des bases de données.
Survie de la maladie métastatique Les deux objectifs du traitement d’un cancer du sein métastatique sont de prolonger la survie et d’améliorer la qualité de vie. La connaissance d’un taux de réponse à un traitement donné permet de déterminer la probabilité qu’a une maladie de répondre à ce traitement. Cette probabilité doit être mise en balance avec la toxicité potentielle du traitement envisagé. L’objectif de la survie globale en situation métastatique n’est plus l’élément majeur mais c’est la survie sans progression qui a pris le pas ces dernières années. L’efficacité des traitements adjuvants rend complexe la prise en charge du cancer du sein métastatique. Les stratégies thérapeutiques, en particulier avec l’utilisation des thérapeutiques ciblées, ont modifié la maladie avec des périodes plus longues de rémission. Si la survie à 5 ans dans les stades précoces est de 80 %, la médiane de survie, pour les stades métastatiques, est comprise entre 18 et 30 mois (1, 2). Actuellement, de nombreuses évolutions thérapeutiques ont vu le jour ces dernières années et on assiste à une survie sans progression significative (3). De nombreuses stratégies thérapeutiques ont leur place, qu’il s’agisse de chimiothérapie anticancéreuse, de thérapeutiques ciblées, d’immunothérapie, d’hormonothérapie mais également de radiothérapie et de chirurgie. La recherche clinique a une place de choix dans le cancer du sein métastatique
Le cancer du sein métastatique
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et toute patiente devrait avoir la possibilité de rentrer dans un essai clinique, si les critères d’inclusion le permettent. Les recommandations pour la pratique clinique et les conférences de consensus sont plus nombreuses. Ainsi le groupe de travail des recommandations de Saint-Paul-de-Vence (2007)1 et le groupe de travail allemand d’oncologie gynécologique (2006)2 ont émis des recommandations. La probabilité de réussite du traitement en situation métastatique repose sur des facteurs prédictifs : – la positivité des récepteurs hormonaux sur la tumeur primitive et sur les métastases ; – la réponse à une première ligne d’hormonothérapie induira la réponse à une deuxième ligne ; – la réponse à une première ligne de chimiothérapie induira une réponse à une deuxième ligne ; – la présence de métastases osseuses nécessitera des biphosphonates.
Épidémiologie Certaines données peuvent être estimées. En France, l’incidence du cancer du sein est de 42 000 nouveaux cas de cancer du sein infiltrant par an. Grâce au dépistage, à la prise en charge plus précoce et plus adaptée, la mortalité est stable depuis 1975. Le cancer du sein est responsable de 8 800 décès par an. La survie médiane des cancers du sein métastatique est de 2 à 3 ans. Donc 43 700 patientes par an vivent en France avec un cancer du sein métastatique. Le nombre de patientes métastatiques ne diminue pas au cours du temps ; si on note des intervalles libres de métastases plus importants, les explications peuvent être multiples, tumeurs plus petites (du fait du diagnostic plus précoce lié au dépistage), diagnostic anatomopathologique plus précis (marqueurs de risque de rechute : HER2, emboles vasculaires...), doses plus fortes données lors du traitement adjuvant et nouvelles molécules prescrites ces six dernières années.
1. Recommandations Saint-Paul-de-Vence 2007, Springer (sous presse). 2. Von Minckwitz Evidence-based treatment of metastatic breast cancer, 2006. Recommendations by the AGO Breast Commission.
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Présentations cliniques Le jugement clinique basé sur le tableau clinique est le guide le plus pertinent de la stratégie thérapeutique du cancer du sein métastatique. Les synthèses méthodiques de la littérature permettent de dégager des situations cliniques qui seront des facteurs décisionnels dans la décision de la stratégie thérapeutique.
Existence d’un traitement adjuvant Le délai entre le traitement initial et l’apparition de la première métastase est un élément à prendre en compte (4, 5). Plus l’intervalle libre entre la tumeur initiale et la survenue de la maladie métastatique est long, meilleur sera le pronostic et cela quel que soit le type de métastases (cutanées, osseuses ou viscérales). Pour certains auteurs, la valeur pronostique diminue ou disparaît s’il y a eu une chimiothérapie adjuvante et surtout si celle-ci n’a pas été associée à une hormonothérapie. L’intervalle libre défini est en général inférieur à 6 mois, entre 6 mois et un an et supérieur à 1 an. Le type de traitement adjuvant (chimiothérapie et/ou hormonothérapie) (6, 7) a son importance mais l’étude de la littérature est difficile à interpréter car deux éléments sont intriqués : l’existence d’une résistance au traitement et le fait de sélectionner les patientes car celles qui ont une tumeur plus agressive reçoivent une chimiothérapie. Pour l’hormonothérapie, on manque de recul par rapport aux antiaromatases. Les données de la méta-analyse de EBCTG (Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group) pourront nous apporter des éléments supplémentaires. Une évolution sous hormonothérapie serait péjorative, mais dans certaines études l’état des récepteurs hormonaux était inconnu.
Type de métastase
(8-10)
Classiquement, on distingue deux grands types de métastases : les métastases viscérales et les autres, en particulier les métastases osseuses ou cutanées. L’urgence thérapeutique sera fonction du type de la localisation métastatique en particulier hépatique, pulmonaire et séreuse. L’existence de métastases cérébrales est une entité à prendre en compte de façon particulière. Il existe une relation entre le site de la métastase et les caractéristiques de la tumeur pri-
Le cancer du sein métastatique
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mitive : les métastases localisées au niveau cutané ou des parties molles et osseuses sont plus fréquentes dans des tumeurs mieux différenciées de grade SBR I ou II et surviennent plus tardivement, le plus souvent pour les tumeurs avec des récepteurs hormonaux positifs, alors que les métastases hépatiques pulmonaires et cérébrales et les sites métastatiques multiples s’observeront le plus souvent dans les cas de tumeurs de grade III avec des récepteurs d’estrogène et de progestérone négatifs. Les métastases hépatiques et cérébrales seraient plus fréquentes pour les tumeurs de type « basal-like » définies par le profil RE- RP- HER2-. Après métastase osseuse, la dissémination viscérale secondaire est un facteur pronostique discuté dans la littérature, péjoratif pour certains et sans influence pour d’autres. La survenue de localisation osseuse après une métastase viscérale initiale a un meilleur pronostic que les métastases viscérales exclusives.
Nombre de métastases (11) Le nombre est un facteur péjoratif : plus le nombre de sites ou le nombre de métastases dans un site est grand, plus le pronostic est aggravé.
Facteurs liés à la tumeur primitive (12, 13) Ceux-ci ont un poids pronostique moins important que les caractéristiques propres de la métastase. Plus l’envahissement ganglionnaire est élevé, plus la survie en phase métastatique est courte. Plus la taille tumorale histologique est importante, moins bon sera le pronostic. Le pronostic de la maladie métastatique est plus mauvais pour les grades SBR III par rapport aux grades I et II. Pour les formes lobulaires, les sites métastatiques sont plus volontiers abdominaux mais le type histologique n’influence pas la survie en phase métastatique. L’existence de récepteurs hormonaux et du statut HER2 sur la tumeur initiale et/ou sur la métastase est à prendre en compte.
Éléments propres à la patiente (14, 15) L’âge réel physiologique et l’espérance de vie sont des éléments importants à prendre en compte : les patientes âgées auraient un pronostic plus mauvais
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mais ce facteur est discuté car ces patientes n’ont pu accéder aux essais thérapeutiques. Le fait que la patiente soit ménopausée ou pas est un élément qui intervient dans la décision thérapeutique. Le performance status intervient dans le pronostic, plus celui-ci est mauvais moins bon est le pronostic. L’état général et les co-morbidités sont à prendre en compte dans la décision thérapeutique.
Cas particuliers des métastases d’emblée (16) Les facteurs pronostiques sont le nombre de métastases, leur localisation, l’envahissement ganglionnaire et les récepteurs hormonaux. Il n’y a pas d’études comparant de façon directe la survie des formes métastatiques d’emblée et des formes métastatiques secondaires, mais la survie est meilleure en cas de métastases osseuses initiales d’emblée, c’est une situation qui est cependant rare.
Perspectives La disponibilité de nouvelles molécules efficaces permet de proposer aux malades différentes associations et stratégies thérapeutiques. Les notions de qualité de vie ou de soins ambulatoires se développent notamment au travers des réseaux de soins. Cependant, de nombreuses questions restent en suspens : définition des facteurs pronostiques et de sous-populations afin d’optimiser les prises en charge, enchaînement des traitements, utilisation de toutes les nouvelles thérapeutiques, durée optimale des traitements. La dynamique révélée par les nombreuses études cliniques menées dans le monde montre que les cliniciens et les industriels sont très sensibles à l’amélioration de la prise en charge de ces malades. Des progrès ont déjà été observés, d’autres suivront. L’avenir est dans les bio-marqueurs prédictifs du bénéfice des divers traitements mais la recherche sur ces bio-marqueurs se heurte actuellement à des problèmes de méthodologie, de conclusions peu pertinentes sur le plan statistique et d’effectifs. Pas moins de quatre vingt huit références médicamenteuses sont répertoriées dans le cancer du sein métastatique. Si la médiane de survie a augmenté ces dernières décades, en particulier chez les patientes avec une maladie
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hormono-dépendante, cela correspond aux progrès de l’hormonothérapie. Une meilleure définition de l’expression génique permet d’identifier différents sous-types de cancers du sein. Ces nouvelles définitions interviennent depuis récemment dans certaines décisions thérapeutiques et vont apparaître dans les différentes stratégies de traitement. L’hétérogénéité de la maladie fait qu’il y a plusieurs sous-types différents, il est donc important dans le cadre des essais cliniques de caractériser les différences entre les populations de patients. Une meilleure structuration de nos connaissances sur les facteurs biologiques, sur les nouveaux facteurs pronostiques et prédictifs nous permettra d’évoluer vers une stratégie d’évaluation en fonction des différentes phases (17).
Conclusion Actuellement, la preuve de l’efficacité par des marqueurs biologiques doit devenir un objectif prioritaire, en particulier pour les essais thérapeutiques, tout en sachant que cela nécessitera une évolution dans la méthodologie et donc un changement pour les évaluations thérapeutiques. Si diminuer les symptômes et prolonger la survie dans les meilleures conditions pour la patiente a permis une avancée certaine dans la prise en charge, la priorité à l’avenir est de trouver pour une catégorie de patientes donnée le traitement qui sera le plus actif. Le clinicien a du mal à estimer la survie des patientes métastatiques, mais les patients souhaitent une meilleure connaissance de l’évolution métastatique. Le fait que des guidelines voient le jour dans cette situation montre un souhait de standardiser les stratégies thérapeutiques. Il serait utile de développer et de mettre en place un score pronostic basé sur les variables pronostiques du cancer du sein métastatique. Un meilleur recueil de l’information clinique permettrait d’adapter des plans appropriés et ainsi de partager avec le patient le projet thérapeutique car la stratégie thérapeutique sera toujours individuelle et adaptée à chaque patient.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Élisabeth Luporsi
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Le phénotype biologique du potentiel métastatique des cancers du sein existe-t-il ? T. Maudelonde, N. Boulle et J. Solassol
Introduction L’acquisition par les cellules cancéreuses d’un phénotype métastatique représente un des aspects les plus péjoratifs de la progression tumorale. Ce phénotype se caractérise par l’invasion des tissus voisins, par la migration des cellules métastatiques via le sang et la lymphe, vers des organes qu’elles sont capables d’envahir et dans lesquels elles prolifèrent. Ces événements résultent de l’implication directe des produits de l’activité de certains gènes, des fonctions intégrées provenant des molécules organiques synthétisées par la cellule, d’une dérégulation de l’homéostasie tumorale par des phénomènes inflammatoires et/ou des modifications d’activité enzymatique. Les innovations technologiques récentes permettent d’envisager le concept de signature moléculaire des tumeurs. Elles peuvent évaluer l’expression de plusieurs gènes à la fois. Le génome humain possède 30 000 à 40 000 gènes. Leur expression donne naissance à plus d’un million de protéines. Un gène peut donc être à l’origine de plusieurs protéines. Le choix de la synthèse d’une protéine donnée va donc dépendre non seulement de la transcription du gène en ARN mais aussi d’autres mécanismes dont les régulations sont complexes et vont varier d’un tissu à l’autre. On appelle génome, l’ADN total, le transcriptome, l’ensemble des ARN et protéome, les protéines synthétisées dans la cellule. Au cours de la cancérogenèse se produisent des anomalies de l’expression des gènes qui vont modifier ces trois grands groupes de molécules. L’étude de la génomique fonctionnelle (ARN) et de la protéomique devrait donc montrer des profils biologiques spécifique de cancers du sein métastatiques.
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Aspects physiopathologiques de la formation des métastases Depuis longtemps, les cliniciens savent que la progression tumorale n’est pas obligatoirement corrélée à son potentiel métastatique et la recherche de marqueur spécifique du potentiel métastatique d’un cancer récemment diagnostiqué est un des enjeux majeurs de la cancérologie. Cet objectif passe par une bonne compréhension des mécanismes intimes du potentiel métastatique afin d’envisager des thérapies plus spécifiques dirigées contre les voies métaboliques impliquées.
Hypothèses mécanistiques de l’évolution métastatique d’un cancer Plusieurs modèles d’évolution métastatique ont été proposés : – Il s’agit d’un événement tardif de la cancérogenèse. Quelques cellules cancéreuses, durant la croissance tumorale, acquièrent la capacité de métastaser par le biais de mutations additionnelles mais il n’y a pas de corrélation entre la taille tumorale et l’apparition de métastase. – Il s’agit d’un événement précoce et il existe deux possibilités : ou bien les sous-populations de cellules métastatiques sont relativement instables résultant dans un équilibre entre la génération et la perte de ces variants cellulaires, ou bien une fois que le clone métastatique a émergé, il prolifère à grande vitesse et domine la masse tumorale elle-même (théorie dite clonale dominante de métastase). Il n’est pas encore possible de trancher entre ces deux hypothèses ; cependant, les études de profil d’expression génique suggèrent fortement que la capacité à métastaser est un événement précoce de la tumorigenèse mammaire. En effet, le transcriptome des tumeurs primaires et celui des métastases qui se développent plusieurs années après sont très semblables. Ces données, associées à la théorie émergente du développement des tumeurs cancéreuses à partir des cellules souches mammaires (1, 2), suggèrent qu’il existerait des cancers à fort potentiel métastatique et d’autres à faible potentiel (fig. 1). À partir des tumeurs de type métastatique, probablement sous l’influence des fibroblastes du stroma, des sous-populations pourraient essaimer. Ces variants métastatiques proviendraient de cellules souches cancéreuses subissant des mutations oncogéniques générant des tumeurs de mauvais pronostic. Au
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contraire, si des événements génétiques se produisent dans des cellules progénitrices différenciées (provenant de cellules souches par division asymétrique), cela aboutirait à un cancer de bon pronostic non ou peu métastatique. Les mutations qui arrivent à différents moments de la différenciation tumorale vont alors contrôler la capacité à métastaser. Certaines cellules métastatiques pourraient exprimer un set de gènes spécifique d’un tissu permettant à la cellule cancéreuse de se développer dans un tissu particulier (os, poumon, foie…).
Agents carcinogènes
Agents carcinogènes
Division asymétrique et différenciation
Tumeur
Division symétrique
Cellule souche
Embryon
Cellule souche transformée
Adulte jeune
Adulte âgé
Fig. 1 – Hypothèse de carcinogenèse à partir des cellules souches (Modifiée d’après Murrell A. (2006) The ScientificWorld J 6: 1888-910).
Mécanismes moléculaires de la diffusion métastatique Le processus de diffusion métastatique peut être divisé en trois étapes (fig. 2) : – détachement de la cellule tumorale de son milieu d’origine et invasion de la matrice environnante ; – passage dans la circulation sanguine ou lymphatique ; – extravasation, survie et multiplication dans un site secondaire. Le passage dans la circulation des cellules tumorales semble une étape « facilement » franchie par les cellules tumorales. À l’opposé, la première étape et plus particulièrement la troisième étape semblent être des étapes limitantes du processus métastatique.
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1-détachement/migration
2-passage dans la circulation
3-survie et multiplication dans un site étranger
Lame basale
Matrice extracellulaire
Étape limitante
vaisseaux
Étape peu limitante
Étape limitante
Fig. 2 – Étapes de la diffusion métastatique.
Détachement du milieu d’origine et invasion de la matrice environnante Cette étape met en jeu les molécules d’adhésion et les protéases extracellulaires.
Molécules d’adhésion Les interactions de la cellule avec les cellules voisines et avec la matrice extracellulaire régulent son comportement en induisant différents signaux impliqués dans la survie, la prolifération ou la différenciation cellulaire. Ces interactions se font par l’intermédiaire des molécules d’adhésion : molécules de la famille des cadhérines, calcium-dépendantes (exemple : cadhérine-E) ou de la superfamille des immunoglobulines, indépendantes du calcium (exemple : N-CAM ou neural cell adhesion molecule) pour les interactions cellule/cellule, molécules de la famille des intégrines pour les interactions cellule/matrice extracellulaire. L’adéquation de la cellule normale avec son environnement est validée par ces molécules d’adhésion et est nécessaire à sa survie : ainsi, une cellule normale, placée dans un environnement étranger, ne peut pas survivre et est vouée à l’apoptose. La cellule tumorale présente une modification de ses molécules d’adhésion. Les tissus cancéreux sont fréquemment caractérisés par la perte de la cadhérine-E et des modifications des molécules d’adhésion de la superfamille des immunoglobulines (N-CAM, etc.) ont été également décrites. La cellule tumorale devient capable de se détacher de son environnement habituel et d’établir de nouvelles liaisons adhésives. Par ailleurs, la cellule tumorale présente une résistance accrue à
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l’apoptose qui lui permet de survivre hors de son environnement naturel et en l’absence des interactions normales avec ses cellules voisines et la matrice extracellulaire.
Protéases extracellulaires Elles appartiennent à différentes familles telles que la famille des métalloprotéases matricielles (MMP), des sérines protéases (plasmine…) ou des aspartyl protéases (cathepsine D…). Elles sont fréquemment surexprimées dans les tissus tumoraux et elles sont impliquées dans la migration et l’invasion tumorale par différents mécanismes : – la dégradation de la matrice extracellulaire et de la lame basale, favorisant la migration cellulaire ; – la libération de facteurs de croissance et de survie séquestrés au sein de cette matrice (exemple : le facteur de croissance FGF) ; – le clivage de molécules d’adhésion telles que la cadhérine-E ; – une stimulation de la migration cellulaire.
Passage des cellules tumorales dans la circulation Le suivi, dans des modèles animaux, de cellules tumorales injectées dans la circulation a permis de montrer que la survie des cellules tumorales dans le système vasculaire, leur arrêt puis l’extravasation sur un site secondaire ne constituent pas des étapes limitantes du processus métastatique (peu de pertes cellulaires). Le problème posé par cette étape est de pouvoir détecter les cellules tumorales circulantes afin d’évaluer le risque d’apparition de métastases chez un patient porteur d’une tumeur. Plusieurs approches ont été proposées pour cela, notamment des approches de biologie moléculaire ou de repérage des cellules tumorales présentes dans le sang, par exemple à l’aide d’anticorps spécifiques.
Survie et multiplication dans un site étranger Peu de cellules tumorales sont capables de survivre et de proliférer sur un site différent de leur site d’origine (site secondaire). Ainsi, dans une expérience menée sur une lignée tumorale d’origine cutanée (mélanome B16F1) injectée dans la veine mésentérique de souris, on a pu montrer que 83 % des cellules tumorales injectées atteignaient le parenchyme hépatique, que 2 % de ces cellules formaient des micrométastases et que seulement 0,02 % des cellules injectées formaient des métastases cliniquement décelables, capables d’entraîner le décès de l’animal.
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Différents obstacles s’opposent à la survie et à la prolifération de la cellule tumorale dans un site (environnement) étranger. Ces obstacles sont notamment l’inadéquation entre les molécules d’adhésion présentes à la surface de la cellule tumorale et celles présentées par son nouvel environnement (cellules, matrice extracellulaire) et l’inadéquation des facteurs de croissance et de survie présents au niveau du site secondaire. Ces inadéquations entraînent, dans une cellule normale, l’arrêt du cycle cellulaire et l’apoptose. Un autre obstacle important rencontré par la cellule tumorale est la réponse immunitaire antitumorale du nouveau site colonisé. Lorsqu’une cellule tumorale survit dans le site secondaire dans lequel elle a migré, elle peut donner lieu à : – une cellule tumorale dormante, qui reste localisée dans le site secondaire mais ne prolifère pas (ni prolifération, ni apoptose). La présence de telles cellules permettrait d’expliquer la survenue, parfois plusieurs années après le traitement d’une tumeur primitive, de métastases secondaires ; – des micrométastases. Dans ce cas, la cellule tumorale est capable de proliférer dans le site secondaire mais cette prolifération serait contrebalancée par une apoptose cellulaire limitant son développement. Ces micrométastases restent très difficiles à détecter car de petites tailles (< 2 mm) ; – des métastases actives. À ce stade, les cellules tumorales prolifèrent au niveau du site secondaire. L’angiogenèse se développe permettant l’expansion des métastases, qui deviennent cliniquement décelables et capables de menacer le pronostic vital. De nombreuses questions restent posées sur cette troisième étape et font l’objet de recherches actives : quelles sont les cellules tumorales qui, parvenues au niveau du site secondaire, vont évoluer vers des métastases actives, et quelles sont leurs caractéristiques ? Quels sont les gènes impliqués dans ce processus ?
Spécificité tissulaire des métastases Le site des métastases secondaires est lié à l’affinité particulière des cellules cancéreuses issu d’un organe donné pour certains tissus. Ainsi, le cancer du sein donnera surtout des métastases ganglionnaires, pulmonaires, hépatiques et osseuses (fig. 3). Plusieurs hypothèses, non exclusives, permettent d’expliquer la spécificité tissulaire des métastases. – L’hypothèse « mécanique » : L’arrêt et la prolifération des cellules tumorales dans un site secondaire sont liés au trajet emprunté par les cellules tumo-
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ganglion poumon
Récepteur CXCR4 Chimiokine CXCL12
foie
os
Fig. 3 – Mécanisme de la spécificité tissulaire des métastases.
rales et aux contraintes mécaniques subies par ces cellules. Ainsi, la cellule tumorale est contrainte de s’arrêter lorsque la taille des capillaires se réduit et va coloniser le tissu à proximité de ces capillaires. – L’hypothèse « soil and seed » : Les cellules tumorales ne peuvent proliférer dans un site secondaire qu’en présence des facteurs adéquats, nécessaires à leur survie et à leur prolifération (facteurs de croissance, molécules d’adhésion, etc.). Ainsi, les cellules tumorales issues de cancer du sein sont probablement stimulées par des facteurs produits par les cellules osseuses (ostéoblastes, ostéoclastes) tels que le TGF-β ou la PTH-RP (parathyroid hormone related protein), alors que des cellules tumorales issues d’autres tumeurs primitives n’y sont pas sensibles. – L’hypothèse des chimiokines : Récemment, il a été montré que les cellules tumorales étaient attirées, comme les globules blancs, sur des sites secondaires par des chimiokines spécifiquement produites au niveau de ces sites. Les cellules de cancer du sein expriment abondamment le récepteur transmembranaire CXCR4, qui lie la chimiokine CXCL12. Or, cette chimiokine est produite de manière spécifique par les tissus pulmonaire, osseux, ganglionnaire et hépatique qui sont les sites préférentiels de métastases du cancer du sein. Un aspect intéressant de cette hypothèse est qu’elle permet d’envisager des thérapeutiques ciblées contre les métastases. Ainsi, des auteurs travaillant sur le cancer du sein ont-ils diminué très significativement le développement de métastases
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ganglionnaires et pulmonaires en traitant des souris, auxquelles on avait injecté des cellules issues de tumeur du sein, par des anticorps anti-CXCR4. Au total, une cellule cancéreuse métastatique paraît avoir des caractéristiques qui devraient la différencier des autres cellules cancéreuses et depuis plusieurs années les auteurs recherchent le ou les marqueurs permettant de les détecter.
Marqueurs de métastases La recherche de marqueurs de métastases a évolué en plusieurs étapes. Tout d’abord ce fut la corrélation entre l’intervalle libre de récidive, la survie globale et des marqueurs protéiques détectée sur la base d’une hypothèse mécanistique (exemple : protéases, facteurs intervenant dans la croissance cellulaire) puis, sous l’impulsion donnée par le séquençage du génome humain, l’étude comparative de l’expression génique des cellules normales et de celle des cellules tumorales s’est développée définissant la notion de famille de gènes caractéristiques d’un cancer ou cluster de gènes. La dernière étape qui est en cours de développement est l’approche protéomique, plus complexe et qui est encore limitée par des aspects technologiques, mais qui est peut-être celle qui apportera le plus d’éclaircissement.
Marqueurs classiques Ils sont essentiellement cliniques. Le cancer du sein métastase préférentiellement dans l’os, le foie et le poumon. Le risque de métastase augmente avec l’existence d’un envahissement ganglionnaire, la taille de la tumeur et la perte de différenciation cellulaire au niveau histologique. Chez les femmes sans envahissement ganglionnaire, l’envahissement vasculaire est un paramètre prédictif important. 30 % des femmes sans envahissement ganglionnaire auront des métastases et 30 % des femmes avec envahissement ganglionnaire n’auront pas de métastase plus de 10 ans après le traitement local. Les marqueurs biologiques permettant de détecter la localisation métastatique restent encore à trouver. Cependant, les cancers du sein avec des récepteurs aux estrogènes métastasent plus à l’os et les cancers lobulaires au niveau de l’ovaire ou du tractus digestif.
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Marqueurs récents Ils sont surtout biologiques. Les premiers correspondent à des gènes dont l’activité dans les cellules cancéreuses a une logique biologique reconnue : – ERBB2 ou HER2 qui est un membre de la famille du récepteur de l’EGF (HER1) est retrouvé amplifié ou surexprimé dans 30 % environ des cancers du sein et est associé à un mauvais pronostic dans les formes avec envahissement ganglionnaire. L’utilisation d’anticorps humanisés inhibiteurs d’HER2 comme traitement adjuvant des cancers du sein ayant une amplification de HER2 améliore de façon spectaculaire leur pronostic. – La détection de cellules cancéreuses disséminées circulantes, dans la moelle osseuse ou dans les ganglions. Quelques études ont recherché des cellules cancéreuses circulantes par marquage immuno-histochimique ou par RT-PCR. Sur de petites séries, il a été retrouvé une corrélation entre les cellules détectées par la recherche de l’ARN messager de la cytokératine 19 ou de la mammoglobine et un raccourcissement de l’intervalle libre de récidive. Des études plus nombreuses montrent que la présence de cellules cancéreuses mammaires dans la moelle osseuse, utilisant des anticorps contre des protéines épithéliales, principalement des cytokératines, est un marqueur de raccourcissement de l’intervalle libre de récidive et de la survie globale mais tous ces résultats sont très controversés. Il est possible que la difficulté à établir une corrélation entre la présence de cellules cancéreuses à distance du foyer originel et le développement de métastases proviennent du fait que moins de 0,1 % des cellules cancéreuses circulantes sont capables d’établir des lésions métastatiques. Ceci voudrait dire que la plupart des cellules cytokératine-positives des micrométastases retrouvées dans la moelle osseuse ne sont pas capables de former des métastases. – L’urokinase type activateur du plasminogène (uPA) et son inhibiteur (PAI1) qui intervient dans les étapes précoces de la cascade métastatique caractérisée par la dégradation de la membrane basale et de la matrice extracellulaire. Cette invasion s’accompagne de l’activation de systèmes enzymatiques dont celui des métalloprotéases et celui de l’uPA. Ce dernier est associé à un récepteur et à deux inhibiteurs (PAI1 et PAI2). L’uPA active le plasminogène en plasmine qui dégrade les composants de la matrice extracellulaire et active les métalloprotéases. PAI1 est produit par le stroma et souligne l’importance des relations entre la tumeur et le stroma, notamment pour contrôler les mécanismes de la protéolyse initiée par le cancer. Les patientes présentant un cancer du sein, avec ou sans métastase ganglionnaire et ayant une élévation de l’activité uPA ont un mauvais pronostic avec un risque élevé d’apparition de
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métastases (3). Une augmentation associée de PAI1 renforce la valeur pronostique de l’uPA. L’intérêt pronostique de l’étude de l’activité uPA associée à celle de PAI1 a été évalué favorablement par le « Tumour Marker Utility Grading System » mais il n’a pas encore une large application en clinique. L’étude du profil d’expression génique des cancers du sein devrait permettre de mieux appréhender l’hétérogénéité et d’augmenter notre efficacité thérapeutique comme l’attestent plusieurs travaux récents qui montrent qu’un cancer ne s’explique pas par l’altération d’un seul gène mais plutôt par une famille de gènes qu’on appelle cluster. Ce cluster serait spécifique d’un type de cancer.
Méthodologie Ces méthodes exploitent une propriété des molécules d’ADN et d’ARN qui est l’hybridation par complémentarité des bases azotées des nucléotides que constituent les acides nucléiques. Une séquence d’ADN synthétisée in vitro et fixée sur un support devient ainsi une sonde capable de reconnaître sa séquence complémentaire dans un milieu contenant des ARN ou de l’ADN. On est capable de fixer sur une surface, parfois inférieure à 1 cm2, plusieurs milliers de sondes permettant ainsi d’apprécier le transcriptome d’un type cellulaire (4). Deux technologies existent : la société Affymetrix synthétise des sondes de petite taille (20-25 nucléotides), in situ sur le support, concernant plusieurs milliers de gènes. D’autres synthétisent des sondes qui sont souvent plus longues, puis les fixent sur le support afin de former ainsi des puces dites « à façon », car les gènes recherchés sont choisis par le chercheur concerné. La cible à détecter est auparavant rendue fluorescente, aussi, lorsqu’elle est retenue par sa sonde complémentaire, elle émet un signal fluorescent facilement visible. Cette intensité va varier en fonction du nombre de molécules d’ARN correspondant présentes dans le milieu à analyser. Puisqu’il s’agit de plusieurs milliers de gènes, les variations d’expression mises en évidence par les puces à ADN vont générer énormément d’informations qui ne peuvent être interprétées sans l’aide de la bio-informatique qui permet de les traiter de façon globale. Grâce à cette méthodologie, certaines équipes ont mis en évidence des clusters de gènes dont l’expression est altérée durant la cancérogenèse mammaire. Malheureusement, ces études sont faites sur un nombre d’échantillon encore insuffisant pour maîtriser la variabilité biologique (5).
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Une première étude a permis de montrer l’existence de cinq groupes de cancer du sein non décrits auparavant (6-8) et présentant des pronostics différents. Une classification hiérarchique met en évidence les récepteurs aux estrogènes comme le facteur informatif le plus important. Les cancers du sein se divisent en RE+ et en RE-. Tout d’abord trois sous-groupes de cancer sans expression de RE α : un « type basal » qui exprime les cytokératines 5/6 et 17 et celui des tumeurs surexprimant HER2, tous deux de très mauvais pronostic ; un sous-groupe intitulé « semblable au sein normal » qui exprime les gènes des adipocytes et des autres cellules mammaires d’origine non épithéliale. Le groupe des cancers avec expression du RE α était divisé en trois sousgroupes : des tumeurs étiquetées « luminales A » qui surexpriment les cytokératines 8 et 18, et des tumeurs « luminales B » et « luminales C » qui ont des taux plus faibles de cytokératines et qui ont un moins bon pronostic. L’existence de ces groupes de cancers a été validée dans des séries de patientes indépendantes des groupes de caractérisation. Ces différentes classes ont des signatures biologiques très différentes qui suggèrent des mécanismes moléculaires particuliers à chaque type biologique étudié et permet d’espérer des thérapies ciblées adaptées (9). Cependant, des études sur de plus larges populations de patientes, de l’intérêt en tant que marqueur pronostique et d’indicateur thérapeutique, sont nécessaires avant d’envisager ce phénotypage biologique des cancers du sein en routine. La seconde étude a été faite de façon rétrospective dans un groupe de 98 patientes de moins de 55 ans dont certaines avec des métastases à distance (n = 34), d’autres avec une forme familiale (n = 20) et ayant un suivi moyen de 10 ans afin de caractériser un sous-groupe de patientes à haut risque de métastase à distance (10). Une signature de mauvais pronostic basée sur le profil d’expression de 70 gènes a été retrouvée. Les gènes impliqués interviennent dans le cycle cellulaire, l’invasion, les métastases, l’angiogenèse et la transduction du signal. Cette signature comprend aussi des gènes exclusivement produits par les cellules stromales telles que les métalloprotéases MMP1 et MMP9 qui participent à la dégradation de la matrice extracellulaire soulignant l’importance du rôle du stroma dans l’agressivité tumorale. Cette signature a été validée dans une cohorte de 295 patientes avec ou sans envahissement ganglionnaire (11) et la classification obtenue paraissait être en accord avec les consignes de Saint-Gallen ou celles du NIH. Cette signature qui paraît donc du plus haut intérêt est en cours de validation sur des larges séries rétrospectives de patientes sous le contrôle d’un Consortium international (Trans BIG) (12). La finalité de ce travail est de savoir si l’étude de ces 70 gènes permettrait de remplacer la classique classification clinicopathologique.
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Une autre étude faite dans un groupe de 115 cancers du sein sans envahissement ganglionnaire afin de prédire leur devenir a retrouvé un groupe de 76 gènes dont 60 pour les tumeurs ayant des RE α et 16 pour les tumeurs sans RE α (13). Une validation a été faite sur un autre groupe de 171 patientes sans envahissement ganglionnaire. La signature représente un marqueur pronostique indépendant permettant de définir un sous-groupe de tumeur ayant un haut risque de métastase et un raccourcissement de la survie globale. D’autres travaux ont été faits et suggèrent fortement que la classification des cancers du sein pourrait être redéfinie par l’étude des profils d’expression génique. En outre, les gènes qui auront montré une dérégulation dans ces classes définies moléculairement pourraient constituer des cibles thérapeutiques. Il a aussi été tenté de caractériser les tumeurs métastasiantes par l’étude des profils protéiques. L’approche protéomique est basée sur le couplage de trois technologies de pointe : – l’électrophorèse bidimensionnelle (2-DE) qui permet de séparer plusieurs milliers de protéines d’un même échantillon ; – la spectrométrie de masse (MS) qui permet d’identifier ces protéines et de mettre en évidence leurs modifications post-traductionnelles ; – la bio-informatique qui permet la quantification du niveau des protéines et la constitution de bases de données.
Méthodes classiques de protéomique La méthode classique d’électrophorèse bidimensionnelle, associée à la spectrométrie de masse (MALDI-TOF), repose sur la séparation des protéines en fonction de deux caractéristiques biochimiques : le point isoélectrique (PI) et la masse moléculaire. Une fois la 2-DE réalisée, les protéines sont révélées selon différentes méthodes de détection. Les taches d’intérêt retrouvées sur le gel, chacune pouvant contenir une ou plusieurs protéines, sont découpées et traitées individuellement. L’identification des protéines se fait par spectrométrie de masse de type MALDI-MS (matrix assisted laser desorption/ionisation –mass spectrometry) ou ESI-MS (electro-spray ionisation) couplée à la chromatographie liquide (LC). La tache du mélange séché est bombardée sous vide par un laser pulsé à 337 nm qui excite les molécules et ionise les peptides entraînés dans le champ électrique d’un aimant qui accélère les ions vers un détecteur. Tous les MALDI-MS actuels permettent une acquisition automatique des données et des bombardements programmables. Ils sont
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équipés du mode de détection en Temps de Vol (TOF ou time of flight) et du mode Réflectron, l’arrivée des peptides chargés se faisant dans le détecteur TOF dans l’ordre croissant de masse, les plus lourds étant ralentis voire éliminés, le Réflectron permettant de focaliser la distribution isotopique et d’améliorer la résolution en diminuant la dispersion isotopique. L’automatisation de toutes ces étapes, de la 2DE à l’analyse par MALDI-MS correspond à ce que l’on appelle la protéomique à haut débit menant à identifier plusieurs centaines de protéines dans un même échantillon. Deux logiciels, MASCOT et PROFOUND, fondés sur des algorithmes différents, permettent d’interroger les principales banques de données protéiques SWISSPROT, PROTSITE et celle de la NCBI (US National Center for Biology Information) qui contiennent les traductions des séquences d’ADN de la GeneBank et les résultats de clivage par les protéases de séquences peptidiques connues. Lorsque la protéine n’est pas présente dans la banque de donnée, il est possible d’obtenir des informations sur la séquence en acides aminées des peptides trypsiques en mode MS/MS (double spectrométrie) à l’aide d’un spectromètre de masse de type nano-electro-spray.
Méthode de « puces » à protéines Une nouvelle méthode est apparue, appelée SELDI-TOF pour surface enhanced laser desorption ionisation - time of flight. Développée par Ciphergen biosystems, cette plateforme protéomique associe le principe de « puce » à la spectrométrie de masse. La séparation, la détection et l’analyse des protéines se font directement à partir de l’échantillon biologique avec une sensibilité de l’ordre du fentomole. En pratique, quelques microgrammes de protéines issues d’échantillon variés (liquides biologiques, extraits cellulaire ou tissulaire) sont directement adsorbés sur une surface de 2 mm2 (spot) présentant des propriétés chromatographiques variées. En fonction de la surface chromatographique, le mélange protéique subit un fractionnement qui dépend de la propriété chimique (anionique, cationique, hydrophobe, hydrophile ou d’affinité aux métaux) ou biologique (liaison à un anticorps, un peptide, un récepteur, un ligand ou un acide nucléique). La puce à protéine est introduite dans un spectromètre de masse. Sous l’action du rayonnement laser, les protéines liées à la « puce » sont désorbées/ionisées et analysées en termes de masse sur charge (m/z) d’après leur temps de vol pour atteindre le détecteur. Les signaux traités par des moyens informatiques sont traduits en spectre d’abondance relative versus la masse moléculaire des espèces détectées. Au final,
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on obtient une vue d’ensemble de peptides et de protéines présents dans l’échantillon sous la forme de profils protéiques. Ces derniers sont ensuite normalisés et calibrés afin de limiter les biais liés à l’opérateur, à la surface chromatique ou à l’instrumentation elle-même. Ce système est particulièrement intéressant en analyse différentielle de type patient/témoin pour mettre en évidence des profils d’expression spécifiques. Par la suite, l’identification de marqueurs potentiels nécessite des étapes de purification supplémentaires par des méthodes électrophorétiques ou chromatographiques classiques afin de caractériser précisément des protéines d’intérêt. Méthode de microanalyse réalisée à partir de faibles quantités protéiques de l’ordre du microgramme, elle permet l’établissement de profils d’expression protéique à partir de mélanges complexes. Elle est toutefois encore limitée dans la taille des protéines qu’elle peut analyser.
Applications de la protéomique aux cancers du sein Protéomique et tissus tumoraux La plupart des études sur le sein avaient pour but d’identifier les protéines qui sont différentiellement exprimées dans le tissu normal et le tissu cancéreux. Afin de parvenir à ce résultat, la microdissection par capture laser a été utilisée. Elle permet d’isoler les cellules tumorales du stroma environnant et du tissu normal (14) et de permettre la caractérisation du tissu cancéreux sans contamination par le tissu voisin à l’aide des diverses techniques de protéomique (14, 15). Environ 30 000 à 50 000 cellules semblent suffisantes pour obtenir des données exploitables. Quelques études faites sur un petit nombre de cancers du sein invasifs ont été publiées et un certain nombre de différences dans l’expression protéique ont été trouvées, bien que 70 à 85 % de ces protéines ne sont pas significativement différentes entre le tissu tumoral et le tissu cancéreux (16, 17). Un autre travail portant sur une petite quantité de carcinomes in situ canalaires objective 57 protéines différemment exprimées du sein normal (15). Beaucoup de ces protéines n’avaient pas encore été associées aux cancers du sein démontrant le grand intérêt de développer cette technologie dans la problématique des cancers du sein. Un travail récent recherchant l’expression de protéines dans la tumeur mammaire primaire, pouvant prédire l’envahissement ganglionnaire utilisant la microdissection laser associée au SELDI-TOF, a isolé deux pics
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protéiques localisés à 4 871 et 8 596 daltons qui pourraient être considérés comme des marqueurs potentiels de métastases (18). Leur identification est en cours. Un petit nombre d’équipes a tenté de caractériser des marqueurs spécifiques de métastases par le biais des cultures de cellules mammaires cancéreuses à fort potentiel métastatique soit en induisant une résistance à une drogue (adryamycine, paclitaxel) (19-21) et ont mis en évidence des protéines qui, souvent, ne sont pas des marqueurs classiques de métastases. Une des études les plus récentes (21), utilisant une technique HPLC/MS/MS, compare une lignée de cellules mammaires cancéreuses métastatiques (M4A4) à une lignée de cellules cancéreuses mammaires non métastatiques (NM2C5). Les auteurs ont mis en évidence 43 protéines différentiellement exprimées par les deux lignées dont 16 sont uniquement exprimées dans une des deux lignées. Douze d’entre elles sont hyperexprimées dans la lignée métastatique et ont un rôle dans l’invasion, la motilité cellulaire, le métabolisme et la transduction du signal. Parmi elles, la galectine-1 et NM23H2. La galectine-1, membre de la famille des protéines de liaison de la β-galactoside, régule la prolifération et est impliquée dans les interactions cellule-cellule et cellule matrice extracellulaire. Elle a déjà été proposée comme marqueur de métastases dans les cancers du sein (22) et elle est exprimée très souvent avec HER2 (erbB-2) qui est un facteur de mauvais pronostic. NM23-H2 est une enzyme multifonctionnelle qui régule la transcription d’un certain nombre de gènes (23). Dans une lignée résistante au Taxol®, Dowling et al. (19), analysant les protéines membranaires de ces cellules, ont retrouvé une hyperexpression de 16 protéines dont la galectine-3 et la cofiline qui intervient dans la motilité cellulaire et qui est connue pour avoir une expression altérée dans les cancers du sein (24). Certaines de ces protéines avaient été retrouvées hyperexprimées dans une lignée non métastatique par les auteurs précédents (HSP70, annexine II). Une troisième étude (20), portant sur une lignée de MCF7 résistante à l’adriamycine, montre une hyperexpression de la GST-pi, de l’annexine-5, de la chaîne B de la lactate déshydrogénase et une hypoexpression de la COMT, qui est une enzyme de détoxification utilisée notamment pour le métabolisme des estrogènes. Une autre étude portant sur des lignées de cellules mammaires cancéreuses hyperexprimant HER2 (SKBr3, BT-474) hyperexpriment aussi des enzymes du métabolisme intermédiaire et de détoxification (25) telles que l’acide gras synthétase, la glyoxalase 1, l’Hsp27.
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Sérum des cancers du sein et plateforme SELDI-TOF Les premiers travaux concernant cette technologie ont été publiés par Petricoin et al. en 2002. Utilisant les puces à protéines ils ont consisté à analyser le sérum de malades atteints de cancer de l’ovaire et de cancer de la prostate (26). Ils rapportaient qu’un profil protéique spécifique sans identification des protéines d’intérêt était capable de diagnostiquer ce cancer au stade infraclinique avec une spécificité de 95 %, une sensibilité de 100 % et une valeur prédictive positive de 94 % et de différentier le cancer de la prostate de l’hyperplasie bénigne (27). D’autres exemples pouvaient être donnés dans le cancer colorectal (28), le cancer du sein (29-31), l’hépatocarcinome (32), le mélanome (33) et le cancer du pancréas (34). Cependant, plusieurs groupes de recherche utilisant les mêmes approches expérimentales et travaillant sur la même pathologie n’ont pas mis en évidence les mêmes pics permettant de discriminer le tissu normal du tissu pathologique et ont proposé des marqueurs ou des profils protéiques différents (35, 36). Diamandis (37) a mis en exergue de nombreux paramètres qui affectent la reproductibilité de cette technique : la variabilité dans le recueil des échantillons, leur traitement, le type de conservation, la diversité des groupes de patients, leur statut hormonal, leurs habitudes alimentaires, l’usage de médicament, ainsi que les biais statistiques ou la variation de la stabilité des spectromètres de masse et/ou des puces à protéines. De même, la complexité des outils informatiques augmente la probabilité d’interprétation erronée et de résultats non reproductibles. Par ailleurs, la sensibilité de la détection n’atteint pas les concentrations inférieures à 1 mg/mL alors que les marqueurs tumoraux usuels sont à des concentrations beaucoup plus faibles et ne sont donc pas suffisamment détectés. De sorte que jusqu’à présent, dans les quelques cas où la caractérisation des marqueurs a été effectuée, les protéines identifiées correspondent à des protéines majoritaires du sérum. Il s’agit notamment de l’apolipoprotéine A, des formes tronquées de la transthyrétine, de la chaîne lourde de l’inhibiteur de l’alphatrypsine et de la sous-unité alpha de l’haptoglobine dans le cancer de l’ovaire (36, 38), des alpha 1 et alpha 2 défensine dans le cancer de la vessie (39) ou encore d’une protéine de liaison à la vitamine D dans le cancer de la prostate (40). Il reste à savoir si ces marqueurs ont leur expression altérée spécifiquement en réponse à la prolifération tumorale ou de manière non spécifique en réponse à des épiphénomènes dépendant de la tumeur.
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Les biomarqueurs identifiés jusqu’ici par SELDI-TOF s’avèrent pour la plupart être des protéines majoritaires de la réponse inflammatoire produites par l’environnement péritumoral ou par les cellules immunitaires plutôt que par la tumeur elle-même (35, 41, 42). Ces protéines sont néanmoins potentiellement instructives s’il est démontré qu’il s’agit de fragments protéolytiques dérivés des protéines inflammatoires de la tumeur, spécifiques de chaque tumeur en fonction de son contenu enzymatique (42). L’observation par Liotta et al. — certains des marqueurs identifiés par SELDI-TOF sont des formes dégradées de protéines sériques — fait avancer l’hypothèse que l’abondance de ces marqueurs clivés est le reflet direct d’événements pathologiques induits par le microenvironnement tumoral (43). Des études récentes montrent que l’équilibre entre des protéases et leurs inhibiteurs cellulaires est modifié dans le sérum et le tissu des patients en réponse à la prolifération tumorale (44). Différents membres des familles de protéases comme les métallo-protéases ou les kallikréines plasmatiques et tissulaires ont leur expression augmentée ou diminuée dans certains cancers (45-47). Ces modifications pourraient avoir un retentissement direct sur la capacité des protéases à cliver des protéines sériques et à générer ainsi une signature moléculaire spécifique. Malgré la bonne sensibilité de la technique SELDI-TOF, la détection de ces protéines minoritaires est encore délicate car elle est masquée par la présence de protéines majoritaires telles que l’albumine et les immunoglobulines (37). La détection de la fraction du sérum représentant ces protéines minoritaires est un défi technologique nécessaire à surmonter, afin d’assurer le développement du diagnostic des formes précoces des cancers. Pour conclure, une signature moléculaire des cancers du sein avancés paraît réalisable mais n’est pas encore réalisée. L’association des informations provenant de la recherche en génomique fonctionnelle et en protéomique devrait nous permettre d’appréhender les voies métaboliques utilisées par la cellule tumorale et de mieux choisir la thérapie ciblée la plus efficace.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Thierry Maudelonde
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Nouveauté et analyse critique des facteurs de pronostic et de réponses thérapeutiques J.-P. Spano
Approximativement 10 % des patientes atteintes de cancer du sein nouvellement diagnostiquées présentent une tumeur localement avancée ou métastatique, et 20 à 85 % de l’ensemble de ces patientes, en fonction du stade initial, de la biologie tumorale et du traitement récidiveront soit sous forme locale, soit sous forme métastatique. L’objet de cette présentation est de présenter quels sont les facteurs pronostiques indépendants et de les distinguer des facteurs prédictifs de réponse thérapeutique, à la lumière des données actuelles (tableau I). Mis à part la radiothérapie, les cliniciens ont actuellement trois types de modalités thérapeutiques différents à leur disposition pour une patiente atteinte d’un cancer du sein avancé : l’hormonothérapie, la chimiothérapie et les thérapies dites ciblées. En matière d’hormonothérapie, il est évident que dans un futur très proche, le traitement optimal et le type de séquence seront basés sur le profil génomique ou moléculaire de la tumeur. Plusieurs études précliniques et cliniques suggèrent que les mécanismes de résistance, spécialement pour les Factors predicting the risk for recurrence Low risk
Moderate/high risk
Hormone receptor status
Positive
Negative
HER-2 expression status
Negative
Positive
Disease-free interval
> 2 years
< 2 years
Metastatic burden
Limited
Extensive
Metastatic sites
Soft tissues, bones
Viscera
Vital organ involvement
No
Yes
Tableau I – Metastatic breast cancer: risk evaluation according to factors that affect prognosis (d’après Tacca et al.).
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antiestrogènes, pourraient être associés à une dérégulation des signaux issus de la famille HER, secondaires à des interactions entre les récepteurs RE et HER 1 et HER2. D’autres déterminants moléculaires semblent jouer un rôle en termes de réponse, en particulier au tamoxifène comme AIB1, IGFR, la survivine, ou encore KI67 qui pourrait être un marqueur prédictif de réponse aux inhibiteurs de l’aromatase type anastrozole (cf. études néoadjuvantes). À ce titre, il est fort probable que le traitement hormonal de demain soit un traitement combiné avec un traitement ciblé (anti-REGF, anti-HER2, TKI ou AC monoclonaux, MMPI, inhibiteur de COX2, etc.). Quant à la chimiothérapie, particulièrement indiquée chez les patientes RE et/ou HER2 négatives, les drogues les plus actives restent les anthracyclines, les taxanes, les antimétabolites et les vinca-alkaloïdes. En dépit de plusieurs années de recherche de transfert dans ce domaine, il n’existe pas à l’heure actuelle de facteurs prédictifs de réponse réellement validés en routine. Bien entendu, la surexpression de HER2 reste associée à une meilleure efficacité en termes de réponse avec les anthracyclines et les taxanes comparée à celle obtenue avec du CMF. Le facteur le plus prometteur repose sur le niveau d’expression de la topo-isomérase II alpha, comme facteur prédictif de réponse aux anthracyclines. Sinon la P53 et les tubulines pour les taxanes, la thymidilate synthase et thymidine phosphorylase pour les chimiothérapies à base de 5FU. L’écueil pour déterminer ces facteurs prédictifs est que nous manquons de données prospectives. Cependant, l’utilisation de nouvelles techniques, comme les cADN microarrays et les nouvelles classifications moléculaires du cancer du sein, devrait nous aider à mieux définir les profiles moléculaires à valeur diagnostique et prédictive de réponse. Ces hypothèses sont actuellement étudiées grâce aux nouvelles générations d’études biologiques prospectives et il est évident que leurs résultats devraient modifier radicalement dans un futur proche nos habitudes thérapeutiques. Enfin, quant aux thérapies ciblées, une fois de plus la génomique et la protéomique vont permettre d’identifier les nouvelles cibles de demain. Ces cibles ou molécules sont impliquées à différents niveaux de la biologie de la cellule cancéreuse, que ce soit au niveau du cycle cellulaire, de la transduction des signaux, de l’apoptose, de l’angiogenèse et la diffusion métastatique. Au-delà de HER2 qui a largement fait ses preuves en matière de cible moléculaire, HER1 est en cours d’étude et les molécules associées (MAPK, PI3K, AKT, src, c-myc, etc). En revanche, VEGF et VEGFR n’ont pour l’instant pas réellement montré des résultats significatifs en termes de facteurs prédictifs de réponse alors que le bevacizumab vient d’être approuvé en première ligne métastatique, associé au paclitaxel.
Nouveauté et analyse critique des facteurs de pronostic…
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Enfin, l’autre message fort de cette présentation repose sur le fait que le niveau d’expression de ces facteurs pronostiques et prédictifs peut varier tout au long de l’histoire de la maladie tumorale. En particulier, cette variation concerne le niveau d’expression des récepteurs hormonaux et HER2. Il en résulte qu’il est de nos jours nécessaire d’avoir une réévaluation histologique au moment de la récidive et si un traitement néoadjuvant est appliqué, mieux vaut tenir compte du statut d’expression des facteurs après chirurgie que celui issu de la biopsie initiale. Au total, si le traitement d’un cancer du sein avancé est encore de nos jours un véritable challenge, il est clair que la connaissance de plus en plus complexe de la biologie tumorale, le développement extrêmement rapide des nouvelles drogues et les résultats obtenus à partir des études de phase III et de transfert devraient profondément modifier nos standards dans les cinq prochaines années.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Jean-Philippe Spano
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Imagerie de la maladie métastatique dans le cancer du sein P. Taourel, C. Cyteval, C. Granier, M. Devaux et A. Suau
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme dans les pays développés avec plus de 40 000 nouveaux cas par an en France et environ 10 000 morts chaque année. La très grande majorité des décès en rapport avec un cancer du sein est due à des métastases, en particulier osseuses, pulmonaires, hépatiques et cérébrales. Le processus métastatique est un processus complexe comprenant l’invasion de cellules tumorales à travers la membrane basale, leur passage dans le système vasculaire, la survie de ces cellules tumorales dans la circulation sanguine, la colonisation de la paroi vasculaire et l’extravasation des cellules tumorales dans les organes cibles et, enfin, la croissance tumorale au sein des organes cibles pour former une métastase (1). L’objectif de cette mise au point est de rappeler l’épidémiologie et la fréquence des métastases dans les différents organes cibles, de décrire la séméiologie en imagerie des métastases du cancer du sein, et de proposer des stratégies diagnostiques tant au moment du diagnostic de cancer du sein que dans le suivi d’une patiente traitée pour un cancer du sein.
Épidémiologie des métastases d’un cancer du sein Les métastases d’un cancer du sein sont plus fréquentes dans les grosses tumeurs, dans les tumeurs de grade III (2) et chez les femmes jeunes. Cependant, il existe un certain nombre de critères biologiques intrinsèques à la tumeur expliquant la survenue possible de métastases même dans des cancers du sein invasifs de taille infra-centimétrique. Les métastases de cancer du sein siègent de façon préférentielle au niveau de l’os, du foie, du poumon et du cerveau.
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La fréquence exacte des métastases de cancers du sein est difficile à évaluer car elle dépend d’une part du stade du cancer et, d’autre part, du mode de recherche de la métastase avec, par exemple, une proportion élevée de métastases dans les séries autopsiques qui ne répertorient, le plus souvent, que des patientes décédées d’atteintes néoplasiques. Cela explique, par exemple, le taux atteignant 20 % de métastases ovariennes de cancer du sein classiquement rapportées dans la littérature (2). De façon plus fiable, peuvent être évaluées les fréquences relatives des métastases de cancer du sein. Dans une série incluant 784 patients présentant des cancers du sein dits avancés, il a été retrouvé un taux de métastases osseuses de 48 %, de métastases hépatiques de 30 %, de métastases pulmonaires de 26 %, de métastases cérébrales de 7 % et de métastases pleurales de 7 %. Chez ces patientes présentant un cancer du sein avancé, deux tiers présentaient une métastase ganglionnaire (4). Les métastases cérébrales sont en augmentation chez les patientes sous Herceptin® car cette chimiothérapie ne franchit pas la barrière hématoméningée. Un certain nombre de métastases plus rares sont classiques dans les cancers du sein. Il s’agit, d’une part, des métastases ovariennes, près d’un tiers des métastases ovariennes sont d’origine mammaire et, d’autre part, des métastases choroïdiennes. Les métastases aux autres organes tels que le rein, la rate ou l’utérus sont relativement rares. Les cancers du sein présentent classiquement des métastases dans environ 15 à 20 % des cas, au moment du diagnostic et chez environ 60 % des patientes au moment de l’autopsie (1).
Sémiologie des métastases en imagerie Métastases osseuses L’os constitue donc le site métastatique le plus fréquent et représente le premier site métastatique chez près de la moitié des patientes (5). Les signes cliniques des métastases osseuses sont les douleurs osseuses, les fractures pathologiques, l’hypercalcémie et ses signes fonctionnels et les signes de compression médullaire. Les métastases osseuses siègent préférentiellement là où existe de la moelle hématopoïétique, c’est-à-dire au niveau du squelette axial, et affectent en première intention le rachis pour le cancer du sein. Les métastases osseuses du cancer du sein sont le plus souvent ostéolytiques ou mixtes, plus rarement ostéocondensantes. Elles sont plus souvent multiples qu’uniques.
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La scintigraphie osseuse constitue l’examen le plus souvent employé dans la détection des métastases osseuses. La fixation scintigraphique dépend de l’activité ostéoblastique locale en première intention et du flux sanguin local. La scintigraphie est sensible pour détecter les métastases osseuses du cancer du sein. Les faux négatifs sont rares, rencontrés dans les métastases ostéolytiques pures, de croissance rapide ou lorsque le site métastatique est avasculaire. En revanche, la spécificité est moyenne avec des faux positifs en rapport avec des processus traumatiques ou inflammatoires. Il est classiquement admis que même chez une patiente présentant un cancer ostéophile, environ un tiers des fixations sont bénignes et ce taux est encore plus élevé si l’hyperfixation est costale et isolée. En dehors des faux négatifs rares et des faux positifs plus fréquents, la scintigraphie osseuse rencontre d’autres problèmes. Le suivi de la réponse tumorale est difficile en particulier dans les premiers mois puisque la réponse tumorale s’accompagne d’une augmentation de la fixation en scintigraphie du fait de la néoformation osseuse formée par le processus de réparation. Aussi, la différenciation entre un phénomène de réparation et une aggravation des lésions est difficile pendant les 6 mois qui suivent la fin du traitement. En radiologie conventionnelle, les lésions osseuses secondaires dans le cancer du sein sont de type ostéolytique ou mixte plus souvent que condensant. Les lésions ostéolytiques sont bien limitées ou bien présentent un aspect mité ou perméatif, elles sont plus souvent de siège intramédullaire mais peuvent être de siège intracortical se traduisant par une ostéolyse corticale excentrée, ou par une destruction complète de la corticale. Les lésions mixtes s’accompagnent souvent d’une réaction périphérique condensante. Les métastases rachidiennes se traduisent par une disparition d’un contour cortical et par un tassement vertébral. Les disques intervertébraux sont classiquement épargnés par ces métastases. Tout tassement situé au-dessus de D4 en dehors d’un contexte traumatique très franc doit être considéré comme suspect jusqu’à preuve du contraire. La radiologie conventionnelle est moins sensible (sensibilité autour de 50 %) que la scintigraphie pour le diagnostic de métastases osseuses. Aussi, les indications de radio conventionnelle sont réservées aux patientes présentant une symptomatologie clinique qui oriente le siège de la radiographie et aux patientes présentant une lésion possible mais non certaine en scintigraphie. La réponse tumorale est difficile à évaluer en radiologie conventionnelle. La tomodensitométrie est nettement supérieure à la radiologie conventionnelle en particulier pour l’étude du rachis ; sa sensibilité est supérieure à 80 %. Elle permet de dépister des lésions métastatiques au sein de la moelle avant
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que la destruction osseuse soit visualisée en radiologie. Elle permet une évaluation fiable de la réponse tumorale dans les lésions lytiques bien limitées. L’IRM est vraisemblablement la technique la plus sensible pour dépister l’infiltration tumorale de la moelle osseuse. Elle dépiste cette infiltration avant la détection scintigraphique de la réaction ostéoblastique associée aux métastases. L’utilisation des séquences en diffusion peut être utile pour des bilans corps entiers de métastases, et l’injection de produit de contraste peut permettre de différencier une tumeur viable de tissu nécrotique et donc de mieux évaluer la réponse tumorale.
Métastases hépatiques Les métastases hépatiques de cancer du sein sont le plus souvent métachrones et plus rarement synchrones. Elles sont en général hypoéchogènes sous forme de nodules multiples ou de plages infiltrantes et exceptionnellement hyperéchogènes. En tomodensitométrie, les lésions sont le plus souvent hypodenses au temps portal ; dans moins d’un quart des cas, elles ont une hypervascularisation individualisable à leur phase artérielle. Cependant, dans une série de 300 patientes où 26 % avaient des métastases hépatiques (6), la phase artérielle n’a dépisté des lésions supplémentaires que chez moins de 5 % des patientes, patientes pour lesquelles la phase portale avait déjà permis de visualiser d’autres lésions hépatiques et de faire le diagnostic de maladie métastatique. Or, dans la prise en charge thérapeutique du cancer du sein métastatique, pour lequel un geste de réduction hépatique n’est pas recommandé, l’individualisation de l’ensemble des lésions hépatiques chez une patiente qui a déjà une métastase hépatique a peu d’impact thérapeutique. De façon classique mais rare, une infiltration diffuse avec des remaniements vasculaires et fibreux et une dysmorphie hépatique donnant un aspect de cirrhose hépatique peuvent être rencontrées dans les métastases de cancer du sein, en particulier si une chimiothérapie est associée. Par ailleurs, une augmentation ou une diminution de la taille des métastases hépatiques au cours de l’évolution sous traitement s’accompagnent souvent d’une rétraction hépatique (7). Les patientes sous Tamoxifène® vont développer dans plus de 40 % des cas une stéatose hépatique (8) qui, lorsqu’elle est nodulaire, ne devra pas être confondue avec des métastases hépatiques. Cette stéatose régresse le plus souvent à l’arrêt du traitement. En pratique clinique, chez une patiente qui présente un cancer pour lequel des lésions hépatiques sont découvertes, la caractérisation de petites lésions
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(inférieures à 1,5 cm de diamètre) est un problème fréquent et difficile. Elles correspondent dans la majorité des cas à des lésions bénignes (kyste biliaire, angiome ou hamartome), et dans le cas contraire seule l’augmentation de taille de la lésion permettra d’affirmer sa nature métastatique (9, 10).
Métastases pulmonaires Les métastases pulmonaires des cancers du sein surviennent à la fois par voie hématogène et lymphatique. Tous les aspects radiologiques des métastases pulmonaires sont observés (11), isolément ou en association avec d’autres atteintes comme l’atteinte musculaire pariétale, médiastinale ou ganglionnaire. Les métastases pulmonaires se présentent typiquement sous la forme de nodules parenchymateux, multiples, prédominant à la périphérie des parenchymes, parfois excavés, en particulier chez les patientes sous chimiothérapie. La deuxième forme de présentation des lésions secondaires pulmonaires est celle d’une lymphangite carcinomateuse qui, bien que classiquement bilatérale, peut être unilatérale dans le cadre du cancer du sein. La tomodensitométrie retrouve des épaississements nodulaires et irréguliers des septa interlobaires et du tissu interstitiel péribronchovasculaire. Les métastases pulmonaires se présentent plus rarement sous la forme d’un nodule parenchymateux unique. La découverte d’un nodule parenchymateux unique chez une patiente présentant un cancer du sein n’est pas toujours en rapport avec une métastase pulmonaire. Dans une série incluant 1 416 patientes avec un cancer du sein (12), 3 % avaient une lésion parenchymateuse pulmonaire unique vue à la radiographie du thorax. Cette lésion correspondait dans 52 % des cas à un cancer primitif du poumon, dans 5 % des cas à une lésion bénigne et dans 43 % des cas à une lésion métastatique. En dehors du parenchyme pulmonaire et des ganglions médiastinaux, le cancer du sein peut diffuser à la plèvre avec un aspect de métastases pleurales associant un épanchement pleural et un épaississement de la plèvre pariétale ou viscérale, ou au péricarde et de façon beaucoup plus exceptionnelle au myocarde.
Métastases cérébrales Bien que donnant plus rarement des métastases cérébrales que des métastases osseuses ou hépatiques, le cancer du sein constitue la deuxième cause de méta-
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stases cérébrales. Les métastases cérébrales sont rarement isolées et le plus souvent associées à des métastases pulmonaires ou hépatiques. La symptomatologie, lors du diagnostic des métastases cérébrales, comporte principalement des céphalées, des crises comitiales, des troubles cognitifs, un syndrome déficitaire, plus rarement une paralysie des nerfs crâniens ou un syndrome cérébelleux. Les métastases cérébrales sont diagnostiquées par la tomodensitométrie et l’IRM. En tomodensitométrie, les métastases se présentent comme des lésions souvent arrondies, spontanément hypodenses, rehaussées par le produit de contraste et entourées d’une hypodensité correspondant à de l’œdème périlésionnel. En IRM, l’aspect est habituellement hypo- ou iso-intense en séquence pondérée en T1 sans injection, en hypersignal sur les séquences pondérées en T2. Après injection de gadolinium, le rehaussement des métastases est souvent de forme arrondie, et peut prendre un aspect homogène, hétérogène ou en cocarde. Les métastases uniques sont difficiles à différencier d’un gliome. L’IRM est plus sensible que la tomodensitométrie dans le dépistage de métastases cérébrales et devra être réalisée préférentiellement à cette tomodensitométrie en cas de suspicion clinique de métastases cérébrales (13). En dehors des métastases cérébrales, les métastases méningées constituent une complication métastatique en augmentation dans le cancer du sein (14). Elles se manifestent le plus souvent par une faiblesse des membres inférieurs accompagnée de paresthésies, auxquelles peuvent être associés d’autres signes neurologiques témoignant de lésions secondaires du système nerveux central. L’IRM recherchera un rehaussement anormal méningé.
Métastases plus rares Les métastases osseuses, hépatiques, pulmonaires ou cérébrales constituent plus de 95 % des métastases de cancer du sein. Néanmoins, les métastases d’un cancer du sein peuvent toucher d’autres organes comme le péritoine ou les muscles. Citons comme cause classique de métastases de cancer du sein la choroïde et les ovaires. La choroïde représente le site le plus fréquent des métastases oculaires et les cancers du sein, et constitue la cause la plus fréquente de métastases oculaires (15). Le cancer du sein constitue après le tube digestif la deuxième cause de métastases ovariennes. Devant une lésion tumorale tissulaire ovarienne, chez une patiente présentant un cancer du sein, le problème posé reste celui de différencier une métastase d’un cancer primitif ovarien associé, d’autant plus que les cancers du sein et de l’ovaire ont la même épidémiologie.
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Stratégie diagnostique : quelle imagerie utiliser et dans quelles situations ? Les indications et le rôle de l’imagerie dans le diagnostic et le suivi de métastases de cancer du sein dépendent de la situation clinique de la patiente et trois situations doivent être individualisées : – la recherche de métastases chez une patiente asymptomatique ; – la recherche de métastases chez une patiente symptomatique ; – le suivi d’une métastase diagnostiquée et traitée.
Recherche d’une métastase chez une patiente asymptomatique Dans la pratique clinique, la stratégie d’imagerie chez une patiente, présentant un cancer du sein récemment diagnostiqué et sans symptôme clinique en faveur d’une métastase, incluait dans un certain nombre de pays des bilans d’imagerie systématique. Ainsi, le registre italien retrouve 81 % de scintigraphies osseuses réalisées dans le bilan d’extension des cancers du sein jusqu’à l’an 2000 (16). Une imagerie systématique dans le bilan d’extension à distance d’un cancer pourrait être défendue par le fait que près de 25 % des patientes présentant un cancer opérable vont développer des métastases métachromes dans le suivi de leur maladie. Cette donnée plaide pour l’existence d’une maladie microscopique ou passée inaperçue au moment du diagnostic de cancer du sein. Un certain nombre de travaux ont évalué l’efficacité de la recherche de métastases chez une patiente asymptomatique au moment du diagnostic de cancer du sein. Les tests évalués ont été la scintigraphie osseuse pour la recherche de métastases osseuses, l’échographie pour la recherche de métastases hépatiques et la radiographie du thorax pour la recherche de métastases pulmonaires. Dans la recherche de métastases hépatiques, une étude rétrospective française conduite par Bruneton et al. (17) incluant 6 649 patientes avec un cancer du sein opérable a démontré un taux de détection de métastases hépatiques de seulement 0,51 %, ne justifiant pas du fait des faux positifs associés l’échographie systématique dans le dépistage de métastases hépatiques.
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Le même type de résultat a été retrouvé pour la radiographie pulmonaire, avec dans une étude incluant 1 493 patientes présentant un cancer du sein de stade I ou II, un taux de détection de cancer du poumon de seulement 0,1 % au moment du diagnostic du cancer (18). Des résultats négatifs ont été également rapportés dans la recherche de métastases osseuses avec, dans une étude rétrospective incluant 3 627 patientes (19), un taux de détection de seulement 0,9 % de métastases osseuses sur la scintigraphie osseuse, variant entre 0,18 % et 1,46 % en fonction du stade de la maladie. Cependant, l’efficacité de la scintigraphie osseuse, chez les patientes présentant une maladie de stade III, a été réévaluée et atteindrait jusqu’à 16 % (20). Un certain nombre d’études a évalué l’efficacité d’une stratégie diagnostique associant de façon conjointe une radiographie du thorax, une échographie hépatique et une scintigraphie osseuse au moment du diagnostic de métastases de cancer du sein. L’étude allemande de Gerber (21) inclut 1 198 patientes avec un cancer du sein dont 28 % sont de stade IIb ou de stade III. Les examens d’imagerie retrouvent des lésions métastatiques chez 2,8 % des patientes de siège le plus souvent osseux, puis hépatique. Ils montrent d’autre part des lésions classées comme suspectes chez 12,1 % des patientes. Parmi les patientes ayant des lésions suspectes, seules 5,4 % auront une lésion métastatique. L’imagerie n’aura donc dépisté une maladie métastatique que chez 3,4 % des patientes et aura induit les faux positifs chez plus de 10 % des patientes. Les métastases étaient le plus souvent rencontrées chez des patientes présentant une tumeur volumineuse ou des ganglions axillaires envahis d’autant plus qu’ils étaient nombreux. Dans l’étude italienne de Ravaioli (22) incluant 1 218 patientes, dont 27 % avec un cancer de stade IIb ou III, une métastase a été dépistée par l’imagerie chez 4,6 % des patientes. Une taille importante de la tumeur et des ganglions envahis d’autant plus qu’ils sont nombreux représentait un facteur de risque significatif de métastases. Les recommandations nord-américaines proposées en 2006 (23) tiennent compte de ces données et ne recommandent pas une imagerie systématique dans le bilan d’extension métastatique d’un cancer du sein. Cette imagerie doit être réalisée s’il existe des signes fonctionnels évocateurs de maladie métastatique, en cas de perturbations du bilan biologique hépatique et dans les tumeurs de stade III. Dans les tumeurs de stade IIa ou IIb, le dépistage par imagerie d’une maladie métastatique est optionnel, mais de nombreuses équipes réalisent des scintigraphies osseuses, en particulier dans les stades IIb. Étant donné la fréquence (30 %) des maladies métastasiques métachrones dans le cancer du sein, il était normal que la place de l’imagerie en suivi pour
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le diagnostic précoce de métastases soit évaluée. Deux études de référence largement citées, italiennes, multicentriques, randomisées publiées dans le JAMA en 1994 (24, 25), ont évalué l’impact sur la survie d’une stratégie incluant un suivi clinique et mammographique, versus une stratégie incluant en plus une imagerie à la recherche de métastase avec scintigraphie osseuse, échographie hépatique et radiographie du thorax. Chez les patientes ayant un suivi par imagerie, il a été détecté un taux plus élevé de métastases isolées thoraciques, osseuses ou hépatiques. En revanche, en termes de mortalité à 5 ans, il n’y avait aucune différence significative entre les patientes suivies par examen clinique et mammographie et les patientes ayant en plus un suivi par imagerie pour le dépistage précoce de métastases. La méta-analyse récente conduite par la Librairie Cochrane (26) reprend quatre études randomisées comparatives, bien conduites, parmi lesquelles les deux sus-citées sont largement dominantes, elle conclut que le simple suivi local par un examen clinique et une mammographie est aussi performant (en termes de survie globale et de qualité de la survie) qu’une stratégie incluant en plus une surveillance biologique, une radiographie du thorax, une échographie hépatique et une scintigraphie osseuse. Il faut néanmoins noter que ces conclusions sont basées sur des travaux incluant des patientes traitées par chimiothérapie il y a 15 à 20 ans et que ces attitudes devraient impérativement être évaluées avec les chimiothérapies données aujourd’hui, plus efficaces et mieux tolérées.
Stratégie diagnostique chez une patiente présentant des signes cliniques compatibles avec une métastase Devant une suspicion de métastases osseuses, sera réalisée une radiologie conventionnelle localisée sur le site douloureux ou fracturaire et un scanner ou une IRM, le scanner étant plus souvent proposé pour les lésions des membres et de la paroi thoracique et l’IRM pour les lésions du rachis. Devant une suspicion de métastases hépatiques, le couple échographiescanner est certainement le plus performant, en termes de coût-efficacité, et la place de l’IRM dans le dépistage de métastase hépatique reste à démontrer. Pour une suspicion clinique de lésions pulmonaires, une radiographie du thorax et surtout un scanner thoracique devront être réalisés. Pour une suspicion clinique de lésions secondaires cérébrales, l’IRM est plus performante que la tomodensitométrie.
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Suivi d’une métastase connue Le suivi d’une métastase connue de cancer du sein est aujourd’hui encore principalement basé sur l’imagerie morphologique afin de déceler des modifications de taille de la tumeur définissant une réponse ou une progression. Les critères les plus souvent utilisés pour cette évaluation qui doit toujours être faite avec la même technique sont les critères RECIST. Les critères RECIST se basent uniquement sur la mesure unidimensionnelle des lésions et ont pour objectif de simplifier et d’uniformiser les critères d’évaluation des essais cliniques. Ils nécessitent des lésions dites mesurables qui sont des lésions dont le plus grand axe est supérieur ou égal à 10 mm pour le scanner spiralé ou dont le plus grand axe est supérieur ou égal à 20 mm pour la radiographie pulmonaire. Les lésions non mesurables sont les lésions infra-centimétriques ou les lésions dont la mesure est considérée comme non fiable car les limites sont difficiles à définir : lésions osseuses, leptoméningées, péritonéales. Dans le cadre du suivi du cancer du sein métastatique, les métastases sont le plus souvent osseuses et dans ce cas considérées dans près des deux tiers des cas comme non mesurables (27). Un certain nombre de critiques peuvent être logiquement apportées à la mesure unidimensionnelle utilisée dans le système RECIST. Elle n’est pas représentative pour des lésions ayant des formes irrégulières et elle n’échantillonne pas une modification hétérogène du volume tumorale dans les trois plans de l’espace. La facilité des reconstructions développées par le scanner volumique amène à discuter l’intérêt de la mesure volumique en termes d’une part de reproductibilité et d’autre part de facteur prédictif de réponse au traitement. Les résultats des premières études sont encore contradictoires mais donnent à penser que la mesure volumique des lésions paraît très prometteuse mais doit bénéficier d’amélioration technique afin de pouvoir être utilisée dans la routine clinique, elle paraît pouvoir d’abord être mise en place de manière automatique ou semi-automatique dans les lésions parenchymateuses pulmonaires, qui ne représentent pas le mode d’extension métastatique le plus fréquent des lésions mammaires.
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P. Taourel, C. Cyteval, C. Granier, M. Devaux et A. Suau
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Patrice Taourel
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 22
Influence de la concentration sérique de CA 15-3 sur les performances diagnostiques de la TEP FDG chez patientes ayant un cancer du sein avec imagerie négative N. Aide, O. Switsers, D. Allouache, C. Lévy, C. Delcambre-Lair, V. Huchet, T. Delozier, A. Hardouin et S. Bardet
But de l’étude : Étudier l’influence de la concentration sérique de CA 15-3 et de son temps de doublement sur les performances diagnostiques de la tomographie d’émission de positons au FDG (TEP FDG) chez des patientes ayant un cancer du sein avec suspicion de rechute occulte (clinique et imagerie conventionnelle négative). Matériel et méthodes : 32 patientes, ayant un taux de CA 15-3 supérieure à la normale (moyenne = 82, [28-669]) et un bilan d’imagerie conventionnelle négatif (dans les 3 mois précédent la TEP FDG) ont bénéficié d’une TEP-FDG (2 TEP pour 3 patientes) et ont été incluses dans cette étude rétrospective. Pour 27 patientes, nous disposons de deux dosages de CA 15-3 réalisés avant TEP, selon la même technique, avec un intervalle inférieur à 6 mois, sans modification thérapeutique entre ces deux dosages, permettant de calculer le temps de doublement (TD). Résultats : 23 TEP FDG sont positives (21 VP, 2 FP), 12 sont négatives (7FN, 5 VN). Les sensibilité, spécificité, VPN et VPP sont respectivement de 78 %, 71 %, 45 %, 76 %. Le taux de CA 15-3 est significativement plus élevé dans le groupe TEP positive (100 U/mL) que dans le groupe TEP négative (65 U/mL) (p = 0,04).
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N. Aide, O. Switsers, D. Allouache, et al.
La probabilité d’avoir une TEP-FDG positive est plus élevée si : – temps de doublement court (< 180 j) (p = 0,05) ; – dosage de CA15-3 > 60 U/mL (p = 0,05) ; – temps de doublement court associé à un taux de CA 15-3 > 60 U/mL (p = 0,03). Conclusion : la probabilité de découvrir des sites métastatiques sur la TEP FDG augmente avec l’importance de la concentration sérique de CA 15-3 et son temps de doublement, reflétant la plus grande agressivité de la maladie. Des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer que la sélection des patientes basées sur ces critères peut améliorer la sensibilité de la TEP dans la recherche des rechutes, en particulier pour des taux bas de CA 15-3.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Odile Switsers
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
X
Le cancer du sein métastatique d’emblée : place du traitement locorégional du sein G. Vlastos, E. Rapiti, H.M. Verkooijen et C. Bouchardy
Introduction Le cancer du sein métastatique est considéré comme une maladie incurable (1, 2). Après le diagnostic, la survie globale à 5 ans n’excède pas 20 % pour la plupart des patientes (3). L’approche thérapeutique est purement palliative et consiste en une association de différents traitements systémiques, tels que la chimiothérapie, l’hormonothérapie, les thérapies ciblées… dont l’objectif principal est de prolonger la survie (4-6). La chirurgie d’exérèse des métastases a une indication limitée dans le traitement de patientes sélectionnées (7-11). La place de la chirurgie locale dans le traitement du cancer du sein précoce est bien établie (12, 13). Pour les patientes métastatiques d’emblée, le rôle du traitement locorégional semblait jusqu’à présent limité à prévenir les complications locales telles qu’ulcérations, saignements ou infections. La chirurgie de la tumeur primaire ne semblait pas apporter un quelconque bénéfice en termes de survie, une fois que les métastases étaient apparues. Cette approche était même considérée, pour certains, comme dangereuse, car parfois suivie d’une prolifération métastatique postopératoire. Aucun essai clinique randomisé n’a prouvé le bien fondé de cet argument. Toutefois, plusieurs études d’observation récemment ont démontré l’importance de la chirurgie de la tumeur primaire dans le traitement des patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique d’emblée. Ces études seront présentées et discutées dans ce chapitre et serviront à apporter des recommandations utiles dans la pratique clinique.
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G. Vlastos, E. Rapiti, H.M. Verkooijen et C. Bouchardy
Études Seules quatre études relatives au rôle du traitement locorégional ont été publiées à ce jour (PubMed jusqu’à avril 2007) (14-17). Parmi celles-ci, trois constituent des séries importantes qui fournissent des résultats robustes du point de vue statistique (14, 16, 17). La quatrième série (15) porte sur un nombre de patientes plus limité, mais arrive à des conclusions similaires. Une autre étude similaire a été récemment présentée sous forme de communication lors d’un congrès international (18), mais n’a pas encore été publiée. Au vue de son intérêt, elle sera également présentée dans cette revue.
Étude de S.A. Khan et al., Northwestern University Medical School, Chicago, IL, États-Unis L’étude de Khan SA et al. de la Northwestern University Medical School, Chicago, IL, États-Unis, est la première étude (14) qui s’est intéressée à la place de la chirurgie de la tumeur primaire pour les patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique d’emblée. Elle repose sur la base de données de l’American College of Surgeons (ACS)- National Cancer Data Base (NCDB) et inclut un total de 16 023 patientes diagnostiquées initialement au stade IV entre 1990 à 1993. Ce groupe représente 4,1 % de tous les cas de cancer du sein traité durant cette période. Parmi ces patientes, 6 861 (42,8 %) n’ont pas été opérées et ont bénéficié seulement de diverses procédures diagnostiques ou de palliation et, 9 162 (57,2 %) ont été traitées chirurgicalement soit par traitement conservateur (3 513, 38,3 %), soit par mastectomie (5 649, 61,7 %). La plupart des patientes ont reçu des traitements systémiques adéquats sous forme d’hormonothérapie (6 880) ou de chimiothérapie, seule ou en association avec d’autres traitements (7 779). Une faible proportion des patientes a été traitée par chirurgie seulement (1 432, 8,9 %). Dans cette large série, la survie à 3 ans était de 24,9 %. La survie était respectivement de 39 %, avec en particulier une survie de 35 % à 3 ans si les marges chirurgicales obtenues sont négatives, de 26 % avec des marges positives et de 17,3 % pour les patientes qui n’ont pas été opérées (p < 0,0001). En revanche, la chirurgie axillaire ne contribue pas de manière significative à une amélioration de la survie.
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Après prise en compte dans un modèle de Cox des autres variables liées au pronostic, à savoir l’étendue du traitement, le nombre de sites métastatiques, l’effet de la chirurgie fait baisser d’environ 30 % la mortalité. Les auteurs sur la base de ces résultats ont proposé l’initiation d’un essai clinique prospectif randomisé pour confirmer le bénéfice de la chirurgie dans le cancer du sein métastatique.
Étude de A.R. Carmichael et al., Edinburgh Breast Unit, Western General Hospital, Edinburgh, Grande-Bretagne Carmichael et al. (15) ont présenté l’expérience de l’Edinburgh Breast Unit du Western General Hospital à Edinburgh, Grande-Bretagne. Cette étude s’est intéressée au rôle de la chirurgie de la tumeur primaire chez des patientes métastatiques d’emblée ou chez qui une métastase a été découverte le premier mois après la chirurgie. Vingt patientes ont été traitées dans cette institution de 1993 à 1999. Cette étude s’est intéressée à la survie et aux récidives locales. Le suivi médian était de 23 mois. Toutes les patientes ont reçu des traitements systémiques appropriés. Parmi celles-ci, dix étaient vivantes sans signes de récidive locale à 20 mois et trois sont décédées en ayant développé une récidive locale. Toutefois, un contrôle local a été obtenu pour 85 % des cas. Les auteurs concluent que la chirurgie de la tumeur primaire a un rôle dans le contrôle de l’évolution de la maladie en général et dans le contrôle local pour un groupe sélectionné de patientes avec une maladie métastatique stable. Ils proposent que la chirurgie soit discutée dans une approche multidisciplinaire et intégrée au traitement.
Étude de E. Rapiti et al., Registre des tumeurs et Hôpitaux universitaires de Genève, Genève, Suisse L’étude de Rapiti et al. porte sur l’ensemble des patientes diagnostiquées avec un cancer métastatique dans la population genevoise entre 1977-1996 (16). Il s’agissait de cas avec des métastases à distance lors du diagnostic (stade IV ou autres, mais avec mention de métastases).
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Près de 300 patientes ont été prises en compte, soit environ 6 % du total des patientes diagnostiquées avec un cancer du sein durant cette période. Les analyses multivariées ont montré l’effet significatif sur la mortalité de nombreux facteurs. Il convient surtout de mentionner le rôle aggravant des métastases « viscérales » estimé à 50 % et celui des métastases du système nerveux central qui augmentent le risque de près de 100 %. En ce qui concerne les traitements, leur prise en compte dans les analyses statistiques montre que leur administration s’accompagne, en général, d’une mortalité par cancer du sein réduite. Ainsi, par exemple, l’absence d’un traitement hormonal est associée à une augmentation du taux de mortalité d’environ 160 %, lorsque celui-ci est calculé dans une optique multivariée prenant en compte toutes les autres variables mentionnées ci-dessus. Le même phénomène se manifeste également pour la radiothérapie, mais de manière moins importante et d’ailleurs non significative. La mise en évidence des effets de la chirurgie, en distinguant les cas avec métastases où l’excision est réalisée en tissu sain et ceux où les métastases ne sont qu’osseuses, montre des différences importantes et statistiquement significatives. Une des situations les plus favorables est celle où les marges chirurgicales sont négatives, car le risque est alors réduit de 40 %. En cas de métastases osseuses, le risque n’est plus que le 20 % de celui que l’on observe en l’absence de chirurgie locale. Le bénéfice d’une chirurgie locale avec excision en tissu sain subsiste lorsque les métastases sont situées dans d’autres organes, mais de façon beaucoup moins importante et d’ailleurs non significative. Les auteurs concluent en suggérant que la chirurgie de la tumeur primaire en cas de cancer du sein métastatique apporte un gain de survie surtout pour les patientes avec des métastases osseuses. Monica Morrow et Lori Goldstein plaident en faveur de ces arguments dans un éditorial du JCO (19).
Étude de G.V. Barbiera et al., The University of Texas MD Anderson Cancer Center, Houston, TX, États-Unis Barbiera et al. (17) ont revu les cas de cancer du sein d’emblée métastatiques ou ayant développé des métastases dans les 3 mois qui suivaient le diagnostic et qui avaient été traités par chirurgie à l’Université du Texas MD Anderson Cancer Center de 1997 à 2002. Parmi les 224 patientes identifiées, 82 (37 %) ont bénéficié de chirurgie pour la tumeur primaire, respectivement 39 (48 %) un traitement conservateur et 43 (52 %) une mastectomie, alors que 142
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(63 %) n’ont pas eu de chirurgie. Le suivi médian était de 32,1 mois. L’analyse multivariée a démontré que la présence d’un seul site de métastase et l’absence d’amplification d’Her2/neu étaient associées à un gain de survie globale. Toutefois, après ajustement pour d’autres variables, la chirurgie d’exérèse de la tumeur primaire était associée à une amélioration de la survie globale pour ce groupe de patientes (p = 0,12, risque relatif, 0,50 ; 95 % CI, 0,21-1,19) et une amélioration de l’intervalle de progression vers des métastases (p = 0,0007 ; risque relatif, 0,54 ; 95 % CI 0,38-0,77). Ceci semblait particulièrement plus marqué pour les patientes avec une tumeur hormonosensible aux estrogènes. Au terme de cette étude, tout en mentionnant que la période de suivi était courte, les auteurs relèvent l’importance de la chirurgie de la tumeur primaire, en particulier pour les patientes jeunes, Her2/neu positives, traitées par chimiothérapie, avec peu de ganglions axillaires envahis et un seul site de métastases.
Communications scientifiques Étude de D.K. Blanchard et al., Breast Care Center, Baylor College of Medicine, Houston, TX, États-Unis Blanchard et al. (18) ont récemment présenté sous forme de communication (poster) au congrès international Breast Cancer Symposium de San Antonio en décembre 2006 l’expérience du Baylor College. Parmi les10 000 patientes incluses dans la base de données de cette institution, 807 étaient des patientes diagnostiquées au stade IV (8,1 %). Parmi celles-ci, 427 ont survécu plus de 90 jours et ont été analysées. Dans cette étude, 169 patientes (39,6 %) n’ont pas été opérées et respectivement, 258 (60,4 %) l’ont été. Les patientes opérées étaient plus âgées, Caucasiennes, avec une tumeur hormonosensible aux estrogènes et/ou à la progestérone, sans métastases viscérales ou des métastases isolées. La chirurgie de la tumeur primaire était associée à un meilleur pronostic, même après ajustement pour les récepteurs positifs pour les estrogènes et/ou la progestérone et le nombre de sites métastatiques. L’impact des marges chirurgicales n’a pas pu être étudié dans cette étude, car cette information n’était pas disponible de manière fiable dans cette database. Toutefois, comme la plupart de ces patientes opérées ont été traitées par
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mastectomie, on peut extrapoler en postulant que celles-ci étaient négatives. Les auteurs insistent également sur la nécessité d’une étude prospective randomisée.
Implications dans la prise en charge clinique des patientes métastatiques d’emblée La survie chez les patientes métastatiques d’emblée est de 16 à 24 mois. Les différentes études rétrospectives (14-18) démontrent une diminution de la mortalité jusqu’à 50 % pour les patientes ayant bénéficié d’une chirurgie de la tumeur primaire. Bien que Khan, Rapiti et Barbiera (14, 16, 17) aient ajusté pour des facteurs comme le nombre de sites métastatiques, la localisation des métastases (viscérales ou osseuses), le type de traitements systémiques qui aurait pu varier entre le groupe opéré et non opéré, tous les auteurs s’accordent à dire que des facteurs de sélection non reconnus peuvent avoir influencé ces analyses et avoir contribué au bénéfice de survie observé pour les patientes opérées. Il semble aussi intéressant de noter qu’un meilleur contrôle local de la maladie semble influencer la maladie à distance, en évitant la survenue de métastases ou en ralentissant le développement de celles-ci lorsqu’elles existent déjà (20). Il est important de mentionner que les tumeurs d’emblée métastatiques étaient accessibles à la chirurgie, respectivement 45 % des cas sont des T1-T2 dans l’étude de Khan (14) et 31 % dans celle de Rapiti (16) par exemple. La chirurgie mammaire est une chirurgie avec une mortalité et une morbidité minime de nos jours qui, dans la plupart des cas, pourrait même être conservatrice. En revanche, la chirurgie axillaire ne semble pas contribuer de manière significative sur la survie. En effet, la présence de métastases axillaires est plutôt un marqueur de présence de micro-métastases systémiques ; d’ailleurs, après la publication de l’essai B-04 du NSABP (National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project) (21), le curage axillaire est considéré comme une procédure diagnostique et non thérapeutique. D’autre part, il est possible que d’autres formes de traitement locorégional comme la radiothérapie pourraient influencer le pronostic des patientes métastatiques. En particulier, il a été démontré dans des essais prospectifs randomisés que la radiothérapie après mastectomie, chez des patientes ganglions positifs recevant de la chimiothérapie ou de l’hormonothérapie, améliore la survie (22).
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Le même concept ressort de la méta-analyse d’Oxford (23) concernant le rôle de la radiothérapie dans le traitement conservateur. On observe avec la diminution du risque de récidive locale une amélioration de la survie à 15 ans. Le rôle d’un meilleur contrôle local semble être démontré, car il évite un ensemencement par la tumeur.
Perspectives Seul un essai clinique prospectif randomisé va pouvoir répondre à la question de savoir s’il faut opérer ou non les patientes métastatiques d’emblée, de déterminer la relation biologique entre la tumeur primaire et les métastases et enfin de déterminer quels marqueurs pourraient jouer un rôle dans le développement des métastases et en particuliers quelles patientes pourraient bénéficier de chirurgie. Nous allons réaliser une étude randomisée en tirant au sort des femmes avec des tumeurs métastatiques qui seront ou pas opérées ou rendues opérables par un traitement systémique néoadjuvant (downstaging). Un nombre de 80 patientes au minimum dans chaque groupe permettra d’obtenir une puissance statistique suffisante pour démontrer une baisse de la mortalité de 20 %. Une analyse multivariée permettra de corriger les biais. Le protocole est en cours de rédaction et devrait être conduit sous les hospices de l’IBCSG (International Breast Cancer Study Group).
Conclusion Les patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique d’emblée sont considérées comme incurables. Le traitement de choix est systémique et palliatif. La chirurgie de la tumeur primaire n’est en principe proposée qu’avec un but de palliation des complications locales. Toutefois, des études récentes semblent démontrer que la chirurgie d’exérèse de la tumeur primaire améliore la survie globale, en particulier pour les patientes chez qui des marges chirurgicales négatives ont pu être obtenues, ou chez celles avec des métastases osseuses. Seul un essai clinique randomisé permettra définitivement d’établir la place du traitement locorégional pour les patientes métastatiques. Cette question est d’autant plus importante de nos jours où les modalités d’imagerie moderne permettent de diagnostiquer une maladie métastatique à ses débuts.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles*, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation
Georges Vlastos * Pas de contrat fixe
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Abstract n° 1
Curages axillaires séparés sein-bras dans les cancers du sein avancés C. Nos, B. Lesieur, M.A. Collignon, E. Zerbib, M.A. Le Frère-Belda, B. Poulet, B. Loridon, K. Clough et F. Lecuru
Mots-clés : cancer du sein, curage axillaire, ganglion sentinelle, lymphœdème
Résumé Objectifs : Le traitement locorégional de l’aisselle dans les cancers du sein avancés comporte un curage axillaire suivi, s’il existe un ou plusieurs ganglions envahis, d’une irradiation des aires ganglionnaires (1). Ce schéma thérapeutique expose particulièrement au risque de lymphœdème du membre supérieur. Pour diminuer ce risque, nous proposons de pratiquer un curage axillaire séparant les ganglions en rapport avec le sein, susceptibles d’être métastatiques, des ganglions en rapport avec le bras qu’il faudrait essayer d’individualiser. Le principe de détection est d’injecter un traceur lymphophile dans le membre supérieur, qui permet l’identification des trajets lymphatiques en rapport avec le bras. Il s’agit d’une nouvelle approche chirurgicale qui a été validée chez l’animal (2) et qui a fait l’objet d’une publication récente à propos d’une étude pilote utilisant le bleu patent (3). Nous proposons de poursuivre ces travaux en utilisant une méthode de détection isotopique. Méthodes utilisées : De juillet 2006 à mars 2007, 14 patientes présentant un cancer du sein avancé ont été opérées d’un curage axillaire avec l’objectif de distinguer les ganglions drainant le sein des ganglions drainant le bras. Pour l’identification des voies de drainage lymphatique et des ganglions sentinelles
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C. Nos, B. Lesieur, M.A. Collignon et al.
du bras (GSB), les patientes ont reçu la veille de l’intervention une injection de nanocolloïde marqué (60 MBq) dans le premier espace interdigital de la main homolatérale au curage. Une lymphoscintigraphie était réalisée en préopératoire afin de déterminer la présence au niveau axillaire de GSB radiomarqués. L’identification des ganglions en rapport avec le sein reposait sur l’injection en début d’intervention de 2 mL de bleu patenté en péritumoral. En peropératoire, les ganglions bleus relatifs au drainage du sein et les ganglions non chauds situés dans l’aire normale du curage étaient prélevés constituant un prélèvement intitulé « curage axillaire », tandis que les ganglions axillaires chauds situés dans les limites du curage axillaire classique détectés à l’aide de la gamma-caméra étaient également prélevés et analysés séparément constituant le prélèvement appelé « GSB ». Résultats : Quatorze patientes d’âge moyen 46 ans ont reçu ce protocole : elles présentaient toutes un cancer du sein avancé associé à une aisselle cliniquement N0 ou N1a dans six cas, N1b dans trois cas et N2a dans cinq cas (tableau I). La lymphoscintigraphie du bras montrait dans 13 cas sur 14 un ou plusieurs ganglions axillaires chauds. Dans 13 cas l’identification des GSB a été possible avec une moyenne de 1,7 ganglion prélevé séparément. Le curage axillaire a ramené 11,7 (7-20) ganglions en moyenne. L’analyse histologique montre un curage axillaire envahi dans 12 cas avec 4,6 (1-11) ganglions envahis en moyenne. Chez les 12 patientes présentant un envahissement axillaire, seules deux présentaient un envahissement des GSB associé à un envahissement massif du curage (patientes n°3 et 6). La patiente chez qui le GSB n’a pas identifié présentait un T4dN2a avec une aisselle totalement envahie (N°5). Conclusion : En cas de cancer du sein avancé, le curage axillaire avec isolement des ganglions en rapport avec le drainage lymphatique du bras est techniquement possible par méthode isotopique. Ces ganglions sont indemnes d’envahissement sauf en cas d’envahissement métastatique complet de l’aisselle. Cette constatation incite à une poursuite de l’étude à une plus grande échelle dans le cadre d’un protocole de façon à savoir si cette méthode est reproductible et pertinente.
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Curages axillaires séparés sein-bras dans les cancers du sein avancés
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Âge
IMC
Stade
LS
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
42 41 56 40 69 74 49 44 47 36 34 34 40 38
26,7 42,3 24,4 19,4 33,2 21,3 25,8 23,9 21,3 21,5 19,5 19,5 23,5 28,3
T1N0* T4dN2a* T4bN1b T2N0 T4N2a* T3N2a T2N1b T2N0* T1N0 T2N1b T2N0* T3N2a T4dN2a* T2N1a*
oui oui oui oui échec oui oui oui oui oui oui oui oui oui
Résultat « CA » 8N4N+/ 18 9N+/ 11 1N+/ 13 7N+/ 7 10N+/ 11 2N+/ 9 1N+/ 7 1N+/ 9 2N+/ 12 8N11N+/ 11 1N+/ 7 7N+/ 9
Résultat « GSB » 4N2 N1N+ 2N-i / 1N+ 2N-i 1N-i 3N-i 3N-i 1N-i 2N-i 2N-i 1N-i
IMC : indice de masse corporelle ; Stade : stade pré-traitement, * = patiente ayant reçu une chimiothérapie néo-adjuvante ; LS : identification lymphoscintigraphique des ganglions axillaires chauds. Résultat « CA » : résultat de l’analyse histologique du prélèvement intitulé « curage axillaire » : nombre de ganglions envahis (N+) ou indemnes (N-). Résultat « GSB » : résultat de l’analyse histologique du prélèvement intitulé « ganglion sentinelle du bras » : nombre de ganglions envahis (N+) ou indemnes (N-) ; i = ganglions analysés en immunohistochimie.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation Claude Nos X
Place de l’imagerie dans le bilan d’extension et l’évaluation de la réponse thérapeutique des cancers du sein J. Stines et P. Troufléau
Place dans le bilan d’extension Le bilan d’extension d’un cancer du sein a pour but de définir son extension locale, régionale et générale apparente basée sur la clinique (et l’imagerie) ou sur des constatations anatomo-pathologiques. Il permet de préciser les facteurs pronostiques. Pour les cancers du sein sans métastases viscérales ou osseuses, l’existence de métastases ganglionnaires est le facteur pronostique principal (1). Elle est prédictive d’une maladie métastatique. La taille tumorale est le facteur qui vient en second. C’est pour ces deux facteurs que l’imagerie peut avoir un impact. Les autres facteurs sont histologiques et biologiques. Les anatomo-pathologistes nous ont appris de longue date que les cancers du sein étaient, au moment de leur découverte, souvent multifocaux ou multicentriques voire bilatéraux. Les protocoles thérapeutiques tiennent compte très largement de la possibilité de ces lésions multiples. La radiothérapie permet d’éradiquer des microfoyers tumoraux mais est moins efficace sur des lésions de plus grande taille. Il importe donc de détecter celles-ci avant la décision thérapeutique.
La tumeur La mammographie est considérée comme la référence pour déterminer la taille tumorale (2). Une étude de Coombs de 2005 a porté sur 800 patientes et a
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montré que la probabilité de métastases dépendait de la masse tumorale globale et que c’est ce dernier élément qui doit être pris en compte pour les décisions de traitements adjuvants (3). La mammographie est cependant plus ou moins performante selon les caractéristiques morphologiques des tumeurs et la densité du sein. Les formes nodulaires sont plus faciles à mesurer que les formes stellaires ou que celles où les microcalcifications sont l’élément séméiologique prédominant. On recommande pour les masses stellaires de mesurer à la fois le centre dense et la masse avec les spiculations, mais on sait que celles-ci ne correspondent pas nécessairement à des extensions tumorales. Une question que l’on peut poser ensuite est de déterminer comment on évalue la taille tumorale en cas de foyers multiples : on peut utiliser soit la plus grande dimension de la lésion la plus volumineuse, soit l’addition des dimensions des différentes lésions élémentaires (4). La densité du sein limite aussi la précision des mesures (5). On sait aussi que d’une manière générale il y a des discordances entre la taille tumorale radiologique et la taille échographique, mais l’échographie est mieux corrélée à la taille anatomopathologique dans les seins denses et la densité du sein n’affecte pas les mensurations en cas de sein dense, alors que la discordance avec la mammographie peut atteindre jusqu’à 1 cm lorsque le sein correspond au type IV de la classification BI-RADS. Dans les seins denses, l’échographie doit être utilisée systématiquement pour évaluer la taille tumorale si on veut éviter le risque de sous-évaluation (6). Une étude de Wilkinson a démontré un impact significatif de l’exploration ultrasonore pour le diagnostic de multifocalité avec un changement de traitement dans 8 % des cas (7). La classification TNM permet d’indiquer les cas où on utilise l’addition des foyers multiples pour définir la taille tumorale (8). On a proposé également d’utiliser la TDM multidétecteur pour évaluer la taille tumorale (9). C’est une méthode acceptable en cas de grosse tumeur mais c’est incontestablement l’IRM qui est la référence si on veut des informations plus précises après que l’on ait déjà utilisé la mammographie et l’échographie. En raison de sa grande sensibilité, l’IRM doit avoir un impact important sur la précision du bilan d’extension tant pour évaluer de manière précise la taille tumorale que pour rechercher la multifocalité. L’IRM trouve des foyers additionnels chez 16 % (6 à 34 %) des patientes (10). Les lésions siègent deux fois sur trois dans le même quadrant (11). Il est toutefois très important d’avoir la confirmation histologique avant de décider d’une modification thérapeutique.
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L’étude multicentrique italienne de Sardanelli a montré que la différence se faisait essentiellement dans les seins qui ne sont pas entièrement graisseux (12). L’IRM est aussi la méthode la plus performante pour la détection des cancers du sein controlatéral invasifs ou in situ. Ceci concerne 6 % (3 à 24 %) des patientes (10). La question que l’on peut poser est l’impact de l’IRM sur la survie. Celuici n’est pas connu à ce jour mais certains auteurs la recommandent (13-15) et il y a des polémiques sur de possibles effets négatifs avec des sur-traitements potentiellement induits. Il semble cependant que l’IRM préalable aux traitements influence favorablement les taux de récidive locale en incitant à adapter les protocoles (16). Certaines formes histologiques sont particulièrement difficiles à évaluer en mammographie et en échographie et plus particulièrement chaque fois que le sein est dense. C’est le cas en particulier des carcinomes lobulaires infiltrants pour lesquels on a recours très souvent à l’IRM complémentaire pour préciser l’extension locale (17). On peut ajouter à cette indication les seins denses et difficiles à lire et les patientes chez lesquelles la mammographie est négative alors que la tumeur est palpable ou visible en échographie. Il est important toutefois de noter que si on a recours aux techniques complémentaires, il est indispensable d’avoir les moyens d’obtenir la preuve histologique ou au moins cytologique de la nature carcinomateuse des lésions additionnelles.
Bilan ganglionnaire Le deuxième volet du bilan d’extension des cancers du sein est le bilan ganglionnaire. Force est de constater que, dans ce domaine, l’imagerie n’a pas pu concurrencer les méthodes de prélèvement chirurgicales. Aucune des méthodes d’exploration de l’aisselle utilisées habituellement n’a des performances qui permettraient de concurrencer les techniques de ganglion sentinelle ou les curages chirurgicaux (18, 19). La place des examens d’imagerie reste encore discutée, mais son rôle se limite principalement à sélectionner un sous-groupe de patientes pour lesquelles on peut annuler la procédure de ganglion sentinelle quand on a pu démontrer qu’il y avait un envahissement ganglionnaire axillaire (20). La sensibilité de l’échographie lorsqu’il n’y a pas de ganglion palpable se situe entre 67 et 84 % et celle de la cytoponction entre 35 et 86 %. Pour cette dernière, la spécificité est en pratique de 100 % et il est donc tout à
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fait possible d’éviter un certain nombre de procédures chirurgicales diagnostiques (ganglion sentinelle) en associant l’échographie et la cytoponction échoguidée (21). L’utilisation d’autres méthodes d’imagerie (IRM, explorations isotopiques) fait l’objet de recherche mais reste en pratique peu utile, en particulier dans le cas de petites tumeurs sans adénopathie palpable (22-26).
Recherche de métastases Il n’y a pas de nouveauté en ce qui concerne la recherche de métastases viscérales ou osseuses au moment du bilan d’extension initial. Dans les SOR, il est indiqué : « Il n’y a pas d’indication à réaliser un bilan d’extension avant la confirmation du diagnostic de carcinome infiltrant. Aucun bilan d’extension n’est réalisé dans le cas de carcinome in situ (standard) », mais on pourra le faire avant une mastectomie pour éviter une mutilation inutile chez une patiente qui serait déjà métastatique. « Si une mastectomie est envisagée (tumeur de petite taille), le bilan d’extension pourra être fait en préopératoire afin d’éviter une mutilation à une femme déjà métastatique, même si le risque est faible. En l’absence de signe d’appel, le bilan d’extension ne doit être réalisé qu’après évaluation des facteurs de risque métastatique (recommandation) » (27). Les examens couramment utilisés pour le bilan d’extension sont la radiographique thoracique, la scintigraphie osseuse, l’échographie hépatique (en première intention). Les autres méthodes d’imagerie seront utilisées à la demande. Le rôle du TEP scan reste à préciser (28-30). Même les études récentes continuent à estimer qu’il faut réserver la recherche systématique de métastases osseuses aux patientes à haut risque (31). Nous n’aborderons pas ici la problématique de l’ « ultrastaging » qui ne concerne pas directement l’imagerie classique mais des études sont en cours pour valider son utilité (32). Par ailleurs, nous n’aborderons pas ici le rôle de l’imagerie dans la détection et/ou le repérage des ganglions sentinelles bien que ce ne soit pas un sujet dénué d’intérêt et d’utilité pratique (33-35).
Évaluation de la réponse thérapeutique L’évaluation de la réponse thérapeutique est également un domaine où l’imagerie peut apporter des éléments d’appréciation objectifs.
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Évaluation de la réponse sous chimiothérapie néo-adjuvante L’équipe de l’Institut Curie a publié récemment dans European Radiology une excellente revue de l’état actuel de nos connaissances dans ce domaine (36). Il existe actuellement des protocoles de chimiothérapie dite néo-adjuvante dont l’objectif est de proposer pour une chirurgie conservatrice des patientes qui initialement étaient candidates pour une chirurgie mutilante. Dans ces protocoles, on se rend compte souvent que la seule évaluation clinique de l’effet de la chimiothérapie est insuffisante et il y a donc un souhait très fort des oncologues d’avoir des indications aussi précoces que possible de l’efficacité des drogues utilisées et de la prédiction de la réponse qui sera obtenue en fin de traitement. L’évaluation de la réponse tumorale nécessite quelle(s) que soi(ent)t la ou les méthodes utilisées un bilan initial de très bonne qualité. L’évaluation de la réponse tumorale peut se faire à travers les critères OMS ou RECIST, ce qui suppose une adaptation des mesures de cibles selon le référentiel qui aura été retenu. La mammographie garde une place importante pour l’évaluation de la taille tumorale au cours d’une chimiothérapie néo-adjuvante. Dans certains cas (présence à la mammographie d’une masse ou de calcifications), elle est supérieure à l’examen clinique (37), mais les performances sont dépendantes du type de sein, de la nature histologique de la lésion et d’une manière générale de la morphologie de la tumeur et de ses caractères séméiologiques (masse, anomalies d’architecture, microcalcifications) et de son environnement tissulaire. La masse peut disparaître alors que les microcalcifications augmentent. Les anomalies d’architecture se modifient peu. Le meilleur critère est la réduction de volume d’une masse à condition que plus de 50 % de son contour soit identifiable (38). Dans le cas contraire, le recours à d’autres techniques d’imagerie est nécessaire. La valeur de l’échographie a fait l’objet de controverses. Quand la densité tumorale diminue sur la mammographie (ce qui n’est pas quantifiable), l’échographie peut être utile. Des erreurs sont possibles quand la tumeur se fractionne, est plurifocale ou plus grande que la largeur de la sonde d’échographie. L’évaluation peut être difficile aussi s’il ne reste que de tous petits foyers et, bien sûr, aussi dans tous les cas où l’échographie initiale n’était pas performante pour évaluer la taille lésionnelle.
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L’échographie permet en revanche un bon suivi de l’épaississement cutané et de l’envahissement ganglionnaire axillaire. Le doppler et l’utilisation de produits de contraste ultrasonore peuvent également donner des informations mais, pour ces techniques, la standardisation des résultats reste difficile et les évaluations restent largement dépendantes des matériels et des réglages utilisés ainsi que des opérateurs. L’IRM fournit des informations à la fois morphologiques et cinétiques. C’est la méthode de référence pour l’évaluation de l’extension locale des cancers et la littérature confirme la bonne corrélation des résultats de l’IRM avec l’histologie. L’IRM est supérieure à la mammographie pour l’évaluation initiale et pour celle de la maladie résiduelle. Bien que l’IRM soit de loin supérieure au couple mammographie-échographie pour l’évaluation de la réponse complète ou l’absence de réponse à la chimiothérapie néo-adjuvante, l’estimation de la maladie résiduelle peut être problématique en raison des modifications de la vascularisation qui peuvent être induites par la chimiothérapie (39). La chimiothérapie peut entraîner une diminution de l’intensité de la prise de contraste et une modification de la cinétique. On considérera qu’il faut prendre en compte toute prise de contraste post-chimiothérapique située dans le site de la tumeur initiale comme suspecte quel que soit le type de courbe de rehaussement. Par ailleurs, s’il y a eu une chirurgie en dehors du contexte de chimiothérapie néo-adjuvante, il peut y avoir une surestimation des résidus tumoraux à cause de lésions inflammatoires concomitantes. Cette surestimation peut atteindre jusqu’à 50 % selon certains auteurs et peut nécessiter des biopsies complémentaires avant de décider de l’étendue de l’exérèse. La diminution du volume tumoral est généralement concentrique mais il peut y avoir également un effet de fragmentation de la tumeur qui peut entraîner une sous-estimation du résidu tumoral (une réduction concentrique de la lésion tumorale permet de sélectionner les bonnes candidates pour une chirurgie conservatrice, et une régression tumorale fragmentée est prédictive de marges positives lors de la tumorectomie). Ce que l’on attend aussi de l’IRM serait de détecter de manière précoce la résistance à la chimiothérapie. L’IRM est une méthode d’imagerie très robuste pour prédire la non-réponse et la progression tumorale. Globalement, il semble que la diminution ou une augmentation de volume de la tumeur dès la première cure soit fortement corrélée à la réponse finale (40, 41). Il y a toutefois une sous-estimation fréquente et il n’est pas exceptionnel de retrouver des foyers tumoraux résiduels alors que l’IRM ne montrait plus aucune anomalie. L’IRM permet également d’étudier la cinétique de prise de
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contraste de la tumeur. Typiquement, les tumeurs malignes présentent un wash-out. Après chimiothérapie, on peut observer un aplatissement de la courbe dans l’intensité qui est également un élément prédictif d’une bonne réponse. Mammographie, échographie et IRM correspondent aux trois méthodes d’imagerie utilisées de manière habituelle pour évaluer la réponse tumorale au cours de la chimiothérapie néo-adjuvante, mais il y a d’autres méthodes qui pourraient être utilisées (spectro-IRM, utilisation de nouveaux produits de contraste IRM, TEP-FDG et imagerie moléculaire). Ces techniques sont en cours de développement mais on peut supposer que, compte tenu des enjeux, si l’une ou l’autre de ces méthodes s’avère réellement efficace, elle sera probablement amenée à jouer un rôle de plus en plus important dans la prise en charge des patientes qui sont soumises à une chimiothérapie néoadjuvante.
Évaluation du résidu tumoral après exérèse incomplète Il arrive dans un certain nombre de cas que l’on n’ait pas obtenu des marges saines lors de la tumorectomie et, dans ce cas, le risque de récidive après radiothérapie est augmenté. On considère généralement qu’après chirurgie, la spécificité de l’IRM est moindre et l’on conseille dans ce contexte que l’IRM ait lieu quatre semaines après la chirurgie (42). Il y a un risque de faux positifs lié en particulier à des granulomes inflammatoires que l’on peut trouver autour des collections postopératoires. Il est conseillé de s’attacher plus particulièrement à la recherche d’épaississements nodulaires irréguliers à proximité des parois des cavités d’exérèse ou de nodules à distance. Une confirmation histologique de ces anomalies est recommandée (43). Au total, on peut considérer que les différentes méthodes d’imagerie jouent un rôle de plus ou plus important dans l’évaluation initiale et dans le suivi des lésions mammaires. La mammographie et l’échographie mammaire restent très utilisées mais ont des performances limitées. L’IRM est la méthode de routine actuellement la plus performante. Des méthodes d’imagerie complémentaires ou alternatives sont en cours de développement.
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Interactions entre les cellules tumorales et le microenvironnement tissulaire : « Quand le dialogue remplace le monologue » P.-M. Martin et L’H. Ouafik
Dès 1970, le cancer du sein a été une des premières pathologies tumorales à bénéficier d’une approche analytique biologique à application clinique promue par le groupe du Pr W.L. McGuire. Le plan cancer décidé par le Président R. Nixon a permis le développement de programmes de recherche qui se sont concrétisés par des progrès rapides dans la compréhension des processus de cancérogenèse et tumorigenèse. Nous développons un second aspect de la pathologie tumorale, montrant l’importance à ce stade de la pathologie des interactions entre les cellules tumorales et leur microenvironnement tissulaire. Ces interactions présentent deux phases caractéristiques : – une où le microenvironnement est non permissif, les cellules tumorales sont contenues et contraintes dans leur développement à une prolifération minimale in situ ; – la seconde est une phase de bascule où le microenvironnement devient permissif et coopérateur. Le développement tumoral devient rapide, invasif, métastatique. Cet aspect fondamental d’interaction tumeur/microenvironnement a été résumé par R.A. Weinberg « Quand le dialogue remplace le monologue ».
Généralités Depuis 1970, nos connaissances sur la biologie du cancer ont progressé de façon extrêmement importante grâce à une approche analytique moléculaire
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de plus en plus performante et le développement des techniques permettant des analyses à haute densité multiparamétriques, avec, dans un premier temps, la mise en évidence des gènes appelés oncogènes, gènes suppresseurs, puis le décryptage progressif des voies associées aux réceptivités cellulaires activées, voies transmettant en cascade un signal à l’intérieur de la cellule pour déclencher au niveau du noyau une réponse spécifique aux stimulus extérieurs. Mais ceci s’est accompagné d’une vue réductionniste du phénomène cancéreux, validée sur des modèles cellulaires in vitro, à savoir qu’une dérégulation de gènes spécifiques (en perte de gain de fonction) se traduit dans une composante cellulaire épithéliale proliférative et invasive. Cependant, depuis 1970 en parallèle, s’est développé un concept plus complexe d’interaction hétérotypique épithélium/stroma environnant sur le plan physiologique, puis sur le plan pathologique. Moins mis en exergue, ce concept a débuté dans quelques équipes, celle de Cunha en 1971-72 (1), puis le groupe de Bissell en 1981-82 (2). Il a été repris et développé progressivement dans d’autres groupes. Dans le même temps, parmi les interactions spécifiques tumeurmicroenvironnement émergeait le concept de néo-angiogenèse comme élément fondamental et indispensable au développement tumoral. Le champ de l’angiogenèse tumorale a été ouvert à l’étude expérimentale dans les années 1970 par les travaux de Gullino au NCI à Frederick puis Folkman au Harvard Medical School (3-4). Dès 1973, Cunha montre que la composante cellulaire embryonnaire pluripotente est, en fin de migration, différenciée et spécialisée en fonction du stroma du site de colonisation et de localisation définitive (5, 6). Ainsi, la composante embryonnaire migrante de la crête neurale s’immobilisant dans un stroma de la chaîne mammaire va donner naissance au bourgeon embryonnaire épithélial mammaire puis à la glande mammaire. Cette même composante épithéliale expérimentale mise en contact avec un stroma de localisation urogénital prostatique ou un stroma de localisation vésicale donnera soit un bourgeon embryonnaire et le développement d’une glande prostatique, soit un bourgeon embryonnaire et le développement d’un épithélium vésical. Le groupe de Cunha, étudiant avec des modèles in vitro, in vivo le développement et la fonction de la glande prostatique met en évidence le rôle fondamental de la matrice extracellulaire et du stroma dans la différenciation fonctionnelle tissulaire et la réponse à la stimulation androgénique (7). Un travail identique sur la glande mammaire a été fait par le groupe de Bissell (8, 9). Ce groupe montre le rôle de la matrice extracellulaire dans la polarisation et la fonction différenciée de l’épithélium. Dans des modèles de cultures tridimensionnelles par ailleurs, ils mettent en évidence la possibilité
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de modulation de la différenciation induite par la modification des composantes de la matrice extracellulaire. Ces travaux ont été confirmés indépendamment par d’autres groupes, sur des modèles de cellules tumorales humaines hormonosensibles (10), avec la mise en évidence que les facteurs régulant la différenciation des cellules épithéliales (activine/inhibine) sont modulés par les interactions stroma épithélium (11). L’étude des modèles expérimentaux in vivo démontre que les interactions hétérotypiques sont à double sens (12), soit une molécule informative sécrétée par l’épithélium normal ou pathologique (tel le PDGF) a pour cible dans le compartiment stromal, les cellules fibroblastiques, myofibroblastiques, macrophages qui expriment le récepteur spécifique à ce facteur (PDGF) ; soit en sens inverse les cellules stromales peuvent émettre des facteurs dont les cibles sont les cellules épithéliales. Ainsi, les facteurs IGF-1 et -2, sécrétés par les cellules stromales ciblent les cellules épithéliales qui seules expriment les récepteurs spécifiques de ces facteurs. Les facteurs IGF-1 et -2 jouent un rôle extrêmement important de survie et trophicité, dans les zones et les périodes d’hypoxie cellulaire et tissulaire. Dans ces interactions intervient le rôle de la matrice extracellulaire (EMC), celle-ci est un réseau complexe formé de différents composants de type collagénique (I, IV…), macromoléculaire (laminine, fibronectine, vitronectine), mais également heparanglycanes/protéoglycanes (13). Ces différentes macromolécules jouent un rôle dans l’attachement, la polarisation des cellules épithéliales et leur différenciation. De plus, les heparanglycanes/protéoglycanes jouent un rôle de compartiment de stockage grâce à leur forte polarité. Cette caractéristique leur permet de trapper des molécules de charge complémentaire. De ce fait, les facteurs de croissance sécrétés par la composante épithéliale ou stromale sont séquestrés sous forme de promolécules ou de molécules actives. Les facteurs séquestrés peuvent jouer secondairement un rôle avec une biodisponibilité rapide en cas de lésion tissulaire, leur libération étant consécutive à la destruction ou remodelages des constituants de la matrice extracellulaire par des protéases/héparinase. Ces facteurs de croissance jouent un rôle extrêmement important dans la réparation physiologique tissulaire post-traumatique, qui se déroule selon trois processus et une durée limitée dans le temps, 10 à 21 jours : – le premier processus est le phénomène physiologique de réparation tissulaire post-traumatique ; – le second est le processus de cicatrisation qui intervient au terme de la réparation tissulaire avec la reconstruction de la continuité épithéliale ; – le troisième processus est la réparation de capillaires lésés par le développement de la néo-angiogenèse et rétablissement d’une vascularisation fonctionnelle.
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Ainsi, les cellules stromales, tels les fibroblastes, macrophages, cellules endothéliales quiescentes, dans les tissus normaux différenciés, sont activées et jouent un rôle capital dans ces trois processus physiologiques. Si, dans un premier temps, les interactions hétérotypiques, épithélium/microenvironnement, ont été étudiées par les groupes de Cuhna et Bissell, dans le développement physiologique et la fonction différenciée tissulaire, ces mêmes groupes ont démontré secondairement que ces mêmes interactions hétérotypiques sont, certes, modifiées, réduites mais restent présentes dans le développement tumoral. Ils démontrent que quand bien même la cellule cancéreuse acquiert des caractéristiques d’indépendance à la signalisation de régulation externe, une indépendance à l’ancrage cellulaire et perte de polarisation, la cellule épithéliale tumorale reste cependant dépendante de ses interactions avec le stroma (14-25). Les processus physiologiques complexes associés à ces interactions hétérotypiques ne sont pas éliminés mais détournés de leur finalité physiologique au profit de la croissance tumorale. La complexité des interactions hétérotypiques, épithélium/stroma mise en évidence dans les processus pathologiques tumoraux posent deux questions : – est-ce que cette signalisation complexe hétérotypique se construit ou émerge petit à petit « de novo » durant la tumorigenèse avec une complexité progressive lors du passage du statut de cellule normale à cellule transformée, de cellule transformée à cellule en prolifération autonome in situ puis en prolifération invasive et métastatique ? – ou est-ce que la cellule tumorale exploite des programmes biologiques physiologiques normaux préexistants en les détournant à son avantage ? Il semble que ce soit cette hypothèse qui soit la plus vraisemblable (26-28).
Réparation tissulaire : fibroblastes/myofibroblastes En 1986, Dvorak montre que le processus de réparation tissulaire pouvait être similaire à certaines interactions observées entre tumeurs et microenvironnement. Si le processus physiologique de réparation tissulaire est limité dans le temps, le processus pathologique peut perdurer plusieurs années avec le développement tumoral. Dvorak le résume en ces termes : « la tumeur est un processus de réparation tissulaire qui ne cicatrise pas… » (29).
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Réparation tissulaire physiologique Pour mieux comprendre la similitude entre interactions hétérotypiques présentes dans le développement d’un processus tumoral in situ puis invasif et le processus de réparation tissulaire post-traumatique, deux aspects sont à prendre en compte : 1. le rôle de la composante stromale ; 2. le rôle de la composante épithéliale comme acteur et cible. Au niveau du stroma, le traumatisme tissulaire entraîne une lésion avec discontinuité des capillaires, et une réaction instantanée physiologique d’agrégation plaquettaire, suivie d’une dégranulation des plaquettes avec relarguage de facteurs tels : PDGF, TGF-β1, associé à un phénomène vasoactif important avec une perméabilité capillaire accrue entraînant une exudation et une séquestration locale du fibrinogène. Le PDGF relargué des plaquettes est un facteur attractant et d’activation des fibroblastes du stroma les transformant en cellules activées ou myofibroblastes. Le TGF-β1 stimule la synthèse et la sécrétion de facteurs par les myofibroblastes, amplifiant par ailleurs le phénomène d’activation induit par le PDGF. L’activation du fibroblaste en myofibroblaste se traduit par un changement du phénotype cellulaire avec sécrétion de collagène de type III, de fibronectine, de protéoglycane, de glycoaminoglycane (30). Ces marqueurs peuvent être mis en évidence à l’examen anatomopathologique, on recouvre ce processus sous le terme de desmoplasie du stroma. Le phénomène physiologique de réparation tissulaire post-traumatique dure quelques jours (environ 10 à 21 jours), par contre, une réaction similaire desmoplasique est présente dans le stroma tumoral plusieurs mois voire plusieurs années dans la lente progression du phénomène tumoral (31). L’activation des myofibroblastes induit la sécrétion de pro-activateur du plasminogène type urokinase, (pro uPA) qui, activé en uPA, transforme le plasminogène (proenzyme à diffusion ubiquitaire dans le stroma), en enzyme protéolytique active, la plasmine (32). En cascade, la plasmine est capable d’activer par clivage toutes les autres proprotéases, entre autres métalloprotéases sécrétées et/ou séquestrées dans la matrice extracellulaire (EMC). Cette activation en cascade permet lors de la destruction et remodelage de la matrice extracellulaire une libération et une biodisponibilité rapide de facteurs attractants et de croissance, nécessaire à la réparation tissulaire et cicatrisations. Ainsi les myofibroblastes sécrètent en plus de la pro-uPA des métalloprotéases (MMP9, MMP5) mises en jeu dans la fibrinolyse, le remodelage de la matrice extracellulaire. Un des premiers impacts des MMP5 sécrétées et activées est de libérer à partir du fibrinogène
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transsudé et séquestré dans le stroma des fibrinopeptides, ceux-ci possèdent un pouvoir attractant pour les fibroblastes, mais également pour les monocytes macrophages, cellules immunitaires, éosinophiles, lymphocytes.
Réaction stroma associé au cancer/similitude avec la réparation tissulaire Ce phénomène détourné dans l’interaction des cellules tumorales avec leur microenvironnement permet la croissance tumorale avec l’induction d’une néoangiogenèse tumorale et l’invasivité tumorale (33-34). Dans les modèles expérimentaux in vivo de xénogreffes, le recrutement des fibroblastes de l’animal hâte leur activation en myofibroblaste est essentiellement sous la dépendance du PDGF et TGFβ1 relargués par la composante épithéliale tumorale. Le recrutement de cellules stromales, dans la réparation tissulaire physiologique, peut être régulé par le TGF-β2. Par contre, dans le stroma tumoral les cellules stromales activées ne répondent plus à cette régulation par le TGF-β2. Il en est de même dans le stroma associé aux foyers d’hyperplasie épithéliale, qui vont évoluer à terme dans les modèles expérimentaux vers un carcinome. Les fibroblastes associés au cancer sont une population mixte de fibroblastes et de myofibroblastes. Les analyses globales du transcriptome de cette population cellulaire mixte isolée par microdissection/capture laser, montrent une similitude étroite entre les fibroblastes/myofibroblastes associés au cancer, et les fibroblastes/myofibroblastes présents dans le phénomène de réparation tissulaire post-traumatique (35). L’étude du transcriptome des myofibroblastes de réparation tissulaire met en évidence deux types d’expressions, à savoir : un ensemble de gènes associés au cycle cellulaire et un autre ensemble de gènes ne variant pas avec le cycle cellulaire (gènes soit activés, soit réprimés). L’analyse des myofibroblastes/fibroblastes du stroma tumoral met en évidence l’expression de ces gènes invariant avec le cycle cellulaire, au sein desquels l’activateur du plasminogène type urokinase joue un rôle extrêmement important, confronté à l’évolution clinique, ils se révèlent être des facteurs cliniques pronostiques. Utilisant ces mêmes techniques de microdissection/laser capture, le groupe de Eng (36), analysant les tissus humains après dissociation des composantes épithéliales et stromales, a développé l’analyse combinée des pertes d’hétérozygotie sur la totalité du génome, soit dans la composante épithéliale isolée, soit dans la composante stromale isolé, ces analyses mettent en évidence de multiples pertes d’hétérozygotie dans la composante stromale, ainsi que la présence de mutations du gène codant pour P53 ou la phosphatase PTEN dans la composante stromale.
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Les modèles expérimentaux in vivo permettent de mettre en évidence une autre particularité des fibroblastes activés, à savoir leur rôle capital pour une forte promotion des cellules épithéliales humaines immortalisées mais en ellemême faiblement tumorigènes. Ainsi, l’implantation en xénogreffes de cellules épithéliales humaines immortalisées par le SV40 induit chez 50 % des animaux des tumeurs avec un délai long de plus de deux mois environ. Si l’on implante ces mêmes cellules épithéliales associées à une matrice artificielle (type Matrigel), il se fait alors un recrutement lent des fibroblastes de l’hôte avec une croissance tumorale toujours lente et progressive, mais une prise dans 100 % des animaux. Si en revanche on implante ces mêmes cellules humaines immortalisées avec des myofibroblastes isolés du stroma de tumeurs humaines, on observe un développement de tumeurs dans 100 % des animaux associé à une croissance tumorale deux fois plus rapide (37). Ces expériences qui montrent la participation importante de la composante stromale activée dans la promotion de tumeurs épithéliales sont à rapprocher des travaux d’expérimentation du groupe de Sonnenschein (38). Ce groupe démontre, dans la carcinogenèse chimique induite, que la cible première est le stroma, celui-ci est indispensable à la transformation secondaire de l’épithélium. Ainsi, dans leur modèle de xénogreffes, un stroma normal différencié ne permet qu’une transformation faible d’un épithélium normal par un carcinogène chimique, soit un contrôle négatif de la prolifération de cellules épithéliales déjà transformées par un carcinogène chimique. En revanche, dans ces mêmes modèles, un stroma anormal soit extrait de tumeur, soit modifié au préalable par irradiation ou mise en contact avec un carcinogène, permet une plus haute fréquence d’induction de la cancérogenèse chimio-induite dans la composante épithéliale normale. Enfin, un stroma anormal ou modifié œuvre en synergie avec un épithélium déjà transformé pour le développement tumoral.
Processus de cicatrisation : macrophages et phénomène de transition phénotypique épithélium mésenchyme (EMT) Second processus physiologique Un second processus physiologique, la cicatrisation tissulaire, intervient en fin de réparation tissulaire avec la reconstitution de la continuité épithéliale.
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Ce processus est associé au recrutement et à l’activation d’une composante cellulaire stromale : les macrophages (38-40, 58). Les macrophages recrutés par la première phase de réparation tissulaire sont capables de répondre dans un contexte hypoxique, par la sécrétion de trois types de facteurs : des facteurs type hereguline (HER1/EGF), protéases (MMP5-MMP9), et des facteurs angiogéniques (VEGF-interleukine 8). La première boucle d’interaction mettant en jeu HER1/EGF a pour cible la cellule épithéliale qui exprime le récepteur spécifique à HER1 (REGF) en augmentant sa prolifération. La sécrétion de MMP5-MMP9 peut avoir plusieurs impacts : le clivage de la protéine sérique de transfert IGFBP2, la destruction des matrices extracellulaires. Le clivage de la protéine IGFBP2 libère les facteurs IGF-1 et -2 qui ont également pour cible la cellule épithéliale tumorale qui exprime les récepteurs spécifiques à ces facteurs de survie et prolifération. Les métalloprotéases MMP5-MMP9 sont associées à uPA et à la boucle plasminogène/plasmine, déjà présentée, qui intervient dans la destruction des différentes composantes de la matrice extracellulaire, la libération et l’activation des pro-facteurs de croissance. Parmi ceux-ci, sont activés des facteurs de croissance dont la cible est la cellule tumorale mais également d’autres facteurs de croissance à potentialité angiogénique dont la cible est la cellule endothéliale. Dans le stroma tumoral, on retrouve des facteurs directement sécrétés par les macrophages en réponse à l’hypoxie (type VEGF-interleukine 8…), facteurs sous dépendance du facteur de transcription spécifiquement activé (stabilisé) sous hypoxie, le facteur HIFα. (41). L’impact des facteurs sécrétés et activés par les macrophages actifs associés à la réparation et la cicatrisation tissulaire permet la modification de la cellule épithéliale en cellule de transition épithéliale/mésenchymateuse. Ce processus physiologique (EMT) indispensable à la cicatrisation permet à la cellule épithéliale de redevenir mobilisable avec perte du phénotype épithélial différencié et polarisé (42). L’acquisition de ce phénotype particulier « mésenchyme-like » EMT exprimé par les cellules épithéliales situées dans les berges des sites de réparation tissulaire permet la restauration de la continuité épithéliale. Le phénotype EMT se traduit par une modification de la relation de la cellule activée avec les constituants de la membrane extracellulaire : perte de la polarisation, modification d’expression de molécule membranaire. Ainsi, les molécules d’adhésion cellulaire, la N-cadhérine est exprimée par la cellule EMT alors que l’expression de la E-cadhérine est réprimée dans son expression. La cellule épithéliale EMT exprime également de nouveaux récepteurs membranaires dont HGF récepteur, et le récepteur à l’urokinase. Le récepteur à HGF rend la cellule sensible à la stimulation par HGF/SF facteur sécrété par les myofibroblastes et macrophages
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activés, facteur induisant la migration cellulaire et le récepteur de l’urokinase, ce dernier récepteur participe également au phénomène de migration cellulaire, par un mécanisme que nous détaillerons ultérieurement.
Macrophages associés aux tumeurs Depuis longtemps observés par les anatomo-pathologistes, ils sont l’objet d’un paradoxe apparent. Théoriquement, les macrophages, éléments du système immunitaire, devraient être adaptés pour contrôler ou détruire des cellules anormales de type tumoral. Or, les macrophages associés aux tumeurs sont corrélés à une évolution tumorale péjorative sur le plan expérimental et clinique. Dans les modèles expérimentaux, plusieurs interactions hétérotypiques macrophage-tumeur ont pu être démontrées. La cellule tumorale sécrète des facteurs : PDGF, CSF1et MCP1 (40), qui sont des facteurs attractants des monocytes circulants, qui deviennent associés et activés en macrophages dans l’environnement tumoral. Les phénomènes physiologiques mis en jeu pour la cicatrisation dans le processus de réparation tissulaire sont détournés par la cellule tumorale dans le phénomène de prolifération et d’invasivité tissulaire qui se déroule en plusieurs temps (43, 44). Les structures épithéliales conservent dans un premier temps leur matrice extracellulaire, présentent une phase d’hyperplasie/prolifération in situ, mais la composante cellulaire épithéliale basale (cellule myoépithéliale) disparaît progressivement, traduisant entre autre la perte de réponse au TGFβ2 (43, 44). La cellule myoépithéliale est indispensable pour la synthèse et la structuration normale des matrices extracellulaires différenciées, elle est aussi la composante cellulaire épithéliale à partir duquel se fait le renouvellement lent du comportement épithélial. Sur le plan morphologique, la disparition sans apoptose traduit un changement phénotypique cellulaire, la cellule myoépithéliale perd sa différenciation spécifique et participe au phénomène de transition phénotypique EMT. Cette phase amorce la dégradation de la matrice extracellulaire permettant des zones micro-invasives puis invasives de la composante cellulaire tumorale (45-47).
Phénomène inflammatoire associé au processus d’activation, réparation, cicatrisation Durant les étapes d’activation des cellules stromales (myofibroblastes, macrophage, cellule endothéliale) mais également durant le processus EMT des cel-
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lules épithéliales, on met en évidence un changement majeur dans les voies métaboliques de l’acide arachidonique et linoléique membranaires avec répression de la voie des lipoxygénases (Lox 1/2) et induction de la voie des cyclooxygénases (Cox 1,2). La répression des voies lipoxygénases Lox 1/2 entraîne une disparition des produits métaboliques I5HETE de l’acide arachidonique 13HODE de l’acide linoléique qui sont associés à la différenciation cellulaire et sensibilité à l’induction de l’apoptose. L’induction de la voie des cyclo-oxygénases (Cox 1,2) entraîne en cascade l’activation des enzymes peroxydases et prostaglandines synthétases aboutissant à une surproduction de prostaglandine PGE2. Ce changement métabolique majeur démontré dans les cancers du sein dès 1980 (48) est observable dans toutes les pathologies. La surproduction de prostaglandines PGE2 se traduit par un phénomène global de type inflammatoire et sur le plan cellulaire par une perte de l’inhibition de contact, prolifération cellulaire indépendante de l’attachement, répression de l’expression de la E-cadhérine et stimulation de la prolifération par induction synthèse βFGF/amphirégulline/EGF/protéases (49, 50). Ce changement métabolique est observable dans toutes les pathologies dans le comportement stromal activé, puis épithélial (51). Cependant dans certaines pathologies, tel le cancer du sein, ce changement métabolique intervient très précocement et de façon prévalente dans le comportement épithélial (48-52).
Hypoxie, P53, switch angiogénique La croissance épithéliale « in situ » est limitée à l’hypoxie centrale des foyers d’hyperplasie lorsque le diamètre est supérieur à 0,4 mm, distance au-delà de laquelle la diffusion passive à partir des capillaires préexistants de l’oxygène n’est plus efficace. Une fois cette limite atteinte et dépassée, l’hypoxie entraîne un arrêt de la prolifération avec zone d’apoptose et de nécrose centrale en cas de non-établissement d’une néo-angiogenèse fonctionnelle. Le groupe de Folkman a développé un modèle d’évolution spontanée de foyers d’hyperplasie, tumeurs pancréatiques à partir d’îlots langerhansiens de cellules β (53-54) (modèle Rip tag modèle). Ce modèle est spontanément évolutif en fonction de l’âge de la souris. En dessous de 5 semaines, les îlots de Langerhans sont morphologiquement normaux. Entre 5 à 7 semaines, 50 % des îlots deviennent hyperplasiques avec un diamètre de 0,1 à 0,2 mm. De 7 à 12 semaines, 10 % des îlots hyperplasiques deviennent angiogéniques, ce que Folkman décrit comme le « switch angiogénique ». Enfin, entre 12
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et 14 semaines, 2 % des îlots hyperplasiques et angiogéniques deviennent des tumeurs invasives. Ce modèle met en évidence l’importance de la réponse à l’hypoxie avec la possibilité de tumeurs latentes, d’un diamètre maximum de 0,4 mm, contrôlées dans leur prolifération par l’hypoxie en cas de non-réduction de celle-ci par le développement du processus de néo-angiogenèse. L’hypoxie cellulaire consécutive à un apport inadéquat en oxygène et nutriments entraîne un taux élevé en dioxyde de carbone, des dérivés métaboliques dont une accumulation d’acide lactique qui acidifie le pH cellulaire et péricellulaire. Cette hypoxie non contrôlée enclenche le processus d’apoptose p53 dépendant stimulé par TSP1. En 1996, Kinzler et Vogelstein (55), étudiant les événements moléculaires intervenant dans la croissance tumorale, démontrent une haute fréquence d’induction de mutation de P53 dans les zones hypoxiques. Les mutations de p53 permettent aux cellules de résister à l’arrêt du cycle et à l’induction de l’apoptose p53 dépendante. Les cellules ayant muté et acquis un avantage de croissance et de résistance à l’hypoxie deviennent peu à peu prédominantes dans la tumeur. L’autre alternative à la reprise de la croissance tumorale est le déclenchement d’un processus de néo-angiogenèse tumorale fonctionnelle ou « switch angiogénique ». Ceci est possible par induction d’une interaction entre foyer épithélial hyperplasique et les cellules du stroma qui sont attirées et activées dans l’environnement immédiat du foyer épithélial, prolifératif. 1. Les cellules monocytaires/macrophages sont recrutées via la sécrétion par les cellules épithéliales prolifératives du CSF1 (40, 56). Les macrophages activés sécrètent, entre autres, les protéases MMP5, MMP9 (57, 58), participent à la destruction de la matrice extracellulaire avec libération de facteur angiogénique séquestré type VEGF (58-60) avec l’activation de la plasmine par uPA, l’activation en cascade de nombreuses protéases, que nous avons décrite avec la destruction de la matrice extracellulaire, la libération et activation de facteurs à potentialité angiogénique tels FGF basique, TGFβ1, PDGF herégulines dont EGFs, heparin binding EGF, IFNγ. 2. Les fibroblastes activés en myofibroblastes jouent un rôle important également en sécrétant MMP5, MMP9 mais également un facteur attractant pour la cellule endothéliale la chémokine SDF1/CXCL12 (61). L’étude morphologique microscopique met en évidence ces phénomènes d’attraction et activation cellulaire dans le stroma péritumoral. En 2005, une étude intéressante (62) montre l’étroite corrélation entre recrutement et acti-
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vation des cellules stromales (dont les macrophages) et le développement de microvaisseaux péritumoraux.
Néo-angiogenèse/ cellules endothéliales/péricytes Le troisième processus mettant en jeu des interactions entre la tumeur et son microenvironnement est la néo-angiogenèse tumorale. Ceci a été mis en évidence par Folkman dès 1970 (3, 4, 63, 64). Une publication de synthèse de Folkman pointait dès 1990 ce processus comme étant une clef du développement tumoral et une cible thérapeutique majeure (65). Le ciblage thérapeutique devenait possible par la découverte en 1989 par quatre groupes, ce de façon indépendante du facteur majeur de la vasculogenèse et angiogenèse le VEGF (66-70). Deux notions importantes sont à rappeler.
Vasculogenèse La vasculogenèse recouvre le développement de l’arbre vasculaire dans les étapes précoces de l’embryogenèse à partir d’îlots (71) cellulaires spécifiques pluripotents composés de cellules précurseurs du système endothélial et hématopoïétique. Ces précurseurs peuvent être identifiés par des antigènes de membrane CD spécifique et communs. Durant toute l’embryogenèse, le développement de la vascularisation à partir d’îlots cellulaires précurseurs peut être observé. Ce phénomène est sous la totale dépendance du VEGF. Ainsi, dans les modèles « knock-out », l’absence d’expression des gènes VEGF A et B ou de ces récepteurs VEGFR1/VEGFR2 est létale et ne peut être remplacée par aucun autre substrat pour le développement princeps de la vascularisation embryonnaire organisée (72-75). L’absence de VEGF et de toute expression du récepteur VEGFR2/ flk1/KDR ne permet pas la première étape indispensable avec le développement des îlots primaires de cellules précurseurs pluripotentes endothéliales (74). En revanche, l’absence du second récepteur VEGFR1/flt-1 permet cette première étape mais non le développement secondaire, à partir de ces îlots de cellules différenciés, précurseurs endothéliaux, d’une vascularisation organisée (75).
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Le développement, à partir d’îlots de cellules précurseurs, d’une vascularisation tissulaire s’observe durant l’embryogenèse mais jamais dans les tissus différenciés adultes. Dans l’analyse du développement du processus tumoral, des arguments de plus en plus nombreux, expérimentaux et cliniques, démontrent la reprise possible de ce processus de recrutement de cellules précurseurs pluripotents d’origine médullaire comme complément ou alternative au développement de la néo-angiogenèse tumorale à partir des capillaires préexistants.
Angiogenèse physiologique L’angiogenèse physiologique, quant à elle, recouvre le développement de nouveaux capillaires sanguins à partir des capillaires pré-existants. Ce processus physiologique existe durant l’embryogenèse en complément de la vasculogenèse ou indépendamment selon les tissus (76) mais c’est par contre le processus de développement et renouvellement qui s’observe seul dans l’organisme adulte : – un marqueur spécifique de l’angiogenèse est l’expression par les cellules endothéliales des intégrines ανβ3 (77) ; – la non-expression de ανβ3 (knock-out) bloque tout développement de l’angiogenèse ; – chez l’adulte, l’angiogenèse est un processus physiologique qui fait partie de la réparation tissulaire post-traumatique mais joue également un rôle important dans la reproduction. L’angiogenèse physiologique vasculaire fait appel aux différents isoformes du VEGF A/B, leur récepteur spécifique VEGFR1R2, mais également à de nombreux facteurs angiogéniques FGFB, PDGF, herégulines, amphiréguline entre autre, et leurs récepteurs cellulaires spécifiques. L’angiogenèse est contrôlée par des facteurs inhibiteurs physiologiques dont les premiers ont été mis en évidence par Folkman. La vascularisation capillaire stable à partir de laquelle va se développer la néo-angiogenèse est caractérisée par des structures capillaires où les cellules endothéliales interagissent avec les péricytes pour la synthèse des éléments de la matrice extracellulaire et le maintien d’une structure fonctionnelle. Les cellules endothéliales expriment à la surface de leur membrane externe le récepteur Tie2 récepteur spécifique des angiopoïétines. Le facteur stabilisant, l’angiopoïétine 1, est sécrété par les cellules endothéliales différenciées et agit en boucle autocrine. La liaison angiopoïétine 1/Tie2 se traduit par l’expression de molécule d’adhésion cellulaire permettant l’association cellule endothéliale-péricytes, par ailleurs, les cellules endothéliales, différenciées et stables n’expriment pas le récepteur au VEGF (78).
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Néo-angiogenèse tumorale Aspect morphologique Sur le plan morphologique, celle-ci aboutit à une angiogenèse différente de l’angiogenèse physiologique. Les néo-capillaires tumoraux ont un diamètre trois fois plus important que ceux observés dans les tissus différenciés. Ils ont de plus une perméabilité à la fibrine dix fois plus importante que celle observée dans les capillaires physiologiques. Ces néo-capillaires tumoraux comportent par ailleurs des espaces intercellulaires fréquents et la participation des cellules tumorales à cette fraction des parois de pseudo-capillaires (vasculomimicrie) (23). La discontinuité des néo-capillaires et la perméabilité accrue se traduisent sur le plan macroscopique par des dépôts de fibrine péricapillaire et intratumoral. Une organisation chaotique s’observe également au niveau des néolymphatiques tumoraux et péritumoraux, leur développement met en jeu les VEGF, C et D et le récepteur VEGFR3 exprimé sur les cellules constitutives des capillaires lymphatiques. La structure de ces néocapillaires non associée à une membrane basale est faiblement efficace car facilement écrasée par la pression intratumorale élevée qui augmente régulièrement. L’augmentation de pression intratumorale est consécutive au non-drainage lymphatique efficace associé à une forte perméabilité des néo-capillaires sanguins qui, eux, résistent mieux à la pression intra- et péritumorale, du fait de leur structuration plus complexe avec cellules endothéliales péricytes, matrice extracellulaire.
Développement dynamique de la néo-angiogenèse Le développement de la néo-angiogenèse tumorale se fait schématiquement en trois phases. – Une phase de déstabilisation et activation des cellules endothéliales quiescentes stables induite par l’hypoxie tumorale. Les protéases et les facteurs de croissance libérés par les cellules stromales activées et les cellules tumorales hypoxiques induisent la sécrétion d’angiopoïétine 2. L’angiopoïétine 2 entre en compétition avec l’angiopoïétine 1 sur le récepteur Tie2 des cellules endothéliales. La liaison angiopoïétine 2/Tie2 a pour conséquence de déstabiliser les structures capillaires avec perte des interactions fortes cellulaires (cellule endothéliale/péricytes) et expression des récepteurs VEGF de type R1 par les cellules endothéliales activées.
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– Les phases ultérieures sont les phases de prolifération et migration. – La troisième phase est la croissance, migration, stabilisation transitoire des cellules endothéliales déstabilisées. La prolifération des cellules endothéliales est secondaire à la stimulation par les facteurs de croissance angiogénique dont le VEGF (si ceux-ci sont absents, les cellules endothéliales activées déstabilisées entrent en apoptose). Les facteurs de croissance angiogénique (FCA) sont sécrétés par les cellules tumorales mises en hypoxie du fait de la croissance de la masse tumorale rapide autonome. Comme nous l’avons vu, les cellules tumorales sécrètent également des facteurs activant les macrophages péritumoraux, ceux-ci, en réponse, produisent d’autres facteurs angiogéniques et attractants pour les cellules endothéliales activées déstabilisées. Enfin, les protéases et héparinases sécrétées par les cellules tumorales et stromales participent à la dégradation des constituants des membranes basales, permettant la libération et l’activation par d’autres protéases des facteurs de croissance angiogéniques séquestrés. La migration cellulaire est un phénomène complexe avec projection de lamellipodes en expansion frontale de la cellule endothéliale, d’attachement-détachement de la cellule migrante sous stimulation de facteurs attractants. Les intégrines ανβ3 jouent un rôle important que nous décrivons plus loin. Au terme de cette migration, les cellules endothéliales s’associent en néotubule, se stabilisent par interactions avec des cellules présentant une différenciation en péricyte. L’ensemble cellules endothéliales/péricytes sécrète les différents constituants de la matrice extracellulaire et permet aux néocapillaires transitoirement stabilisés, d’être fonctionnels. La néoangiogenèse tumorale est un phénomène dynamique en perpétuel remaniement déstabilisation/stabilisation dans un environnement riche en protéases. La sécrétion d’inhibiteurs PAI1-TIMP et d’angiopoïétine 1 permet une stabilisation temporaire des cellules endothéliales et péricytaires stromales. L’adrénomédulline, peptide amidé dont l’expression est régulée par l’hypoxie, joue un rôle majeur dans la stabilisation des complexes cellules endothéliales/péricytes et la fonctionnalité de la néo-angiogenèse. La prise en compte de la néo-angiogenèse est sa quantification, ou celle de facteurs spécifiques intervenant dans son développement (protéases, facteurs angiogéniques…). Ce sont des facteurs pronostiques majeurs pour les tumeurs invasives non cliniquement métastatiques (79).
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Points communs dans la réponse à l’hypoxie cellulaire post-traumatique ou hypoxie tissulaire tumorale Ils recouvrent deux choses : la stabilisation de HIF1α et les protéases activées par uPA.
HIF1α HIF1α est un facteur fondamental mis en jeu dans la réponse à l’hypoxie et régulation de la transcription de gènes nécessaires au développement d’une néo-angiogenèse, à un apport accru d’oxygène et la mise en route de voies et processus métaboliques nécessaires à la survie cellulaire dans une phase d’hypoxie transitoire (80). HIFα/β est une molécule agissant comme facteur de transcription après dimérisation et fixation sur l’élément de réponse HRE, il existe deux isoformes isolées HIF1, HIF2 avec deux sous-unités α et β. HIF est en fait synthétisé de façon continue par les cellules mais en cas de normoxie cette molécule cytoplasmique est instable car hydroxylée sur les résidus proline p402 et p564 par la propylhydroxylase (PMD 1.23). HIF hydroxylé se couple à la protéine de van Hippel Lindau qui joue le rôle de protéine de transport et d’adressage, de ce fait HIF1α hydroxylé est dégradé dans le protéasome. En cas d’hypoxie, HIF non hydroxylé est stabilisé, après une translocation dans le noyau, dimérisation, il s’associe à l’élément de réponse HRE. Certains facteurs induisent une augmentation de la transcription de base de HIF, à savoir les facteurs de croissance mettant en jeu des récepteurs membranaires à activité tyrosine kinase. Tels IGFR, HER1, HER2, CCR-abl, les voies de transmission du signal AKT mTOR, les prostaglandines PGE2, ces dernières facilitent par ailleurs la translocation des HIF non hydroxylés/stabilisés dans le compartiment nucléaire. La dimérisation HIFα β et la liaison au HRE induisent la transcription de plusieurs dizaines de facteurs (80-82). Globalement, HIF1α induit la transcription : – de facteurs mis en jeu dans l’angiogenèse tels les facteurs angiogéniques, (VEGF, ANG1, PDGFβ, adrénomédulline, endothéline 1), et les protéases uPA, Cat D, MMP2, UPAR PAI1 ; – de facteurs mis en jeu dans le transport d’oxygène telle l’érythropoïétine (EPO) ;
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– de facteurs permettant la survie dans un contexte de stress hypoxique telles IGF2/EPO qui inhibent l’apoptose induite par le stress hypoxique ; – de facteurs impliqués dans le métabolisme du glucose en condition d’acidose hypoxique, avec entre autre l’induction des enzymes GLUT1 et GLUT3, la répression de GLUT2 et augmentation des transporteurs du glucose. De nombreux facteurs mis en jeu dans les processus physiologiques de réparation/cicatrisation et néo-angiogenèse de réparation sont sous dépendance de HIF et agissent en synergie (80).
Protéases activées par uPA La néo-angiogenèse et l’invasivité tumorale locale mettent en jeu une coopération entre tumeur et microenvironnement dans laquelle de multiples protéases jouent un rôle important. Trois classes de protéases prédominent : les sérines protéases avec l’activateur du plasminogène type urokinase uPA, les métalloprotéases MMP2, MMP5, MMP9 (collagénases) ou MMP10, MMP7 (stromélysines) et les cathepsines (BDL). Toutes ces protéases sont en fait sécrétées par les cellules tumorales ou les cellules de l’environnement tumoral sous forme de proenzyme inactive. Différents systèmes interagissent dans un but d’activation en cascade de proenzymes en enzymes actives. Chaque protéase cible des séquences spécifiques présentes dans les macromolécules constitutives des MEC et stroma fibrillaire (14-18) mais également des macromolécules tels les facteurs de croissance. Le système d’activation du plasminogène est un système protéolytique complexe capable de produire de grandes quantités de plasmine (enzymes actives à partir de son précurseur le plasminogène). Le plasminogène est une prosérine protéase de 90 kDa produite par le foie et sécrétée dans le système vasculaire à très haute concentration (1,5 à 2 mM). Le plasminogène peut également être trappé dans les compartiments extravasculaires (83, 84). De ce fait, cette proenzyme plasmatique et tissulaire est disponible de façon importante et ubiquitaire pour une activation par des systèmes spécifiques. L’activation du plasminogène est catalysée par deux types d’activateurs différents, les activateurs de type urokinase (uPA) et de type tissulaire (tPA). Récemment, il a également été montré que le facteur XIIa était également un activateur physiologique du plasminogène (85). L’activation du plasminogène par uPA libère la plasmine, protéase relativement polyvalente et peu spécifique. La plasmine peut, directement ou en
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cascade à travers sa capacité d’activer des prometalloprotéases, dégrader la plupart des constituants de la matrice extracellulaire (86-89). De plus, la plasmine active diverses macromolécules tels que les profacteurs de croissance (à titre d’exemple, le TGFβ) (90-91) qui, comme nous l’avons vu, modulent les interactions intervenant entre tumeur et environnement (9295). Parmi les produits de la protéolyse il a été mis en évidence que la néoangiogenèse pouvait être inhibée par un fragment du plasminogène (l’angiotensine) (96-97). De très nombreux arguments suggèrent un rôle majeur de l’activation du plasminogène par uPA durant l’invasivité tumorale et l’établissement de la néo-angiogenèse tumorale. Les études par immunohistochimie et hybridation in situ des modèles expérimentaux ou des tumeurs humaines ont montré que l’uPA et uPAR et PAI1 sont exprimés dans le compartiment épithélial tumoral mais également dans le compartiment stromal, dans et autour des foyers tumoraux invasifs associés à une forte angiogenèse (98, 99). Plusieurs modèles expérimentaux ont montré un retard à la croissance, que ce soit des tumeurs primitives ou des métastases, lorsque l’activité uPA est inhibée (100-103). Enfin, dans un modèle de souris transgénique uPA-/-, il a été montré que la transformation cellulaire maligne et la croissance des tumeurs chimiquement induites étaient fortement réduites (104).
Rôle de uPA Le rôle de uPA dans la croissance tumorale et l’invasivité couvre deux aspects différents : – l’un, protéolytique, est décrit ci-dessus ; – l’autre est la migration cellulaire. uPA via sa liaison à son récepteur membranaire UPAR présent sur les cellules tumorales, et endothéliales activées, participe à la migration cellulaire. Le récepteur uPAR étant externalisé à l’extrémité des lamellipodes au pôle cellulaire antérieur, uPA associé à son récepteur spécifique se lie sans protéolyse à la vitronectine/fibronectine. Cette liaison en association avec les intégrines ανβ3 et le cytosquelette déclenche un capping postérieur. Au pôle cellulaire postérieur, il y a dissociation du complexe vitronectine uPA/uPAR et internalisation d’uPAR. Après trafic intracellulaire, une réexternalisation de uPAR se fait au nouveau pôle antérieur des lamellipodes cellulaires rendant possible une nouvelle interaction avec la vitronectine et le déplacement cellulaire.
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Rôle de PAI1 Le rôle de PAI1 dans le développement tumoral est complexe. Il joue probablement des rôles différents. Plusieurs voies d’action peuvent être proposées quant au rôle de PAI1 dans la progression tumorale. 1. PAI1 est lié à la néo-angiogenèse. Exprimé dans les capillaires borgnes, il est de ce fait un marqueur de l’intensité de la pénétration de la néo-vascularisation dans la tumeur. 2. PAI1 joue un rôle dans l’établissement de l’invasivité et la dissémination des cellules tumorales et endothéliales, en réduisant l’adhésion cellulaire par une dissociation par compétition d’UPA/UPAR de son interaction avec la vitronectine, PAI1 ayant une affinité plus grande pour la séquence de vitronectine que UPA. 3. PAI1 protège l’ensemble du stroma tumoral de l’autodégradation secondaire à la plasmine activée par l’uPA, ce qui est important dans la réparation tissulaire, mais outrepasse dans la croissance et l’invasivité tumorale. 4. PAI1Il joue un rôle important dans la stabilisation définitive de la néovascularisation de la réparation tissulaire. Mais il joue un rôle temporaire dans la stabilisation de la néo-angiogenèse tumorale permettant sa fonctionnalité transitoire après établissement d’une interaction cellules endothéliales/péricytes et formation d’une matrice extracellulaire élémentaire. Cette stabilisation est temporaire dans un contexte stromal péritumoral riche en protéases et modulé par l’hypoxie cellulaire qui entraîne un phénomène dynamique perpétuel de remodelage de la vascularisation tumorale.
Cibles du stroma et du système angiogénique Indispensable à la croissance tumorale, la néo-angiogenèse tumorale est un processus dynamique en remodelage constant alternant phase de déstabilisation, expansion et stabilisation transitoire. Dans ce processus, le VEGF joue un rôle important dans la phase d’initiation mais peu à peu un nombre de plus en plus important de facteurs angiogéniques accompagne le développement tumoral, particulièrement lors des phases d’échappement thérapeutique (60). Parmi cette mixture angiogénique de plus en plus complexe, un facteur, l’adrénomédulline (AM) fait l’objet depuis 1998 d’une attention croissante et de nombreux travaux (110, 111).
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Adrénomédulline Depuis les premières publications (111), plusieurs travaux (112-115) ont démontré et confirmé le rôle de l’AM dans la croissance tumorale par l’induction d’une néovascularisation fonctionnelle consécutive au recrutement de toutes les cellules du stroma et leur activation ainsi qu’un recrutement de précurseurs. Les modèles murins « knock-out » du gène de l’AM démontrent le rôle essentiel de l’AM dans la vasculogenèse embryonnaire et la revascularisation post-ischémique. L’expression de l’AM est stimulée par l’hypoxie (via HIF1α/HRE) dans les tumeurs solides humaines et joue un rôle dans le recrutement et l’activation des différents partenaires cellulaires du stroma mis en jeu dans les différents processus que nous avons décrits dans le développement de la tumorigenèse et l’angiogenèse. Les mécanismes moléculaires identifiés mis en jeu dans les interactions hétérotypiques entre la tumeur et son micro-environnement ayant pour conséquence le recrutement et l’activation dans le stroma péritumoral des fibroblastes-macrophages, la cellule endothéliale et les précurseurs participant au développement dynamique d’une néo-angiogenèse sont proposés comme étant les cibles à privilégier dans le développement des « thérapeutiques ciblées » (115, 116).
Remerciements Les auteurs remercient Véronique Gagna pour sa compétence et pour son aide efficace dans l’établissement du manuscrit.
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Interactions entre les cellules tumorales et le microenvironnement tissulaire 123
Annexe. Abréviations communes usitées dans ce chapitre. AM CSF1 ECM EGF EGFR EMT FGF HGF/SF HIF1/2α HRE IGF IGFBP MCP1 MEC MMP PAI PDGF TAM TGFα TGFβ1 TP/PDECGF UPA UPAR VEGF VEGFR
Adrenomedullin Colony Stimulating Factor 1 Extra Cellular Matrix Epidermal Growth Factor (HER1 = Hereguline 1) Epidermal Growth Factor (HER1) Receptor Epithelial Mesenchyme Transition Fibroblast Growth Factor (Type 1-2) Hepatocytes Growth Factor/Scattering Factor Hypoxia Induced Factor α (Type 1-2 α β) Hypoxia Responsive Element Insuline « like » Growth Factor (type 1-2) Insuline Growth Factor Binding Protein Monocytes Chemo attractive Proteins 1 Matrice extracellulaire Metalloproteases Plasminogen Inhibitor (type 1) Plaquette Derived Growth Factor Tumor Associated Macrophage Tumor Growth Factor Type α Tumor Growth Factor (type 1-2) Thymidine Phosphatase/Plaquette Derived Endothelium Cell Growth Factors. Urokinase Plasminogen Activator Urokinase Plasminogen Activator Receptor Vascular Endothelium Growth Factor (4 types : A, B, C, D) Vascular Endothelium Growth Factor Receptor (3 types : R1, R2, R3)
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Pierre-Marie Martin
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 15
Évaluation des facteurs pronostiques déterminants pour la stratégie thérapeutique des patientes métastatiques après cancer du sein. Évaluation de la prise en charge de 1 096 patientes traitées entre 1980 et 2005 au centre Antoine Lacassagne-Nice R. Largillier, E. Chamorey, J. Doyen, A. Courdi, F. Ettore, C. Maestro, I. Raoust, M. Lallement, M. Namer et J.M. Ferrero
Introduction : Depuis 25 ans, la prise en charge des cancers du sein en situation adjuvante et métastatique s’est modifiée de manière importante avec l’apparition de nouvelles thérapeutiques en hormonothérapie, en chimiothérapie et en thérapeutique ciblée. L’objectif de cette étude est d’évaluer les facteurs pronostiques classiques influençant la décision thérapeutique et la survie en situation métastatique. D’autre part, cette étude épidémiologique a pour but d’évaluer l’évolution de la survie des patientes liées aux modifications thérapeutiques mises en place depuis 25 ans. Patientes et méthodes : Il s’agit d’une étude rétrospective à partir des analyses de bases de données du centre Antoine Lacassagne. 4 600 patientes ont été opérées avec un traitement locorégional standard entre 1980 et 2005. Elles ont toutes reçu un traitement adjuvant standard au moment du diagnostic initial. Parmi ces patientes, 1 096 patientes ont évolué sur un mode métastatique. Ces patientes métastatiques ont constitué notre cohorte d’étude. Les caractéristiques initiales des tumeurs des thérapeutiques adjuvantes et le devenir de ces patientes ont été étudiés pour la survie spécifique en analyse univariée par le test de LogRank et en analyse multivariée en utilisant un modèle de Cox.
128
R. Largillier, E. Chamorey, J. Doyen et al.
Résultats : Les variables pronostiques de la survie en situation métastatique significative sur le plan statistique sont l’atteinte ganglionnaire axillaire initiale (p < 10–6), les récepteurs hormonaux (p < 10–6), le type de localisation tumorale (p < 10-6), le traitement adjuvant postopératoire (p < 10–6), le délai de l’apparition de la métastase (p < 10–6), le grade SBR (p = 0,000051), la taille tumorale (p = 0,000970), l’âge au diagnostic de la métastase (p = 0,001008) et la période de la prise en charge thérapeutique en situation métastatique (p = 0,003547), le test HER2 n’a pas été utilisé dans notre étude par absence de données avant les années 2000. En analyse multivariée, les variables pronostiques significatives de la survie en situation métastatique sont le type de localisation tumorale métastatique (p < 0,008), les récepteurs hormonaux (p = 0,000100) et la notion de traitement adjuvant antérieur (p < 0,01) et l’âge (p = 0,000055). La notion de délai d’apparition des métastases après traitement initial n’apparaît pas comme le facteur pronostique indépendant. L’évaluation de la survie des patientes métastatiques prise en charge entre 19802005 met en évidence une amélioration globale de la médiane de survie des patientes en fonction du moment de leur prise en charge (80-85, 18 mois ; 85-90, 23 mois ; 90-95, 30 mois ; 95-00, 28 mois ; 00-05, 32 mois uniquement pour les patientes récepteurs hormonaux positifs). La prise en charge des patientes aux récepteurs hormonaux négatifs ne s’est pas améliorée en 25 ans avec des médianes de survie globale stable à 10 mois entre 1980-2005. Conclusion : Les facteurs pronostiques significatifs de la survie spécifique en situation métastatique d’un cancer du sein sont le type de localisation métastatique, la notion de positivité des récepteurs hormonaux, la notion de traitement adjuvant antérieur et l’âge au diagnostic des métastases. Le délai d’apparition des métastases par rapport au traitement initial n’est pas significatif en analyse multivariée. Nous avons mis en évidence une amélioration significative de la prise en charge des patientes pour la survie globale entre 19802005, uniquement pour les patientes aux récepteurs hormonaux positifs.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Rémy Largillier
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
X
Évolution de l’histoire naturelle et du pronostic des métastases des cancers du sein sur quatre décennies Étude de 4 110 cancers du sein métastasés T. Delozier, O. Switsers, J.M. Ollivier, C. Lévy, A. Rivière, D. Allouache, C. Delcambre, P. Berthet et K. Gunzer
Introduction Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme, dans les pays occidentaux. Il a fait l’objet d’une attention particulière pour en diminuer la morbidité et la mortalité. Le dépistage organisé par mammographie a été institué puis généralisé à toute la France. Les traitements locaux ont évolué vers la conservation du sein. Les traitements adjuvants, hormonothérapie et chimiothérapie, ont fait leur apparition dans la fin des années 70. Ils ont apporté une diminution significative des rechutes métastatiques. Les traitements adjuvants les plus récents ont encore accru le bénéfice (inhibiteurs de l’aromatase en hormonothérapie, anthracyclines puis taxanes en chimiothérapie). Depuis peu, les thérapeutiques ciblées font partie de notre arsenal thérapeutique. Malgré tous ces progrès, 30 % des patientes présentent encore une évolution métastatique. La prise en charge de la phase métastatique a, elle aussi, évolué. L’arsenal thérapeutique s’est accru dans cette phase de la maladie, de nouvelles chimiothérapies et hormonothérapies sont disponibles et les thérapeutiques ciblées y ont également fait leur apparition. D’autre part, les patientes prises en charge pour métastases ont de plus en plus souvent reçu un traitement adjuvant. Nous avons tenté d’évaluer l’évolution de l’histoire naturelle des métastases au cours des quatre dernières décennies, en tenant compte en particulier des modalités de la prise en charge au moment de la tumeur primitive, l’évolution de la prise en charge des métastases et le pronostic des cancers du sein métastatiques.
132
T. Delozier, O. Switsers, J.M. Ollivier et al.
Matériel et méthode Nous avons revu, dans une population homogène de cancers traités dans un seul centre, les modes de présentation des métastases, les traitements antérieurs, les traitements appliqués en première ligne et la survie des patientes. Depuis 1973, les données cliniques de toutes les femmes prises en charge au centre François Baclesse pour un cancer du sein sont enregistrées dans un fichier prospectif. Nous avons extrait du fichier les patientes qui avaient présenté une évolution métastatique entre 1973 et septembre 2003. Les 4 110 patientes ont été regroupées en quatre cohortes en fonction de la date d’apparition de la métastase : 70 pour les métastases apparues entre 1973 et 1979 (n = 1 034), 80 pour les métastases apparues entre 1980 et 1989 (n = 1 596), 90 pour les métastases apparues entre 1990 et 1999 (n = 1 315), 2000 pour les métastases apparues entre 2000 et 2003 (n = 178). Pour chaque patiente, nous avons revu les données de la maladie initiale, du traitement initial (chirurgie notion d’hormonothérapie ou de chimiothérapie adjuvante), les localisations des métastases ainsi que le traitement appliqué en première ligne. Toutes les métastases qui touchaient plusieurs organes ont été classées en métastases multiples. Les probabilités de survie ont été calculées selon la méthode Kaplan et Meyer et les comparaisons effectuées par un test du Log-Rank. Les comparaisons de pourcentages ont été effectuées par un test du khi2.
Résultats Les données de la tumeur initiale sont détaillées dans le tableau I. Il y a peu de variation de l’âge selon les décennies des métastases. Les tumeurs T1 sont en augmentation alors les T4 sont en diminution (p < 0,001). Les tumeurs lobulaires sont en augmentation, elles représentent maintenant 15 % des cancers métastasés. Les tumeurs SBR3 sont les plus fréquentes parmi les cancers métastasés, les tumeurs de grade 1 sont les moins nombreuses. Les deux tiers des cancers métastasés sont hormono-sensibles (RE+ ou RP+), leur fréquence a augmenté depuis les années 90. Les trois quarts des cancers métastasés présentaient initialement un envahissement ganglionnaire axillaire. Ce taux est stable au cours des décennies. Les traitements initiaux reçus varient dans le temps avec une augmentation importante des traitements adjuvants, chimiothérapie et hormonothérapie.
Évolution de l’histoire naturelle et du pronostic des métastases… 133
Années 70-79 Âge au traitement initial Âge moyen Tumeur primitive T1 (%) T2 (%) T3 (%) T4 (%) Type histologique Canalaire Lobulaire Mixte Autre type Grade histologique Grade SBR1 (%) Grade SBR2 (%) Grade SBR3 (%) Récepteurs hormonaux RE+ ou RP+ (%) Envahissement ganglionnaire N+ (%) Traitements initiaux Chirurgie (%) Radiothérapie (%) Hormonothérapie (%) Chimiothérapie (%)
Décennies des métastases Années Années 80-89 90-99
Années 2000 et +
58,4
57,7
57,3
59,8
p = 0,02
9,0 31,4 22,1 37,6
12,9 38,7 17,8 30,6
17,4 38,9 15,3 28,4
20,1 38,1 16,9 20,6
p < 0,001
89,1 3,5 2,0 5,5
87,7 6,4 2,7 3,2
82,1 10,2 5,3 2,4
74,4 14,9 7,5 3,2
p < 0,001
6,8 56,8 36,4
10,5 54,8 34,7
7,5 48,4 44,1
5,0 45,9 49,1
p < 0,001
34,1
55,6
68,8
67,0
p < 0,001
78,8
716
72,9
73,9
p = 0,09
79,1 71,8 37,4 13,4
83,5 66,6 39,4 25,2
87,6 71,0 58,8 35,2
76,9 61,6 63,2 42,5
p p p p
< = < <
0,001 0,001 0,001 0,001
Tableau I – Caractéristiques des tumeurs initiales.
L’histoire naturelle des métastases est détaillée dans le tableau II. L’âge au moment de la découverte des métastases est stable. Le taux de métastases d’emblée est plus élevé dans la dernière décennie, il peut s’agir d’un biais de recrutement. Au fil des ans, les rechutes dans la première année de surveillance diminuent. Il peut s’agir d’un bénéfice du traitement adjuvant qui retarde certaines évolutions. La localisation des métastases montre une augmentation des métastases multiples, ce qui peut s’expliquer par les progrès de l’imagerie. La répartition métastases osseuses et viscérales est relativement stable. L’augmentation isolée du Ca15-3 se retrouve en majorité dans les années
134
T. Delozier, O. Switsers, J.M. Ollivier et al.
Années 70-79 Âge au moment des métastases Âge moyen Délai d’apparition Concomitante < 12 mois > 12 mois Localisation des métastases Ganglions, tissus mous Os Viscères Cerveau Ca 15-3 isolé Métastases multiples
Décennies des métastases Années Années Années 80-89 90-99 2000 et +
60,7
61,0
61,4
62,0
p = 0,36
17,5 23,6 58,8
16,0 14,2 69,8
15,6 12,6 71,8
26,8 10,9 62,3
p < 0,001
7,6 34,4 28,0 3,1 0 26,9
9,7 34,1 26,4 2,4 0,6 26,9
7,3 29,7 24,4 3,2 4,4 30,9
3,9 29,6 20,6 2,9 0,3 42,8
p < 0,001
Tableau II – Histoire naturelle des métastases selon les décennies.
1990, lorsque le Ca 15-3 était surveillé régulièrement. Il ne se retrouve plus dans les années 2000, faute de recherche systématique. La prise en charge médicale des métastases et l’évolution (tableau III) ont été étudiées chez les femmes de moins de 70 ans au moment de la métastase. La prise en charge a évolué au cours des décennies avec moins d’hormonothérapie seule et plus de chimiothérapie. L’hormonothérapie seule ne concerne que 29,9 % des femmes dans les années 2000 contre 54 % dans les années 1980. Aux même dates, la chimiothérapie, seule ou en association, est proposée à 61,7 % des femmes contre 37,7. Sur l’ensemble de la population, la probabilité de survie s’est améliorée dans la décennie 80 avec peu de changement dans la décennie suivante. La probabilité de survie la plus importante (fig. 1) est retrouvée chez les femmes traitées récemment. Les médianes de survie sont respectivement de 12, 18, 18 et 23 mois (p < 0,0001). Chez les femmes qui n’ont pas reçu de chimiothérapie adjuvante (fig. 2), l’amélioration de la survie dans le groupe 2000 paraît plus évidente. Les médianes de survies sont respectivement de 13, 21, 20 et > 43 mois. L’augmentation de la survie ne se retrouve pas pour toutes le localisations, en particulier le pronostic des métastases cérébrales reste toujours aussi péjoratif. En analyse multivariée sur l’ensemble de la population, la décennie de prise en charge reste un facteur pronostique (tableau IV).
Évolution de l’histoire naturelle et du pronostic des métastases… 135
Années 70-79 Prise en charge Soins de confort Hormonothérapie Chimiothérapie Hormono. + chimio. Médianes de survie (mois) Globale Soins de confort Hormonothérapie Chimiothérapie Hormono + chimio Médiane de survie en fonction Chimiothérapie adjuvante Pas de chimiothérapie adjuvante Médiane de survie en fonction Ganglions, tissus mous Os Viscères Cerveau Ca 15-3 isolé Métastases multiples
9,4 49,3 13,5 27,9
Décennies des métastases Années Années Années 80-89 90-99 2000 et + 8,1 54,2 23,3 14,4
6,0 50,2 28,2 15,7
12 18 18 6 5 6 12 25 27 9 11 10 14 18 22 de la chimiothérapie adjuvante 11 12 16 12 22 20 de la localisation métastatique 16 19 22 15 26 28 9 15 14 4 4 10 103 51 8 15 12
8,5 29,9 32,8 28,9
p < 0,001
23 1 > 31 10 31
p < 0,0001 p = 0,12 p < 0,0001 p = 0,88 p = 0,004
16 > 43
p = 0,03 p < 0,0001
> 41 14 3 20
0,22 0,0001 0,32 0,03 0,23 0,009
Tableau III – Prise en charge et pronostic des métastases selon les décennies chez les femmes de moins de 70 ans. Facteur pronostique
p
Grade SBR
p < 0,001
Récepteurs hormonaux (RE ou RP)
p < 0,001
Décennie de prise en charge
p < 0,001
Réponse au traitement de première ligne
p < 0,001
Localisation de la métastase
p = 0,010
Chimiothérapie adjuvante
p = 0,043
Âge (tranches de 10 ans)
p = 0,059
Délai d’apparition
p = 0,077
Envahissement ganglionnaire initial
p = 0,095
Tableau IV – Facteurs pronostiques de survie en analyse multivariée.
T. Delozier, O. Switsers, J.M. Ollivier et al.
Survie cumulée
136
Survie après métastase
Survie cumulée
Fig. 1 – Probabilité de survie des cancers du sein métastasés selon la décennie de leur apparition.
Survie après métastase
Fig. 2 – Probabilité de survie des cancers du sein métastasés naïfs de chimiothérapie adjuvante.
Évolution de l’histoire naturelle et du pronostic des métastases… 137
Conclusions L’histoire naturelle des cancers du sein métastatique a peu évolué durant les quatre dernières décennies. Les localisations métastatiques les plus fréquentes restent le squelette, le foie et le poumon. Si les progrès sont incontestables dans les cancers du sein localisés, au moment de la rechute métastatique, malgré l’augmentation de notre arsenal thérapeutique, les progrès sont significatifs mais modestes. L’apparition du tamoxifène et des anthracyclines peut expliquer les progrès depuis les années 1970. Ces progrès ont été vite gommés par l’utilisation de ces molécules dans le traitement adjuvant, ne laissant au stade métastatique que des patientes déjà résistantes à ces traitements. Au stade métastatique, l’effet des nouvelles chimiothérapies se manifeste essentiellement chez les patientes non traitées en adjuvant.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Thierry Delozier
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie M. Campone, E. Bourbouloux, D. Berton-Rigaud, A. Le Pourhiet, S. Sadot, T. Chatellier et J.-S. Frenel
Le développement de mécanisme de résistance par la tumeur est un obstacle majeur de l’efficacité à la chimiothérapie. Ces mécanismes sont complexes et multifactoriels. Ils sont le reflet du polymorphisme de la tumeur (instabilité génomique et mutations). On distingue des mécanismes de résistance primaire (intrinsèque) présents au diagnostic et des mécanismes de résistance secondaire (acquis) présents lors de la rechute après exposition à la chimiothérapie. Nous allons définir, à travers cet article, les mécanismes impliqués dans la chimiorésistance et nous aborderons les moyens thérapeutiques pour les contourner. Une définition de la chimiorésistance pourrait être la suivante. Il Métabolisme
Cible
Influx
Activation ADN EFFLUX
Stockage
Apoptose
ADN
Fig. 1. – Schéma général des mécanismes de chimiorésistance.
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s’agit d’une exposition inadéquate de la drogue au niveau de sa cible ou/et altération moléculaire de la cible (fig. 1).
Exposition inadéquate de la drogue au niveau de sa cible La délivrance de la dose optimale d’un agent donné au sein du tissu tumoral dépend des caractéristiques du microenvironnement tumoral (désorganisation du réseau vasculaire, modification des pressions interstitielles, hypoxie) et les paramètres de pharmacocinétiques/pharmacodynamie (absorption, distribution, élimination).
Paramètres de pharmacocinétique/pharmacodynamie des agents Par définition, un agent cytotoxique est délivré à sa dose recommandée, selon un schéma d’administration (orale, IV, hebdomadaire, tout les 3 semaines) déterminé lors des études de phase I. Les paramètres de pharmacocinétique et de pharmacodynamie de la drogue sont pris en compte pour établir cette dose recommandée. Ils regroupent les données d’absorption, de distribution, du métabolisme et d’élimination de la drogue (1). Ainsi, toute modification de l’un de ces paramètres aboutira à une concentration inadéquate de l’agent au niveau de sa cible.
Absorption Si nous prenons le cas d’un agent cytotoxique oral, l’absorption orale de cet agent sera fonction des caractéristiques physicochimiques de la molécule (agent hydrosoluble ou pas, mécanismes actif ou passif de l’absorption). La biodisponibilité de cet agent peut ainsi varier en fonction de facteurs alimentaires, d’association médicamenteuse et de l’effet premier passage (tube digestif, hépatique).
Distribution Après avoir pénétré dans l’organisme, tout médicament est transporté soit sous sa forme libre (forme active), soit lié aux protéines (forme inactive).
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 141
Un agent présent en majorité sous forme liée aux protéines aura une concentration au niveau de sa cible diminuée. Le volume de distribution peut être influencé par l’état physiopathologique du patient (obésité, ascite…), ou par des phénomènes de compétition entre médicaments sur un même site de fixation.
Métabolisme/élimination Très souvent, les agents cytotoxiques subissent des phénomènes métaboliques dont la finalité est d’augmenter leur élimination (détoxification). On considère qu’il existe deux grands groupes de réactions métaboliques : les réactions d’oxydoréduction (groupe I) et les réactions de conjugaison (groupe II). Les différents métabolites, ainsi produits, peuvent être plus ou moins actifs ou même constituer la forme active du médicament (2).
Réactions de groupe I Ces réactions métaboliques impliquent la famille des cytochromes P450 (particulièrement les sous-familles : CYP1, CYP2 et CYP3) ainsi que la dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD). Nous pouvons citer l’exemple du docétaxel et du 5-FU. Le docétaxel est détoxifié par le cytochrome CYP3A4 (3). Myoshi démontre qu’il existe une corrélation entre l’expression intratumorale du CYP3 et une résistance au docétaxel (4). Des données précliniques et clinique semblent démontrer qu’une surexpression de la DPD confère une résistance au 5FU (5-9).
Réactions de groupe II Il s’agit de réactions de conjugaisons des produits des réactions du groupe I en vue de leur élimination. Elles regroupent des réactions de glucuroconjugaison (système glucuronide : UGT), glutathion transférase (GST), aldhéhyde déshydrogénase (ALDH 1 et 2) et NAD (P) H quinone réductase. – Détoxification par le système glucuronide : Le CPT 11 est une prodrogue qui est activée par une enzyme, la carboxylestérase en SN38. Ce métabolite actif est inactivé après glucuroconjuguaison par l’enzyme l’UGT1 (10). Des modèles précliniques démontrent qu’une surexpression de UGT1 confère une résistance au SN38 (11). Cette résistance est levée en inhibant l’activité UGT1 (12). – Détoxification par le système aldhéhyde déshydrogénase : Le cyclophosphamide est détoxifié par le système ALDH. Une étude clinique a
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démontré qu’il existait une corrélation entre une résistance au cyclophosphamide et un niveau d’expression élevé du ALDH 1A1 (13). – Détoxification par le système gluthation-S- transférase (GST) : Les réactions GST sont impliquées dans la détoxification des sels de platine, des anthracyclines, de la cytarabine et du cyclophosphamide. Une étude incluant 245 patients présentant un cancer du sein traité par un régime comprenant du cyclophosmamide a étudié le polymorphisme de l’expression de la GST. Les auteurs démontrent que le polymorphisme GST B*B* est corrélé à une meilleure survie que le polymorphisme GST A*A* (sauvage) ou GSTA*B* avec respectivement une survie à 5 ans de 86 vs 66 % (14).
Diminution de la diffusion de la drogue au sein de la tumeur Sanctuaire Les sanctuaires sont définis comme des régions protégées, où la chimiothérapie ne peut diffuser. Le cerveau est un sanctuaire protégé des agressions extérieures par la barrière hémato-méningée.
Désorganisation du réseau vasculaire Le réseau péritumoral se caractérise entre autres par une désorganisation architecturale du réseau vasculaire, responsable d’une augmentation de la pression interstitielle. Il existe un gradient de prolifération cellulaire inverse du gradient d’oxygénation de la tumeur. Les zones tumorales à distance du réseau vasculaire ont des taux de prolifération moins important et les cellules qui les composent ont une capacité de survie en milieu acide et hypoxique. La résultante étant une non-accessibilité des agents dans ces zones peu vascularisées (15).
Altération de cible au sein de la cellule Au sein du tissu tumoral, l’agent cytotoxique doit traverser la membrane cytoplasmique de la cellule tumorale. Cette diffusion est soit passive, soit active par l’intermédiaire d’un transporteur (influx). Puis il doit rester au sein du cytoplasme sans en être expulsé (efflux). Sa cible atteinte, la drogue va engendrer des dommages sur l’ADN tumoral irréversibles. Dommages qui induiront l’en-
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 143
clenchement du programme apoptotique de la cellule. Les mécanismes de résistance résultants seront liés à l’influx/efflux, altération de la cible, système de réparation de ADN, apoptose/cycle cellulaire et les signaux de survie cellulaire.
Influx/efflux La diffusion à travers de la membrane cytoplasmique peut être passive (agent liposoluble) mais aussi active (agent hydrosoluble). Cet influx de drogue est réalisé par l’intermédiaire de canaux ou de transporteurs transmembranaire. Le méthotrexate, inhibiteur de la voie des folates, traverse la membrane cytoplasmique via son transporteur dénommé RCF (reduced folate carrier) (16). Des données précliniques et cliniques ont démontré qu’une inactivation du RCF par mutation (génotype 80 GG) ou par répression du site promoteur induit une résistance au méthotrexate et autres agents antifolates (17-19). Cependant, toutes les cellules ont mis en place un système de transporteurs ou des canaux ioniques qui vont favoriser l’expulsion dans le milieu extérieur des drogues. On parle de mécanisme d’efflux (20). Ces transporteurs appartiennent à la famille des protéines « ABC-cassette » comprenant les protéines P-gp, MRP, LRP, BCRP (tableau I). Des données Dénomination commune
Gène
ABCA2
ABCA2
Pgp/MDR1
ABCB1
MDR2/MDR3
ABCB4 ABCB5
BSEP/SPGP
ABCB11
MRP1
ABCC1
MRP2/cMOAT
ABCC2
MRP3
ABCC3
MRP4
ABCC4
MRP5
ABCC5
MRP6
ABCC6
MRP7
ABCC10
MRP8
ABCC11
MRP9
ABCC12
BCRP
ABCG2
Tableau I – Les protéines de la famille des ABC cassettes.
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précliniques et cliniques semblent démontrer que les membres de cette famille sont impliqués dans les mécanismes de résistance soit primaire, soit secondaire aux agents cytotoxiques (tableau II) (21-23). Vincas alcaloïdes
• Vincristine • Vinblastine • Vinorelbine
Anthracyclines
• Doxorubicine • Daunorubicine • Idarubicine
Épipodophyllotoxines
• Étoposide
Taxanes
• Paclitaxel
• Téniposide • Docétaxel Autres
• Dactinomycine • Mithramycine • Mitomycine
Tableau II – Drogue induisant un phénotype MDR.
Inactivation de la drogue Toute altération du niveau d’expression de la cible thérapeutique aura une conséquence directe sur l’activité d’un agent thérapeutique. Pour illustrer nos propos, nous prendrons l’exemple du 5-FU, des anthracyclines et des taxanes. La cible thérapeutique du 5-FU est la thymidylate synthase (TS). Il est démontré qu’un faible niveau d’expression (en immunohistochimie/ou en RTPCR) de la TS est prédictif de la réponse au 5-FU (24, 25). Une étude portant sur le polymorphisme du site promoteur de la TS (TSER3/TSER3 vs TSRE2/TSER2-TSER2/TSER3) a établi une parfaite corrélation entre polymorphisme d’expression de la TS et réponse au 5FU (favorable pour le polymorphisme TSER3/TSER3) (26). Une surexpression de la TS semble aussi prédictive de résistance aux antifolates (Tomudex®, MTA) sur des données précliniques (27).
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 145
La cible thérapeutique des anthracyclines est la topo-isomérase II. Il est décrit des mutation/amplification de la topo-isomérase II prédictives de la réponse aux anthracyclines (28). Les taxanes sont des agents cytotoxiques qui inhibent la dépolymérisation des microtubules lors de la mitose. Ces microtubulines sont constituées de sous-unités α et β de tubuline (29). Il a été décrit des résistances au paclitaxel liées soit à des mutations des sous-unités α de la tubuline (30-33), soit à une surexpression de la protéine Tau (34).
Complexe de réparation de l’ADN L’interaction entre l’agent cytotoxique et sa cible va aboutir à des altérations de l’ADN. En théorie la cellule possède tout un équipement enzymatique qui va lui permettre de réparer ces altérations. Les voies impliquées dans les mécanismes de réparation comportent entre autres la voie NER (nucleotide excission repair) et MMR (DNA mismatch repair). Parmi les protéines impliquées dans la voie NER, les protéines ERCC1 (excission repair cross-complementig protein) et XPA (Xeroderma pigmentasum group A) sont impliquées dans les mécanismes de réparation des lésions de l’ADN induites par les sels de platine. Les résultats des données précliniques et cliniques semblent démontrer qu’un déficit de la voie NER (ERCC1) serait prédictif de réponse aux sels de platine (35-42). Il suffit de restaurer cette voie pour induire une résistance aux sels de platine (43). La voie MMR, et notamment les protéines hMLH1 et hMSH2, sont impliquées dans les mécanismes de réparation de l’ADN après exposition aux sels de platine, et à des inhibiteurs des topo-isomérases II, comme les anthracyclines. Les données de modèles précliniques démontrent qu’une perte d’expression de hMLH1 et hMSH2 induit une résistance aux anthracyclines et aux sels de platine (44-46). Il semblerait que cette perte d’expression soit liée à un mécanisme de méthylation du gène sur son site promoteur (47).
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Cycle cellulaire/apoptose/signaux de survie Cycle cellulaire Une fois la cible neutralisée et les altérations sur l’ADN produites, la cellule peut soit réparer les anomalies, soit, si cela n’est pas possible, enclencher son programme de mort cellulaire (apoptose). La protéine p53 joue un rôle clef dans la régulation du cycle cellulaire et de la mort cellulaire (48, 49). Le gène p53 est muté dans environ 50 % des cas. L’expression de la p53 est sous la dépendance d’un certain nombre de kinases liées aux dommages de l’ADN : ATM (ataxia-telangiectasia-mutated), ATR (ATM and Rad-3 related), DNA-PK (DNA-dependant protein kinase). La kinase MDM2 va favoriser la dégradation par le protéosome de la p53 (50). Le facteur de transcription p53 va induire l’expression de protéines impliquées dans l’arrêt du cycle cellulaire (p21 WAF-1/CIP1, GADD45) et dans l’exécution du programme apoptotique. Les modèles in vitro semblent démontrer que les mutations de p53 induisent une résistance à un certain nombre d’agents dont les anthracyclines, les sels de platine, et le 5-FU (51-62).
Apoptose L’apoptose, ou mort cellulaire programmée, se déroule en trois étapes. Une phase d’induction, d’engagement et d’exécution. Elle est régulée par des signaux extracellulaires et intracellulaires qui sont amplifiés par des seconds messagers aboutissant à son exécution par les caspases. Il existe une voie intrinsèque (contrôle), médiée par les membres des protéines de la famille Bcl2 et une voie extrinsèque (activation) médiée par les récepteurs de la famille TNF (63). Les protéines de la famille Bcl-2 possèdent des homologies et se répartissent en membres pro-apoptotiques (Bax, Bak, Bok) ou anti-apoptotiques (Bcl-2, Bcl-Xl, Bcl-w, Mcl-1, A1) et des protéines dénommées « BH3 only » pro-apoptotique (Bik, Bad, Bim, Bmf, Hrk, Noxa, Puma). Les protéines proapoptiques vont permettre la libération au niveau de la mitochondrie, du cytochrome C, qui va constituer un complexe (apoptosome) avec la protéine Apaf1/caspase 9 pour activer la voie terminale des caspases. La voie extrinsèque est médiée par la famille des récepteurs transmembranaires du TNF : Fas, DR4 ou TRAIL-R1, DR5 ou TRAIL-R2. La fixation du ligand à son récepteur va induire l’activation de la caspase 8 qui va cliver la protéine Bid activant à son tour la voie terminale de l’apoptose.
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 147
Les caspases peuvent être inhibés par des inhibiteurs de caspase : IAP (IAP1, IAP2) XIAP, survivine. Les mécanismes de résistance à l’apoptose actuellement décrits sont liés à : – la voie intrinsèque : une résistance peut être induite soit par une surexpression des protéines de survie (bcl-2, Bcl-xl), soit par la perte d’expression des protéines pro-apoptiques (Bax) (64, 65) ; – la voie extrinsèque : il a été décrit après exposition au 5-FU une induction de l’expression de Fas ligand à la surface des cellules tumorales aboutissant à l’activation de Fas au niveau des cellules du système immunitaire et l’activation de l’apoptose des cellules immunitaires (66-68) ; – les inhibiteurs des caspases : une surexpression de la survivine est corrélée à une résistance des agents cytotoxiques (69-71).
Voies de survie cellulaire Tout comme les thérapeutiques ciblées, l’agent cytotoxique va mettre en jeu des voies de transduction du signal pour induire la mort cellulaire. Il semble établi que chaque clone tumoral met en jeu sa propre voie de transduction de survie et par conséquence de résistance. Les deux voies qui semblent actuellement les plus impliquées dans « les signaux de survie » sont la voie PI3Kinase/AKT/mTor, et la voie STAT. Les lipides transmembranaires jouent un rôle important dans la transduction de seconds messagers. Ils sont riches en résidu phosphatidyInositol (PtdIns). Ces phospholipides peuvent être activés par des réactions de phosphorylisation par une phosphoInositol 3 kinase (PI3K). L’activation de ces phospholipides par la PI3K permet d’activer un certain nombre d’effecteurs. Le principal effecteur est la kinase AKT (72). Elle inhibe le programme apoptotique cellulaire en neutralisant Bad et les membres de la famille de transcription Forkhead (FKHR). Elle va dissocier le complexe IkB/NFkB en activant la kinase IKKB. IkB va être dégradé par le protéosone (ubiquination) et le facteur de transcription NFkB va pouvoir induire la transcription de gènes impliqués dans la survie cellulaire (protéine de la famille bcl-2 et IAP). La voie STAT transduit les signaux médiés par les cytokines via les récepteurs JAK (73, 74). Sont décrits les mécanismes de résistance suivants : – la voie PI3K/AKT/mTor est la voie la plus impliquée dans les mécanismes de résistance à la chimiothérapie et par conséquent de survie cellulaire ;
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Facteur de transcription
Gènes cibles
Interaction avec autres facteurs de transcription
Agent cytotoxique
c-Myc
Bax, p53,YB-1
Sp1, Max
Sels de platine
NF-KB
Fas/FasL, MDR1
I-KB, c-Jun
Sels de platine, paclitaxel, anthracycline, 5-FU
AP-1 (c-Jun)
GST, MDR1,
NF-KB
Sels de platine
ERCC1 p53/p73
Bax, MDR1
HMG1,YB-1,p300
Sels de platine
HIF-1α
MDR1
DNA-PK
Sels de platine
Sp1
MDR1, Topo-isomérase II
p300
Anthracycline
ATF4
Zing Finger 143
YB-1
MDR1, Topo-isomérase II
Sels de platine p53, PCNA
Sels de platine, mitomycine
Tableau III – Facteurs de transcription impliqués dans les mécanismes de chimiorésistance.
– Real a démontré dans des modèles précliniques qu’une surexpression de STAT3 induisait une surexpression de Bcl-2, donc une résistance aux agents cytotoxiques (75). L’inhibition de STAT3 rétablit la sensibilité au 5-FU dans des lignées cellulaires (76) ; – une surexpression de facteur de transcription induit une résistance à la chimiothérapie (77-79) (tableau III).
Perspectives thérapeutiques Elles vont tenir compte des différents mécanismes décrits (tableau IV).
Exposition inadéquate de la drogue au niveau de sa cible Pour augmenter l’exposition de la drogue au niveau du tissu tumoral, il faut améliorer les paramètres de pharmacocinétique de l’agent, améliorer sa dis-
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 149
tribution en rétablissant un gradient de pression entre le réseau vasculaire/le milieu interstitiel et la tumeur.
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie
Les bases moléculaires de la résistance Faible concentration plasmatique Faible solubilité Fixation protéique importante Faible fixation tissulaire
Concentration inadéquate de la drogue
Métabolisme/détoxification TP DPD GST
Thérapeutique à envisager Augmenter la dose
Pégylation-drogue Polymère-conjugué-drogue
Capécitabine Éniluracil : S1 Tegafur® + Uracil® : UFT TLK286
Sanctuaire de la barrière
Induire la rupture
Vascularisation faible
Thérapie anti-angiogénique
Efflux
Reverseur MDR
Inactivation de la drogue
Nouveaux agents antitubuline : épothilones
Complexe de réparation de ADN
Inducteur de MMR et répresseur NER
Cycle cellulaire
Inhibiteur de cyclines
Apoptose
• BH3 mimétique • Sonde anti-messager Bcl-2, • Sonde anti-messagersurvivine
Signaux de survie cellulaire
• Inhibiteur de la transduction du signal
Facteur de transcription
• Inhibiteur de l’acétylation et de la méthylation des histones • Inhibiteur du protéosome
Altération de la cible
Tableau IV – Les grands principes d’inhiber la résistance à la chimiothérapie.
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Amélioration des paramètres de distribution et de vascularisation de l’agent – Augmenter la concentration plasmatique : augmenter la dose du médicament ou bien modifier le schéma d’administration (paclitaxel hebdomadaire > paclitaxel 3 semaines). – Augmenter la liposolubilité du médicament et diminuer sa fixation protéique : formes pégylées des agents cytotoxiques. – Diminuer la fixation au tissu : formes polymériques des drogues. – Diminuer le métabolisme des drogues : inhibiteur spécifique des cytochromes, de DPD, de la GST. – Rétablir un gradient entre le milieu interstitiel et la tumeur : association antiangiogénique et chimiothérapie.
Altération de cible au sein de la cellule – Influx/efflux : améliorer la capture des drogues et diminuer l’efflux des drogues (inhibiteur de la Pgp). – Inactivation de la drogue : développement de nouveaux agents cytotoxiques : fixation des épothilones à la β-tubuline indépendamment des mutations décrites pour le paclitaxel. – Complexe de réparation de l’ADN : développement de nouveaux sels de platine, anthracyclines ou inhibiteur de la voie NER. – Cycle cellulaire/apoptose/signaux de survie : développement d’inhibiteur du cycle cellulaire, d’agent BH3-mimétique, inhibiteur d’agent de survie (sonde anti-Bcl-2), inhibiteur des IAP (survivine). Développement d’inhibiteur de facteur de transcription, d’inhibiteur de l’acétylation des histones (HDAC Inhibiteur) ou de la méthylation des histones.
Conclusion Le but pharmacologique de tout agent cytotoxique est d’être délivré à la bonne dose au niveau de sa cible pour induire le plus de dommages possible et enclencher le programme de mort cellulaire. Nous avons pu constater, à travers notre revue, que les mécanismes de chimiorésistance sont complexes et multifactoriels. Tous ces mécanismes aboutissent à des signaux de survie cellulaire. Le modèle du cancer du sein surexprimant HER2 est un modèle qui nous donne
Mécanismes de résistance à la chimiothérapie 151
quelques pistes. L’amplification de HER2 induit des voies de résistance à la chimiothérapie. Les thérapies ciblées dirigées contre HER2 sont actives en monothérapie mais cette activité est améliorée en association avec la chimiothérapie. Tout se déroule comme si cette thérapie ciblée levait la résistance à la chimiothérapie. Cela signifie en autres qu’il faut considérer qu’une meilleure connaissance des voies médiées par chaque agent cytotoxique va permettre d’identifier les cibles de résistance. Une fois la cible identifiée (récepteur, second messager, facteur de transcription), la thérapeutique ciblée devra être associée à la chimiothérapie.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Mario Campone
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Bilan des traitements ciblés de la phase métastatique : quelles perspectives pour demain ? J. Gligorov, A. Khalil, F. Selle et J.-P. Lotz
La question qui m’a été posée est avant tout celle d’un bilan. L’origine italienne de ce mot, remontant au XVIe siècle et provenant de bilancio (voulant dire balance), m’amène donc à « peser » l’apport des thérapies ciblées dans la prise en charge du cancer du sein métastatique. Par ailleurs, il m’est également demandé de m’intéresser aux thérapies dites « ciblées » ou plutôt aux thérapies pour lesquelles la cible est définie. Curieusement, ce mot d’origine allemande schîbe (et voulant dire disque ou cible) est plus jeune de près d’un siècle comparé à bilancio ; comme si les termes d’économies étaient historiquement antérieurs à ceux de la précision. N’y voyez-là aucune allusion pharmaco-économique de ma part… En allant plus loin, j’ai découvert donc que les organisateurs de ce congrès m’ont demandé de m’intéresser plus spécifiquement à la phase métastatique. J’ai de principe, concernant ce terme, vérifier mes connaissances historiques et me suis donc souvenu que ce mot d’origine grec metastasis (voulant dire « changement de place », n’apparaissait que vers la fin du XVIe siècle également. Enfin, le plus difficile qu’ils m’aient demandé fut de me projeter dans l’avenir. Si le terme franc de porjeter (voulant dire « jeter à terre ») est retrouvé initialement dans les écrits datant cinquante ans avant la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, celui du mot avenir à des racines communes au début du XIIIe siècle avec le mot franc advenir signifiant « succès dans le futur ». Les membres du comité scientifique de ce congrès m’ont donc demandé une vision du futur peut-être du fait de mon prénom, n’est-il pas dit dans les écrits que Joseph avait le don de regarder dans les songes, je m’en tiendrai
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pour ma part à une réflexion, je l’espère, plus scientifique qui sera développée en détail dans l’exposé oral. Le cancer du sein métastatique est le terrain de prédilection pour l’étude et le développement de nouveaux traitements systémiques du cancer. Toutefois, en ce qui concerne l’utilité et les implications futures de ce modèle dans le domaine des thérapies ciblées, plusieurs questions semblent essentielles.
La cible est-elle conservée à l’identique entre la tumeur primitive et les métastases ? En effet, une question essentielle en ce qui concerne le développement des thérapies ciblées évaluées en phase métastatique reste celle de la stabilité de la cible au cours du temps. Trois exemples à ce jour illustrent cette problématique.
Récepteurs hormonaux et récepteur HER2 Il existe dans la littérature des preuves confirmant la stabilité importante de l’expression de ces récepteurs entre la situation métastatique et la tumeur primitive. Cependant, de récents travaux suggèrent une modification de l’expression de ces récepteurs sous l’influence d’une thérapeutique ciblée particulière comme par exemple celle de l’expression des récepteurs estrogéniques dans une population HER2+++ sous l’influence d’un traitement par trastuzumab.
Angiogenèse tumorale L’angiogenèse tumorale est un des mécanismes clés de la diffusion métastatique et de la prolifération tumorale. Si la mise en évidence de facteurs proangiogéniques en excès au moment du diagnostic de cancer est souvent associée à un facteur péjoratif, la mise en évidence de métastases témoigne de l’activation de ces voies angiogéniques. Cette cible thérapeutique faisant partie de l’environnement péritumoral et non de la tumeur elle-même est non seulement potentiellement conservée aux différents temps de l’évolution de la maladie cancéreuse mais également amplifiée.
Bilan des traitements ciblés de la phase métastatique 161
Profils tumoraux génétiques Ces dernières années, les nouvelles biotechnologies ont permis l’établissement de profils génétiques particuliers caractérisant de façon plus précise les différents cancers du sein mais également y associant une valeur pronostique. Il a été montré sur de petites séries qu’il existe une expression conservée de ces profils génétiques entre la tumeur primitive et les métastases témoignant donc d’une relative « stabilité génomique » de la tumeur. Ces éléments peuvent peut-être être utilisés pour juger d’un éventuel profil de sensibilité aux agents de chimiothérapie dont la cible est peu ou mal identifiée mais l’efficacité souvent corrélée au pronostic initial de la maladie. L’ensemble de ces exemples plaide donc en faveur de la conservation de la cible en fonction des différentes situations de la maladie mais également d’une modification possible de certaines autres cibles après exposition à un traitement ciblé.
Le traitement ciblé peut-il en situation métastatique donner des signaux forts d’efficacité ? Le développement des médicaments anticancéreux repose sur un paradoxe important qui est, d’une part, celui de la notion d’incurabilité du cancer du sein métastatique et, d’autre part, de la nécessité de démontrer en situation métastatique un bénéfice important en termes de survie (sans progression ou globale) afin d’envisager une poursuite de développement du médicament en situation non métastatique. Pourtant, si un traitement ciblé cytostatique (n’étant pas une chimiothérapie) permet une efficacité clinique même en termes de stabilisation prolongée de la maladie métastatique, cela peut présager d’une efficacité beaucoup plus importante en situation adjuvante et ne doit pas entraîner l’arrêt de son développement. Par ailleurs, même si nous avons vu que la cible thérapeutique peut être conservée dans le temps, l’importance hiérarchique de cette cible dans l’agressivité tumorale peut varier au cours du temps, expliquant qu’un traitement puisse avoir une efficacité différente en fonction du temps et de la situation clinique. L’exemple même en est la place des traitements antihormonaux en fonction du profil clinique de la maladie métastatique.
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J. Gligorov, A. Khalil, F. Selle et J.-P. Lotz
Peut-on identifier des cibles spécifiques en situation métastatique ? La véritable question est en fait d’identifier ces cibles, car le principal objectif du traitement du cancer est de prévenir la survenue de ces métastases. Depuis près de 30 ans, les principaux progrès thérapeutiques spectaculaires en matière de thérapie ciblée ont été l’apport des thérapeutiques antihormonales et celle des traitements anti-HER2. La découverte de ces deux cibles a reposé sur l’identification de facteurs pronostiques qui ont permis de caractériser des populations, leur devenir évolutif et de développer des traitements ciblés spécifiques. D’autres exemples suivent avec une spécificité d’organe comme la place des traitements à tropisme osseux (essentiellement représentés par les bisphosphonates à ce jour). Il apparaît donc que la cible en situation métastatique puisse être la cellule cancéreuse mais également l’organe de prédilection de l’évolution métastatique.
Peut-on extrapoler de la situation métastatique un bilan pour la situation adjuvante ? En ce qui concerne l’efficacité, nous avons vu que non, même s’il peut exister des présomptions fortes d’efficacité. En ce qui concerne la tolérance, si la tolérance immédiate est extrapolable, la tolérance au long cours reste importante à surveiller, car la plupart des cibles identifiées à ce jour sont présentes dans le tissu normal et de plus en plus caractérisent le tissu normal péritumoral. Le bilan global est donc positif puisqu’il a permis en trente années une nette amélioration de la survie des cancers du sein tant en situation métastatique qu’en situation adjuvante. Cependant, l’explosion de la recherche amène à modifier nos concepts dans les années à venir tant en ce qui concerne les plateaux techniques biologiques de caractérisation de la tumeur, que les approches thérapeutiques et de surveillance des patientes sans oublier les paramètres économiques et la réorganisation de la recherche clinique qui, inexorablement, va vers la fragmentation de la maladie et la genèse de micro-essais pour de macro-résultats.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Joseph Gligorov
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X *
* Agendia, Amgen, Astra Zeneca, Bayer, Chiron, Chugai, BMS, GlaxoSmithKline, Lilly, Marc Dorcel, Mayne Pharma, Novartis Pierre Fabre, Ffizer, Roche, Sanofi Aventis, Schering AG, Schering Plough, Unilever.
Informer en phase métastatique : Un défi ? Quelles limites ? J. Rouëssé et G. Marx
« Vous avez une métastase hépatique… Vous pleurez… Nous allons vous donner un rendez-vous avec le psy » (New-York, avril 1975)
Introduction Ce dialogue entendu par l’un de nous il y a plus de trente ans pose plusieurs problèmes. Le premier est la signification du mot métastase pour un malade. Le deuxième est, en l’occurrence, le fait incontournable du grave impact d’une mauvaise nouvelle. Le troisième est celui de la délégation à un tiers de la « gestion » psychologique d’un diagnostic qui ne laisse au médecin que le simple rôle du technicien ce qui est non seulement une négation de la noblesse de son métier, mais aussi non souhaitable car la pratique médicale implique obligatoirement la psychologie. Nous envisagerons ces questions sous plusieurs angles. D’abord sous un angle clinique : la maladie métastatique a changé tout au moins dans de nombreuses localisations cancéreuses et la difficulté de son pronostic reste toujours considérable. Sous un angle humaniste : peut-on atténuer l’impact d’une mauvaise nouvelle et comment dire la réalité tout en préservant l’espérance du malade ? Sous l’angle de la société, car son regard sur ce que l’on doit dire de la maladie cancéreuse a évolué. Enfin, nous verrons dans quelle mesure il est possible de relever le défi posé par ce problème de l’information en phase métastatique.
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Un changement dans la maladie métastatique Pour beaucoup de localisations cancéreuses, l’apparition de nouveaux produits – chimiothérapies, hormonothérapies et plus récemment thérapies ciblées – a permis de proposer de nouveaux traitements qui peuvent indiscutablement prolonger la survie. Pour le cancer du sein métastatique, celleci est passée en moyenne de 18 mois dans les années 1970-80 à 36 mois maintenant et des durées de vie supérieures à 10 ans ne sont plus exceptionnelles ; ainsi, il n’est pas déraisonnable actuellement de proposer jusqu’à huit lignes de traitements systémiques pour les formes hormonosensibles. Pour les cancers coliques métastatiques, l’espérance de vie est passée de 6 à 20 mois. Pour les cancers bronchiques métastatiques, cette espérance de vie s’est plus modestement mais indiscutablement allongée, passant de 4,5 à 8 à 10 mois en moyenne et de même pour les cancers du pancréas dont la survie médiane est passée de 4,8 mois à 10,7 mois. Même tableau pour les lymphomes : la Société française d’hématologie va même jusqu’à recommander dix lignes de chimiothérapie pour le traitement des lymphomes non hodgkiniens de faible grade de malignité. Mais quoi qu’il en soit, sauf dans certains cas où un traitement local (chirurgie et/ou radiothérapie) associé ou non à un traitement général peut entraîner une très longue stabilisation, voire une guérison, le pronostic demeure réservé.
Un pronostic toujours incertain Le pronostic reste toujours incertain. Ce qui lui est demandé c’est à la fois la notion de possibilité de guérison, la durée de « survie » et les chances de rémission apportées par un traitement. Ces deux derniers éléments relèvent des statistiques lesquelles concernent des populations et ne sont pas transposables telles quelles à l’échelon individuel où il s’agit de probabilités. En outre, les statistiques en ce qui concerne la maladie métastatique sont particulièrement imprécises car les pourcentages donnés s’accompagnent d’un intervalle de confiance généralement très large. Tout pronostic est individuel et il n’est pas possible de diluer le singulier dans le pluriel. Une probabilité n’est pas un pronostic. Une étude publiée en 2000 dans le British Medical
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Journal (1) met en évidence l’imprécision pronostique des médecins : sur 504 malades, dont 65 % sont atteints de cancers, le pronostic n’est précis que dans 20 % des cas et encore ce pronostic comporte une marge d’erreur entre 0,67 et 1,33 % par rapport à la vérité, la prédiction des oncologues n’étant correcte que dans 23 % des cas et pessimiste dans 9 % des cas.
Une mauvaise nouvelle L’annonce d’une maladie grave et/ou d’une métastase est toujours une mauvaise nouvelle. Le problème posé est de savoir si celle-ci est pour le malade synonyme de mort. Si le mot de « cancer généralisé » l’est, autant il n’est pas certain que tous les patients apprécient à son exact impact l’importance du mot « métastase » dont ils ne perçoivent pas toujours le sens. L’utilisation du terme « lésion secondaire » a le mérite de se référer non pas à l’organe atteint mais au cancer d’origine avec toutes les possibilités thérapeutiques que cela implique. Quoi qu’il en soit, le choc émotionnel que représente pour le patient la notion de passer d’une maladie curable à une maladie peut-être incurable est forcément sévère. Cette nouvelle fait basculer le sujet d’un monde dans l’autre, elle sera souvent ressentie comme étant brutale, brutalité qui bien qu’involontaire ne sera pas pardonnée au porteur de mauvaises nouvelles quel que soit le « dispositif d’annonce » utilisé. Dans l’Antiquité, il était mis à mort séance tenante. Une étude de Mahon et al. confirme ce dont on pouvait se douter, à savoir que la grande majorité des malades (78 %) considèrent que l’annonce d’une rechute est plus stressante que celle du diagnostic initial (2). Dans une étude de Turner et al. (3), environ 61,2 % des femmes aimeraient changer leur mode communication avec leur médecin. Si l’on postule le fait que la « Vérité » est celle de savoir si l’on va mourir dans un délai relativement proche, cette connaissance est ressentie depuis toujours comme sinon insupportable du moins comme très difficile à vivre. « Morsque minus poenae quam mora mortis habet »* dit Ovide cité par Montaigne. De façon plus savante, Jankélévitch écrit dans son livre La Mort (4) : « La connaissance du Quod et du Quando réunis dévitalise et désagrège en effet le temps vertébré de l’action quotidienne, fait de ce temps un temps insoutenable et inhumain : réduit à la pure expectative d’une échéance inévi-
* Et mourir est moins dur que d’attendre la mort.
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table, l’homme ressemble à une bête traquée. » Cette appréhension est souvent continue, comme le décrit admirablement Victor Hugo dans les derniers jours d’un condamné : « Quoi que je fasse, elle est toujours là, cette pensée infernale, comme un spectre de plomb à mes côtés, seule et jalouse, chassant toute distraction, face à face avec moi misérable, et me secouant de ses deux mains de glace quand je veux détourner la tête ou fermer les yeux. Elle se glisse sous toutes les formes où mon esprit voudrait la fuir, se mêle comme un refrain horrible à toutes les paroles qu’on m’adresse, se colle avec moi aux grilles hideuses de mon cachot ; m’obsède éveillé, épie mon sommeil convulsif, et reparaît dans mes rêves sous la forme d’un couteau. Je viens de m’éveiller en sursaut, poursuivi par elle et me disant : – Ah ! ce n’est qu’un rêve ! – Et bien ! Avant même que mes yeux lourds aient eu le temps de s’entrouvrir assez pour voir cette fatale pensée écrite dans l’horrible réalité – Condamné à mort ! ». Rien n’a donc changé et rien ne changera à ce sujet sauf si une pilule miraculeuse vient nous « guérir » de cette fatalité. Plus souvent qu’un grand courage, seul le travail du temps, nous allons y revenir, peut y apporter remède.
Des vécus différents en fonction du temps et de l’interlocuteur Évitons une psychologie « plane » dénoncée par Marcel Proust. L’importance de cette appréhension varie d’un patient à l’autre se traduisant par de manifestations très variées : prostration, révolte et colère ou résignation apparente. Mais chez la même personne, cet état change beaucoup selon son entourage, et selon le temps, tout au long de la maladie mais aussi au même moment le malade peut admettre le fait qu’il va mourir et malgré tout garder espoir. Encore fautil lui en laisser la possibilité. Pour avoir vu des malades auxquels la certitude de leur mort avait été annoncée sans la moindre ambiguïté, on peut affirmer que dans bien des cas leur désespoir souvent muet est en apparence irrémédiable.
Le temps La temporalité est un élément essentiel. « Le temps est galant homme » disait le Roi Louis XV. C’est ce temps que le malade aimerait voir structuré par une médecine toute puissante. Face au début d’une maladie métastatique très probablement non curable, l’oncologue ou le médecin traitant est généralement dans une situation délicate, la mort est certaine mais dans on ne sait
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dans quel délai et en tout cas des traitements spécifiques peuvent la retarder. On s’insurge à juste titre du lent supplice subi par un condamné à mort dont la peine inéluctable est repoussée de mois en mois, pourquoi résolument l’infliger à un patient qui bien souvent ne le demande pas ? Que l’on prévienne une personne qu’elle est en danger de mort relève, bien souvent, d’une sagesse « charitable », l’annonce d’un trépas inéluctable et « prochain » ne l’est certainement pas. Surtout s’il s’agit de jeune. La situation diffère de celle d’un sujet âgé qui sait que son espérance de vie diminue inéluctablement avec l’âge. En revanche, l’abord des spécialistes des soins palliatifs rejoint celle des gériatres face à des personnes très âgées, lucides et résignées à une mort parfois souhaitée. Ils voient le plus souvent des malades tout à fait en fin de vie. Ils peuvent alors aborder avec le patient la proximité de la mort et leur aide est précieuse. Leur approche tant temporelle que psychologique rejoint alors ce qu’elle était autrefois : il convient que le malade meurt sans précipitation, mais sans lenteur, afin que, comme l’écrit Philippe Ariès (5), « la scène des adieux ne soit ni escamotée ni prolongée. »
L’interlocuteur Le malade ne va pas demander la même chose au médecin ou à l’équipe soignante et à son entourage. Cette distinction est surtout nette avant le passage en soins palliatifs. Au médecin, c’est un message d’espoir qu’il adresse. Le médecin doit y répondre tout en évitant les contre-vérités. Exercice qui demande du tact et de la finesse. Le fait d’annoncer qu’il n’y a plus aucun traitement spécifique possible à un sujet encore dans un état général correct et qui exprime toujours le souhait d’être « soigné » comporte le risque d’être dévastateur car cette annonce est pour eux l’équivalent d’une condamnation à mort. À l’inverse, il est souvent noté qu’une simple réponse biologique a un fort effet « placebo » entraînant une amélioration des fonctions et des performances (6). À l’entourage, c’est une compassion qui est demandée ; refuser au patient qu’il ait connaissance de sa fin prochaine est la plus cruelle des attitudes, admirablement décrite dans La mort d’Ivan Ilitch. Aussi le médecin lui conseillet-il d’écouter jusqu’au bout le discours de son malade et de ne pas lui opposer une dénégation systématique si pénible que cela puisse être, un message d’espoir ne peut être donné que si il ne l’implique pas de façon catégorique. Il faut éviter que, comme l’écrivait Philippe Ariès en 1975, « le mourant ne devienne celui qui ne doit pas savoir ».
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Cet entourage doit aussi être ménagé ; sauf opposition spécifiée par le patient, il doit approcher au plus près de la réalité, mais ceci implique qu’il reconnaisse les limites de son savoir. C’est ainsi qu’il doit s’abstenir de données précises qui concernent les délais et les échéances et qu’il doit s’efforcer à ce qu’il y ait une certaine cohérence dans les discours tenus au patient.
La société : pour le médecin des devoirs parfois contradictoires Le devoir de « Vérité » vis-à-vis des malades a été ressenti différemment par la société au fil du temps. La mort subite était considérée comme une disgrâce importante du Moyen Âge au XVIIe siècle du fait du fort contexte religieux, elle apparaît désormais, comme dans nombre de cas, souhaitée. C’est sans doute pour cela qu’il y a encore une vingtaine d’années, en France et de façon plus générale dans les pays latins, le mot cancer était tabou même dans les Centres de Lutte contre le cancer et bien entendu l’annonce d’une mort prochaine. Ce climat change actuellement. Les pays anglo-saxons nous ont donné l’exemple sans doute en raison de leur contexte culturel mais aussi de la juridiciarisation envahissante. Ce qui n’empêche pas que, chez eux aussi, la mort est soit niée : plus de deuil, plus de pompes funèbres dans le rues, plus de tombeau mais dispersion des cendres. Mais on ne peut manquer de souligner la difficulté que l’on peut éprouver à dire la « vérité » tout en conservant l’espoir. Ce sont ces ambiguïtés que l’on retrouve dans les dispositions législatives récemment prises dans l’idée de faire respecter, par les médecins, un devoir de vérité. C’est ainsi que la loi de 2002 fait injonction au médecin d’informer complètement son malade tout en laissant celui-ci libre de ne pas savoir. La loi du 9 août 2004 concernant la protection des personnes en matière de santé dans son titre II concernant les recherches biomédicales sur la protection des personnes confirme « qu’à titre exceptionnel, lorsque dans l’intérêt d’une personne malade le diagnostic n’a pu être révélé, l’investigateur peut, dans le respect de sa confiance, réserver certaines informations liées à ce diagnostic ». Il faut noter aussi que la société exige que la « Vérité » sorte de la bouche des médecins, détenteurs d’une science supposée infaillible, alors que, nous venons de le voir, dans de nombreux cas ils ne la possèdent pas. En théorie, comme l’écrivent Mallet et al. « Il faut savoir et ce savoir est scientifique » (7), mais comme le note Bézy (8) citant Lebrun (9) « nous sommes en droit d’espérer
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qu’en se donnant les moyens de penser l’acte qui est le sien, le médecin, tout en continuant à se former à la médecine scientifique de pointe, sera susceptible de se décaler quelque peu des schémas que lui impose le discours de la science. » En fait, on ne doit pas oublier cette phrase de Kates « Que faut-il dire au malade, il faut lui demander » et il faut garder à l’esprit cette phrase d’un malade du Johns Hopkins Hospital cité par Browner et al. (10) : « We remain realistic about what we’re dealing with here (metastatic recurrent pancreatic cancer), but also remain hopful as well that we’re showing some response to this (palliative chemotherapy) regimen ».
En conclusion : des constatations plutôt que des solutions Plusieurs publications récentes ont posé le problème de l’annonce. Beaucoup ont l’intérêt de préciser l’importance de ses conséquences psychologiques et d’essayer d’apprécier au plus près le vécu de la maladie cancéreuse « évoluée ». L’on apprend ainsi que les femmes de moins de 55 ans ont plus souvent de troubles psychologiques que celles qui sont plus âgées, que 60,3 % des malades atteintes de cancers du sein métastatiques sont tristes et que 41,1 % se disent irritables (3)… Pour intéressantes que soient ces constatations qui ne surprendront pas les cliniciens qui prennent en charge ces malades, on voit mal quelles implications pratiques elles peuvent avoir face à un malade donné. Aussi nous paraissent-elles peut-être moins instructives pour un praticien que les descriptions individuelles telles qu’on en trouve sous la plume de grands romanciers traitant de l’annonce de la mort. Nous avons cité plus haut celle de Victor Hugo dans Les derniers jours d’un condamné, et de Tolstoï dans La mort d’Ivan Ilitch. Ces descriptions d’une précision saisissante et témoignant d’une profonde connaissance de la nature humaine, font toucher du doigt au médecin les problèmes psychologiques de leurs patients et par là les amener à plus d’empathie, plus que de secs pourcentages de symptômes plus ou moins précis accompagnés d’un p significatif ou non. Les recommandations pour « humaniser » l’information formulées récemment ont le mérite de rappeler aux médecins l’importance capitale de l’annonce d’une mauvaise nouvelle et de légitimer leur demande de temps et d’espace corrects (11). La qualité de l’annonce repose sur celle de ceux qui en ont la charge et c’est une qualité d’humanité qui est fondamentalement requise. La dimension humaniste de la médecine est beaucoup trop négligée dans le
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cursus actuel des études médicales ; plutôt que de sélectionner les futurs médecins essentiellement sur des sciences « dures » qui ne peuvent que renforcer leur tendance à croire qu’ils possèdent la « Vérité », il serait plus pertinent de mettre l’accent sur la façon de se comporter d’un candidat médecin. Ce comportement implique la considération et le respect de l’autre. Ceci suppose qu’on le comprenne et le laisse s’exprimer. Ceci signifie aussi la clarté dans le discours. Ce qui n’est pas toujours simple. Le médecin se doit non seulement de posséder des capacités d’empathie mais d’avoir aussi une écoute appropriée pour savoir à quel moment de l’évolution de la maladie il peut annoncer telle ou telle information afin de ne pas heurter le cheminement de son patient.
Références 1. Christakis NA, Lamont (2000) Extents and determinants of errors in doctor’s prognoses in terminally ill patients: prospective cohort study. Br Med J 320: 469-77 2. Mahon SM, Cella DF, Donovan MI (1990) Psychosocial adjustment to recurrent cancer. Oncol Nurs Forum 17 (Suppl): 47-54 3. Turner J, Kelly B, Sawnson C et al. (2005) Psychological impact of newly diagnosed advanced breast cancer. Psycho-Oncol 14: 396-407 4. Jankélévitch V (1977) La Mort. Paris, Flammarion 5. Ariès P (1975) Essais sur l’histoire de la mort en Occident du Moyen Age à nos jours. Paris, Seuil 6. Mitchell G (2002) Chemotherapy and radiotherapy-When to callit quits. Aust Fam Phys 31: 129 7. Mallet D, Vanheems D, Soyez S et al. (2005) Imaginaire social, science et croyance. Rev Fr Psycho-Oncol 4: 235-60 8. Bézy O (2005) Croire ou comprendre : il faut choisir. Rev Fr Psycho-Oncol 4: 278-80 9. Lebrun JP (2005) De la maladie médicale. Bruxelles, De Boeck Université 2e ed 10. Browner I, Carducci MA (2005) Palliative chemotherapy: historical perspective, applications, and controversies. Semin Oncol 32: 145-4 11. Gros D (2006) Annonce du cancer : la tentation de Ponce Pilate. Oncologie 8: 870-5
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Jacques Rouëssé
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 3
L’annonce de la rechute du cancer du sein… entre rupture et continuité E. Gallon
Mots-clés : cancer du sein, annonce, rechute, temporalité psychique Thème : Cette communication a pour objet l’étude des mécanismes psychiques mis en jeu chez les patientes lors de l’annonce de la rechute de cancer du sein. Problématique et hypothèses : La réflexion autour de l’annonce du diagnostic de cancer est actuellement très présente dans les équipes de soins, notamment du fait de la généralisation du « dispositif d’annonce ». L’annonce de la maladie, dans le parcours du patient, revêt une importance particulière ; désormais la temporalité du sujet sera marquée par un avant et un après… Dans le discours des patientes, le moment de l’annonce apparaît souvent comme un espace-temps qui, comme gravé, reste intact dans leur mémoire. De nombreux travaux ont mis en évidence le fort potentiel traumatique de l’annonce d’un cancer (diagnostic initial ou récidive). Face à ce choc traumatique possible, différents éléments réactionnels sont repérés (état de sidération, détresse psychique, etc.). Cependant, nous savons que ces réactions diffèrent d’une patiente à une autre et restent très individuelles. Ainsi, certaines femmes apprenant leur récidive vont, dans une phase très active, être immédiatement en demande d’informations quant à la suite (traitement, pronostic, etc.). D’autres patientes vont, quant à elles, se trouver plongées dans un état de sidération où l’envahissement émotionnel sera tel qu’il les empê-
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chera de raisonner ; dès lors seul le temps leur permettra de ré-amorcer un travail psychique. Notre hypothèse est que, pour ces dernières, par sa soudaineté l’annonce n’a pas laissé place à un travail psychique « d’anticipation ». Le potentiel traumatisant de l’annonce de la maladie cancéreuse est donc d’autant plus actif qu’il vient s’inscrire sur un fond d’impréparation psychique. Objectif et modèle : À travers notre travail clinique, nous essaierons de réfléchir sur les notions de « rupture » et de « continuité » vécues par les patientes en rechute de cancer du sein. Il nous semble important de comprendre ce qui se joue chez les sujets au plan psychique afin d’améliorer, dans notre pratique, le cadre de prise en charge à proposer. Le modèle psychanalytique et psychopathologique nous amène à utiliser une méthodologie qualitative où le travail d’élaboration se situera dans l’après-coup. Méthodologie : Pour cette étude nous avons assisté, en tant qu’observateur, à des consultations d’annonce médicale (de diagnostic initial et de rechute) pour lesquelles nous avons effectué, a posteriori, une analyse de contenu. Nous avons, par ailleurs, réalisé une analyse qualitative des entretiens d’inspiration psychanalytique, à but thérapeutique, que nous avons menés dans le cadre des prises en charge psychologiques de nos patientes. Résultats : Il nous apparaît que les modalités de réaction des patientes lors de l’annonce de leur rechute sont en lien avec la façon dont elles avaient investi la période de rémission. En effet, nous pensons que, chez certaines femmes, la rechute de la maladie s’inscrit psychiquement dans une continuité de leur maladie initiale, tandis que pour d’autres, la récidive vient signer une rupture avec le premier événement. Conclusion : À travers cette étude, nous avons perçu que les réactions psychiques des patientes lors de l’annonce de la rechute de cancer du sein étaient très individuelles, néanmoins nous avons pu dégager deux modalités principales de réponse. Ainsi, nous comprenons que, pour une partie des patientes, leur « laisser du temps » (notamment entre la consultation médicale d’annonce diagnostique et thérapeutique) leur permettrait de s’approprier l’information et de la métaboliser. Cependant, ce même temps peut se révéler anxiogène pour les patientes dont la rechute se situe dans une continuité de leur histoire de vie et dont le cheminement psychique est déjà plus élaboré. Dès lors, il paraît fondamental, lors de l’annonce d’une telle information médicale, de rester à l’écoute de l’individualité de chaque sujet.
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Bibliographie Freud S (1920) Au-delà du principe de plaisir. In: Essais de psychanalyse, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2002 Brun D et al. (2005) 7e Colloque Médecine et Psychanalyse – Violence de l’annonce, violence du dire, Paris, Études Freudiennes hors série Brun D et al. (2006) 8e Colloque Médecine et Psychanalyse – Devenirs de l’annonce : par delà le bien et le mal, Paris, Études Freudiennes hors série
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation Élise Gallon X
Soins palliatifs : peut-on parler de qualité de vie en phase métastatique ? P. Kerbrat et E. Botton
Poser la question sous cette forme paraît impliquer une réponse évidente. L’amélioration de la qualité de vie est un objectif premier de l’activité médicale, quelle qu’en soit sa situation : prévention, dépistage, thérapeutique adjuvante ou palliative ; le patient doit pouvoir espérer, sinon tirer, un bénéfice du geste entrepris. L’évaluation des avantages, quels qu’ils soient, doit être contrebalancée par celle des inconvénients. En situation métastatique d’un cancer du sein, cette question peut paraître curieuse dans la mesure où, sauf cas exceptionnel, la patiente ne peut espérer guérir, avec une survie en moyenne inférieure à 3 ans, même si 10 % des malades peuvent espérer une survie supérieure à 10 ans (1). Durant cette période, plusieurs traitements spécifiques, systémiques – chimiothérapie, hormonothérapie, et traitements ciblés – ou locorégionaux – chirurgie, radiothérapie, radiologie interventionnelle –, mais aussi non spécifiques – bisphosphonates, antalgiques, corticoïdes, etc. – seront utilisés. À chaque instant le thérapeute devra, pour la patiente et avec elle, évaluer le rapport coût/bénéfice. Après une réflexion sur les objectifs du traitement, et la définition et la mesure de la qualité de vie, nous séparerons artificiellement deux phases durant cette période, de longueur très variable, une phase « palliative active » où une thérapeutique anticancéreuse sera employée, puis une phase « palliative terminale » proprement dite, avec parfois une frontière difficile à définir (fig. 1) (2).
Objectifs des traitements Ils ont été encore récemment définis en rappelant qu’actuellement le cancer du sein métastatique reste une maladie incurable. Pour le groupe allemand
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PÉRIODE CURATIVE Espoir de guérison
Période palliative initiale
SOINS ONCOLOGIQUES SPECIFIQUES
Diagnostic de cancer
PÉRIODE PALLIATIVE Période palliative terminale
A G O N SOINS ONCOLOGIQUES I E DE SUPPORT
Diagnostic d’évolution locale incurable ou de première métastase
Diagnostic d’entrée en phase terminale
+ Soins de support à l’entourage
Décès
Fig. 1 – Continuité et globalité des soins.
qui a effectué une revue de la littérature (3), le traitement reste palliatif et vise à obtenir une prolongation de la survie et pas seulement la diminution des symptômes. À l’inverse, la seconde réunion de Consensus européenne place la qualité de vie au premier plan, même avant la prolongation de la survie (4). Pour l’École européenne d’oncologie, les patientes doivent se voir offrir en routine une prise en charge personnalisée, avec des soins de support adaptés aux symptômes (5). Dès l’initiation du traitement spécifique, il conviendra donc d’évaluer la toxicité liée aux traitements, d’autant que le bénéfice en termes de survie reste modeste, malgré la multiplicité des options thérapeutiques (6).
Définition et mesures de la qualité de vie Définir clairement la qualité de vie n’est pas aisé : elle pourrait se rapprocher de la définition de la « santé », donnée par l’OMS en 1946, et qui correspond non pas à l’absence de maladie, mais à « un état complet de bien-être physique, psychologique et social ». En ce sens, l’objectif des traitements carcinologiques n’est plus seulement de guérir ou de prolonger la vie, mais aussi de préserver ou d’améliorer la qualité de vie dans ses différentes composantes, en réduisant les répercussions fonctionnelles négatives de la maladie et des traitements. La qualité de vie englobe quatre dimensions : physique, psychologique,
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sociale et spirituelle ; celle du patient peut être évaluée par un observateur indépendant – médecin, infirmière, psychologue – ou par lui-même. Une telle « autoévaluation » est irremplaçable, car seul le malade est juge de ses propres critères de « normalité », et de l’impact subjectif de la maladie et des traitements. Ainsi, l’échelle de Karnofsky mesure par un index de performance les conséquences physiques et fonctionnelles de la maladie sur les aptitudes physiques et sur les activités professionnelles et de la vie quotidienne. Les facteurs contribuant à une bonne qualité de vie chez les patients atteints de maladie grave peuvent échapper aux observateurs : diverses études ont montré que les patients estiment généralement avoir une qualité de vie supérieure à celle que jugent les observateurs. De même, les malades en phase terminale avancée, recevant un traitement médical approprié de leurs symptômes physiques, mentionnent souvent que leurs préoccupations existentielles prédominent (7). En 1996, le groupe d’experts de l’ASCO recommandait de donner la priorité aux critères d’évaluation centrés sur les patients, la durée de la survie pour les essais thérapeutiques adjuvants, et la qualité de vie en situation palliative (8) ; il soulignait également la nécessité d’utiliser des mesures de qualité de vie en routine. Cela facilite la communication en associant le patient aux décisions, en détectant les symptômes non spontanément exprimés en consultation, mais également guide le choix thérapeutique en tenant compte de ces mesures, ce qui facilite l’adhésion au traitement (9). Ces mesures semblent d’autant plus indispensables que les avancées thérapeutiques en termes de survie sont souvent mineures, au prix d’une augmentation importante de la toxicité mais également des coûts (10). Les principaux outils utilisés en cancérologie pour évaluer la qualité de vie et la survie sont le QALY (Quality Adjusted Life Years) et le Q-TWIST (Quality Adjusted Time Without Symptoms or Toxicity). Ce dernier conduit à décomposer la survie globale en quatre phases, correspondant à quatre états de santé prédéfinis : une phase thérapeutique avec des effets secondaires liés à la toxicité des traitements, une phase libre de tout symptôme et de toute toxicité, une phase comprise entre la maladie symptomatique et le décès, et enfin, une phase correspondant au décès (11).
Traitements en phase palliative active Durant leur usage, l’objectif essentiel sera d’allonger la durée de survie. Celleci va dépendre de multiples facteurs pronostiques et prédictifs, sans qu’une classification dichotomique puisse être proposée (4).
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Trois traitements systémiques peuvent être employés. Pour deux d’entre eux, l’indication en sera simplifiée par l’existence de facteurs prédictifs, de valeur reconnue. L’hormonothérapie sera utilisée chez les patientes dont la tumeur primitive et/ou les métastases expriment les récepteurs d’estrogènes et/ou de progestérone. Elle est notamment recommandée en première intention devant les formes les plus favorables : métastases osseuses ou des parties molles, notamment cutanées, récidives tardives avec faible masse tumorale, faible évolutivité (4). Elle est plus discutée mais ne doit pas être exclue devant des lésions viscérales, pleuro-pulmonaires ou hépatiques, si le pronostic à court terme n’est pas mis en jeu par l’évolutivité ou la masse tumorale. L’hormonothérapie possède l’avantage notable d’être peu toxique avec une faible altération de la qualité de vie (3). De plus, les différentes molécules peuvent être utilisées successivement, si un bénéfice clinique a été observé avec la ligne antérieure, pourvu que les critères précédents soient toujours présents, réalisant une véritable cascade thérapeutique (4). Jusqu’à une période récente, l’hyperexpression de la protéine HER2 dans la tumeur primitive ou les métastases impliquait l’association du trastuzumab à une forme de chimiothérapie. Cependant, les résultats de l’étude TANDEM, démontrant un bénéfice, certes minime, de l’association anastrozole + trastuzumab par rapport à l’anastrozole seul, doivent faire reconsidérer cette attitude (12). À l’inverse, l’association concomitante hormonothérapie + chimiothérapie n’est pas recommandée (5). De la même façon, un traitement par trastuzumab est indiqué chez les patientes dont la tumeur hyperexprime la protéine HER2, pour certaines après échec, le cas échéant, de l’hormonothérapie (5). En première intention, le trastuzumab doit être associé à une chimiothérapie ; on n’en connaît pas actuellement le schéma optimal, quelle drogue doit être associée (taxanes, vinorelbine, capécitabine, sels de platine) sans en augmenter la toxicité, essentiellement cardiaque. La durée idéale du traitement n’est pas non plus précisée : on ne sait pas, en effet, si le trastuzumab doit être maintenu, après échec d’une première ligne, et changement de molécule de chimiothérapie (3). Après une réponse à une association chimiothérapie + trastuzumab, un traitement d’entretien par trastuzumab seul est souvent recommandé, dont l’avantage essentiel est l’excellente tolérance. Du fait de l’absence de facteurs prédictifs fiables, c’est la chimiothérapie qui pose le plus de problèmes ; c’est aussi le traitement susceptible d’induire le maximum de toxicité à court terme : alopécie, nausées et vomissements, mucite, hypoplasie médullaire, accentuation de l’asthénie. Il
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convient à nouveau, dans cette situation précise, de définir les buts de cette thérapeutique. L’obtention d’une réponse objective semble conduire à un bénéfice en termes de survie (13, 14), mais également de réduction des symptômes (15). Cependant, pour la majorité des patientes, il n’est pas démontré que la polychimiothérapie induise une survie supérieure à celle obtenue par monochimiothérapie (16), ce qui conduit plusieurs auteurs à s’interroger sur la meilleure stratégie (17, 18) et certains groupes à recommander une monothérapie (3-5) dans le but notamment de respecter la qualité de vie, hormis le cas des patientes porteuses d’une atteinte viscérale évolutive, nécessitant l’obtention d’une réponse thérapeutique rapide. La recherche, récente, d’une augmentation du taux de réponse par une polychimiothérapie à haute dose, voire à très haute dose, n’a pas abouti pour l’instant à la démonstration d’un bénéfice en termes de survie (19). Cependant, il faut rappeler qu’un nombre substantiel de patientes accepterait un risque important de toxicité majeure pour une augmentation minime de la survie (20). Une fois obtenue la réponse thérapeutique, ou une longue stabilisation – supérieure à 24 semaines – ce qui est équivalent en termes de survie, la question se pose de poursuivre la même chimiothérapie jusqu’à progression, ou de l’arrêter pour la reprendre lors de la rechute, dans le but de réduire les effets secondaires. Les réponses de la littérature sont discordantes, fréquemment sans bénéfice en termes de survie ou de qualité de vie (21). Le groupe allemand recommande un traitement discontinu (3). Ici encore, l’avis de la patiente prendra toute sa valeur. Après échappement à la première ligne de chimiothérapie, les indications thérapeutiques sont encore plus floues : les chances de réponse en deuxième ligne semblent largement dépendre des résultats de cette première ligne, notamment la réponse complète ou non et la durée de réponse, mais également le performance status. En étude multifactorielle, l’intervalle libre prédit l’efficacité du traitement de rattrapage (22). Ici encore, la monochimiothérapie, notamment par taxane, devrait être envisagée en tenant compte de l’index thérapeutique (17, 23). Après la deuxième ligne, il existe très peu de données, faute d’essais réalisés dans cette situation. Le taux de réponse en troisième ligne ou plus est considéré comme très faible (24), pour un bénéfice très bref, et le rapport efficacité/toxicité devrait être pris en compte (24, 25). La question se posera alors de l’arrêt de la chimiothérapie et du passage aux soins palliatifs vrais, lorsque le bénéfice escompté sera inférieur aux inconvénients, en maintenant avec la malade une communication adaptée et rassurante (26).
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Traitements en phase palliative terminale Après ces traitements spécifiques et parfois à côté de ceux-ci, il faudra accompagner et aider la patiente durant la fin de sa vie. La mesure 42 du Plan Cancer, par la circulaire du 22 février 2005, introduit la notion de soins de support : c’est « l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie, conjointement aux traitements oncologiques lorsqu’il y en a » (27). Le programme personnalisé de soins permet une anticipation des besoins et un repérage des situations à « risque ». Il permet de plus le recours à des compétences d’expertise en soins de support, avec des structures de professionnels formés dans les domaines de lutte contre la douleur chronique rebelle, l’accompagnement et les soins palliatifs, la psycho-oncologie, l’accompagnement social, la nutrition, la réadaptation fonctionnelle, l’ergothérapie, la socioesthétique… (27). Il permet donc la prise en charge de la patiente et de « sa douleur globale » (fig. 2) (28).
Effets indésirables du traitement Perte du statut social Dégradation schéma corporel Sensation d’abandon Perte du rôle dans la famille Dépendance
Dépression
Nausées Essoufflement Fatigue Dénutrition
LA TUMEUR
Douleur physique SOUFFRANCE ANEANTISSEMENT
Anxiété, angoisse, insomnie
Crainte de l’hôpital
Peur de la mort
Fig. 2 – Douleur globale ou « total pain », d’après Baines (28).
Les autres symptômes Médecins inaccessibles Pas de visites Échecs thérapeutiques
Colère, exaspération
DOULEUR GLOBALE Total Pain
Crainte de la douleur
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Il n’est évidemment pas question de traiter dans le détail la prise en charge de tous les symptômes, variables selon les localisations les plus fréquentes : – métastases osseuses : antalgiques, bisphosphonates, radiothérapie, chirurgie orthopédique, cimentoplastie ; – localisations pleuropulmonaires : corticothérapie, ponction, symphyse pleurale ; – localisations hépatiques conduisant parfois en cas de compression des voies biliaires à une dérivation ; – métastases cérébrales traitées par chirurgie, radiothérapie, anti-œdémateux, anti-épileptiques… Enfin, les traitements parallèles ou « médecines complémentaires » sont très fréquemment utilisés, pour Molassiotis par 47 % des patientes, souvent jeunes, avec un haut niveau d’éducation. Ce sont le plus souvent des plantes, des thés médicinaux, des techniques de relaxation, l’homéopathie… Elles ont recours à ces traitements pour augmenter le bien-être physique et émotionnel, avec un indice de satisfaction élevé, même s’il n’existe pas d’étude permettant clairement leur évaluation (29).
Conclusion Le respect de la qualité de vie et son évaluation constituent donc des éléments primordiaux de la prise en charge d’une femme atteinte d’un cancer du sein métastatique dont on sait qu’elle ne guérira pas de sa maladie, tout d’au moins dans les conditions actuelles. Il conviendra donc dans la phase active, et en dehors des essais thérapeutiques, de trouver le traitement le moins agressif possible permettant le contrôle des symptômes, et dans la phase palliative terminale de prendre en charge l’ensemble de ses problèmes pour aboutir au décès dans les conditions les plus sereines possibles, pour la patiente et son entourage.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Pierre Kerbrat
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Sensualité, sexualité et cancer du sein : l’expérience d’ateliers esthétiques P. Cannone, D. Marie et E. Dudoit
Un couloir C’est ce même couloir que j’emprunte au quotidien, bordé de portes parfois entrouvertes. Là, un monsieur immobile avec une trachéo qui ronronne le rythme du temps, et par là une dame, la poitrine à la vue de tous. À ce moment, je vois des corps, troués par des actes chirurgicaux, tatoués et brûlés par la radiothérapie, usés par une maladie qui façonne un corps selon ses contingences. Et puis cet entretien avec Nora : « On m’a levé le cœur quand on m’a levé le sein, ils ont tout pris…, je suis sale, pourrie de l’intérieur, je voudrais frotter, frotter à la Javel pour enlever cette crasse, sortir mes organes et les remettre une fois propre, laver ce sang noir, c’est possible vous pensez… et non je le sais bien… Je voudrais m’envoler comme un oiseau, être libre, je serai un corbeau… ». Rêver d’être un corps beau, d’un corps habitable qui puisse éprouver, sentir et désirer pour un temps sans souffrance. Ce corps connu de la médecine devient inconnu à ses yeux, quand le miroir se trompe d’image, non, c’est bien ça, estce moi qui pourtant aimais…, est-ce moi qui à présent ne m’aime (même) plus ? Nos patients ne cessent de nous parler de leur corps qui les emprisonne, de ce corps qui nous présente et nous définit, de l’enjeu esthétique dans ses relations au monde. « Depuis mon cancer, je n’ose plus sortir… » ; « La chimio, ça fatigue, d’ailleurs j’ai plus de libido, j’ai envie mais je n’y arrive pas… » ; « Il a peur de me toucher, que ça me fasse mal… il me dit quand tu iras mieux… » ; « Ma main sur sa cicatrice, je faisais semblant… » ; « Je ne savais plus qui j’étais, un homme, une femme…, une cancéreuse ça c’est sûr… ». Dans cette mise en scène de sensualité et sexualité, voilà des paroles de souf-
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frances à propos d’un corps bien étranger à soi-même et aux autres. Cette intimité, ce domaine privé peuvent bien sûr se partager dans le colloque singulier, mais la langue se délie aussi avec d’autres semblables quelque peu différents autour d’une table. La création des ateliers esthétiques permet ce passage du niveau individuel au niveau collectif par la mise en commun d’une expérience, celle du cancer et ses inconnues. Le travail psychique institutionnalisé peut ainsi s’articuler entre singulier et pluriel, par entretien clinique en face à face et dans une dynamique de groupe via les ateliers. Du dispositif utilisé découle des niveaux de mise en commun, des thématiques et des processus d’énonciation particuliers. L’atelier est ici pensé comme un système qui opère par autorégulation de ses membres au sein d’une expérience de groupe à la fois corporelle et psychique.
Un dispositif L’atelier esthétique a été élaboré en s’appuyant sur les besoins exprimés par ceux qui vivent le cancer de l’intérieur. Cette expérience de groupe s’inscrit dans un projet de service qui témoigne de cette volonté d’associer les soins techniques centrés sur le corps, qui reste l’exigence première et la vocation de l’hôpital, avec des soins de « support » qui offrent une autre approche du soin. Nous proposons dans un même lieu (l’hôpital) mais dans un temps différent, la possibilité de partager, dévoiler et déposer les parts de soi-même les plus meurtries par la maladie et ses avatars. C’est bien évidemment une façon de se soumettre au regard d’autres, de supporter leurs réactions ou paroles, tout en sachant qu’ils vivent tous, à leur façon cette même maladie, le cancer. Cet atelier esthétique est ouvert également aux familles qui accompagnent leur proche, ce qui permet d’entendre les difficultés que les familles sont amenées à rencontrer. Cette implication par participation aux soins esthétiques de leur proche est une opportunité de travailler la dynamique et le lien familial qui est souvent conflictuel car la question de l’attachement s’impose avec force. Cet atelier se déroule un après-midi par mois, de 14 à 17 heurs, sous forme de trois tableaux. Il accueille 5 à 7 personnes atteintes d’un cancer quelles qu’en soient la localisation et la gravité mais dont l’état général permet de se déplacer pour cette rencontre. Le premier est animé par un médecin oncologue et dermatologue à partir d’un bref exposé médical sur les retentissements somatiques de la pathologie cancéreuse et des traitements sur l’esthétique du corps (peau, phanères, pilo-
Sensualité, sexualité et cancer du sein : l’expérience d’ateliers esthétiques 193
sité…). S’ensuit un temps de discussion avec le groupe, où chacun peut y relater sa propre situation. Remarquons que cette intervention s’attache au physiologique questionnant de fait le « corps réel » (1), permettant à chacun d’obtenir des informations concrètes vis-à-vis des problèmes inhérents à la prise en charge anticancéreuse. Le deuxième tableau, vers 14 h 45, est le recueil et l’application des soins esthétiques que chaque participant souhaite effectuer avec l’esthéticienne. Après une explication technique et éducative du soin, c’est le temps du prendre soin. Chaque participant est convié à des démonstrations pratiques afin de se réapproprier son corps, pour le ré-investir comme emblème social et venir interroger le symbole corporel au sein de la vie psychique d’un individu. « C’est étonnant comme ça change » disait une dame du groupe, les rires et les regards pétillants font leur apparition. Une pause sert de transition pour la suite de l’après-midi. En effet, ce moment d’attente où le groupe est livré à lui-même permet de tisser des liens entre eux, une cohésion de groupe se construit vers une harmonie, chacun échange. Le troisième tableau est le groupe de soutien et d’expression animé par un psychologue. « Mettre des mots sur ce qui se passe à l’intérieur de soi, sur ce corps qui procure souffrance et plaisir… » est une phrase qui invite chaque participant à associer sur ce qu’il vit. Le psychologue veille à ce que la parole circule, que chacun puisse dire s’il le souhaite, l’expérience qu’il en a, avec confiance et sans jugement.
Une évaluation Les ateliers esthétiques existent en France sous différentes formes selon les institutions comme l’Institut Curie et les Centres CEW France (Cosmetic Executive Women) ayant développé les soins esthétiques dans différentes unités hospitalières notamment dans le domaine de la cancérologie à l’Institut Gustave Roussy à Villejuif depuis 1992, l’hôpital de la Salpêtrière et l’Institut Curie. À ce jour, aucune évaluation n’a été effectuée pour évaluer les effets de tels ateliers si ce n’est un état des lieux des besoins et une description de l’activité. Ainsi, nous avons initié depuis septembre 2005, une étude qui se propose d’évaluer les effets d’une approche psychosociale de groupe réalisée autour de la mise en place d’ateliers esthétiques au sein d’un service d’oncologie médicale. Il s’agit de vérifier l’influence de tels ateliers sur l’investissement cor-
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porel à l’aide de questionnaires sur l’estime de soi sociale (2), l’image du corps (3) et la qualité de vie des patients (4). Un questionnaire d’attitudes est proposé afin d’explorer l’évolution des pratiques corporelles des patients : utilisation de produits cosmétiques, modifications des comportements en rapport à des objets évoquant l’image de soi et l’esthétique (miroir, peigne, brosse, lime à ongle, tenues vestimentaires, etc.), impact sur la sexualité. Un questionnaire de satisfaction est rempli en fin d’atelier afin d’évaluer la satisfaction liée aux interventions. L’ensemble des données recueillies fera l’objet de traitements statistiques. Ceux-ci seront effectués par un spécialiste détaché à cette fonction dans le respect des règles éthiques (anonymat, confidentialité…). L’intérêt de ce dispositif s’inscrit dans une double dynamique. Il permet d’explorer la dimension esthétique en soins palliatifs, de questionner la sphère personnelle en termes de pratiques corporelles, de façon collective où chacun dans sa subjectivité peut y déposer une parole, et à la fois de définir la place des soins de « support » au sein d’un milieu hospitalier. Nous utilisons des méthodes quantitatives et qualitatives, en évaluation groupale (groupe d’expression) et personnel (questionnaires anonymes), afin de rester au plus près des attentes et désirs des personnes souffrantes dans leur corps. C’est sans cesse réajuster un dispositif pour éclairer et apporter des réponses et informations pertinentes à ceux qui font, ou ont fait, l’expérience d’une maladie potentiellement létale. C’est également développer une approche différente de la médecine occidentale, en quelque sorte prendre soin de l’humain en résonance à la « culture soins palliatifs ». Ainsi, ces ateliers sont bien un média vers un réinvestissement du corps propre dans ses dimensions de plaisir/déplaisir pouvant déboucher sur le « théâtre du corps » (5) dans sa fonction de relation aux autres.
Une expérience esthétique Il y a de l’énergie psychique, de la libido qui circule, de la sexualité au sens freudien qui trame l’ensemble de nos relations aux autres. Et pourtant ça peut nous faire violence, nous échapper. Tous ces corps croisés dans ce même couloir prennent essence quand une main se pose, une parole enveloppe, un regard désire. Des corps sans histoire refont une histoire commune le temps d’une expérience, celui de l’esthétique. Le singulier s’énonce dans un pluriel pour devenir singularité.
Sensualité, sexualité et cancer du sein : l’expérience d’ateliers esthétiques 195
Cette dame à ma droite pendant le groupe de parole : « Pour moi c’est différent des autres, je suis à part… j’aimerai que les médecins me disent ce que je veux entendre, que je vais guérir, pour moi je vais guérir… ». Une autre dame, sur un ton très doux lui répond : « moi, je sais… ». « Ben voilà, vous savez que vous allez guérir ». « Je sais que je vais partir. » Un grand silence s’impose au groupe, des paroles sur un départ sont énoncées. « Je ne pense pas que je vais mourir, je ne veux pas y penser, sinon je m’effondre, il faut prendre du courage et garder l’espoir… ». Bien sûr, chaque participant évoque son propre cheminement, mais ces bouts de récits constituent aussi et surtout une histoire commune, « un rêve commun » (6) qui permet une figuration collective de chaque individu. Chacun dans sa singularité permet de construire un « sujet du groupe » (7), telle la création commune d’un pluriel bien singulier. C’est comme si le groupe dans sa diversité rejouait, mettait en scène les parts de soi-même enfouies, découvertes ou encore inconnues. L’expérience esthétique définirait ainsi un espace-temps où l’ensemble des histoires singulières par l’effet du pluriel constituerait une singularité universelle comme voie d’élaboration, l’ébauche d’une genèse : une mythopoïèse. Il s’agit, dès lors, de créer une mélodie au rythme d’un orchestre où chacun se met à la mesure des autres. Une rythmique entre identité de groupe et identité personnelle mise en place par les alter ego venus se rencontrer pour une compréhension, une déculpabilisation, une dé-hontisation par identification. Est ainsi créée l’opportunité de déclarer publique l’expérience intime. Toutefois, c’est la rencontre entre hommes et femmes, qui est abordée lors de cette « ex-position » picturale de scénarii érotisés, sensualisés et sexualisées. Des récits, des histoires, des contes de « faits », des poésies où chacun y narrent son mythe retranscrivant le chemin décrit par Freud et ses contemporains : d’une sensualité conduisant une confusion identitaire (8) à la sexualité amenant à l’Existant (9). La génitalité ne revêt, ici, que le symptôme de la question identitaire du « qui suis-je ? ». Ce groupe d’expression est un temps shakespearien, « Être ou ne pas être, telle est la question », et à l’instar d’Hamlet, les participants se perdent, errent, tissent des liens faits d’amour, de haine et de connaissance (10), dans leur royaume du Danemark pour tenter d’y retrouver leur êtreté… Pour conclure, l’atelier est une opportunité pour parler de sexualité, d’esthétique, de la vie menacée par le cancer, du désir qui nie l’atteinte somatique. Cela s’éprouve et se parle dans ce qui constitue le quotidien où l’humain est fait de ses liens dans l’altérité… et c’est de cette altérité que naissent la conscience et le sujet, nous rappelait Hegel.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Patrice Cannone
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Le cancer du sein métastatique chez la femme âgée : revue synthétique de l’ensemble des options thérapeutiques E. Brain
Le vieillissement de la population, l’augmentation de l’espérance de vie et, en parallèle, l’incidence croissante des cancers avec l’âge, sont des phénomènes parfaitement reconnus dans la société moderne. Le cancer du sein n’échappe pas à ce dernier phénomène. Près de 50 % d’entre eux surviennent aujourd’hui chez des femmes de 65 ans ou plus et plus de 30 % au-delà de 70 ans (1). Malgré des métastases synchrones plus fréquentes lors d’un diagnostic au-delà de 75 ans, le pronostic varie peu en fonction de l’âge, probablement du fait d’un phénotype biologique plus favorable chez les sujets âgés : moindre taux de prolifération tumorale ou de surexpression de l’oncogène HER2, hormonosensibilité plus fréquente avec expression des récepteurs hormonaux (RH) croissant avec l’âge, etc. La carence d’informations objectives concernant sa prise en charge thérapeutique reste cependant paradoxale si l’on considère les projections pour les dix prochaines années annonçant une augmentation de l’incidence dépassant 40 % chez les sujets de plus de 70 ans (2). La France est en bonne position pour répondre à un certain nombre de questions pratiques de prise en charge, du fait des initiatives structurantes de l’institut national du cancer (INCa) et de l’existence de groupes spécifiques s’intéressant à l’oncogériatrie – comme le Programme d’action concertée d’oncogériatrie (PAC GERICO) de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer (FNCLCC), et le Groupe d’échanges de pratiques en oncogériatrie (G-EPOG) en articulation avec la Société internationale d’oncogériatrie (SIOG) – ou de la Task force in elderly (TFE) de l’European organization for research and treatment of cancer (EORTC).
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Comme chez les sujets plus jeunes, les traitements systémiques du cancer du sein métastatique de la femme âgée peuvent intégrer une hormonothérapie, une chimiothérapie, un traitement dit « ciblé » ou encore certains traitements de support spécifiques comme les biphosphonates.
Hormonothérapie L’hormonothérapie est le volet thérapeutique dont l’indication est la moins débattue en raison de sa tolérance affirmée excellente et de l’hormonosensibilité fréquente et croissante du cancer du sein avec l’âge. Une seule série a étudié spécifiquement la question de l’efficacité du tamoxifène en fonction de l’âge et en contexte métastatique, sans identifier de différences entre les groupes, mais avec tous les biais méthodologiques classiques et plusieurs questions de tolérance (3). Parmi les antiaromatases, seul le létrozole a fait l’objet d’une analyse voisine, ne montrant un meilleur taux de réponse objective par rapport au tamoxifène que chez les sujets de plus de 70 ans, ainsi qu’une amélioration du temps jusqu’à une progression plus importante, grâce à l’antiaromatase, chez les sujets âgés par rapport aux autres (4). Ces éléments ne doivent pas occulter les questions de tolérance qui peuvent influencer notablement l’observance et minimiser l’intérêt souvent formulé de la moindre contrainte de l’hormonothérapie en comparaison à la chimiothérapie. Prescrit depuis plus de 30 ans, le tamoxifène présente des effets secondaires parfaitement décrits : carcinome de l’endomètre, saignements gynécologiques, bouffées de chaleur, troubles thromboemboliques et cérébrovasculaires, ces derniers étant plus fréquents avec l’âge (5, 6). Les antiaromatases ont un index thérapeutique plus favorable pour ces différents registres d’effets secondaires, par exemple sur le plan cardiovasculaire (7). Inversement, elles sont responsables d’autres effets secondaires : troubles musculosquelettiques, dont arthralgies parfois sévères, et fractures favorisées par le contexte de l’ostéoporose (8). Certains auteurs suggèrent également un retentissement sur les fonctions cognitives plus important avec l’anastrozole qu’avec le tamoxifène (9, 10). Ces effets secondaires pouvant avoir un impact pratique important chez le sujet âgé, on doit en mesurer constamment le « poids » dans le contexte d’une maladie métastatique incurable où la qualité de vie et l’autonomie demeurent des objectifs permanents.
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Chimiothérapie Bien que plusieurs groupes aient suggéré que l’âge n’influait pas ou peu sur la réponse et la tolérance à la chimiothérapie, cette dernière reste considérée comme potentiellement plus à risque chez le sujet âgé en raison des modifications pharmacocinétiques et pharmacodynamiques accompagnant le vieillissement, incluant le déclin fonctionnel de plusieurs organes clefs et l’incidence croissante des comorbidités. Aussi, bien que la question du choix entre un traitement combiné et un traitement séquentiel demeure importante en contexte métastatique, la préférence est à la seconde stratégie chez les sujets âgés afin de limiter les cumuls de toxicité croisés (2). Les anthracyclines détiennent un rôle central dans la prise en charge du cancer du sein. Ce sont aussi les cytotoxiques les plus redoutés chez le sujet âgé en raison de leur toxicité cardiaque. Au-delà d’une dose cumulée de 400 mg/m2 de doxorubicine, un âge supérieur à 65 ans constitue un facteur de risque important dans la survenue d’une insuffisance cardiaque congestive (11), malgré des données pharmacocinétiques contradictoires (12). En contexte métastatique, les travaux rétrospectifs du MD Anderson ne semblent pas discerner de différence significative en terme de toxicité ou d’efficacité de la doxorubicine à la dose de 50 mg/m2 chez des sujets de plus de 65 ans par rapport aux sujets plus jeunes (13). Bien qu’aucune recommandation officielle n’existe pour ajuster les doses de doxorubicine selon l’âge, des doses inférieures ou égales à 50 mg/m2 sont généralement préférées chez les sujets âgés. L’augmentation du nombre de cycles avec de plus faibles doses, le recours à l’épirubicine, aux formes liposomales associées à une moindre cardiotoxicité, voire aux formes orales, constitue autant de pistes utiles de recherche. Elles n’éliminent pas le risque cardiaque, comme dans l’essai ayant récemment comparé gemcitabine à épirubicine en première ligne de chimiothérapie métastatique chez des femmes de plus de 60 ans, avec une efficacité favorisant l’épirubicine, mais où la survenue d’une toxicité cardiaque sous l’anthracycline choisie imposa la suspension du traitement chez 5 % des patientes (14). Le cyclophosphamide, la capécitabine, les taxanes, la gemcitabine ou la vinorelbine ont été étudiés dans certains programmes spécifiques pour les sujets âgés, avec des ratios thérapeutiques variables, conduisant généralement à des recommandations spécifiques de doses (références dans (2)). L’efficacité de la combinaison cyclophosphamide, méthotrexate et 5-fluorouracile (CMF) ne semble pas varier avec l’âge dès lors que les doses de cyclophosphamide sont adaptées à la fonction rénale des sujets âgés. Malheureusement, cette consi-
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dération est loin d’être appliquée en routine. La capécitabine a été étudiée à l’Istituto nazionale dei tumori et doit être prescrite à un palier plus faible que le palier standard (1 000 mg/m2 × 2/jour, 2 semaines/3) pour contourner les problèmes de tolérance digestive (diarrhée) parfois sévères. L’utilisation des taxanes est possible avec des doses ajustées (15-18). Le paclitaxel à la dose de 80 mg/m2/semaine, 3 semaines/4, donne un excellent taux de réponse (54 %), mais la toxicité reste inacceptable chez près de 15 % des sujets, incluant décès toxiques, cardiotoxicité, myélotoxicité plus intense que celle décrite chez les sujets plus jeunes, voire allergie sévère, non anticipés par l’évaluation gériatrique approfondie (EGA) initiale. Une dose plus faible doit donc être employée (18). Le programme GERICO 04 évaluant l’administration de docétaxel à la dose de 50 mg/m2 toutes les deux semaines a été clos prématurément pour toxicité (communication PAC GERICO, FNCLCC). Malgré l’absence de différences pharmacocinétiques significatives en fonction de l’âge, les doses recommandées pour une administration hebdomadaire de docétaxel sont 25 % inférieures à celles des sujets plus jeunes (26 versus 35 mg/m2) (16, 17).
Nouveaux traitements ciblés Les nouveaux traitements ciblés visant des anomalies moléculaires spécifiques, comme le HER2 pour l’anticorps monoclonal trastuzumab et l’inhibiteur tyrosine kinase lapatinib, ou comme le vascular endothelial growth factor pour le bevacizumab, incarnent de nouvelles voies de recherche particulièrement intéressantes pour la population âgée du fait de leur spectre de toxicité très différent de la chimiothérapie. Généralement, leur activité a été démontrée en situation métastatique et en combinaison à des agents cytotoxiques (19, 20). Cependant, seuls quelques patients âgés très sélectionnés ont été traités dans ces études, empêchant de tirer des conclusions fermes pratiques. Le meilleur exemple est incarné par le trastuzumab dont le bénéfice majeur en adjuvant est démontré pour les tumeurs de statut HER2 positif, mais pour lequel les données spécifiques aux sujets âgés sont très limitées. Dans l’essai adjuvant HERA, moins de 16 % des patientes étaient âgées de plus de 60 ans. Si l’analyse par sous-groupe discerne toujours un bénéfice significatif sur la survie sans récidive pour ces sujets, l’intervalle de confiance est beaucoup plus lâche (21) et une certaine prudence est nécessaire pour l’adoption de ce traitement chez le sujet de plus de 60 ans et a fortiori au-delà de 70 ans en l’absence de données plus spécifiques, tout spécialement après administration d’anthracyclines. Il existe donc un besoin crucial de données spécifiques pour
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cette population, d’autant plus que plusieurs travaux soulignent les enjeux des voies croisées de signalisation entre RH et récepteurs tyrosine kinases pour contourner les mécanismes d’hormonorésistance (22).
Biphosphonates Le bénéfice établi des biphosphonates dans le cancer du sein métastatique sur le plan osseux existe aussi dans la population âgée sous réserve d’une vigilance à l’égard de la fonction rénale à chaque séance afin d’adapter les doses si nécessaires (23).
Conclusion En conclusion, il est nécessaire de souligner l’importance des répercussions fonctionnelles des traitements en cancérologie et de leur impact sur l’autonomie dans la population âgée (24, 25). L’évaluation gériatrique approfondie (EGA) ou comprehensive geriatric assessment (CGA) (24) représente un moyen d’apprécier ces différents volets. Il s’agit d’une évaluation multidimensionnelle (évaluation nutritionnelle, cognitive, des troubles dépressifs, de la dépendance, des conditions de vie et des comorbidités) au cours de laquelle les différents problèmes des sujets âgés sont « révélés » et décrits, où les ressources et les soutiens de la personne sont recensés et où, au final, un plan coordonné de soins peut être établi. Couplée à un index prédictif de toxicité des traitements, comme le MAX2 pour la chimiothérapie (26, 27), elle pourrait aider à mieux individualiser les traitements. Ceci fait l’objet d’un travail de cohorte conduit par Martine Extermann et Ludovico Balducci à l’Université de Tampa en Floride avec une initiative complémentaire de validation européenne en cours de construction. Elle fait partie de ce vocabulaire indispensable que doivent s’approprier progressivement les oncologues afin de pouvoir échanger avec les gériatres. Le développement d’outils plus légers que l’évaluation gériatrique approfondie, afin de dépister les fragilités induites par le vieillissement, est un champs de recherche complémentaire de cette pratique en plein développement, non spécifique au cancer du sein (24). Les oncologues doivent apprendre à intégrer bénéfice absolu, espérance de vie et tolérance, trois volets essentiels pour abandonner la discrimination ancienne reposant sur l’âge, inadaptée à l’évolution de nos moyens et pratiques.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Étienne Brain
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
La nanomédecine est-elle une réalité ? Quelles perspectives en cancérologie ? M.-C. Favrot
Après la révolution, liée au décodage du génome humain et à l’identification des protéines codées par ces gènes, un nouveau défi est celui des nanobiotechnologies. Elles doivent fournir les outils d’analyse de la fonction de ces molécules dans l’organisme vivant et permettre de mieux comprendre certaines maladies, développer de nouvelles thérapies et des outils diagnostiques. Depuis une dizaine d’années, le préfixe nano caractérise, dans de nombreux domaines, l’étude et la manipulation de la matière à l’échelle atomique. Il se décline en une multiplication croissante de néologismes en tous genres : nanoparticules, nanomachines, nanomatériaux, nanoélectronique, nanochimie, nanobiotechnologies, nanomédecine, etc. Les premiers instruments qui permettaient de travailler à l’échelle des « nano » sont apparus dans les années 1980 avec l’invention, par des chercheurs de Zurich, d’une nouvelle famille de microscopes permettant tout à la fois d’observer et de manipuler les atomes un à un. D’abord cantonnés aux laboratoires de physique, ces outils se sont répandus dans d’autres disciplines, dont la biologie humaine. Peu à peu s’est ainsi forgé, à partir de 1995, le concept de nanosciences, en référence au nanomètre. Cette unité de longueur équivaut à un milliardième de mètre, à savoir l’intervalle occupé par une dizaine d’atomes de taille moyenne. Les nanosciences impliquent des structures dont les éléments de base sont de taille inférieure à 100 nanomètres. En médecine, les « nanomédicaments » sont 50 à 100 fois plus petits qu’un globule rouge. Les « nanos » couvrent des champs disciplinaires allant de la physique, des sciences et technologies de l’information et de la communication à la chimie, la biologie et la médecine et reposent sur l’interdisciplinarité ; leur avenir en médecine passe par la formation des médecins et des chercheurs de demain à l’interface des disciplines (fig. 1).
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Fig. 1. – Nanostructures biologiques.
Les grands domaines de recherche en nano-biotechnologies Dans les sciences du vivant, les micro- et nanotechnologies permettent une interface physique entre des matériaux ou objets artificiels de taille nanométrique et des composants clés du vivant, comme les molécules et les cellules permettant une « convergence d’échelle ». Ces nanomatériaux peuvent être inclus dans des micro-outils comme une biopuce pour le diagnostic ou un
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appareil à microbiopsie. Ainsi, le monde des « nanos » rejoint celui des « objets usuels » pour la prise en charge du malade. Dans le domaine de l’analyse, la miniaturisation des outils permet des mesures très sensibles (une molécule unique) et simultanées de très nombreux paramètres ; mesures devenues indispensables pour une étude du sujet sain ou de l’homme malade, dans toute sa complexité. On distingue très schématiquement quatre grands domaines de recherche. – Les nanomatériaux et nanostructures sont construits par l’assemblage d’atomes ou de molécules et vont pouvoir, grâce à leur taille et leurs propriétés, trouver leurs interfaces avec les biomolécules ou les cellules et ainsi renouveler les outils d’exploration du vivant. – Dans ce domaine, on trouve les microsystèmes implantables chez l’homme. – L’imagerie et la manipulation d’objets biologiques sont centrées sur le développement de méthodes et d’outils qui permettent de caractériser ou de manipuler des cellules ou des molécules dans l’être vivant. – Les microsystèmes qui permettent l’analyse et la détection d’une ou plusieurs molécules dans un échantillon biologique. Ce sont les biopuces qui par rapport aux systèmes d’analyse « classiques » utilisés dans les laboratoires permettent de mener un grand nombre d’analyses en parallèle, à temps et coûts réduits, sur des très petites quantités d’échantillons avec une très grande spécificité. – Les outils d’imagerie fonctionnelle, de vectorisation/délivrance de molécules in vivo.
La nanomédecine : rêve ou réalité ? L’exemple du cancer du sein Le champ de la nanomédecine recouvre le diagnostic (en particulier le diagnostic précoce et le dépistage), le traitement de la maladie, ainsi que la prévention, la protection ou l’amélioration de la santé humaine. Cinq grands domaines de recherche technologique sont aujourd’hui développés : les biopuces, les nano-outils implantables ou nanomatériaux, l’imagerie, les nouvelles thérapies et les systèmes de délivrance de drogues, auxquels il faut ajouter un vaste domaine qui explore les risques toxicologiques de la nanomédecine et les aspects réglementaires et éthiques inhérents à cette nouvelle pratique clinique.
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Des biopuces au laboratoire sur puces À l’instar de ce qui s’est passé pour l’industrie de l’électronique, la possibilité de miniaturiser les instruments utilisés dans l’investigation clinique devrait révolutionner ce secteur. Les outils d’analyse, qui sont aujourd’hui relativement volumineux et coûteux, seront dans le futur remplacés par des systèmes basés sur les principes de la microfluidique et de la microtechnologie. Tirant avantage de la réduction de taille, le nombre d’analyses devrait pouvoir être augmenté de plusieurs ordres de grandeurs, sans augmenter ni la durée d’analyse, ni le coût global. Par ailleurs, la multiplication des paramètres analysés sur un échantillon de taille réduite améliorera la compréhension de la physiopathologie des maladies. Ces outils sont dénommés biopuces. Ils permettent d’envisager de nombreuses applications dans le domaine du diagnostic, du dépistage, de la pharmacogénomique, mais aussi dans les domaines de la santé des populations (avec la détection des pathogènes dans l’eau, l’air) et dans celui de l’optimisation du processus de découverte de nouveaux médicaments (screening à haut débit, chimie combinatoire in situ, étude de toxicité). La cancérologie est un des domaines dans lesquels ces outils commencent à faire leur preuve ; le transcriptome est un bon exemple avec les premiers essais de classification pronostiques des cancers du sein, basé sur l’analyse de plusieurs milliers de gènes en parallèle, sur une même biopsie. Un autre exemple récent est l’identification de nouveaux gènes jouant un rôle dans la transmission génétique du cancer du sein. Dans ce domaine, l’exploitation de ces puces pour le diagnostic d’une prédisposition au cancer du sein devra être entourée de réflexion éthique et sociétale. Un autre exemple est celui des puces permettant de prédire la sensibilité aux drogues cytotoxiques (pharmacogénomique). Dans d’autres applications, c’est l’identification de l’ensemble des protéines présentes dans un échantillon de sérum qui permettrait de diagnostiquer précocement un cancer ; cela semble possible pour le cancer de l’ovaire. Des travaux analogues sont développés pour l’analyse de microponction dans les suspicions de cancer du sein ou dans l’analyse de liquide céphalorachidien pour le diagnostic de métastases du cancer du sein. Si l’on va un peu plus loin, on devrait réduire la taille d’un laboratoire actuel à celle d’un sucre. Le laboratoire sur puce (Lab-on-ship) sera capable de mesurer au lit du malade les paramètres biologiques usuels mais aussi de reconnaître une séquence d’ADN, ou d’analyser en extemporané les protéines présentes dans une ponction de tumeur. Pour cela, il suffira d’y déposer une
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goutte de sang ou de liquide biologique ou un liquide d’aspiration. Ceux-ci seront aspirés, divisés en des milliers de gouttelettes et acheminés par des canaux (d’environ 50 nanomètres) jusqu’à des chambres de réaction ; le produit de cette réaction sera analysé in situ par des capteurs et le résultat récupéré à sa sortie.
Nanomatériaux ou nano-outils implantables Ce domaine regroupe des applications nombreuses et hétérogènes mais toutes porteuses de promesses en médecine. Les nanomatériaux ou les matrices nanostructurées sont des supports indispensables pour l’engineering cellulaire et tissulaire ; ils devraient permettre la reconstitution, in vitro, de cellules ou de tissus qui seront utilisés en médecine régénérative. Les microsystèmes implantables pour le prélèvement de tissus (microbiopsies) ou le traitement (des microélectrodes implantables) auront des avantages majeurs, comparés aux systèmes actuellement utilisés ; leur faible invasivité et une optimisation de la biocompatibilité à l’interface vivant/non vivant aboutiront à une meilleure tolérance. Ce type d’outils est en cours de développement et devrait avoir des applications rapides en cancérologie, en particulier pour le dépistage ou le diagnostic précoce d’un cancer ; le cancer du sein est une application potentielle. Aujourd’hui, il existe déjà des « pinces » constituées d’un rayon laser capable de saisir les molécules une par une et de les ré-assembler à volonté dans des cellules en culture. En médecine, on imagine déjà des robots miniatures injectés dans les vaisseaux sanguins pour aller soigner les organes ou des capteurs qui donneraient une vision extrêmement précise des tissus et des fonctions physiologiques en voyageant dans les groupes de cellules.
Imagerie Les différentes techniques d’imagerie pour l’étude des pathologies ont pris une importance considérable au cours de la dernière décennie. Ces techniques donnent accès à de nombreux paramètres anatomiques (localisation des cibles), physiologiques (le fonctionnement biologique d’un organisme ou d’un organe), pharmacologiques (le suivi cinétique de la fixation d’une molécule). Récemment, le terme d’imagerie moléculaire a été proposé pour décrire l’ima-
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M.-C. Favrot
gerie des réactions à l’échelle moléculaire (l’expression d’un gène ou l’action d’une enzyme par exemple). Ce domaine est en pleine expansion et nécessite des recherches en optique et la mise au point de nouveaux traceurs. Ainsi, sont en cours de développement des traceurs qui s’accumulent de façon préférentielle dans les cellules tumorales et les métastases et des détecteurs qui permettent d’activer le fluochrome et d’illuminer la cellule. Ces sondes, souvent appelées « capsules décorées » contiennent un cœur métallique ou fluorescent sur lequel sont attachés les ligands spécifiques de la tumeur. Une application prochaine en cancérologie est l’aide au geste chirurgical. La détection de rares cellules malignes, activée à l’aide d’un détecteur à fluorescence, devrait aider le chirurgien à voir quelques micronodules métastatiques ou à définir les berges de la tumeur. Une autre application, importante pour le cancer du sein, est l’imagerie du drainage lymphatique avec une visualisation de micrométastases dans le ganglion sentinelle.
Nouvelles thérapies et délivrance de drogues Dans les maladies graves ou chroniques, un des défis est d’augmenter l’efficacité des traitements (le plus souvent en augmentant les doses ou la durée du traitement) sans provoquer de toxicité. Certaines molécules, pour être efficaces, doivent être véhiculées jusque dans le tissu malade puis dans la cellule. Pour atteindre cet objectif, il faut d’une part utiliser des thérapies dites « ciblées », spécifiques des anomalies présentes dans les cellules malades, d’autre part de vectoriser les molécules thérapeutiques jusqu’au tissu malade en préservant les tissus sains. Ces nouvelles drogues sont de véritables Lego® moléculaires, qui reposent sur l’ingénierie chimique de biomolécules impliquées dans les phénomènes de reconnaissance des cellules ou des tissus ciblés (systèmes de guidage), et sur le positionnement de molécules, les unes par rapport aux autres, pour catalyser la réaction désirée dans la cellule. Cette nouvelle « chimie » divise, par cinquante, la taille d’un cristal pharmaceutique, et permet aussi d’augmenter leur solubilité dans l’eau ou leur absorption lors d’administration par voie orale ou en aérosols. La cancérologie est encore un champ d’application majeure avec le ciblage de molécules cytotoxiques dans la tumeur. Une autre application, proche dans son concept de l’imagerie, est l’utilisation de nanoparticules avec un cœur « en or » qui est excitable dans le proche infrarouge et permet la destruction de la cellule par
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thermothérapie. Ainsi, on injecte le produit, on vérifie sa localisation sélective dans la tumeur, puis on active ces particules pour permettre une destruction spécifique du tissu malin.
Conclusion Avec la nanomédecine, on voit se concrétiser le concept de médecine « personnalisée » et l’on entrevoit des progrès spectaculaires dans certains domaines, comme la détection précoce des cancers ou leur traitement. On est aussi en droit d’être enthousiaste lorsque l’on regarde l’évolution du marché mondial des biopuces, encore inexistant en 1997 et qui représente aujourd’hui 650 millions de dollars (547 millions d’euros). Cependant, si l’on peut être optimiste face à la révolution des « nano », en médecine, il reste de nombreux défis à relever. Les « nano » attisent les peurs, et il faut multiplier les programmes visant à évaluer la toxicité potentielle de ces produits pour l’homme et leur impact sur l’environnement. Le transfert en clinique des « nano » passera par des étapes longues de développement, incluant toutes les étapes de fabrication de produits dans des conditions compatibles avec la clinique, et par une analyse prudente de leur impact clinique, éthique et sociétal.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Marie-Christine Favrot
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Chirurgie de rattrapage des cancers du sein localement évolués et des récidives locales agressives P. Rouanet
Introduction Définis par un volume tumoral important, les cancers du sein localement évolués et les récidives locales agressives associent un groupe hétérogène de malades comportant des pronostics très variables. Du point de vue de la technique chirurgicale, leur dénominateur commun est la nécessité de réaliser des résections locales étendues nécessitant une couverture pariétale avec du matériel autologue, le plus souvent des lambeaux musculo-cutanés. Qualifiée de maladie inopérable par les techniques classiques de mastectomie, la littérature confirme que la primeur thérapeutique est donnée aux traitements systémiques pour combattre la maladie micrométastatique (1). Dans ces conditions, quelle peut être la place d’un traitement local chirurgical agressif ?
Histoire naturelle – Individualisation de ce groupe de patientes Le volume tumoral de ces lésions sous-entend le risque de maladie métastatique et donc la notion de maladie systémique. Dès 1969, Fisher (2) publiait une relation directe entre la taille tumorale et l’envahissement ganglionnaire :
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P. Rouanet
les tumeurs de plus de 5 cm avaient un taux d’envahissement de 63 % avec le plus souvent plus de quatre ganglions métastatiques (65 %) et un pronostic à 10 ans inférieur à 20 % alors que les patientes N- présentaient une survie à 10 ans de 65 % mais un taux de récidives locales de 24 %. Downey et al. (3) confirmaient ces données à propos de 38 femmes opérées de résection pariétale large, l’infiltration ganglionnaire était le premier facteur pronostique des re-récidives locales et de la survie à long terme. Les combinaisons thérapeutiques actuelles, radiothérapie, chimiothérapie et hormonothérapie, ont permis d’améliorer le pronostic de ces patientes sans pouvoir gommer l’impact pronostique de l’envahissement ganglionnaire. Ces chiffres démontrent clairement l’hétérogénéité pronostique de ce groupe de cancers du sein pour lequel l’envahissement ganglionnaire permet de distinguer grossièrement les sous-groupes extrêmes que sont les tumeurs à agressivité purement locale des lésions à pronostic général. À partir du fort volume tumoral parfois associé à la fixité pariétale, trois groupes de patientes peuvent s’individualiser cliniquement : – Les maladies inflammatoires définies par les signes classiques que sont l’œdème cutané, la rougeur, la présence de nodules de perméation. La vitesse de prolifération peut s’apprécier par la rapidité d’installation de l’histoire clinique, la prise en masse du sein ou l’existence d’adénopathies axillaires synchrones. Le recueil des facteurs pronostiques associe des tumeurs indifférenciées, à fort index mitotique, souvent non hormonosensibles. Ces tumeurs inflammatoires ont un pronostic systémique, la chirurgie agressive doit rester d’indication exceptionnelle. – Les cancers du sein localement évolués au diagnostic se caractérisent par un fort volume tumoral isolé. L’anamnèse confirme la lenteur d’évolution et le caractère dissimulé de la découverte de la maladie. Ces patients consultent tard soit par crainte, par ignorance ou par déni. La biologie s’accorde à la lenteur d’évolution clinique en associant des récepteurs hormonaux présents et un faible index de prolifération. – Les récidives locales agressives sont caractérisées par leur volume tumoral important associé à l’infiltration de la paroi thoracique ou du sternum. Elles associent les récidives pariétales mais aussi les récidives ganglionnaires, surtout mammaires internes. Leur pronostic s’individualise en fonction de l’intervalle libre les séparant de la fin du traitement initial. Faneyte et al. (4) proposent la barrière pronostique à 2 ans. Au-delà d’un intervalle supérieur à 2 ans, le taux de survie à 5 ans passe de 58 % en cas de résection R0 à 28 % en cas de résection R1.
Chirurgie de rattrapage des cancers du sein localement évolués… 219
Techniques opératoires Résections thoraciques Les résections pariétales intéressent surtout la paroi thoracique antérieure, que ce soient les résections costales ou les résections sternales. Les résections inférieures à 5 cm2 avec une exérèse emportant moins de trois côtes antérieures ou moins de la moitié du sternum n’imposent pas de reconstruction de la rigidité pariétale (5, 6). Au-delà de ces limites, l’utilisation de matériaux synthétiques s’impose pour rigidifier la paroi et éviter l’apparition de volets thoraciques avec le risque de respiration paradoxale (fig. 1). Ce sont des matériaux rigides, inertes et malléables, sous forme de plaques pour la plupart ; il s’agit essentiellement du polytétrafluoroéthylène (Goretex®) non rigide, du polypropylène (Marlex®) rigide, du polyéthyléneletrophélate (Mersilène®), voire de plaque résorbable telle que le polyglactine (Vicryl®). Plusieurs études ont montré que ces différentes plaques ont une efficacité équivalente dans la restauration de la rigidité pariétale thoracique (6, 7). Les résections pulmonaires associées sont rares, le plus souvent atypiques de contiguïté, exceptionnellement réglées. L’appréciation des marges prédictives de résection est difficile, plusieurs auteurs soulignent la sécurité d’avoir 2 cm macroscopiques pour éviter une résection R1.
Fig. 1 – Récidive pariétale agressive après mastectomie : résection pariétale, plaque de Mersilène® ; lambeau de grand dorsal.
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Les risques du renforcement pariétal profond par les matériaux synthétiques sont l’infection ou la douleur chronique. Dans certains cas où il n’est pas nécessaire d’utiliser un recouvrement cutané par lambeaux et où existe un risque infectieux, nous avons rigidifié la paroi en utilisant la palette désépidermisée d’un grand dorsal suturée au plan osseux (8) (fig. 2).
Recouvrement pariétal Problématique avant l’utilisation des lambeaux musculo-cutanés (LMC), les défects pouvaient être comblés par transposition du sein controlatéral ou par l’utilisation d’épiplooplastie greffée (9). La confection des lambeaux musculocutanés pédiculés de grand dorsal ou de grand droit a transformé les suites cicatricielles de ces interventions tant pour la durée d’hospitalisation, la
Fig. 2 – Récidive ganglionnaire mammaire interne : résection pariétale sterno-costale consolidée par lambeau de grand dorsal désépidermisé.
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morbidité ou les suites fonctionnelles à long terme (10, 11). Le lambeau de grand dorsal est robuste, fiable techniquement, facile à réaliser (12). Le lambeau de grand droit permet des recouvrements plus larges au prix d’une morbidité plus lourde. Leurs contre-indications absolues dépendent des séquelles chirurgicales antérieures au niveau de leurs pédicules principaux : curage axillaire agressif pour le grand dorsal, sternite radique importante pour le grand droit.
Indications Chirurgie agressive de première intention Elle est devenue exceptionnelle et ne se conçoit que pour des formes histologiques très particulières : sarcome de bas grade, tumeur desmoïde. Le faible index de prolifération de ces tumeurs autorise des résections curatives d’emblée.
Chirurgie de clôture après traitement d’induction Le recueil des facteurs pronostiques sur biopsie associé à un bilan d’extension complet et exhaustif de la maladie permet de sélectionner les femmes candidates à une chirurgie de clôture agressive. La notion de réponse au traitement d’induction est capitale pour établir le pronostic. Les non-répondeuses gardent un pronostic excessivement grave alors que les répondeuses peuvent bénéficier d’une chirurgie à visée curative. Dans le premier cas, l’indication du geste chirurgical doit intégrer en plus du pronostic carcinologique des notions telles que la prise en charge symptomatique du résidu tumoral ou l’impact sur la qualité de vie. La nécessité d’une résection macroscopiquement complète et de suites opératoires simples reste l’objectif principal de l’acte. Pour les patientes répondeuses, le chirurgien doit se poser la question de réséquer simplement le résidu tumoral visible ou de réséquer les tissus initialement pathologiques. Dans cette situation, l’apport de l’examen extemporané des marges est discutable car la mise en évidence de dépôts tumoraux épars est toujours sous-estimée. L’appréciation du bénéfice-risque de la chirurgie à réaliser est capitale pour décider de la stratégie opératoire.
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P. Rouanet
Chirurgie des récidives isolées Caractérisée par les antécédents thérapeutiques avec notamment la notion d’irradiation antérieure, la résection doit être obligatoirement large (2 à 5 cm de marge macroscopique) (4), avec un recouvrement toujours par LMC autologue (5, 6, 10). La radiodystrophie ou l’existence de nodules de perméation imposent des marges macroscopiques supra-centimétriques (fig. 3). En cas de doute entre tissu fibreux radique et tissu tumoral, le chirurgien ne doit pas hésiter à réaliser des examens extemporanés ciblés. Une récidive ganglionnaire associée peut remettre en cause l’utilisation d’un LMC en fonction de sa topographie, axillaire pour le grand dorsal, mammaire interne pour le grand droit. Enfin, on peut schématiser l’indication chirurgicale en fonction de l’intervalle libre (± 2 ans), à savoir que plus il est long, plus l’indication d’une chirurgie agressive s’impose (13).
Fig. 3 – Récidive locale agressive sur sein radique : recouvrement pariétal par TRAM bipédiculé.
Chirurgie de propreté en cas de maladie générale non contrôlée L’indication d’une chirurgie palliative doit prendre en compte plusieurs symptômes qui sont susceptibles d’altérer la qualité de vie : la douleur, les odeurs émises par la plaie thoracique, les exsudats, le saignement, l’œdème. Les déficits fonctionnels, les répercussions psychologiques et sociales doivent être évalués. La synthèse de ces plaintes peut conduire à une chirurgie de propreté même dans le contexte d’une maladie terminale sous couvert d’un état général conservé. La chirurgie est le moyen le plus rapide et le plus efficace pour avoir une réponse complète… sous réserve de suites opératoires simples ! (fig. 4).
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Fig. 4 – Récidive locale agressive après mastectomie. A, B : recouvrement pariétal par TRAM bipédiculé. C : Résultat 26 mois après la chirurgie.
Résultats Dans toutes les séries publiées, la mortalité opératoire de ces interventions est nulle avec une morbidité faible, toujours inférieure à 15 %. Weyant et al. (7) confirment que le risque opératoire est directement lié à une résection pulmonaire associée. Le taux de résection curative R0 varie de 60 à 80 % (4, 7). La survie à 5 ans varie de 20 à 70 % et le taux de re-récidives locales se stabilise autour de 20 %. Pameijer et al. (13) ont effectué une métaanalyse de la littérature anglo-saxonne qui confirme, à partir de 400 patientes, un taux de survie à 5 ans de 45 %. À partir de la série du MD Anderson, Chen et al. (11) confirment que le taux de survie à 3 ans des résections curatives est de 66 % alors qu’il chute à 8 % en cas de résections palliatives. Pour Faneyte et al. (4), il varie de 60 à 20 %. Chang et al. (5) publient une série de 113 patients opérés au Memorial Sloan Kettering Cancer Center de New York. La surface pariétale moyenne réséquée était de 266 cm2 comblée par 157 LMC. 85 % des patientes ont bénéficié d’une reconstruction en un temps sans complications. Pour la même institution, Shah et Urban (14) avaient
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montré que le taux de survie à 5 ans de ces femmes passait de 57 % en cas de chirurgie première à 19 % si la chirurgie était programmée en cas de nonréponse à la radiothérapie.
Conclusions et perspectives La chirurgie pariétale lourde des cancers du sein localement évolués ou récidivants a fait la preuve de sa reproductibilité technique chez les équipes référentes maîtrisant à la fois l’exérèse pariétale large et les différentes techniques de reconstruction pariéto-thoracique. L’utilisation large des lambeaux musculo-cutanés a transformé les suites opératoires de ces patientes, autorisant des indications purement palliatives dont l’objectif est d’améliorer la qualité de vie. Pour les patientes à pronostic incertain, cette chirurgie a parfaitement sa place dans le cadre d’une prise en charge multidisciplinaire et programmée. Enfin, elle reste le point clé du traitement curatif des tumeurs volumineuses à malignité locale pour lesquelles l’erreur thérapeutique serait de résumer la prise en charge à un traitement purement systémique. En l’absence de facteurs biologiques ou anatomo-pathologiques suffisamment performants pour prédire le risque régional ou systémique de ces femmes, la discussion multidisciplinaire doit toujours inclure une réflexion chirurgicale pertinente.
Références 1. Giordano SH (2003) Update on locally advanced breast cancer. The oncologist 8: 52130 2. Fisher B, Slack NH, Bross IDJ (1969) Cancer of the breast: size of the neoplasm and prognosis. Cancer 24: 1071-81 3. Downey RJ, Rusch V, Hsu FI et al. (2000) Chest wall resection for locally recurrent breast cancer: is it worthwhile ? J Thorac Cardiovasc Surg 119: 420-8 4. Faneyte IF, Rutgers EJ, Zoetmulder FA (1997) Chest wall resection in the treatment of locally recurrent breast carcinoma: indications and outcome for 44 patients. Cancer 80: 886-91 5. Chang RR, Mehrara BJ, Hu QY et al. (2004) Reconstruction of complex oncologic chest wall defects: a 10-year experience. Ann Plast Surg 52: 471-9 6. Veronesi G, Scanagatta P, Goldhirsch A et al. (2007) Results of chest wall resection for recurrent or locally advanced breast malignancies. Breast in press
Chirurgie de rattrapage des cancers du sein localement évolués… 225
7. Weyant MJ, Bains MS, Venkatraman E et al. (2006) Results of chest wall resection and reconstruction with and without rigid prosthesis. Ann Thorac Surg 81: 279-85 8. Rouanet P, Giacalone PL, Pujol H (1994) De-epithelialized latissimus dorsi musculocutaneous flap to reconstruct major chest wall resection after breast carcinoma. Eur J Surg Oncol 20: 687-91 9. Contant CM, van Geel AN, Wiggers T (1996) The pedicled omentoplasty and split skin graft for reconstruction of large chest wall defects. Eur J Surg Oncol 22: 532-7 10. Rouanet P, Fabre JM, Tica V et al. (1995) Chest wall reconstruction for radionecrosis after breast carcinoma therapy. Ann Plast Surg 34: 465-70 11. Chen KN, Yu P (2006) Significance of multidisplinary surgery in chest wall resection and reconstruction for selected patients with breast cancer. Zhonghua Zhong Liu Za Zhi 28: 856-9 12. Rouanet P, Jozwik M, Pujol H (1994) Divided latissimus dorsi musculocutaneous flap for chest wall radionecrosis. Ann Plast Surg 33: 418-20 13. Pameijer CR, Smith D, McCahill LE et al. (2005) Full-thickness chest wall resection for recurrent breast carcinoma: an institutional review and meta-analysis. Am Surg 71: 711-5 14. Shah JP, Urban JA (1975) Full thickness chest wall resection for recurrent breast carcinoma involving the bony chest wall. Cancer 35: 567-73
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Philippe Rouanet
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 5
Conservation mammaire et survie à long terme après chimiothérapie néo-adjuvante Expérience de l’Institut Bergonié M. Debled, M. Durand, A. Avril, C. Tunon de Lara, F. Bonichon et L. Mauriac pour le Groupe Sein de l’Institut Bergonié
Mots clés : étude randomisée, chimiothérapie néoadjuvante, rechute locale, survie globale, mastectomie Le principal objectif des traitements médicaux néoadjuvants est de permettre un geste chirurgical ou d’en réduire la morbidité, ceci sans altérer le pronostic à long terme des patientes. Concernant le cancer du sein, 14 études ont été publiées comparant une chimiothérapie néo-adjuvante au traitement classique de chirurgie première suivie de chimiothérapie adjuvante. L’étude de phase III réalisée à l’Institut Bergonié de 1985 à 1989 fut le premier essai publié, et est donc l’étude dont le suivi demeure le plus long. C’est aussi l’une des deux seules études dont l’objectif principal est la réduction du taux de mastectomie sans pénalisation de la survie globale. C’est enfin la seule étude dont 100 % des patientes incluses dans le bras de chirurgie première ont eu une mastectomie. Une actualisation des résultats avec plus de 17 ans de recul médian apparaissait donc justifiée. Parmi les 272 patientes randomisées d’âge médian 54 ans (30–69 ans), 138 eurent une mastectomie de type Patey et 134 patientes reçurent une chimiothérapie néo-adjuvante. Après mastectomie première, les patientes recevaient une chimiothérapie adjuvante en cas d’atteinte ganglionnaire histologique (n = 82) ou en cas d’absence totale de récepteurs stéroïdiens (n = 28). Celles n’ayant pas ces facteurs pronostiques péjoratifs n’avaient pas de chimiothérapie adjuvante. Si les premiers résultats
228
M. Debled, M. Durand, A. Avril et al.
montraient une meilleure survie globale sous chimiothérapie néo-adjuvante, ce bénéfice disparut lors des analyses suivantes. Avec un recul médian actuel 209 mois, la survie globale reste identique, que la chimiothérapie ait été administrée avant (néo-adjuvant) ou après (adjuvant) le traitement local. Les taux actuariels de rechute à distance sont également identiques entre les deux bras. À l’inverse, les taux de rechute locorégionales sont plus élevés en cas de chimiothérapie néo-adjuvante. Ce fait est lié aux conditions de traitement locorégional prévues dans l’essai : elles permettaient de traiter par irradiation exclusive les patientes dont la tumeur était en rémission clinique complète après chimiothérapie néo-adjuvante (n = 44). Celles dont le reliquat tumoral mesurait jusqu’à 2 cm bénéficiaient d’une chirurgie conservatrice (n = 40), les autres étant traitées par mastectomie totale (n = 49). Finalement, malgré un taux de rechute locorégional plus important après chimiothérapie néo-adjuvante, une conservation mammaire a pu être obtenue dans près de 50 % des cas avec un recul médian de plus de 17 ans, sans que la survie globale en soit altérée.
Bibliographie Carter CL, Allen C, Henson DE (1989) Relation of tumor size, lymph node status, and survival in 24, 740 breast cancer cases. Cancer 63: 181-7 Mauriac L, Durand M, Avril A, Dilhuydy JM (1991) Effects of primary chemotherapy in conservative treatment of breast cancer patients with operable tumors larger than 3 cm. Ann Oncol 2: 347-54 Mauriac L, Macgrogan G, Avril A et al. (1999) Neoadjuvant chemotherapy for operable breast carcinoma larger than 3 cm: a unicentre randomized trial with a 124-month median followup. Institut Bergonie Bordeaux Groupe Sein (IBBGS). Ann Oncol 10: 47-52
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation Marc Debled X
Chirurgie des métastases hépatiques de cancer du sein R.J. Salmon, P. Mariani, J.Y. Pierga, M.C. Falcou et P. Pouillart
La résection chirurgicale des métastases viscérales est devenue une part intégrante de la prise en charge de l’évolution des cancers. Dans les cancers du sein, il est vrai que l’évolution métastatique est le plus souvent polyviscérale de façon synchrone. L’atteinte hépatique seule est rare, représentant environ 10 % des évolutions métastatiques et parmi ces métastases hépatiques seules 10 % vont pouvoir faire envisager un geste chirurgical. Si l’on voit que ces métastases isolées ou peu nombreuses sont rares, la fréquence élevée des cancers du sein permet néanmoins, dans les centres spécialisés, de voir ce type de patientes de façon assez fréquente. Avant d’envisager un geste chirurgical et à la lumière de l’expérience acquise en chirurgie hépatique d’une part et l’analyse de notre propre série de plus de 90 malades depuis 1988 traits de façon pluri disciplinaire, il nous est apparu que cette chirurgie devait être considérée comme une « chirurgie adjuvante » dans le traitement de la maladie métastatique. Quatre règles ont été édictées dans notre institut pour la prise en charge chirurgicale des métastases hépatiques de cancer du sein : 1) la tumeur primitive doit être retirée ; 2) la ou les métastases hépatiques doivent avoir régressé ou s’être stabilisées sous l’effet du traitement de chimio/hormonothérapie. L’existence d’une réponse objective au traitement médical est indispensable avant d’envisager un geste chirurgical ; 3) le nombre de métastases doit être limité 3-5 au maximum. Un nombre supérieur à l’imagerie rend une exérèse illusoire car il existe alors une maladie microscopique associée, constante, qui sera, elle, inextirpable ; 4) il ne doit pas y avoir d’autre métastase viscérale en dehors de métastases osseuses contrôlées chez des patientes RH+.
232
R.J. Salmon, P. Mariani, J.Y. Pierga Doyen et al.
Que ces métastases surviennent de façon synchrone à la maladie initiale ou dans la surveillance d’un cancer du sein déjà traité, la chirurgie hépatique qui laisse la patiente sans localisation tumorale visible permet de faire évoluer le traitement vers une stratégie « adjuvante » ou permet aussi d’interrompre une chimiothérapie et de la relayer par une hormonothérapie. Dans notre expérience, la mortalité opératoire était nulle chez des patientes âgées de 53 ans (31-73). Avec un suivi moyen de 82 mois, la survie était de 85 % à 24 mois, 66 % à 36 mois et 46 % à 60 mois. Trois patientes ont fait l’objet de résections itératives. La survie était liée de façon significative au délai écoulé entre le cancer primitif et la survenue des métastases, la présence de RH+ et le caractère complet de l’exérèse. Au cours de l’évolution, une récidive métastatique survenait dans le foie chez la moitié des malades seulement. Ces résultats mono-institutionnels ont été confirmés par une série multicentrique de l’Association française de chirurgie sur 460 patientes, série qui retrouvait les mêmes critères pronostiques que les nôtres. La chirurgie d’exérèse des métastases hépatiques ou « chirurgie adjuvante » est une option à envisager dans la prise en charge multidisciplinaire des métastases hépatiques de cancer du sein. Elle permet l’arrêt d’une chimiothérapie chez la majorité des patientes au prix d’une mortalité nulle et d’une morbidité très limitée.
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Rémy Salmon
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 27
Métastases hépatiques : vers une amélioration de la survie ? C. Ségura, C. Lévy, D. Allouache, C. Delcambre, O. Switsers, J.M. Ollivier, P. Berthet, F. Emily-Toudic et T. Delozier
Mots-clés : métastases hépatiques, facteurs pronostiques, survie Introduction : Trente à 50 % des patientes traitées pour cancer du sein présentent une évolution métastatique. Le foie est le 3e site de rechute métastatique après l’os et le poumon. À l’heure actuelle, les stratégies thérapeutiques sont palliatives, basées sur des traitements systémiques par hormono- et/ou chimiothérapie, parfois en association avec les thérapies ciblées. Le pronostic des ces patientes reste sombre avec une médiane de survie de 4 à 6 mois, et un taux de survie à 1 an de seulement 30 % (1, 2). Cependant, certaines équipes chirurgicales décrivent, après résection de métastases hépatiques de cancer du sein, des médianes de survie allant de 27 à 45 mois chez des patientes « bien sélectionnées » (3). Peut-on, à partir de données rétrospectives, tenter de définir des sous-groupes de bon et mauvais pronostic ? Matériel et méthode : Ce travail est une étude rétrospective, réalisée à partir du fichier de patientes suivies et prises en charge au centre François Baclesse pour cancer du sein, entre 1973 et 2003. Nous avons analysé les dossiers des patientes qui ont présenté sur cette période une évolution métastatique hépatique isolée, quels que soient le délai d’apparition des ces métastases et l’étendue de l’atteinte hépatique. La survie après métastases a été analysée en fonction des paramètres clinicobiologiques suivants : 1) pour la patiente : âge au moment du traitement initial et au moment d’apparition de la métastase ;
234
C. Ségura, C. Lévy, D. Allouache et al.
2) pour la tumeur initiale : taille, type histologique, grade histopronostique SBR, envahissement ganglionnaire, nombre de ganglions atteints, récepteurs hormonaux, type de traitement reçu (chimiothérapie ± hormonothérapie) ; 3) pour la métastase : délai d’apparition (< ou ≥ à 12mois), type de traitement reçu (chimiothérapie, hormonothérapie, seules ou en association, soins de support), réponse à la première ligne de traitement. Les probabilités de survie ont été calculées selon la méthode Kaplan et Meyer et les comparaisons effectuées par un test du Log-Rank. Les comparaisons de pourcentages ont été effectuées par un test du khi2. Pour l’analyse multifactorielle, on utilise le modèle de Cox. Résultats : Nous avons sélectionné 354 patientes. L’âge médian au moment du traitement de la tumeur primitive était de 57,5 ans (29-90 ans). Dans cette population, la médiane de survie est de 9 mois, et la durée moyenne de survie de 19 mois. Les paramètres qui ressortent de façon significative en analyse univariée sont : l’âge par tranche de 10 ans (p = 0,01), le grade histopronostique SBR (p = 0,0035), le statut ganglionnaire (p = 0,03), les récepteurs hormonaux (p < 0,0001), le délai d’apparition des métastases (p < 0,015), le type de traitement reçu (p < 0,017), et la réponse au traitement initial de la métastase (p < 0,0001). En analyse multivariée, seul le grade histopronostique, le statut des récepteurs hormonaux et la réponse au traitement de 1re ligne métastatique sont significatifs sur le plan statistique comme le montre le tableau I. Tableau I – Réponse au traitement de 1re ligne métastatique. p Âge < 50 ou > = 50
0,229
Taille tumorale
0,108
Grade SBR
0,019
Envahissement ganglionnaire
0,578
Récepteurs hormonaux
0,000
Type de traitement de 1re ligne méta
0,347
Réponse 1re ligne métastatique
0,000
Conclusions : Les patientes ayant des métastases hépatiques d’un cancer du sein ont des pronostics hétérogènes ; l’analyse réalisée va permettre de définir des groupes pronostiques et d’améliorer ainsi la prise en charge de nos patientes.
Métastases hépatiques : vers une amélioration de la survie ? 235
Références 1. Sledge GW, Jr., Miller KD (1999) Metastatic breast cancer: the role of chemotherapy. Semin Oncol 26(1 Suppl 2): 6-10 2. Wyld L, Gutteridge E, Pinder SE et al. (2003) Prognostic factors for patients with hepatic metastases from breast cancer. Br J Cancer 89: 284-90 3. Adam R, Chiche L, Aloia T et al. (2004) Hepatic resection for noncolorectal nonendocrine liver metastases: analysis of 1,452 patients and development of a prognostic model. Ann Surg 244: 524-35
Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Carine Ségura
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
X
Métastases ovariennes, péritonéales et rétropéritonéales du cancer du sein H. Crouet, A. Lesur, C. Blanc-Fournier, S. Martin et J.-M. Guilloit
Introduction Les sites métastatiques du cancer du sein, habituellement rencontrés ou recherchés, sont l’appareil pleuro-pulmonaire, les os, le foie, à un moindre degré le cerveau et les surrénales. La survenue de métastases ovariennes, carcinoses péritonéales et rétropéritonéales est une éventualité moins connue, quoique relativement commune en pratique clinique.
Métastases ovariennes et péritonéales Elles ne sont pas exceptionnelles après cancer du sein.
Ovaire, site métastatique habituel, quel que soit le cancer primitif Dans une série d’autopsies systématiques de patientes décédées de lésion maligne, quel que soit le cancer primitif, des localisations ovariennes sont retrouvées dans 19,2 % des cas (1). Parmi les tumeurs ovariennes malignes, la fréquence des métastases d’un cancer d’origine extragénitale est diversement appréciée selon l’origine de la publication. Une étude du registre suédois des tumeurs (2) rapporte 255 métastases ovariennes pour 10 955 cancers primitifs pendant la même période, soit
240
H. Crouet, A. Lesur, C. Blanc-Fournier et al.
2,3 %. Certaines séries hospitalières, sur des patientes opérées, font état de chiffres allant jusqu’à 30 % (3). Dans une série personnelle de 1 216 tumeurs annexielles malignes ou carcinoses péritonéales opérées, il s’agissait 56 fois d’une lésion secondaire (4,6 %) et des métastases de cancer du sein étaient retrouvées dans 20 cas, soit 36 %.
Cancer du sein primitif fréquent des métastases ovariennes et péritonéales Les cancers génitaux (endomètre, col, sarcomes gynécologiques, tumeurs trophoblastiques) sont l’origine la plus fréquente des métastases ovariennes. Plusieurs publications basées sur des séries chirurgicales (4-7), des registres des tumeurs (2, 10) ou des séries d’autopsies (1, 4), ont étudié le site primitif des localisations ovariennes secondaires. Le tableau I regroupe les tumeurs extragénitales à l’origine de 1 005 métastases ovariennes retrouvées dans dix études publiées. La répartition selon le cancer primitif est très variable d’une publication à l’autre et doit être interprétée en fonction de l’épidémiologie propre de l’institution d’origine. Globalement, parmi les origines non gynécologiques, le cancer du sein est la cause la plus souvent rencontrée ; il est à l’origine de 26 % des métastases ovariennes.
Ovaires et péritoine, sites métastatiques « ordinaires » du cancer du sein ? Dans une série autopsique (11) de 226 patientes décédées dans un contexte de cancer du sein métastatique, des localisations ovariennes, péritonéales et rétropéritonéales ont été retrouvées dans 26 cas soit 11,5 %. D’un autre point de vue, l’analyse d’une série de 2 605 cas de cancers du sein métastatiques (12) ne retrouve une localisation péritonéale ou digestive que dans 17 cas, soit moins de 1 %. Dans la série de la Mayo Clinic (13), sur 1 201 patientes avec métastases de cancer du sein, 73 (6 %) présentaient des localisations digestives ou une carcinose péritonéale. Malgré cette rareté relative, la grande fréquence du cancer du sein rend cette situation habituelle en pratique clinique quotidienne.
Métastases ovariennes, péritonéales, rétropéritonéales du cancer du sein 241
Type étude Demopoulos 1987 (4)
Nbre Côlon cas Sein rectum
SH
60 32
Gagnon 1989 (5)
SH Autop.
165 64
Petru 1992 (6)
SH
Fujiwara 1995 (1) Ayhan 1995 (7)
Estomac
Pancréas Hém. VB
Appendice grêle Autre
12
6
2
8
82 28
23
22
7
2
Autop.
60 13
4
18
7
18
SH
97 27
18
17
Perucchini 1996 (8)
SH
35
6
6
7
Moore 2004 (10)
Registre
59
5
19
4
Turan 2006 (9)
SH
75
5
21
28
9
2
2
Khunamornpong 2006 (3)
SH
117 11
36
16
4
12
6
13
19
Registre
255 74
69
41
1 005 265
208
159
27
21
43
45
49
Skírnisdóttir 2007 (2) Total
14
Inconnu
10
16
11
4
11 8
SH : série hospitalière ; Autop. : série autopsique ; Hém. : hémopathie maligne ; VB : voies biliaires.
Tableau I – Sites primitifs des métastases ovariennes hors appareil génital.
Cancer lobulaire du sein : essentiellement, mais pas uniquement Les modalités évolutives particulières des cancers canalaires et des cancers lobulaires du sein ont été signalées depuis longtemps (14). Dans la série autopsique de Bumpers (15), le tropisme pour les glandes endocrines y compris les ovaires est retrouvé dans 91 % des cancers lobulaires contre 58 % des cancers canalaires infiltrants. Sur la série hospitalière de Borst (12), le cancer
242
H. Crouet, A. Lesur, C. Blanc-Fournier et al.
lobulaire est retrouvé dans 13 cas contre 3 cancers canalaires infiltrants et une forme mixte. Dans l’étude de McLemore (13), qui concerne aussi bien les métastases au tube digestif que les carcinoses péritonéales, le cancer lobulaire est retrouvé dans 64 % des cas contre 32 % pour le cancer canalaire. Une étude, réalisée à Houston (16) et portant sur 50 399 patientes, a comparé les modalités évolutives des cancers canalaires (45 169 cas) et lobulaires (4 140 cas) ; les métastases aux ovaires, au péritoine et au tube digestif sont beaucoup plus fréquentes dans le cancer lobulaire (6,7 % versus 1,8 %) ; le tableau II reprend la répartition selon les sites métastatiques rencontrés dans cette étude. Globalement, devant des métastases ovariennes, digestives ou des carcinoses péritonéales d’un cancer du sein, il s’agit, environ deux fois sur trois, d’un cancer lobulaire et une fois sur trois d’un cancer canalaire infiltrant.
Cancer lobulaire
Cancer canalaire
4 140
45 169
179
2576
Sites de première récidive
%
%
p
Plèvre, poumon
9,0
17,6
0,0019
Système nerveux central
1,7
5,3
0,032
Ovaires
2,2
0,7
0,0003
Tractus gastro-intestinal
4,5
1,1
0,009
Nombre de cas Métastases
Ganglions
15,5
22,0
0,018
Os
34,6
35,5
NS
Peau
31,8
27,3
NS
Foie
7,3
10,9
NS
Hypophyse
0,5
0,1
NS
NS : non significatif.
Tableau II – Sites métastatiques comparés des cancers lobulaires et canalaires. Emprunté à Arpino et al. (16).
Métastases ovariennes, péritonéales, rétropéritonéales du cancer du sein 243
Présentation clinique Délai de survenue par rapport au cancer primitif du sein Les métastases d’origine digestive (estomac, côlon, rectum) surviennent généralement de façon précoce – 1 à 2 ans – par rapport à la tumeur primitive. Les localisations secondaires du cancer du sein sont vues plus ou moins tôt selon le stade de la maladie primitive. Elles peuvent être précoces dans les stades avancés : 11 à 15 mois (5, 17). Elles se rencontrent en moyenne 7 à 8 ans après le traitement de la tumeur primitive (13, 18). Dans quelques cas (5, 8), les localisations abdominales ont été révélatrices de la tumeur mammaire primitive. À l’opposé, des métastases péritonéales très tardives, jusqu’à 28 ans, ont été rapportées.
Métastases ovariennes pures Elles sont, le plus souvent, des découvertes de hasard, multipliées par les échographies et scanographies réalisées dans les bilans d’extension, dans la surveillance ou dans le cadre de traitements par tamoxifène. Environ 10 % des métastases ovariennes et péritonéales seront ainsi découvertes par examen systématique (19). A contrario, cette pratique des bilans systématiques, pas toujours en conformité avec les recommandations internationales, peut conduire à des gestes chirurgicaux multiples et inutilement agressifs puisque, y compris dans cette population de patientes traitées pour cancer du sein, les anomalies échographiques sont bénignes dans 74 à 88 % des cas (20, 21).
Carcinoses péritonéales et métastases digestives Les métastases peuvent prendre les aspects les plus trompeurs de l’ensemble de la pathologie abdominale. Malgré des antécédents connus de cancer du sein, les diagnostics qui pourront être évoqués vont des cancers de l’ovaire, de l’endomètre ou du rectum à la cholécystite, la défaillance cardiaque et la cirrhose alcoolique (13). Les symptômes les plus habituels sont la distension abdominale par l’ascite, des troubles digestifs, la découverte d’une masse pelvienne ou abdominale (19).
244
H. Crouet, A. Lesur, C. Blanc-Fournier et al.
Carcinose rétropéritonéale Les publications sont, le plus souvent des rapports de cas1. Le cancer lobulaire est pratiquement toujours en cause dans cette situation clinique particulière. Anatomiquement, il s’agit, non pas d’une extension ganglionnaire lombo-aortique mais d’une réelle carcinose des tissus mous rétropéritonéaux avec engainement néoplasique des uretères ; des métastases urétérales authentiques ont également été décrites dans ce contexte. La symptomatologie est celle de toute complication aiguë d’une fibrose rétropéritonéale. Ont ainsi été publiés des crises de coliques néphrétiques, des urinomes par rupture des cavités pyélo-calicielles, des insuffisances rénales progressives imposant parfois des épurations extrarénales, des accidents infectieux aigus sur hydronéphrose.
La question fondamentale : métastase du cancer du sein ou second primitif ovarien ? La difficulté clinique essentielle, devant une patiente antérieurement traitée pour un cancer du sein et qui présente une tumeur ovarienne, une ascite ou un tableau de carcinose péritonéale, est de faire la distinction entre une évolution métastatique abdominale du cancer du sein et la survenue d’un second cancer primitif, en particulier ovarien.
Deux seconds cancers de l’ovaire pour une métastase du cancer du sein Devant une symptomatologie évocatrice, tumeur pelvienne ou carcinose péritonéale, la répartition entre lésion secondaire à la pathologie mammaire et autre cancer primitif, peut être appréciée à partir de l’étude de séries hospitalières, en général chirurgicales, étudiant les résultats histologiques chez des patientes antérieurement traitées pour cancer du sein.
1. Bibliographie complète sur demande à l’auteur.
Métastases ovariennes, péritonéales, rétropéritonéales du cancer du sein 245
Dans l’expérience du Centre François Baclesse, 75 patientes opérées pour tumeur ovarienne ou carcinose péritonéale avaient un antécédent de cancer du sein : il s’agissait 20 fois d’une localisation secondaire au cancer du sein, 54 fois d’un cancer primitif de l’ovaire et une fois d’un cancer de l’endomètre sous tamoxifène avec dissémination péritonéale. Le tableau III regroupe ces données avec celles de quelques séries de la littérature. Seul Quan (17) retrouve plus de métastases que de second primitif mais il s’agissait, dans cette étude, uniquement de cancers du sein au stade IV. Globalement, chez une patiente antérieurement traitée pour cancer du sein, devant une symptomatologie évocatrice d’une tumeur ovarienne ou d’une carcinose péritonéale, il s’agit, environ deux fois sur trois, d’un second cancer primitif ovarien et une fois sur trois d’une métastase du cancer du sein. Publication
Nombre de cas
Primitif ovarien
Métastase cancer du sein
45
28
17
Curtin 1994 (23)
60
44
16
Hann 2000 (21)
14
7
7
Quan 2004 (17)
24*
3
21
Garg 2005 (24)
79
59
20
Simpkins 2005 (20)
16
14
2
Tserkezoglou 2006 (18)
36
27
9
Série personnelle
74
54
20
Total
348
236
112
68 %
32 %
LeThay 1991 (22)
* Cancers du sein stades IV.
Tableau III – Distribution entre métastase du cancer du sein et second cancer ovarien devant une symptomatologie évocatrice, sur des séries chirurgicales.
Rôle de l’imagerie devant une localisation ovarienne Devant une localisation ovarienne, l’imagerie peut orienter. Certains critères échographiques sont plus en faveur d’une lésion secondaire (21, 25, 26) : – une taille plus petite (médiane 60 mm versus 100 mm) mais on peut voir des cancers primitifs de l’ovaire à ovaires de taille normale ;
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– un aspect tissulaire homogène, moins souvent un aspect mixte solide et liquide, plus caractéristique d’une tumeur primitive ; – le caractère bilatéral ou non, l’irrégularité des contours, la présence de végétations endokystiques ne permettent pas d’orienter le diagnostic.
Arguments préopératoires devant une carcinose péritonéale Devant une carcinose péritonéale, il n’y a que peu d’arguments préopératoires. Les arguments cliniques sont seulement ceux du bon sens : meilleur est le pronostic du cancer du sein initial, moins il y a de risque qu’il s’agisse d’une métastase (22, 24). L’existence d’une mutation BRCA oriente vers la survenue d’un second primitif ovarien, bien que, dans les rares études où il est étudié (18), ce facteur ne soit qu’à la limite de la significativité Aucun marqueur tumoral n’a suffisamment de spécificité pour être d’un grand secours (9). CA125 est toujours élevé dans les carcinoses péritonéales quelle qu’en soit l’origine ; il peut être augmenté dans le cancer du sein, métastasé ou non, surtout en cas d’atteinte pleurale. CA153 est élevé dans 60 % des cancers de l’ovaire. L’intérêt du dosage de l’ACE et de TATI est discuté (25).
Diagnostic cytologique et histologique difficile Le diagnostic cytologique et histologique est, lui-même, parfois difficile. – Les difficultés rencontrées par le pathologiste seront d’autant plus grandes qu’il n’aura pas connaissance des antécédents de la patiente ou qu’il s’agira d’une métastase révélatrice, mais c’est précisément dans cette dernière situation que le diagnostic différentiel aura une plus grande importance. – L’analyse cytologique des liquides d’ascite est souvent insuffisante pour distinguer l’origine des adénocarcinomes malgré l’utilisation d’une batterie de marqueurs d’immunoréaction (27). – Le diagnostic histologique de métastase du cancer du sein sera parfois simple. Dans 25 % des cas, toutefois, la métastase mammaire peut présenter des caractéristiques histologiques imitant un cancer primitif de l’ovaire ou même des aspects de lutéome, de dysgerminome, de tumeur de la granulosa ou de carcinoïde (5). L’analyse immunohistochimique sera alors indispensable pour le diagnostic différentiel. Le plus souvent, seront utilisés les
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anticorps dirigés contre les cytokératines (CK7, CK20), le CA125, la vimentine, l’ACE, le GCDFP-15, et les récepteurs aux estrogènes (ER). Malgré l’analyse de ces immunoréactions par méthode semi-quantitatives ou arbres de décision intuitifs, 10 à 20 % des tumeurs ne pourront être classées histologiquement (28). – La difficulté sera plus grande encore de distinguer, devant une tumeur de Krukenberg (métastase ovarienne avec des cellules en bague à chaton), une origine digestive d’une localisation secondaire d’un cancer lobulaire du sein [29).
Métastase ovarienne et/ou péritonéale du cancer du sein : Quelle chirurgie ? Pour quel pronostic ? Exploration chirurgicale Elle pourra rarement être évitée. – Devant une anomalie ovarienne pure, en l’absence de signe de suspicion, après cancer du sein comme en l’absence d’antécédent, l’attentisme et la surveillance doivent être la règle pour éviter d’opérer trop d’anomalies bénignes (21). Ceci est encore plus vrai s’il s’agit de patientes traitées par tamoxifène, ménopausées ou non, chez qui les kystes fonctionnels sont particulièrement fréquents (30). À l’opposé, devant des éléments de suspicion de malignité (taille > 5 cm, augmentation franche du CA125, aspect échographique de kyste multiloculaire et mixte), il n’y a qu’exceptionnellement des arguments significatifs en faveur d’une métastase du cancer du sein (23) et ces patientes devront être adressées en oncogynécologie (20). – L’exploration par cœlioscopie de ces anomalies pelviennes isolées est bien sûr possible (17). Des métastases de cancer de sein sur orifices de trocart ont été toutefois été décrites et les précautions techniques doivent être les mêmes que pour toute cœlioscopie en cas de suspicion de malignité. – Devant un tableau de carcinose péritonéale, le premier diagnostic qui doit être évoqué est celui de cancer primitif ovarien et l’intervention exploratrice ne pourra être récusée qu’exceptionnellement, par exemple lorsque cette localisation survient comme phase terminale d’une dissémination métastatique (24).
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– En cas de carcinose rétropéritonéale, le mode de révélation est le plus souvent aigu. Il est, par ailleurs, relativement rare que les cancers ovariens, tout au moins à leur début, donnent de telles complications urinaires. Dans ces situations particulières, une fois réglé le problème urologique (endo-prothèses urétérales), le traitement médical de la maladie métastatique mammaire pourra être entrepris.
Quelle chirurgie devant une métastase abdomino-pelvienne d’origine mammaire ? Une localisation ovarienne ou pelvienne, seul site métastatique, pourra être traitée par annexectomie bilatérale avec ou sans hystérectomie (19), complétée par une exploration abdominale complète. Devant une carcinose péritonéale, une chirurgie élargie, correspondant à la check-list des cancers de l’ovaire est recommandée (19) : hystérectomie avec les annexes, omentectomie, curage ganglionnaire para-aortique et pelvien. L’intérêt d’une réduction tumorale optimale est souligné par plusieurs auteurs, avec un seuil de maladie résiduelle de 1 à 2 cm (18, 19, 24, 31).
La maladie résiduelle après chirurgie : facteur pronostique ? Tous les auteurs s’accordent pour considérer que le pronostic des localisations ovariennes ou péritonéales secondaires est défavorable, à extension égale, par rapport à une lésion ovarienne ou péritonéale primitive (18, 19, 22, 24). La médiane de survie des métastases ovariennes et péritonéales est, selon les études de 6,4 mois (24) à 23 mois (31), mais des survies prolongées, jusqu’à plus de 12 ans, ont été rapportées, en particulier en cas de maladie métastatique à récepteurs hormonaux positifs. De même, une extension abdominale étendue ou des sites métastatiques abdomino-pelviens multiples sont des facteurs de mauvais pronostic par rapport à une atteinte ovarienne ou pelvienne isolée : survie à 5 ans 6 % versus 22 % pour Petru (6). Comme pour toute maladie métastatique, un long délai de survenue par rapport à la tumeur primitive est un facteur pronostique favorable. Dans l’étude de Eitan (31), la médiane de survie est de 36 mois pour les patientes ayant un délai de 5 ans ou plus versus 17 mois pour celles diagnostiquées plus tôt.
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La chirurgie de cytoréduction, sur le modèle du cancer ovarien, est moins souvent possible en cas de carcinose péritonéale métastatique (18). Lorsqu’elle est réalisée, elle semble influencer favorablement la survie ; dans l’étude de Ayhan (19), tout primitif confondu, la survie médiane est de 48 mois en cas de réduction optimale contre 26 mois en cas de chirurgie non optimale (p = 0,0039) et la survie à 5 ans de 44 % et 23 % respectivement. Dans l’étude du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (31), qui ne concerne que le cancer du sein, la médiane de survie est de 36 mois en cas de chirurgie optimale versus 20 mois dans le cas contraire ; en analyse multivariée, les deux seules variables significatives sont le délai par rapport à la maladie initiale et la réduction chirurgicale optimale (RR de décès en cas de chirurgie non optimale 2,14 ; IC95 1,13-4,02 ; p = 0,02).
Conclusion Les métastases ovariennes ou péritonéales du cancer du sein ne sont pas exceptionnelles et peuvent se voir à tout moment de la maladie y compris comme premier site métastatique. Le cancer lobulaire du sein en est l’origine la plus fréquente mais un type histologique différent de la maladie initiale n’est jamais suffisant pour récuser le diagnostic de métastase. La difficulté diagnostique sera toujours de les distinguer d’un second cancer primitif ovarien avec ou sans dissémination péritonéale, dont le risque de survenue est augmenté chez les patientes traitées pour cancer du sein, qu’il y ait ou non une mutation de BRCA. L’évolution du cancer du sein métastatique vers les ovaires, le pelvis ou l’abdomen, ne semble pas influer sur la survie par rapport à un autre site métastatique. Le pronostic est surtout altéré lorsque l’extension abdominopelvienne survient de façon précoce par rapport à la maladie initiale et que l’atteinte abdominale est importante. La résection chirurgicale optimale de la maladie métastatique, sur le modèle de la chirurgie du cancer de l’ovaire, semble influencer favorablement la survie, quels que soient les traitements médicaux complémentaires.
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Métastases ovariennes, péritonéales, rétropéritonéales du cancer du sein 251
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Hubert Crouet
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Abstract n° 13
Altérations de l’expression, et implications pronostique et thérapeutique, des protéines régulatrices de l’épissage des ARNm dans les cancers du sein M. Lacroix-Triki, J.F. Dupuy, F. Dalenc, S. Dejean, P. Besse, H. Roché et S. Vagner
Mots clés : cancer du sein, métastase, facteur pronostique, épissage, cible thérapeutique
Résumé Les protéines SR (« arginine-Serine-Rich splicing regulator ») et hnRNP (« heterogeneous nuclear ribonucleoprotein ») sont des protéines de liaison aux ARNm qui régulent plusieurs aspects du métabolisme des ARNm associé à l’expression des gènes. La plupart de ces protéines agissent à différents niveaux, allant des étapes nucléaires d’épissage des pré-ARNm jusqu’à l’étape de traduction des ARNm dans le cytoplasme (1, 5, 6). Plusieurs études ont notamment prouvé l’existence d’un lien entre cancer et épissage alternatif d’oncogènes et/ou suppresseurs de tumeurs (2-4, 7-9). Dans ce contexte, nous avons étudié le profil d’expression de ces protéines dans les cancers du sein. Notre étude a porté sur 277 patientes présentant un carcinome infiltrant du sein et traitées à l’ICR entre 1996 et 1998. L’étude immunohistochimique a été réalisée sur tissus fixés et inclus en paraffine, en utilisant la technologie des tissue micro-array. Cinq protéines ont été étudiées : quatre de la famille
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M. Lacroix-Triki, J.F. Dupuy, F. Dalenc et al.
des protéines SR (9G8, SC35, SRp20, ASF/SF2) et une protéine hnRNP (hnRNP A1). Les résultats ont été interprétés en utilisant un score combinant le pourcentage de cellules marquées et l’intensité du marquage. Les données cliniques, histopathologiques et évolutives ont été recueillies pour chaque cas. L’analyse statistique a porté sur des études de corrélation, de survie globale et de survie sans rechute (courbes de Kaplan-Meier) (10), en distinguant la récidive métastatique ou locorégionale. La population étudiée présentait les caractéristiques suivantes : – âge médian de 54 ans (de 29 à 87 ans) ; – taille médiane des tumeurs de 18 mm (de 4 à 120 mm) ; – type histologique : canalaire infiltrant 77,3 %, lobulaire infiltrant 17 %, autre 5,7 % ; – grade histopronostique : I 12,3 %, II 39 %, III 45,8 % ; – envahissement ganglionnaire axillaire : absent 56,7 % (n = 157), présent 43,3 % (n = 120) ; – expression des récepteurs hormonaux : RE + 65 %, RP + 58,4 % ; – surexpression de HER2 12 %. Toutes les patientes avec envahissement ganglionnaire avaient reçu le même traitement chimiothérapique. La médiane de suivi était de 9,1 ans (de 0,5 mois à 12,9 ans). L’analyse des corrélations linéaires pour nos cinq protéines d’intérêt montrait une corrélation très significative de l’expression de certaines protéines entre elles, telles que SC35 et 9G8 (corrélation de 0,5950 avec p < 0,0001). L’expression de la protéine SRp20 était corrélée à l’expression des récepteurs hormonaux (RE p < 0,0001, RP p = 0,08) et de HER2 (p = 0,008). L’expression de 9G8, hnRNP A1 et SRp20 était significativement corrélée à l’envahissement ganglionnaire (p = 0,009, p < 0,001 et p < 0,001 respectivement). En termes de survie, deux des cinq protéines étudiées, hnRNP A1 et SC35, donnaient des résultats statistiquement significatifs. Pour l’ensemble de la population étudiée, un niveau d’expression élevé de hnRNP A1 était associé à un pronostic défavorable en termes de survie sans rechute (p = 0,05), de survie sans rechute métastatique (p = 0,03), et de survie globale (p = 0,02). De même, un faible niveau d’expression de SC35 était associé à un pronostic défavorable pour la survie sans rechute dans la population globale (p = 0,04), mais aussi dans le sous-groupe des patientes sans envahissement ganglionnaire (N-) (p = 0,04). L’association des deux facteurs (forte expression de hnRNP A1 et faible expression de SC35) était particulièrement associée à un profil évolutif défavorable pour la survie sans rechute (p = 0,01 sur la population globale, p = 0,006 pour la population N-).
Altérations de l’expression, et implications pronostique et thérapeutique… 255
Ainsi, notre étude montre une relation significative entre le profil d’expression de protéines clés du métabolisme des ARNm et le potentiel évolutif des cancers du sein. Outre un éventuel apport pronostique, la possibilité de nouvelles approches thérapeutiques justifie la poursuite des études dans ce domaine. De par la diversité du répertoire protéique ainsi généré, l’étude des modifications de l’expression post-transcriptionnelle des gènes dans les cancers, au niveau de l’épissage mais aussi de la traduction, reste plus que jamais un enjeu majeur.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Magali Lacroix-Triki
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
X
Irradiation des métastases cérébrales des tumeurs du sein E. Lartigau et Y. Belkacémi
L’incidence des métastases cérébrales va varier selon la tumeur primitive en cause (10 à 30 %) des cas. La mise en œuvre de prises en charge de plus en plus efficaces (sein, côlon…) pour la maladie métastatique viscérale entraîne une augmentation significative de la survie de ces patients. Néanmoins, l’absence de protection du « sanctuaire cérébral » par la majorité des thérapies ciblées ou des chimiothérapies conventionnelles entraîne une augmentation paradoxale de l’incidence des métastases cérébrales. Ainsi, une population de plus en plus significative de femmes porteuses de cancers du sein localement évolué va rechuter ou évoluer en intracérébral, alors que leur maladie métastatique semble par ailleurs contrôlée. Cette constatation semble particulièrement vraie pour les patientes exprimant HER2 (1, 2). L’apparition de ces localisations est souvent considérée comme la phase terminale de l’évolution tumorale avec une très médiocre survie. Néanmoins, une prise en en charge associant chirurgie et/ou radiothérapie peut entraîner pour les lésions de diagnostic précoce (moins de trois localisations) et de taille modérée (< 3 cm de diamètre) des survies de très bonne qualité (3-6). Nous envisagerons donc de décrire cette population et de définir les potentielles stratégies préventives et curatives de prise en charge.
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E. Lartigau et Y. Belkacémi
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Éric Lartigau
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X
Contrôle local des métastases vertébrales A. Gangi et X. Buy
Introduction Les gestes de radiologie interventionnelle ont fait des progrès très importants au cours des dix dernières années, en particulier dans le domaine de l’oncologie. Les cancers du sein sont souvent accompagnés de localisations secondaires osseuses, en particulier vertébrales, souvent très invalidantes et douloureuses, qui peuvent se compliquer de tassements avec des compressions médullaires. Les gestes décrits ci-dessous vont couvrir les possibilités de l’imagerie interventionnelle dans ce domaine. Ces gestes sont effectivement dans la majorité des cas réalisés dans un but palliatif, mais de multiples techniques sont aussi appliquées pour traiter des lésions de manière curative. Les gestes décrits sont : la vertébroplastie percutanée, l’ablation des tumeurs par radiofréquence ou par cryothérapie, la décompression tumorale par ionisation et l’association des différentes techniques.
Vertébroplastie percutanée L’injection de ciment acrylique par voie percutanée est une technique qui date du milieu des années 1980. Le but de ce geste est double, avec une consolidation vertébrale et un traitement antalgique. C’est pour cela que son indication dans les métastases vertébrales douloureuses prend tout son sens.
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A. Gangi et X. Buy
En effet, les lésions lytiques du corps vertébral, sans signe de compression médullaire ni d’envahissement canalaire, pourront être traitées par l’injection de ciment acrylique sous le contrôle précis de l’imagerie, permettant ainsi de consolider la vertèbre, évitant un tassement secondaire ou stoppant ce tassement, permettant d’obtenir aussi un effet antalgique majeur et durable. L’effet antitumoral du ciment est très limité. En effet, il existe une petite destruction tumorale en périphérie du ciment, qui reste extrêmement faible. Si un effet antitumoral est recherché, une technique d’ablation devrait être associée à la cimentoplastie telle que la radiofréquence ou la cryothérapie. L’injection de ciment acrylique est contre-indiquée en cas de compression médullaire ou de présence de symptomatologie de compression radiculaire. Dans ces cas, une décompression chirurgicale est nécessaire. Si la chirurgie est rejetée, les techniques de décompression tumorale pourront intervenir (cf. infra la décompression tumorale). L’injection de ciment acrylique est réalisée sous contrôle d’une imagerie en temps réel (scopie télévisée). La mise en place des instruments nécessite un opérateur entraîné et aguerri. Les complications peuvent être majeures si la technique n’est pas irréprochable. Les compressions médullaires sont rares, les fuites foraminales avec des radiculalgies peuvent survenir en cas de fuite de ciment au niveau des foramens. Les fuites veineuses peuvent aussi survenir avec, dans les cas les plus graves, une embolie pulmonaire. L’autre rare complication est l’infection, ce qui explique l’obligation d’un respect de stérilité absolue. Un respect des indications et une technique parfaite avec une imagerie de haute résolution permettent d’éviter une majorité de complications.
Ablation tumorale par radiofréquence et cryothérapie L’ablation par radiofréquence utilise les ondes de radiofréquence pour une destruction tissulaire par la chaleur. La plupart des cellules ne résistent pas à une température au-dessus de 55 °C de manière durable. Au-dessus de 95 à 100 °C, il existe une vaporisation des tissus. C’est pour cela que la température idéale se situe entre 60 et 90 °C.
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De multiples machines de radiofréquence existent sur le marché avec des électrodes de différentes formes, toutes recherchant à augmenter la taille et le volume de l’ablation. La cryothérapie est une technique d’ablation par congélation tissulaire qui utilise des sondes fonctionnant avec le gaz Argon. Ces sondes peuvent atteindre des températures de – 180 °C à leur extrémité. Selon le type cellulaire, l’ablation a besoin de – 40 à – 20 °C. L’intérêt de cette technique, par rapport à la radiofréquence, est la possibilité de mise en place de multiples sondes en parallèle, fonctionnant simultanément, permettant ainsi des volumes assez importants. L’autre avantage majeur de cette technique, par rapport à la radiofréquence, est la visibilité de la zone d’ablation qui apparaît en tomodensitométrie sous forme d’une zone hypodense avec des contours assez nets. Le dernier avantage de cette technique reste le caractère moins algique par rapport à la radiofréquence. En effet, les ablations par radiofréquence nécessitent une sédation profonde ou plutôt une anesthésie générale, tandis qu’une simple sédation suffit dans la plupart des traitements par cryothérapie. Les inconvénients de la cryothérapie par rapport à la radiofréquence sont : l’encombrement en salle à cause de la présence des bouteilles de gaz, ainsi que le prix du consommable, en particulier en cas d’utilisation de multiples sondes en même temps. Dans le cadre des tumeurs vertébrales, les techniques d’ablation sont surtout utilisées dans le cas où une action antitumorale est recherchée, telle que pour les cancers avec un nombre limité de métastases ayant une évolution bien contrôlée par les autres thérapeutiques. En effet, quand un patient répond bien au traitement et qu’il ne persiste que quelques lésions métastatiques, (en dessous de 5 [d’où l’intérêt du PET SCAN]), une ablation pourra être pratiquée pour détruire les localisations secondaires et donner de meilleures chances d’évolution aux patients. L’ablation d’une tumeur vertébrale par radiofréquence ou par cryothérapie nécessite une consolidation par vertébroplastie au cours d’une même séance. En effet, l’ablation fragilisant encore plus la structure osseuse, une consolidation est nécessaire pour éviter un tassement secondaire. L’autre indication des techniques d’ablation dans les lésions vertébrales est le traitement palliatif des métastases. La vertébroplastie traite de manière très efficace les algies vertébrales métastatiques. Pour les métastases avec un envahissement des tissus avoisinants et des extensions paravertébrales importantes, l’ablation pourra détruire la tumeur
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A. Gangi et X. Buy
avec son extension paravertébrale, tandis que la vertébroplastie consolidera le corps vertébral et traitera la douleur d’origine vertébrale. L’association des deux techniques prend toute son importance pour les lésions étendues et le traitement palliatif des tumeurs larges. Dans le cas des tumeurs limitées au corps vertébral, le traitement palliatif pourra se contenter de la vertébroplastie simple. Ces techniques d’ablation sont limitées dans les cas où la tumeur vient au contact des structures nerveuses ou des organes à voisinage sensible avec risque d’atteinte de ces organes. Dans certains cas, la technique ne pourra pas être appliquée, dans d’autres des précautions devront être prises, telles que l’insertion de ballons entre les tissus à protéger et la zone d’ablation ou l’injection de gaz carbonique pour faire une interface entre les différentes structures à protéger. L’utilisation des thermo-couples avec mesure de température en continu vient renforcer et sécuriser le geste.
Décompression tumorale par ionisation Cette technique a vu le jour il y a environ 4 ans et utilise les ondes de radiofréquence grâce à des électrodes bipolaires produisant un plasma d’ionisation en bout de l’électrode. Cette ionisation nécessite la présence de sodium, ce qui explique l’injection en continu en contact de la sonde du sérum physiologique apportant du sodium. Cette électrode de décompression a une température maximale de 70 °C et les tissus avoisinants sont à peine chauffés. En revanche, tout tissu en contact avec ce plasma d’ionisation qui se situe au bout de l’électrode est immédiatement détruit avec une rupture des liaisons moléculaires et une cavitation immédiate. Cette cavitation à faible température a un intérêt majeur, en particulier pour les tissus ne supportant pas les températures élevées. Nous utilisons la technique de décompression dans les cas où une baisse de pression est nécessaire telle que les compressions radiculaires ou médullaires avec contre-indication chirurgicale ou un stade III trop avancé pour la chirurgie. Cette cavitation est en cours d’évaluation dans ces cas, mais semble être très prometteuse dans les cas limites et très avancés chez les patients souffrant de compression tumorale douloureuse.
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Déclaration de conflits d’intérêts Auteur
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation Afsin Gangi X
Abstract n° 29
La chimiothérapie orale, le point de vue de l’INCa R. Bugat
L’hormonothérapie des cancers a, de longue date, et depuis ses débuts, concilié efficacité et prescription orale. S’agissant des médicaments cytotoxiques, l’utilisation de cette voie d’administration a transitoirement été rendue plus délicate, essentiellement pour des raisons d’ordre pharmacologique et galénique, centrées autour de la biodisponibilité. Aujourd’hui, plusieurs médicaments anticancéreux majeurs, principalement de la classe pharmacologique des antimétabolites et des poisons du fuseau, sont commercialisés par voie orale. Ils sont efficaces dans le traitement du cancer du sein. Rien ne s’oppose au développement clinique de leur association, dans le cadre de protocoles de bithérapie orale et leur prescription, croissante, progresse dans la pratique, simultanément à la mise à disposition de nouveaux médicaments, les inhibiteurs de phosphorylation des voies de signalisation intracellulaire, eux aussi actifs par voie orale. Le développement de la chimiothérapie anticancéreuse par voie orale est facilitée par un certain nombre de dispositions réglementaires (notamment la levée de la réserve hospitalière) et par des recommandations institutionnelles qui attribuent à ce mode de prescription un effet favorable sur le contrôle médicalisé des dépenses de santé. Pour autant, des propositions demandent à être formulées pour accompagner et optimiser la pratique de la chimiothérapie per os. Parmi elles, peuvent être citées : – l’éducation thérapeutique : peu développée en cancérologie, elle doit être encouragée car elle peut notamment améliorer l’observance ;
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R. Bugat
– les prescriptions doivent s’accompagner de garanties pour gérer par anticipation la prise en charge d’éventuelles manifestations iatrogènes, non différentes de celles occasionnées par les chimiothérapies administrées par voie parentérale. L’amélioration des relations opérationnelles entre la ville et l’hôpital doit être soutenue. À ce titre, la formation des acteurs de santé qui travaillent à proximité des malades non sédentarisés constitue dans la pratique un levier du changement ; – la cotation des actes demanderait à être repensée pour prendre en compte la prescription et son suivi.
Déclarations de conflits d’intérêts Auteur
R. Bugat
Aucune Participation Contrat consultant, Activité donnant Autres liens Sans réponse situation financière interventions lieu à versement Sans d’intérêt dans le capital ponctuelles, au budget rémunération particulière d’une entreprise expertises, d’une structure conférences, formation X